L`escorte, nouvelle mission pour l`ensemble des personnels

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L`escorte, nouvelle mission pour l`ensemble des personnels
L'escorte, nouvelle mission pour l'ensemble des personnels pénitentiaires !
Projet de circulaire Permissions de sortir & Autorisations de sortie sous escorte
L'ordre du jour du Comité technique SPIP du mercredi 28 septembre est connu. Point de sujet en lien avec les suites du
relevé de conclusions intéressant la filière Insertion et Probation, dossier qui fera l'objet d'une réunion dédiée le lundi
26 septembre entre les organisations professionnelles et la direction de l'administration pénitentiaire. Au cœur de la
réunion de l'instance consultative pour les SPIP, deux textes : un projet de note relatif au « repérage et suivi des personnes
prises en charge en milieu ouvert présentant un risque de radicalisation violente », cinquième production de la Direction
Projet « Lutte contre la Radicalisation » en quelques mois, sur laquelle nous reviendrons en temps et en heure. Et un
projet de circulaire présentant et explicitant le contenu du décret du 14 septembre 2016 relatif aux permissions de sortir
et aux autorisations de sortie sous escorte, publié ce jour au journal officiel1.
Ce projet vient de faire l'objet d'une réunion de travail entre le SNEPAP-FSU et la Sous-Direction des Missions (SDMi), au
cours de laquelle nous avons attiré l'attention de nos interlocuteurs sur plusieurs points, points que nous portons à la
connaissance des personnels sans attendre le CT SPIP, l'un d'entre eux nous semblant particulièrement problématique :
le recours aux personnels des SPIP pour la réalisation d'escorte.
PERMISSIONS DE SORTIR
Le maintien des liens familiaux, la réinsertion professionnelle et sociale
Le projet de décret ne porte pas atteinte à l'équilibre actuel ; il apporte même une réponse de droit à des besoins ou à
des pratiques existantes. Il en est ainsi avec l'intégration, dans les motivations de la permission de sortir pour réinsertion
professionnelle, des rendez-vous avec les structures de formation professionnelle, de stage ou d'enseignement. Avec
l'adjonction, dans les hypothèses de l'article D 143 du code de procédure pénale actuel, de la prochaine admission possible
au bénéfice d'un placement sous surveillance électronique2. La naissance d'un enfant s'ajoute aux hypothèses de maladie
grave ou de décès d'un proche dans l'expression de l'événement familial exceptionnel.
L'obligation exigeant la présence
C'est l'une des motivations cibles du projet de décret. Outre le maintien des liens familiaux, la réinsertion professionnelle
et sociale, la permission de sortir peut être octroyée pour accomplir une obligation exigeant la présence de la personne
détenue. Obligation de présence qui n'est pas encadrée par les textes. Ce serait désormais chose faite : sortie d'une
journée maximum ; et outre le respect des conditions de délais (peine ou quantum de peine inférieur à 5 ans ; mi peine
dans l'autre hypothèse), la personne détenue ne doit pas être en mesure d'accomplir son obligation depuis l'établissement
(elle ne peut être représentée par un tiers, et l'organisme ne peut pas intervenir en détention; lorsqu'elle est convoquée
devant une juridiction, il ne peut être juridiquement ou matériellement fait recours à la visioconférence). La personne
condamnée devra justifier du fait qu'elle se trouve dans les conditions susmentionnées, le SPIP devant quant à lui
« chercher à établir des éléments objectifs ». Le SNEPAP-FSU a souligné le flou qui entoure cette définition.
La circulaire se refuse à établir une liste exhaustive des obligations exigeant la présence de la personne concernée. Mais
elle n'hésite pas à donner des exemples, ce qui peut devenir problématique : procédures de délivrance ou de
renouvellement de titres de séjour ou encore les demandes d’asile effectuées auprès de l’OFPRA sont bien des démarches
avec obligation de présence (restera malgré tout à établir et justifier que l'organisme ne peut pas se déplacer sur
l'établissement). « A l’inverse, les démarches tendant à déclarer un décès, à se marier ou se pacser, à la délivrance d’un
certificat de nationalité française, à l’obtention ou au renouvellement d’une carte nationale d’identité ou encore à
1La volonté de modifier les textes remonte à l’automne 2015 et à un fait divers à l’occasion duquel un fonctionnaire de police avait été victime
d’une personne détenue en état d’évasion après qu’il n’ait pas réintégré son établissement à l’issue de sa permission de sortir.
2« Présentation à leurs employeurs éventuels des détenus prochainement libérables ou susceptibles d'être admis au bénéfice de la libération
conditionnelle ou de la libération sous contrainte ou au régime de semi-liberté ou de placement à l'extérieur (...) ».
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accomplir la journée de défense et citoyenneté peuvent être réalisées depuis ou au sein de l’établissement pénitentiaire ».
En écrivant noir sur blanc que ces motivations relèvent de l'article D 145 (obligation de présence), nous pouvons penser
qu'elles ne pourront plus jamais être envisagées dans le cadre des permissions de sortir « réinsertion
sociale/professionnelle ». Ce que nous, professionnels de la probation, pouvons considérer comme relevant d'un élément
utilisable dans le cadre de la construction d'un processus de réinsertion (recherche d'autonomie etc.), n'est ici, clairement,
et définitivement considéré que comme une simple démarche administrative.
LES AUTORISATIONS DE SORTIE SOUS ESCORTE
« Lorsque l’administration pénitentiaire est compétente, l’autorisation de sortie sous escorte peut être assurée
par tout personnel pénitentiaire (personnels du SPIP, personnels pénitentiaires de l’établissement, agents d’un
PREJ), de tous corps et de tous grades ».
C'est, pour le SNEPAP-FSU le point explosif de ce projet de circulaire : considérer qu'une escorte puisse être assurée par
tout personnel pénitentiaire, c'est non ! Au sein des établissements pénitentiaires, ce n'est ni le rôle des personnels
administratifs, ni celui des psychologues, mais bien celui des personnels de surveillance. Dans les SPIP, car disons-le ce
sont les SPIP qui sont visés, nous irons plus loin et ajouterons à cette liste les CPIP, les DPIP, les ASS, mais également les
personnels de surveillance en SPIP. « Tous corps, tous grades » : les élèves, les stagiaires, les titulaires…
Certes, dans la pratique, il peut arriver que le SPIP indique, à l'appui d'un projet de PS, qu'un PIP accompagnera la personne
détenue durant la permission de sortir. Le Ministère de la Justice a souhaité donner une solide base légale à cette
pratique...en tordant le principe sous-jacent de l'accompagnement, et en oubliant que les conditions pour l'obtention
d'une permission de sortir ne sont pas les mêmes que pour l'autorisation de sortie sous escorte (délais ; durée ; tout
prévenu et tout condamné quelle que soit la durée de la peine). DAP et DACG ont ainsi radicalement tranché en déterrant
une vieille jurisprudence de la Cour de Cassation de près de 30 ans, période où les SPIP n'existaient même pas3, en gravant
dans le marbre la possibilité pour tout personnel pénitentiaire, et notamment ceux du SPIP de former une escorte.
L'administration met en avant la définition originelle de l'escorte, et se défend de toute approche sécuritaire. Mais qui
doute du fait que l'autorisation de sortie sous escorte ne soit pas, dans l'esprit de tous les acteurs, utilisée pour prévenir
un risque (évasion, trouble à l'ordre public etc). C'est évidemment l'objectif de surveillance physique et de garde qui
prend le pas sur toute autre considération, même de réinsertion. Dans un contexte où les juges de l'application des peines
ont serré le frein à main sur les permissions de sortir et les aménagements de peine, en chute vertigineuse, nul doute que
les personnels des SPIP (dont chacun notera qu'ils sont placés en bonne position dans le projet de circulaire, devant les
personnels de l'établissement et ceux des PREJ), seront rapidement, et massivement sollicités. Dans un contexte de
ressources humaines carencées, où l'actualité pointe quasi hebdomadairement les difficultés RH des PREJ ou des
établissements pénitentiaires pour répondre à leurs missions respectives d'extraction, il sera facile d'aller chercher les
personnels du SPIP, ou d'autres dans les établissements pénitentiaires...
Pourquoi facile ? Parce que la composition de l'escorte est décidée.... par le chef d'établissement. Hallucinante
possibilité donnée à un directeur d'établissement d'interférer dans l'organisation et d’aspirer les ressources humaines
d'un service qui ne relève pas de lui. Après La confusion engendrée par l’introduction du renseignement pénitentiaire
dans les SPIP, le délire continue.
L'administration est curieusement apparue surprise de nos remarques sur les A.S.S.E., remarques qui ne lui étaient
jusque-là pas remontées. Elle indique comprendre notre inquiétude et réfléchit à davantage encadrer cette disposition.
Pour le SNEPAP-FSU, ce serait le minimum et c'est bel et bien une définition claire et cohérente des personnels habilités
à procéder aux escortes que nous attendons : une définition qui ne conduise pas à une RGPP sauce pénitentiaire où
chacun pourrait exercer les missions des autres, une définition qui ne conduise pas à un échec supplémentaire des
mesures d'individualisation à travers des ASSE qui se substitueraient à des PS... Le SNEPAP-FSU s'oppose formellement
à ce projet, et alerte les personnels pénitentiaires, et ceux des SPIP en particulier, des conséquences d'un texte qui
n'entoure le recours à « leurs services » d'aucune garantie.
Paris le 16 septembre 2016
3Où les CPAL étaient rattachés aux JAP, et les services socio-éducatifs aux chefs d'établissement..
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