Actualités dans la prise en charge chirurgicale des cancers du côlon

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Actualités dans la prise en charge chirurgicale des cancers du côlon
Mini-revue
Actualités dans la prise
en charge chirurgicale
des cancers du côlon
Karine Pautrat, Patrice Valleur, Xavier Dray, Marc Pocard
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Département Médico-Chirurgical de Pathologie Digestive, hôpital Lariboisière,
2 rue Ambroise Paré, 75010 Paris
<[email protected]>
La prise en charge des cancers du côlon continue de progresser, la
généralisation d’une vraie prise en charge multidisciplinaire constitue le progrès le plus marquant, répondant aux objectifs du plan
cancer. En chirurgie, si les grandes règles carcinologiques sont
toujours indispensables (résection « en-bloc », résection R0, curage
lymphatique, contrôle des hémorragies, la cœlioscopie actuellement validée comme voie d’abord, est devenue indiscutable pour
les petites tumeurs. L’autre grande évolution, quoique moins perceptible est l’évaluation des pratiques et la détermination de
critères de qualité qui à terme vont structurer la prise en charge
chirurgicale de ces cancers.
Mots clés : cancer du côlon, chirurgie, traitement adjuvant, laparoscopie,
chimiothérapie intrapéritonéale, ganglion sentinelle, qualité de vie
L
a prise en charge des cancers du côlon représente de par sa
fréquence et son caractère multidisciplinaire un des exercices les
plus fréquents de la cancérologie digestive. La généralisation sur
toute la France, d’une prise en charge de ce type, constitue probablement
la vraie révolution des trois dernières années écoulées. Il s’agissait d’un
des objectifs du Plan Cancer, mais surtout d’un travail très ancien mené
par de nombreuses sociétés savantes.
Parallèlement aux progrès récents du versant médical du traitement, allant
des progrès de la coloscopie à ceux de la chimiothérapie, il existe de
nombreuses évolutions en chirurgie qui, sans que les grandes règles de la
chirurgie carcinologique soient changées, font évoluer et modifient la
prise en charge actuelle de ces cancers. L’introduction validée de la
cœlioscopie est probablement la plus visible de ces évolutions, mais
d’autres sont en cours de validation comme l’utilisation de la tomographie
par émission de positrons (TEP), ou elles sont limitées à des situations
particulières comme la prise en charge des carcinoses péritonéales par
chirurgie et chimiothérapie intrapéritonéale. Elles vont probablement
modifier nos pratiques et justifient cette mise au point.
Le traitement chirurgical des cancers coliques non compliqués est l’exérèse de la tumeur primitive avec des marges de côlon sain (exérèse R0),
ainsi que la réalisation du curage lymphatique. Le problème de la marge
30
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, mars 2007
doi: 10.1684/hpg.2006.0014
Des règles chirurgicales,
anciennes mais toujours actuelles
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de résection de part et d’autre de la tumeur colique est
beaucoup moins important que pour le cancer du
rectum. La ligature des vaisseaux à l’origine autorise
une exérèse large du mésocôlon et des ganglions
lymphatiques de drainage [1, 2]. La ligature des vaisseaux à l’origine permet l’exérèse du mésocôlon et des
derniers relais ganglionnaires, qui sont envahis dans 2
à 17 % des cas. Le bénéfice de la ligature à l’origine
de l’artère mésentérique inférieure n’est pas démontré
en termes de survie [1]. L’existence de ganglions distaux est bien évidemment un facteur de mauvais pronostic ; Malassagne et al., dans une série rétrospective
de 197 malades rapportent un taux de survie à 5 ans
qui passe de 45 % à 17 % en cas d’atteinte des
ganglions distaux [3]. Toutefois, ce taux de survie
n’étant pas nul, la lymphadénectomie ne peut donc pas
être considérée comme seulement informative puisque
17 % des patients ont été « guéris » par la chirurgie,
alors qu’un curage limité laissant ces ganglions
n’aurait pas permis ce résultat.
Au total, les grandes règles de la chirurgie carcinologique s’appliquent aux traitements chirurgicaux des
cancers coliques : une résection « en-bloc » n’ouvrant
pas la tumeur, une résection R0 (pas de lésion macroscopique résiduelle et marges saines), un curage lymphatique centré sur le vaisseau principal et un acte
opératoire limitant au plus les hémorragies.
Cœlioscopie et cancer :
possible si les critères
pré et peropératoires sont optimaux
Critères carcinologiques :
taux de survie et de récidive identiques
Leung et al. dans une étude récente, portant sur 403
malades porteurs d’un cancer du sigmoïde et du haut
rectum, rapportent un taux de survie globale à 5 ans
de respectivement 76 % et 73 % dans les groupes
cœlioscopie et laparotomie [4]. Les taux de survie à
5 ans sans récidive étaient respectivement de 75 et
78 %. Les taux de récidive locale ou péritonéale (6,6
versus 4,1 %), métastatique (18 versus 15 %), étaient
semblables dans les 2 groupes. Concernant le respect
des règles carcinologiques et chirurgicales, les 2 groupes étaient comparables en termes de marges proximale et distale, et du nombre de ganglions examinés
(11 versus 12).
Cette dernière étude confirme, s’il en était besoin, les
résultats des grandes études randomisées précédentes
[5], notamment l’étude américaine [6] qui avait randomisé 872 patients par 48 équipes. Dans cette étude,
les taux de récidive et de survie à trois ans étaient
strictement identiques. Les taux de greffe tumorale
pariétale, longtemps sujets d’inquiétude étaient évalués dans cette étude, et étaient similaires dans les
groupes cœlioscopie et laparotomie (0,5 versus
0,2 %) [6].
Critères cliniques :
une amélioration modérée
mais indiscutable en postopératoire
Dans cette même étude [6], la réalisation d’une cœlioscopie permettait de réduire d’une journée la durée
d’hospitalisation, 5 jours versus 6 jours (p < 0,001) et
également de réduire d’une journée le besoin d’antalgiques intraveineux (p < 0,001). L’ensemble des études s’accorde sur la supériorité de la cœlioscopie
concernant l’importance de la douleur postopératoire,
l’utilisation d’antalgiques ainsi que la reprise du transit
[7] (tableau 1). Si les gains sont selon les études
modérés, ils sont constants.
Tableau 1. Extraits du texte publié par l’Anaes et la Haute Autorité de Santé en mars 2005 :
évaluant l’apport de la cœlioscopie dans la prise en charge
des cancers colorectaux
http://www.anaes.fr.
Critère évalué
Survie et récidive
Respect des règles
carcinologiques
Greffe pariétale
Nombre
d’études
retenues
Résultat
Niveau
de
preuve
3
6
Non-infériorité de la cœlioscopie
Pas de différence pour les marges
de résection et les curages
Va de 0 % à 3,5 %, comparable à la
chirurgie ouverte
Les douleurs postopératoires
sont moindres après cœlioscopie
qu’après chirurgie ouverte
L’iléus postopératoire est moins important
après cœlioscopie
Les modifications immunitaires seraient peu
affectées par la technique utilisée
B
A
22
Douleur postopératoire
5
Iléus postopératoire
5
Réactions inflammatoire et
immunitaire
9
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, mars 2007
D
B
A
C
31
Mini-revue
Critères de sécurité : identiques
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Aucune des neuf études randomisées actuellement
publiées n’a rapporté de taux de mortalité périopératoire différent selon la technique ; de même, la
morbidité ne semble pas modifiée. Dans un essai
multicentrique récent, la morbidité était semblable
dans les 2 groupes (32 % versus 32 %), avec cependant plus de complications pulmonaires dans le groupe
laparoscopie [5]. Le taux de conversion est difficile à
estimer car les populations des études sont hétérogènes. Dans une méta-analyse, le taux de conversion
était évalué à 15 % [8]. Dans une méta-analyse de
12 essais randomisés, Abraham, et al. identifiaient
comme causes fréquentes de conversion une tumeur
localement évoluée, une dissection extra-anatomique,
des adhérences intra-abdominales, des difficultés
d’exposition, ou des complications peropératoires [9].
Si la conversion est réalisée en cas de difficultés, les
pièces opératoires et les nombres de ganglions examinés sont identiques quelle que soit la technique. Seule
la durée opératoire est significativement plus longue
par cœlioscopie dans la quasi totalité des études,
donnée qui ne représente plus un critère de qualité
actuellement, mais qui doit par contre être incluse dans
les calculs de coûts.
Au total, les résultats carcinologiques de la cœlioscopie dans le cancer colique ne sont donc pas différents
de ceux de la chirurgie ouverte ; il est donc possible
d’opérer les cancers coliques par cœlioscopie. Dans
toutes les études, ces interventions sont plus longues
qu’en laparotomie, l’avantage fonctionnel immédiat en
postopératoire pour les patients est faible mais indiscutable. Enfin, après 6 mois, aucune différence ne semble persister [10] si ce n’est une cicatrice plus petite,
elle aussi indiscutable. Néanmoins, il convient de rester prudent et de rappeler que tous les malades inclus
dans ces études étaient sélectionnés, et que les chirurgiens participants avaient tous une expérience importante de la chirurgie colique par cœlioscopie.
Critères de qualité, évaluation
des pratiques professionnelles :
des notions nouvelles
mais essentielles
Nous devons évaluer scientifiquement nos pratiques. A
défaut de le faire, ceci est actuellement réalisé par voie
de presse et ne repose que sur le volume d’activité, ce
qui est probablement un critère très peu pertinent. Si,
pour la chirurgie du rectum, l’importance du volume
d’activité semble prouvée avec un bon niveau de
preuve, elle reste discutable pour la chirurgie colique
[11]. Plusieurs études ont évalué l’effet-volume en chirurgie colique avec des résultats contradictoires. Seules
32
2 études rétrospectives ont suggéré un effet-volume
significatif [12, 13]. Ainsi, aucune étude n’a permis de
mettre en évidence un volume annuel – seuil en dessous
duquel la morbi-mortalité devient excessive. Le chirurgien n’est d’ailleurs pas l’unique facteur dans la morbimortalité de la chirurgie colique : il y a aussi le gastroentérologue, le radiologue, le réanimateur et le
personnel infirmier, qu’il convient de prendre en
compte dans l’interprétation des résultats de la chirurgie [14]. Ainsi il est possible qu’in fine, aucun chiffre ne
soit proposé par nos tutelles. En revanche, il est possible d’évaluer de façon plus globale la prise en charge
des cancers colorectaux (CCR), avec la tenue systématique ou non d’une réunion pluridisciplinaire et le
niveau de formation des praticiens, puisque les règles
de la formation continue devraient s’appliquer. Les
critères applicables à tous sont probablement peu
nombreux. A titre d’exemple, le seuil d’au moins 8
ganglions jugé nécessaire à l’évaluation correcte du
statut ganglionnaire selon la conférence de consensus
française [au moins 12 pour l’UICC (classification
TNM)] [15], n’est probablement un critère de qualité
que pris de façon générale et non au cas par cas.
Au total, l’évaluation des pratiques professionnelles
doit être mise en place, et si cela peut sembler complexe, elle doit être réalisée régulièrement par chaque
équipe, car elle ne sera pertinente que réalisée par les
praticiens.
Chimiothérapie postopératoire :
décidée sur la clinique et l’histologie
mais pas encore sur la génétique
Les recommandations actuelles sont de proposer une
chimiothérapie adjuvante aux malades présentant une
tumeur de stade III et en cas de tumeur de stade II à haut
risque de récidive : tumeur perforée, en occlusion, peu
différenciée, et selon la présence d’emboles vasculaires. Dans ce cas, il est indispensable que soit clairement expliqué aux malades le bénéfice modéré espéré
de l’administration d’une chimiothérapie, les toxicités
potentielles de celle-ci puisqu’il faut que le rapport
bénéfice/risque soit évalué et exposé au mieux. Le
choix de la chimiothérapie devra être guidé par ce
rapport et la chimiothérapie interrompue en cas de
toxicité excessive (Recommandations FFCD 2005).
Ces notions doivent être connues de tous les chirurgiens puisqu’ils devront les premiers informer les
patients en postopératoire, alors qu’ils sont dans une
situation très particulière où la relation patientchirurgien est particulièrement forte et ce, avant la
consultation d’oncologie médicale.
La biologie cherche à améliorer la sélection des
patients dans le but de traiter les stades II à risque de
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cancer du côlon et d’éviter de traiter les stades III déjà
guéris par la seule chirurgie. Actuellement, cette
« signature tumorale » du risque de récidive ou de
métastase n’existe pas, même si cela semble de plus en
plus proche [16]. De la même façon, il n’est pas encore
possible de prédire une chimiosensibilité pour une des
drogues utilisées en adjuvant sur des critères biologiques tumoraux, permettant d’orienter le choix de la
chimiothérapie. Toutefois, toutes ces recherches ont
permis de progressivement distinguer des types de
cancers coliques.
Le profil d’une instabilité des microsatellites (MSI) est
retrouvé dans 10 à 15 % des cancers du côlon. Il est
secondaire le plus souvent à une hyperméthylation du
promoteur de HMLH1 et s’observe plus fréquemment
dans les tumeurs du côlon droit et chez les sujets âgés.
Il apparaît que le profil MSI est associé à un meilleur
pronostic et à un risque moindre de métastases ganglionnaires et/ou hépatiques [17, 18]. Les résultats
concernant l’efficacité plus importante de la chimiothérapie sont contradictoires [19, 20]. Une étude française a montré le très bon pronostic de ces tumeurs MSI
de stade T3N0M0 comparé aux tumeurs non MSI
(dites MSS) ce qui pourrait orienter le choix thérapeutique [21].
Au total, chaque équipe doit actuellement envisager
une démarche locale pour être capable, lorsque cela
sera devenu impératif, de déterminer à quel type
génétique de cancer colique appartient le cas pris en
charge, d’autant plus que des thérapies ciblées sont
possibles.
TEP scan : un examen
incontournable mais dont la place
reste à déterminer
La tomographie par émission de positrons (TEP) a
l’avantage d’être une imagerie fonctionnelle et non
plus seulement descriptive, couplée à une tomographie
(TEP-scan). Ses avantages sont certains. Néanmoins,
cet examen est coûteux, peu disponible, et doit donc
être prescrit dans certaines indications : certaines ne
seront pas traitées ici, comme le bilan d’une récidive ou
de métastases, d’autres sont très spécifiques comme les
cas d’élévation de l’ACE sans cause décelée par
l’imagerie conventionnelle.
Élévation de l’ACE
Il n’est pas démontré que la surveillance, chez des
malades opérés d’un cancer colorectal, par le dosage
d’antigènes carcino-embryonnaires (ACE) améliore la
survie. Néanmoins, lorsque ce marqueur est élevé,
l’imagerie conventionnelle est parfois incapable
d’identifier le site de récidive. Dans cette indication
précise, il a été rapporté que la TEP permettait de
localiser une récidive avec une sensibilité de 79 %
[22]. Ces résultats imposent de réévaluer l’apport de la
surveillance par dosage de l’ACE chez des malades
opérés d’un cancer colorectal.
Sites difficilement explorables :
un apport limité de la TEP
Le caractère tumoral d’une adénopathie est suspecté
par l’imagerie conventionnelle sur des critères dimensionnels (> 1 cm) et morphologiques (sphéricité), critères le plus souvent approximatifs et donc peu fiables.
Lai et al., dans une série de 34 malades sélectionnés
pour la chirurgie de métastases hépatiques ont noté
que 6 d’entre eux avaient des métastases ganglionnaires latéro-aortiques identifiées par la TEP et faisant
récuser la chirurgie [23]. De la même façon, des
résultats encourageants ont été rapportés pour la détection de carcinose péritonéale, mais ne sont pas confirmés par les séries comportant des explorations chirurgicales [24, 25].
TEP-scan et résécabilité limite :
une pratique qui se généralise
Les progrès des techniques chirurgicales et de la chimiothérapie permettent d’envisager des résections
chez un nombre croissant de malades ayant des récidives ou des métastases hépatiques, pulmonaires ou
péritonéales. Tous ces cas de « chirurgie limite » nécessitent des explorations préopératoires les plus sensibles
possibles afin d’éviter des interventions inutiles. Fong et
al., dans une étude prospective portant sur 40 malades
ayant des métastases hépatiques, ont montré que la
TEP modifiait l’attitude thérapeutique dans 40 % des
cas [26]. Une difficulté est représentée par les faux
positifs, susceptibles de contre-indiquer la chirurgie
d’exérèse chez des malades résécables. Le risque de
sur-stadification dans des études récentes était de 5 et
6 %, du fait de foyers d’hyperfixation liés à d’anciens
foyers infectieux [27, 28].
Au total, la TEP et maintenant le TEP-scan sont devenus
indispensables lorsque la situation et la chirurgie sont
inhabituelles. Par contre, une évaluation préopératoire
d’une tumeur primitive simple ou une surveillance par
cet examen, si elles sont possibles, ne sont pas encore
validées.
La chirurgie de la carcinose associée
à la chimiothérapie peropératoire :
enfin validée,
mais pour quels malades ?
Depuis 2003, la chirurgie de la carcinose péritonéale
a été validée par une étude prospective randomisée
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33
Mini-revue
1,0
Probabilité
0,8
0,6
0,4
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CHIP
Cas contrôles
0,2
0,0
50
53
39
37
18
26
8
20
5
11
1
7
4
0
6
12
18
24
30
36
Randomisation par mois
Figure 1. Courbes de survie d’après [29]. CHIP : ChimioHyperthermie IntraPéritonéale.
réalisée en Hollande [29]. Cette étude a randomisé, en
cas de carcinose d’origine colique prouvée histologiquement, 104 patients entre un traitement de référence
par chimiothérapie de type LV 5-fluorouracile versus un
traitement de chirurgie d’exérèse associé à une chimiohyperthermie intrapéritonéale (CHIP) par mitomycine
suivi d’une chimiothérapie systémique identique. Les
courbes de survie sont rapportées sur la figure 1 et sont
statistiquement significatives. En France, une étude de
phase II réalisant pour des carcinoses d’origine colorectale une exérèse complète macroscopique (R1) puis
une CHIP par oxaliplatine a permis d’obtenir des
Figure 2. Aspect peropératoire de la réalisation d’une chimiothérapie intrapéritonéale selon la technique dite du « coliseum », permettant un
brassage manuel assurant une diffusion spatiale optimale de la chaleur et de la chimiothérapie.
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Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, mars 2007
Tableau 2. À quels patients proposer une chirurgie de carcinose péritonéale puis une
chimio-hyperthermie intrapéritonéale ?
Données cliniques
Age
Bilan d’extension
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Transit
Ascite
Cancers colorectaux
Détails
Age physiologique ≤ 65 ans
Pas de localisations
extra-péritonéales
Pas d’occlusion
Pas d’ascite
70 ans pour certaines équipes
Sauf 1-2 métastases
hépatiques ?
Sauf si évolution favorable ?
En particulier se majorant sous
chimiothérapie
Si description sur CRO, TR,
TDM peu pathologique
Y compris sur les marqueurs
Gravité de la carcinose
Carcinose modérée
Histoire de la maladie
Une maladie : chimiosensible
chiffres de survie encore plus élevés pour des malades
très sélectionnés [30] (figure 2). Le tableau 2 essaye de
définir les meilleurs critères cliniques pour réaliser ce
type de prise en charge. Ces critères sont importants
puisqu’ils doivent conduire auprés de patients jeunes
chez qui on découvre une carcinose péritonéale non
connue en préopératoire, donc le plus souvent limitée
et extirpable, à surseoir à la résection chirurgicale. En
effet, lorsque la barrière péritonéale est intacte, n’a pas
été ouverte par la chirurgie ou la carcinose, les probabilités de succès de la CHIP sont plus grandes et la
mortalité bien moindre.
Au total, les indications du traitement des carcinoses
péritonéales sont maintenant connues et devraient
induire de nouvelles attitudes thérapeutiques chez les
chirurgiens ou les oncologues, référant les patients soit
sans exérèse chirurgicale, soit alors que la carcinose
est contrôlée par la chimiothérapie, avant un éventuel
échappement [31].
Ganglion sentinelle :
un concept applicable au côlon,
mais pour des objectifs précis
L’intérêt d’une détection du ganglion sentinelle (GS)
dans la prise en charge des CCR est un sujet toujours
débattu. Le GS pourrait apporter trois types d’information.
Certains auteurs ont proposé de réorienter le curage en
peropératoire par la réalisation d’une cartographie
lymphatique (figure 3). Dans l’étude multicentrique de
Saha et al., un drainage lymphatique aberrant a été
rapporté chez 5 % des patients (11 cas sur 198) [32].
Cette utilisation peut voir son intérêt souligné en cas
d’antécédents de chirurgie colique limitant les possibilités de conservation digestive à deux uniques pédicules vasculaires [33].
La démarche la plus fréquente a été de chercher,
comme pour les cancers du sein, à éviter une analyse
de toute la pièce opératoire en utilisant la seule information du GS. Dans ce type de démarche, la sensibilité
et la spécificité sont les éléments majeurs. Pour certains,
une cellule circulante positive en immuno-histochimie
ou un signal en RT-PCR a été jugé comme un GS positif
ce qui a conduit certains auteurs à défendre la technique comme informative [34]. Par contre, si on ne
retient que la présence de cellules tumorales en histologie conventionnelle, la seule analyse du GS ne permet pas de se passer de l’analyse du GS car les faux
négatifs sont très fréquents [35]. Le concept le plus
innovant consiste à mettre en évidence des micrométastases en réalisant des coupes multiples du GS en
histologie conventionnelle qui, comme elles, ne font
pas appel à une technique inhabituelle (ce qui est le
cas des métastases occultes détectées seulement par
l’immuno-histochimie) et permettent « d’up grader » le
stade histopronostique II en stade III (selon la classification UICC), et ce pour près de 10 % des cas selon les
études, y compris en technique ex vivo [36].
Au total, la technique du GS doit permettre la découverte de micrométastases pour 10 % des cancers de
stade II. Par contre, cette technique a un fort taux de
faux négatifs et ne permet pas de se passer de l’analyse de toute la pièce opératoire.
Figure 3. Aspect peropératoire d’une détection d’un ganglion
sentinelle : l’injection a été réalisée en sous-séreux, le ganglion est
visible sur l’axe vasculaire, ici en position modale.
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, mars 2007
35
Mini-revue
En résumé
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 78.47.27.170 le 07/02/2017.
• Les recherches en génétique continuent de progresser et
devraient modifier nos pratiques, essentiellement en démembrant
les divers cancers du côlon et en orientant nos choix thérapeutiques médico-chirurgicaux, comme par exemple celui des traitements postopératoires. Tout aussi indiscutable, l’utilisation d’un
TEP-scan, qui se généralise pour la prise en charge des métastases, va devoir trouver ou non sa place dans le bilan initial d’un
cancer du côlon et dans son suivi post-thérapeutique.
• D’autres possibilités inhabituelles sont en cours d’évaluation et
pourraient à terme trouver une place dans la pratique clinique. Il
s’agit par exemple de la prise en charge des carcinoses péritonéales d’origine colique par une chirurgie d’exérèse (et non de
debulking) suivie immédiatement d’une chimiothérapie intrapéritonéale, qui voit sa validité reconnue, mais dont les indications et
modalités sont encore à définir. La recherche des ganglions dit
sentinelles à l’évidence ne remplacera pas l’analyse classique de
toute la pièce opératoire mais pourrait améliorer la détermination
du stade tumoral en détectant pour 10 % des stades II des
micrométastases « surclassant » ces tumeurs en stade III.
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