4ème forum sur la Vie associative

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4ème forum sur la Vie associative
 4ème Forum Départemental sur la Vie Associative « Vers un nouveau modèle associatif » Vendredi 22 février 2013 Ouverture Jean PETAUX Bien Mesdames, Messieurs, bonjour. Nous allons, sans plus attendre, comme on dit, pour ne pas perdre de temps, sachant que ce forum, ce quatrième forum des associations organisé par le Conseil Général de la Gironde est aussi retransmis, je crois, sur grand écran dans le hall de ce bâtiment en Gironde, tellement il y a de monde, sans plus attendre donc, la parole au président, Cher Philippe MADRELLE, président du Conseil Général de la Gironde. Philippe MADRELLE Président du Conseil Général de la Gironde Merci. Mesdames et Messieurs, je suis tout d'abord très heureux de vous souhaiter au nom du Conseil Général la plus cordiale bienvenue dans cet amphithéâtre Robert Badinter Je salue avec beaucoup de plaisir Isabelle DEXPERT qui est vice‐présidente chargée de la culture, des sports et de la vie associative ; le président de la commission de la vie associative du Conseil Général, Cher Matthieu ROUVEYRE. Je salue Mesdames et Messieurs les professeurs, en particulier je voudrais saluer Monsieur Emmanuel BAYLE et Jean LAVILLE. Et je voudrais remercier aussi Jean PETAUX que nous connaissons bien, qui est professeur à l’Institut d’Études Politiques, politologue et qui nous fait le plaisir et l’honneur d’animer nos débats durant ce temps de rencontres, comme il le fait d’ailleurs aussi très souvent. Je voudrais saluer naturellement Mesdames et Messieurs les Présidents venant des associations girondines qui sont vraiment ici très nombreux. Je voudrais saluer vraiment à travers vous ce bénévolat, cet extraordinaire dévouement dans la cité. Saluer également Monsieur le Président du CDOS, notre ami Patrick HUDE qui représente beaucoup d’associations, mais elles sont très nombreuses. Vous êtes très nombreux, je crois qu’on bat le record aujourd'hui, ça me fait beaucoup de plaisir. Mesdames et Messieurs, mes chers amis, je voudrais, sans attendre, vous remercier, encore une fois, d’avoir répondu à notre invitation et d’avoir tenu à participer à ce quatrième forum départemental sur la vie associative. Mes collègues et moi‐même, Isabelle DEXPERT tout à Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 1 / 66
4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » l'heure aura l’occasion de le dire, nous sommes très heureux de vous accueillir pour ce nouveau temps d’échanges. Cette rencontre naturellement se déroule dans un contexte économique et social, vous le connaissez aussi bien que moi, une crise économique et sociale. En réalité, ce n’est même pas une crise parce qu’une crise, ça s’arrête. Là, on est vraiment dans un changement de monde, on est dans un monde nouveau. Et à notre échelle naturellement du département, de lourdes contraintes budgétaires nous conduisent à concentrer l’essentiel de nos efforts sur nos compétences régaliennes, et le cœur de nos politiques naturellement sur la solidarité qui est notre mission historique, cette solidarité qui a infiniment besoin de la puissance publique. La précarité, la paupérisation grandissante qui touche nos territoires urbains comme ruraux, il n'y a pas de différence. La hausse accélérée du nombre d’allocataires, je le vois, du RSA pour la première fois des viticulteurs qui sont aussi inscrits au RSA. Les gens ne le savent pas, ils pensent que c'est extraordinaire. Non, malheureusement, l’immense majorité aussi de nos viticulteurs sont touchés. Nous avons aussi naturellement le poids des allocations individuelles nationales de solidarité qui ont été transférées. Tout ça entraîne naturellement des choix extrêmement difficiles. Préparer un tel budget relève de plus en plus de la quadrature du cercle et, que je sache, il n’y a encore aucun mathématicien qui a résolu le problème. D’autant que nous ne levons pratiquement plus l’impôt, puisque la réforme du précédent gouvernement nous a retiré la part de la taxe professionnelle, la part de la taxe d’habitation, le foncier non bâti, simplement nous sommes sur le foncier bâti, c'est‐à‐dire qu’il ne faut pas y toucher compte tenu maintenant, n’est‐ce pas, du poids des impôts qui est devenu prohibitif, vraiment pour l’immense majorité de nos concitoyennes et nos concitoyens. Donc, compte tenu aussi de la situation nationale, les dotations de l’Etat ne sont pas prêtes d’être revues en notre faveur parce qu’il est bien certain… C'est vrai qu’il y a des démagogues qui pensent qu’il y a un changement de Président de la République, il y a un changement de Gouvernement et tout ça va changer. Non malheureusement. Il n'y a pas de thaumaturge, il n'y a pas de faiseur de miracle, il n'y a pas de baguette magique. On a ce poids terrible de la dette publique qui a été multipliée par deux au cours des dix dernières années et qui a augmenté de 600 milliards d’euros au cours des cinq dernières années. Et ceux qui disent : « Mais non, on ne s’en occupe pas de ça », mais c'est criminel. Si on ne s’occupe pas de ça, on est au fond du trou. On est un pays, n’est‐
ce pas, qui tombe au fond du trou, donc il faut résister et la croissance ne se décrète pas malheureusement. Donc, on est dans un contexte difficile. Pour autant, le Conseil Général, on n’a jamais baissé les bras, moi je n’aime pas les pessimistes ni les pétainistes d’ailleurs (rires). Je dis ça parce que tout à l'heure, on m’a parlé du Conseil Départemental qui, vous savez, le Conseil Général s’appelle maintenant Conseil Départemental, et pourquoi on n’avait pas appelé le Conseil Général plus tôt Conseil Départemental ? Parce que c’était une réminiscence de Vichy. Vichy, vous savez, avait supprimé les Conseils Généraux et avait appelé, donné cette connotation alors qu’ils n’existaient pas. Comme je viens de faire une interview là‐dessus… Je veux dire par conséquent que nous n’avons pas effectivement de baguette magique, mais nous voulons continuer. Je disais que je n’aime pas les pessimistes parce que le pessimiste, il se contente et se condamne être spectateur au moment où nous, nous avons besoin d’acteurs et non pas de spectateurs. Et puis, il y en a aussi qui pensent que c'est en tapant du pied qu’on fait jaillir des sources miraculeuses. Non, voilà. Pour autant, malgré tout ça, on continue à sortir de nos compétences régaliennes. Nous essayons autant que possible, mais naturellement tout cela est perfectible, à soutenir le mouvement associatif, les associations, qu’elles soient culturelles, sportives, de loisirs ou d’essence Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 2 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » sociale. Le forum sur la vie associative s’inscrit dans ce contexte de monde nouveau, je le disais tout à l'heure, en poursuivant quatre objectifs principaux. 
Il s’agit tout d’abord d’exprimer notre reconnaissance, chers collègues, du fait associatif, du rôle fondamental que jouent les associations, en particulier en termes de lien social au service de l’ensemble de nos concitoyens. 
Deuxièmement, nous avons plus que jamais, à travers ce forum, l’objectif de proposer un espace de réflexion avec les acteurs associatifs sur des thèmes précis, transversaux, et en dehors des liens que nous entretenons tout au long de l’année. 
Troisièmement, il s’agit d’améliorer la connaissance des problématiques associatives et de leurs évolutions. Enfin quatrième objectif, nous devons favoriser les rencontres interassociatives. Les thématiques des trois premiers forums reflètent bien l’intérêt du département vis‐à‐vis du monde associatif, et notre souci de prise en compte de ces préoccupations. Qu’il s’agisse des enjeux de demain, de l’engagement bénévole ou de l’évocation de la crise, ces thèmes ont contribué au succès croissant de ces rencontres en nombre de participants – on le voit aujourd'hui ‐ mais aussi en nombre d’associations présentes. Nous avons eu le bonheur d’accueillir des intervenants de notoriété nationale et internationale, chercheurs, professeurs d’université, sociologues, politologues, avocats, philosophes et écrivains. Je pense à Viviane TCHERNONOG du centre d’économie de la Sorbonne, à Édith ARCHAMBAULT de l’université de Paris I, à Jean‐Pierre WORMS, vice‐président de la FONDA ou encore Henri PENA‐RUIZ philosophe écrivain et à Roger SUE, sociologue et chercheur au CNRS. Ces personnalités ont largement contribué à la réussite de nos temps de rencontre. Ce forum 2013, chers amis, est donc intitulé « Vers un nouveau modèle associatif ». Et il évoquera les changements indispensables à la reconnaissance du monde associatif, ainsi que le rôle incontournable que les associations tiennent aujourd'hui dans notre société tout en mesurant la responsabilité qu’elles peuvent aussi porter. Je voudrais maintenant saluer nos deux intervenants qui nous font l’honneur d’être parmi nous en les remerciant par leur présence, de donner toute son ampleur à la thématique cette année. Je salue ainsi : 
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Monsieur Jean‐Louis LAVILLE, professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers, mais aussi chercheur et auteur de nombreux ouvrages sur le monde associatif. Son intervention portera sur ce vaste et passionnant sujet « Vers un nouvel âge de l’association ». 
Monsieur Emmanuel BAYLE, professeur des universités à Lyon III Jean Moulin, professeur également à l’université de Lausanne et qui interviendra sur la responsabilité sociétale des organisations et plus particulièrement sur cette question « Quel changement pour le management des associations ? ». Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 3 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Je vous remercie vraiment tous les deux d’être parmi nous aujourd'hui. Mes remerciements, je l’ai fait également tout à l'heure, s’adressent également à Jean PETAUX, politologue et professeur à Sciences Po Bordeaux qui anime ce forum. Et je voudrais lui témoigner une nouvelle fois ma reconnaissance et mon amitié. La présence des associations lors des trois premières éditions du forum, les retours s’évaluation auxquels nous avons procédés ont largement démontré l’adhésion des participants à nos différents objectifs. Aussi, une réflexion élargie a été conduite grâce à une mobilisation plus grande des différentes directions du Conseil Général en charge du soutien aux associations. Elle l’a été aussi par une consultation des représentants associatifs girondins via un comité associatif consultatif animé par les élus porteurs de la politique associative de notre assemblée départementale. En outre, un effort important a été consenti cette année pour faciliter les échanges avec les représentants associatifs invités au forum grâce à l’utilisation de toutes les technologies de l’information à notre disposition, qu’il s’agisse des inscriptions en ligne, des questions posées par Internet et via les réseaux sociaux, ou encore par le biais d’un vidéo reportage. Hormis notre appui financier qui n’est pas neutre puisqu’en Gironde, près de 2 000 associations de toute nature se voient aidées à hauteur de plus de 30 millions d’euros, ce forum s’inscrit dans une démarche plus ample du Conseil Général pour accompagner les associations grâce au centre de ressources départementales pour la vie associative créé au sein de la Maison départementale des sports et de la vie associative que le Département, que le Conseil Général vous a léguée. Y sont menées des actions de formation territorialisées pour les bénévoles et sont donnés des conseils en ingénierie par les conseillers départementaux sport et vie associative présents sur toute la Gironde au plus près des citoyens. Voilà, je vais conclure en soulignant une nouvelle fois l’engagement de qualité à vos côtés de mes co‐équipiers, Isabelle DEXPERT, Matthieu ROUVEYRE et Serge LAPORTE qui est président de la commission des sports, ainsi que de tous mes collègues. Vous avez, vous le savez, toute ma confiance. Elle est la clé d’un partenariat réussi et de tout ce que nous avons à construire ensemble. Voilà pourquoi je souhaite à ce quatrième forum de la vie associative un beau succès, riche en débat et en perspective qui est toujours placé sur ce trésor de la République qui s’appelle la « laïcité ». Merci de votre attention. Jean PETAUX La parole est à Madame Isabelle DEXPERT, vice‐présidente du Conseil Général, en charge de la culture, des sports et de la vie associative. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 4 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Isabelle DEXPERT Vice‐présidente du Conseil Général, en charge de la culture, des sports et de la vie associative Merci Jean. Je voulais bien sûr saluer notre président Philippe MADRELLE, merci Philippe d’être à nos côtés pour cette ouverture de ce quatrième forum. On sait que ton emploi du temps est souvent contraint et je sais que tu vas devoir nous quitter pour aller sur d’autres directions, notamment Langon, puisque ta soirée est orientée sur Langon. Donc merci en tout cas d’avoir pris le temps d’être avec nos côtés avec Matthieu ROUVEYRE, Président de la commission vie associative, mais également Serge LAPORTE qui est là, qui est dans notre vice‐présidence le président de la commission sport. Je te demande de bien vouloir excuser Max JEAN‐JEAN qui est notre président de la commission culture et qui a dû subir une petite intervention chirurgicale, mais qui se remet pour être encore plus fringuant à nos côtés pour le reste de l’année qui vient et nous avons du travail. Je voulais bien sûr saluer très chaleureusement mes collègues qui nous ont rejoints, Édith MONCOUCUT qui est la vice‐présidente en charge de la solidarité, élue sur Pessac. Merci Édith, je sais que tu as toujours à cœur de participer à ces mouvements de la vie associative, à ces moments de partage, et nous en partageons notamment sur la culture mais aussi le handicap. Donc merci d’être à nos côtés. Jacques RESPAUD qui est l’élu en charge des ressources humaines. Je voulais avoir un clin d’œil tout particulier à notre Directeur Général des Services, si tu me le permets, Président, parce qu’il peut voir là que nous avons une belle assistance et que les politiques que nous portons avec le soutien de toutes ses équipes techniques, voilà tout son sens. Donc merci Monsieur le Directeur de faire que nos équipes au Conseil Général puissent comme ça nous accompagner sur des moments aussi chaleureux. Je voulais, moi aussi, saluer nos deux intervenants, merci Messieurs d’être à nos côtés cette année. Nous attendons beaucoup de vous, nous savons avoir là sûrement les interlocuteurs qu’il nous faut. Saluer bien sûr les présidentes, présidents, membres des associations parce qu’on est là sur une parité quasi vérifiée, beaucoup de femmes dans le milieu associatif, beaucoup d’hommes aussi. Ça veut donc bien dire que c'est ensemble qu’on peut faire les choses. Saluer Jean PETAUX qui sera le maître du temps, je le sais, c'est pour ça que je vais faire très vite ; et saluer l’ensemble de mes collègues élus qui seraient là. Avoir une pensée pour mon professeur d’histoire/géographie qui est là, chaque année, à ce forum de la vie associative et qui est quelqu’un de très très engagé dans la vie associative sur le langonnais et qui, aujourd’hui, est malade et est en phase de traitement très lourd, et qui ce matin a pris la peine de me téléphoner pour me demander de bien vouloir excuser son absence aujourd’hui parce que ça avait du sens pour lui d’être à nos côtés, ça fait trois ans qu’il est là, et il était désolé de ne pouvoir être là. Chaque fois, il me disait, il m’expliquait que c’était important d’avoir comme ça une vraie reconnaissance du monde associatif du bénévolat, des gens qui souvent ne sont pas forcément vus et reconnus, mais qui pourtant Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 5 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » font autant de choses. Donc, je voulais juste penser à lui aujourd'hui et lui dire : « Louis, on pense à vous ». L’engagement des bénévoles, le président en a parlé. Une société sans bénévolat, sans association, ne serait pas grand‐chose sans compter que souvent les collectivités ont eu à cœur de développer des services justement en partenariat avec les associations et que même quelquefois ça a été plus loin, des associations ont pu être créées pour justement venir là compléter l’action publique. Le président le disait également et pour faire très rapidement, vous avez aujourd'hui un forum où vous êtes très nombreux et je crois que ça n’est pas pour rien. Ça veut dire qu’on a tenu compte de vos attentes sur les années précédentes et que les questionnaires que vous avez remplis nous ont aidé à imaginer ce nouveau forum. Donc veuillez ne pas oublier de remplir le nouveau questionnaire que vous avez pour une année encore meilleure en 2014 en termes de participation, mais après je ne vois pas où on va vous mettre, mais ça ne fait rien, venez toujours aussi nombreux ! Bien sûr, nous avons essayé de nous ouvrir très largement sur le choix des thématiques et des invitations et nous avons donc là souhaité nous appuyer sur des compétences, des personnes qui avaient cette expertise et c’est comme ça que nous avons travaillé tout particulièrement avec la CEPAD qui est venue sur un comité de pilotage d’organisation de ce forum. La CEPAD bien entendu mais aussi l’union des associations musicales de la Gironde et l’association PROMOFAM à Saint Michel, parce qu’on voulait effectivement avoir là un large panel du monde associatif. Il y a l’action sociale, il y a le sport, il y a les arts, il y a plein de choses à porter, et on voit bien que le champ associatif est très très diversifié, très varié et toujours très riche. Un contexte un peu compliqué, le président l’a dit, et je ne voudrais pas m’appesantir dessus pour autant, vous êtes là aussi parce que nous sommes des partenaires. Des partenaires par convention pour beaucoup où chacune et chacun des deux parties ont des engagements, les respectent, vont souvent bien au‐delà des termes de cette convention. Et c’est vrai que le contexte budgétaire que nous connaissons et qui vous sera présenté en fin d’après‐midi, on n’a pas voulu vous assommer après le repas avec les chiffres, donc on a gardé le meilleur pour la fin à savoir donc Monsieur DARMIAN qui est le vice‐président en charge des finances, qui interviendra pour vous donner un paysage vite balayé, mais nécessaire à votre connaissance, je crois, pour savoir comment on a travaillé le montage, la préparation même si elle a été très compliquée et douloureuse du budget du Conseil Général. Un contexte contraint avec des compétences, et ça a été dit également par le président, où nous avons des obligations, des obligations d’accompagnement. Ce qui fait qu’effectivement on pourrait imaginer que d’autres champs ont un petit peu moins que les autres. Pour autant, sur la vie associative et je le remercie en cela, le président a tenu à ce que nous puissions sauvegarder des domaines bien particuliers de la vie associative, mais aussi en matière de culture sur les enseignements artistiques, à savoir ce qui s’adresse aux plus jeunes, aux plus fragiles, aux plus démunis, les plus anciens également. Et c’est ainsi que toutes les actions qui vont toucher au handicap, au troisième voire quatrième et bien plus puisque aujourd’hui on vit très longtemps, âge, bien sûr, ont été quelque part sacralisées. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 6 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Les enseignements artistiques également. Tout ça, le sport amateur, parce qu’il y a des choix à faire et que l’on peut imaginer que certains ont plus besoin que d’autres et notamment de l’aide du département. C’est dans ce contexte‐là que nous avons travaillé ce budget en étant très très sérieux dans notre approche, dans notre analyse, avec les services qui nous ont accompagnés là‐dessus parce que nous avions vraiment à cœur d’être au plus près de vos inquiétudes, de les entendre et de faire que nous soyons toujours dans l’accompagnement que vous attendez du département. C’est comme ça que des choix sont faits, j’espère qu’ils vous agréeront bien entendu même si, il n’y a pas de secret, quand il y a une réduction de budget, elle s’applique à l’ensemble de nos partenaires, certains plus que d’autres. On peut imaginer que ceux qui ont été plus touchés étaient plus riches que les autres. En tout cas, c’est ce que nous nous sommes attachés à faire. Et soyez certains que c’est dans cet esprit que ça a été fait. Ce qui veut dire que les riches auront moins, les pauvres auront davantage. Voilà ce que nous avons essayé de faire sur cette préparation du budget, mais je sais que Jean‐Marie DARMIAN vous présentera ça beaucoup mieux que moi. Nous voulions avoir cette reconnaissance de l’action associative et je me réjouis que le Gouvernement ait bien compris cette problématique et installé le groupe de travail avec pour objectif d’élaborer la charte État/Associations/Collectivités territoriales dont une partie des propositions pourrait effectivement être intégrée à la future loi sur l’économie sociale et solidaire, mais je sais que nos intervenants vont justement rentrer dans ces champs. Et justement, nous avons la chance donc que notre vice‐président en charge des finances fasse partie de ce groupe de travail, Jean‐Marie DARMIAN siège dans ce groupe de travail. Bien sûr me féliciter également que la Ministre de la vie associative et des sports, Valérie FOURNEYRON effectivement reconnaisse les collectivités comme des partenaires incontournables des associations sur les territoires. Il est quand même étonnant que l’on attende un nouveau Gouvernement pour enfin entendre ces choses‐là. En tout cas c’est fait, le changement c’est maintenant, président. Aujourd'hui, nous espérons donc apporter notre contribution sur le devenir des associations. Je l’ai dit tout à l’heure vraiment que ce soit un moment d’échange et de partage, et c’est pour ça que je ne serai pas davantage plus longue parce que je souhaite, comme mes collègues, comme Matthieu ROUVEYRE qui fera la synthèse de cet après‐midi ce soir, que vous puissiez tous là échanger bien sûr, avoir l’éclairage de nos deux intervenants. Je crois qu’il y a des petits films qui vont vous être proposés et que vous ayez tous très largement le temps de pouvoir vous exprimer, d’avoir des réponses à vos questions en sachant que si nous n’avions pas les réponses à vos questions aujourd'hui, vous pouvez toujours revenir vers nous. À savoir que nous notons vos interrogations bien sûr et que nous vous porterons réponse. Et que si vous aviez oublié de nous poser des questions, vous pourrez toujours le faire, dans un second temps, en vous adressant à nos services comme vous le faites déjà tous les jours, voilà. Donc, j’avais juste envie de vous souhaiter un très très beau quatrième forum et qu’il soit à la hauteur de vos attentes et donc de nos attentes. Merci beaucoup. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 7 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean PETAUX Merci Madame la Vice‐présidente. Je vais donc lancer le premier intervenant, vous le présenter même si le Président MADRELLE a fait déjà une brève et tout à fait remarquable présentation. Jean‐Louis LAVILLE, vous êtes donc professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers, vous êtes par ailleurs chercheur dans un laboratoire qui est une UMR au CNAM, comment on dit ? CNRS LISE, vous nous direz ce que c’est que cet acronyme. Vous avez déjà publié, vous avez une œuvre, j’allais dire, déjà considérable. Je suis venu avec quelques‐uns de vos ouvrages que j’ai gentiment empruntés rapidement à la bibliothèque de recherche de Sciences Po Bordeaux, « L’économie solidaire » aux éditions du CNRS. Un livre tout à fait passionnant mais en anglais qui est intitulé « The Third Sector in Europe » c'est‐à‐dire un comparatif extrêmement passionnant qu’il faut considérer comme de plus en plus une approche globale de ce secteur. Et puis juste peut‐être pour vous lancer, vous allez donc traiter et aborder la question du « Nouvel âge de l’association ». Nouvel âge de l’association, ça veut dire sans déflorer votre propos qu’il y a peut‐être eu un ancien âge en tous les cas, un âge avant. Juste vous citer, vous me permettrez de vous citer, l’extrait de ce livre qui est tout à fait remarquable, il s’appelle « Politique de l’association » qui a été publié en 2010 aux éditions du Seuil. Ce n'est pas votre dernier ouvrage, le dernier a été publié chez Pluriel il y a très peu de temps. Dans « Politique de l’association », vous dites Jean Louis LAVILLE page 174, vous traitez du paradoxe associatif et vous dites : « Devant cette évolution, les inquiétudes sévères sur le devenir de l’espace public notées dès le début de ce livre apparaissent fondées. Le recul des régimes totalitaires ne signifie pas l’avènement définitif de la démocratie. C’est maintenant la fragilité de la démocratie qui appelle réflexion. Nombre d’auteurs soulignent, à juste titre, que l’individualisme négatif incite à la défection, au refus des engagements, au recul du sentiment d’appartenance commune, à l’oubli de la reconnaissance mutuelle et de la solidarité. Cet individualisme de déliaison et de désengagement est fait de retrait dans la sphère privée et d’indifférence vis‐à‐vis du politique. Il perçoit la démocratie comme un simple cadre institutionnel dispensateur de liberté négative alors même qu’elle ne serait perdurer sans une liberté positive, un souci du bien commun et du vivre ensemble. Il existe donc une incertitude démocratique mais elle ne peut être abordée à partir des seules tendances propres à la sphère politique. L’impact des mutations du néocapitalisme marchand est tel qu’il incite à relier le questionnement sur le devenir de la démocratie et les choix économiques. Le diagnostic portant sur un nouvel âge de l’individualisme convie à une interrogation renouvelée sur les rapports entre démocratie et économie ». Je suis sûr que vous allez passer effectivement de cette réflexion sur le nouvel âge de l’individualisme au nouvel âge de l’association, puisque c’est le titre de votre intervention. On va vous donner, on en a convenu ensemble, à peu près une petite quarante cinq minutes c’est ça, et puis après il y aura un échange et on vous promet qu’on vous libère pour des raisons à la fois ferroviaires et personnelles à 15 heures 45. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 8 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean‐Louis LAVILLE Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers « Vers un nouvel âge de l’association » Merci à vous. Donc effectivement, je vais partir de la situation dans laquelle on se trouve aujourd'hui, le président l’a noté, ce n’est pas simplement une crise, c’est un changement de monde. Et dans ce changement de monde, je crois qu’il y a des raisons effectivement d’être inquiet parce qu'il se passe une situation étrangement parallèle à celle qui a eu lieu dans les années 30. L’un des auteurs qui me semble un auteur majeur, Karl Polanyi, a étudié tout ce qui s’est passé au XIXème siècle jusque dans les années 30, et il a établi que ce qui s’est passé dans les années 30, c’est qu’à vouloir aller dans l’excès de marché, on a tellement insécurisé la société, on a tellement mis les gens en difficulté, on a tellement créé de peur de l’avenir qu’on a fait le lit des fascismes, des régressions autoritaires et je crois que cette question est aussi devant nous. Donc, c’est aussi par rapport à ça que je voudrais parler du monde associatif, c’est parce que nous avons aujourd'hui un risque de totalitarisme ou d’autoritarisme. D’ailleurs, on a de plus en plus de publications qui, prenant exemple sur la Chine ou d’autres pays, parlent de la compatibilité entre capitalisme et autoritarisme. Donc, je crois que nous sommes dans une situation qui est une situation difficile. Et de ce point de vue là, je voudrais effectivement essayer de voir comment est‐ce qu’il est possible de voir ce nouvel âge de l’association. Mais pour arriver à ce nouvel âge de l’association, je voudrais quand même fonder cette prospective sur quelques éléments de rétrospective parce que je crois que l’un des problèmes que nous avons, c’est qu’on rend hommage aux associations dans des rituels périodiques, dans des dîners républicains, mais enfin quand on passe aux choses sérieuses, on parle du marché de l’Etat et on abandonne l’association. Donc, je crois que nous avons un vrai problème de reconnaissance au‐delà des discours convenus sur ce que font les associations dans nos sociétés. Et je crois que nous avons une histoire des associations qui a été oubliée parce qu’on a centré dans le XXème siècle des interrogations sur le poids respectif du marché de l’État. Donc, je voudrais quand même essayer de donner quelques fils sur cette histoire associative parce que je pense qu’avant de réfléchir sur le nouvel âge de l’association, nous devons nous remémorer ensemble cette histoire associative parce que c’est le patrimoine collectif sur lequel nous pouvons nous fonder pour aller vers l’avenir. Et nous avons été privés de cette mémoire d’une certaine façon. Je voudrais juste mentionner que les associations sont nées juste après l’instauration des grandes démocraties modernes. C'est‐à‐dire que le projet initial tel qu’il s’exprime dans l’associationnisme pionnier du premier XIXème siècle, c’est la volonté de ce que les principes qui viennent d’être acquis au niveau politique ‐ liberté, égalité et fraternité ‐ soient diffusés dans la vie économique et sociale. Et la diffusion de ces principes politiques, de manière large, va amener l’apparition d’un nouveau concept introduit en 1840 par Leroux dans la philosophie française, c’est celui de solidarité. Ce que Leroux désigne comme solidarité en 1840, c’est ce qui succède à la charité en démocratie. Puisque pour lui, il ne peut y avoir de charité en démocratie. La charité supposait qu’il y avait une relation inégalitaire entre celui qui donne et celui qui reçoit. Donc pour lui, ce qui succède à la charité quand on est véritablement en démocratie, c’est un nouveau rapport social qui n’est pas fondé sur le Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 9 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » contrat mais qui est fondé sur la coopération volontaire entre des citoyens libres et égaux. Et c’est à partir de cela que se dégage ce premier temps de l’association dont on a des très beaux textes par exemple dans la « Parole ouvrière » éditée par Rancière, des textes entre 1830 et 1848 dans lesquels on retrouve toujours deux mots « association » et « solidarité » comme deux véritables drapeaux de cette nouvelle phase que l’on veut ouvrir en étendant les principes de liberté et d’égalité dans la vie sociale et dans la vie économique. À cette époque‐là, la solidarité n’est pas réservée au social. Elle est aussi destinée à régler la question de l’organisation du travail, comme on disait en 1848. Donc, je crois que cette forme d’auto‐organisation qui voulait arriver à donner de nouvelles chances à l’égalité dans l’ensemble de la société, c’est le premier creuset associatif. Et c’est un creuset associatif que nous avons véritablement oublié parce qu’après ce premier temps, il y a eu le second XIXème siècle où s’est manifestée l’idéologie qui a dominé ensuite, qui est l’idéologie du progrès, dans lequel finalement on attendait moins de la démocratie et on attendait plus du développement économique. C'est‐à‐dire qu’à partir d’un certain moment, la solidarité s’est trouvée relativisée parce qu’on pensait avec Smith et les philosophes libéraux que finalement on allait arriver à offrir la richesse aux nations et la richesse à toutes la population. Et donc là, on a redéfini la solidarité d’une manière plus restrictive en considérant que la solidarité, ce n’est finalement pas la préoccupation de tous les citoyens, c’est quelque chose qui est destiné à un groupe particulier, celui des gens pauvres. Et donc là, il y a eu dans ce deuxième temps une torsion de la notion de solidarité pour la faire correspondre à la philanthropie, c'est‐à‐dire à une politique de contrôle des pauvres puisque évidemment si la solidarité n’est pas l’affaire de toute la société, mais l’affaire uniquement d’un groupe particulier, la question subsidiaire qui arrive tout de suite : « Mais est‐ce que tous les pauvres méritent vraiment d’être aidés ? » Vous voyez que malheureusement, nous ne sommes pas sortis des questions du XIXème siècle en ce début du XXIème siècle puisque la question de la contrepartie dans les aides sociales est une question extrêmement actuelle. Donc, je crois que nous avons cette tension dans le monde associatif entre une solidarité démocratique et une solidarité philanthropique, j’en reparlerai dans le nouvel âge de l’association. Si je revisite trop vite ces quelques éléments, c’est parce que je pense que nous sommes dans une nouvelle étape de la contradiction entre capitalisme et démocratie, et celle‐ci s’est déjà manifestée antérieurement. Et donc je crois que nous pouvons aussi regarder ce qui s’est passé hier pour mieux comprendre ce qui peut se passer demain. Heureusement, la question de la solidarité n’a pas été soluble définitivement dans la philanthropie, et on a eu un troisième temps qui a été celui de l’instauration de l’état social à partir de ce qu’ont apporté, si on reste dans le cas français, l’école française de sociologie ou ce qu’on a appelé aussi « le solidarisme ». C'est‐à‐dire cette idée que non la solidarité n’est pas réservée à des personnes particulières, c’est véritablement un principe qui est englobant dans la société, qui est aussi important que d’autres principes et en particulier le principe de marché. La solidarité, c’est le souci comme disait Durkheim, Bouglé, Fournière et les autres jusqu’à Mauss et Jaurès, c’est le souci de la cohésion sociale et le fait que nous ne vivons pas simplement avec le niveau de vie que nous permettent nos mérites personnels contrairement à un certain discours libéral, nous vivons en fonction de ce qui a été déjà réalisé par les générations antérieures. Et donc, ce qui apparaît avec le solidarisme, c’est Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 10 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » l’idée qu’il y a également une solidarité verticale, une solidarité entre les générations dont nous sommes tributaires. Et dans ce lien intergénérationnel, il y a une appartenance qui nous est chère. Et puis, en même temps, il y a une dette sociale entre les différents groupes sociaux puisque les gens ne naissent pas avec les mêmes dotations, donc il y a une solidarité à la fois verticale et horizontale. Vous remarquerez là encore pour faire signe de l’histoire vers l’actualité que la définition qui est donnée de la solidarité par les solidaristes avec ces deux dimensions verticale et horizontale est à peu près la définition du développement durable dans le rapport Brundtland tel qu’il a fondé le débat sur le développement durable. Donc, il y a des échos, je crois, entre ce qui s’est passé dans le XIXème siècle et ce que nous sommes en train de redécouvrir aujourd'hui. Mais c’est vrai qu’à la fois à la fin du XIXème siècle, on a réussi à ce que la solidarité sorte de la philanthropie et acquiert une base légale, ce qui fait qu’on n’est plus obligé de tendre la sébile, on peut revendiquer ses droits, mais en même temps ça a amené une architecture institutionnelle qui va dominer tout le XXème siècle qui est une architecture où ce qui était de l’ordre de l’association va tendanciellement être recouvert par l’ombre de ces deux grands piliers que sont le marché et l’État. Et finalement, ce à quoi on arrive à la fin du XIXème siècle et qui va complètement imprégner le XXème siècle, c’est que d’un côté, il y a l’économie que l’on confond avec le marché et de l’autre côté il y a le social que l’on confond avec l’État. Ce qui veut dire que tout ce qui émane de l’associationnisme va être séparé, cloisonné en différents statuts qui vont finalement amener à ce que même si ce que l’on va appeler l’« Économie sociale » a une certaine portée économique, elle va perdre son importance politique, elle va perdre l’importance dans le débat social parce que les coopératives vont être en concurrence avec d’autres entreprises sur le marché. Et comme disait un coopérateur brésilien : « Les coopératives pensaient changer le marché, en fait c’est le marché qui a changé les coopératives ». Les mutuelles vont se retrouver en tant qu’auxiliaires de la protection sociale généralisée et de plus en plus les associations après la Seconde guerre mondiale dans une période d’extension des moyens de l’État providence et de l’État social, dans cette période‐
là, les associations vont être de plus en plus au service des objectifs qui leur sont fixés par les politiques… (intervention sans micro – inaudible) Donc, je vais parler moins fort, ça va être plus supportable. Donc, nous en étions au fait que les associations ont été très largement mobilisées dans les cadres des politiques mises en œuvres par l’État social puisque dans ce qu’on a appelé les « Trente glorieuses », il y a eu la possibilité de développer ces politiques sociales de manière extrêmement sensible. Donc, on pensait finalement à travers les Trente glorieuses avoir trouvé la recette définitive d’un progrès qui soit à la fois un progrès économique avec la dynamique marchande et un progrès social avec l’État providence. Et en fait, ce qu’on est en train de réaliser depuis quelques décennies, c’est que cet équilibre qu’on croyait définitif est en train de s’écrouler. Et donc, c’est à partir de ce qui s’est passé dans les dernières décennies que je voudrais en arriver à la question du nouvel âge de l’association. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 11 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Qu’est‐ce qui s’est passé depuis que nous sommes sortis de ce qu’on a appelé les « Trente glorieuses » ? C'est‐à‐dire cette ère dans laquelle nous pensions que nos enfants vivraient mieux que nous, que la génération qui allait venir aurait des situations meilleures que la génération qui la précédait. Je crois que ce que nous vivons, c’est une période, on l’a dit tout à l’heure, une période de changement de monde, mais qui se manifeste par une succession de crises. En fait, nous ne vivons pas une crise, nous vivons un changement de monde et ce changement de monde, il se manifeste par la sédimentation de crises différentes, mais qui s’ajoutent les unes aux autres et dont nous n’arrivons pas à sortir. La première crise qui, je crois, a été importante pour le monde associatif, c’est la crise qui s’est amorcée dès la fin des années 60 et la fin des années 70, c’est‐à‐dire je crois ce que l’on peut désigner, de manière trop là aussi rapide, comme la fin ou l’effritement au moins de l’idéologie du progrès. Parce que cette idée qu’on va vers un avenir meilleur a commencé à s’effriter dès les années 70. Je vous rappelle que c’est dans les années 60 que sort le club de Rome, le rapport sur une interrogation sur la croissance qui est tout à fait inédite et vous voyez bien qu’on n’en est pas sorti de ces problèmes‐là, parce qu’à la fois on voit avec tout un ensemble d’études convergentes Sen, Stiglitz, Gadrey, Jany‐Catrice pour prendre des auteurs français, on voit bien que la notion de croissance dans une société de service, dans une société d’économie immatérielle a de moins en moins de sens pour des raisons sur lesquelles on pourrait revenir, et en même temps on conditionne la sortie de crise au retour de la croissance. Donc, nous sommes dans une contradiction pratique et intellectuelle dont nous n’arrivons pas à sortir et cette contradiction, elle a commencé à se manifester dès le début des années 70. Le début des années 70, vous vous rappelez, ça parait, il y a un siècle et pourtant ce n’est pas si ancien, c’est aussi les grèves des OS pour dénoncer la manière dont est organisé le travail en miettes dans l’entreprise. C’est les premières interrogations aussi sur la consommation. Est‐ce que la consommation, la société qu’elle nous amène, est‐ce que c’est forcément une libération ou est‐ce que ça peut aussi être une aliénation supplémentaire ? Donc, vous voyez qu’il y a tout un ensemble d’interrogations qui ont émergé à ce moment‐là et que l’on a essayé de synthétiser en parlant des nouveaux mouvements sociaux, c'est‐à‐dire de tous les mouvements qui ne réduisent pas la conflictualité sociale à l’affrontement entre le capital et le travail, mais qui essaie justement de mettre en évidence de nouvelles questions de société. Deux exemples évidents, c’est le féminisme et l’écologie qui sont parmi les mouvements qui émergent à ce moments‐là, des mouvements qui vont poser des questions tout à fait différentes de celles qui étaient posées dans le cadre de ce qu’on a appelé la « lutte des classes » et de ce qu’on appelle encore la « lutte des classes » d’ailleurs. Donc dans ce moment‐là, il va y avoir de nouvelles associations qui vont naître. Et à partir de ce moment‐là, le paysage associatif devient un paysage très contrasté parce que nous avons à la fois des anciennes associations qui ont été profondément intégrées dans les politiques de l’État social, et puis des nouvelles associations qui vont émerger et qui vont rendre compte de sensibilités qui sont en train d’arriver dans la société. Et on pourrait reprendre en détail à partir, par exemple, du mouvement écologique, comment est‐ce qu’il y a eu tout un ensemble d’associations sur l’alimentation naturelle, sur l’agriculture biologique, sur un Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 12 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » nouveau rapport à la nature qu’ont commencé à émerger à partir de ce moment‐là. On pourrait reprendre des tas d’autres exemples, on pourrait reprendre aussi comment un certain nombre d’associations sont venues contester, dès cette période‐là, non pas le principe de l’État social mais les modalités traditionnelles d’exercice du pouvoir de l’État social. En particulier, c’est la question qui a été posée dans plusieurs pays, mais aussi en France de la participation des usagers dans les associations d’action sociale par exemple, alors que ces associations dans le développement des Trente glorieuses s’étaient construites sur un corporatisme professionnel qui, d’une certaine façon, invalidait comme non experte et non compétente la parole des usagers. Ce qui se passe ‐ je vais évidemment là encore trop vite ‐ mais ce qui se passe à ce moment‐là, c’est qu'au‐delà du compromis entre marché et État, il y a de nouvelles demandes de démocratisation qui se font jour. Il y a une demande d’aller plus loin dans la participation effective des choix de société qui remettent en cause ce qui paraissait encore la veille évident. Et là, ça va nous créer une nouvelle vague d’associations qui d’ailleurs, très largement au niveau internationale, se reconnaîtra dans des appellations comme celles d’économie solidaire par exemple. On a en même temps le fait que des associations qui datent de très longtemps perdurent et une nouvelle vague d’associations qui commencent à émerger dont la manifestation emblématique au niveau international sera l’avènement du forum social mondial, c'est‐à‐
dire un regroupement, une constellation de toute un ensemble de forces qui ne veulent plus être limitées non plus par l’espace national, mais qui essaient de réfléchir à comment un autre monde pourrait être possible, reprenant le slogan bien connu. Vous voyez l’idée, c’est que là il y a vraiment finalement la dénonciation implicite ou explicite de ce compromis du marché d’État et tout ce qu’il laissait dans l’ombre. Et il y a la volonté d’investir de nouveaux espaces de démocratisation dans la société. Donc, vous voyez que ce moment des nouveaux mouvements sociaux, c’est un moment qui fait là encore écho de manière forte par rapport à l’associationnisme pionnier dans le premier XIXème siècle que je mentionnais tout à l’heure. Mais tout ça a été à nouveau oublié puisque cette crise qu’on pourrait appeler une « crise culturelle » ou une « crise de valeur des années 60‐70 » a été recouverte par une autre crise, celle que l’on a appelé la « crise économique ». Et évidemment la crise économique a entraîné aussi une reconfiguration du tissu associatif avec le fait que, de plus en plus, les associations ont été absorbées non pas par l’invention d’un autre monde, mais par la nécessité de sauver ce qui pouvait encore l’être dans une phase où la restructuration capitaliste a entraîné de nombreux bouleversements et en particulier une montée du chômage, une montée de la pauvreté et de la précarité. Donc, ce qui envahit à ce moment‐là le monde associatif, c’est de nouvelles thématiques. Alors il y a des questions comme celle de la reprise des entreprises par leurs salariés qui est très présente dans certains pays et que l’on voit réapparaître régulièrement en France, mais il y a surtout la thématique comme celle de la lutte contre l’exclusion, la thématique de l’insertion qui devient très importante au sein du tissu associatif et qui va aussi être l’un des éléments à travers lesquels les associations vont pouvoir se financer. Ça va les amener effectivement à être parfois un petit peu cantonnées dans ces champs qui ont trait à l’insertion ou à la tentative de traitement social du chômage, parfois même à leur corps défendant. On a eu cette crise économique qui a succédé à la crise culturelle, et puis ce que l’on voit, c’est que les préconisations néolibérales qui ont été appliquées partout, pourrait‐on dire, n’ont pas permis de sortir de la crise, bien au contraire, elles ont conféré un caractère Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 13 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » systémique à cette crise. Et on se retrouve là aujourd'hui dans une phase dont on nous a déjà parlé et qui évidemment est extrêmement préoccupante, c'est‐à‐dire une phase dans laquelle nos sociétés européennes sont confrontées à ce qu’ont connu les sociétés sud‐
américaines, il y a vingt ans, c'est‐à‐dire des programmes d’ajustement structurel dans lesquels ce sont les préoccupations de remboursement de la dette qui dominent, et dans lesquels on en arrive aujourd'hui à ce qu’en Europe, il y ait dans certaine région la moitié de la population active de moins de 25 ans qui soit privée d’emploi. Comment une société comme la société européenne qui doit sa légitimité à son modèle d’État social, peut aujourd'hui proposer un avenir dans lequel la moitié de la population active de moins de 25 ans n’a aucune perspective d’emploi, comme c’est le cas aujourd'hui en Grèce ou en Andalousie. Je pense que ça nous amène effectivement à réfléchir à ces tensions et à ces risques de régression autoritaire que je mentionnais tout à l’heure. En même temps, vous voyez bien que le monde associatif est un monde associatif qui, du fait de l’intégration dans le fonctionnement de l’État social puis du fait des crises successives, est devenu un peu un caléidoscope. Et à partir de ce caléidoscope et donc de la complexité de la situation, j’aimerais, pour engager le débat, dégager finalement trois scénarios possibles qui me semblent aujourd'hui se dégager pour un nouvel âge de l’association. Ces scénarios en fait sont des scénarios qui ne viennent pas uniquement de l’observation de la réalité française puisque, je pense, qu’il est indispensable dans ce domaine d’avoir une ouverture internationale et que cette espèce de paradoxe associatif que nous vivons est tout à fait partagé dans l’ensemble du monde. C’est‐à‐dire, qu’est‐ce qui se passe dans tous les pays aujourd'hui, depuis l’Afrique du sud jusqu’au Brésil en passant par les pays européens ? C’est le fait que partout les associations connaissent un véritable boom, et partout elles sont aujourd'hui quasiment en danger de mort. Et donc, pourquoi est‐ce qu’il y a à la fois ce regain associatif qui va quand même dans des dimensions que l’on n’avait pas connues précédemment. Je rappelle, jusqu’entre 2000 et 2010, c’est la première fois que les associations ont créé plus d’emplois que les entreprises privées, mais ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. On pourrait prendre l’exemple du fait qu’il y a un Français sur trois aujourd'hui de plus de quinze ans qui est impliqué dans une association. Les associations jouent un rôle dans la vie civile et dans la vie civique et, en même temps, ce rôle est de plus en plus contraint par les éléments qui nous ont été présentés et qui vont vous être présentés tout à l’heure parce que nous sommes dans une situation de goulot d’étranglement au niveau des financements publics. Qu’est‐ce qui est possible dans cette situation‐là ? Et qu’est‐ce qui est possible si l’on prend au sérieux cette idée selon laquelle les associations effectivement ne sont pas un luxe pour nos sociétés, mais sont une nécessité absolue si l’on veut que le lien social soit maintenu, préservé, renforcé et que l’on ne tombe pas dans cette régression autoritaire que j’évoquais. Je pense qu'il y a trois scénarios que l’on peut dégager à partir de la réalité internationale aujourd'hui : ‐ Le premier scénario, c’est un scénario qui est avant tout présent dans les pays anglo‐
saxons, mais qui commence à se répandre aussi en Europe. C’est l’idée selon laquelle les associations sont certes sympathiques, mais elles souffrent d’amateurisme, et donc elles doivent moderniser leur fonctionnement en adoptant le modèle de ce que sont les Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 14 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » formes de management des grandes entreprises privées. Et donc finalement, les associations pour être modernes doivent se convertir d’une certaine façon en ce que Yunus a désigné comme « Social business », c'est‐à‐dire des entreprises à but social fonctionnant comme des entreprises, adossées à de grands groupes privés qui vont leur permettre de gagner justement en performance. Et donc il y a dans ce scénario 1, une préconisation très forte puisque les pouvoirs publics n’ont plus d’argent, c’est du moins l’hypothèse qui est faite dans ce scénario de se rapprocher des grandes entreprises privées et de passer des joint‐ventures avec ces grandes entreprises privées. Et là, vous voyez bien qu’il y a évidemment une cohérence entre l’option de modernisation des associations comme Social business et la responsabilité sociale des entreprises. Et ce type de scénario, il a été introduit en fait dès les années 80 dans des pays comme le Royaume‐
Uni à travers l’idée qui a été dégagée à ce moment‐là de ce qui a été appelé un « secteur indépendant ». C'est‐à‐dire que l’on a commencé à mettre en avant les vertus du secteur indépendant. Le secteur indépendant, c’est quoi ? C’est les entreprises privées d’une part, les associations d’autre part. On les réunit comme étant porteuses d’un modèle vertueux puisque la société civile, comme c’est expliqué aussi aujourd'hui dans le projet de Big Society de Cameron, les associations sont vertueuses parce qu’elles sont dans la proximité des besoins de la population, et donc elles doivent se rapprocher des entreprises parce qu’elles vont y gagner ce professionnalisme inhérent au fonctionnement des entreprises. Et, à ce moment‐là, on va sortir de la bureaucratie publique pour arriver à mieux résoudre les problèmes sociaux à travers ce qui est recommandé dans ce cas‐là, c'est‐à‐dire un secteur indépendant beaucoup plus articulé entre grandes entreprises privées et associations. C’est en fait un scénario qui commence à s’imposer en Europe puisqu’il y a aujourd'hui une Social Business initiative au niveau européen, et il y a aujourd'hui un certain nombre de fonds structurels qui vont être dédiés à cette option. Alors j’y reviendrai tout à l’heure et on pourra y revenir dans la discussion parce qu’il y a des ambiguïtés dans les textes européens sur cette question, parfois on parle de Social Business au sens restrictif que je prends dans ce premier scénario, parfois on parle d’innovation sociale ou d’entreprise sociale dans un sens plus large. Donc je pense que ce scénario n’est pas définitivement établi, mais il y a toute une tendance. Pourquoi il y a cette tendance aujourd'hui ? Parce que nous ne sommes plus du tout dans le discours néolibéral du début des années 2000. La crise de 2008 est passée par là. Les gouvernements savent très bien que ce qui va être demandé aux populations européennes va entraîner des sacrifices et va entraîner des résistances. Et donc pour arriver à vaincre ces résistances, il est très important de prétendre que le système peut se moraliser. C’est pour ça qu’on nous parle tant d’une moralisation du capitalisme pour dire : « Rassurez‐vous, il y a une possibilité d’auto‐
réforme de système sans que ce système soit mis en cause ». Et on voit bien qu’il y a là une cohérence idéologique dans ce premier scénario dans lequel les associations sont indexées finalement sur un fonctionnement dans lequel on considère ‐ et je crois que c’est la principale caractéristique de ce scénario ‐ qu’il n’y a qu’une manière de faire de l’économie et que cette manière, elle a été bien appréhendée par les grandes entreprises privées sur lesquelles il faut se modeler. Évidemment je schématise à l’extrême en présentant ce scénario, mais si vous reprenez les médias de ces derniers mois, vous verrez que ce scénario tranquillement, Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 15 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » imperceptiblement peut‐être, il est en train de s’implanter en Europe et il est en train aussi d’arriver en France. Néanmoins, ce scénario n’est pas encore développé en Europe continentale parce que nous avons en Europe continentale une tradition très forte du service public. Et ce qui est effectivement une rupture dans ce scénario, c’est que tout ce qui avait été confié à la démocratie représentative et à la dimension publique depuis la fin du XIXème siècle, dans ce scénario tendanciellement, il est préconisé que cela repasse du côté du privé puisque ce scénario considère que l’action privée est beaucoup plus efficace que ne peut l’être l’action publique. Donc là, je crois que dans un certain nombre de pays, il y a une force de ce scénario, particulièrement dans un certain nombre de pays anglo‐saxons, puisque c’est lié aussi à un nouvel âge de la philanthropie, ce que l’on appelle la « Venture philanthropy», qui est aussi une philanthropie beaucoup plus axée sur une connaissance de ces résultats, sur une volonté de faire progresser les associations dans leur fonctionnement. Donc là, il me semble qu’il y a un modèle cohérent qui est en train de se dessiner, le modèle de l’intégration des associations dans une moralisation du capitalisme à travers leur modernisation en tant que Social Business et que cette option est en train de gagner des points dans un certain nombre de contextes. ‐ La deuxième option est beaucoup plus familière d’une certaine façon pour les associations françaises, c’est une modernisation qui n’est pas au service des entreprises privées, mais qui est plutôt une modernisation plus conforme à l’histoire de l’Europe continentale, c'est‐à‐dire dans le sillage de la modernisation de l’État. Et là, évidemment, on voit bien qu’il y a un certain nombre de réformes, LOLF RGPP, qui introduisent de nouvelles architectures que l’on peut regarder, par exemple, dans l’articulation entre le sanitaire, le médicosocial et le social, dans lequel ce qui est considéré comme essentiel du point de vue de la collectivité reste du domaine public. Et il y a un certain nombre de secteurs qui deviennent de plus en plus pilotés par ce service public parce qu’ils sont considérés comme étant subordonnés à des grands secteurs comme le secteur sanitaire. Et là on voit bien qu’effectivement, il y a une volonté de changer ce paysage associatif qui, du point de vue d’un pilotage technocratique, est un paysage trop compliqué. Et on entend cette phrase récurrente : « Oh là là, on n’y comprend rien, les associations sont trop nombreuses, il faut en supprimer une bonne partie et regrouper autour de grands ensembliers ». Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’on va faire une course à la taille dans les associations, et que cette course à la taille qui va essayer d’éradiquer les petites associations, elle va se faire au nom de systèmes qui se veulent rationnels et qui se veulent rationnels à travers des outils de gestion qui ont été implantés dans le service public et qui maintenant sont en train de s’implanter dans les associations. Je veux parler des différents outils du New Public Management. Et donc là aussi, vous avez un véritable problème qui est en train de se créer dans les associations et qui ne fait que reprendre le problème qui existe maintenant depuis quelques années dans le service public, c'est‐à‐
dire que vous avez une caractérisation du management dans le New Public Management qui ne raisonne qu’à partir de reportings et qu’à partir de calculs qui sont centrés sur l’efficacité et l’efficience, c'est‐à‐dire le ratio entre moyens investis / résultat dégagé. Évidemment, personne ne nie qu’il faille être très vigilant sur ces questions, mais le problème qui se pose, c'est que si vous vous focalisez uniquement sur ces indicateurs ou sur ces batteries d’indicateurs, ça veut dire que vous allez de plus en plus avoir ce que l’on constate aujourd'hui dans les associations d’action sociale par exemple, c'est‐à‐dire une Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 16 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » élite de dirigeants qui sont venus sans expérience associative avec des formations qui sont des formations managériales, qui vont essayer d’implanter ces indicateurs de manière totalement coupée des professionnels qui eux, arc‐boutés sur leur corporatisme habituel, vont résister et de plus en plus va y avoir des incompréhensions, des systèmes ingérables dans les associations. Et ce new public management, qui se voulait comme la rationalisation des associations, ce qui est très intéressant c’est qu’il commence à y avoir une littérature aujourd’hui qui montre bien les effets pervers qu’a produit ce new public management dans le service public et comment aujourd’hui on est en train de le faire rentrer dans les services associatifs alors que, justement, ce qui l’a entraîné dans le service public, va se diffuser aussi dans les associations, c’est‐à‐dire, comme le dit Vincent de Gaulejac, « un oubli de la mission institutionnelle ». Ce qui caractérise une association c’est d’être toujours un agencement complexe entre un projet et une organisation, avec des tensions récurrentes entre le projet et l’organisation suivant les moments de développement. Mais là, dans cette approche‐là, on élimine finalement le projet, sauf un projet très vague et pas véritablement opératoire et on se centre uniquement sur l’organisation. Et c’est ça qui, de plus en plus, crée ce que les travailleurs associatifs appellent « les malaises » au sein des associations parce que, effectivement, les gens ne s’y retrouvent pas dans ces méthodes de management qui ne tiennent pas en compte des projets associatifs et qui ne les intègrent pas dans la démarche de management. Donc, ce deuxième scénario, c’est un scénario que l’on pourrait dire un scénario de « modernisation des associations dans la dépendance au service public » qui va de plus en plus les considérer comme des plateformes techniques, des prestataires de services, des sous‐traitants quasiment. Dans cette architecture‐là, il n’y a pas de place pour l’innovation associative puisqu’en fait ce que l’on va demander aux associations c’est uniquement de se conformer à un certain nombre de cahiers des charges qui leur sont fixés de l’extérieur. Ce qui fait la spécificité de l’association est profondément enfoui dans ce deuxième scénario et, finalement, il ne me semble que les associations puissent se satisfaire de situation qui soit une situation qui les limite à la situation de prestataire technique, pas plus qu’elles ne peuvent se satisfaire d’une situation qui voudrait les convertir en social business. ‐ Donc, il y a un troisième scénario et ce troisième scénario, je pense, que c’est le scénario sur lequel acteurs, responsables publics, chercheurs doivent travailler ensemble parce que c’est un scénario difficile, exigeant mais c’est un scénario qui, comme les 2 autres, est en train aussi de se mettre en place. Et ce scénario, c’est celui que j’appellerai « le scénario de la démocratie et de l’économie plurielle », c’est‐à‐dire que je crois qu’il est temps aujourd’hui, si l’on veut résoudre les problèmes sociaux et environnementaux auxquels nous sommes confrontés, de ne plus raisonner marché / État, mais d’intégrer dans l’analyse et dans l’action ce troisième pôle, qui est celui de la société civile, qui est celui de l’association. Et ce troisième pôle n’est pas un secteur à part, c’est un secteur en interdépendance avec les 2 autres. Mais, il permet aussi de conférer une respiration à l’ensemble de la société, me semble‐t‐il, qui sinon peut être complètement encadrée par les piliers du marché et de l’État que j’évoquais tout à l’heure. Ça veut dire quoi ce scénario concrètement ? Ça veut dire que les associations, sous une forme rénovée, peuvent être aujourd’hui partie prenante de la construction d’un Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 17 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » nouveau compromis. Je vais citer quand même cet exemple parce que, même s’il apparaît lointain je crois qu’il est extraordinairement proche. Il y a 2 pays qui récemment ont adopté une nouvelle constitution. Cette nouvelle constitution dit que, finalement, il faut substituer à l’objectif de croissance maximale qui, d’une certaine façon, produit aussi des effets aujourd’hui, un nouvel objectif pour la société, c’est l’objectif de bien vivre pour tous. Et ces deux pays, l’Équateur et la Bolivie, lient, et c’est là que c’est intéressant, l’objectif de bien vivre pour tous à l’existence d’une économie plurielle, c’est‐à‐dire d’une économie qui soit fondée sur un secteur privé, un secteur public et aussi un secteur d’économie sociale et solidaire parce que ce secteur apparaît comme nécessaire aujourd’hui en complément des 2 premiers et en tension avec les 2 premiers, pour arriver à réaliser un certain nombre d’objectifs de la collectivité. Alors, évidemment, ces affirmations sont liées à la réalité de ces sociétés, mais je pense qu’au‐delà de ce qu’elles ont de particulier, je crois qu’il y a un message qui a un certain caractère d’universalité. Et il me semble que si l’on veut véritablement prendre au sérieux ce que sont les associations, ça veut dire qu’elles peuvent participer à une démocratie qui soit une démocratie plus ouverte en permettant de consolider des formes concrètes de démocratie participative et délibérative. On a parlé, à un certain moment, de démocratie participative, mais on voit bien que les systèmes institutionnels qui se revendiquent de cet horizon de la démocratie participative ne sont pas vraiment, effectivement, fréquentés par les citoyens en France. D’ailleurs, là on pourrait s’interroger sur la différence avec d’autres pays à cet égard. Mais je pense que ce que cela donne, à ce moment‐là, comme exigence pour les associations, c’est que les associations ne peuvent véritablement avoir une chance de reconquérir une place dans le compromis de demain que si, dans leur fonctionnement interne, elles activent aussi cette dimension de démocratie participative. Ce qui veut dire qu’il y a besoin, je pense, de revisiter très largement les fonctionnements internes des associations et de voir comment est‐ce que dans un certain nombre de champs d’activités, les associations permettent, par exemple, aux usagers d’avoir d’autres rapports avec le service quand il est presté en association que le rapport qu’elles auraient si ce service était rendu par une entreprise privée. Si les associations ne sont pas en mesure de montrer dans la pratique quotidienne de leurs services qu’elles sont différentes d’une entreprise privée, je ne pense pas qu’elles aient véritablement d’avenir. Et donc, c’est vraiment ce levier démocratique qui doit être réactivé et un certain nombre de nouveaux statuts qui ont été reconnus dans un vingtaine de pays… en France, il y a eu le statut de la société coopérative d’intérêts collectifs, par exemple, mais il y a eu des nouveaux statuts associatifs et coopératifs dans une vingtaine de pays qui vont tous dans le sens d’essayer de renforcer cette coopération entre différentes parties prenantes au sein même du fonctionnement associatif. Ça veut dire aussi que les associations doivent reprendre pied et là on n’est plus dans leur fonctionnement interne, mais plus dans leur fonctionnement externe, doivent reprendre pied dans le débat public. Je crois que ce qui est endémique dans le cas français, c’est que les associations sont trop gentilles ou les associations sont parfois trop représentées par des grands fonctionnaires à la retraite. Nous avons besoin d’une représentation autonome des associations et d’une représentation qui véritablement se fait entendre et, à un certaine moment, est capable de dire « non » parce qu’il y a des évolutions qui ne sont pas tenables. Je prendrai un seul exemple. Nous avons dépensé des milliards de fonds publics dans le domaine des services de proximité, des services à domicile et Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 18 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » aujourd’hui ça se traduit par des résultats qui sont désolants en qualité de services pour les usagers, pour les salariés, alors que c’est extrêmement coûteux pour les finances publiques. Les associations, il y a 20 ans dans ce champ, avaient plus que la majorité de l’offre. À aucun moment, elles n’ont dit « non » quand des changements ont été adoptés, qui étaient contradictoires avec leur logique parce qu’elles ont trop cru, telle ou telle fédération a trop cru qu’elle pouvait s’en sortir, elle, au détriment des autres. Je crois que nous devons revisiter aussi l’inter coopération entre associations parce que cela devient désormais vital si nous voulons vraiment défendre un certain modèle de société qui soit, comme le disaient les solidaristes, un modèle de cohésion sociale. Donc, il me semble qu’il y a cette dimension de la démocratie plurielle qui est au cœur du fonctionnement associatif et qui doit être au cœur aussi de la parole associative, qui doit porter plus fort désormais dans la société pour que ces associations ne soient pas simplement convoquées quand on a besoin d’elles, mais qu’elles participent réellement dans la co‐construction d’un certain nombre de politiques publiques. Et là on pourrait parler d’un certain nombre d’exemples de co‐construction des politiques publiques qui ont lieu dans différents pays. Je pense, en particulier, à ce qui est en train de se passer là encore en Amérique du Sud puisque je crois que ce continent est aujourd’hui marqué par son élan démocratique. Ça veut dire également économie plurielle au sens où, comme nous avons besoin d’une biodiversité, nous avons besoin d’une biodiversité économique. Et c’est là où je pense que le scénario 1 se trompe complètement. Il n’y a pas une façon de faire de l’économie. Il y a de multiples façons de faire de l’économie et si nous voulons que dans l’économie il y ait une place pour tout le monde, il faut reconnaître ces diverses façons de faire de l’économie. Et je crois que, de ce point de vue‐là, les alliances sont beaucoup moins passées avec les grands groupes privés qui, à mon sens, ont tous les moyens d’instrumentaliser les associations et beaucoup plus des alliances à passer avec ce que j’appellerai « une économie marchande territorialisée », c’est‐à‐dire un tissu de PME, d’artisanats, de commerces, qui a gardé un lien profond avec le territoire. Et c’est à partir de l’entrée que peuvent partager les associations avec cette économie marchande, c’est‐
à‐dire une économie finalement pour les populations, pour les territoires et non pas une économie pour la finance, c’est là qu’on peut retrouver des complémentarités fortes avec des acteurs économiques, mais qui soient congruents avec le modèle de société dont sont porteurs les associations. Et il me semble que des expérimentations, comme celle qui est lancée aujourd’hui par le Laboratoire de l’économie sociale et solidaire sur les pôles territoriaux de coopération économique, amènent aussi à mettre en avant cette revendication qui est celle du financement de ces formes de coopération économique, du financement non seulement de l’innovation technologique, mais aussi de l’innovation sociale. Ça veut dire également, et je pense que c’est ce qui est en train de se travailler dans le groupe qui a été mentionné tout à l’heure, il faut reconnaître pleinement la légitimité de la subvention, la légitimité aussi de modes de financement qui peuvent être d’initiatives associatives. Donc, il me semble que, dans ce troisième scénario, il y a véritablement la possibilité de refonder des rapports entre les pouvoirs publics et les associations, mais, ça suppose d’une certaine façon que les associations imposent aussi Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 19 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » un certain nombre de choses dans le débat. Je crois qu’elles ont été, d’une certaine façon, trop enfermées dans la docilité, dans les dernières décennies qui viennent de s’écouler et aujourd’hui nous avons besoin véritablement d’une parole qui soit plus forte de la part des associations et aussi d’une mise en évidence de son rôle économique qui soit beaucoup plus forte que ça n’a été le cas jusqu’à maintenant parce que je crois qu’on ne rend pas compte, véritablement, du monde économique que jouent les associations désormais. Voilà les 3 scénarios qui sont évidemment extrêmement schématiques que je voulais partager avec vous pour ouvrir la discussion. Il me semble que les associations sont à la croisée des chemins aujourd’hui et qu’on ne sait pas du tout vers quel nouvel âge de l’association on va aller. Il y a 3 scénarios qui, à mon sens, renvoient à des avenirs totalement différents et c’est à nous tous et à nous toutes, je crois, de voir dans quel type de scénario, dans quel type de nouvel âge de l’association nous voulons nous engager. Merci. (applaudissements) Jean PETAUX Alors, un triple merci, Jean‐Louis LAVILLE, pour d’abord cette performance puisque je dois dire que vous avez parfaitement tenu le contrat et le créneau dans un exercice un peu même physiquement difficile pour vous puisque vous étiez debout pendant 45 minutes. Merci beaucoup. Premier merci. Deuxième remerciement, je crois que vous avez remarquablement bien lancé la discussion qu’on va pouvoir maintenant avoir pendant à peu près une vingtaine de minutes, 20‐
25 minutes, en faisant appel aux questions de la salle, en reprenant certaines questions qui ont été posées lors des inscriptions des représentants des associations en préalable à ce forum et puis avec le fil internet qui nous arrive. Et puis troisième remerciement, je crois qu’il est suffisamment compliqué d’avoir une telle vision kaléidoscopique puisque vous avez parlé du kaléidoscope des associations pour vous remercier d’avoir non pas traité du nouvel âge de l’association, mais des nouveaux âges éventuels, c’est ce que vous dites à la fin de votre propos. Puis, je noterai cette sorte non pas d’appel à la révolte mais, finalement, appel à prendre les fourches par les associations pour qu’elles se fassent entendre. Je pense que je réduis votre propos fortement. Voilà. Est‐ce qu’il y a des questions dans la salle ? Il y a des micros qui circulent. Il y a déjà 2, 3 mains, 4 mains, 5 mains, là c’est parti. Donc, on va peut‐être commencer par Madame qui a été la toute première à lever la main au deuxième rang, s’il vous plaît. Vous êtes gentille, s’il vous plaît de vous présenter, enfin juste de dire quelle association vous représentez. Merci. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 20 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Sylvie JAULT Oui, bonjour, je suis Sylvie JAULT, je suis présidente de l’association de l’Atelier Remuménage. Nous faisons du déménagement solidaire. Nous vivons à l’heure actuelle grâce aux diverses subventions que nous donne, notamment, le Conseil général. À ce jour, à chaque déménagement que nous faisons, nous perdons de l’argent. Donc, la question que nous nous posons est la suivante : « Est‐ce qu’on va pouvoir continuer longtemps comme ça ? » Si un jour ces subventions diminuent ou disparaissent, comment allons‐nous faire ? Est‐ce qu’on va être obligé de passer en société, c’est‐à‐dire sur le secteur marchand, c’est‐
à‐dire en SCOP ou en SIC ou etc. ? Quel va être notre devenir ? C’est une grosse question. Jean PETAUX On va prendre 2‐3 questions et puis on laissera Jean‐Louis LAVILLE répondre. Là donc la question du devenir très précisément d’associations solidaires. Pierre JARILLON Bonjour, je suis Pierre JARILLON, je suis Vice‐Président de l’Association Bordelaise des Utilisateurs de Logiciels libres. Nous avons une association vieille de 15 ans et nous avons créé, en 2000, les premiers rencontres mondiales de logiciels libres qui se tiennent depuis tous les ans. Cette année, la manifestation aura lieu à Bruxelles. Aujourd’hui, il existe un secteur qui se développe d’une façon entièrement nouvelle, qui s’est créé tout seul, naturellement, c’est le domaine des logiciels libres. C’est un domaine de partage qui se fait non plus au niveau local, mais maintenant au niveau mondial. Alors, il en ressort des choses comme Wikipédia, comme, par exemple, Open Street Map, qui fait de la cartographie, et on arrive à avoir une liberté qui se retrouve aussi dans le partage de la connaissance, comme de la musique ou des arts. Et c’est un domaine qui se heurte à de très fortes oppositions, en particulier des grandes sociétés, comme Microsoft ou même des lobbyings qui sont très actifs auprès des hommes politiques, qui soit par naïveté, soit par incompréhension ou même pour d’autres raisons s’opposent, par exemple, au développement de logiciels libres qui pourrait rapporter à la France… Enfin, je vais prendre simplement le chiffre que coûte Microsoft à la France chaque année : 1,5 milliard de dollars pratiquement sans impôts. Donc, voilà, on a des choses extrêmement puissantes de ce côté‐
là. Je voudrais savoir si vous avez bien pris en compte ce domaine‐là qui est une source d’économies considérables en France et qui développe aussi des économies locales auprès des personnes, très importante. Jean PETAUX Merci. Troisième question. Emmanuel GENET Oui, bonjour. Emmanuel GENET, trésorier d’une association de baseball en Aquitaine. Donc, association sportive. Là par rapport à votre intervention, si j’ai bien compris, on est plus ou moins dans les associations, nous tous, archaïques, donc on a un petit peu… un mauvais, euh… Et là, c’est savoir pour vous comment on doit… Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 21 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean PETAUX Quand vous dites « Si j’ai bien compris », Monsieur, je pense que vous ne sous‐entendez pas que vous avez compris juste ? Emmanuel GENET Oui, voilà. Enfin, personnellement, je suis d’accord avec vous sur le fait qu’il faut changer tout ça. Mais, à l’heure actuelle, quels sont les moyens pour faire pression, pour soit aller vers le privé ou soit améliorer nos rapports par rapport aux services publics ? Jean PETAUX Alors, merci beaucoup pour ces 3 questions. Jean‐Louis, 3 questions d’une certaine façon assez révélatrices, justement, de la dimension du kaléidoscope dont vous avez parlé. Qu’est‐
ce que vous pouvez dire – ce n’est pas facile forcément de faire un peu la synthèse, vous pouvez répondre au coup par coup bien sûr ‐ sur ces 3 interrogations qui révèlent bien d’une certaine façon les questions qui se posent à ce carrefour des âges associatifs. Jean‐Louis LAVILLE Je pense qu’il ne faut pas limiter cette question de la subvention aux associations parce que sinon on a l’impression d’être toujours en train d’être dans le misérabilisme. Enfin, il faut quand même arriver à voir qu’aujourd’hui les secteurs les plus subventionnés sont parfois les secteurs marchands. Je ne fais pas un dessin, puisque vous le connaissez mieux que moi, sur les fonds que l’on a pu dégager pour sauver les banques. Mais, prenons aussi au niveau régional. Nous, on avait fait une étude au niveau d’une région sur là où va l’aide au développement économique. Et en fait, on voyait qu’elle allait principalement à l’économie marchande, ce qui se manifestait par des effets d’aubaine, des effets de substitution sans, véritablement, des résultats probants en termes de création d’emplois nouveaux. Donc, est‐
ce qu’il ne faut pas aussi avoir une réflexion sur non pas le fait que le social est exempt parce que ça on a compris, ça c’est vrai, mais aussi sur « Comment on peut réaffecter aujourd’hui des sommes sur le développement économique pour permettre des formes d’activité socioéconomiques qui sont utiles aux populations, qui sont utiles aux territoires et qui vont permettre d’avoir des emplois non délocalisables ? ». Parce que si vous regardez certaines régions, j’ai regardé un peu la Lorraine, les dizaines de milliards qui ont été investies pendant 20 ans pour attirer les entreprises, il y en a plus une seule qui est en Lorraine aujourd’hui. Donc, ça veut dire quoi du point de vue des subventions et des financements publics ? Je crois que nous sommes toujours en train de nous mettre en position défensive en disant « Nous avons besoin d’un peu plus d’argent ». Mais arrêtons de nous mettre dans cette position. Les gens qui rackettent les fonds publics, ce n’est pas les associations. (applaudissements) Donc je suis d’accord sur le fait que les associations doivent rendre compte, ça c’est tout à fait légitime parce qu’à partir du moment où on a accès à des financements publics, il est légitime que l’on rende compte. Mais, arrêtons de nous mettre dans une position perpétuelle d’auto justification. Et on pourrait prendre d’autres exemples. On vient de faire une étude européenne sur les entreprises sociales d’insertion. Certains de ces managers de l’insertion qui se définissent en disant « Moi, je suis un vrai entrepreneur, je ne suis pas un Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 22 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » assisté, je suis complètement sur le marché », vous regardez la réalité de leur compte de résultats, ils sont sur des financements publics ou parapublics à 70 %. Donc faisons correspondre la réalité de l’économie avec les représentations que nous en avons et, à ce moment‐là, on va se rendre compte que parfois l’investissement associatif n’est pas si coûteux qu’on veut le dire au prorata d’autres formes d’investissement. Mais, ça suppose que l’on sorte de la case du social et qu’on ait aussi une capacité à réinterroger où passe l’argent qui est fait pour le soi‐disant développement économique. Je crois que là il y a vraiment des interrogations qui doivent être des interrogations citoyennes et que ce terrain a été un petit peu déserté. Et il me semble qu’il peut, tout à fait, y avoir des activités d’utilité sociale qui ont besoin d’un financement permanent de l’ordre de 20 à 30 %, par exemple. Et si elles arrivent à avoir 70 % de ressources marchandes et 30 % de ressources publiques, on va arriver à un jeu à somme positif pour tout le monde, y compris pour les financeurs. Donc, faisons vraiment des calculs économiques et ne nous contentons pas de ces clichés éculés selon lesquels, par exemple, seule l’économie de marché crée de vrais emplois et crée de la vraie richesse. C’est ce que l’on entend dans nos médias encore tous les jours et tous les matins et tous les soirs alors que cette représentation de l’économie est empiriquement fausse. Donc, essayons de regarder cela pas simplement en demandant au secteur associatif de toujours plus se justifier, mais en demandant à tous les acteurs socio‐économiques de se justifier à partir du moment où ils ont accès à des financements publics ou parapublics. Jean PETAUX Je me permets de vous interrompre là Jean‐Louis parce que, pour relayer et relancer, la question de notre ami, elle montre aussi que tout n’est pas question d’économie, tout n’est pas qu’une affaire, on va dire de financements. La question qu’il pose, si j’ai bien compris, c’est « Finalement on peut être dans une motivation associative qui se heurte à défendre le conservatisme, à défendre des positions acquises où, d’une certaine façon, la pression va bien au‐delà de la seule dimension financière ou économique ». Si j’ai bien compris. C’est un peu la question de notre ami aussi sur une association sportive, de loisirs, etc. Qu’est‐ce qu’il faut faire finalement parce que finalement, vous êtes certes trésorier, mais votre interrogation va bien au‐delà finalement des moyens matériels et financiers, si j’ai bien compris. Jean‐Louis LAVILLE Alors, sur ce que vous disiez, il me semble qu’on ne parle pas simplement d’économie, mais on parle aussi d’économie parce que je crois que l’économie, ce n’est pas simplement le marché. Et en fait, ce que vous désignez aussi par rapport aux logiciels libres, c’est le fait que dans une économie de la connaissance, dans une économie immatérielle, dans une économie de services, d’une certaine façon l’intelligence collective est une ressource essentielle et que les gens qui ont fait les logiciels libres, ils se sont mis ensemble, justement, à partir de la volonté d’aller dans une construction coopérative. Et ça, je crois que c’est un aspect de l’économie d’aujourd’hui. Si je reprenais les termes de Polanyi que je citais tout à l’heure, il montrait très bien que dans toutes les sociétés humaines l’économie ce n’est pas seulement le marché, c’est aussi la redistribution. Aujourd’hui, la redistribution publique c’est à peu près 54 % de notre économie totale en France. Mais, il y a aussi un troisième élément, celui sur lequel vous mettez l’accent, c’est celui de la réciprocité, c’est‐à‐dire qu’il y a des comportements humains qui sont indissociablement démocratiques et économiques au sens où ils ont fondés sur cette intercompréhension et sur cette volonté de construire des Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 23 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » choses ensemble. Et là, je crois que vous avez raison d’insister sur l’exemple du logiciel libre. Je pense qu’on pourrait prendre d’autres exemples. On a essayé de faire un dictionnaire de l’autre économie avec nos collègues d’Amérique et d’Europe pour montrer, justement, la richesse des pratiques qu’il y a aujourd’hui dans le monde associatif et comment il est nécessaire et important d’intégrer un certain nombre d’émergences associatives qui ont eu lieu dans la période récente. Alors, après, comment on peut changer ? Ça je vais avoir du mal à vous répondre en 5 minutes puisqu’on vient de publier un ouvrage qui s’appelle « L’association, sociologie et économie » où on essaye de prendre au sérieux cette question. Mais, c’est quand même le fruit d’une vingtaine d’années de travail et de plus de 200 études de cas dans différentes associations. Donc, c’est difficile de résumer ça en 5 minutes. Ce que je veux dire c’est que, si on considère véritablement l’hypothèse que j’ai formulée, c’est‐à‐dire que l’association n’est pas une entreprise un peu amateur et n’est pas un service public au rabais, à ce moment‐là ça veut dire : « Quelle méthode de gouvernance et quelle méthode de gestion sont appropriées à l’association ? ». Et si on veut sortir, par exemple, des écueils de ce que j’appelais tout à l’heure les scénarios 1 et 2, je crois qu’il faut qu’on ait des outils, on a essayé d’en formuler quelques‐uns dans ce livre. Une association, ce n’est pas simplement une organisation, ce n’est pas simplement une production de biens et services, c’est aussi toute une histoire, une association. On a travaillé avec certains acteurs associatifs, je pense à l’ARI, je pense à RENOVATION avec ces méthodes‐là. Comment arriver à reconstituer ce qu’est une association en intégrant, justement, toute son histoire, la richesse de son histoire, les logiques qui se sont constituées dans son histoire parce que moi je suis sûr d’une chose, là pour avoir observé un certain nombre d’études de cas, c’est que quand vous greffez des outils managériaux sans tenir compte de l’histoire de l’association, la greffe ne prend pas parce que le véritable secret de la gouvernance et du management associatif c’est d’arriver à trouver des outils qui sont cohérents avec ce qui s’est joué dans l’histoire, avec le système social tel qu’il existe dans l’association donnée. Donc, tous les outils ils sont contextualisables. Et donc, vous n’avez pas la recette magique qui pourrait vous dire « Voilà, comment il faut faire ». Ce qu’il faut faire, je crois, c’est essayer d’appréhender le patrimoine historique de votre association, la manière dont elle s’est constituée, les rapports qui se sont faits entre les gens, essayer de synthétiser tout cela et de voir en fonction de cette histoire quels sont les devenirs possibles parce que ce que je faisais au niveau général, on peut le faire aussi au niveau de chaque association. On a travaillé avec des associations à faire une sorte de diagnostic de ces associations et ensuite de faire des scénarios prospectifs, justement, pour voir vers quoi les gens veulent aller parce que vers où aller ça sera jamais un extérieur qui pourra le dire, lui il pourra donner des éléments de repérage, mais c’est toujours les acteurs eux‐mêmes de l’association qui vont le décider. Jean PETAUX Alors, on va reprendre des questions dans la salle. Emmanuel BAYLE Juste apporter, si je peux, un complément de réponse très rapide. Je crois que tout dépend de l’articulation qu’a rappelée tout à l’heure Jean‐Louis LAVILLE entre projet, organisation, financement et finalement quelle réussite vous avez. Parce que, Madame qui représente effectivement une association qui fait du déménagement solidaire, si j’ai bien compris, si elle Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 24 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » emploie des personnes en insertion, si elle s’adresse à des personnes qui sont elles‐mêmes exclues du marché du déménagement, eh bien quand on regarde… Effectivement, elle prend un salarié en insertion qui, s’il est chômeur, coûte beaucoup plus à la collectivité que s’il est en insertion. Si on regarde l’impact, ces gens‐là ils ne peuvent pas déménager sinon ça fait tourner une économie. En fait, son impact économique en termes d’utilité sociale, il est fort. Donc, son projet, il est socialement utile, il est mené d’une manière qui est aussi socialement utile, donc il y a une vraie différenciation par rapport à une entreprise classique qui est sur ce marché‐là. C’est ça la clé qu’il faut arriver à faire ressortir en évaluation vis‐à‐vis de vos financeurs, qu’ils soient effectivement publics, privés… du mécénat c’est aussi des fonds publics, etc. Et pour Monsieur, juste une dernière réponse, puisque tout dépend du projet. Si votre projet c’est de vous faire plaisir avec des amis au baseball et que vous soyez une bande de copains, eh bien, c’est super. Si votre projet, c’est d’éduquer des jeunes par le baseball, peut‐être que ça peut justifier des subventions, peut‐être que ça peut justifier des aides diverses, etc. Tout dépend et il faut, je crois, être exigeant pour revisiter son projet : à quoi on sert finalement et qu’est‐ce qu’on crée comme richesses et comme valeurs, c’est ça la question, et qu’est‐ce qu’on veut faire ? Jean PETAUX Merci Monsieur BAYLE. Avant que le micro reparte dans la salle, j’en profite pour lire une question qui va exactement, je crois, dans le sens de nos 2 interventions et 2 réponses là. Alors je ne cite pas l’association pour ne pas gêner, mais la personne, je pense, se reconnaîtra. Elle dit, je crois que c’est une dame, une présidente : « Je viens surtout pour écouter car il n’est jamais trop tard pour apprendre. Je considère que les associations sont indispensables, que l’aide aux devoirs pour les petits enfants 6‐12 ans qui sont en retard en classe est une bonne action de la part des adultes et je poserai une question certainement sur le devenir du bénévolat en général ». Et là, on voit, par exemple… Jean‐Louis vous évoquiez, ce qu’on appelle « la motivation institutionnelle ou associative », ça rejoint ce que vient de dire Monsieur BAYLE en disant « À chaque association d’une certaine façon, ses couleurs ». La question du bénévolat est abordée en quatrième de couverture de cet ouvrage que je recommande ‐ c’est le tout dernier écrit, co‐publié avec Renaud Sainsaulieu avant sa disparition, ça reprend le livre de 97 très complété – « L’association ‐ Sociologie et économie » vous dites à Pluriel « près d’un français sur 3 de plus de 15 ans est bénévole ». Et là, on est dans quelque chose qui est tout à fait essentiel, dans l’investissement personnel. Voilà, je voulais faire part d’une question qui avait été posée en amont du forum. Dominique MILLET Je me présente d’abord, Dominique MILLET, président d’une association, « Association internationale de Recherche en Instruction Spécialisée de la santé et du social ». Je précise tout de suite pour que vous compreniez bien ma question, c’est que nous ne recevons aucune subvention ni du Conseil général ni d’un autre organisme territorial. Ça met à l’aise. Je suis d’ailleurs trésorier d’une autre association qui reçoit des subventions, mais je ne parlerai pas de celle‐là. Ce qui m’a intéressé dans votre travail, c’est 2 choses. D’abord, le point de vue historique et c’est vrai qu’on oublie quelquefois, et c’est très intéressant, j’avais travaillé là‐dessus, il y a longtemps, sur l’époque du solidarisme, qui est quand même une époque passionnante en termes historiques pour la construction du système associatif. Ma Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 25 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » question va venir ici. Vous avez proposé 3 scénarios. On l’a bien compris dans votre exposé, vous ne considérez pas que ces 3 scénarios sont équivalents, en tout cas en termes de valeurs. Merci, Monsieur BAYLE, d’avoir prononcé pour la première fois le mot de « valeurs » parce que c’est important quand on travaille pour des associations de se dire : « Au fond quelles sont les valeurs que nous défendons ? ». Alors, maintenant, la question que je poserai, ce n’est pas à vous, Monsieur LAVILLE, que je la poserai, mais c’est au Département qui propose des subventions à un certain nombre d’associations. Par rapport à ces 3 scénarios, comment se situe le Département et quelle optique va‐t‐il prendre ? En particulier, cela pose la question de savoir comment est‐ce qu’on évalue les associations auxquelles on offre des prestations. Dernièrement, mon association a commencé à faire un audit pour une autre association du Département qui dépend à 100 % du département et ça s’est très mal passé parce que ces gens disaient « Nous refusons de rendre des comptes à notre financeur », qui les finance à hauteur importante. Et bon, ça s’est arrêté là. Aux décideurs, par rapport à cela, est‐ce que vous avez une idée… Jean PETAUX Matthieu, tu souhaites répondre maintenant ou à la fin dans la synthèse, comme tu veux ? Matthieu ROUVEYRE Un peu plus tard. Jean PETAUX Un peu plus tard. Donc, on a bien compris votre question. Juste une précision, si vous voulez garder le micro, vous dites que l’association que vous avez présentée au début n’a pas de subvention du Conseil général, c’est parce que vous n’en avez pas demandé ou parce que vous n’en avez pas obtenu ? Dominique MILLET Nous n’en avons pas demandé. Jean PETAUX D’accord. C’était juste pour préciser. Michèle PERSONNE Oui, Michèle (PERSONNE 01:36:00). Donc, présidente d’une association qui s’occupe de l’accompagnement dans le projet de vie de personnes déficientes mentales et dans leurs loisirs de tous les jours. Moi, ce que je voulais aussi rappeler c’est ce rapport qu’il y a entre les financeurs publics et la taille des associations, la motivation profonde de tous les bénévoles dans ces associations, même si elles ne sont pas très importantes, et le manque d’intérêt que peut apporter le milieu public au travail qui est fait par ces bénévoles. C’est souvent une démotivation profonde qui se met en place dans les associations, quelles qu’elles soient par le peu de reconnaissance et je dirais même de respect du travail énorme qui est fait par les bénévoles. Et aujourd’hui, au bout de 25 ans de bénévolat dans ces associations, quand on parle de passer un peu le relai quand même, plus personne aujourd’hui ne veut prendre le relai parce qu’il y a un travail phénoménal qui est fait et que les gens n’ont plus envie de faire et ne sont même pas pris en compte par les pouvoirs publics. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 26 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Une grosse difficulté également, c’est de trouver des financements privés parce que, justement, c’est un secteur qui n’est pas porteur pour le monde commercial. Jean PETAUX Merci Madame. Andrée JOLLET Andrée JOLLET, Solidarité Paysans Gironde, une association qui existe depuis 6 ans. Nous accompagnons les agriculteurs en difficulté. On a parlé tout à l’heure de pas mal de viticulteurs qui sont au RSA. Jean PETAUX Le Président MADRELLE, oui, tout à l’heure, au début. Andrée JOLLET Voilà, il en a parlé. Donc, nous accompagnons ces personnes‐là. La question que je pose c’est d’abord, et je rebondis sur ce que vient de dire la dame, du coup, la valorisation du bénévolat. Parce que je trouve que derrière, il y a une économie induite. Il y a du professionnalisme, il y a peut‐être… on a dit « amateurisme » à un moment donné. Je crois que ça c’est important, de valoriser parce qu’on a tous des compétences dans ces bénévolats : l’aide aux scolaires, etc. Donc il y a ça à valoriser. Nous, en tant qu’association, souvent on fait une ligne « Valorisation du bénévolat » en fonction des compétences de chacun. Ça, je crois que c’est important. Ensuite, ce que je souhaite dire aussi c’est que nous sommes 5 associations du monde rural agricole où on est en train de faire un travail, justement, de mutualiser nos compétences. Alors, je ne sais pas si on est dans le scénario 2, mais il faudra peut‐être éviter qu’on soit dans un cahier des charges qui nous contraigne à des choses puisqu’on est dans une démarche innovante. On est en train de faire ce parcours avec 5 associations et je crois que de mutualiser ‐ justement, si on ne veut pas disparaître par rapport à un manque de financement ou un manque de bénévolat ‐ et que derrière on va laisser des personnes qui ont besoin d’être aidées, accompagnées, etc., parce que là aussi il y a de l’économie. Si des artisans, des commerçants ou des agriculteurs ou toute économie disparaît par manque d’accompagnement de ces personnes‐là puisqu’il y a plus la solidarité nationale qui existe, on est complémentaire des organismes professionnels agricoles, etc. Jean PETAUX On va vous demander d’arrêter là. On va vous voir dans le film tout à l’heure. Alors, on ne va pas vous voir 2 fois, une fois maintenant au micro et puis dans le film. Vous allez ré‐
intervenir tout à l’heure. Merci, merci beaucoup, on a bien compris la problématique de la valorisation. Il faut que la parole circule sinon autrement c’est toujours un peu le blocage de la parole. D’autres interventions avant de… Il y a une question internet qui est tout à fait passionnante. Merci pour votre témoignage, Madame. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 27 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Dakiri SAWADOGO Merci beaucoup. Je m’appelle SAWADOGO Dakiri. Je suis le président de l’Association Trait d’union des jeunes burkinabè et président du Réseau Ouest Africain des Jeunes Leaders des Nations Unies. J’ai été très impressionné par les différentes interventions et je crois qu’en Afrique également nous avons des situations pareilles et je voudrais savoir, puisque j’ai un peu retenu ce qui a été dit sur l’Amérique du Sud, je voudrais savoir, dans le contexte africain, quelle analyse vous faites essentiellement ? En ce qui concerne nos associations, vous savez que nous sommes essentiellement tournés vers des financements extérieurs et nous voulons aussi savoir au‐delà de tout cela comment une association en Afrique peut s’auto valoriser en termes d’économie sociale. Est‐ce qu’il y a possibilité également en Afrique que ces associations‐là puissent évoluer vers l’économie sociale ? Et quelles peuvent être les pistes de solutionnement dans ce sens ? Jean‐Louis LAVILLE Sur la réalité africaine, moi je n’ai pas les compétences pour m’exprimer. Simplement, ce que l’on essaye de mettre en place là, qui a commencé ‐ j’en parle parce que ça a commencé la semaine dernière ‐ c’est une coopération avec l’Université de Pretoria puisque nous avons réussi, avec les collègues Sud‐Africains, à créer un programme qui s’appelle Human Economy à l’Université de Pretoria dans lequel il y a des bourses pour des étudiants africains qui ont fait déjà une thèse ou qui font une thèse sur ces sujets‐là, et donc, on espère apprendre beaucoup, dans les temps qui vont venir, de cette coopération. Je pense que, par rapport à la question que vous posez, il va y avoir une rencontre qui va être intéressante aussi du 6 au 8 mai à Genève, qui est la première rencontre de l’ONU sur l’économie sociale et solidaire parce qu’il va y avoir de très nombreuses communications qui vont venir d’Afrique. Je pense que les questions que vous posez sont tout à fait essentielles et j’espère être en mesure de plus dialoguer sur cette question dans quelques temps, mais là pour l’instant je n’ai pas les éléments qui me permettraient de vous répondre. Sur ce que vous disiez à l’instant, je pense qu’il est intenable pour des associations, à partir du moment où elles ont un financement public, de refuser des formes d’évaluation. Je ne vois pas la légitimité démocratique qui amènerait à se défausser vis‐à‐vis d’une évaluation. La vraie question qui se pose c’est celle de : « Quelles sont les méthodologies d’évaluation qui vont permettre, justement, de rendre compte des originalités associatives et de ne pas les rabattre comme de multiples procédures d’audit sur les modèles importés. Jean PETAUX Et ça repose la question de la valorisation du bénévolat. Jean‐Louis LAVILLE Oui, exactement. Et c’est ce que j’allais dire à l’instant, c’est que la question de la valorisation du bénévolat est incluse là‐dedans. Sur ce que vous disiez aussi, Madame, je pense qu’on a un exemple dans le livre‐là sur l’association sociologie économie où on prend une association qui était considérée comme exemplaire pour ses partenaires publics parce que c’était une énorme association en Bretagne, qui intégrait tout un ensemble d’activités qui avait absorbé des associations, qui avait une taille énorme et on essaye de voir à travers Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 28 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » l’étude de cas pourquoi cette association s’est écroulée en 6 mois et pourquoi il y a eu des abus de biens sociaux. À un moment donné, si vous voulez, quand on fait des grands ensembliers associatifs il n’y a aucun contre‐pouvoir démocratique et donc là il y a moins de contre‐pouvoir démocratique que, d’une certaine façon, dans les sociétés de capitaux. Donc, je crois que le contre‐pouvoir démocratique, il est dans le fonctionnement interne de l’association et cette course à la taille parfois, peut produire des effets pervers, mais on peut voir l’ARC aussi ou un certain nombre de scandales d’associations qui, justement, ont perdu toute assise démocratique et, de ce fait‐là, sont devenues la propriété de clans, de gens qui ont privatisé des associations et on sait que ça existe. Donc, et je crois qu’il ne faut pas être idéaliste sur les associations. Autant je ne m’associe pas parce que c’était une image dont je rendais compte, je ne m’associe pas à l’idée d’amateurisme qui est trop renvoyée aux associations, autant je pense qu’il faut analyser les associations dans leur complexité. Et il me semble que dans les scénarios, il y a aussi des risques associatifs qui sont liés à ce pseudo contrôle technocratique que l’on veut mettre en augmentant la taille des associations parce que je crois que, justement, l’idée de la mutualisation qui est pratiquée aujourd’hui par un certain nombre d’associations, et l’idée de types de réseaux qui ne reposent pas sur l’intégration et qui ne reposent pas sur la fusion est une idée à fouiller. Du côté des gros ensembliers associatifs, il y a eu, je crois, des alertes qui devraient nous rendre vigilants. Jean PETAUX Alors, je me permets juste un petit intermède. Si vous ne voulez pas louper votre train, il faut partir maintenant. Si vous pouvez me rendre ma montre aussi en même temps. Et puis, merci, on peut applaudir Jean‐Louis LAVILLE. Et on va reprendre une dernière question. Emmanuel BAYLE réagira après. Jean‐Louis LAVILLE Je vais passer la parole à Emmanuel. Je voulais juste vous demander de bien vouloir m’excuser parce que pour des raisons de santé, je ne peux pas rester assis et debout très longtemps cet après‐midi. Et donc, je vais devoir partir. Mais, j’aurais vraiment voulu assister à la fin de la rencontre et à l’intervention d’Emmanuel puisqu’on avait prévu de dialoguer ensemble dans la partie finale. Donc je vous fais part de mes regrets, je vous demande de bien vouloir m’excuser et je suis sûr que la suite du débat va être passionnante. Jean PETAUX Au revoir. Merci beaucoup. Emmanuel BAYLE pour enchaîner et puis après, on prendra 2 autres questions. On arrêtera avant la pause. Emmanuel BAYLE Une question qui était, me semble‐t‐il, centrale pour beaucoup d’associations, c’est la crainte de la disparition du bénévolat devant les charges administratives qui incombent aux bénévoles et aux dirigeants. Je crois que la réponse de Jean‐Louis LAVILLE tout à l’heure, il faut l’entendre, c’est « Non », « Non, ce n’est pas toujours à nous de le faire ». Ça veut dire qu’il faut s’organiser dans les associations pour libérer du temps utile aux dirigeants, aux bénévoles qui ne sont pas venus pour faire des tâches parfois administratives ou de comptabilité, etc. Il faut s’organiser avec des groupements d’employeurs solidaires ou autres, etc., pour libérer du temps utile aux dirigeants qui seront, de moins en moins, des Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 29 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » dirigeants comme beaucoup l’étaient, c’est‐à‐dire des gens qui restent 40 ans à la tête d’une association, en portant le fardeau, en travaillant 70 heures par semaine pour une association. Ça n’existera plus. Il faut s’organiser pour pouvoir libérer du temps utile aux dirigeants pour qu’ils puissent se consacrer aux projets associatifs et à faire des choses qui leur semblent utiles et moins sur des contraintes administratives, qui doivent peser, pour moi, sur des salariés qui sont en insertion ou autres, etc. puisque la réponse n’est pas seulement marchande ou publique d’accompagnement. Voilà. Jean PETAUX Alors, merci. Denise GRESLARD, je crois, veut poser une question. Denise GRESLARD Denise GRELARD, je suis ici présidente d’une association qui s’appelle L’Éveil Habitat Jeunes, qui gère un foyer de jeunes travailleurs sur Bordeaux. L’intervention de Monsieur LAVILLE m’a absolument intéressée d’autant plus que notre association s’est trouvée face, justement, à devoir prendre des positions sur les 3 scénarios qui ont été évoqués il y a 2 ans, ce qui a nécessité beaucoup de débats. Cela a abouti d’ailleurs à l’éclatement un petit peu de notre conseil d’administration et donc à un requestionnement sur notre projet. Nous avons donc décidé de faire une évaluation, en tous les cas de demander dans notre réseau, le réseau de l’URHAJ et le réseau de l’UNHAJ, réseau régional des habitats jeunes et national des habitats jeunes… et cela nous a permis, en tous les cas, de nous repositionner pour savoir vers quoi on voulait aller. Ce n’est pas facile, bien sûr. Cela prend du temps, mais ça a été quand même source pour nous tous, bénévoles, mais aussi pour l’équipe des salariés, de se reposer des questions, de retravailler ensemble et de s’interroger sur nos objectifs et la place des usagers. Nous avons travaillé aussi, puisque c’était un peu dans l’ère du temps, sur les projets de mutualisation. On a refusé une mutualisation venue avec une méthodologie qui ne nous convenait pas. Nous nous sommes rapprochés d’une autre association, Foyer Pour Tous, qui est aussi sur Bordeaux, et nous essayons d’explorer les différentes possibilités parce que, comme l’a dit Monsieur LAVILLE tout à l’heure, nous avons des histoires différentes. Nous ne voulons pas abandonner ces histoires qui ont leurs valeurs, qui ont fondé aussi ce qu’est l’association, ce qu’elle représente. Alors, ce n’est pas facile, on va essayer de se faire aussi accompagner. Mais en tous les cas, jusqu’à présent on n’a pas tout à fait exploré toutes les pistes. Pour ce qui est de la valorisation du bénévolat, il me semble – et peut‐être que vous pourrez nous répondre ‐ qu’il y a dans les propositions ministérielles des possibilités de faire passer en VAE des expériences de type bénévolat et, en tous les cas, que ça puisse devenir des références professionnelles, y compris dans un CV. Est‐ce que vous pourrez nous en dire un peu plus ? Jean PETAUX Ça je peux me permettre de répondre au plan universitaire, Denise. C’est tout à fait vrai. Enfin, ça existe tout à fait. Et ça fait partie des éléments de la validation des acquis de l’expérience puisque c’est ça la VAE. Une dernière remarque, intervention, question ? Madame ? On fera répondre Emmanuel BAYLE et puis je crois que Matthieu ROUVEYRE, président de la commission Vie Associative, Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 30 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » va conclure cette première mi‐temps, on va dire, ce premier tempo avant qu’on fasse une petite pause et qu’on reprenne, si possible, à 16 heures 15. Madame ? Une intervenante Oui, bonjour. Alors, j’ai 2 casquettes. Je suis présidente d’association, une amicale laïque et je suis aussi ce qu’on appelle « déléguée du Préfet », c’est‐à‐dire que je m’occupe de politique de la vie dans les quartiers difficiles. Donc, depuis que j’ai pris mes fonctions, je suis en appui aux associations des quartiers et, depuis que j’ai pris mes fonctions, les baisses de subventions sont énormes. Donc, je les vois toutes en train de s’écrouler et on doit prendre des décisions extrêmement difficiles. Donc, il y a 2 choses que je voudrais… Jean PETAUX Mais, vous ne pensez pas que c’est à cause de vous ? Une intervenante On n’est pas tout seul, heureusement, je suis avec le Conseil général, je suis avec le Conseil régional, la ville de Bordeaux. Donc, ce que je voulais dire, c’est que ce scénario 2, moi je le vis en plein, c’est ça. C’est‐à‐
dire qu’on demande à des associations maintenant d’oublier leurs projets pour remplir des dossiers. Et moi, je sais sur le terrain le boulot qu’elles font. Donc, je suis en train d’essayer de défendre ces assos avec pourtant une casquette qui est une casquette État. Donc, il y a des moments où je suis assez mal positionnée. Au niveau de l’accompagnement, je trouve qu’il est extrêmement important d’accompagner les associations et je trouve que ce n’est pas suffisant. Deuxièmement, c’est la bascule dans ce troisième modèle. Il y a ici ‐ j’entends parler de Remuménage, que je connais comme association puisque on la connaît sur nos territoires ‐ je vois dessous là d’EcoSolidaire, qui est une association que je connais bien aussi et qui n’arrive pas à faire cette bascule sur le troisième modèle dans le champ de l’économie sociale et solidaire, d’autant plus que nous, nous avons des publics en très grande difficulté. Pour arriver à attirer des financeurs, que ce soit des financeurs publics comme des financeurs privés, c’est extrêmement compliqué. Donc, moi ça me fait rêver ce qui vient d’être dit sur le troisième modèle, mais je peux vous garantir que pour le moment on n’y arrive pas. Jean PETAUX Jean‐Louis LAVILLE n’est plus là pour répondre, il est parti. Peut‐être Emmanuel BAYLE, un mot ? Ou Matthieu directement puisque, d’une certaine façon, les remarques qui viennent d’être faites renvoient, effectivement, à ce que Jean‐Louis LAVILLE a indiqué tout à l’heure : il convient que les acteurs, les responsables publics, les chercheurs réfléchissent ensemble à cette économie plurielle d’un côté et démocratie. Une remarque qui a été faite avant le forum par un président d’une association ‐ je peux citer l’association d’ailleurs « SOS Victimes de la route » ‐ qui dit ceci « Une démocratie sans association libre m’apparaît comme une dictature à l’horizon », belle phrase qui revient d’une certaine façon sur l’impératif associatif dans la dimension démocratique. Matthieu, est‐ce que tu veux peut‐être en, en quelques mots conclure cette première partie. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 31 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Matthieu ROUVEYRE Très rapidement et peut‐être pour répondre à une interpellation, mais qui sans doute reflète des préoccupations que beaucoup partagent dans cette salle. Et sans, bien entendu, déflorer ce que dira tout à l’heure Jean‐Marie DARMIAN, notre vice‐président aux finances. Il y a quand même 2 grandes catégories d’associations : il y a des associations, effectivement, qui ont un mandat de la part du Conseil général pour travailler sur un certain nombre de sujets. Ces associations n’ont quasiment pas de marge de manœuvre, à part évidemment la manière dont elles organisent les missions de services publics qu’on leur confère. C’est, par exemple, les missions de prévention de la délinquance, etc. Celles‐ci, je n’en parle pas parce qu’elles sont sur des champs très spécifiques. Maintenant, s’agissant de toutes les autres associations. Pour répondre à cette question, le Conseil général vient à les évaluer, à leur demander des comptes. Il faut peut‐être d’abord rappeler qu’il y a 2 grandes manières pour le Conseil général d’aider les associations : il y a la subvention et puis il y a ce qui n’est pas de la subvention. Je ne parlerai pas de ce qui ne relève pas de la subvention, mais vous savez de quoi je parle, c’est les prêts de salles, les prêts de matériels, c’est l’aide logistique, c’est parfois l’aide intellectuelle, l’accompagnement de diverses associations, les DLA, par exemple, certaines associations connaissent. Et ensuite il y a la subvention. Il existe trois grands types de subventions. Il y a la subvention de fonctionnement qu’évidemment vous préférez parce que ça vous laisse une certaine latitude pour agir au quotidien dans l’objet social qui est le vôtre. La deuxième subvention est la subvention de projets : vous avez un projet, le projet nait de l’association et vous nous le présentez pour qu’éventuellement il soit financé, souvent plutôt cofinancé. Et puis, il y a le troisième élément que je ne veux pas rattacher au scénario 2, mais qui évidemment je dois évoquer, qui est l’appel à projets. C’est‐à‐dire que le règlement d’intervention est proposé par le Conseil général et des associations décident ou non d’y répondre. Alors, quand je ne veux pas la rattacher au scénario 2, c’est que je pense qu’il y a quand même, dans ce troisième volet de subvention, la possibilité pour les associations d’innover. L’année dernière, nous avons lancé un appel à projet « Lutte contre les discriminations » parce qu’il nous semblait important que sur un certain nombre de sujets et parfois en sortant finalement des associations qui ont l’habitude de travailler sur ce champ, nous avions envie de stimuler quelque chose. Il faut voir que pour nous, ce n’est pas quelque chose que nous avons répété. C’était un one shot sur ce thème‐ci. Nous avons travaillé sur l’intergénérationnel. Mais, l’idée c’était peut‐être de lancer des stimulations et ça a plutôt bien fonctionné. Il faut voir quand même que ces appels à projets ne viennent pas prendre des financements sur le fonctionnement ou vos propres projets. C’était une ligne à part que nous avons réussi... alors, évidemment, et Jean‐Marie le dira, toutes les lignes ont baissé. Nous avons réussi évidemment à la conserver un petit peu parce qu’on a eu aussi le sentiment que c’était quelque chose d’intéressant dans notre partenariat avec les associations. Et dernier élément, pour répondre très concrètement : « Comment se passe l’évaluation ? ». Alors, peut‐être ‐ et là encore Jean‐Marie y reviendra ‐ rappeler tout de même que le Conseil général a des compétences légales, que dans le cadre de ses compétences légales, nous Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 32 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » cherchons dans la vie associative, dans le service notamment de la dynamique associative, à rester effectivement dans les grandes lignes que la loi impose au Conseil général. On a parlé de la solidarité, pour la dynamique associative c’est, par exemple, le travail de mémoire, c’est la lutte contre les discriminations, c’est l’accès aux droits, etc. Donc, on essaye déjà dans un premier temps de rester, pour notre service en tout cas, dans ce champ d’intervention. Ensuite, il y a quelque chose d’important qu’il faut avoir à l’esprit, c’est que ‐ et on va rentrer dans le vif du sujet tout à l’heure ‐ tout ce qui est « aide aux associations » est de l’aide facultative. Alors, pas toutes les associations, on en reparlera tout à l’heure, mais pour la plupart des personnes qui sont ici on parle d’aide facultative. Ça veut dire que… Jean PETAUX Facultatives par rapport aux compétences du Conseil général. Matthieu ROUVEYRE Ça veut dire que la loi nous impose d’abord de payer ce qui… Et tout à l’heure le président MADRELLE parlait de « prérogatives régaliennes », c’est‐à‐dire que, par exemple, quand le législateur crée le RSA à la suite du RMI, il dit au département « Payez !». Bon, eh bien, quand nous, on a notre budget, on va devoir d’abord flécher nos financements sur le RSA, sur l’APA, sur les collèges, sur les routes départementales parce que ce sont nos compétences obligatoires. Et après, on va regarder ce qui reste, c’est‐à‐dire plus grand‐
chose maintenant et puis on va voir ce qu’on peut faire dans cette marge de manœuvre. Dites‐vous quand même bien, ici, que c’est extrêmement frustrant pour un élu local d’en arriver là parce que nous sommes d’abord en train de payer des politiques qui ont été décidées par d’autres, c’est‐à‐dire par le législateur. Le législateur décide, imagine des dispositifs et c’est nous, élus locaux, qui finalement avec vos impôts évidemment, les finançons. Mais nous n’avons plus, quasiment plus de marge de manœuvre. Donc, c’est là qu’on se bat et que c’est un combat avec Jean‐Marie DARMIAN pour lui expliquer… Tout à l’heure, quand Isabelle DEXPERT remerciait et faisait un clin d’œil au DGS, c’était pour lui dire « Vous voyez, quand on vous embête, nous, vice‐présidente à la vie associative, au sport, à la culture... Moi, président de la commission Vie Associative, c’est que nous pensons que derrière il y a des choses importantes » et je sais que Jean‐Marie, évidemment, a conscience de tout cela. Il expliquera aussi les arbitrages qu’il est contraint de faire. Mais, nous savons que nous avons intérêt à défendre les associations parce que nous savons ‐ ça a été dit avec avec l’orateur précédent, ce sera dit après moi ‐ que pour nous, elles sont vraiment, ces associations, un outil concret de maillage du territoire. Elles remplissent des missions de service public ou, en tout cas, d’intérêt général. Pour nous, c’est indispensable. Et moi, je vais conclure, avant la pause, pour revenir sur une proposition de Monsieur LAVILLE. Ce qui m’a semblé intéressant dans son propos, c’est cette dimension de coopération inter associative. Aujourd’hui, on n’est pas dans le monde des Bisounours. On est obligé de peser et pour peser il faut s’unir. C’est l’adage : « L’union fait la force » et c’est la raison pour laquelle il y a des associations comme la CEPAD qui ont cette responsabilité‐là. Dans cette confrontation difficile, il faut que les associations se réunissent pour peser parce que ‐ et ça l’a été dit aussi très justement – dites‐vous bien que ce n’est pas parce qu’une association va jouer cavalier seul qu’elle va finalement se sauver au détriment des autres, ça Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 33 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » ne fonctionne pas comme ça. Véritablement, c’est se mettre ensemble sur un certain nombre de combats. Tout à l’heure, Monsieur LAVILLE disait également que les associations, on devait davantage les entendre. Alors, je comprends qu’un certain nombre se dit « Mais attention, moi si on m’entend trop, on va me faire une menace sur les subventions… ». Je pense que le problème est un peu plus global et qu’il faut peut‐être prendre de la hauteur. C’est d’ailleurs l’objet de ce type forum, c’est essayer de voir comment ensemble ‐ parce que le Conseil général s’efforce d’être un vrai partenaire des associations ‐ et je crois qu’ensemble on peut faire bouger les choses. Je crois vraiment qu’il faut les faire bouger au niveau national. Il faut que le Département ait la possibilité de sanctuariser des financements en faveur des associations, en fonction de ses compétences, évidemment, en tout cas très, très reliés à celles‐ci. Mais, ce combat, si nous voulons qu’il soit victorieux, nous ne le mènerons qu’ensemble. Merci. Jean PETAUX Merci Matthieu pour cette réponse très politique, au sens étymologique du mot. On va s’arrêter pour un petit quart d’heure. On va essayer de reprendre au plus tard à 16 heures 20. Vous aurez le plaisir de retrouver notre ami de Solidarité rurale dans un petit film avec d’autres associations, en particulier Promo‐femmes sur Saint Michel. A tout de suite, dans un quart d’heure. Vous revenez vite. Avant d’écouter le Vice‐président aux finances, moment essentiel dans ce forum. Après la clôture de ce forum, et entre les deux Emmanuel BAYLE. Pause Jean PETAUX Bien. Merci de bien vouloir reprendre place. Nous allons, après cette courte pause, entamer la deuxième partie de ce forum. Donc, j’invite les unes et les autres à bien vouloir retrouver leur siège. Voilà. S’il vous plaît, vous allez vous réinstaller dans l’Amphithéâtre Badinter. Quand les gens seront assis, je donnerai éventuellement l’information pour celles et ceux qui sont dans l’Atrium. S’il y a peut‐être un petit peu plus de places assises disponibles, on pourra éventuellement les faire venir, avec l’autorisation du Président de la Commission de la Vie associative. S’il vous plaît. Bien, nous allons entamer cette deuxième partie de l’après‐midi. Je vais faire comme Jean‐
Louis LAVILLE, je vais parler tout doucement. S’il vous plaît. Je précise pour les personnes qui sont dans le hall qu’il y a quelques places assises disponibles dans l’Amphithéâtre Badinter. Donc, n’hésitez pas à nous rejoindre. Je crois qu’il fait plus chaud que dans l’Atrium. Deuxième élément, nous allons commencer par un petit film de 6 minutes qui s’appelle « Regards croisés d’associations » où 3 associations vont s’exprimer. Il n’y aura pas de débat Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 34 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » à l’issue de ce film et on donnera la parole ‐ je le présenterai à ce moment‐là ‐ à Emmanuel BAYLE qui nous vient tout spécialement de Lyon. Et puis, ensuite, il y aura un échange et nous clôturerons le forum. Après la fin du forum, il y aura cette intervention toute spéciale du Vice‐président aux finances qui est assis, je ne sais pas comment là, t’es bien assis ? Ah, oui, d’accord, il fait de la lévitation, Jean‐Marie DARMIAN. On y va pour le film. Merci. Diffusion d’un film Une intervenante Alors, je pense que c’est une reconnaissance de l’utilité de l’association et de leur efficacité, parce qu’elles sont en relation étroite, elles sont sur le terrain, elles sont en relation étroite avec les populations auxquelles elles s’adressent. Un intervenant Pour beaucoup de nos adhérents, le RAMA a été en 97, donc ça commence à être une histoire un peu ancienne et il a été créé par les acteurs de musiques actuelles parce que, justement, ils avaient cette volonté de travailler ensemble, de mieux coopérer, d’améliorer leurs actions à destination des publics et aussi de favoriser le dialogue et de construire un dialogue avec les partenaires publics. Une intervenante Si on parle de médiation, c’est ça. C’est recréer ce lien. Donc, apaiser, éteindre les feux, comme nous le disons. Et dans nos campagnes, je pense que c’est très important de recréer ce lien social, de redonner confiance. Une intervenante Le regard qu’on porte autour de l’agriculteur, c’est de dire « Bon, il ne reste pas tout seul, il faut qu’il s’ouvre ». Donc s’ouvrir, c’est se former pour pouvoir mettre en place un projet, c’est comprendre, c’est retrouver aussi une vie sociale sur le village, des responsabilités peu importe, c’est entraider, témoigner vis‐à‐vis des autres en disant « Je suis passé par cette situation, grâce à Solidarité Paysans ou grâce à d’autres, j’ai pu m’en sortir ». Et ça, je crois que c’est important dans des sociétés très individualistes, etc. C’est recréer du collectif, mais un collectif qui apporte du positif. Un intervenant Ces actions structurantes, ça peut être, par exemple, un travail sur la gestion des ressources humaines et donc la mutualisation d’emploi. Donc, nous avons créé un groupe d’employeurs. C’est un travail sur les coopérations sur l’action culturelle, l’éducation artistique, sur la transmission des savoirs, un gros chantier sur le développement durable, on ouvre aujourd’hui un chantier sur le numérique également. On s’occupe de toutes les problématiques que rencontrent les acteurs de musiques actuelles et on essaye de les résoudre collectivement par la solidarité et la concertation. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 35 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Une intervenante Et nous avons décidé, en fait, de lancer un projet, il y a 2 ans, sur l’éducation des filles et des garçons, même éducation, même chance. Et ce projet a été l’occasion de travailler à travers tous nos ateliers sur la réflexion concernant l’éducation. Le but de ce projet c’était tout simplement de faire bouger les lignes, d’ouvrir les esprits des unes et des autres. Une intervenante La mission de Solidarité Paysans c’est prendre globalement, pas de saucissonner mais de prendre globalement l’aspect famille, exploitation, économique, financier, etc. psychologique aussi. Une intervenante Et à travers ce projet, nous avons été obligés de mettre en place une organisation beaucoup plus transversale. Pour ce faire, si vous voulez, on a été obligé de changer notre façon de gérer l’association dans la mesure où nous voulions être participatifs dans notre approche. Nous avons mis en place un comité de pilotage, en plus du bureau et du conseil d’administration qui existaient déjà, mais aussi un groupe village où étaient présents aussi bien des bénéficiaires que des bénévoles, qui participaient de façon volontariste au projet. Et ce groupe village avait pour vocation de donner son avis sur les actions. Un intervenant Il y a eu des traductions, effectivement, concrètes. La première, ça a été déjà de s’emparer de la norme ISO 26000 qui est un peu technique, bon ça demande un petit effort. Ça a été fait et ça a été fait très vite avec l’objectif de recruter, ce qui est le cas aujourd’hui, de recruter une salariée spécialisée sur cette question et de lancer un chantier de 3 ans, qui est soutenu aujourd’hui par le Conseil régional d’Aquitaine, le service développement durable, autour de cette question de la responsabilité sociétale des organisations. La traduction aussi c’est que, effectivement, quand on commence à s’emparer de cette question‐là, ça réinterroge la gouvernance du réseau, puisque le RAMA est un réseau. On a changé les statuts en juillet 2012, une modification importante qui a déjà permis de reformuler les valeurs communes qui est un élément important, mais qui a aussi permis d’ouvrir une gouvernance collégiale. Et on a aussi rajouté un collège de salariés du RAMA pour se rapprocher des modèles de sociétés coopératives d’intérêt collectif. Une intervenante Ah ben, le futur je crois que c’est une adaptation permanente. Je pense que la société évolue vite. Les difficultés que l’on ressent du fait de la crise touchent particulièrement les gens précaires et je pense qu’il faut que l’on soit toujours à l’écoute. On va probablement devoir un peu élargir notre action. Ce que l’on a réalisé à travers cette ouverture sur les enfants, il va falloir qu’on le confirme probablement. Une intervenante Moi, le mot « solidarité » est important. Ce mot, « solidarité », « fraternité », voilà. Ça, c’est l’avenir. Et mutualisation. C’est‐à‐dire mutualiser les compétences et le savoir‐faire. Mutualiser le savoir‐être et prendre en compte la dignité humaine. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 36 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Un intervenant J’aurais tendance comme ça à reparler de solidarité, mais la question de la solidarité est presqu’un petit peu dévoyée aujourd’hui. Je pense qu’il y a nécessité de la retravailler, de la repenser et de la repenser notamment à partir des textes internationaux qui nous régissent tous, c’est‐à‐dire la déclaration universelle des droits de l’homme et, pour ce qui concerne la culture, la déclaration universelle sur la diversité culturelle, qui posent comme fondamentaux la question de l’égale dignité des êtres humains. Une intervenante La cohésion sociale, on parle de cohésion sociale, territoriale, etc., c’est ça qui est en jeu. Une intervenante D’accepter sans arrêt de se remettre en cause. Un intervenant Cette notion d’écosystème créatif, elle est essentielle. Une intervenante Je crois que les associations ont un rôle très, très important. ‐ oOo ‐ Jean PETAUX Je vais juste dire quelques mots de présentation d’Emmanuel BAYLE qui est Professeur de gestion, Professeur des Universités en Sciences de gestion, Université Jean Moulin, Lyon 3 ; et qui a beaucoup travaillé sur la responsabilité sociétale des organisations. J’ai retrouvé un papier tout à fait passionnant qu’il a publié dans la revue « Politiques et management public » de 2010. Il a fait beaucoup de productions, Monsieur BAYLE, sur la gouvernance des fédérations d’associations chargées d’une mission de service public, le cas des fédérations sportives françaises, qui est un cas tout à fait passionnant. Et en guise de lancement de votre intervention, Emmanuel BAYLE, je voudrais faire référence à une contribution, à un post, comme on dit, qui est arrivé tout à l’heure sur la page Facebook qui a été ouverte spécialement sur le portail du Conseil général de la Gironde, de quelqu’un qui s’appelle SONANT ou SENENT, il se reconnaîtra, qui dit que Monsieur BAYLE est intervenu tout à l’heure sur la mise en valeur du cœur du projet de l’association, et en particulier, vous faisiez référence à l’association de déménagement qui a été évoquée. La question c’est « Est‐ce que, par exemple, dans le cadre de marchés publics ou d’obtention de marchés publics, pour le Conseil général de la Gironde, est‐ce que dans les critères d’attribution éventuels il y a ce qu’on pourrait appeler non pas du quantitatif, mais du qualitatif au sens non pas du mieux disant, mais du « plus intelligent disant », si vous me passez cette expression qui n’a rien de juridique, en termes de valeurs que peuvent apporter, par exemple, les associations. Cela renvoie à la responsabilité sociétale également et je crois que c’est une bonne manière. Merci à ce contributeur sur Facebook de vous lancer, Emmanuel. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 37 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Emmanuel BAYLE Professeur des Universités en Sciences de gestion (Lyon 3) Professeur à l’Université de Lausanne « Responsabilité Sociétale des Organisations : quels changements pour le management des associations ?» Merci. Bonsoir à tous. Je voudrais remercier le Conseil général de m’avoir invité à partager ce moment d’échanges avec vous. Je suis particulièrement sensible parce que c’est un secteur qui m’intéresse énormément, le secteur associatif. Et puis, le Conseil général, je trouve, développe des choses aussi particulièrement innovantes dans le secteur public en tout cas, sur tout ce qui est développement durable, responsabilité sociétale, de l’organisation Conseil général aussi ou de sa coresponsabilité sociétale plutôt. Alors, c’est vrai que c’est un gros mot peut‐être pour certains « responsabilité sociétale ». Lorsqu’on a parlé de l’intervention, c’est vrai qu’on s’est dit « Ce thème, il est peut‐être un peu compliqué, complexe » et ce mot est peut‐être pas très adapté. Très simplement, la responsabilité sociétale des organisations, c’est l’application des principes du développement durable à l’intérieur des organisations, que ce soit des entreprises grandes, petites, moyennes, que ce soit des organisations publiques, que ce soit aussi des organisations associatives. C’est vrai que les organisations associatives ont plus dans leurs gênes, l’idée de contribuer à un meilleur fonctionnement peut‐être de la société que d’autres et c’est peut‐être pour ça que vous dites « Ben, finalement, moi je le fais déjà » et vous n’avez finalement pas tort. La question c’est plutôt un processus : « Est‐ce qu’on peut toujours mieux faire ? Aller un peu plus loin ? » et puis aussi il y a des questions de sens qui sont posées ici. Alors, on est, je crois, en France dans le scénario 3 qu’a dessiné, tout à l’heure, Jean‐Louis LAVILLE. Le scénario 1 est quand même assez anglo‐saxon dans sa culture. Le scénario 2 correspond assez peu à l’évolution, sauf pour quelques associations en France et quelques secteurs d’activités. Et ce scénario 3, pour moi, il exige, effectivement, pour les associations d’affirmer leurs responsabilités sociétales parce que d’autres le font à côté d’elles, des entreprises qui se prétendent aussi entreprises sociales, on le verra, et que c’est aussi un moyen de s’interroger « Est‐ce qu’elles contribuent au mieux‐vivre ensemble, au bien‐vivre ensemble, effectivement ? » et c’est un moyen de se réinterroger sur leurs pratiques de gouvernance et de management, notamment à travers la nécessité d’avoir une capacité d’entreprendre. Donc, on dit que les associations entreprennent autrement à travers cette responsabilité sociétale, etc. qu’elles ont un mode d’entreprendre qui est différent du secteur marchand, qui est différent du secteur public. Et ce mode d’entreprendre, il passe par, effectivement, un noyau dur qui s’appelle le « projet », le « projet associatif », dont on parle beaucoup, mais qu’on doit réinterroger sur les modes d’organisation et de management qu’on a. Alors, c’est dommage, Jean‐Louis LAVILLE n’est pas là mais j’ai pas du tout la même conception que lui du management. Pour moi, le management ce sont des principes, des outils et ils peuvent s’appliquer à n’importe quelle organisation, qu’on soit dans une organisation privée, publique ou associative. Les outils, ils sont ce qu’on en fait, Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 38 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » finalement. Je pense que si ‐ c’est un petit peu le sens de la réponse que j’ai faite à Madame tout à l’heure sur le déménagement solidaire ‐ si on arrive, quand on est une association, à montrer qu’on a vraiment une utilité sociale, qu’on a une performance sociale, une performance sociétale et qu’on a une contribution qui évite de gaspiller de l’argent… On le disait, tout à l’heure, pour insérer des chômeurs ; ben, voilà, c’est un exemple concret : « Qu’est‐ce que deviennent ces chômeurs après ? », c’est un peu la question que vous posiez tout à l’heure. Est‐ce que ces chômeurs qui sont passés par des contrats de réinsertion chez vous, est‐ce qu’au bout de 5 ans ils ont été réinsérés sur le marché du travail ? Est‐ce qu’ils sont bien dans leur vie ? Est‐ce qu’on peut mesurer ces choses‐là, même qualitativement ? C’est aussi des questions qu’on peut légitimement se poser. Alors, moi ‐ c’est le sens de mon intervention en tout cas ‐ je ne vois pas de contradiction à travailler avec des entreprises, si ce n’est celle de vos valeurs. Si vos valeurs ne correspondent pas à celles de certains chefs d’entreprise, de certaines entreprises ou de projets d’entreprise, il ne faut pas travailler forcément avec ces entreprises. De la même manière, si vous vous sentez trop dépendants du secteur public, il ne faut pas accepter cette dépendance. Mais, il faut trouver le chemin qui vous semble le plus pertinent, sachant que le bon mot c’est effectivement l’adaptation parce que tout va très vite et on demande beaucoup d’exigence d’adaptabilité aujourd’hui aux individus et aux organisations. Je voudrais commencer par une première idée dans l’introduction. Vous allez voir, j’ai pas mal de slides, et vous aurez tous ces transparents qui vous seront remis bien sûr en support de l’intervention de la journée. Il y a certains transparents sur lesquels je vais aller très vite parce que ça ne me semble pas forcément utile de trop développer. Aujourd’hui, il y a parfois un flou dans les situations, il y a des questions qui sont posées où les gens se disent « Est‐ce que je suis encore vraiment une association ? Il y a des entreprises, j’ai l’impression, qui font un peu la même chose que moi ». « Et puis, finalement, j’ai des activités aussi commerciales, lucratives, mais j’ai l’impression pourtant que je fais quelque chose de différent des entreprises », et il y a parfois une perte d’identité. C’est vrai pour des associations. Il y a des associations aussi qui se trouvent être un peu dans les mains d’une autorité publique en se disant « Mais, finalement, je fais le travail pour une organisation publique, un conseil régional, un conseil général, une ville, etc., et qu’est‐ce que j’ai d’associatif finalement ?». Donc entre le « para‐commercialisme » ce qu’on appelle effectivement, faire les mêmes activités qu’un commerçant et puis finalement être ce qu’on appelle le « faux‐nez » de l’administration, c’est‐à‐dire prolonger les activités de l’administration, sachant que ça va coûter un petit peu moins cher, eh bien on est parfois un peu frustré. On est d’autant plus frustré qu’en face, aujourd’hui ‐ et je crois que c’est ça la grande nouveauté depuis ces 10‐15 dernières années ‐ vous avez des entreprises qui ont ou qui commencent à affirmer un projet social ou sociétal ou écologique seulement, voire un peu plus global et qui ont ce qu’on pourrait appeler « un idéal élevé » qui appartenait historiquement plutôt aux associations. Aujourd’hui, il y a plein de secteurs d’activités où des entreprises qui sont regroupées en réseaux d’Eco‐entreprises, par exemple, c’est‐à‐dire des entreprises dont l’activité est bénéfique pour l’écologie et d’un point de vue territorial. Il y a des entreprises qui sont même cotées en bourse, qui se prétendent entreprises sociales, parce qu’elles pensent qu’elles ont un impact social favorable par leurs activités. Et finalement, on se retrouve dans une situation où on se dit « Mais, finalement, est‐ce que cette entreprise elle n’a pas une finalité sociale, le bien‐être des gens, etc. ? ». Quand vous Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 39 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » prenez le projet de Danone, de Nestlé, de toutes ces entreprises, ils vous disent finalement : « Moi, avec mes produits alimentaires, c’est résoudre des problèmes de santé publique, c’est contribuer au mieux‐vivre, au bien vivre, au bien manger, etc. ». Bon, voilà, je prends juste cet exemple. Et pourtant, on verse toujours des dividendes aux actionnaires, on est toujours dans une logique... Donc, tout ça pour dire qu’il y a beaucoup de paradoxes, beaucoup de contradictions aujourd’hui et qu’on est dans une complexité, dans une hybridité de situation qui est extrêmement importante et il y a un flou dans les frontières des organisations aujourd’hui qui est important. Donc, les associations ont‐elles vraiment le monopole des valeurs ? On peut se poser la question, parfois au regard du fonctionnement de certaines associations. Est‐ce qu’il n’y a pas un risque de banalisation ? C’est ce qu’on disait un petit peu tout à l’heure en filigrane de l’intervention de Jean‐Louis LAVILLE. Ce risque de banalisation il est très problématique pour les associations parce que si vous dites, Madame, effectivement : « Mon association, je fais la même chose qu’une entreprise », eh bien c’est que vous êtes une entreprise, c’est que vous avez perdu le projet associatif peut‐être. Ou alors peut‐être que vous avez perdu de vue vos spécificités qui font votre richesse et votre plus‐value sociale et l’impact social que n’ont pas certains de vos concurrents entreprises qui travaillent différemment que vous : ils ne travaillent pas avec les mêmes ressources, ils ne cherchent pas à avoir le même impact, etc. Mais, des fois, on est un petit peu perdu quand on pilote ces organisations complexes. Alors, c’est vrai que je pense que l’approche développement durable et sa déclinaison responsabilité sociale des organisations, responsabilité sociale des entreprises dans les entreprises a fait bouger les frontières, les logiques de fonctionnement et est porteuse d’opportunités de risques pour les acteurs. J’ai prévu 2 temps dans mon intervention : un temps rapide parce que je ne veux pas trop mettre l’accent là‐dessus, mais il faut savoir que le développement durable amène quand même un changement de paradigme et une méthode de gestion des partenaires, que ce soit les entreprises aujourd’hui et les organisations publiques. Sur les marchés publics, me semble‐t‐il, je crois que vous avez des éco conditions pour les associations aujourd’hui, il y a 8 éco conditions, si j’ai bien compris pour les manifestations et il faut en remplir 3 au minimum pour pouvoir prétendre obtenir ces financements. Donc, vous voyez que les partenaires publics le font et les partenaires privés veulent aussi travailler avec des associations dont ils connaissent mal les réalités et dont ils veulent s’assurer, effectivement, qu’elles ont un fonctionnement qui est garant d’une certaine éthique, garant de certaines valeurs et puis qui a aussi un impact social, qui n’est pas facile à mesurer. Si on veut rassurer tous ces acteurs‐là, si on veut aussi s’approprier ces principes ‐ comme le disait, tout à l’heure, la dirigeante de Promo‐Femmes qui est intervenue ‐ si on veut effectivement s’interroger sur sa responsabilité sociale d’association, aussi sur ses pratiques de gouvernance, de management interne, de mesure de sa réussite, il faut développer une capacité managériale et s’interroger avec des outils de management, une réflexion de management, autour d’un projet et ça me semble essentiel dans ce cadre‐là. Alors, le développement durable et sa déclinaison. Jean‐Louis LAVILLE a cité le rapport BRUNDTLAND, c’est donc un développement qui ne va pas compromettre le développement Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 40 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » des générations futures. Cela consiste à appliquer le développement durable à l’intérieur des organisations sur le plan social ‐ réfléchir à l’impact de ses activités ‐ sur le plan économique et sur le plan environnemental. Je ne vais pas trop développer parce que vous connaissez en général ces définitions, mais l’idée de l’application du développement durable dans les organisations, ça part quand même d’une démarche volontaire de dire qu’on assume ses responsabilités économiques, sociales, légales, éthiques, philanthropiques envers toutes ces parties prenantes. C’est un petit peu ça l’idée. C’est finalement presqu’un nouveau paradigme après le paternalisme dont on a beaucoup parlé, à la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle, après l’État Providence dont Jean‐Louis LAVILLE a aussi beaucoup parlé, est‐ce que cette application du développement durable dans les organisations, est‐ce que sa généralisation ‐ si on y croit et si on y pense et que le processus est vraiment en marche ‐ est‐ce que ça peut vraiment être un nouveau paradigme de fonctionnement pour l’ensemble des acteurs ? Et c’est la question sur laquelle je me suis effectivement interrogé en sachant qu’aujourd’hui il y a une profusion dans le monde de codes internationaux, de normes, de principes, de guides pratiques, privés, publics, d’incitation à agir. Vous les regarderez, je ne vais pas les détailler parce que ce n’est pas intéressant. Aujourd’hui, la forme la plus synthétique de l’application du développement durable dans les organisations c’est une norme qui a vocation à s’appliquer à toutes les organisations, c’est ça la nouveauté parce que la plupart des normes avait plutôt vocation à s’appliquer dans les entreprises, et surtout dans les grandes entreprises auparavant, c’est ce qu’on appelle le norme ISO 26000, qui n’est pas une norme certifiante, mais qui est une norme qui invite les organisations à s’interroger sur les conséquences de leurs activités sur l’environnement, sur la manière dont elles sont gouvernées, sur la manière dont elles gèrent leurs relations de travail en termes, par exemple, de parité, de diversité, d’égalité des chances, etc. Donc, des questions qui sont relativement fondamentales pour le management. Alors, en France, je fais quand même un petit détour sur un aspect légal qui n’est pas inintéressant, qui concerne, certes, les entreprises et les très grandes entreprises, mais qui, culturellement, montre quand même un changement de règles du jeu globalement, dont vous avez tous entendu parler ‐ peut‐être moins avec la loi NRE, qui est la loi sur les Nouvelles régulations économiques qui date de 2001 ‐ et surtout le Grenelle 1 et le Grenelle 2, dont vous avez tous entendus parler. Alors, c’est quoi ces règles, finalement ? Eh bien c’est que d’abord 1, toutes les sociétés cotées en bourse ont l’obligation de rendre public un certain nombre d’informations qui concernent, finalement, les conséquences sociales et environnementales de leurs activités, donc un rapport, si vous voulez, développement durable à faire pour être plus clair. Et ce rapport va être étendu aux sociétés non cotées qui ont plus de 500 salariés et 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. Alors, ce sont des chiffres qui sont très importants, qui concernent plutôt les grandes entreprises, mais qui vous montrent qu’on est dans une espèce d’effort de transparence pour voir, effectivement, quels sont les engagements sociétaux qui sont faits par les organisations que sont les entreprises, en sachant que ce rapport doit être théoriquement certifié par un tiers indépendant. Donc, ça change un petit peu les règles du jeu, même si parfois il y a des commissaires aux comptes qui certifient des comptes, vous avez vu, et il y a parfois beaucoup de cosmétiques derrière. On ne peut être sûr de rien, mais en tout cas il y a quand même un processus de transparence, d’exigence, de ce qu’appellent les anglo‐saxons d’accountability, c’est‐à‐dire de rendre compte de l’impact de ses activités. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 41 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Alors, derrière, ce que propose le décret, c’est un décret qui est relativement récent du Grenelle puisqu’il date du 24 avril 2012 et qui donne un petit peu le contenu de ce rapport, avec des informations sociales, des informations environnementales et puis des informations qui vous concernent plus, associations. Dans les relations, on peut avoir notamment les entreprises avec les associations, ça va être, effectivement, l’impact territorial, économique et social de l’activité des entreprises. Cela va être les relations entretenues avec des organisations tierces, notamment avec les associations et elles doivent renseigner ce type de rapport. Donc, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’elles doivent s’interroger aussi, à travers ces rapports, sur leurs pratiques de management, sur leurs pratiques de gouvernance et sur la manière dont elles peuvent travailler aussi avec les associations. Donc, c’est la raison pour laquelle j’ai fait ce petit détour. Et plus globalement, beaucoup d’entreprises s’interrogent aujourd’hui sur la manière dont elles peuvent décliner cette responsabilité sociale avec parfois carrément un business model ou une stratégie qui va aller sur ces questions, par exemple, de stratégie de responsabilités sociales en devenant vert, etc. dans les process, en reconfigurant tous les process de management. Beaucoup d’entreprises, même des grandes entreprises, mais il y a des paradoxes bien évidemment derrière, ont reconfiguré complètement leur processus d’achats, de R&D avec de l’éco conception, de logistique, parfois de marketing aussi, parfois bien évidemment de leur empreinte énergétique avec les bilans carbone, ont développé très fortement en France alors que c’était une tradition plutôt anglo‐saxonne le Mécénat. Je ne sais pas, pour vous donner une idée, le nombre de fondations d’entreprises a été multiplié par 6 en 10 ans en France. On peut considérer qu’il y a à peu près 700 fondations d’entreprises, il y en avait 100 au début des années 2000, à peu près, pour vous donner une idée. L’émergence d’un nouvel outil qui s’appelle le « fonds de dotation », qui est un fonds très souple sur lequel on peut agir à la fois individuellement, mais aussi des petites entreprises peuvent créer ces fonds de dotation, même des associations lucratives, qui sont très commerciales, peuvent créer aussi ces fonds de dotation. Et puis, depuis une dizaine d’années ont émergé, ce que critiquait un petit peu Jean‐Louis LAVILLE tout à l’heure, ce que les scientifiques appellent les stratégies BoP, mais qui ont été vite reprises par des opérateurs, tels que Danone, par exemple, qui sont des stratégies… très simplement, BoP ça veut dire quoi ? C’est Bottom Of the Pyramid, c’est un terme anglo‐saxon, il y en a beaucoup en management. Bottom of the pyramid c’est quoi ? C’est les 4 milliards de personnes qui dans le monde vivent avec moins de 2 dollars par jour. Et comment peuvent les entreprises s’intéresser à ces marchés ? En leur proposant des produits solvables, mais avec une démarche qui est complètement différente. C’est l’exemple qui est assez connu aujourd’hui puisqu’il a été très popularisé, qui a mis en place la joint‐venture dont parlait tout à l’heure Jean‐Louis LAVILLE, entre Grameen, qui est la banque pour les pauvres, qu’a créée Muhammad Yunus, avec des microcrédits essentiellement à la base pour fonctionner, et puis Danone. Danone vend des yaourts à quelque 0,05 centime le yaourt en Inde ou en Bangladesh, parfois un peu plus cher avec un process de production, de commercialisation qui intègre l’ensemble de la population locale et qui va aussi prendre en compte les besoins de nutrition, par exemple, des populations pour avoir un yaourt responsable sur tous les aspects, pour être plus clair. Donc, ça veut dire quoi aujourd'hui ? Ça veut dire que ces entreprises s’évaluent aussi sur ce qu’on appelle la « triple ligne de résultats », avec une performance globale, sur une Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 42 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » performance qui est économique et financière, mais aussi sociale, voire sociétale, théoriquement. Parfois, elles se font noter de manière aussi extra financière, mais c’est très contestable parce que c’est elles qui payent cette évaluation et qui fournissent bien souvent les données. Et vous avez aussi de l’investissement socialement responsable, qui s’est beaucoup développé. Bref, en l’occurrence, qu’est‐ce qui est questionné derrière tout ça même s’il y a beaucoup de cosmétiques, de greenwashing, de réalités qui sont à explorer, à critiquer ? Il y a, malgré tout, la question de la légitimité et de la réputation des entreprises qu’elles prennent beaucoup plus en compte et cette question de la légitimité, elle est aussi posée pour vos associations. Pour les organisations publiques, on est dans une démarche qui est un petit peu pareille, c’est‐à‐dire que le Conseil général vous demande de la transparence en tant qu’association : des rapports, vos impacts, de l’évaluation ‐ et c’est exigeant parce que beaucoup d’associations sont portées par des bénévoles qui n’ont pas forcément le temps de faire ça ‐ les compétences, même si vous êtes parfois accompagnés, c’est un accompagnement qui est parfois lointain et vous avez beaucoup de mérite pour le faire. Pourquoi le Conseil général aussi ne s’appliquerait pas aussi ces principes de transparence sur ses pratiques de gestion, de gouvernance, qui peuvent être contestables aussi. Ce n’est pas parce qu’il est le garant du service public. Donc, quand on fait ce type de process, que ce soit les entreprises, les organisations publiques, on est dans un processus d’apprentissage, de démarche qualité avec une démarche de progrès. Bon, c’est, par exemple, effectivement, quelque chose de global aujourd’hui, mais avec des avancées qui sont plus ou moins importantes selon les organisations publiques. On parle du plan vert des universités, il y a une stratégie nationale du développement durable. J’ai regardé juste à Bordeaux, vous avez l’Agenda 21 scolaire, le Conseil général 33 a l’agenda 21 local, le guide des manifestations durables en Gironde qui est un guide que je trouve particulièrement bien fait et qui est, je pense, très utile pour la plupart des acteurs. Le Conseil général évalue sa coresponsabilité sociétale sur l’aspect RSO, je crois que c’est la deuxième organisation publique à le faire en France, donc avec une innovation qui est relativement importante. Donc, pour vous dire que même les organisations publiques sont aussi sur ces questions. Alors, pour les associations finalement qu’est‐ce qui se passe ? Eh bien, vous avez une responsabilité qui est génétique, c’est‐à‐dire que vous voulez faire, dans la plupart du temps du bien pour les autres, du bien pour la société, pour le mieux‐vivre ensemble, pour du lien social, pour aider les plus démunis, etc. Et vous l’avez cette responsabilité sociétale dans vos gènes, dans vos valeurs, dans vos statuts, dans votre mission. Et parfois, elle est finalement assez mal travaillée parce qu’elle est là, présente, mais vous ne la mettez pas forcément spontanément en évidence. Ce que je vous ai dit tout à l’heure ne vous paraît peut‐être pas aussi évident que ça, je vous montrerais les outils qui sont derrière parce que vous avez un impact sociétal qui est très certainement, et j’en suis convaincu, différent d’une entreprise qui est sur le marché du déménagement. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’il y a des possibilités de changement dans les relations avec les partenaires, vous l’avez compris, parce que les entreprises ont des exigences et les organisations publiques ont des exigences nouvelles. Et puis, c’est aussi la possibilité de réinterroger, d’enrichir son projet, ses méthodes de management et l’évaluation de ce qu’on pourrait appeler la création de valeurs. On parle beaucoup de création de valeurs pour les entreprises, c’est : « Qu’est‐ce qu’on donne comme valeurs aux actionnaires ? », ça veut dire ça concrètement. C’est quoi le Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 43 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » dividende qu’on verse régulier, élevé ou pas, aux actionnaires ? Et là, la création de valeurs c’est : « Quelles sont les valeurs que vous créez pour la société ? » « Est‐ce que vous êtes capables de mesurer cette utilité ? » Et ça, ce n’est pas facile parce qu’il y a des éléments qui peuvent être quantifiés, mais il y a des éléments qui sont éminemment, effectivement, qualitatifs. Alors, les questions associées à ce type de problématique c’est, effectivement « Comment on peut renouveler son projet ? », « Comment on peut plus professionnaliser son intervention dans les principes du développement durable ? », « Comment on peut mobiliser les bénévoles, pérenniser et développer l’emploi ? », « Comment mesurer la création de valeurs pour les adhérents, pour les bénéficiaires, pour la société ? » parce que vos résultats ne se mesurent non pas par seulement la satisfaction de vos adhérents, mais aussi par l’impact que vous avez souvent sur votre société, sur vos territoires. Et ça, ce n’est pas toujours facile à mesurer. Alors, je vais prendre un petit exemple, pour commencer, sur les changements des relations possibles avec les relations avec les partenaires qui est l’ouverture en France du mécénat parce que l’ouverture du mécénat ouvre des possibilités extrêmement importantes, même si la crise peut peut‐être laisser un peu dubitatif aujourd’hui sur la capacité des entreprises, qu’elles soient grandes, petites ou moyennes, à intervenir. Mais, il y a quand même des modalités d’intervention qui peuvent être mobilisées. Et puis, les individus aussi peuvent agir, les gens qui sont soumis à l’ISF, mais des gens qui sont soumis aussi à l’impôt sur le revenu. Et puis, on peut agir avec le bénévolat sans être soumis aux impôts, etc. Il y a plein de possibilités de donner, de s’engager pour les autres. Donc, je vais en reparler. Les financements publics conditionnés, je ne vais pas développer parce que c’est quelque chose, je trouve, qui est très bien développé ici donc on pourrait plus répondre vos questions. Des expérimentations, les manifestations éco responsables, je ne vais pas développer parce que c’est quelque chose qui, à mon avis, est très accompagné au Conseil général. La mise en réseau et le regroupement d’associations pour les achats, l’emploi, le lobbying. Je disais, par exemple, tout à l’heure « libérer du temps utile aux dirigeants ». Un dirigeant, il n’est pas venu pour toujours faire de la comptabilité, pour faire du travail administratif, pour gérer une fonction d’employeur sur l’aspect social, comptable, etc. Eh bien, dans ces cas‐là, il faut s’organiser peut‐être. Il y a un groupement d’employeurs solidaires avec des gens qui sont en insertion, avec peut‐être un apport intergénérationnel, je dis peut‐être n’importe quoi, entre quelqu’un qui est retraité, qui a été comptable, qui va former un plus jeune qui est en formation de comptabilité, qui va l’aider, etc. Donc, c’est des choses à imaginer. L’accompagnement, il n’est pas forcément marchand, il n’est pas forcément public, il peut être hybride et solidaire et responsable aussi de ce point de vue. Donc, il y a beaucoup de choses ‐on parlait d’innovation sociale ‐ à inventer de ce point de vue‐là. C’est vrai, vous l’avez tous dit, la mutualisation est effectivement gage peut‐être de plus d’efficacité entre sous‐secteurs associatifs. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 44 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Alors, je vais développer essentiellement les partenariats avec les entreprises, notamment sur l’aspect mécénat puisqu’aujourd’hui à peu près toutes les grandes entreprises ont une fondation avec un objet bien délimité. Elles versent du mécénat par cette fondation, mais elles peuvent agir aussi directement par leur budget propre et puis par d’autres actions aussi. Ensuite, il y a le fonds de dotation dont je reparlerai et puis il y a les fondations d’entreprises. Donc, je vais prendre un petit exemple pour commencer parce que je trouve que c’est un exemple extrêmement intéressant. C’est une fondation qui a été créée sur un territoire par des acteurs économiques locaux, comme l’a dit Jean‐Louis LAVILLE, auxquels il croit beaucoup. C’est une expérimentation qui est extrêmement intéressante, qui a été portée par le département du Maine‐et‐Loire. Ce sont des entrepreneurs, un petit boulanger, un boucher, un expert‐comptable, un restaurateur, des gens qui se sont associés et qui ont dit « Chacun si on aide des associations, on ne va pas pouvoir faire grand‐chose. Mais, ce qu’on veut, c’est avoir un effet vertueux sur le territoire et on va se regrouper et on va monter une fondation d’entreprises ». Et il y a une quarantaine comme ça, de petits entrepreneurs locaux, qui ont mis un peu d’argent. Alors 10 000 euros par an ça peut paraître beaucoup, mais en réalité ça coûte 4 000 avec les réductions fiscales, voire ça peut coûter 3 600 euros si vous êtes en nom propre pour une entreprise. Donc, vous voyez, ce sont des sommes qui restent abordables pour des TPE même. Et donc, ils ont réussi à générer comme ça 300 000 euros avec des petits acteurs qui ont donné des contributions et pour promouvoir des actions qui leur semblaient responsables sur le territoire que mènent des associations pour aider à la réalisation de projets parce que, eux, dans leur écosystème, ils ont besoin qu’il y ait ces innovations et ils en profitent aussi. C’est une initiative qui est assez intéressante, pourquoi le Conseil général ou pourquoi des associations d’envergure départementale n’inciteraient pas des entreprises à se fédérer dans un fonds de dotation ou dans une fondation d’entreprises dont la vertu serait d’aider à faire rayonner des associations qui ont, finalement, un impact positif et une utilité sociale sur le département de la Gironde. Le fonds de dotation peut être un outil encore plus simple pour le faire. Moi, je pense que toutes les collectivités locales aujourd’hui devraient avoir des partenariats avec les entreprises et avec les associations pour créer ce type d’outil qui, effectivement, n’est pas aussi important en termes de financement que le sont aujourd’hui les subventions publiques, mais qui sont symboliquement complémentaires d’une synergie entre des opérateurs qui souhaitent contribuer et reconnaître l’acteur majeur que représentent les associations pour la vie des territoires. Autre exemple : beaucoup de grandes entreprises ont développé le mécénat de compétences via leurs fondations, via d’autres choses. C’est quoi le mécénat de compétences ? On ne donne pas que de l’argent, on permet à des salariés qui sont dans les entreprises de s’engager dans des associations, de faire du travail pour les associations ‐ ça peut être de la comptabilité, ça peut être des choses, d’autres choses, etc. ‐ et de pouvoir défiscaliser aussi le temps de travail, c’est‐à‐dire le salaire, les charges sociales, de défiscaliser au titre de l’impôt sur les sociétés, le mécénat de compétences qui est donné par Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 45 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » ces sociétés. Alors ce n’est pas du tout une niche fiscale, mais c’est effectivement une réduction fiscale qui va s’appliquer dont on a eu peur qu’elle disparaisse, mais qui a vocation à aider le monde associatif aussi. L’aider en termes de ressources humaines. Beaucoup d’entreprises aussi, notamment les plus grandes, veulent aider l’entreprenariat social, beaucoup d’entre vous sont dans l’entreprenariat social dans la gestion de ces entreprises, tel qu’on l’entend au niveau général. C’est quoi ? Même si on a des activités économiques qu’on essaye de financer par le marché, eh bien c’est quand on a une utilité sociale, effectivement, on peut être soit sous statut entreprise soit sous statut associatif et avoir un financement un peu marchand prédominant, mais avoir une utilité sociale. Et là, il y a beaucoup d’aides qui se développent aussi sur cette idée d’entreprenariat social. Et dans tous les cas, quand on travaille avec des entreprises, vous allez toujours avoir ce type d’exigence qu’ont aujourd’hui la plupart du temps les partenaires publics, maintenant mais encore plus, une demande de transparence, une exigence d’efficacité. Vous montrez que vous êtes dans un processus d’amélioration continue et, finalement, d’évaluation de ce que vous faites. J’ai pris une citation que donne le directeur du développement durable puisque c’est une nouvelle fonction qui existe depuis une dizaine d’années dans les entreprises ‐ directeur du développement durable, directeur de l’innovation sociale, responsable de la fondation, responsable du fonds de dotation, etc. ‐ le Directeur du développement durable de GDF Suez : « On mixte trois piliers : l’investissement chez les entrepreneurs sociaux locaux, les dons qui viennent de notre fondation et le mécénat de compétences ». Donc, voilà leurs trois axes qu’ils ont donnés d’intervention. Les dons intéressent bien évidemment les associations, mais aussi l’entreprenariat social local et puis le mécénat de compétences. Mais, pas question de mettre en avant des actions sans qu’on connaisse leur impact. Vous voyez, ça c’est déjà la première condition pour travailler avec des associations. Ça veut dire que vous devez être capable de mesurer votre impact ou de vous faire aider pour y arriver. Le retour de boomerang peut être terrible pour nous. De nos jours, beaucoup de gens surveillent et évaluent la politique des groupes, comme GDF Suez, mieux vaut donc avoir des résultats affichés. L’idée n’est pas de faire du marketing éthique ni de communiquer sur l’intention, on veut travailler en partenariat avec des résultats. Donc, vous voyez la culture dans laquelle souhaitent travailler les opérateurs et cette culture, elle peut avoir quand même des intérêts, je pense, en termes de partenariat. J’ai pris l’exemple d’un partenariat qui n’est pas forcément financier mais qui est un partenariat en termes de gestion des ressources humaines associatives avec du mécénat de compétences où on peut avoir un savoir‐faire, par exemple, de mise à disposition du personnel, par exemple, avec du mécénat de compétences auprès d’associations. Il peut y avoir de l’action associative des salariés ponctuels ou durables, c’est‐à‐dire qu’il y a des gens qui peuvent s’engager en même temps qu’ils font du mécénat de compétences, ils peuvent s’engager comme bénévoles. Et puis, il y a toutes les nouvelles formes d’engagement des jeunes, qui sont soutenus aussi par des entreprises, comme le service civique. La plupart des grandes entreprises aujourd’hui soutiennent des dispositifs comme Unicité ‐ je ne sais pas s’ils sont dans la salle ‐ très fortement. Elles aident les gens à s’engager au service des autres parce que c’est très important pour que les entreprises recrutent ces jeunes‐là qu’ils connaissent la réalité de vie sociale, etc. et pour qu’ils aient des chances d’être recrutés derrière. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 46 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Je vais aller plus vite. Alors pour les associations, des conditions à créer, parce que c’est le thème de mon intervention et pour moi, il y a 3 points clés véritablement : 
un projet formalisé qui passe l’écriture de sa mission, de sa vision, de ses valeurs, des orientations qu’on s’est données, des actions et de ses indicateurs de performances, 
une capacité à mettre en œuvre, 
une évaluation, une capacité à rendre compte. Alors, pour le projet, je vous ai mis une petite pyramide qui est très simple, mais qui est très intéressante pour se réinterroger : 
mission : pourquoi on existe ? 
vision : ce que nous voulons être, et ça c’est très important, on pourra en discuter dans les questions, 
valeurs : ce à quoi nous croyons, ce à quoi on ne veut pas transiger dans les relations en interne et en externe, 
orientations stratégiques : sur quoi on veut se concentrer, c’est quoi nos priorités, on ne peut pas tout faire, 
objectifs : c’est quoi les objectifs chiffrés qu’on veut atteindre mais aussi des objectifs plus qualitatifs, 
actions : et bien souvent, les associations se concentrent beaucoup aujourd’hui sur les actions, portent des projets mais qui s’appellent actions. Et tout le haut de la pyramide est oublié : les indicateurs de performance, comment nous saurons si nous avons réussi ? c’est un peu oublié. Donc, l’idée, c’est de voir un projet formalisé, c’est l’idée de la culture, le sport, l’insertion. Votre projet associatif peut être un outil pour répondre à des problèmes de société. Donc, comment vous pouvez passer de l’implicite à l’explicite sur ces questions ? Pour moi, le projet il est là pour expliciter. Capacité à mettre en œuvre responsable Sur les modalités de gouvernance, on s’est interrogé sur les modalités de gouvernance, on pourra en parler dans les débats. Une gestion déléguée à des professionnels, pour moi, j’ai mis entre guillemets puisque vous pouvez avoir des dirigeants bénévoles qui ont un comportement tout à fait professionnel. Pour moi un comportement professionnel, c’est avoir des gens qui ont du temps et des compétences pour assumer les activités qu’on s’est données dans l’association. Et puis, vous pouvez avoir des associations qui sont très professionnelles et qui sont, finalement, assez mal gérées aussi quelque part. C’est la qualité du maillage pour les réseaux associatifs. C’est le développement des relations partenariales multiples pour les associations. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 47 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » C’est une culture d’entreprise associative aussi, c’est‐à‐dire d’entreprenariat, de projets, d’innovation sociale. Et puis, c’est éviter le manque de contrôle, éviter les conflits des bénévoles, donc j’ai beaucoup insisté parce que paradoxalement dans les associations, il y a souvent très peu de gestion des ressources humaines et c’est un vrai paradoxe parce qu’on affiche des valeurs, on est centré sur l’humain et il y a beaucoup de sclérose de gouvernance aussi. Donc, j’ai mis quelques outils derrière pour se réinterroger. J’ai fait un petit guide avec un dirigeant d’associatif sur le management associatif, un petit guide sur « Comment se poser ces questions de gouvernance ? » : l’accès aux femmes aux responsabilités, l’accès aux jeunes aux responsabilités avec un mini conseil d’administration junior, sur la charte d’engagements des dirigeants, sur un comité innovation et prospectif pour voir quelles sont les grandes tendances qui peuvent affecter votre fonctionnement. Gestion déléguée à des professionnels Pôle ressources humaines associative, Organisation spécifique du travail et des ressources mixtes, vous verrez il y a des outils Reconnaissance et la valorisation des dirigeants du bénévolat : il y a aussi pas mal d’outils. Comme ça, on a construit une trentaine d’outils qui sont des petits outils qui sont dans un guide. Evaluation et capacité à rendre compte Bon, il y a le bilan carbone bien évidemment, mais moi je vais vous donner 2 petits exemples. Un qu’on appelle le bilan sociétal qu’a créé le centre des jeunes dirigeants de l’économie sociale et solidaire en 1997 et qui est assez peu popularisé, mais qui a été simplifié depuis, qui est un bilan qui consiste à dire « Comment on peut mesurer l’impact de nos activités sur le plan économique, social et environnemental ? ». La méthode des bénéfices cachées, c’est aussi amusant, je vais vous montrer juste parce que c’est la réponse à votre question de tout à l’heure, mais c’est une réponse partielle parce qu’on ne compte pas tout. Par exemple, c’est une méthode qui a été faite par un collègue qui a écrit dans un bouquin que j’ai coordonné avec un collègue, c’est « rechercher les bénéfices cachées qu’a l’activité des associations sur la société notamment ». Alors, comment on fait ? Exemple, SNCF et RATP sont partenaires, subventionnent l’association qui s’appelle Compagnons du voyage, qui fait de l’aide à des personnes qui présentent un déficit de mobilité pour utiliser des transports en commun et en plus les collaborateurs de cette association sont des personnes en insertion. C’est votre cas, Madame, pour être clair. Et l’étude montre, en fait, que l’activité est rentable pour la société civile, parce qu’un salarié en insertion ça coûte en moyenne 13 800 euros de moins qu’un chômeur par an à la collectivité locale. Donc, ça c’est déjà la première chose. Et puis, surtout ‐ c’est le petit tableau qui est juste après ‐ c’est qu’en permettant à ces personnes d’accéder au voyage, eh bien on crée un chiffre d’affaires aussi pour la RATP et la SNCF et que la différence sur la subvention est positive. C’est positif, j’allais dire, dans la relation avec la SNCF, il n’y a pas à Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 48 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » rougir de la subvention, comme vous pourriez le faire en disant « Cette subvention, elle est complètement légitime, voire elle peut même être plus élevée ». Et puis, il y a un impact qui est favorable sur la société avec les gens en insertion. Mais on pourrait trouver plein d’autres indicateurs pour montrer que c’est encore plus positif que ça. On peut avoir des outils comme ça qui peuvent aider à mesurer son utilité sociale et son impact social et sociétal. Tout ça, pour terminer, parce que je suis allé un peu au pas de course, pressé par le petit mot qui est tout à fait légitime. Il y a effectivement une exigence accrue dans le scénario 3, qui est positionné autour de la responsabilité sociétale des organisations, mais qu’il y a des opportunités de financement et de partenariat. De revoir aussi ses pratiques de gouvernance, je pourrais y répondre avec vos questions, si vous le souhaitez, j’ai pas mal travaillé sur cette question et de management. Et puis, les entreprises partenaires, les collectivités territoriales peuvent avoir aussi une action politique d’orientation de la RSO des associations, c’est un peu ce qu’on fait aujourd’hui quelque part et vous avez eu aussi quelques outils. Je m’excuse, je suis allé très, très vite et j’ai été un peu caricatural. (applaudissements) Jean PETAUX Merci beaucoup Emmanuel BAYLE. Merci parce que je crois que c’était tout à fait intéressant et passionnant d’avoir cette autre vision et lecture par rapport aux 3 scénarii évoqués par Jean‐Louis LAVILLE tout à l’heure. Il y a un monsieur qui va lever la main, qui est représentant de l’association « Passerelles et compétences ». Il est de l’autre côté et je crois que vous allez, d’une manière très synthétique forcément… Parce que l’objet de votre association, c’est justement de montrer qu’il peut y avoir du transfert de compétences, on en a évoqué avec les bénévoles compétents, présentés par Emmanuel BAYLE. Je crois que c’est intéressant que vous nous disiez un petit peu quel est l’objet de votre structure de manière très rapide. Michel BETBEDER Oui, donc, Michel BETBEDER. Je suis le responsable à Bordeaux d’une association nationale qui s’appelle « Passerelles et compétences », qui fait la promotion du bénévolat de compétences. C’est‐à‐dire qui propose une aide aux services des associations de solidarité. Quand une association a une problématique ponctuelle, ça peut être l’organisation d’une manifestation, ça peut être un problème de communication, ça peut être de la recherche de fonds, un problème juridique, fiscal, de l’aide au recrutement, eh bien, elle peut s’adresser à « Passerelles et compétences », nous avons un fichier national de plusieurs milliers de bénévoles qui sont des bénévoles dont les compétences sont parfaitement connues et ce sont ces bénévoles qui vont aider l’organisation à réaliser cette mission. C’est une mission ponctuelle, ça se fait dans des conditions d’efficacité et dans des conditions économiques qui sont tout à fait satisfaisantes. Et alors, je crois que c’est quelque chose qui est intéressant parce que vous parliez, tout à l’heure, d’intelligence collective, là il y a vraiment quelque chose qui est tout à fait intéressant pour les associations. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 49 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean PETAUX Quelles sont vos ressources pour l’association ? Michel BETBEDER Alors, nous n’avons pas de subvention. Nous n’avons pas de subvention publique, nous avons un peu de mécénat d’entreprises. Et je peux dire que « Passerelles et compétences » appartient au Haut conseil à la vie associative, ce Haut conseil à la vie associative est rattaché au Premier ministre et le Président DARMIAN est l’un des membres éminent de ce Haut conseil à la vie associative. Elles sont ainsi 25 associations. Nous fonctionnons avec un budget qui est assez réduit puisque nous sommes tous bénévoles. Et nous facturons simplement extrêmement légèrement. Jean PETAUX Merci pour ce témoignage tout à fait passionnant. Michel BETBEDER Non, simplement, j’ai quelques plaquettes à disposition. Jean PETAUX Il y a Emmanuel BAYLE qui veut rajouter quelque chose. Emmanuel BAYLE Je vous remercie beaucoup d’avoir pris la parole pour illustrer et puis pour donner une ressource concrète en Gironde. Il y a France Bénévolat qui est un réseau que vous connaissez aussi certainement, peut‐être qu’ils sont présents, je ne sais pas. France Bénévolat, vous êtes là ? D’accord, OK. Bon, qui est aussi un acteur qui ‐ je ne sais pas si vous voulez prendre la parole ‐ qui est intéressant. Sur la culture d’entreprise associative, moi j’essaye de beaucoup insister sur les bonnes pratiques. L’intérêt, c’est d’avoir un bénévole professionnel, c’est‐à‐dire quelqu’un, même s’il s’engage ponctuellement, qui va le faire avec des compétences et du temps qui est dédié à l’activité qui lui est donnée et puis d’avoir des professionnels bénévoles aussi, c’est‐à‐dire qui partagent un peu les valeurs du projet associatif et qui sont là pour le partager. Donc, la culture d’entreprise associative elle marche aussi un petit peu sur un fondement qui est partagé. Jean‐Louis ARRIVE Merci. Donc, Jean‐Louis ARRIVE, je suis le délégué départemental d’une association qui s’appelle ECTI. Nous sommes 2 500 en France et c’est tout à fait dans le même esprit… Jean PETAUX Vous avez contribué par une question sur le fichier avant le forum. Jean‐Louis ARRIVE Voilà. Donc, nous sommes aussi une association de seniors bénévoles. Nous sommes financés à peu près à 20 % par l’aide publique et 80 % par le privé. Nous sommes donc des retraités qui venons de tous secteurs d’activités et nous avons des actions en France et à l’international pour l’aide aux collectivités et aux individus. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 50 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Dans le premier débat précédant la pause, je pense que c’est très important de se dire que l’association, c’est une société qui participe aux liens de la société. On n’est pas des pleurnichards, on n’est pas là dans le misérabilisme, on est là dans l’économie. Et notre rôle est important d’être dans le lien entre le monde professionnel et le monde associatif. Étant donné que nous venons de tous les secteurs d’activité, nous faisons aussi bien de l’aide à des TPE, de l’aide à la formation, de l’aide à reclasser des gens qui cherchent un travail, enfin c’est très, très varié. Et votre deuxième exposé est tout à fait dans la continuité pour bien montrer que nous sommes une association qui représente une société économique dans le monde du lien social. Les cadres dirigeants, lorsqu’ils arrivent à 10‐15 ans de la retraite, ils pensent déjà au monde associatif de leur retraite, c’est‐à‐dire qu’ils se mettent dans un état d’esprit où l’entreprise participe de façon active au monde associatif et lorsque ces gens‐là seront à la retraite ils vont prendre le fil et ils vont continuer, c’est‐à‐dire que dans le monde associatif ils vont continuer le lien avec le monde privé. Et c’est comme ça que le lien social continue. Jean PETAUX Merci. Les gens de France Bénévolat. Monsieur, oui ? Un intervenant de France Bénévolat Oui, effectivement, vous parliez tout à l’heure de mécénat de compétences. France bénévolat a de nombreuses activités et parmi ces activités, on développe beaucoup ce qu’on appelle des liens avec les grandes fondations. Par exemple, pour vous donner une idée de lien, on a un accord très précis avec la fondation SNCF qui, sur le plan national, avait un budget relativement conséquent et voulait trouver et aider des associations qui interviennent dans la solidarité inter générationnelle. Donc, la fondation SNCF se disait « Je ne connais pas assez bien le monde associatif » et donc en travaillant avec France Bénévolat on a pu, nous, rechercher des projets de solidarité inter générationnelle sur tout le territoire national et ainsi France Bénévolat et la fondation SNCF en 2012 ont pu, avec un budget qui était de 300 000 euros pour le citer, récompenser 50 associations qui avaient des projets innovants en matière de solidarité intergénérationnelle et ça a permis à ces projets de démarrer. Et notamment à Bordeaux, nous avons pu financer 3 projets qui étaient originaux et intéressants. C’est un lien entre, justement, l’entreprise et le milieu associatif. C’est une des activités de France Bénévolat, mais on en a plusieurs. Mais voilà, des choses très concrètes. Nous sommes encore en train de redévelopper des projets de solidarité inter générationnelles pour 2013 et 2014. Jean PETAUX Autre demande de prise de parole ? Ahmed SERRAJ, Oui, merci. Ahmed SERRAJ pour le Boulevard des potes. Jean PETAUX Pourquoi tu ris ? Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 51 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Un intervenant Parce qu’on voulait prendre la parole tous les 2. Jean PETAUX Ah vous faites un truc à 2. C’est bien, là Patrick et Ahmed, allez‐y. Ahmed SERRAJ, « Mariage pour tous » donc égalité, donc… Jean PETAUX Je vous invite à une pause et puis on va revenir dans 10 minutes. Vas‐y Ahmed ! Ahmed SERRAJ, Oui, merci pour l’éclairage vers un nouveau modèle associatif. Mais, c’est vrai que, à la fois votre intervention, mais la succession d’interventions qui s’en est suivi, pose quand même un certain nombre de questions. Aujourd’hui, on voit bien comment il y a un vrai problème avec le modèle économique, comment la question de l’emballement économique de tout capital, tout business, etc., et tout votre développement est ‐ veuillez m’en excuser ‐ est un développement qui s’appuie quand même sur une logique très, très calée, très inspirée, très modélisable autour de la dimension économique. Vous avez, à travers l’illustration, effectivement trop rapide, probablement, fait l’éloge d’une certaine manière en lame de fond du modèle économique. Et les illustrations qui ont suivi ont corroboré vos propos. Je crois qu’aujourd’hui, et à aucun moment, vous n’avez évoqué le terme d’éducation populaire parce que « Vers un nouveau modèle économique », « Vers un nouveau modèle associatif », ça veut dire qu’on ne parle plus d’éducation populaire et on va vers autre chose. Donc là il y a quelques questionnements quand même qui sont posés à un moment où dans nos sociétés, pas qu’ici en France, mais on voit bien comment, avec tout le respect que j’ai pour les amis de France Bénévolat, comment à travers des systèmes comme ceux‐là, on est tiré quand même vers une vision très libérale de ce qu’est l’associatif. Jean PETAUX Merci Admed. Ahmed SERRAJ, Non, non, je n’ai pas fini, je n’ai pas fini, s’il te plaît, 30 secondes. Y a eu une succession de… On n’a pas parlé d’éducation populaire. Donc au lieu de prendre la parole à deux ou trois, je prends la parole tout seul. Jean PETAUX D’accord. Vas y, excuse‐moi, mais c'est pour qu’Emmanuel BAYLE réponde aussi. Ahmed SERRAJ, Oui, parce qu'aujourd'hui, ce n'est pas pour idéaliser ou angéliser le monde de l’éducation populaire, mais aujourd'hui ensemble, il y a à repenser toute une série de questions, mais qui sont des questions en rupture avec le système économique. On ne peut pas aujourd'hui nous dire « Allons vers un modèle économique pour faire du lien social », on voit bien que ce Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 52 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » qui casse aujourd'hui la société, c'est l’emballement et le système économique. Vous parlez de dividendes, etc. On peut aller plus loin sur un certain nombre de sujets, mais on n’en a pas le temps. Donc moi, je voudrais bien quand même parce qu'on est dans un département qui est fortement ancré à gauche, qui développe une politique plutôt humaniste qui va dans le sens de l’éducation populaire, qu’on resitue les limites de ces questions‐là. Ça va, on a changé de gouvernement, Sarkozy on s’en est débarrassé, il y a une… Oui mais en même temps, les questions libérales restent très prégnantes dans le débat même dans le débat associatif. (Applaudissements) Jean PETAUX Merci beaucoup. On a parfaitement compris. Merci. En tous les cas, là, le changement c'est pas maintenant pour toi parce que ça continue comme jadis. Très bien. Allez‐y Emmanuel. Merci pour cette prise de position qui a le mérite de remettre les choses. Maintenant, il vous a quand même clairement interpellé. Emmanuel BAYLE Je réponds juste clairement, pour moi, c'est entreprendre autrement, le modèle associatif. C'est entreprendre autrement que le modèle associatif. Ce n'est pas l’économie, je crois que ce n'est pas un bon terme, à mon avis. On est dans des entreprenariats, ensuite selon les valeurs des associations, effectivement, on peut vouloir travailler avec l’entreprise, parfois on a un mouvement contestataire, eh bien pourquoi pas, on travaille différemment. Peut‐
être, on travaille plus avec des partenaires publics, tout dépend de ses valeurs, tout dépend du projet qu’on a. Moi, je n’ai pas de jugement de valeur par rapport à ces questions‐là. Et je dis que tout dépend du projet que vous avez. C'est quoi le projet que vous avez ? C'est quoi les modes d’organisation que vous voulez mettre en place ? C'est quoi les critères de réussite que vous posez ? Que vous soyez dans l’éducation populaire ou ailleurs et que l’éducation populaire soit plus vertueuse qu’un autre mouvement associatif ou autre, je pense que ce n'est pas ça le débat. Le débat c'est de dire : « Est‐ce que les projets sont portés par des gens qui se donnent les conditions pour réussir ? ». Jean PETAUX Mais pour relayer, pardon Emmanuel, pour relayer la… Emmanuel BAYLE Que ça soit en termes de valeur, que ça soit en termes… Jean PETAUX Pour relayer la remarque d’Ahmed SERRAJ, quand vous avez montré tout à l’heure cet exemple avec des compagnons de la circulation là dans SNCF, on a bien compris que vous êtes passé par un modèle économique ou économétrique financier pour dire : « Voilà, au bout du compte, cette affaire est rentable pour la société ». Est‐ce que vous êtes, j’imagine parfaitement conscient, que vous rentrez par un biais qui est un biais j’allais dire monétaire, je n’ai pas dit « monétariste », mais monétaire ou économétrique qui participe d’une logique du quantifiable ? Dans l’éducation populaire, tout n’est pas quantifiable si je puis dire dans Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 53 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » une mise en équation. Et vous avez tout un plus, par exemple, qui va être un investissement différé sur 30 ans dans une société. Mais vous le comptabilisez comment ça ? Emmanuel BAYLE Alors, c'est la question pour laquelle j’ai pris la précaution de dire « Voilà, il y a une évaluation économique, mais il y a plein d’autres évaluations qualitatives qu’il faudrait mettre en place ». Quand j’ai dit par exemple « Qu'est‐ce que deviennent les personnes en insertion 5 ans après ? » C'est‐à‐dire que tout le problème de l’évaluation, c'est qu’on ne peut pas évaluer à un instant T, c'est‐à‐dire que là, on est là pour « justifier » les aides à un moment donné, mais la richesse qui se crée, elle est bien plus vertueuse. Il y a le lien social, il y a « Qu'est‐ce que deviennent les gens ? » « Comment vous les réinsérez ? », etc. Jean PETAUX Sauf que, quand une institution décide de financer, elle le fait dans l’instant T ou à T+1. Elle ne le fait pas avec un recul de 5 ans. Emmanuel BAYLE Oui mais c'est aux associations… Jean PETAUX Vous avez un vrai biais là, enfin il me semble, je ne veux pas… Emmanuel BAYLE Oui mais je prends la même chose… Je ne sais pas, si on prend le sport par exemple, parce qu’il y a des associations sportives. Moi, je dis toujours aux dirigeants : « Arrêtez de compter les médailles, les résultats sportifs, regardez qu'est‐ce que deviennent les gens qui passent par vos systèmes parce que vous leur avez donné un tel regard sur la vie, sur le monde, vous avez tellement contribué à leur éducation, à leur formation de citoyen, etc. qu’il faut être capable d’en rendre compte ». C'est bien évidemment toutes ces richesses qui sont cachées, je les ai caricaturalement amenées par ce modèle, mais je vous ai dit que c'était caricatural tout à l’heure, qu’il y avait plein d’autres choses à montrer. Et si on oublie tout ça, il faut être capable d’en rendre compte. Mais on peut citer aussi des choses. On peut dire : « Mais attention, voilà l’impact qu’on a, voilà ce qu’on cherche à travailler, voilà comment travailler, voilà quelles sont les valeurs, voilà comment on forme nos éducateurs, voilà comment on est responsable ». Parce que je suis désolé, je n’ai pas dit une chose qui me semble très importante c'est que vous n’êtes pas plus vertueux parce que vous êtes dans l’éducation populaire ou parce que vous êtes ailleurs, tout dépend, il faut regarder les conditions de fonctionnement dans lesquelles vous faites les choses. Et c'est ça qui compte d’abord, pour moi. Il faut être réaliste. Et ce n’est pas pour ça qu’on a un label qui va vous dédouaner qu’on regarde la manière dont vous vous fonctionnez. Je suis désolé. Ahmed SERRAJ, La question n’est pas de dire que l’éducation populaire est plus vertueuse qu’une autre organisation ou modèle. Il y a quand même toute une rhétorique que vous développez, il y a deux ou trois niveaux de lecture de ce que vous amenez, qui est quand même une rhétorique très très calée sur un modèle sociétal fortement empreint d’une logique économique. Et ça me pose un problème. Parce qu'on peut renvoyer la question de « Quel Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 54 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » est le projet d’une association ? », mais aujourd'hui plus fondamentalement, quel est le projet, comment on fait société aujourd'hui ? Une des questions qui se posent à nous, c'est « Comment on fait société en étant en rupture avec un système qui a cassé de l’humain depuis un certain nombre de dizaines d’années ? ». Et votre rhétorique ne répond pas à cette question‐là. Votre rhétorique nous amène tranquillement dans une logique de refroidissement vers un modèle qui, lui, est un modèle vraiment sur la question économique. Emmanuel BAYLE Je voudrais juste repréciser quelque chose. Je crois qu’il y a quelque chose qui est fondamental et on ne s’est absolument pas compris. Si vous voulez changer la donne et si les associations veulent véritablement changer la donne, c'est ce qu’a dit toute à l’heure Jean‐
Louis LAVILLE ‐ et il a pris un exemple qui était extrêmement bien choisi ‐ il faut changer la manière dont on alloue toutes ces aides qui sont données aux entreprises, etc. Il faut aller choisir sur ces budgets et dire « Il y a des moyens d’entreprendre autrement sur lesquels on peut aller chercher des budgets et où il y a une légitimité et où on doit prouver qu’on doit pouvoir effectivement être un troisième pilier essentiel de l’entreprendre autrement avec une économie plurielle, etc. » Mais ce n'est pas en se débattant, en piquant les subventions aux uns aux autres. Ça veut dire qu’il faut repenser cette redistribution sur une économie plurielle. Yves BALOUP Yves BALOUP. Je suis sur les pratiques corporelles du monde du travail, affinitaire au monde du travail. Moi j’ai toujours l’habitude d’écouter ceux qui sont porteurs de savoir, c'est le cas de cet après‐midi, pour me questionner dans ma propre pratique. Et donc à ce niveau‐là, je remercie les intervenants pour le travail qu’ils nous ont amené. La question c'est de ne pas déduire de leur savoir une pratique. Il faut se méfier du réductionnisme et du déductionnisme. Par contre, ce qui me paraît important et qui émerge du débat maintenant, c'est de savoir comment on passe du social au sociétal ? En d’autres termes, c'est le problème de la capacité des transformations d’une société en panne pour aller vers une société de bonne vie, du bon vieillot, comme disait l’article. Moi je pose une question simple : le projet. Je ne comprends pas comment on n’est pas dans son propre projet ? L’enfant est dans son projet. L’adulte est dans son projet. Et voilà qu’on veut mettre quelqu'un dans un projet. Mais partons d’abord du projet de l’individu, dans sa forme de vie, dans son parcours de vie. Partant de là, on commence peut‐être à respecter sa propre liberté à ce niveau‐là. Principe républicain. Deuxième aspect, c’est question : « Où donc je vais pouvoir faire valoir ce que je peux faire ? » Question. Et donc, partant de là, question : « Au service de qui dois‐je m’investir ? » Mon propre investissement mais certainement trouver avec d’autres à investir et la reconnaissance mutuelle des inégalités sociales. Parce qu'on n’est pas là dans le chapitre de l’égalité, on est dans le chapitre de l’action contre les inégalités sociales. C’est un deuxième principe républicain qu’il faut modifier aujourd'hui, tant il y a des inégalités sociales. Partant de là, il y a des questions secondaires qui arrivent. À savoir, « C’est quoi ce que je sais faire ? » « C’est quoi ce que je sais faire ? » Ce qui veut dire que mon positif doit être posé quelque part, mais avec mes propres limites. Et là, je n’ai pas entendu aujourd'hui le terme « émancipation ». Parce que c’est là que commencent les procédures d’émancipation. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 55 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Quand on est capable collectivement d’apprécier ensemble les limites de tout un chacun, qu’il soit bénévole ou pas. Parce que même les bénévoles, il faut qu’ils s’émancipent. Donc on est dans un nom commun qu’on appelle la solidarité, à ce niveau‐là. Alors partant de là, quelle gouvernance pour mon émancipation personnelle ? Et je suis encore à 80 ans encore dans l’émancipation, sinon je ne serai pas ici, mais avec qui je vais m’émanciper ? On ne s’émancipe pas seul. Et là intervient ce qu’on appelle le « collectif cognitif ». Il faut se connaitre pour se transformer. Alors, je ne vais pas plus loin, mais je veux dire par là qu’au bout du compte … non mais j’essaie de trouver une alternative. Jean PETAUX Et la fin aussi de ton intervention. Yves BALOUP D’accord, mais c’est difficile de développer une cohérence pour en arriver à une autre forme de cohésion. Ce qui veut dire que c’est donc l’agir, c'est‐à‐dire le sens qu’on va donner en commun qui va transformer la façon de faire. La façon de faire. Et je termine en disant que c’est en travaillant cela et en mettant en évidence ce qu’on appelle des « alternatives de transformation sociétale » qu’on pourra interpeller ceux qui sont déjà dans l’alternance constituée et qui nous reçoivent aujourd'hui. Je vous remercie. Jean PETAUX Merci cher ami BALOUP. Matthieu ROUVEYRE, Matthieu ROUVEYRE, une question avant Emmanuel BAYLE. Matthieu ROUVEYRE Oui parce que je suis également un apprenant, donc j’ai également une question à mon voisin. Il y a eu le biais « entreprise » qui a été soulevé tout à l’heure et je m’associe à un certain nombre d’interrogations mais sans doute peut‐être parce que vous devez aussi faire votre exposé en un temps réduit et, pour ma part, je me replongerai dans vos travaux et dans vos publications. Mais le deuxième biais qui moi, en tant qu’élu m’interroge, c’est l’exemple que vous avez donné sur la question du fonds de dotation. Finalement, vous avez pris cet exemple où vous avez plusieurs entreprises qui se sont réunies pour créer un fonds de dotation qui va intervenir sur les champs choisis par l’entreprise. Et je pense que c’est là que je suis un peu heurté. Ces entreprises grâce à ça, eh bien, défiscalisent. Autrement dit, la décision ne revient plus à l’État, à la puissance publique, mais à l’entreprise. Parce que cet argent qui aurait pu servir à des élus à exposer leurs propres orientations par l’impôt, finalement c’est les entreprises. Et c’est là que ça m’inquiète parce qu’on est en train de glisser peut‐être, je ne sais pas, vous allez sans doute pouvoir nous rassurer, on est en train de faire glisser cette légitimité démocratique à des entreprises qui n’en ont aucune. Et c’est là que l’élu que je suis est quelque peu inquiété. Parce que je me méfie des niches ou des niches fiscales de ce type‐là. Je crois pour ma part que c’est quand même, dans une démocratie en tout cas, c’est aux politiques de prendre des décisions. Un intervenant Avant qu’il réponde, est‐ce que je pourrais ajouter un mot sur ce sujet précis ? Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 56 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean PETAUX Très vite. Un intervenant C’est tout à fait dans ce qui vient d’être dit. Il se trouve que je suis originaire de la région du Pays de Loire, donc je connais tout à fait le département du Maine‐et‐Loire qui a été cité. Jean PETAUX Moi aussi, c’est mon pays natal. Un intervenant Voilà. Je connais également le président de la Chambre de commerce de Maine‐et‐Loire. Jean PETAUX Ce n’est pas le département le plus à gauche de France. Un intervenant Non mais je ne parle pas de politique là. Jean PETAUX Non mais je vous le dis. J’informe. J’informe la salle. Un intervenant Je dis simplement, c’est un département où pratiquement chaque commune a une petite usine et donc les entrepreneurs… Jean PETAUX Non, c’est dans les Mauges, c’est précisément dans les Mauges. Un intervenant Dans les Mauges, tout à fait. Jean PETAUX Ce n’est pas dans la totalité du Maine‐et‐Loire. Un intervenant Dans les Mauges. Jean PETAUX C’est le choletais, ce qu’on appelle la Vendée militaire. Un intervenant Exactement. C’est exactement ça. Jean PETAUX On peut faire un débat mais on ne va pas le faire. On va donner la parole à… Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 57 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Un intervenant Non mais… Jean PETAUX À Emmanuel BAYLE. On a compris votre intervention. Merci. Allez‐y, allez‐y Emmanuel. Emmanuel BAYLE Alors, juste pour rebondir sur la dernière intervention qui est extrêmement pertinente. « Se connaitre pour se transformer », je crois que la réalité du monde associatif aujourd'hui, c’est « l’hétérogénéité est la richesse ». C'est‐à‐dire qu’il y a une création de richesse qui est incroyable, des innovations, mais il y a un éclatement des initiatives, il y a une difficulté à regrouper toutes ces initiatives, à se connaitre. Vous avez vu, quand on essaie de voir, il y a des ressources humaines à France Bénévolat, d’autres, etc. qui peuvent être utiles. Et donc cette richesse, cette hétérogénéité, il doit y avoir une prise de conscience sur le non qu’a posé Jean‐Louis LAVILLE au début de son intervention. C'est‐à‐dire qu’à la fin de son intervention, il a dit : « non », c'est‐à‐dire que comment on peut arriver à devenir un acteur légitime pour montrer qu’on peut entreprendre autrement à travers l’associatif. Mais ça conditionne effectivement un changement de culture, une prise de conscience aujourd'hui du poids économique social politique que représentent ces associations. Et j’en veux pour preuve, c'est beaucoup plus… beaucoup mieux fait finalement par des petites ONG qui ont commencé de rien au niveau international et qui aujourd'hui ont pignon sur rue pour négocier aujourd'hui quasiment tout au niveau du commerce mondial, au niveau des problématiques écologiques, etc. Greenpeace c'était rien, c'est un type qui part dans son bateau, un étudiant, et qui change le monde 20 ans après dans les négociations et etc. Il y a plein d’exemples de ce type. Et en France, on est paradoxalement, je pense, on a été dans une culture un peu de dépendance vis‐à‐vis du secteur public, etc. qui a peut‐être un peu obéré cette capacité d’innovation et cette prise de position, me semble‐t‐il. Alors, pour répondre à la question de la défiscalisation qui est une vraie question parce qu'on laisse à l’initiative privée, le choix avec de l’impôt choisi effectivement. Moi, ça ne me choque pas à partir du moment où on estime qu’il y a une espèce d’équilibre. C'est‐à‐dire à partir du moment où il y a un contrôle, à partir du moment où il y a un équilibre et c'est vrai que le politique doit pouvoir réguler, mais pourquoi des entreprises n’auraient pas la capacité, à travers de l’impôt choisi, à aider des causes selon des cadres qui sont limités. Parce que quand on parle de mécénat, on est quand même dans un cadre limité même si le cadre fiscal français est le plus favorable au monde aujourd'hui, pour les individus et pour les entreprises. Le plus favorable au monde, devant le modèle anglo‐saxon. C'est vrai qu’on a les vannes du robinet public qui sont quand même assez ouvertes encore même si elles commencent un peu à se fermer et puis on a les vannes du mécénat qui ont été quand même malgré tout ouvertes. Donc ça questionne effectivement, et vous avez raison de poser cette question de la légitimité démocratique. Mais moi la légitimité démocratique, si on est sur de la démocratie participative, pourquoi les entreprises et notamment locales n’auraient pas voix au terrain pour dire : « Voilà, sur mon territoire, comment moi je veux agir, comment je veux m’associer à des initiatives ? » Et pourquoi elles ne feraient pas de la démocratie participative aussi ces entreprises ? Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 58 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean PETAUX Merci. Alors dernière question et après, on donnera la parole à Matthieu. Tu vas conclure je pense ? C'est Jean‐Marie directement. Dominique HOFFMAN Oui. Dominique HOFFMAN, Présidente de la Maison de la Nature et de l’Environnement de Bordeaux qui est une fédération de 45 associations de protection de l’environnement. Oui, je voulais rebondir sur ce que vous avez dit sur l’hétérogénéité des associations. On parle de travail collectif des associations, mais souvent, elles sont très atomisées, elles se font concurrence entre elles pour avoir des subventions. Et puis, pour pouvoir peser comme disait Monsieur LAVILLE, il faut qu’on ait un rapport de force plus équitable avec les décideurs politiques et économiques, elles ne sont pas en mesure de pouvoir avoir ce rapport. Non pas que les décideurs politiques ne veulent pas les écouter ou les méprisent, je crois que souvent, on dit cela mais ce n'est pas tout à fait juste, mais souvent parce qu'il y a une méconnaissance de ce milieu associatif. D’où la nécessité de se regrouper, de se mettre en réseau, d’arrêter de se tirer dans les pattes, de pouvoir peser. Et récemment par exemple, je peux donner un exemple précis, dans le cadre d’une intervention sur les déchets, nous avons été invités, on nous a demandé au niveau des décideurs publics et politiques de la CUB d’intervenir, de nous donner les personnes ressources qui pourraient intervenir, qui pourraient nous éclairer sur cette question des déchets. Et là, on a pu avoir une réunion très intéressante, donc la nécessité de se mettre en réseau pour pouvoir peser dans le débat démocratique et politique. Jean PETAUX Bien. Merci de ce témoignage, on va s’arrêter sur ce témoignage d’ailleurs. Maintenant, on va donner la parole à Jean‐Marie DARMIAN qui va rejoindre la tribune, Vice‐président du Conseil Général de la Gironde en charge des finances et par ailleurs conseiller général du canton de Créon. Jean‐Marie DARMIAN Vice‐président du Conseil Général de la Gironde en charge des finances, conseiller général du canton de Créon Écoutez, bon alors, d’abord vous dire que je suis ravi de me trouver là. Je vais vous raconter une petite histoire parce que je vous sens bien tendus, je vous sens bien… Je sens que c'est un peu crispé. Alors je vais vous dire, au début de la journée, quand la journée a été décidée, on m’a dit « Tu interviendras dès le début de la séance ». Puis après, quand ils ont vu ce que j’allais annoncer, ils m’ont dit : « Non, il vaudrait mieux que t’interviennes à la fin, il y aura moins de monde, ils seront tous partis et ça sera moins grave pour nous ». Donc, j’interviens à la fin. Je vous remercie d’être là. Je suis un peu inquiet parce que j’en ai vu qui secouaient leur montre pour voir si elle n’était pas arrêtée, donc vous êtes pressés de partir. Alors, je Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 59 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » vais être bref. Je vais être d’autant plus bref qu’on vient de m’apprendre que j’avais plus de PowerPoint, donc vous voyez, ça va être tout à la main. Vous dire d’abord que c'est vrai que c'est une journée tout à fait particulière et que j’apprécie particulièrement les interventions qui ont été faites, parce que nous sommes au carrefour d’un certain nombre de rapports entre les collectivités territoriales et le Conseil Général dans son ensemble. Et que je vous annonce que le gouvernement a lancé la réforme de la Charte entre les collectivités territoriales de 2001, que vous aurez à l’approuver au travers des instances représentatives des associations en juin et qu’elle fixera l’essentiel de ce que vous venez d’entendre dans la journée. Je ne vais pas vous lire quels sont les thèmes, mais à quelques nuances près, au niveau national, tout le monde se pose la continuité de la vie associative et son développement en période de crise. Puisqu'on sait tous, les uns et les autres, que la meilleure façon pour une collectivité de résister à la crise, c'est de faire confiance au milieu associatif dans son ensemble, ne serait‐ce que pour des problèmes de citoyenneté et de dépasser ce qui pèse sur notre société, de passer du stade de consommateur au stade de citoyen. Je vous souhaite bien du plaisir et on se retrouvera dans les années futures pour voir si par le système éducatif ou le système de l’éducation populaire, on a réussi cette mutation. Alors quel est le point entre le Conseil Général et les associations ? Le Conseil Général d’abord, il demande aux associations 3 points, si j’ai bien entendu ce qui était affirmé dans les scenarii qui ont été expliqués. Premier point, la transparence, deuxième point un rapport de confiance et enfin un rapport de partenariat. Qu'est‐ce que ça suppose de la part du Conseil Général ? Ça suppose qu’il exige de vous la transparence, qu’il exige de vous de lui faire confiance et qu’il exige de vous d’être des partenaires fiables. Mais le Conseil Général aujourd'hui vous demande simplement d’inverser les rôles, de faire confiance au Conseil Général, d’admettre que nous avons une certaine transparence dans nos pratiques et c'est pour ça que je vais vous dire quelles sont les contraintes du Conseil Général et d’aller en avant en améliorant les méthodes de partenariat et le fonctionnement que nous avons avec vous. Première réalité du Conseil Général, c’est une… Ah ça marche. Alors voilà, d’habitude je suis nul, mais… Je ne sais pas comment ça marche ce truc‐là. Au lieu de t’échapper, si tu venais là. Parce que je vous signale que c’est… on forme un couple redoutable parce que c'est la dixième réunion qu’on fait ensemble. Jean PETAUX Il y a peut‐être un bénévole associatif qui pourrait t’aider ? Jean‐Marie DARMIAN Voilà oui. Est‐ce que dans l’échange de compétences, il n’y a pas quelqu'un qui devrait me former au PowerPoint, je suis nul. Donc la double problématique, j’ai entendu notre ami et camarade du Boulevard des Potes qui disait : « Sarkozy est parti ». Non. Non, non, il est toujours là. Parce que le budget que je vais vous présenter, c'est la résultante du gouvernement de 2010, 2 ans après avec les conséquences qui pèsent sur le budget du département. Quel est le décalage ? Aujourd'hui, nous payons la réforme fiscale de 2010 avec 2 ans d’écart, point final. Si vous ne comprenez Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 60 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » pas ça, ce n'est pas la peine d’aller plus loin dans la démonstration, on l’arrête là. Le Conseil Général avait à essuyer une volonté politique d’étranglement via la restriction de ses recettes budgétaires et le faire disparaître du paysage politique – ce n'est pas encore tout à fait fini d’ailleurs bien qu’on ait changé de gouvernement ‐ le faire disparaître du paysage politique par des recettes contraintes. Ces recettes contraintes, elles sont faciles. Autrefois dans la gestion d’une collectivité, ce qui est encore le cas pour les communes, ce qui est encore le cas pour les intercommunalités, on avait une tendance à ajuster les recettes aux dépenses que l’on prévoyait. C'est‐à‐dire qu’on disait : « Il me faut 1,5 milliard pour faire fonctionner le Conseil Général, je vais adapter mes recettes via la fiscalité pour obtenir 1,5 milliard ». Désormais, je suis désolé de vous le dire, c'est le cheminement inverse. On prend ce qu’on nous donne ‐ puisqu'il y a plus de fiscalité ou très peu ‐ et à partir de ce qu’on nous donne, c'est une boîte à chaussures dans laquelle on essaie de faire entrer tout le monde. La boîte à chaussures, elle était de 42, la boîte à chaussures n’est plus que de 38 mais il faut toujours faire entrer du 42. Donc, c'est un exercice qui n’est pas très facile. C'est un exercice qui vaut au Vice‐président aux finances d’être très célèbre puisque chaque fois qu’un vice‐président va vous refuser quelque chose, il vous dira : « C'est de la faute à Jean‐
Marie DARMIAN », donc il y a aucun problème de ce côté‐là, je l’assume. Donc premier point, l’objectif du Conseil Général pour l’année 2013, c'est de maintenir un taux d’autofinancement de ses investissements à 8 %. Vous êtes concernés puisque dans ces taux d’investissement du Conseil Général à 8 %, il y a toutes les subventions dites d’équipement ou les subventions qui sont accordées pour des dépenses d’investissement que vous connaissez tous dans votre gestion. Premier point, pourquoi 8 % ? Parce qu'il existe une volonté politique et c'est en ça qu’il doit y avoir une confiance réciproque entre les citoyens et les élus ‐ ce n'est pas trop à la mode de faire confiance aux élus actuellement, c'est plutôt le contraire ‐ la volonté politique, c'est de préserver l’investissement parce que si les collectivités territoriales arrêtent d’investir, le massacre pour l’emploi et le massacre pour le milieu économique sera terrible. On a beau l’expliquer, apparemment c'est de l’aide au grand capital qui devient particulièrement louche. N’empêche que, chaque fois que le Conseil Général, sous l’impulsion de Sylvie LOISEAU fait un collège, c'est derrière un certain nombre d’emplois, un certain nombre de richesses, un certain nombre de durabilités de l’investissement qui va permettre à des gens de trouver du travail. C'est la priorité 2013. Toute priorité politique est critiquable, certes, mais c’est « restriction sur le fonctionnement », « essayer de dégager le plus d’investissements possible ». Ce niveau d’investissement, je vous en parlerai tout à l’heure très rapidement. Alors quelles sont les difficultés du Conseil Général et que vous devez absolument comprendre, non pas comme consommateurs de crédits du Conseil Général, mais comme citoyens participant à la vie du Conseil Général. Vous devez noter deux choses. La première chose, vous avez un camembert ‐ Bernard DUSSAUT dirait que je suis le roi du camembert ‐ 2006 et 2013. Pourquoi 2006 et 2013 ? 2006 avant la réforme, 2013 cette année, 2 ans après l’application de la réforme qui a commencé en 2006. Ce que vous devez bien comprendre, c'est regarder les portions vertes. Les portions vertes, c'est la négation du rôle politique de l’élu qui a été voulue. C'est‐à‐dire qu’en 2006, les élus du Conseil Général Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 61 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » décidaient de 37 % de leurs recettes. Ils avaient un rôle politique. Ils pouvaient dire « priorité à la vie associative », on décide qu’au lieu de 37 % de nos recettes, on mettra 38 % ou 37 %. En 2013, la part politique de choix du Conseil Général, je dis bien, je pèse mes mots : la part politique de choix du Conseil Général, est réduite à 19 %. Donc chaque fois que nous décidons d’un point de votre fiscalité qui ne porte plus que sur le foncier bâti, c'est la seule chose, on taxe le propriétaire en ce qui nous concerne, le point de fiscalité est à 2,6 millions, le point de fiscalité était antérieurement à 4 millions. Quand vous verrez la baisse des crédits de subvention, elle se retrouve strictement à travers cette différence de la fiscalité. Puisqu'un point de fiscalité représente la différence entre le montant des subventions de l’année dernière et le montant des subventions de cette année, point barre. Comme la modération fiscale est exacte et qu’elle est prônée par le Président, nous la maintenons à 2 points de fiscalité par an en moyenne sur les 3 ans. Résultat des courses, automatiquement, vous allez voir qu’il manque de l’argent dans les caisses, c'est une réalité, on ne peut pas faire autrement. Les produits gelés, l’État, vous avez bien entendu qu’on était content qu’ils soient gelés. On a appris qu’ils allaient plus l’être l’année prochaine, 2 milliards de baisse dans les dotations des collectivités. Et les produits sans pouvoir décisionnel, c'est‐à‐dire sur lesquels nous nous contentons d’enregistrer ce qu’on nous donne ou qu’on nous octroie par la loi des finances, représentaient 24 % en 2006, représentent 45 % du budget. C'est‐à‐dire que quasiment la moitié du budget n’appartient plus à la décision politique. C'est un peu comme vous, quand vous votez vos budgets associatifs, si on commençait par vous indiquer que la moitié de vos dépenses ou la moitié de vos recettes, et vous allez voir que c'est plus de la moitié de nos dépenses qui nous est imposée par des actions extérieures à notre propre choix. Tu l’as vu pourtant plusieurs fois, tu devrais être plus prompt que ça. Allez continue. Non, il l’a vu 7 fois, 8 fois et… Alors donc, sur les recettes de fonctionnement, très très vite. Les dotations de l’État en baisse : ‐1,3. Les transferts de l’État, on en reparlera tout à l’heure, c'est tout le volet social en hausse de 1,4. Vous allez dire « C'est magnifique ». Non, parce que la hausse des dotations de l’État est de 1,4 mais la hausse des dépenses est de 4,6. Donc vous creusez un trou de 3 points. En ce qui concerne le foncier bâti, alors c'est là que vous allez vite vous dresser sur votre siège, vos impôts vont augmenter de 6,4 % alors que je viens de vous dire 2. C'est totalement faux, puisqu'en fait dans les 6,4, il y a l’augmentation du nombre d’habitants en Gironde avec l’augmentation des bases d’imposition du foncier bâti. Il y a également l’actualisation automatique des bases de 1,8 et les 2 % du Conseil Général. Donc, je maintiens bien que c'est toujours la même chose. En ce qui concerne la réforme, le fameux panier de dotation de l’État, il est en augmentation de 2 %, c'est‐à‐dire à peine l’inflation. La fiscalité indirecte, alors je ne vais pas entrer dans les détails parce que ce n'est pas une réunion où on peut en parler, c'est les fameux droits de mutation qui font toujours les choux gras de Sud‐Ouest qui appelle ça « la cagnotte », « la sous‐cagnotte », « le trésor », etc. Totalement absurde puisque c'est une dotation qui est liée à la richesse économique et qu’actuellement, je ne vais pas vous faire un signe du destin Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 62 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » mais la richesse économique sur les droits de mutation est en train de s’effondrer chaque jour davantage. La fiscalité indirecte, c'est tout que l’on perçoit à côté des dotations officielles et autres, je passe. Notez seulement que le budget des recettes de fonctionnement atteindra 1,349 milliard soit une hausse de 2,7 et on passe à la diapositive suivante qui concerne les dépenses de fonctionnement. Les dépenses de fonctionnement du Conseil Général, j’entendais tout à l’heure beaucoup de débats sur « Il faut aider les associations du monde social », 59 % des dépenses de fonctionnement du Conseil Général relèvent du droit social. Elles sont toutes imposées, c’est‐à‐dire que nous n’avons aucun pouvoir de décision sur l’affectation de 59 % de nos recettes, c’est‐à‐dire 732 millions d’euros sont automatiquement inscrits dans le budget au titre des dépenses sociales : APA, 3ème âge, RSA. Ce mois‐ci, pour vous donner un exemple, le RSA en janvier a atteint en Gironde 15 millions d’euros pour une dépense salariale du Conseil Général à 16 millions. Bientôt, nous allons payer plus de dépenses RSA que de dépenses pour nos propres salariés. Les ressources humaines sont limitées. Un problème qui vous échappe également, j’ai vu tout à l’heure qu’il y avait un charmant capitaine, c’est le SDIS et les sapeurs‐pompiers : 86 millions d’euros pour les sapeurs‐pompiers. Chaque fois qu’une ambulance roule, eh bien vous la payez à travers le Conseil Général. Les transports, on n’en parle pas, c'est le ticket unique et les frais financiers qui augmentent dans la mesure où, pour maintenir le niveau d’investissement, il faut emprunter. Et les dépenses qui baissent, et vous allez voir pourquoi elles baissent, les subventions 16 %, et je vais vous expliquer pourquoi. Le fonctionnement des services est réduit à 1,3, mais il ne faut pas penser en « fonctionnement des services », il faut penser entretien des routes, des collèges, de la voirie, de tout ce qui est l’entretien général de tous les bâtiments et de tout le département, 7 000 kilomètres de routes par exemple. Et la péréquation des droits de mutation : si vous avez des questions, je vous l’expliquerai, c'est tellement compliqué qu’on vous prend d’un côté ce que vous gagnez de plus de l‘autre. Donc c’est ce qu’on appelle la péréquation. Voilà la diapositive la plus importante pour vous. Lorsque l’on fait le budget du Conseil Général, au moment où on pose son stylo sur la feuille, on a 1,128 milliard d’euros de dépenses qui sont imposées, c'est‐à‐dire que vous ne pouvez pas en discuter 1 euro. Je vous ai dit 731 millions d’euros de dépenses sociales, vous voyez que je me suis trompé que d’1 million, mais on l’a déjà dépensé le million de plus puisque ce mois‐ci, on en a dépassé 4 de plus. Les transports, 59 millions d’euros, pour les transports assurés sur le département : transport collectif, ramassage scolaire, transport dans les collèges, etc. La péréquation des droits de mutation, c'est‐à‐dire que comme la Gironde en volume de droits de mutation a plus que les autres départements, on lui prend 21 millions sur ce qu’elle gagne en plus pour le donner à ceux qui ont moins. C'est la solidarité territoriale. Les charges financières, vous ne pouvez pas les éviter. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 63 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Le SDIS, je vous l’ai dit 86 millions d’euros, c'est la contribution du département à votre sécurité individuelle de chaque jour sur les terrains de sport ou n’importe où. Les ressources humaines 211 millions d’euros. Ce qui fait que pour 2103, il fallait trouver 48 millions d’euros supplémentaires pour faire face aux dépenses obligatoires. Ça se traduit donc par la partie souple et y en a plus que deux, c'est les subventions et c'est le fonctionnement des services. Le reste, il est impossible de jouer sur ces dépenses‐là. Les subventions et le fonctionnement des services, il nous manque 4 millions d’euros que vous retrouvez dans les deux points de fiscalité que l’on aurait pu ajouter à la fiscalité. Et donc on a rogné de 4 millions d’euros sur notre partie souple, c'est‐à‐dire sur notre politique non obligatoire. Ce n'est pas une nécessité de le faire sauf que jusqu’à présent, on a beau chercher où on peut prendre les 4 millions d’euros sur la partie rigide, ce n’est pas possible de la prendre puisque la dépense sociale, vous ne pouvez pas y toucher puisqu'elle vous est imposée chaque jour, puisque c'est la CAF qui envoie la facture du RSA, l’APA est envoyée en facture par tout le monde. On continue. Les priorités pour l’investissement : les collèges, c'est la priorité départementale. C'est ce qu’a très bien expliqué tout à l’heure Matthieu, c'est des choix politiques, les collèges étant une dépense obligatoire. Les infrastructures, c'est les routes, c'est les dépenses obligatoires du Conseil Général. Les autres, c'est notre propre patrimoine. La solidarité qui arrive à 44 millions. Et en haut, vous voyez apparaître un petit triangle bleu qui va vous réjouir, vous contribuez à hauteur de 42 millions d’euros pour la LGV qui va vous permettre de gagner 20 minutes entre Bordeaux et Paris lorsqu’elle sera en service. On continue. Et voilà, ils m’ont fait que ça donc voilà, j’ai terminé. Simplement, dans le contexte actuel, un certain nombre de mesures équitables ont été prises dans le fonctionnement. Tout à l’heure a été posée la question de l’évaluation des associations. Je suis destinataire, chaque semaine, d’une évaluation d’une association qui repose non pas sur le bilan financier, mais sur le bilan, je suis d’accord avec ce qui a été dit, développement durable. C'est‐à‐dire par exemple, je dois être attentif à ce que les assemblées générales se soient bien tenues. Quand je dis « bien tenues », ce serait déjà pas mal si quelques‐unes se tenaient déjà. Si, si, si, je sais ce que je dis. Mon ami APPRIOU est là, il a dit « Tu vas envoyer quelques SCUD ». Je le regarde toutes les semaines. Deuxièmement, je suis attentif à quelque chose qui pèse désormais sur le Conseil Général, ce sont les masses de trésorerie stockées dans certaines associations. Elles dépassent actuellement les ressources de fonctionnement du Conseil Général. Il y a des associations qui ont 25 millions d’euros de trésorerie actuellement sur la base et j’en ai entendu parler tout à l’heure d’ailleurs dans les discours. Elles ne sont pas ici non, mais il faut le savoir et elles maintiennent toujours leurs demandes de subventions à la même hauteur au Conseil Général. Et on bien attentif évidemment au fonds de roulement qui vous permet à vous de faire face à vos dépenses courantes. Donc, on a une évaluation globale pour toutes les associations qui touchent des subventions significatives, ce qui nous permet de constater que quelquefois, le principe numéro 1 de la vie politique c'est : « Aide‐toi, le Conseil Général t’aidera ». Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 64 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Jean PETAUX Merci beaucoup. Matthieu ROUVEYRE pour la conclusion de la conclusion. Matthieu ROUVEYRE Oui alors très rapidement, je ne ferai pas de synthèse parce que vous avez entendu ces débats, ils ont été riches et difficilement synthétisables. En revanche, une vidéo a été réalisée de ces interventions, donc vous la retrouverez sur le site du Conseil Général. Nos intervenants ont rédigé un certain nombre d’ouvrages, ils ont réalisé quelques publications, vous pouvez également les retrouver sur la bibliographie qu’on met à disposition sur le site du Conseil Général. Et les débats qui peuvent continuer également grâce aux réseaux sociaux. Donc il ne faut pas hésiter à s’approprier l’ensemble de ces outils. Moi, je voudrais évidemment conclure en vous remerciant, en vous remerciant d’être venus. Vous avez pour cette quatrième édition également été très nombreuses et très nombreux. Et ça nous fait plaisir parce qu'on se dit que peut‐être on a trouvé un moyen de travailler sur des thématiques transversales ensemble en essayant, effectivement, parfois il y a du débat, je trouve que c'est plutôt intéressant, mais peut‐être trouver notamment avec le Comité Consultatif un mode de fonctionnement qui est plutôt satisfaisant. Je voudrais également remercier évidemment les intervenants : Monsieur BAYLE, Monsieur LAVILLE et évidemment Monsieur PETAUX qui, maintenant depuis quelques années, gère ce forum avec une main de maître. (applaudissements) Remercier parce que sans eux, évidemment, ce forum ne pourrait pas se tenir, les services du Conseil Général. Je ne peux pas tous les citer, mais je pense évidemment à la direction de Madame LOISEAU, celle de Laurent GAUMET à Claire GOUARDES, évidemment à toutes les mains qui participent à cette organisation, qui préparent les invitations, qui n’hésitent pas à vous repasser un petit coup de fil pour vous relancer le cas échéant, qui tiennent à votre disposition un formulaire dont je parlerai. Et enfin, je voudrais remercier mes collègues qui étaient présents, qui ont pris de leur temps et notamment Jean‐Marie qui est, sans doute, parti là maintenant à Langon avec son Powerpoint pour évidemment aller expliquer la situation. Elle n’est pas facile. Il a un rôle plutôt ingrat parce qu’il a raison de dire que souvent, les élus pour botter en touche expliquent que le Vice‐président aux finances peut répondre. Mais cela dit, il le fait je pense très bien et j’espère que vous avez compris la situation dans laquelle on se trouve. Pour les associations qui dépendent de ma commission, bon vous le savez, il y a un certain nombre d’associations qui ont été notifiées. On a vu là le chiffre de ‐16 %. Alors c'est une moyenne. Si vos subventions baissent au‐delà, normalement, il y a un problème parce que ces associations qui baissent au‐delà ne se trouvent pas dans cette salle. Je vais vous donner un seul exemple parce que vous savez que c'est un peu, comment dire, mon « cheval de bataille » mais on s’est posé la question de savoir par exemple, si les Girondins de Bordeaux devaient bénéficier d’une même subvention ou si, par exemple, par rapport aux clubs de sports amateurs, il fallait pas faire une péréquation, mais là favorable aux sports amateurs. Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 65 / 66 4ème Forum départemental sur la Vie associative. « Vers un nouveau modèle associatif » Et on a fait ce choix‐là au Conseil Général. Ce qui n’est pas un choix simple. Et notamment, c'est quelque chose que devra défendre Isabelle DEXPERT parce qu'on sait aussi que le football professionnel est extrêmement populaire. Et donc en termes de positionnement électoral, ce n’était pas toujours simple. Mais en tout cas, par exemple, je peux vous dire qu’un club de football professionnel a vu ses subventions baisser au‐delà des ‐16%. Ce qui nous a permis de faire une moyenne et d’aider un peu plus évidemment ou en tout cas descendre un peu moins, ceux qui en avaient le plus besoin. Donc, juste pour terminer sur ces aspects. Je crois que cela a été dit, on se retrouve dans une période d’incertitude, une situation dramatique, mais ce que j’ai envie moi de retenir, c'est qu’ensemble, on peut arriver à faire des choses. Je crois qu’il nous reste quand même une énergie forte. À la fois au Conseil Général, vous avez des élus qui sont extrêmement intéressés par le travail que vous menez. Moi, en tant que Président de la Commission de la Vie Associative, mais bien sûr Isabelle DEXPERT, le Président MADRELLE. Évidemment que nous avons véritablement à cœur de continuer à vous donner les moyens d’agir sur vos territoires et donc on reste vos interlocuteurs. Et malgré la période que nous traversons, nous voulons évidemment trouver des nouveaux dispositifs, trouver des solutions pour aller de l’avant. Il est hors de question de s’enterrer soi‐même. C'est‐à‐dire que les services du Conseil Général, je vois Claire, je vois Madame LOISEAU, je vois Laurent GAUMET, on travaille ensemble pour essayer de continuer à avancer malgré les difficultés. Parce que nous pensons que l’intérêt général commande à ce que nous mettions toute notre énergie à continuer à travailler dans ce sens. Voilà. J’en termine par là. Alors, je ne sais plus si la rigueur budgétaire nous a empêchés de faire un pot. Ah si… Jean PETAUX Francis LARRIBA qui a été à la veille informatique depuis le début de l’après‐midi me dit de te dire qu’il y a un rafraîchissement. Matthieu ROUVEYRE Bon d’accord. Bon, il y a un rafraîchissement. On n’est plus du tout… parce que vous le verrez sur un certain nombre d’actions… parce qu'évidemment, les baisses, on se les ait appliquées à nous également sur un certain nombre de choses et d’abord à nous. Donc, il y aura quelques rafraîchissements, peut‐être une citronnade. Merci à tous et encore merci d’être venus. Nous avons repéré quelques éléments. N’oubliez pas surtout de remplir le formulaire parce qu'il va nous aider à vous proposer un bon forum l’année prochaine. Merci encore. ‐ oOo ‐ Bordeaux, Vendredi 22 février 2013 Page 66 / 66