INDIVIDUATION ET DETACHEMENT A L`ADOLESCENCE :
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INDIVIDUATION ET DETACHEMENT A L`ADOLESCENCE :
Université Libre de Bruxelles Faculté de Médecine Service de Psychiatrie Clinique de Psychiatrie Infanto-Juvénile Hôpital Erasme INDIVIDUATION ET DETACHEMENT A L’ADOLESCENCE : EXPLORATIONS CLINIQUES ET PSYCHOPATHOLOGIQUES Docteur Marie DELHAYE Thèse déposée en vue de l’obtention du grade de Docteur en Sciences Médicales Année Académique 2011-2012 Université Libre de Bruxelles Faculté de Médecine Service de Psychiatrie Clinique de Psychiatrie Infanto-Juvénile Hôpital Erasme INDIVIDUATION ET DETACHEMENT A L’ADOLESCENCE : EXPLORATIONS CLINIQUES ET PSYCHOPATHOLOGIQUES Docteur Marie DELHAYE Promoteur : Pr Paul LINKOWSKI Co-Promoteur : Pr Luc GOOSSENS Thèse déposée en vue de l’obtention du grade de Docteur en Sciences Médicales Année Académique 2011-2012 Remerciements Je remercie tout particulièrement le Professeur Paul Linkowski, Chef du Service de Psychiatrie, qui, dans son intérêt constant pour les derniers développements scientifiques en psychiatrie m'a parlé un jour (au commencement de mon aventure doctorale) d'un article qu'il avait lu sur le concept de détachement. Il a toujours cru en moi dans les moments de découragement ; il m'a donné les moyens nécessaires pour entreprendre cette recherche. Je souhaite également lui manifester toute ma reconnaissance pour son fidèle soutien dans mon évolution professionnelle et académique au sein de la clinique de psychiatrie infanto- juvénile à l'hôpital Erasme. Je remercie aussi vivement le Professeur Luc Goossens, Chef du service de Psychologie du Développement à la Faculté Universitaire de Leuven, pour son investissement personnel et le partage inconditionnel de ses connaissances inestimables. Son écoute, ses conseils avisés, son expertise scientifique et ses caractéristiques humaines ont été d'une aide déterminante. La richesse des discussions scientifiques avec le Professeur Goossens ont permis de structurer ce travail et à la clinicienne que je suis de prendre goût à la recherche. Je le remercie pour sa patience et sa gentillesse tout au long de ces années. Je remercie sincèrement ma petite équipe qui m'a suivi tout au long de cette recherche : Françoise Bury, Julie Burton, Doris van Cleemput. Leur engagement et leur bonne humeur ont permis une productivité remarquable. Je remercie Chantal Kempenaers et Bernard Jacques qui m’ont aidé pour la structuration des outils et l’analyse des données. Je remercie Emilie Batselaere qui est intervenue dans la récolte des données. Je remercie mon père, Guy Delhaye, pour sa relecture attentive et ses bons conseils. Je remercie aussi chaleureusement tous les adolescents qui ont participé à l'étude ainsi que la direction, les enseignants et les équipes éducatives des différents établissements. Je remercie toute l'équipe de l'unité adolescents de l'hôpital Érasme pour sa patience, son soutien, ses réflexions intéressantes, qui m'ont donné envie de poursuivre mes engagements même dans les moments les plus critiques. Je remercie Alberte Chevalier, Chef de Service du Secrétariat du Service de Psychiatrie pour ses encouragements constants. Je remercie Judith Mathys et Jennifer Bogaert, Secrétaires du Service de Psychiatrie pour leurs conseils judicieux et leur aide dans la rédaction de ma thèse. Je remercie les membres du jury qui m'ont permis de présenter ma thèse. Je remercie mes parents et ma famille qui m'ont permis de devenir ce que je suis aujourd'hui. Je remercie vivement mon tendre époux Laurent, pour sa patience et son soutien lors des périodes de stress et de doute dans la dernière ligne droite de mon aventure doctorale ! Curriculum Vitae Nom, Prénom : DELHAYE Marie Nationalité : belge Numéro d’inscription au Tableau de l’Ordre des Médecins : 58480 Etudes universitaires : 1. Candidature en sciences médicales : Université de Mons, avec grande distinction (1992-1995). 2. Doctorat en Médecine, Chirurgie et Accouchements, avec distinction : U.C.L. (19951999). 3. DES en psychiatrie : Université Libre de Bruxelles, filière pédopsychiatrique (19992004). 4. Doctorat en sciences médicales (en cours) : Faculté de Médecine de l’ULB ; thèse intitulée : « Individuation et Détachement à l’Adolescence: explorations cliniques et psychopathologiques » (déposée en mars 2012). 5. Certificat de Criminalistique et Psychiatrie Judiciaire, ULB (2010-2012). Carrière professionnelle : - Novembre 2009- … : Chef de Clinique Adjoint au sein de la Clinique de Psychiatrie Infanto-Juvénile à l’Hôpital Erasme. Publications : 1) G.Vila, M. Delhaye, C. Bertrand, M.C. Mouren –Siméoni, J.J. Robert. « Risque microangiopathique et psychopathologie clinique chez l’enfant et l’adolescent diabétique de type 1 ». La Presse Médicale – 31 : 4 ; 151-157, 2002.: 2) M. Delhaye, J.-J. Robert, G. Vila : « Diabète Insulino-dépendant et Troubles des conduites alimentaires : quels progrès ? ». Annales Médico-Psychologiques : 160 ; 565-573, 2002. 3) M. Delhaye, F. Lotstra. “Somatisations rencontrées en pédopsychiatrie de liaison. ». Cahiers Critiques de Thérapie Familiale et de Pratiques de Réseaux, n°36, 2006/1,137143. De Boeck 2006. 4) M. Delhaye, F. Lotstra: “Soignants…Soignés, un rapport complexe. Une réflexion « chemin faisant » quant au statut émotionnel du soignant. ». Cahiers de Psychologie Clinique : 28 ; 2007/1 : 51-59. De Boeck, 2007. 5) M. Delhaye : « Détachements adolescentaires ou dysfonctionnements de l’autonomisation à l’adolescence. L’adolescent en son système. ». Cahiers Critiques de Thérapie Familiale et de Pratiques de Réseaux, n°40, 2008/1, 99-107. De Boeck 2008. 6) M. Delhaye, C. Kempenaers, J. Burton, L. Goossens, P. Linkowski : « Réflexions sur le concept de détachement adolescentaire.». Annales Médico-psychologiques (Paris), 2010. 7) M. Delhaye : « Schizophrenia at adolescence » Revue Médicale de Bruxelles 2010 sep ; 31(4) : 221-5. 8) M.Delhaye; C. Kempenaers; J.Burton; R.Stroobants; P.Linkowski; L.Goossens. “Attachment, Parenting, and Separation-Individuation in Adolescence: A Comparison of Hospitalized Adolescents, Institutionalized Delinquents, and Controls!”; The Journal of Genetic Psychology; (in press) 9) M. Delhaye, C. Kempenaers, R. Stroobants, P.Linkowski, L. Goossens. “Perceived parenting and separation-individuation in Belgian College Students: Associations with Emotional Adjustment.”; The Journal of Psychology, (in press) 10) M. Delhaye, C. Kempenaers, R. Stroobants, L. Goossens, P. Linkowski. “Attachment and socio-emotional skills: a comparison of depressed inpatients, institutionalized delinquents and control adolescents.”; Clinical Psychology and Psychotherapy, 2012; DOI:10.1002/cpp.1787. 11) M. Delhaye, W. Beyers, T. Klimstra, P. Linkowski, L. Goossens. “The Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale: reliability and validity with French-speaking Adolescents in Belgium.” Psychologica Belgica, 2012 (sous presse). Membres du Jury Présidente Joanne Rasschaert, Université Libre de Bruxelles. Secrétaire et Promoteur Paul Linkowski, Université Libre de Bruxelles. Co-promoteur Luc Goossens, Katholieke Universiteit of Leuven. Experts, Faculté de Médecine, ULB Véronique Delvenne, Université Libre de Bruxelles. Michèle Dramaix, Université Libre de Bruxelles. Charles Komreich, Université Libre de Bruxelles. Experts étrangers Paul Cosyns, UIA UZ Antwerpen. Philippe Jeammet, Université Paris-Descartes, Paris, France. Résumé de la thèse : Individuation et détachement à l’adolescence Ce travail de thèse repose sur une recherche qui s'est intéressée à un groupe de 151 adolescents de 15 à 18 ans bien différenciés au départ. Nous avons recruté un groupe de jeunes « hospitalisés » en unité pédopsychiatrique, un groupe d'adolescents délinquants institutionnalisés dans une institution publique de protection de la jeunesse et un groupe d'adolescents « contrôles » recrutés dans un lycée bruxellois. Ces groupes ont été comparés en fonction de trois concepts importants de la pédopsychiatrie du développement. Il s'agit du parenting, de la séparation individuation, et de l'attachement. Les outils utilisés sont des auto-questionnaires mesurant d’une part, le parenting, la séparation-individuation et l’attachement et, d’autre part, les aptitudes socio-émotionnelles des jeunes (résilience, empathie, intelligence émotionnelle). Nous avons aussi fait passer une interview diagnostic (Kiddie- Sadds) ainsi qu’un test d’évaluation intellectuelle (WISC IV ou WAIS III). La première partie de la recherche a consisté à évaluer si les outils utilisés étaient suffisamment fiables et valides pour un usage en langue française dans un échantillon plus important. Au cours de la deuxième étape, nous avons comparé les trois groupes en fonction des trois concepts définis auparavant. Ce sont surtout les résultats de la comparaison des trois groupes qui ont été développés dans le travail qui suit. L’autre partie des résultats peut être retrouvée dans les articles publiés. Les résultats en faveur des prédictions de la recherche effectuée sont: 1. Le Parenting : Soutien parental élevé dans le groupe « contrôles » Contrôle comportemental élevé dans le groupe « hospitalisés » 2. La Séparation-Individuation: Séparation saine élevée dans le groupe « contrôles » Autonomie excessive élevée dans le groupe « délinquants » 3. L’ Attachement : Dimension Sécure élevée dans le groupe « contrôles » Hyperactivation élevée dans le groupe « hospitalisés » Les résultats différents des prédictions de la recherche effectuée sont : 1. Le Parenting: Soutien parental élevé dans le groupe « délinquants » Contrôle comportemental élevé dans le groupe « délinquants » 2. La Séparation-Individuation: Autonomie excessive élevée dans le groupe « hospitalisés » Dépendance excessive élevée dans le groupe « délinquants » 3. L’Attachement: Hyperactivation élevée dans le groupe « délinquants » Ces résultats sont discutés et interprétés. Cette recherche a un impact important pour les cliniciens dans leur façon d'aborder les problématiques présentées par les jeunes délinquants et les jeunes hospitalisés ainsi que dans l’intervention auprès des familles. Liste des publications Cette thèse se base sur les publications suivantes : Delhaye M, Kempenaers C, Burton J, Goossens L, Linkowski P. Réflexions sur le concept de détachement adolescentaire. Annales médico-psychologiques, 169 : 215-220, 2011. Delhaye M, Kempenaers C, Burton J, Linkowski P, Stroobants R, Goossens L. Attachment, Parenting an Separation-Individuation in Adolescence: A Comparison of Hospitalized Adolescents, Institutionalized Delinquents, and Controls. The Journal of Genetic Psychology, 2012, 173(2), 119-141. Delhaye M, Kempenaers C, Stroobants R, Goossens L, Linkowski P. Attachment and SocioEmotional Skills: A Comparison of Depressed Inpatients, Institutionalized Delinquents and Control Adolescents. Clinical Psychology and Psychotherapy 2012, DOI: 10.1002/cpp.1787. Delhaye M, Kempenaers C, Linkowski P, Stroobants R, Goossens L. Perceived Parenting and Separation-Individuation in Belgian College Students: Associations with Emotional Adjustment. The Journal of Psychology, 2012, 146(4), 353-370. Delhaye M, Beyers W, Klimstra T, Goossens L, Linkowski P.. The Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale (LAPPS): Reliability and Validity with FrenchSpeaking Adolescents in Belgium. Psychologica Belgica 2012 (sous presse). Individuation et détachement à l’adolescence : mécanismes théoriques et psychopathologiques 1. INTRODUCTION ............................................................................................................ 14 1.1. 2. Contexte général et objectifs de la recherche ............................................................ 14 1.1.1. Le parenting........................................................................................................ 15 1.1.2. La séparation-individuation................................................................................ 15 1.1.3. L’attachement ..................................................................................................... 17 1.1.4. Aptitudes émotionnelles ..................................................................................... 19 OBJECTIFS ET HYPOTHÈSES DE TRAVAIL ............................................................ 21 Validation d’un questionnaire évaluant le parenting dans une autre région 2.1. linguistique (LAPPS, cfr chapitre Méthodologie)................................................................ 21 2.2. Analyse des différents aspects de séparation-individuation dans une population d’étudiants bacheliers en médecine ...................................................................................... 22 2.3. Analyse des concepts d’attachement et de séparation-individuation à l’adolescence après comparaison d’une population d’adolescents « hospitalisés », « délinquants » et «contrôles » .......................................................................................................................... 23 2.3.1. Associations parmi les mesures d'attachement, de parenting, et de séparation- individuation..................................................................................................................... 23 2.3.2. Attachement, dépression, et délinquance ........................................................... 24 2.3.3. Parenting, dépression et délinquance ................................................................. 25 2.3.4. Séparation-individuation, dépression, et délinquance ........................................ 26 2.3.5. Hypothèses testées.............................................................................................. 27 2.4. 3. METHODOLOGIE .......................................................................................................... 31 3.1. Description des outils dans leur contexte théorique .................................................. 31 3.1.1. Auto-questionnaires ........................................................................................... 31 3.1.2. Le CaMir ............................................................................................................ 37 3.1.3. Interview Diagnostique ...................................................................................... 40 3.1.4. Le test de mesure d’intelligence ......................................................................... 40 3.1.5. Anamnèse ........................................................................................................... 40 3.2. 4. L’attachement et les aptitudes socio-émotionnelles .................................................. 27 Méthodologie statistique............................................................................................ 40 SYNTHESE DES PRINCIPALES OBSERVATIONS EXPERIMENTALES ............... 42 4.1. Analyse des concepts d’attachement et de séparation-individuation à l’adolescence après comparaison d’une population d’adolescents « hospitalisés », « délinquants » et « contrôles » ......................................................................................................................... 42 4.1.1. Méthode .............................................................................................................. 42 4.1.2. Outils .................................................................................................................. 44 cfr Méthodologie et article : «Delhaye et al.. Attachment, Parenting, and SeparationIndividuation in Adolescence : A Comparison of Hospitalized Adolescents, Institutionalized Delinquents, and Controls. The Journal of Genetic Psychology, 2012, 173(2), 119-141 » ............................................................................................................. 44 4.1.3. Procédure ............................................................................................................ 45 4.1.4. Résultats ............................................................................................................. 46 4.2. Analyse plus précise du concept d’attachement associé au contexte psycho-social au sein de trois groupes de jeunes : jeunes « hospitalisés », jeunes « délinquants » et « contrôles » ......................................................................................................................... 59 5. DISCUSSION GÉNÉRALE ............................................................................................ 60 5.1. Etude de validation du parenting ............................................................................... 60 5.2. Parenting, séparation-individuation et adaptation émotionnelle chez des bacheliers en médecine............................................................................................................................... 60 5.2.1. Autonomie excessive comme une dimension intrapsychique de séparation- individuation..................................................................................................................... 61 5.2.2. 5.3. Les rôles respectifs de la séparation saine et de la dépendance excessive ......... 61 Parenting, séparation-individuation et attachement chez les adolescents « hospitalisés », « délinquants », et « contrôles » ................................................................ 62 5.3.1. 5.4. Adolescents « hospitalisés » et « délinquants » ................................................. 62 Adaptation socio-émotionnelle et attachement chez des adolescents « hospitalisés », « délinquants », et « contrôles » ........................................................................................... 65 6. CONCLUSIONS GÉNÉRALES...................................................................................... 68 7. PERSPECTIVES .............................................................................................................. 70 8. LIMITATIONS ................................................................................................................ 71 9. BIBLIOGRAPHIE : ......................................................................................................... 73 1. INTRODUCTION 1.1. Contexte général et objectifs de la recherche Comment, au 21ème siècle, un adolescent peut-il s'autonomiser ? Dans cette recherche, nous proposons une contribution à la réflexion pédopsychiatrique développementaliste actuelle. En effet, un consensus émerge dans la littérature récente : la compréhension des bouleversements liés à l'adolescence se veut avant tout holistique (Berger et al, 2012). Ce point de vue amène un éclairage nouveau et fructueux sur le fonctionnement individuel de l'adolescent, ainsi que sur le contexte psychosocial qui sont étroitement intriqués dès la conception de l'enfant (Berger et al, 2012). Le courant développementaliste s’intéresse aux changements dans le fonctionnement psychologique de l’individu au cours de sa vie dans les domaines cognitifs, affectifs et sociaux. Il vise à cerner les modes de fonctionnement de l’individu et les processus de transformation de ce fonctionnement durant les différentes périodes de sa vie (Berger et al, 2012). La pédopsychiatrie développementale englobe deux champs d’études originelles : le développement de l’enfant et de l’adolescent ainsi que l’influence génétique dans la genèse du processus de croissance de l’individu. L'étude actuelle examine les perceptions parentales chez des adolescents « hospitalisés », « institutionnalisés », et « normaux » à partir de trois perspectives théoriques développementales complémentaires, qui sont, le parenting, la séparation-individuation et l’attachement). Nous avons choisi ces trois concepts car ils sont décrits dans la littérature comme ayant une grande influence sur l’autonomisation de l’adolescent sous l’angle de trois perspectives complémentaires (Goossens et Jackson, 2002). Notre recherche s’est étendue sur une période de cinq ans (octobre 2007 à juin 2012). Elle concerne 151 adolescents âgés de 15 à 18 ans répartis en trois groupes: « contrôles », « hospitalisés », et « délinquants ». Nous allons commencer par définir ces trois concepts. 1.1.1. Le parenting Le style de parenting se réfère à une constellation d'attitudes envers l'enfant qui s’inscrivent dans un contexte plus large pour des comportements parentaux spécifiques (Darling et Steinberg, 1993). Ces attitudes créent un climat émotionnel ou une atmosphère de parenting qui est typiquement décrite en termes de deux dimensions clés, qui sont, le soutien et le contrôle. Le soutien se réfère à la réactivité des parents aux besoins de leurs enfants et est caractérisé par les attitudes parentales comme la chaleur, l'implication ou l'acceptation. Le contrôle se réfère aux stratégies parentales actives impliquant la communication des attentes claires des parents pour un comportement approprié chez l'enfant et les efforts que les parents mettent en œuvre pour guider le comportement de l'enfant en lien évidemment avec leurs attentes (Soenens et al, 2006). Ces dernières années, le contrôle-ainsi défini- se réfère de manière croissante au contrôle comportemental, qui devrait être distingué d'une troisième dimension de style de parenting, qui est, le contrôle psychologique. Le dernier terme se réfère aux comportements parentaux qui font intrusion dans les pensées et les sentiments des enfants à travers un usage excessif de techniques de manipulation comme l'induction de la culpabilité ou la menace de rejet, et de retrait d'amour (Barber, 1996). Le contrôle psychologique est situé par certains auteurs comme étant au pôle négatif d'une dimension bipolaire tandis que les parents qui ont un comportement soutenant l'autonomie à l’âge approprié chez leurs enfants se situent au pôle positif de cette même dimension bipolaire. Les trois dimensions de parenting sont typiquement mesurées au moyen d'échelles ou d'auto-questionnaires que les adolescents utilisent pour décrire leur perception du climat de socialisation créé par leurs parents (cfr chapitre méthodologie, section outils). 1.1.2. La séparation-individuation Le processus de séparation-individuation commence dans la prime enfance mais se poursuit tout au long du développement et influence inévitablement l’autonomisation (Pine, 2004). Le processus de séparation-individuation à l'adolescence n'est pas un processus linéaire dans lequel on passerait d'un état de dépendance à un état d'indépendance ; c'est plutôt un processus où le jeune développe de nouvelles formes d'autonomie de manière discontinue. Comme dans l'attachement, on s'aperçoit que le processus de séparation-individuation est influencé par l'individu mais aussi par son environnement et qu'il continuera à être influent dans la vie adulte (Kroger, 1998). Bien que la dynamique de ce processus ait été conçue de manière variée selon les chercheurs, il y a un consensus sur le fait que le jeune adulte doit se différencier des identifications parentales. Il doit établir sa propre voie dans un contexte de relations mutuelles validantes (Frank et al, 1997). La mutualité des relations parents-adolescents est accomplie lorsqu'il y a un respect bilatéral croissant. Les parents facilitent l'autonomie de l'adolescent dans un contexte de relation proche qui se veut soutenant. Ils communiquent leur fierté dans les compétences croissantes de l'enfant. L'adolescent est encouragé à participer aux prises de décision familiales (Frank et al, 1997). Les garçons doivent se distancier de leur mère et s'identifier à leur père pour trouver une identité masculine. Les filles restent attachées à leur mère pour constituer leur identité féminine (Gnaulati et Heine, 2001). L'individuation est donc au stade de l'adolescence un acquis développemental tardif. L'individuation signifie la séparation intrapsychique par rapport à la famille d'origine (Kroger, 1998). Elle implique une séparation émotionnelle et une différenciation. Les parents sont perçus aussi comme des personnes à part entière et non plus uniquement comme des parents (Andersen et al, 2007). La séparation-individuation chez l'adolescent se réfère à un processus normatif qui permet aux jeunes gens d'établir un nouveau type d'équilibre dans leurs relations avec leurs parents. Quand ils ont traversé ce processus, les adolescents doivent prendre distance par rapport aux représentations internalisées et idéalisées de leurs parents (l'aspect de séparation) pour pouvoir développer un sens plus mature d'eux-mêmes (l'aspect d'individuation ; Kroger, 1998 ; Jeammet, 2007, 2008). À travers ce processus, les adolescents doivent éviter à la fois un combat excessif pour l'autonomie et d'autre part des formes exagérées de dépendance temporaire à leurs parents afin d'atteindre un compromis entre ces deux tendances opposées. Trois facettes du processus ont donc été distinguées ; il s’agit de l'autonomie excessive, de la dépendance excessive, ainsi que de la séparation saine (McClanahan et Holmbeck, 1992). Les perceptions des adolescents à propos du processus de séparation-individuation sont mesurées au moyen d'auto-questionnaires, dont certains se concentrent sur une facette seulement, celle de l'autonomie excessive (l'échelle d'autonomie émotionnelle, EAS ; Steinberg et Silverberg, 1986), tandis que d'autres testent les trois facettes ensemble (la SITA, cfr Chapitre méthodologie ; Levine et al, 1986). 1.1.3. L’attachement La notion d’attachement a d’abord été élaborée par R. Spitz (1940) à partir de l’observation directe du nourrisson. John Bowlby (1951) a ensuite mis en évidence les mécanismes de la formation et du développement des relations d'attachement. Il a émis le postulat selon lequel l’enfant naît avec un besoin de proximité physique et de contacts sociaux. Ce besoin d’attachement est un besoin primaire vital et inné (Bowlby, 1969 ; Pierrehumbert, 2003). Mary Ainsworth a étendu la théorie de Bowlby en y associant des données comportementales et une recherche développementale longitudinale qui ont souligné la stabilité du type d'attachement à travers le temps (Pierrehumbert, 2003). Son dispositif de recherche est appelé: « La Situation Etrange ». Il s’agit d’un dispositif expérimental qui évalue de façon qualitative le type d’attachement de l’enfant à l’âge de douze mois. L’enfant est exposé à de très brèves séparations d’avec sa mère et mis en présence d’une personne non familière dans une pièce avec des jouets. Le but est d’observer comment l’enfant va organiser son comportement vis-àvis de la figure d’attachement lorsqu’il fait l’expérience d’une situation troublante. Mary Ainsworth y a observé trois types d’attachement (sécure, préoccupé et évitant) (Ainsworth et al, 1978). Dans l’attachement sécure, l’enfant s’adapte facilement à la situation et accueille le parent à son retour ; dans l’attachement préoccupé, l’enfant pleure et va se nicher contre le parent à son retour ; dans l’attachement évitant, l’enfant ignore le parent à son retour (Ainsworth et al, 1978). La théorie de l'attachement s'est ensuite enrichie de l'apport de la psychanalyse et d'un retour au monde interne suivant le concept de « modèle interne opérant » à partir de la représentation interne de la figure d’attachement (Brown et Wright, 2001). L’attachement chez les adolescents se réfère à « l'état des lieux » actuel de leurs expériences passées avec les personnes qui leur ont donné des soins. Un tel état des lieux, se référant à l'État d'esprit d'une personne avec le respect de ses propres expériences d'attachement, peut être déterminé en utilisant une approche catégorielle au moyen de l' «Adult Attachment Interview » (AAI ; Hesse, 2008). Cette interview se concentre sur les expériences des participants avec leurs parents pendant l'enfance. Les quatre états de base qui émergent de telles interviews sont : a) l'attachement autonome ou sécure avec un regard aux expériences d'attachement, qui implique un compte rendu cohérent des expériences précoces qui donnent une valeur à l'attachement ; b) l'attachement préoccupé par les expériences d’attachement passées, qui implique des réponses anxieuses ou de colère à cette interview ; c) l'attachement évitant ou « dismissing attachement », qui implique que de telles expériences sont considérées comme peu importantes, d) l'attachement non-résolu désorganisé avec le même regard sur les expériences du passé qui implique des disparitions dans le raisonnement quand il y a discussion à propos de la perte ou d'un trauma. Comme complément à l'approche catégorielle pour mesurer l'attachement chez l'adolescent, les chercheurs utilisent des mesures continues des constructs liés à l'attachement. De telles mesures continues sont construites sur la notion que les adolescents ont un répertoire comportemental sophistiqué qui comprend une stratégie primaire et deux stratégies secondaires (Main, 1990) quand il y a régulation de leurs émotions associées à l'attachement (Kobak. et al, 1993). L'attachement sécure mène au développement d'une stratégie comportementale primaire basée sur des expériences de soins disponibles et réactives (le modèle autonome dans lequel on essaye d'établir un contact avec la personne qui donne les soins). Les stratégies secondaires ignorent la stratégie primaire quand la personne qui donne les soins apparaît comme n’étant pas disponible. Si la figure d'attachement est expérimentée comme inconsistante, l'adolescent hyperactive le système d'attachement et se centre excessivement sur l'information liée à l'attachement et sur des signaux de stress exagéré (par exemple le modèle préoccupé). Lorsque la figure d'attachement est expérimentée comme rejetante, l'adolescent désactive le système d'attachement en divertissant son attention des indices associés à l'attachement dans un effort pour minimiser le stress (modèle évitant). Dans l'Adult Attachment Interview Q-sort, des évaluateurs formés transcrivent l'interview entière et ensuite décortiquent l'interview dans un ensemble d'items. Basées sur cette description, les corrélations-Q sont encodées avec des prototypes correspondant aux trois stratégies de contrôle comportemental (sécure, préoccupé, et évitant ou détaché), comme dérivé des descriptions par de nombreux experts de l'attachement. Ces corrélations représentent le moyen avec lequel chaque participant se rapproche de chacun des trois types d'attachement, ce qui fournit un pouvoir analytique intéressant (Kobak, 1993). Nous avons aussi évalué les aptitudes émotionnelles des adolescents dans le souci de complémentarité par rapport aux concepts de psychologie du développement ayant trait au parenting, à la séparation-individuation et à l’attachement. 1.1.4. Aptitudes émotionnelles On peut s'attendre à ce que les adolescents qui sont hospitalisés pour des symptômes dépressifs aggravés ou qui sont institutionnalisés pour de sérieuses formes de délinquance perçoivent leurs figures d'attachement (par exemple leurs parents) et régulent leurs émotions d'une manière spécifique (Manninen et al, 2011; Zegers et al, 2006, 2008). Puisque les représentations d'attachement sont associées à la manière par laquelle les gens gèrent leurs émotions associées à ces représentations, il est largement répandu que l'attachement soit associé aux capacités des gens à gérer leurs émotions et leurs relations sociales en général. Ces capacités sont référées aux aptitudes socio-émotionnelles. Dans la présente recherche, trois aspects de telles aptitudes sont pris en compte : l'intelligence émotionnelle, l'empathie et la résilience. a) L'intelligence émotionnelle se réfère à la constellation des auto-perceptions associées à des émotions et les dispositions comprenant les aspects affectifs de la personnalité (Petrides et al, 2006). Plus simplement, les gens qui ont un score élevé aux mesures d'intelligence émotionnelle peuvent identifier les émotions chez les autres gens plus rapidement et leur répondre plus adéquatement. b) L'empathie se réfère à « la capacité à comprendre et à partager dans l'état émotionnel ou le contexte d'un autre » (Cohen et Strayer, 1996, p. 988). c) La résilience, finalement, se réfère aux facteurs de protection qui permettent le développement de traits de personnalité sains chez des jeunes gens qui ont été exposés à des circonstances défavorables ou adverses dans leur vie (Herman et al, 2011). Toutes ces notions théoriques confirment que l’autonomisation pour l’adolescent d’aujourd’hui est souvent un vrai défi. L’autonomisation à l’adolescence est un processus développemental qui va s’appuyer sur des stades très précoces de la première enfance avec une influence du tempérament propre et des relations avec la famille et l’environnement au sens large dans l’ici et maintenant. Les détachements adolescentaires apparaissent quand la séparation émotionnelle est dysfonctionnelle. L’individuation est alors compliquée (Beyers et al, 2001,2003, 2005). Nous allons maintenant développer les objectifs et hypothèses de travail. 2. OBJECTIFS ET HYPOTHÈSES DE TRAVAIL La recherche s’est déroulée en plusieurs étapes : 1. Validation du questionnaire d’évaluation du parenting dans une autre région linguistique. 2. Analyse de différents aspects de la séparation-individuation au sein d’une population d’étudiants bacheliers en médecine. 3. Analyse des concepts d’attachement et de séparation-individuation à l’adolescence après comparaison d’une population d’adolescents « hospitalisés », « délinquants » et «contrôles ». 4. Analyse plus précise du concept d’attachement associé au contexte psycho-social au sein des trois groupes de jeunes (« hospitalisés », « délinquants », « contrôles »). 2.1. Validation d’un questionnaire évaluant le parenting dans une autre région linguistique (LAPPS, cfr chapitre Méthodologie) L'étude actuelle examine si l’auto-questionnaire LAPPS ou Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale (initialement développé en langue néerlandaise) est suffisamment fiable et valide pour être utilisé avec des adolescents d'une région linguistique différente, dans ce cas précis, la partie francophone de Belgique. Cette partie de recherche est développée dans l’article : Delhaye M, Beyers W, Klimstra T, Goossens L, Linkowski P. The Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale (LAPPS): Reliability and Validity with FrenchSpeaking Adolescents in Belgium. Psychologica Belgica 2012 (sous presse). 2.2. Analyse des différents aspects de séparation-individuation dans une population d’étudiants bacheliers en médecine La recherche sur la séparation-individuation chez des étudiants à l’université s’est typiquement concentrée sur deux dimensions qui sont la dépendance excessive et la séparation saine d'un de ses parents. Basée sur un modèle théorique à deux dimensions, l'étude actuelle introduit une troisième dimension, qui est l'autonomie excessive vis-à-vis d'un de ses parents. Les effets de ces trois dimensions sur la séparation-individuation chez des étudiants à l’université et leur adaptation émotionnelle sont examinés. Ces trois dimensions ont le rôle de médiateur du lien entre la perception du parenting et l'adaptation émotionnelle. Sur la lignée des études antérieures (Boles, 1999 ; Mattanah et al, 2004), nous avons testé un modèle dont les dimensions de séparation-individuation servent d'intermédiaire entre la qualité globale des représentations parentales d’étudiants (universitaires) et leur adaptation psychologique. Nous avons fait cependant d'importants changements dans la mesure des trois variables clés du modèle (représentations parentales, séparation-individuation, et adaptation psychologique). De plus, nous avons conduit notre étude selon une culture, la culture belge, qui a des normes spécifiques et des attentes concernant la séparation d'un de ses parents. Le développement complet de cette partie de recherche se retrouve dans l’article : Delhaye M, Kempenaers C, Linkowski P, Stroobants R, Goossens L. Perceived Parenting and SeparationIndividuation in Belgian College Students: Associations with Emotional Adjustment. The Journal of Psychology, 2012, 146(4), 353-370. 2.3. Analyse des concepts d’attachement et de séparationindividuation à l’adolescence après comparaison d’une population d’adolescents « hospitalisés », « délinquants » et «contrôles » Les problèmes d'internalisation (par exemple, la dépression) et les problèmes d'externalisation (par exemple la délinquance) sont associés à des types enchevêtrés de perception attribués aux parents à l'adolescence (Collins et Laursen, 2004). L'étude actuelle examine les perceptions parentales chez des adolescents « hospitalisés », « institutionnalisés », et « normaux » à partir de trois perspectives théoriques complémentaires, qui sont, l'attachement, le parenting, et la séparation-individuation. 2.3.1. Associations parmi les mesures d'attachement, de parenting, et de séparation- individuation Le chevauchement empirique parmi les mesures existantes des différents types de perception associés aux parents ont été examinés en testant deux constructs à la fois. De telles analyses par paires ont révélé que les mesures des trois constructs, qui sont, l'attachement, le parenting, et la séparation-individuation, montrent typiquement des intercorrélations significatives mais modérées. La mesure Q-sort de la sécurité de l'attachement dérivée de l’Adult Attachment Interview a montré une corrélation positive avec le soutien maternel comme rapporté par des adolescents (Allen et al, 2003). Les auto-questionnaires concernant l'attachement sécure à la fois chez la mère et le père ont montré des corrélations négatives avec la dépendance excessive (Mattanah et al, 2004). Finalement, une mesure factoriellement dérivée de la qualité du parenting a montré une corrélation positive avec la séparation saine et une corrélation négative avec la dépendance excessive (Boles, 1999). L'évidence disponible, donc, soutient la notion que l'attachement, le parenting, et la séparation-individuation sont des constructs distincts mais interconnectés à l’adolescence. Les recherches inspirées par chacune de ces perspectives ont apporté une information importante sur les associations entre ces représentations d'une part et la dépression et la délinquance à l'adolescence d’autre part. 2.3.2. Attachement, dépression, et délinquance La recherche basée sur la théorie de l'attachement et la théorie associée à la régulation des émotions qui distinguent différents types de stratégies secondaires a amené des associations claires avec les différents types d'émotion et des problèmes de comportement dans des échantillons non-cliniques d'adolescents. Spécifiquement, les adolescents qui ont montré un attachement préoccupé avaient un score élevé pour l'anxiété, tandis que leurs compagnons qui ont montré un attachement évitant ont montré des scores plus élevés pour l'hostilité (Kobak et Sceery, 1988). Dans la littérature actuelle, nous relevons que l'hyperactivation du système d'attachement (comme trouvé dans l'attachement préoccupé) est susceptible d'entraîner des problèmes d'internalisation comme des sentiments dépressifs, tandis que la désactivation du système (comme trouvé dans l'attachement évitant ou détaché) est susceptible d'entraîner des problèmes d'externalisation comme la délinquance (Brown et Wright, 2001). Des articles initiaux (Rosenstein et Horowitz, 1996) ont confirmé aussi les attentes dérivées de la théorie de l'attachement dans des groupes cliniques d'adolescents. Les adolescents « déprimés » étaient classés de manière prédominante comme ayant un attachement préoccupé à l’AAI tandis que les adolescents « délinquants » étaient typiquement assignés à la catégorie attachement évitant. Cependant, une revue récente de la littérature, basée sur des groupes cliniques dans une large tranche d’âge (à la fois à l'adolescence et à l'âge adulte), a suggéré que les résultats sont plus compliqués. Les problèmes d'internalisation (dépression) étaient associés à un attachement plus préoccupé et non-résolu, mais la catégorie attachement évitant était aussi surreprésentée. De manière similaire, les problèmes d'externalisation (trouble antisocial ou trouble des conduites qui sont fréquemment associées à la délinquance) étaient associés avec un attachement plus évitant et désorganisé, mais la catégorie préoccupée était aussi surreprésentée (BakermansKranenburg et van Ijzendoorn, 2009). La classification dans la catégorie non-résolue est basée seulement sur la discussion des expériences de perte ou de trauma et non sur l'interview complète comme c'est le cas pour les trois autres catégories d'attachement. Les représentations non-résolues avec un regard sur les traumatismes sont contributives à la psychopathologie car elles diminuent à la fois les interactions interpersonnelles et la régulation des émotions (Ward, Lee et Polan, 2006). Une image similaire de résultats mixtes s'applique à la jeunesse des institutions résidentielles. Une étude néerlandaise sur des adolescents placés dans une telle institution par le juge de la jeunesse,- parce qu'ils avaient commis un crime sévère ou avaient été victimes d'abus et de négligence-, ont révélé que la plupart de ces jeunes présentent un attachement évitant ou nonrésolu. Un sous-groupe a cependant montré un attachement préoccupé (Zegers et al, 2008). Au vu de ces résultats, les auteurs de la revue systématique de littérature recommandent une utilisation croissante des approches alternatives. Spécifiquement, ils discutent d'un usage plus systématique des mesures continues des stratégies d'attachement principal (sécurité, hyper activation, et désactivation de l'attachement) et d'autres mesures continues dérivées de l’AAI qui peuvent amener une image plus précise des liens entre attachement et psychopathologie que ne le fait l'approche catégorielle traditionnelle (Bakermans-Kranenburg et van Ijzendoorn, 2009). 2.3.3. Parenting, dépression et délinquance De nombreuses études ont trouvé à la fois que la dépression et la délinquance pouvaient montrer des associations significatives avec le soutien et le contrôle parental. Une métaanalyse récente (McLeod et al, 2007) a indiqué qu'un soutien plus bas et un contrôle plus grand étaient associés à des scores plus élevés sur les mesures de symptômes dépressifs. Ces associations étaient plus prononcées dans les groupes cliniques avec un diagnostic de dépression. Une autre revue méta-analytique (Hoeve et al, 2009) indique que des scores plus élevés au niveau contrôle psychologique et des scores plus bas au niveau du soutien et contrôle comportemental étaient associés à des scores plus élevés aux mesures par auto- questionnaire dans le groupe délinquance. Dans un grand échantillon d'adolescents judiciarisés (Steinberg, et al, 2006), les scores les plus élevés pour les jeunes « délinquants » étaient trouvés parmi les jeunes qui décrivaient leurs parents comme négligeants (soutien et contrôle comportemental faibles). 2.3.4. Séparation-individuation, dépression, et délinquance Dans les échantillons d'adolescents non-cliniques, la dépendance excessive est typiquement associée à des problèmes d'internalisation comme des symptômes dépressifs (Milne et Lancaster, 2001), tandis que l'autonomie excessive ou les conflits non-résolus à propos de l'autonomie sont associés à des problèmes d'externalisation comme l’agression et, chez les garçons uniquement, la délinquance (Frank et al, 2002). Les études sur des échantillons mixtes d'adolescents hospitalisés en service psychiatrique dépeignent un tableau plus compliqué d’associations rencontrées. Une telle étude qui incluait à la fois des patients déprimés et des patients avec un trouble oppositionnel et un trouble de déficit d’attention et d'hyperactivité ont révélé deux modes d'humeur déprimée. La contre-dépendance, un aspect crucial de l'autonomie excessive, était associée avec des préoccupations autocritiques, tandis que le rapprochement excessif aux parents, un aspect clé de la dépendance excessive, était associé à des préoccupations interpersonnelles. Les deux types de préoccupations, chacune à leur tour, étaient associés à une humeur déprimée chez l'adolescent (Frank et al, 1997). Les différents aspects développés ci-dessus nous permettent maintenant de nous recentrer sur notre recherche. Pour mieux élucider le rôle des représentations parentales pendant l'adolescence, trois groupes clairement définis de participants seront comparés : des adolescents « hospitalisés » pour des problèmes sévères d'internalisation des adolescents institutionnalisés dans des centres de traitement pour des problèmes sévères d'externalisation des sujets « contrôles ». Nous avons utilisé des mesures continues standardisées de parenting et de séparationindividuation ainsi qu’une mesure d'attachement. Cette mesure se rapproche des stratégies d'attachement obtenues avec l'Adult Attachment Interview Q-sort (le CaMir). Avec ces mesures, les hypothèses suivantes concernant la troisième étape de la recherche, seront testées. 2.3.5. Hypothèses testées Ces hypothèses se basent sur la revue de la littérature dont nous venons de parler. Nous nous attendons : 1. En ce qui concerne l’attachement, à ce que les sujets « contrôles » aient un score plus élevé pour l'attachement sécure que les deux autres groupes « hospitalisés » et « délinquants » ; à ce que les adolescents « hospitalisés » aient un score plus élevé pour l'attachement préoccupé (hyperactivation), et que les adolescents « délinquants » aient un score plus élevé pour l'attachement détaché (ou évitant ; désactivation). De plus, pour les deux groupes adolescents « hospitalisés/délinquants », on s'attend à ce qu'ils aient un score plus élevé que les sujets « contrôles » pour les indices d'attachement non-résolu. 2. En ce qui concerne le parenting, à ce que les sujets « contrôles » aient un score plus élevé pour le soutien (de leurs parents) perçu que les adolescents « hospitalisés » ou « délinquants » ; à ce que les adolescents « hospitalisés » obtiennent un score plus élevé pour le contrôle comportemental et à ce que les adolescents « délinquants » obtiennent un score plus bas pour le contrôle comportemental mais avec un contrôle psychologique plus élevé. 3. En ce qui concerne la séparation-individuation, à ce que les sujets « contrôles» aient un score plus élevé pour la séparation saine par rapport aux adolescents « hospitalisés » et « délinquants » ; à ce que les adolescents « hospitalisés » aient un score plus élevé pour la dépendance excessive et à ce que les adolescents « délinquants » aient un score plus élevé pour l'autonomie excessive. 2.4. L’attachement et les aptitudes socio-émotionnelles En utilisant la théorie de l'attachement comme cadre théorique, la présente étude a examiné les différences dans les perceptions de l'attachement et les capacités associées, référées aux aptitudes socio-émotionnelles, chez des adolescents dépressifs « délinquants » institutionnalisés, et des adolescents « contrôles ». « hospitalisés », des Le développement complet de cette étape de la recherche est développé dans l’article : Delhaye M, Kempenaers C, Stroobants R, Goossens L, Linkowski P. Attachment and SocioEmotional Skills: A Comparison of Depressed Inpatients, Institutionalized Delinquents and Control Adolescents. Clinical Psychology and Psychotherapy 2012, DOI: 10.1002/cpp.1787. Ci-dessous vous trouverez les tableaux qui sont une synthèse de nos prédictions en fonction des trois concepts testés au sein de trois groupes. 1. Tableau de synthèse des hypothèses et prédictions concernant le parenting 2. Tableau de synthèse des hypothèses et prédictions concernant la séparationindividuation 3. Tableau de synthèse des hypothèses et prédictions concernant l’attachement 3. METHODOLOGIE 1.1. Description des outils dans leur contexte théorique 1.1.1. Auto-questionnaires 1.1.1.1. Auto-questionnaires qui évaluent le parenting et la séparation-individuation La LAPPS ou Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale: auto-questionnaire évaluant la perception du parenting chez des adolescents Le parenting a été défini comme quelque chose que les parents font, ou omettent de faire, et qui peut affecter leurs enfants (Kendziora et O’Leary, 1993). Dans certaines conceptualisations, une distinction est faite entre les pratiques de parenting et les styles de parenting (Darling et Steinberg, 1993). Les pratiques de parenting se réfèrent au contenu et à la fréquence de comportements spécifiques plutôt qu'à la qualité des comportements dans les interactions parents-enfants comme c’est le cas pour le style de parenting. Notamment, les pratiques de parenting englobent ce que les parents font (par exemple, donner une fessée ou étreindre leur enfant) et le style de parenting implique comment les parents le font (par exemple, avec chaleur ou hostilité). Les aspects des styles de parenting sont mesurés de façon continue (par exemple, chaleur vs froideur ; rigueur vs permissivité ; Locke et Prinz, 2002). Les scores des parents sur ces mesures continues chez l’adolescent (Laursen et Collins, 2009), sont associés avec à la fois des problèmes d'internalisation (par exemple, la dépression) et des problèmes d'externalisation (par exemple, la délinquance). Ces associations impliquent non seulement un effet causal des styles de parenting ou de leurs aspects spécifiques sur le comportement problématique de l'adolescent, mais ensuite ce comportement problématique amène également les parents à adopter un style de parenting moins effectif (Kerr et Stattin, 2003). Il est important d'avoir une mesure solide des dimensions de style de parenting pour pouvoir mieux explorer les associations avec des troubles du comportement de l'adolescent. Ces dernières années, une mesure exhaustive des dimensions de style de parenting par autoquestionnaire a été développée dans la région néerlandophone de Belgique (Beyers et Goossens, 2008; Soenens et al 2004). Les adolescents peuvent utiliser cet instrument pour décrire leur perception du climat de socialisation créé par leurs parents. Initialement, le style de parenting a été décrit en termes de seulement deux dimensions clés, qui sont, la réactivité et le contrôle (Maccoby et Martin, 1983). La réactivité se réfère à l'attention des parents aux besoins de leurs enfants et est désignée par de nombreux labels différents comme la chaleur, l'implication, ou l'acceptation. Le contrôle se réfère à des stratégies parentales actives impliquant la communication claire de ce qu’ils attendent comme comportement (approprié) chez leur enfant ainsi que la manière pour guider l’enfant dans cette voie (Soenens et al, 2006). Récemment, le contrôle-ainsi défini-est plutôt appelé contrôle comportemental. Cette seconde dimension devrait être distinguée d'une troisième dimension de style de parenting, qui est le contrôle psychologique. Ce dernier terme se réfère aux comportements parentaux qui intrusent les pensées et les sentiments de leurs enfants à travers un usage excessif de techniques parentales de manipulation comme l'induction d'une culpabilité ou la menace d’un abandon (Barber, 1996). Une quatrième et dernière dimension de style de parenting est le soutien à l'autonomie. Ce terme se réfère au soutien des parents adapté à l’âge pour l'autonomie de leurs enfants (Soenens et al, 2007). Ces quatre dimensions de style de parenting sont typiquement mesurées au moyen de différents instruments. Dans un effort pour arriver à une mesure exhaustive des quatre dimensions, la « Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale » (LAPPS) a été développée pour une utilisation chez des adolescents néerlandophones de Belgique. Les quatre sous-échelles ont été adaptées à partir d'instruments bien connus, développés aux États-Unis. Les dimensions de réactivité, de contrôle comportemental, et de contrôle psychologique ont été adaptées d'une version brève (Schludermann, 1988) du « Child Report of Parental Behavior Inventory » (CRBPI), un instrument développé à l'origine par Schaefer (1965). Certains items des « Parenting Scales » (PS ; Lamborn et al, 1991) étaient aussi inclus dans la sous-échelle de contrôle psychologique. La sous-échelle de soutien à l'autonomie, finalement, est adaptée de la « Perception of Parents Scale » (POPS ; Grolnick et al, 1997). Les sous-échelles de la LAPPS recouvrent les différentes facettes du parenting, comme la réactivité et le soutien à l'autonomie, d’ailleurs reliés entre eux, qui reflètent les aspects positifs de permissivité d'un tel climat, tandis que le contrôle comportemental et le contrôle psychologique, qui montrent aussi une corrélation significativement positive, recouvrent les aspects un peu plus négatifs de contrainte de cette atmosphère générale. L'instrument complet (Beyers et Goossens, 2008) ou ses sous-échelles (Smits et al, 2008 ;2010 ; Soenens et al, 2006) ont été utilisés sur un grand échantillon d’adolescents néerlandophones de Belgique. Toutes les sous-échelles ont montré des hauts niveaux de consistance interne (par ex, variant entre .73 et .92 ; Beyers et Goossens, 2008). Ce qui reste à éclaircir c’est si cette mesure peut être utilisée chez des adolescents d'autres régions linguistiques. La LAPPS (Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale; Soenens et al, 2004) est complétée pour la mère et le père séparément. Pour chaque parent, l'échelle comprend 28 items (quatre sous-échelles de 7 items chacune). Ces sous-échelles ont mesuré les aspects suivants du parenting : a) réactivité (par exemple, « ma maman/mon papa fait en sorte que je me sente mieux après que j’ai discuté de mes soucis avec lui/elle ») ; b) contrôle comportemental (par ex : « ma maman/mon papa est très sévère envers moi ») ; c) contrôle psychologique (par exemple, « ma maman/mon papa évite de me regarder quand je l’ai déçu ») ; d) soutien à l'autonomie (par exemple, « ma maman/mon papa m’aide à choisir mon propre chemin dans la vie»). La validité de la LAPPS a été soutenue par des chercheurs précédents (Beyers et Goossens, 2008 ; Soenens et al, 2004). Les réponses aux items se font sur une échelle Likert à 5 points allant de 1 (complètement en désaccord) à 5 (complètement d'accord). Pour l'étude actuelle, la LAPPS a été traduite du néerlandais au français par un membre de l’équipe qui a une connaissance intime du français. L'outil a été rétro-traduit en néerlandais par un assistant chercheur qui a une connaissance intime du néerlandais. La traduction finale a donc produit des questions qui ressemblaient tout à fait à la version originale néerlandophone de l'instrument. L’EAS (Emotional Autonomy Scale) L’Emotional Autonomy Scale à 20 items (EAS ; Steinberg et Siverberg, 1986) a été utilisée comme une mesure alternative des relations adolescents-parents, selon la perception des adolescents. Comme recommandé dans une recherche antérieure (Beyers et al, 2003, 2005), deux sous-échelles ont été distinguées dans cet instrument. La séparation (12 items ; par exemple, « mes parents et moi sommes d'accord sur tout » ; cotation inversée) mesure l'étendue selon laquelle les adolescents avaient abandonné leurs dépendances enfantines ainsi que leurs représentations infantiles de leurs parents. Le détachement (8 items ; par exemple, « mes parents parlent probablement de choses différentes quand je suis là et quand je ne suis pas là ») mesure des formes plus conflictuelles et radicales de la distanciation d'un de ses parents, incluant la méfiance et l'aliénation perçue. La validité des deux sous-échelles a été établie dans plusieurs études ( Beyers et al, 2003,2005 ; Ingoglia et al, 2011 ; Pace et Zappulla, 2010). L’EAS a été traduite avec succès et rétro-traduite de l'anglais en néerlandais dans un travail précédent (Beyers et Goossens, 1999). La version néerlandaise de l’EAS a été traduite du néerlandais en français par une psychologue qui a une connaissance intime du français. Le questionnaire a été rétro-traduit en néerlandais par un assistant chercheur qui a une connaissance intime du néerlandais. La rétro-traduction a donc produit une version qui ressemblait de manière très proche à la version originale néerlandophone. La SITA (Separation-individuation Test of Adolescence ; Lévine et al, 1986) Cet instrument a été initialement développé pour une utilisation chez des adolescents anglophones (Levine et al, 1986) et adapté dans une forme légèrement plus courte en français (Lévine et Saintonges, 1993). Dans l'étude actuelle, une version française à 52 items a été utilisée (Saintonge et Lachance, 1995) dans laquelle chaque item demandait une réponse à l’échelle de Likert à 5 points allant de 1(profondément d’accord ou toujours vrai pour moi) à 5 (profondément en désaccord ou n'est jamais vrai pour moi). L'instrument était organisé en neuf sous-échelles. Ces sous-échelles étaient étiquetées : « Anxiété de séparation » (6 items ; « l'idée d'aller à une grande fête où je ne connaitrais personne me fait peur » ; alpha = .60), « Dépendance primitive » (7 items, « je me sens seule quand je suis séparée longtemps de mes parents » ; alpha = .72), « Attente de rejet » (4 items ; « mes parents paraissent très désintéressés de ce qui m’arrive»; alpha = .76), « Anxiété d'engloutissement » (6 items ; « parfois mes parents sont tellement surprotecteurs que je me étouffé(e)» ; alpha=.74), « Déni de dépendance » (9 items ; « je n'ai vraiment besoin de personne» ; alpha = .72), « Consolidation narcissique » (8 items ; « je sens souvent, à mon égard, l’admiration des gens autour de moi» ; alpha = .83), « Angoisse du professeur » (4 items ; « je serais bouleversé si je découvrais que mon professeur était fâché contre moi ou déçu de moi» ; alpha = .79), « Recherche de l'intimité avec les amis » (5 items ; « je me sens tellement à l'aise avec l'un de mes amis que je peux lui dire tout ce que je ressens » ; alpha = .77), « Amitié mature » (5items ; « mes amis et moi avons certains intérêts communs et certaines différences » ; alpha = .62). La validité de la SITA a été soutenue dans de nombreuses études (Gnaulati et Heine, 2001 ; Holmbeck et Leake, 1999 ; Levine et al, 1986 ;McClanahan et Holmbeck, 1992). 1.1.1.2. Auto-questionnaires évaluant les aptitudes socio-émotionnelles Le TEIQue ASF (Questionnaire d’intelligence émotionnelle-forme brève de l’adolescent ; Petrides et al, 2006) L’instrument comporte 30 courtes affirmations destinées à mesurer les aspects de l’intelligence émotionnelle telle que la perception d’émotions et l’expression d’émotions (« il m’est facile de parler de mes sentiments aux autres »). La validité a été établie dans un travail antérieur (Petrides et al, 2006). On répond aux items sur une échelle Likert à 7 points allant de 1 (complètement en désaccord) à 7 (complètement d’accord). Les scores ont été moyennés pour les 30 items, avec des scores plus élevés indiquant des niveaux plus élevés d’intelligence émotionnelle. Le questionnaire a été traduit de l’anglais en français par le second auteur, qui a une connaissance intime du français, et ensuite rétro-traduit en anglais par une autre psychologue qui était bilingue et parlait couramment en anglais et français. La traduction finale a donc produit une version hautement similaire à la version originale anglophone de l’instrument. L’EQ (Quotient d’Empathie ; Baron-Cohen et Wheelwright, 2004) Il s’agit d’un questionnaire à 60 items, avec 40 questions appréhendant l'empathie comme un construct unidimensionnel (« je trouve facile de me mettre dans la peau de quelqu’un d’autre » ; et « je ne peux pas toujours saisir pourquoi une personne aurait dû se sentir offensée par une remarque» ; codage renversé) et avec 20 items de remplissage. Une version française du questionnaire, validée de manière croisée, a été utilisée dans l'étude actuelle (Berthoz et al; 2008). Les réponses aux items se font sur une échelle Likert à 4 points allant de 1 (fortement en désaccord) à 4 (fortement en accord) et ensuite recodées dans un score à 3 points (0,1 et 2). On a fait une moyenne de ces derniers scores à travers les 40 items d'empathie, avec des scores plus élevés qui reflètent une plus grande empathie. L'échelle de résilience pour les adolescents (READ ; Hjemdal et al, 2006) L'instrument comprend 28 items à connotation positive, dont le but est de découvrir cinq dimensions de résilience : a) compétence personnelle (8 items ; « j'atteins mes buts si je travaille dur » ; alpha = .76), b) compétence sociale (5 items ; « je rends facilement les autres confortables autour de moi » ; alpha = .67), c) style structuré (4 items ; « je suis au mieux tant que j'ai des objectifs et des buts clairs » ; alpha = .49), d) cohésion familiale (6 items ; « dans ma famille nous nous soutenons tous » ; alpha = .84) e) ressources sociales (5 items ; « j'ai quelques amis/membre de famille proches qui prennent réellement soin de moi » ; alpha = .72). Le modèle de mesure à cinq facteurs a été validé au moyen d'une analyse confirmatoire (Hjemdal et al, 2006). Les réponses aux items se sont faites sur une échelle Likert à 5 points, allant de 1 (complètement d'accord) à 5 (complètement en désaccord). Des scores plus élevés à la READ indiquent des niveaux plus élevés d’intelligence émotionnelle. Cet outil a été traduit de l'anglais au français en utilisant les mêmes procédures que celles décrites pour le TEIQue. 1.1.2. Le CaMir L’attachement aux parents a été examiné en utilisant un instrument signifié au moyen de l'acronyme français CaMir (Cartes : Modèles individuels de relations). Le CaMir (Pierrehumbert et al, 1996) est une mesure Q-sort auto-rapportée. Le CaMir fournit aux chercheurs des scores continus d'attachement qui sont similaires aux scores obtenus à partir de l’AAI Q-Sort (Kobak et al, 1993) mais qui ne sont pas dérivés de la transcription d’interviews individuelles. Les 72 items de cet instrument, dérivés de mesures existantes dans la littérature de l'attachement (incluant l’AAI Q-Sort), sont transcrits sur une carte et concernent les expériences présentes ou passées dans la famille. Toutes les cartes sont distribuées deux fois. Dans la première phase (« tri sans restriction »), les participants sont invités à trier les cartes en cinq piles (allant de 1= le moins caractéristique à 5 = le plus caractéristique). Basés sur ce tri initial, les scores de l'échelle sur les 13 sous-échelles factoriellement dérivés sont encodés selon une voie qui est très proche de la traditionnelle mesure utilisant le format Likert. Trois sous-échelles se réfèrent chacune respectivement aux aspects de l'attachement sécure, préoccupé, et détaché. Les sous-échelles : Soutien parental (par exemple « enfant on m’encourageait à partager mes sentiments »), Communication ouverte (par ex, « je fais confiance à ceux qui sont proches de moi »), Evaluation positive de l'enfance (« j'aime penser à mon enfance »), se réfèrent à l'attachement sécure. Les sous-échelles : Interférence parentale (« enfant, j'avais peur d'être abandonné »), Hyperimplication (« je ne peux pas me concentrer sur quelque chose si je sais que les gens de mon entourage ont des problèmes »), Parenting restrictif (« enfant, j'avais peu d'occasions pour vivre ma propre vie »), se réfèrent à l'attachement préoccupé. Les sous échelles : Manque de préoccupation parentale (« enfant, les gens autour de moi étaient souvent impatients et irritables »), Autosuffisance (« je peux seulement compter sur moi-même quand j’ai un problème »), Rancune envers les parents (« je n'ai jamais eu une réelle relation avec mes parents ») se réfèrent à l'attachement détaché. Deux sous-échelles supplémentaires sont les indices d'un attachement non résolu et, dès lors, sont associés aux stratégies des participants à gérer les expériences de perte et de trauma associées à l'attachement. La sous échelle « Trauma dans l'enfance » (« quand j'étais enfant, il y avait des conflits incessants à la maison ») couvre explicitement de telles expériences qui se sont produites dans le passé. La sous-échelle « Perte de mémoire des expériences passées d'attachement » (« j'ai des difficultés à me souvenir des événements de l'enfance d'une manière précise ») couvre une stratégie potentiellement défensive contre de telles expériences associées à un trauma et ressemble de manière très proche aux pertes d'attention qui sont indicatives de l'attachement non-résolu dans l’AAI. Finalement deux sous-échelles (attitude parentale inconsistante et résignée ainsi que valeurs familiales traditionnelles) se réfèrent aux aspects structuraux de la famille. Les items types sont « comme enfant je pouvais faire ce que je voulais » ou « dans une famille, c'est très important de respecter les parents ». (Voir Milijkovitch et al, 2005, pour une liste complète des items du CaMir). Dans une seconde phase (« tri restreint »), on a demandé aux participants de réarranger les cartes de telle façon à ce que la distribution des 72 cartes à travers les cinq piles s'approche de la distribution normale. Chaque item reçoit un score de 1 à 5. Des scores de proximité (corrélations de Spearman allant de -1 à 1) sont alors calculés entre les réponses des participants et les trois prototypes-Q correspondant aux trois stratégies de contrôle (Sécure, préoccupé, et détaché), dérivés des descriptions d'un nombre d'experts en attachement. Ces trois corrélations-Q représentent le degré avec lequel chaque participant se rapproche de chacune de ces trois stratégies d'attachement. Le CaMir a une bonne fiabilité et validité. Les trois corrélations Q-sort ont montré une fiabilité test – retest substantielle et les 13 sous-échelles au format type Likert (tri sans restriction) ont une consistance interne acceptable avec l’alpha de Cronbach allant de .75 à .85 (Miljkovitch et al, 2005). Une corrélation significative entre la corrélation-Q préoccupé et les scores de préoccupation dérivés de l’Adult Attachment Interview Q-sort (Kobak et al, 1993) suggère que le CaMir révèle des aspects importants de stratégies d'attachement secondaires (Miljkovitch et al, 2005). L'instrument a été utilisé avec succès chez des jeunes gens présentant des troubles alimentaires et des troubles d'abus de substances, avec une plus grande hyperactivation chez les jeunes avec troubles alimentaires (préoccupé) et une plus grande désactivation du système d'attachement chez les jeunes ayant un trouble d'abus de substances (détaché ; Miljkovitch et al, 2005 ; Pierrehumbert et al, 2002). Même si le CaMir ne peut pas remplacer l’AAI Q-sort, il amène des scores fiables et valides d'une nature continue. 1.1.3. Interview Diagnostique Une version française (Renou et al, 2004) de la K-SADS-PL (Ambrosini, 2000) a été utilisée. Cette interview diagnostique semi-structurée est destinée à évaluer les épisodes actuels et passés de psychopathologie chez les enfants et les adolescents selon le DSMIV. 1.1.4. Le test de mesure d’intelligence Les participants se sont vus administrer une version appropriée à leur âge de la Wechsler Intelligence Scale, qui est la WISC 4 (Wechsler, 2003) pour les 15-16 ans et la WAIS 3 pour les adolescents âgés de 17 ans et plus (Weschsler, 1997). Seul le QI verbal a été retenu dans les analyses, comme ce type d'intelligence a montré une forte corrélation avec les deux autres types (performance et intelligence totale). 1.1.5. Anamnèse Une anamnèse détaillée a été menée et a couvert plusieurs thèmes concernant les adolescents : le niveau d'éducation, l'occupation des parents, l'ordre de naissance, l'origine ethnique, et l'histoire familiale psychiatrique. 1.2. Méthodologie statistique Ci-dessous est présentée une synthèse des différentes méthodes utilisées dans ce travail et qui sont décrites en détail dans les articles (Delhaye et al, 2011, 2012). Pour décrire les échantillons, les statistiques descriptives usuelles ont été utilisées, moyenne et écart type (ET) pour les variables à distribution normale, médiane et proportions pour les variables catégorielles. Pour réduire le nombre de variables découlant des échelles, des analyses factorielles exploratoires, avec des rotations obliques Promax ont été effectuées. Une analyse factorielle confirmatoire pour confirmer la structure à quatre facteurs de la LAPPS. Les associations entre variables quantitatives ont été analysées à l’aide du coefficient de corrélation de Pearson ou de Spearman en fonction du type de distribution des variables en présence. Les comparaisons de moyennes ont été effectuées à l’aide de l’analyse de variance (ANOVA) à un facteur, suivie éventuellement de comparaisons multiples deux à deux, effectuées par le test de Tukey. La part de la variabilité de la variable dépendante expliquée par l’ANOVA a été mesurée par le coefficient ². Dans certains cas, afin évaluer l’importance de la différence entre deux moyennes, la différence standardisée (d) a été calculée (différence divisée par son écart-type). Selon Cohen (1988), la différence est considérée d’importance moyenne si d>0.5 et grande si d>0.8). L’analyse multivariée de variance (MANOVA) a été appliquée pour analyser simultanément plusieurs résultats d’échelle. Les résultats seront présentés dans le chapitre 4. 4. SYNTHESE DES PRINCIPALES OBSERVATIONS EXPERIMENTALES Les résultats des deux premières parties de la recherche ont permis de considérer que les autoquestionnaires utilisés dans le cadre de la recherche sont suffisamment fiables pour être utilisés dans une population francophone telle que celle de l’échantillon des 151 sujets. Celui-ci est décrit dans le tableau 1. Le développement exhaustif des résultats des deux premières parties de la recherche sont expliqués dans les articles suivants : « Delhaye M, Kempenaers C, Linkowski P, Stroobants R, Goossens L. Perceived Parenting and Separation-Individuation in Belgian College Students: Associations with Emotional Adjustment. The Journal of Psychology, 2012, 146(4), 353-370.” et “Delhaye M, Beyers W, Klimstra T, Goossens L, Linkowski P.. The Leuven Adolescent Perceived Parenting Scale (LAPPS): Reliability and Validity with FrenchSpeaking Adolescents in Belgium. Psychologica Belgica 2012 (sous presse)”. 4.1. Analyse des concepts d’attachement et de séparationindividuation à l’adolescence après comparaison d’une population d’adolescents « hospitalisés », « délinquants » et « contrôles » (Delhaye et al, The Journal of Genetic Psychology, 2012, 173(2), 119-141) Il s’agit de la phase de la recherche où nous avons comparé nos trois groupes à propos du parenting, de la séparation-individuation et de l’attachement. 4.1.1. Méthode Trois groupes d'environ 50 adolescents chacun, tous francophones, ont été recrutés pour l'étude en région de Bruxelles-capitale (Belgique). Ces trois groupes sont désignés comme adolescents « contrôles », « hospitalisés », et « délinquants », respectivement. Les caractéristiques descriptives des groupes sont présentées dans le tableau 1. Le nombre dans ces groupes n’est pas toujours N= 51 pour les « contrôles », N=50 pour les adolescents « hospitalisés », et N=51 pour les adolescents « délinquants », puisque certains adolescents n'ont pas complété tous les outils. Un participant dans le groupe « contrôle », par exemple, a complété tous les questionnaires, mais le diagnostic psychiatrique et l'information anamnestique n'était pas disponible. Les trois groupes étaient similaires en termes de moyenne d'âge et d’écart-type autour de la valeur moyenne, mais les deux groupes cliniques (« hospitalisés et délinquants ») comprenaient un grand nombre d'adolescents plus âgés. Les adolescents dans le groupe « contrôle » suivaient régulièrement les cours dans une école secondaire de Bruxelles. Les adolescents « hospitalisés » ont été recrutés dans une unité spécialisée pour les enfants et les adolescents dans un hôpital universitaire. De telles unités se réfèrent au terme unité de psychiatrie infanto-juvénile en Belgique francophone et les jeunes y sont admis après une préadmission. Dans la plupart des cas les parents des adolescents ou les jeunes gens eux-mêmes ont demandé de l'aide ; ils peuvent aussi être référés à l'unité adolescents par l'école ou leur médecin de famille. Les raisons principales pour une hospitalisation sont des problèmes relationnels dans la famille, une tentative de suicide, un décrochage scolaire chronique, ou des automutilations répétées. Finalement, les adolescents « délinquants » ont été recrutés dans une institution de protection de la jeunesse. De tels types d'institution se réfèrent aux institutions publiques de protection de la jeunesse ou IPPJ en Belgique francophone qui sont subsidiés par l'État et qui sont destinés à rééduquer des jeunes qui ont commis des actes de délinquance. Tous les adolescents ont été placés en institution par le juge parce qu'ils avaient commis un acte sévère de délinquance. Les trois groupes sont similaires en termes de type de famille, mais certaines différences ont été retrouvées dans l'origine ethnique et le type d'école. La distribution entre les familles avec les deux parents et les familles monoparentales étaient similaires dans tous les groupes. Les trois groupes ont des contacts réguliers avec leurs parents (quotidiennement pour les jeunes « hospitalisés » ainsi que les jeunes « contrôles » et une fois par semaine pour les jeunes « délinquants »). Dans le groupe « contrôle » et le groupe « délinquant », environ la moitié des adolescents viennent de familles dans lesquelles les deux parents sont nés en Belgique et l'autre moitié a au moins un parent qui est né à l'étranger (typiquement dans un pays d'Afrique du Nord, comme le Maroc). La majorité des adolescents dans le groupe « hospitalisé » indiquent que les deux parents sont nés en Belgique. Cette surreprésentation des adolescents avec des parents nés à l'étranger peut refléter des différences ethniques dans l'utilisation des aides médicale ou psychiatrique. Finalement, le groupe « contrôle » a suivi le cursus académique classique en école secondaire (ils se préparent tous à une éducation supérieure), tandis que la majorité des jeunes du groupe « hospitalisé » suivent soit le cursus traditionnel classique soit un enseignement technique. Chez les jeunes « délinquants », l'orientation en école professionnelle est surreprésentée. 4.1.2. Outils cfr Méthodologie et article : «Delhaye et al.. Attachment, Parenting, and SeparationIndividuation in Adolescence : A Comparison of Hospitalized Adolescents, Institutionalized Delinquents, and Controls. The Journal of Genetic Psychology, 2012, 173(2), 119-141 » Tous les participants ont été interviewés individuellement à l'aide d'une interview diagnostique standardisée et ils ont complété des auto-questionnaires sur leurs perceptions associées aux parents. Toutes les interviews ont été menées en français, la langue maternelle des participants. Interview diagnostique Comme on peut le voir dans le tableau 1, les diagnostics selon le DSMIV se marquent différemment dans les trois groupes, comme on pouvait s'y attendre. La grande majorité (96%) des adolescents du groupe « contrôle » n'ont pas montré de troubles psychiatriques. Les diagnostics principaux relevés dans le groupe des adolescents « hospitalisés » étaient selon un ordre décroissant, des troubles de l'humeur, de l'anxiété (36%), des troubles de l'adaptation (32%) et des troubles de l'attention ou des conduites (16%). Un petit sous-groupe (14%) n'a pas montré de diagnostic psychiatrique. Finalement, tous les jeunes adolescents « délinquants » ont au moins un diagnostic soit de troubles des conduites ou de trouble oppositionnel mais la majorité d'entre eux (67%) a aussi un trouble dépressif ou un trouble anxieux. Attachement mesuré à l’aide du CaMir (cfr chapitre méthodologie) Parenting (cfr chapitre méthodologie) Séparation-Individuation. (cfr chapitre méthodologie) 4.1.3. Procédure Dans chaque groupe, l'information générale sur l'étude et ses objectifs a été fournie oralement pendant une session de 30 minutes aux participants potentiels, par l’auteur et son équipe. Cette session d'information, qui se centrait sur l'autonomie et le détachement à l'adolescence a été répété 10 fois dans chaque groupe jusqu'à ce que le nombre planifié de participants soient atteint (environ 50 adolescents dans chaque groupe). Un consentement informé a été complété par les adolescents et leurs parents. Une permission pour l'étude a été obtenue auprès du Ministère de la Santé et du Service de Protection de la Jeunesse pour le groupe des jeunes « délinquants », à l'hôpital pour les jeunes « hospitalisés », et à l'école pour le groupe « contrôles ». Le testing s'est déroulé dans chaque endroit où se trouvaient les jeunes (école, service hospitalier universitaire, ou institution de protection de la jeunesse). Les participants ont été assurés quant à la confidentialité des données obtenues lors du test et de l'interview. Chaque adolescent a pris part à deux sessions (pour un total de 4h30). Durant la première session, l’auteur a administré l'interview diagnostique (K-SADS-PL) à chaque adolescent (1h30) ainsi que les caractéristiques de base (composition de la famille et parcours scolaire) et les antécédents psychologiques du sujet et de sa famille. Pendant la deuxième session, l’auteur a présenté le CaMir à chaque adolescent (1h en tout). L'infirmière psychiatrique a administré les auto-questionnaires à chaque participant (1h). Finalement l'auteur a aussi organisé une session de feed-back individuel (1h) pendant lequel elle a présenté une brève synthèse des résultats cliniques principaux et quelques résultats préliminaires de l’étude. 4.1.4. Résultats Une analyse préliminaire des associations parmi les différents aspects des perceptions des adolescents à propos de leurs parents, a permis de mesurer le chevauchement empirique parmi ces différents aspects. Les sous-échelles multiples de parenting et de séparation-individuation ont été réduites à des dimensions plus efficaces au moyen de l'analyse factorielle. L'analyse factorielle exploratoire (analyse factorielle principale répétée) avec la rotation promax sur les huit échelles de parenting a amené deux facteurs, un pour chaque parent, tous deux définis par des saturations positives pour le soutien et le soutien à l'autonomie et des saturations négatives pour le contrôle comportemental et le contrôle psychologique, respectivement. Des scores élevés pour chaque facteur reflètent une qualité élevée de la perception du parenting. Des procédures analytiques factorielles similaires sur les onze sous-échelles qui ont mené à la séparation-individuation (les deux sous-échelles de l’EAS et les neufs sous-échelles de la SITA) ont amené trois facteurs qui sont étiquetés autonomie excessive (définie par des saturations positives pour séparation et détachement, comme trouvé dans l’EAS, l’attente d’un rejet, et l’angoisse d’engouffrement, comme trouvé dans la SITA), la dépendance excessive (définie par des saturations positives pour l'anxiété de séparation, la dépendance primitive, et l'anxiété du professeur), et la séparation saine (définie par une saturation négative pour le déni de la dépendance et des saturations positives pour la recherche de l'intimité avec les amis et l'amitié mature). Ces mesures pour le parenting et la séparation-individuation, avec les corrélations-Q de l'attachement, ont été utilisées afin de voir s’il y avait chevauchement des trois constructs dans l'échantillon complet. Les différences entre les trois groupes d’adolescents ont été subséquemment analysées en utilisant les sous-échelles originales de toutes les mesures. Il faut remarquer ici que la sous-échelle de consolidation narcissique de la SITA n'a pas montré une saturation substantielle pour aucun des trois facteurs. Les adolescents qui ont des scores élevés à cette échelle se sentent spéciaux et croient que les autres apprécient leur compagnie. 4.1.4.1. Corrélations parmi les perceptions associées aux parents Pour l’analyse qui suit, nous avons considéré que nous avions une distribution normale partielle car bien que l’échantillon soit plus petit que dans les deux autres chapitres, nous avons retrouvé une homogénéité des variances. Les corrélations parmi les aspects clés de l'attachement, du parenting, et de la séparationindividuation étaient hautement similaires dans les trois groupes (« hospitalisés », « délinquants », et adolescents « contrôles »). Les corrélations dans l'échantillon total sont représentées au tableau 2. Avec chaque instrument, des corrélations parmi les sous-échelles étaient celles attendues. Dans la même lignée que les études précédentes, les scores pour l'attachement préoccupé et l’attachement détaché étaient positivement associés, tandis que les deux formes de l'attachement insécure ont montré des corrélations substantiellement négatives avec l'attachement sécure. Les scores de parenting pour la mère et le père n'étaient pas associés ainsi que les aspects dérivés factoriels de la séparation-individuation. Quel que soit l'instrument, les corrélations étaient dans la même lignée que les découvertes antérieures dans la littérature. L'attachement sécure a montré une association significativement positive avec les deux dimensions de parenting maternel et de parenting paternel, comme décrit par les adolescents, tandis que des corrélations négatives avec le parenting ont été obtenues pour les deux formes d'attachement insécure. En ce qui concerne la séparation-individuation, l'autonomie excessive a montré des corrélations significativement négatives avec l'attachement sécure et le parenting ainsi que des corrélations positives avec l'attachement préoccupé et l'attachement détaché. La dépendance excessive, un autre aspect de la séparation-individuation, a montré une association négative avec l'attachement détaché. Finalement, la séparation saine a montré des corrélations significativement positives avec l'attachement sécure et le parenting maternel ainsi qu'une corrélation négative avec l'attachement détaché. Comme les corrélations significatives parmi les sous-échelles trouvées dans les différents instruments varient en valeur absolue entre r =.20 et r = .60 (Mdn r = .30), nous pouvons conclure que l'attachement, le parenting, et la séparation-individuation représentent effectivement des facettes bien distinctes et associées des perceptions des relations aux parents parmi les adolescents, comme attendu. 4.1.4.2. Différences inter-groupes : perception des relations aux parents Une série d’ANOVAS à une voie (avec l’appartenance à un groupe comme variable entre les sujets) et des tests Tukey par paires comme follow-up des résultats significatifs ont été menés pour toutes les sous-échelles d'attachement, de parenting, et de séparation-individuation. Les scores moyens en fonction de l'appartenance à un groupe pour toutes les mesures sont représentés au tableau 3. Comme attendu, les sujets « contrôles » ont obtenu des scores significativement plus élevés pour la mesure Q-sort de l'attachement sécure par rapport aux deux autres groupes cliniques. Les deux groupes cliniques ont aussi montré des corrélations négatives plus basses que le prototype Q-sort de l'attachement préoccupé par rapport aux sujets « contrôles »; il n'y a pas de différences significatives qui ont émergé pour l'attachement détaché. Les scores sur les treize sous-échelles du CaMir ont amené un tableau de résultats qui était plus différencié. Pour la communication ouverte, un aspect de l'attachement sécure, les sujets « contrôles » ont eu des scores plus élevés que les adolescents « hospitalisés » ; les jeunes « délinquants » ont scoré entre les deux. Pour l'évaluation positive de l'enfance, un autre aspect de l'attachement sécure, les sujets «contrôles » ont obtenu un score significativement plus élevé, sur la moyenne, que les deux groupes cliniques. À l'inverse, les deux groupes cliniques ont eu des scores significativement plus élevés que les sujets « contrôles » pour différents aspects de l'attachement insécure, tels que l'interférence parentale, le parenting restrictif, et la rancune envers les parents. De plus, ces adolescents ont eu un score plus élevé que les deux autres groupes pour l'hyperimplication, un aspect de l'attachement préoccupé. Des différences supplémentaires ont émergé pour des aspects de l'attachement non-résolu. Les « délinquants » ont obtenu des scores significativement plus élevés pour l’item « trauma dans l'enfance » que ne l'ont obtenu les adolescents « hospitalisés », qui à leur tour ont eu des scores plus élevés que les adolescents « contrôles ». Les adolescents « hospitalisés » ont eu des scores significativement plus élevés que les « contrôles » pour l’item perte de mémoire des expériences négatives du passé ; les jeunes « délinquants » scorent entre les deux. Finalement, en ce qui concerne les aspects structuraux de la vie familiale, les deux groupes cliniques ont obtenu des scores plus élevés que les sujets « contrôles » pour les attitudes inconsistantes et résignées des parents. Contrairement aux attentes, peu d'effets significatifs ont été observés pour le parenting. Les adolescents « délinquants » ont eu des scores significativement plus élevés que les adolescents « hospitalisés » pour le soutien maternel à l'autonomie avec des sujets « contrôles » qui avaient un score entre les deux. La différence ANOVA significative pour le soutien paternel à l'autonomie n'a pas pu être clarifiée par les tests Tukey. Finalement, des contrastes significatifs entre les trois groupes ont émergé pour les différentes sous-échelles de séparation- individuation. Les adolescents « hospitalisés » ont eu des scores significativement plus élevés que les contrôles pour la séparation, avec des adolescents « délinquants » qui auront obtenu un score entre les deux. Les adolescents « délinquants », par contraste, ont obtenu des scores significativement plus élevés pour le détachement que les sujets « contrôles », avec des adolescents « hospitalisés » qui scorent entre les deux. Les jeunes « délinquants » ont aussi obtenu un score significativement plus élevé pour la dépendance primitive par rapport aux adolescents « hospitalisés ». Les adolescents « hospitalisés » ont obtenu des scores significativement plus élevés pour l'anxiété d’engouffrement par rapport aux sujets « contrôles », avec des adolescents « délinquants » qui scorent entre les deux. Finalement, les adolescents « délinquants » ont eu des scores significativement plus élevés pour la consolidation narcissique que les deux autres groupes. La discussion sera élaborée plus loin. Ci-dessous, vous trouverez des tableaux de synthèse des résultats qui seront développés et interprétés dans la discussion générale. 1. Tableau de synthèse des résultats concernant le parenting 2. Tableau de synthèse des résultats concernant la séparation-individuation 3. Tableau de synthèse des résultats concernant l’attachement Tableau 1 : Caractéristiques descriptives des groupes cliniques et contrôle Variables Contrôles Hospitalisés Délinquants N (filles, garçons) 51 (26, 25) 50 (25, 25) 51 (26, 25) Age moyen (ans) 16.33 16.51 16.52 0.84 1.06 0.94 ET(ans) Tranche d’âge (ans) 14.7 – 18.5 15 – 18.8 15.1 – 18.3 Famille avec 2 parents 43 41 42 Famille monoparentale 7 9 9 26 42 24 Type de famille Background éthnique 2 parentés nés en Belgique Au moins un parent né à l’étranger 24 8 27 Type d’étude Parcours classique 48 23 0 Enseignement technique 0 15 4 Enseignement professionnel 0 9 27 Enseignement specialise 0 1 17 Autre 2 2 2 48 7 1 12 Diagnostic DSM-IV Aucun Troubles de l’humeur et anxiété Troubles dépressifs (DD) Troubles anxieux (AD) 6 Troubles de l’attention et/ou des conduites Hyperactivité et déficit d’attention Trouble (ADHD) 1 Trouble des conduites (CD) 4 Trouble oppositionnel (OD) 1 CD + OD 2 CD + OD + ADHD 5 9 CD + DD ou AD 4 OD + DD ou AD CD + OD + DD ou AD 1 33 Troubles de l’adaptation Troubles- de l’adaptation 1 14 Trouble de l’adaptation + DD ou AD 2 Statut d’emploi des parents Père Sans emploi 4 11 18 Employé 27 20 9 Ouvrier 9 6 9 Fonctionnaire 3 3 3 Indépendant 4 6 7 Autre 3 4 5 Sans emploi 7 16 24 Employée 36 28 21 Ouvrière 1 2 3 Fonctionnaire 1 0 0 Indépendant 4 2 3 Autre 1 2 0 Mère ______________________________________________________________________ Note. Dans le groupe contrôle, l’information sur les caractéristiques descriptives était disponible pour N = 51, mais les données anamnestiques ne sont disponibles que pour N = 50. Histoire familiale psychiatrique Présence 4 32 18 Absence 46 18 33 Actuelle ou passée 0 2 51 Jamais 50 48 0 Institutionnalisation Tableau 2 : Corrélations parmi les perceptions associées aux parents (échantillon complet) Variable 2 3 4 5 6 7 8 Attachement 1. Sécure -.75*** -.60*** .42*** .32*** -.60*** .07 2. Préoccupé .20* -.31** -.23** .48*** .06 .26** -.14 -.35** -.29*** .40*** -.29*** -.23** 3. Détaché Parenting 4. Parenting-Mère .10 5. Parenting-Père -.40*** .02 .30*** -.24** .12 .13 Séparation-Individuation 6. Autonomie excessive .06 -.06 7. Dépendance excessive .15 8. Séparation saine -- * p < .05. ** p < .01. *** p < .001. Tableau 3 : Différences moyennes parmi les groupes clinique et contrôle : perceptions associées aux parents Variables Contrôles Hospitalisés Délinquants .57b .34a .32a (.26) (.36) (.33) -.17b -.04a -.04a (.15) (.18) (.16) -.07 -.03 -.03 (.16) (.18) (.15) 3.80 3.43 3.57 (0.89) (0.88) (0.94) 3.68b 3.23a 3.45 (0.78) (1.03) (0.87) 4.04b 3.42a 3.59a (0.77) (0.92) (0.91) 2.18a 2.81b 2.97b (0.70) (0.82) (0.81) 3.39a 3.45a 3.82b (0.67) (0.79) (0.87) 2.02a 2.54b 2.71b (0.68) (0.68) (0.95) 2.22 2.48 2.53 (0.74) (0.81) (0.85) 3.50 3.41 3.67 (0.83) (0.91) (0.92) 1.97a 2.72b 2.72b (0.82) (1.02) (1.14) F η2 Attachementa Q-sort Sécure Préoccupé Détaché 9.44*** .11 10.13*** .12 0.94 .01 2.14 .03 3.16* .04 7.19*** .09 14.90*** .17 4.57* .06 10.87*** .13 2.18 .03 1.11 .01 9.47*** .11 Sous-échelles Soutien parental Communication ouverte Evaluation positive de l’enfance Interférence parentale Hyperimplication Parenting restrictif Manque de préoccupation parentale Auto-suffisance Rancune contre les parents Trauma de l’enfance Manque de mémoire 1.84a 2.35b 2.82c (0.73) (0.87) (1.09) 2.69a 3.18b 2.95 (0.86) (1.07) (0.93) 1.77a 2.29b 2.65b (0.67) (0.79) (0.87) 4.36 4.17 4.35 (0.37) (0.49) (0.50) 15.05*** .17 3.30* .04 16.38*** .18 2.79 .04 Attitudes parentales inconsistantes et résignées Valeurs familiales traditionnelles (le tableau continue) Tableau 3 (suite) Variables Contrôles Hospitalisés Délinquants 3.84 3.52 3.61 (0.99) (1.08) (1.18) 3.21 3.22 2.91 (0.74) (0.73) (0.87) 2.59 2.69 2.79 (0.94) (0.74) (0.91) 3.44 3.10a 3.48b (0.67) (0.72) (0.77) 3.13 2.89 3.12 (0.97) (1.07) (1.30) 3.19 3.18 3.47 (0.85) (0.94) (0.73) 2.60 2.72 2.94 (0.64) (0.91) (0.94) 3.49 3.10 3.09 (0.65) (0.92) (0.94) 2.82a 3.09b 2.97 (0.54) (0.40) (0.54) 2.45a 2.61 2.77b (0.47) (0.47) (0.52) 2.96 3.01 3.12 (0.74) (0.78) (0.87) 2.98 2.69a 3.35b (0.88) (0.68) (0.97) 1.93 2.29 2.34 (0.87) 0.92) (1.05) 2.82a 3.37b 3.20 (0.66) (0.76) (0.96) F η2 1.17 .02 2.63 .03 0.66 .01 4.16* .05 0.69 .01 1.78 .02 1.89 .03 3.57* .05 3.79* .05 5.37** .07 0.52 .01 7.51*** .09 2.90 .04 6.27** .08 Parentingb M – Soutien M – Contrôle comport. M – Contrôle psychol. M – Soutien autonomie F – Soutien F – Contrôle comport. F – Contrôle psychol. F – Soutien autonomie Séparation-Individuation c Séparation Détachement Anxiété de séparation Dépendance primitive Attente de rejet Anxiété d’engouffrement Déni de dépendance Consolidation narcissique Angoisse du professeur 2.23 2.53 2.49 (0.60) (0.74) (0.72) 2.77a 2.71a 3.53b (0.79) (0.70) (0.80) 2.84 2.73 2.61 (1.00) (1.12) (1.16) 3.68 3.68 4.03 (0.87) 0.95) (0.84) 4.37 4.09 4.18 (0.47) (0.56) (0.86) 2.89 .04 18.18*** .20 0.56 .01 2.69 .03 2.35 .03 Recherche d’intimité – Pairs Amitié mature – Pairs Note. Ecart-types entre parenthèses. M = Mère; F = Père. Les moyennes avec les différents items sont significativement différents l’un de l’autre quand p < .05 (Tukey test). a n contrôles = 51; n hospitalisés = 50; n délinquants = 51; df = 2, 149. b Pour l’échelle mère: n contrôles = 51; n hospitalisés= 50; n délinquants = 50; df = 2, 148; pour l’échelle père: n contrôles = 50, n hospitalisés = 47; n délinquants = 44; df = 2,138. c n contrôles = 51; n hospitalisés = 50; n délinquants = 51; df = 2, 149. * p < .05. ** p < .01. *** p < .001 4.2. Analyse plus précise du concept d’attachement associé au contexte psycho-social au sein de trois groupes de jeunes : jeunes « hospitalisés », jeunes « délinquants » et « contrôles » Il s’agit des résultats concernant la comparaison des trois groupes (« hospitalisés », « contrôles » et « délinquants ») au niveau de l’attachement et des aptitudes socioémotionnelles. Ceux-ci sont développés de manière exhaustive dans l’article : (Delhaye et al, Clinical Psychology and Psychotherapy (2012) ; DOI : 10.1002/cpp.1787) 5. DISCUSSION GÉNÉRALE Dans cette partie du travail, nous allons analyser les résultats en lien avec les hypothèses et les prédictions pour les quatre étapes de la recherche. 5.1. Etude de validation du parenting Cette étude était la première à examiner la fiabilité et la validité d'une mesure de représentation du parenting (à l’origine développée pour l'utilisation chez des adolescents néerlandophones) chez des adolescents avec un régime linguistique différent. Des découvertes prometteuses ont été obtenues sur les propriétés psychométriques de la mesure dans un échantillon d'adolescents de la région francophone de Belgique. Comme attendu, les propriétés psychométriques solides de la LAPPS obtenues dans l'une des principales régions linguistiques de Belgique (Beyers et Goossens, 2008) peuvent être étendues à une autre région linguistique principale du pays. Spécifiquement, la consistance interne, la structure factorielle, et les scores moyens de l'instrument étaient vraiment similaires dans des échantillons attentivement assortis d'adolescents néerlandophones et francophones. De plus, la validité de la LAPPS a été établie dans le sous-échantillon francophone seulement. En outre, les différentes sous-échelles de l'instrument ont largement montré un modèle différencié attendu d'associations avec une mesure alternative de la perception des relations adolescents parents. Des analyses sur l'échantillon complet, lorsqu'elles sont combinées en fonction des régions linguistiques, ont aussi montré que la structure factorielle et les scores moyens obtenus étaient vraiment similaires pour les adolescents filles et garçons. 5.2. Parenting, séparation-individuation et émotionnelle chez des bacheliers en médecine adaptation Cette étude a ajouté de manière substantielle à notre compréhension du processus de séparation-individuation chez des étudiants à l’université. Un soutien mixte a été trouvé pour notre attente qui était que les trois dimensions de séparation-individuation serviraient d'intermédiaire pour le lien entre la perception du parenting et l’adaptation émotionnelle, avec un effet positif sur l’adaptation émotionnelle pour la séparation saine et des effets négatifs pour les deux facteurs autonomie excessive et dépendance excessive comme suggéré dans la littérature (Levine et al, 1986 ; Mahler et al, 1975). Nos résultats nous permettent de clarifier les notions actuelles de processus psychologique de séparation entre les adolescents et leurs parents. 5.2.1. Autonomie excessive comme une dimension intrapsychique de séparation-individuation L'autonomie excessive a agi effectivement comme intermédiaire partiel du lien entre la perception du parenting et l'ajustement émotionnel. Une qualité meilleure de perception du parenting s’associe à des niveaux bas d'autonomie excessive. Ceci est associé à une meilleure adaptation émotionnelle. De plus, toute la qualité de la perception du parenting fourni par la mère, prédit directement une portion significative de la variance dans l’adaptation émotionnelle, ce qui n'est pas le cas pour la perception du parenting fourni par le père. Le modèle général des résultats, dès lors, suggère que la perception du parenting maternel et paternel ont un effet sur l’adaptation émotionnelle des étudiants à l’université à travers différents canaux et, potentiellement, à travers différents mécanismes sous-tendus. Une recherche supplémentaire sur les antécédents des étudiants luttant excessivement pour l'autonomie est nécessaire pour élucider ce modèle de recherche. 5.2.2. Les rôles respectifs de la séparation saine et de la dépendance excessive Dans la même lignée que nos attentes initiales et les recherches antérieures sur l’adaptation émotionnelle à l’université et l'adaptation en général, la séparation saine d'avec les parents a été associée à une adaptation émotionnelle supérieure. Par contre, la dépendance excessive des étudiants universitaires à leurs parents, n'a pas fourni de lien entre la perception du parenting et l’adaptation émotionnelle. Ce modèle de résultats suggère que dans la population présente, la séparation saine était la dimension la plus importante des deux. Une recherche future sur les associations entre la séparation saine et la dépendance excessive ainsi que leurs rôles respectifs dans le processus de séparation-individuation peut être intéressante. Les résultats de l'étude ont d'importantes implications pour la recherche sur la séparation psychologique des étudiants à l’université d'avec leurs parents. Le modèle global de résultats suggère que les étudiants à l’université luttant excessivement pour leur autonomie est une dimension importante et quelque peu négligée de la séparation-individuation. A la fois dans les antécédents parentaux présumés et les associations avec l'adaptation, cette dimension doit se distinguer des autres dimensions comme accomplir une séparation saine et être dépendant excessif d'un de ses parents. 5.3. Parenting, séparation-individuation et attachement chez les adolescents « hospitalisés », « délinquants », et « contrôles » L'étude actuelle a examiné les perceptions qu’ont les adolescents de leurs relations à leurs parents et ceci chez des adolescents « hospitalisés », « délinquants », et « contrôles » à partir de trois perspectives théoriques, qui sont, l'attachement, le parenting, et la séparationindividuation. L'inspection des corrélations a révélé que les différentes mesures inspirées par ces théories dévoilaient effectivement trois constructs bien distincts et associés. Utilisant les sous-échelles distinctes dans chaque mesure, la comparaison des trois groupes d'adolescents a amené un soutien limité pour les hypothèses initiales avancées. Les sujets « contrôles » ont effectivement des scores plus élevés pour les indices d'attachement sécure que les deux autres groupes cliniques, comme attendu. Concernant les différences entre les adolescents « hospitalisés » et « délinquants », cependant, certaines différences inattendues ont émergé pour les mesures pour lesquelles des hypothèses spécifiques ont été énoncées et certaines différences intéressantes ont été trouvées pour les sous-échelles pour lesquelles il n'y avait pas de telles hypothèses. 5.3.1. Adolescents « hospitalisés » et « délinquants » Les différences entre les adolescents « hospitalisés » et « délinquants » sont plus complexes que prévu. Notamment, il n'y a pas d'indication que les adolescents « hospitalisés » aient adopté une stratégie spécifique pour gérer leurs relations avec leurs parents en exagérant l'anxiété et la dépendance continue, comme on peut le voir à travers un attachement préoccupé et une dépendance excessive. Il n'y a pas d'évidence non plus que les adolescents « délinquants » aient adopté une stratégie complémentaire mais également unique qui a pour but une distanciation psychologique vis-à-vis de leurs parents, que l'on retrouve dans l'attachement détaché et l'autonomie excessive. Au contraire, les adolescents qui ont été hospitalisés pour des symptômes dépressifs marqués ont obtenu un score plus élevé que les « contrôles » pour les indices d'autonomie excessive (la sous-échelle séparation de l’EAS et la sous-échelle anxiété d’engouffrement de la SITA). Ceci montre la tendance opposée à celle attendue. Cependant, leurs scores à ces indices n'étaient pas significativement différents de ceux des adolescents « délinquants ». Ce dernier groupe, qui est institutionalisé dans un centre de traitement pour des problèmes sévères d'externalisation, a obtenu des scores plus élevés que les « contrôles » à l'index d'autonomie excessive (la sous-échelle détachement de l’EAS) et un score plus élevé que les adolescents « hospitalisés » pour la dimension de dépendance excessive (par ex la sous-échelle hyperimplication du CaMir et la sous-échelle dépendance primitive de la SITA). Une ambivalence concernant les questions de proximité et de distance interpersonnelle semble être caractéristique pour les jeunes adolescents « délinquants ». Les attentes initiales concernant l'attachement non-résolu, cependant, étaient partiellement confirmées. Les adolescents « délinquants » et « hospitalisés » ont rapporté des niveaux plus élevés de traumas pendant l'enfance que ne l'ont fait les sujets « contrôles », comme attendu, avec les scores les plus élevés pour les « délinquants ». Les jeunes « hospitalisés » ainsi que les « délinquants » ont ramené de plus grandes difficultés à se rappeler de souvenirs spécifiques de l'enfance en opposition aux sujets « contrôles », une indication qu'ils ont dû se battre de manière excessivement défensive lors des expériences associées à l'attachement (Ward et al, 2006). Dans le test CaMir, les items ayant trait au trauma sont isolés et ne permettent pas d’analyser une réelle maltraitance. Ceci pourrait être envisagé dans une étude ultérieure. Les « délinquants » ont aussi eu un score plus élevé à la sous-échelle consolidation narcissique de la SITA. Ce résultat est plus difficile à interpréter à cette sous-échelle qui n'était pas incluse dans le modèle à trois facteurs de séparation-individuation et aucune hypothèse spécifique sur les différences intergroupes n’a été établie à l'avance pour cette sous-échelle particulière. Au niveau théorique, le narcissisme adolescentaire, ou le sens d'être admiré par les compagnons de son âge, est typiquement considéré comme une phase temporaire, adopté quand les dépendances infantiles aux parents déclinent et qu’un sens de l'identité indépendant n'a pas encore été établi (Levine et al, 1986). A un niveau empirique, une recherche précédente indique que cette forme transitoire de narcissisme pourrait être adaptative d’une certaine façon Holmbeck et Leake, 1999). Les adolescents qui ont un niveau élevé à la consolidation narcissique, ont aussi des mesures élevées à l’adaptation (ils ont une estime de soi élevée et une confiance sociale ; Holmbeck et Leake, 1999). Cet item de consolidation narcissique ne permet pas une analyse approfondie du narcissisme chez les adolescents. Ceci pourrait être l’objet d’une recherche ultérieure. Finalement, les adolescents « délinquants » ramènent un niveau plus élevé de soutien à l'autonomie de la part de leur mère que ne le font les adolescents « hospitalisés ». Ce résultat est à nouveau un peu difficile à analyser puisqu'il n'y a pas d'hypothèses spécifiques sur les différences entre les groupes qui ont été avancées pour cette sous-échelle non plus. Une explication potentielle est que cette perception particulière de la mère, est associée au processus continu de distanciation psychologique de l'adolescent à partir des figures parentales et cette forme concomitante de narcissisme transitoire est adaptative. Une recherche supplémentaire sur le narcissisme chez l'adolescent et le soutien maternel perçu pour l'autonomie est clairement nécessaire pour élucider plus à fond cette recherche à propos des adolescents « délinquants ». Une autre dimension qui pourrait être prise en compte ultérieurement est celle amenée par Caspi en 2002, dans le courant évolutionniste qui s’intéresse au rôle de génotype dans l’expression de la violence chez des enfants maltraités. Pour cela, il faudrait considérer un groupe où tous les sujets auraient subi de la maltraitance psychologique et physique. 5.4. Adaptation socio-émotionnelle et attachement chez des adolescents « hospitalisés », « délinquants », et « contrôles » L’objectif de cette étude était de comparer des adolescents « hospitalisés », « délinquants », et « contrôles » au niveau de leurs cognitions d'attachement et de leurs aptitudes socioémotionnelles. Basées sur la théorie de l'attachement, des hypothèses ont été avancées concernant les différences entre ces trois groupes. Sans surprise, les adolescents « contrôles » ont montré des scores plus positifs que les deux autres groupes pour la plupart des mesures utilisées. Par contre, il n'y a pas de différences significatives entre les groupes au niveau de l'attachement détaché et de l'empathie. Des différences importantes, cependant, ont été découvertes sur certaines mesures entre les adolescents « hospitalisés » et les adolescents « délinquants ». Sur les échelles d'attachement, les adolescents « hospitalisés » et « délinquants » ne diffèrent pas. Les deux groupes ont un score plus bas pour l'attachement sécure que ne l'ont les sujets « contrôles », ce qui était attendu. Ce qui était un peu moins attendu, c'est que les deux groupes aient aussi un score plus élevé pour l'attachement préoccupé. La dernière découverte en lien avec un récent article ayant réalisé une revue de la littérature (Bakermans-Kranenburg et van Ijzendoorn, 2009), est que l'attachement préoccupé est surreprésenté chez des patients qui ont soit des problèmes d'internalisation, soit des problèmes d'externalisation. Les adolescents « hospitalisés » ont des scores plus bas pour l'intelligence émotionnelle et la résilience en comparaison aux sujets « contrôles », et ces différences étaient attendues (Hjemdal, 2011 ; Hugues, 2011). Les adolescents « hospitalisés » ont aussi un score plus bas pour la résilience par rapport aux adolescents « délinquants ». D'autre part, ils ne diffèrent par des adolescents « contrôles » en ce qui concerne l'empathie, comme on pouvait s'y attendre (Hugues, 2011), et en ce qui concerne l'intelligence. Les adolescents « délinquants », finalement, ont montré un nombre de facteurs de risques tels qu'une intelligence verbale plus basse, un parcours académique moins privilégié, et un statut d'emploi précaire chez les parents, comme révélé dans les analyses descriptives. Cependant, ils ne diffèrent pas des adolescents « contrôles » en termes d'intelligence émotionnelle, d'empathie, ou de résilience. Ces résultats vont à l'encontre de nos attentes qui avaient prédit une intelligence émotionnelle plus basse et une empathie plus basse dans ce groupe particulier. Les « délinquants », donc, semblent avoir développé des voies spécifiques d'adaptation qui devraient être explorées en plus grand détail dans de futures recherches. Les mesures d'attachement permettent aux professionnels des centres thérapeutiques de prédire comment les adolescents vont former des liens d'attachement spécifique (par exemple, se mettre à distance ou s'accrocher) aux adultes dans ce cadre. De même, les mesures d'aptitudes émotionnelles associées à l'attachement permettent à ceux qui donnent les soins de prédire comment les adolescents vont probablement développer un comportement difficile comme résultat de telles aptitudes appauvries à la régulation dysfonctionnelle de leurs émotions (Zegers et al, 2006, 2008). Quand les caractéristiques spécifiques des adolescents « dépressifs » et « délinquants » dans ces domaines sont prises en compte, l'efficacité des traitements dans le système de la santé mentale et les systèmes judiciaires se voit améliorée. Les résultats de cette recherche ont d'importantes implications pour les professionnels qui travaillent avec des adolescents troublés admis dans des unités hospitalières spécialisées dans le système de santé mentale et dans des centres résidentiels thérapeutiques du système judiciaire, qui sont souvent le dernier recours. Tous les professionnels devraient être conscients que les adolescents dépressifs et délinquants ont des problèmes similaires en ce qui concerne l'attachement (ils montrent un attachement anxieux ou préoccupé). En ce qui concerne les aptitudes socio-émotionnelles, la fragilité des adolescents « hospitalisés » et l'apparente résilience des adolescents « délinquants » malgré la limitation cognitive, comme découvert dans l'étude actuelle, devraient faire partie de plans de traitement spécifiques pour ces groupes d'adolescents. Les adolescents hospitalisés avec des problèmes sévères d'internalisation et les adolescents placés dans une institution de protection de la jeunesse pour des problèmes sévères d'externalisation se sont trouvés absorbés, chacun dans leur manière spécifique, par des expériences de traumas associées à l'attachement. Le travail avec les parents est primordial pour qu’ils puissent être en meilleur « accordage » avec leurs adolescents. 6. CONCLUSIONS GÉNÉRALES L’autonomisation et la séparation-individuation sont un processus essentiel à l’adolescence. La recherche actuelle est une sorte de photographie des représentations d’adolescents à un moment donné. La première étape de la recherche a permis de conclure que le parenting est mesuré avec une fiabilité semblable et comparable dans la région francophone de Belgique par rapport à la région néerlandophone. La deuxième étape de la recherche a relevé une plus grande adaptation en général chez des étudiants bacheliers d'une université belge lorsque la dimension « séparation saine » était élevée. Ce résultat est un soutien relatif à nos attentes de départ où nous pensions rencontrer une association plus importante avec les deux autres dimensions de séparations individuation qui sont la dépendance excessive et l'autonomie excessive. Ceci nous indique que le modèle global de nos résultats suggère que ces étudiants bénéficient de conditions plus favorables pour la séparation individuation (Lévine et al, 1986 ; Goossens et al, 2002 ; 2006). Nous allons maintenant discuter de l'intérêt principal de cette recherche. Notre but au départ était d'analyser trois concepts complémentaires du courant de pédopsychiatrie développementaliste qui sont le parenting, la séparation individuation et l'attachement. Ceci chez 151 adolescents de 15 à 18 ans, répartis en trois groupes : « contrôles », « hospitalisés », et « délinquants ». Nous avons obtenu des résultats en faveur de nos prédictions et d'autres moins. En ce qui concerne le parenting, nous avons relevé un soutien parental élevé dans le groupe des adolescents « contrôles » et un contrôle comportemental élevé dans le groupe des jeunes « hospitalisés ». Ceci va dans le sens nos attentes. Par contre, nous avons obtenu un soutien parental et un contrôle comportemental élevés dans le groupe des adolescents « délinquants ». À propos du concept de séparation- individuation, les adolescents du groupe « contrôles » ont obtenu une séparation saine élevée et les adolescents du groupe « délinquants » ont obtenu une autonomie excessive élevée. Ce qui était attendu. Par contre le groupe des adolescents « hospitalisés » a obtenu une autonomie excessive élevée et le groupe des jeunes « délinquants » ont obtenu une dépendance excessive élevée. Pour le concept d'attachement, les adolescents « contrôles » ont obtenu une dimension sécure élevée et les adolescents « hospitalisés » ont obtenu une hyperactivation élevée du système d’attachement. Ce qui était aussi attendu. Par contre les jeunes délinquants ont obtenu une hyperactivation élevée du système d’attachement. Nous pourrions interpréter ces résultats de la manière suivante. Les adolescents hospitalisés et les adolescents délinquants se sont trouvés absorbés dans leurs difficultés. Nous observons une ambivalence entre trop de proximité et trop de distance interpersonnelle chez les adolescents délinquants de notre échantillon. Les jeunes « hospitalisés » présentent une autonomie excessive. Ceci pourrait s’expliquer par le fait qu’ils ont été hospitalisés de manière volontaire et qu’ils étaient souvent en demande d’une mise à distance de la famille. D'autre part, bien qu'étant recrutés dans trois groupes bien distincts, les deux groupes cliniques sont assez proches au final. Les jeunes recrutés en institution publique de protection la jeunesse n'ont pas montré de traits antisociaux sévères. Ils n'ont malheureusement peut-être pas rencontré les tuteurs de résilience nécessaires à leur donner un soutien suffisant pour leur long cheminement de séparation-individuation par opposition aux deux autres groupes. Ces résultats sont cruciaux pour les cliniciens qui travaillent en pédopsychiatrie. En effet, une évaluation psycho développementale des adolescents en souffrance psychique permet de mieux appréhender la prise en charge spécifique en fonction des difficultés individuelles et contextuelles liées à chaque jeune. Pour ce faire, un traitement intensif se référant à l'attachement et à la séparation-individuation est indispensable auprès du jeune et de sa famille. 7. PERSPECTIVES Une recherche utile pourrait étendre les analyses à la perception des parents sur le climat de socialisation qu'ils offrent à leurs enfants. Une recherche plus précoce a montré que les corrélations entre les adolescents et les parents sur ce type de mesure étaient dans une tranche basse à modérée (Holmbeck et al, 2002). Une observation directe des comportements de permissivité et de contraintes dans les interactions familiales (Yasui et Dishion, 2008) peut aussi amener une information supplémentaire sur les relations adolescents parents. Une recherche longitudinale est nécessaire pour débrouiller la séquence causale des différentes variables impliquées pour les questionnaires évaluant le Parenting, la Séparation-Individuation et les Aptitides Socio-émotionnelles. Des interviews individuelles qui décrivent des sentiments négatifs d'un protagoniste dans des vignettes filmées et invitent l'adolescent à adopter la perspective de la personne et de décrire ses sentiments révèlent de plus grandes difficultés avec la réponse empathique chez des « délinquants » comparés aux adolescents non- délinquants (Robinson et al, 2007). Une future recherche est conseillée pour utiliser des mesures plus fines d'attachement et d'empathie avec l'aide d'interviews individuelles. 8. LIMITATIONS La taille de l’échantillon dans certaines parties de la recherche rendent difficile une généralisation à d’autres régions. Pour la LAPPS, les sous-échantillons sont relativement grands et attentivement assortis avec une orientation linguistique différente mais il faut quand même parler des implications pour la généralisation des découvertes obtenues. On garde en mémoire que la validité de la LAPPS a été examinée uniquement dans l'échantillon francophone et qu'il y a donc une limitation des associations avec une autre mesure des relations adolescents-parents. Tous les instruments utilisés étaient basés chez un partenaire particulier de cette relation qui est le sujet adolescent. Tous les participants de l'échantillon francophone ont été recrutés en région de BruxellesCapitale. Une future recherche devrait faire un recrutement dans toute la région francophone de Belgique (Wallonie). Pour les bacheliers en médecine, nos résultats reflètent la qualité affective de la relation avec les parents et les normes et attentes associées à la séparation d'un de ses parents qui prévalent dans la culture belge. Ce contexte culturel spécifique peut expliquer pourquoi la séparation saine et la dépendance excessive n'étaient pas « médiateurs » du lien entre la perception du parenting et l’adaptation émotionnelle. Ce lien de médiation a été trouvé dans un travail antérieur aux États-Unis (Boles, 1999 ; Mattanah et al, 2004). Pour la comparaison des trois groupes selon les trois concepts clé, cette étude a plusieurs points importants qui sont l'utilisation de trois groupes clairement déterminés de participants en termes de problèmes psychologiques et la validation d'un large set de mesures de perception parents-adolescents. Cependant, on doit aussi prendre en compte les limitations de l'étude actuelle qui concerne la validité des mesures et la généralisation des résultats obtenus. En ce qui concerne la validité, il est important de garder en mémoire qu'une mesure autorapportée de l'attachement a été utilisée. La moyenne des corrélations-Q avec le prototype sécure sont suffisamment élevées dans les trois groupes, mais ils sont bas pour les prototypes insécure et détaché en particulier. Ce modèle de résultats peut simplement indiquer que la mesure sécure travaille mieux avec les adolescents que les autres mesures. Pour clarifier cette question, un travail de validité additionnelle sur la mesure d'attachement devra certainement être réalisé (CaMir). En ce qui concerne la généralisation, les groupes examinés dans cette étude sont restés assez petits étant donné l'ensemble des instruments administrés individuellement tels que l'interview diagnostique et la mesure de l'attachement dont l'ampleur a imposé un nombre limité de participants potentiels. Ces résultats obtenus ne pourront pas être généralisés en dessous de la tranche d’âge examinée, 15 à 18 ans. Les groupes adolescents « hospitalisés » et adolescents « délinquants » ont été recrutés dans un seul service psychiatrique et à un seul centre de traitement pour jeunes respectivement mais on retrouve peu de différences dans la manière d'organiser ces institutions parce qu'ils sont régulés par la loi et l'État fédéral en Belgique. Finalement, on devrait être prudent à généraliser les résultats aux autres cultures, puisque chaque système de santé mentale et judiciaire a ses propres règles définies. Pour la comparaison des trois groupes pour l’adaptation émotionnelle et l’attachement, les résultats de l'étude actuelle sont intéressants et appellent pour une future recherche. Celle-ci pourrait considérer les aspects socio-économiques de l’échantillon. Les mesures d'empathie peuvent ne pas être assez sensibles pour capter les différences d'empathie entre les adolescents « délinquants » et non-délinquants. 9. BIBLIOGRAPHIE : Ainsworth MDS, Blehar MC, Waters E, Wall S. 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Résumé de la thèse annexe : « Le Syndrome de Münchhausen par procuration : l’hypothèse d’un trouble de l’investissement parental ? » Le syndrome de Münchhausen par procuration est situé à la frontière des disciplines pédiatrique, psychiatrique et médico-légale. Décrit en 1977 par Meadow, cette forme extrême et parfois létale de maltraitance débutant dans l'enfance met en scène une mère induisant des symptômes alarmants chez son enfant qu'elle amène à répétition devant le corps médical pour des explorations diagnostiques et thérapeutiques parfois lourdes voire invasives. La confusion, la méconnaissance de ce syndrome rare et la complexité éthiopathogénique à poser le diagnostic de manière valable sont à l'origine de sa fréquence sous-estimée et de sa gravité potentielle (mortalité de 7 % au moins, implications médico-légales lourdes). Après une révision de la nosographie, nous replacerons ce trouble factice au sein de la nosographie et discuterons de l'élargissement de sa définition en dehors de la sphère médico-légale. La psychopathologie largement énigmatique du syndrome met en lumière la confusion et la fascination de ces relations triangulaires mère- enfant- médecin. Un cas clinique-décrit dans un premier temps, à partir d’une expertise psychiatrique en milieu hospitalier (unité des adolescents, hôpital Érasme) apporte une tentative de compréhension et s'intéresse plus particulièrement au rôle et à la place du père dans cette triade mère enfant soignant. À partir de cette articulation théorico-clinique, nous proposerons des pistes de recherche clinique concernant la spécificité de cette forme de maltraitance infantile, s'appuyant sur une anomalie de la théorie de l'investissement parental. Une piste d’exploration du profil psychopathologique de la mère maltraitante et du père sera discutée. 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