Les cancers du pancreas - ATC : Association Tunisienne de Chirurgie
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Les cancers du pancreas - ATC : Association Tunisienne de Chirurgie
Les cancers du pancreas PLAN 1) 2) 3) 4) 5) 6) 7) 8) Introduction…………………………………………………………………………..3 Anatomie chirurgicale du pancreas…………………………………………………..6 Biologie moleculaire des cancers du pancreas………………………………………24 Aspects anatomopathologiques du cancer du pancreas……………………………...28 Epidemiologie du cancer du pancreas exocrine……………………………………..35 Diagnostic clinique et biologique des cancers du pancréas………………………… 41 Imagerie des tumeurs du pancreas…………………………………………………...47 Le bilan d'extension de l'adenocarcinome pancreatique : quels examens demander et dans quel ordre ?..........................................................................................................71 9) Les techniques de la duodenopancreatectomie cephalique…………………………. 84 10) Les splenopancreatectomies gauches………………………………………………...92 11) Duodenopancreatectomie totale (dpt)……………………………………………….101 12) Place de la lymphadenectomie dans le cancer de la tete du pancreas……………….110 13) L’envahissement vasculaire dans le cancer pancreatique : diagnostic et interet de la resection vasculaire………………………………………………………………….115 14) Le traitement chirurgical palliatif……………………………………………………125 15) Le traitement palliatif non chirurgical des cancers du pancreas…………………….132 16) Place de la chimiotherapie et de la radiotherapie dans le traitement du cancer du pancreas……………………………………………………………………………...139 17) Les indications therapeutiques pour les adenocarcinomes pancreatiques…………...150 18) Facteurs pronostiques et survie des cancers pancreatiques………………………….152 19) Les tumeurs kystiques du pancreas (tkp)……………………………………………160 20) Les tumeurs endocrines du pancreas (tep)…………………………………………..178 21) Les cystadenocarcinomes pancreatiques…………………………………………….194 22) Les tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses du pancreas (tipmp)………...204 2 INTRODUCTION Mohamed Tahar KHALFALLAH Le bureau de l’association tunisienne de chirurgie a choisi cette année le thème des cancers du pancréas. Cette maladie connue par sa gravité et la difficulté de sa prise en charge a toujours constitué pour notre communauté un challenge. Elle s’impose comme un sujet d’actualité du fait des récents développements dans la connaissance des mécanismes aboutissant à la carcinogenèse, des outils diagnostiques de plus en plus performants, et des modalités thérapeutiques chirurgicales et non chirurgicales nouvelles. Malgré les progrès timides en terme de survie dans le traitement de cette maladie, ces nouvelles modalités sont en train d’ouvrir la voie, nous en sommes convaincus, vers des progrès plus consistants. Afin de donner des éléments de réflexion sur ce sujet, nous avons comme à l’accoutumée constitué une série multicentrique tunisienne. Vu les progrès importants réalisés dans le diagnostic de cette pathologie, nous avons volontairement limité la période concernée par l’étude à cinq ans, débutant en Janvier 1999 et se terminant en Décembre 2003. Ceci visait une plus grande homogénéité dans les modalités d’exploration et de traitement de nos patients. Nous avons sollicité tous les services de chirurgie générale des centres hospitalo universitaires de notre pays, le service de chirurgie de l’institut Salah Azaiez à Tunis, un certain nombre de services de chirurgie des hôpitaux régionaux, et certains collègues exerçant dans la libre pratique. Nous avons demandé à nos collègues d’inclure toutes les tumeurs malignes du pancréas prises en charge par eux quelles que soient la nature histologique de la tumeur et les modalités thérapeutiques appliquées. Nous voudrions remercier tous les collègues nous ayant confié leurs observations. Je cite : Bahi S (Libre pratique), Balti M. H. (Hôpital des FSI- La marsa), Bel Hadj Hamida R. (Hôpital Sahloul. Sousse), Ben Alaya M. A. (Hôpital Militaire- Tunis), Ben Safta Z. (Hôpital de la Rabta. Tunis), Beyouti I (Hôpital H Bourguiba- Sfax), Chokki A. (Hôpital régional de Siliana), Fodha M. (Hôpital T Sfar – Mahdia), Hamdi A. (H. Fattouma Bourguiba – Monastir), Khila M. (Hôpital Farhat Hached – Sousse), Letaief A.(Hôpital Habib Thameur – Tunis), Majdoub S. ( Hôpital de Menzel Bourguiba), Miladi M. (Hôpital régional de Jendouba), Najah N. (Hôpital Charles Nicolle- Tunis), Rahal Kh.(Institut Salah Azaiez Tunis), Sassi S. (Hôpital M T Maamouri – Nabeul), Sebai F. (Hôpital de la Rabta. Tunis), Zaouche A. (Hôpital Charles Nicolle- Tunis) de même que le service de chirurgie de l’hôpital Mongi Slim La marsa. Nous voudrions présenter un rapide survol des principales caractéristiques de nos malades avant d’en avoir une étude plus détaillée dans les différents chapitres de cette monographie Nous avons ainsi réuni 495 dossiers de tumeurs malignes du pancréas. Notre travail, n’ayant concerné que les chirurgiens, ne peut pas avoir la prétention d’être une série exhaustive de tous les cancers pancréatiques diagnostiqués au cours de la même période. Par ailleurs, chez 75,5% de nos malades, la nature histologique de ces tumeurs n’avait pas été connue du fait de l’absence pièce opératoire ou de biopsie. Ces malades ont été considérés dans le groupe des adénocarcinomes pancréatiques par argument de fréquence. Les cas de cystadénocarcinomes, de tumeurs neuro endocrines, et de lymphomes, ont été écartés du reste des tumeurs du fait de leur profil anatomo clinique particulier. Le tableau 1 résume les données anatomo pathologiques de notre série. 3 Adénocarcinome ductulaire Adénocarcinome mucineux Nombre 75 26 % 15,2 5,3 Carcinome adénosquameux Cystadénocarcinomes 2 5 ,4 1 Tumeurs neuro endocrines 8 1 ,6 Adénocarcinome + Tum. N Endocrine 2 ,4 2 375 495 ,4 75 ,5 100 Lymphomes Non connu Total Tableau 1 : Variétés histologiques des tumeurs de la série Les localisations tumorales sont présentées dans le tableau 2. Localisation Nombre % Céphalique 382 79,6 Corporéale 19 4 caudale 22 4,6 Corporéo caudale 28 5,8 Corporéo céphalique 20 4,2 Toto pancréatique 3 ,6 Petit pancréas 2 4 Total 480 100 Tableau 2 : Localisation tumorale sur le pancréas Deux cent malades (41,7%) avaient une ou plusieurs localisations métastatiques au moment du diagnostic. La répartition des métastases est présentée dans le tableau 4. Localisation métastatique Nombre % Ganglion de Troisier 8 1,6 Métastases hépatiques 136 28,3 Métastases pulmonaires 20 4,2 Carcinose péritonéale 87 18,1 Tableau 3 : Localisations métastatiques associées aux carcinomes pancréatiques La répartition selon le score ASA de nos patients est présentée dans le tableau 4. Score ASA Total Nombre % 1 241 50,2 2 160 33,3 3 48 10 4 7 1,5 Non précisé 24 5 480 100 Tableau 4 : Score ASA des malades 4 La stratégie Thérapeutique adoptée vis-à-vis de nos malades est présentée dans le tableau 5: Modalité Abstention thérapeutique Palliation non chirurgicale Laparotomie exploratrice Palliation chirurgicale Exérèse Total Nombre 111 21 44 251 51 478 % 23,2 4,4 9,2 51,5 10,7 100 Tableau 5 : Modalités Thérapeutiques appliquées à nos patients La majeure partie de nos patients n’a donc pas pu bénéficier d’une exérèse chirurgicale du fait de l’extension trop importante des lésions. Dans cette monographie nous nous proposons d’étudier les principales facettes épidémiologique, biologique, diagnostique, et thérapeutique de cette maladie. En seconde partie de ce document, nous présentons les tumeurs pancréatiques rares. 5 ANATOMIE CHIRURGICALE DU PANCREAS Zouaoui T, Ben Othmene M, Hmida A, Bouchiba N, Chebbi F, Mighri M.M, Touinsi H, Sassi S. Service de Chirurgie Générale – Hôpital de Nabeul I- Introduction : La situation profonde du pancréas et ses rapports dans la cavité abdominale découlent de son organogénèse. Sa description anatomique est difficile et certaines de ses particularités suscitent un intérêt certain. Pour étudier l’anatomie chirurgicale du pancréas il est impératif de répondre à quatre questions : 1. Quelles sont les phases essentielles de l’organogénèse du pancréas ? 2. Quelle est la fréquence des variations artérielles coelio-mésentériques et quelle est leur incidence sur les résections pancréatiques ? 3. Comment se fait le drainage lymphatique du pancréas ? 4. Quelle est la réalité de la lame retroportale ? Les rapports, la vascularisation, le drainage lymphatique et l’innervation du pancréas nous amènent à distinguer au pancréas deux entités chirurgicalement et anatomiquement distinctes séparées par l’axe mésentéricoportal qui chemine en arrière de l’isthme pancréatique puis en avant du processus unciné: La tête et l’isthme du pancréas entretiennent des connexions intimes avec la jante duodénale et avec le conduit cholédoque. Ces trois structures constituent une unité indivisible et sont contenues dans une même loge duodéno-pancréatique, elles constituent Le bloc cholédocoduodénopancréatique. Le pancréas gauche ou la partie corporéo-caudale du pancréas dont la vascularisation est surtout tributaire des vaisseaux spléniques constitue avec la rate la deuxième entité chirurgicale. II – L’EMBRYOLOGIE DU PANCREAS ET SA DISPOSITION DEFINITIVE : a- L’embryologie du pancréas : Le développement du pancréas passe par quatre étapes essentielles : 26j apparition du pancréas dorsal : Diverticule endodermique de la face dorsale de l’anse duodénale. 30j Apparition du pancréas ventral. 35j La croissance inégale des parois duodénales conduit à une apparente rotation : fusion des deux ébauches pancréatiques le pancréas ventral se place en arrière et au-dessous du pancréas dorsal. 42j fusion des canaux pancréatiques : Le conduit du pancréas ventral a un abouchement commun avec le cholédoque dans l’ampoule hépato-pancréatique et constitue la portion céphalique du canal pancréatique principal. Les deux anomalies les plus fréquentes au cours de l’organogénèse du pancréas : Le pancréas annulaire résulte d’un défaut de rotation ou d’un pancréas ventral bilobé. Le pancréas divisum est un défaut de fusion des canaux pancréatique. Le canal pancréatique principal se termine dans la papille mineure. 6 Fig 1:Le développement du pancréas(1) Fig 2 Le pancréas annulaire(1) Fig 3 :rotation et accolement du duodénopancréas(2) 7 b- La disposition définitive du pancréas : Le cholédoque, la tête du pancréas et le cadre duodénal forment une loge entourée de péritoine viscéral. La rotation de l’anse duodénale primitive a entraîné un accolement de l’anse duodénale au péritoine pariétal postérieur à droite de l’axe mésentérico-portal. Le méso-embryonnaire dorsal a disparu cédant la place au fascia retroduodénopancréatique, espace avasculaire fait de tissu conjonctif(2). Fig4 : Coupe transversale de l’abdomen niveau L2(3) 8 Un défaut d’accolement sous la forme de bloc cholédocoduodénopancréatique mobile relié au péritoine pariétal postérieur par un long mésoduodénum postérieur est une variété rare dont deux cas rapportés par Androulakis(4). Fig 5 :Le décollement duodénopancréatique. Le corps et la queue du pancréas développés dans le mésoduodénum postérieur s’accolent après la rotation embryonnaire de l’anse intestinale au péritoine pariétal postérieur à gauche de l’axe mésentérico-portal formant le fascia de Toldt retropancréatique qui se prolonge à gauche par l’accolement de la rate devant le rein gauche(2). 9 Fig 6 : coupe transversale de l’abdomen niveau T12 L1 (3) L’accolement secondaire de la racine du mésocôlon transverse se fait sur la face antérieure du deuxième duodénum, de la tête et de l’isthme pancréatique à l’union des 2/3 supérieurs sus mésocoliques et du 1/3 inférieur sous mésocolique(5). La racine du mésocôlon transverse longe ensuite le bord inférieur du corps et de la queue du pancréas. 10 Fig 7: les rapports péritonéaux du pancréas(6) La racine du mésentère commence à droite de l’angle duodéno-jéjunal, longe d’abord le bord droit de la quatrième portion duodénale, puis croise obliquement le processus unciné et la troisième portion du duodénum(5). Le décollement colo-épiploïque puis mésocolique et l’abaissement de l’angle colique droit permettent d’exposer la face antérieure du bloc duodénopancréatique(7). le décollement duodénopancréatique poussé jusqu’à l’origine de l’artère mésentérique supérieure et la bascule du bloc céphalique autour de cette charnière artérielle, expose la face postérieure du bloc cholédocoduodénopancréatique et de la lame rétroportale droite d’une part et les organes retropéritonéaux d’autre part, cette manœuvre reconstitue le mesoduodenum primitif(8). 11 Fig 8 :Les voies d’accès au pancréas(6) La vascularisation artérielle du bloc duodéno-pancréatique, variantes et anomalies : L’intestin primitif est séparé en trois parties : antérieur, moyen et postérieur. Les limites de ces trois portions de l’intestin sont fixées par les territoires des trois artères qui se distribuent à la partie abdominale du tube digestif : le tronc coeliaque, l’artère mésentérique supérieure et l’artère mésentérique inférieure. L’anse duodénale se trouve dans une zone intermédiaire entre les intestins antérieur et moyen ce qui explique la dualité de sa vascularisation artérielle. Les artères de la portion abdominale du tube digestif prennent naissance à partir des artères segmentaires primitives ventrales (ASPV), branches de l’aorte dorsale primitive. Les 10ème, 11ème et 12ème ASPV se réunissent par une anastomose longitudinale, leurs racines disparaissent et forment ainsi le tronc cœliaque. La 13ème ASPV donnera l’artère mésentérique supérieure. Les variations qui peuvent survenir résultent de la persistance de racines des 11ème ou 12ème ASPV, de l’extension de l’anastomose longitudinale à l’artère mésentérique supérieure ou de l’absence d’un des segments de cette anastomose longitudinale(6). 12 Fig 9:développement du tronc coeliaque et de l’artère mésentérique supérieure. La vascularisation du duodénopancréas est assurée par un réseau vasculaire fait d’arcades pancréatiques provenant des branches du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure. Ce réseau anastomotique artériel constitue une voie de suppléance en cas d’obstruction (athérome) ou de compression (ligament arqué) du tronc cœliaque ou de l’artère mésentérique supérieure. Cette voie de suppléance risque d’être sacrifiée au cours de la duodénopancréatectomie céphalique(9). Ces deux artères peuvent avoir une origine commune on parle alors de tronc coeliacomésentérique. 13 Fig 10 : La vascularisation artérielle du pancréas(3) 14 a/ L’artère gastroduodénale : Elle prend naissance à partir de l’artère hépatique commune dans 75% des cas, elle peut provenir de l’artère hépatique gauche dans 11% des cas, de l’artère hépatique droite dans 8% des cas ou de l’artère mésentérique supérieure dans 2% à 2,5% des cas( replaced common hepatic artery)(9). L’artère gastroduodénale fournit les artères duodénopancréatiques droites. b/ L’artère mésentérique supérieure : L’artère mésentérique supérieure constitue l’axe de rotation du mésentère durant la vie embryonnaire. Elle prend naissance à la face ventrale de l’aorte abdominale à 1 cm au dessous du tronc coeliaque, elle chemine derrière l’isthme pancréatique puis croise la face ventrale de processus unciné. Les artères pancréaticoduodénales gauches sont des branches collatérales de l’artère mésentérique supérieure, elles peuvent naître séparément ou à partir d’un tronc unique. Fig 11 : Variantes de l’artère hépatique droite(10). c/ L’artère pancréatique dorsale : Vascularise la partie corporéocaudale du pancréas, et peut donner des branches artérielles qui s’anastomosent avec les arcades duodéno-pancréatiques.. Elle prend naissance à partir de l’artère splénique dans 39% des cas dans les 61% des cas restants elle peut naître de l’artère hépatique droite(12%), de l’artère mésentérique(14%) ou du tronc coeliaque (22%) (9). 15 d/ L’artère hépatique droite : G AMS B AHD Fig 12 :Artère pancréatique droite naissant de l’artère mésentérique supérieure Elle naît de l’artère hépatique commune(75%),de l’artère mésentérique supérieure(18%), de l’artère gastroduodénale(6%), de l’artère gastrique droite(1%)( 10) L’existence d’une artère hépatique droite naissant de l’artère mésentérique supérieure est l’anomalie la plus fréquente du pédicule hépatique rencontrée dans 14 à 41% des cas(9). Cette artère, quand elle existe, participe peu à la vascularisation du duodéno-pancréas mais elle peut amener à des difficultés techniques lors de la duodénopancréatectomie céphalique. Les conséquences de sa section accidentelle sont graves surtout s’il s’agit d’une artère hépatique commune naissant de l’artère mésentérique supérieure anomalie rencontrée chez 2 à 2,5% de la population générale(11). L’artère hépatique droite chemine le plus fréquemment à droite et en arrière de la veine porte derrière la tête du pancréas, elle pénètre ensuite dans le ligament hépato-duodénal à droite et en arrière de la voie biliaire principale. De façon exceptionnelle, l’artère hépatique droite peut se creuser un tunnel dans le parenchyme pancréatique avant d’entrer dans le pédicule hépatique ce qui rend son repérage encore plus difficile lors de la dissection. Sa situation dans le ligament hépatoduodénal est également sujette à une grande variabilité ; elle peut cheminer en arrière de la veine porte ou en avant de la veine porte et à gauche de la voie biliaire principale(11,12). Le meilleur moyen de la préserver est de la rechercher systématiquement, de la repérer et d’identifier son origine au niveau de l’artère mésentérique supérieure pour pouvoir la suivre sur tout son trajet. III - Le drainage lymphatique du pancréas : Le pancréas est un véritable carrefour des voies lymphatiques abdominales. a/ Les voies de drainage lymphatique : On identifie au bloc duodéno-pancréatique trois principales voies de drainage lymphatique. 16 La voie supérieure appartient à la chaîne hépatique, les voies moyenne et inférieure rejoignent le groupe ganglionnaire mésentérique supérieur. Toutes ces voies de drainage convergent vers les nœuds lymphatiques situés à droite de l’origine du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure. Le pancréas gauche est drainé par deux voies lymphatiques distinctes, la première longe les vaisseaux spléniques et la deuxième l’artère pancréatique inférieure. Ces deux voies de drainage lymphatique rejoignent un lymphonoeud situé à gauche de l’origine des branches coelio-mésentériques. L’ensemble de ces relais rejoint les lymphonoeuds inter aorticoveineux au dessus et au dessous de l’abouchement de la veine rénale gauche(13). Fig 13 :Le drainage lymphatique du pancréas(14) 17 b/ Les relais ganglionnaires (japanese pancreas society nodal stations): Tableau 1 : Les relais ganglionnaires selon la japanese pancréas society(15) 18 Fig 14 :Les relais lymphatiques du pancréas(16) IV - Les lames pancréatiques retroportales : La distinction pancréas gauche et bloc cholédocoduodénopancréatique se retrouve dans le drainage lymphatique et dans l’innervation du pancréas. 19 Fig 15 :Le hile pancréatique postérieur(2) fig 16 :Les attaches postérieures du pancréas(2) En effet le pancréas est amarré en arrière au plan pré aortique par un feutrage vasculonerveux et lymphatique formant deux lames retropancréatiques, véritables hiles des pancréas droit et gauche. La lame retroportale gauche est mince, réduite à des filets nerveux et quelques lymphatiques. La lame retroportale droite est en arrière de l’axe mésentéricoportal, elle comprend les veines de drainage de la tête du pancréas, les branches artérielles mais aussi les lymphatiques gagnant les lymphonoeuds cœliaques et les nerfs végétatifs reliés aux ganglions droits du plexus cœliaque(2). Le pancréas céphalique comprend en fait deux parties morphologiquement et topographiquement distinctes, l’une droite superficielle et massive, en continuité en haut et à gauche avec le segment isthmique ; l’autre gauche, profonde et aplatie, séparée de l’isthme par le plan veineux mésentéricoportal. Cette partie gauche retro-vasculaire, se trouve réduite dans les descriptions classiques à son seul segment inférieur, le processus uncinatus, 20 représenté comme un crochet recourbé sous le pédicule mésentérique supérieur. En réalité il s’agit d’une lame parenchymateuse continue, étendue sur toute la hauteur de la tête pancréatique depuis le pied du pédicule hépatique jusqu’à la troisième portion du duodénum(7,8,17,18). Cette portion parenchymateuse se continue toujours en arrière de l’axe mésentéricoportal et séparée de lui par un plan de clivage celluleux par une cloison verticale ininterrompue, se continuant à gauche sans aucune démarcation sous forme d’une lame conjonctive dense qui va se souder avec la gaine de l’artère mésentérique supérieure. Cette cloison verticale, au-delà de la portion parenchymateuse est donc constituée par une lame conjonctive dense réunissant l’ensemble des structures contenues dans le mésoduodénum primitif, qui à la suite de la rotation de l’intestin primitif s’est frontalisée et densifiée du fait de la compression contre la paroi abdominale postérieure. La lame retroportale droite se présente alors comme un mur étroit vertical situé dans le plan frontal, de 6 à 8 cm de long et de 3cm de large et dont l’épaisseur est de 5 mm en moyenne, elle augmente de haut en bas et de gauche à droite(7). La systématisation des canaux excréteurs autorise à juste titre l’individualisation de trois segments glandulaires : unciné, retromésentérique et retroportal mais aucun accident morphologique ne permet à première vue de les reconnaître. A H LRPD Fig17 :La lame retroportale La lame retroportale se trouve tapissée par deux feuillets(7) : Le feuillet antérieur n’est qu’une condensation de la capsule glandulaire au contact de l’axe veineux traversée par des veinules amarrant le parenchyme glandulaire au tronc veineux. Le feuillet postérieur, plus épais, se présente comme la continuité du fascia qui revêt la face postérieure de la tête du pancréas ( fascia de Treitz) et dans lequel se développent 21 les arcades vasculaires pancréatiques, une éventuelle artère hépatique droite et le groupe lymphatique retropancréatique. La section de la lame retroportale est en même temps le temps le plus difficile et la clé de la duodénopancréatectomie céphalique. Cette section doit se faire le plus à gauche possible au niveau de la gaine de l‘artère mésentérique supérieure avec une hémostase et une lymphostase élective des petits vaisseaux (8). 22 Références 1. Larsen W. J. Embryologie Humaine. De Boeck 2003 Bruxelles 2ème édition française 2. Chevalier J. M. Anatomie, Le Tronc. Médecine sciences Flammarion, 1998 Paris, 1ère édition. 3. Kamina P, Di Marino V, Abdomen appareil digestif et rein Tome 2 1998, Maloine Paris 1ère édition. 4. Androulakis J., Colborn G. L., Skandalakis L.J. Surg. Clin. North. 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ANALYSE DE LA THERAPEUTIQUES CANCEROGENESE PANCREATIQUE. ESSAIS Le développement d’un cancer du pancréas est le résultat d’une série de perturbations où le rôle des oncogènes tient une place prépondérante. Bien que plusieurs points de cette oncogenèse ont été identifiés, le mécanisme complet demeure obscure. Le K-ras est probablement l’oncogène le plus connu et le mieux étudié, une mutation est retrouvée dans 70 à 100 % des adénocarcinomes pancréatiques. Ce gène joue un rôle important dans la transmission des signaux de croissance à partir de récepteurs membranaires cellulaires, signaux qui vont affecter la production et la régulation des protéines nucléaires. Cette mutation du K-ras localisée au niveau du codon 12 est un événement précoce dans l’adénocarcinome du pancréas. Normalement, le signal délivré par le ras est régulé par une enzyme, une GTPase qui en clivant le GTP inactive la protéine. Lors de la mutation, cette enzyme disparaît et, le signal ras n’est plus arrêté. En fait, l’action enzymatique se déroule en plusieurs étapes dont la première est une farnesylation par une Farensyl transférase, cette étape peut être activée via d’autres récepteurs cellulaires tels que une geranyl géranulation. En effet, une approche thérapeutique par inhibition de la farensyl transférase a été entreprise en utilisant diverses molécules telles que Ionafarnib (SCH66336) ou le Tipifarnib (R1155777) ou le BMS-214662. Toutefois les résultats sont décevants. L’explication est probablement en rapport avec une activation du ras par d’autres voies sans passer par la farensylation. D’autres proto oncogène ont été étudiés, notamment la famille des ErB récepteurs qui ont une activité tyrosine kinase. Il s’agit de quatre structures : le EGFR ou Epidermal Growth Factor receptor ou ErB-1, le ErB-2, le Erb-3 et le ErB 4. Le ErB-1 et le ErB-2 sont les plus étudiés. Dans le cancer du pancréas, le ErB-1 est à la base de transformation en TGF ou Growth Factor Alpha, qui est associé avec un phénotype de tumeur plus agressive synonyme d’un pronostic plus mauvais. 24 Certaines molécules tel le Cetuximab qui est un anticorps monoclonal inhibant l’activation des récepteurs et donc le processus enzymatique de la tyrosine kinase par voie extra cellulaire ainsi que des molécules plus petites et plus spécifiques inhibant en intra cytoplasmique la tyrosine kinase ont été étudiées avec des résultats encourageants. Parfois, notamment en association avec une chimiothérapie à base de Gemcitabine, des essais de phase III sont en cours pour le Cetuximab. Concernant le ErB-2, le trastuzumab ou herceptine a été évalué mais les résultats sont décevants. En effet, une très faible proportion de cancer du pancréas surexprime le ErB-2 (Her-2/neu). La mutation du p53 est très documentée car très fréquente dans le cancer du pancréas, elle est, en effet, retrouvée dans 50 à 70 % des cas. Ce gène situé sur le bras court du chromosome 17 est considéré comme le contrôleur principal de certains mécanismes de la suppression tumorale. Il supporte certaines séquences ADN et permet la production d’ARN par les gènes voisins selon un procédé d’activation transcriptionnelle. La protéine qui en résulte arrête la croissance cellulaire en réponse à une délétion de l’ADN permettant ainsi, soit la réparation de l’ADN, soit l’apoptose ou mort cellulaire programmée. Toute mutation du p53 fait perdre cette capacité suppressive de la tumeur. Des voies de recherches, de réparation des mutations du p53, pourraient ouvrir la voie à une approche thérapeutique différente de beaucoup de tumeurs. La mutation du p53 représente l’une des premières étapes, en effet, les étapes de la cancérogénèse rapportées nécessite au moins 6 altérations : 1) l’échappement à l’apoptose, 2) l’altération des signaux de croissance ou growth factors, 3) l’altération de la réponse ou l’échappement aux signaux de croissance, 4) l’étape de l’angiogénèse, 5) l’absence de limites de la réplication, et enfin 6) l’invasion tissulaire et les métastases. L’étape de l’angiogénèse est une étape fondamentale dans la cancérogénèse notamment celle du cancer du pancréas. L’angiogénèse est un phénomène complexe dont l’hypoxie et l’acidose sont les deux stimuli physiologiques. L’hypoxie du cancer du pancréas a été démontrée. Le VEGF, ou vascular endothelial growth factor, est le facteur le plus important de l’angiogénèse, au moins 6 autres facteurs ont été mis en évidence, d’autres protéines jouent un rôle régulateur tel que l’angiotensine, l’endostatine et le MMPs. Actuellement, plusieurs essais de phase II menés semblent mettre en évidence un bénéfice de l’adjonction de facteurs anti-angiogéniques, tel que : le Bevacizumab (anticorps monoclonal), à une chimiothérapie par Gemcitabine ou Oxaliplatine pour des patients métastatiques. Par ailleurs, plusieurs essais, menés sur des souris, permettent de mettre en évidence une action bénéfique de substances anti-angiogéniques sur des tumeurs pancréatiques. ANOMALIES CHROMOSOMIQUES L’analyse du caryotype des adénocarcinomes pancréatiques permet non seulement de détecter la localisation spécifique des gènes mais aussi de supposés des mécanismes qui altèrent la fonction de ces gènes. L’analyse des délétions chromosomiques par typage allèlique a permis de détecter des anomalies au niveau de 1p, 9p, 17 et 18q. cette atteinte du bras long du chromosome 18 est, en effet, le support d’une inactivation d’un nouveau gène suppresseur de tumeur, le DPC4, dont la fréquence est retrouvée dans près de 50 % des adénocarcinomes pancréatiques. 25 Concernant le bras court du chromosome 9, cette altération est responsable d’une inactivation du gène p16, qui est aussi un gène suppresseur de tumeur. Ce gène, par une action complexe médiée par diverses protéines, est responsable d’une transition des cellules de la phase G1 à la phase S et donc il est responsable d’une progression cellulaire importante. Le tableau 1 résume les principales altérations dans le cancer du pancréas. Gènes Chromosomes Mécanisme d’action Fréquence % Suppresseur de tumeur Oncogènes P16 9p LOH + IM 40 Deletion homozygote 40 Hypermethylation 15 P53 17p LOH + IM 50-75 DPC4 18q LOH + IM 30 Deletion homozygote 20 BRCA2 13q Mutation 4-7 K-ras - Mutations codon 12-13 80-100 LOH : Loss of heterozygoty, IM: Intragenic mutation Tableau 1 : Altérations gêniques et leur action dans la carcinogenèse du cancer du pancréas D’autres anomalies, aussi bien en terme de gain de matériel génétique que de perte d’allèles sont décrites. Les plus fréquentes sont la perte du bras court des chromosomes 1, 3, 6 et 8. L’aneuploïdie est un facteur pronostique important, en effet, 60 à 80 % des tumeurs sont aneuploïdes ce qui explique leur caractère agressif. Actuellement, la détection de certaines mutations peut se faire par immuno histochimie ou par l’utilisation d’anticorps monoclonaux. Les différentes anomalies chromosomiques ouvrent la voie à une thérapie génique qui est elle même médiée par un support immunologique. A travers ce chapitre, on a essayé de dresser un profil des connaissances actuelles en matières d’oncogénèse concernant l’adénocarcinome du pancréas. Certes des zones d’ombres persistent et la compréhension du mécanisme en entier permettra vraisemblablement une approche diagnostique et thérapeutique plus intelligente. 26 Références : 1. Jafari M, Abbruzzese JL. Pancreatic cancer : future outlook, promising trials, newer systemic agents, and strategies from the Gastrointestinal Intergroup Pancreatic Cancer Task Force. Surg Oncol Clin N Am 2004; 13: 751-760. 2. Tseng JF, Mulligan RC. Gene therapy for pancreatic cancer. Surg Oncol Clin N Am 2002; 11 :537-569. 3. Sunamura M, Lefter LP, Duda DG, Morita R, Inoue H, Yokoyama T, Yatsuoka T, Abe T, Egawa S, Furukawa T, Fukushige S, Oshimura M, Horii A, Matsumo S. The role of chromosome 18 abnormalities in the progression of pancreatic adenocarcinoma. Pancreas 2004; 28: 311-316. 4. Onizuka S, Kawakami S, Taniguchi K, Fujioka H, Miyashita K. Pancreatic carcinogenis. Apoptis and angiogenis. Pancreas 2004; 28: 317-319. 5. Kawakami Y, Okada T, Akada M. Developpement of immunotherpy for pancreatic cancer. Pancreas 2004; 28: 320-325. 6. Matsuo Y, Sawai H, Funahashi H, Takahashi H, Sakamoto M, Yamamoto M, Okada Y, Hayakawa T, Manabe T. Enhaced angiogenesis due to inflammatory cytokines from pancreatic cancer cell lines and relation to metastatic potential. Pancreas 2004; 28: 344352. 7. Furukawa T, Horii A. Molecular pathology for pancreatic cancer. In quest of tumor suppressor genes. Pancreas 2004; 28: 253-256. 8. Sawabu N, Watanabe H, Yamagushi Y, Ohtsubo K, Motoo Y. Serum tumor markers and molecular biological diagnosis in pancreatic cancer. Pancreas 2004; 28: 263-267. 9. Hruban RH, Petersen GM, Ha PK, Kern SE. Genetics of pancreatic cancer. From genes to families. Surg Oncol Clin N Am 1998; 7: 1-23.. 10. Rosty C. vers l’identification de nouveaux marqueurs du cancer du pancréas par l’analyse du transcriptome. Bull Cancer 2004 ; 91 : 593-8. 27 ASPECTS ANATOMOPATHOLOGIQUES DU CANCER DU PANCREAS N. Kchir, A. Mekni, K. Bellil, S. Bellil, S. Haouet, M. Zitouna. Laboratoire d’Anatomie Pathologique. Hôpital la RABTA. Les tumeurs malignes du pancréas sont très complexes et leur classification se base sur le type cellulaire à partir duquel se développe la tumeur. Elles se subdivisent donc en tumeurs du pancréas exocrines et tumeurs du pancréas endocrine. Les tumeurs du pancréas exocrine prédominent et se développent à partir des cellules canalaires et beaucoup plus rarement des cellules acineuses. Elles sont dominées par l’adénocarcinome canalaire qui représente à lui seul 85 à 90 % des tumeurs du pancréas. Les tumeurs du pancréas endocrine, extrêmement rares, représentent moins que 0,5 % des tumeurs pancréatiques et développent à partir des cellules souches appartenant au système APUD (Amine Precursor Uptake and Decarboxylation). Nous adopterons la dernière classification de l’OMS parue en 2000. I - Données de notre série : Dans notre série, 375 malades (75,5%) n’avaient pas de preuve histologique de leur tumeur. Il s’agit soit de malades non opérés, soit de malades opérés mais sans exérèse et sans pouvoir réaliser une quelconque biopsie. Le diagnostic de tumeur maligne du pancréas a été retenu sur la clinique, les images radiologiques, et éventuellement l’élévation des marqueurs biologiques. La répartition du type histologique des tumeurs de notre série est présentée dans le tableau 1. Adénocarcinome ductulaire Adénocarcinome mucineux Nombre 75 26 % 15,2 5,3 Carcinome adénosquameux Cystadénocarcinomes 2 5 ,4 1 Tumeurs neuro endocrines Adénocarcinome + Tum. N Endocrine 8 2 1 ,6 ,4 2 375 495 ,4 75,5 100 Lymphomes Non connu Total Tableau 1 : Variétés histologiques des tumeurs de la série 28 II - Moyens d’étude anatomopathologique : II-1- La nature des prélèvements parvenant au service d’Anatomie et de Cytologie Pathologique est variée : 1- Le prélèvement par brossage endoluminal du Wirsung est utile pour les tumeurs intracanalaires. 2- La ponction biopsie percutanée guidée sous échographie ou tomodensitométrie permet un diagnostic précoce mais comporte un risque de dissémination métastatique. 3- La ponction biopsie guidée sous échoendoscopie à l’aiguille fine ramène un matériel très petit. La sensibilité et la spécificité dépendent de l’expérience combinée de l’anatomopathologiste et de l’opérateur. 4- La pièce opératoire ( duodénopancréatectomie céphalique, pancréatectomie caudale, ou pancréatectomie totale ) permet de réaliser des prélèvements multiples de la tumeur et d’étudier ses rapports avec le duodénum et les canaux principaux. II-2- L’examen histopathologique constitue une étape importante pour le diagnostic et le pronostic. En effet, il permet de déterminer le type histologique, le degré de différenciation, l’intégrité des limites d’exérèse, l’envahissement ganglionnaire et la présence d’embols vasculaires ou d’engainements périnerveux. II-3- L’ examen histochimique utilisant des colorations complémentaires (PAS, Bleu Alcian, Grimélius …) sont utiles pour connaître la nature des cellules tumorales. Le PAS et le Bleu Alcian permettent de rechercher une mucosécrétion et la coloration de Grimélius met en évidence des granulations argyrophiles qui déterminent leur nature neuroendocrine. II-4- L’examen immunohistochimique est surtout utile pour le diagnostic des tumeurs indifférenciées et des tumeurs endocrines. II-5- Enfin les techniques de biologie moléculaire permettent de mettre en évidence des mutations génomiques comme la mutation de l’oncogène Ki-ras ou d’autres types de mutations. III - Tumeurs borderline pancréatiques (de potentiel malin incertain ou lésions précancéreuses): Certaines lésions précancéreuses pancréatiques peuvent préluder au développement des adénocarcinomes pancréatiques en passant par différents stades évolutifs de dysplasie légère, modérée et sévère. Lors de ces stades évolutifs, des modifications moléculaires, génétiques accompagnent le développement du cancer. - - Tumeur mucineuse kystique borderline ou cystadénome mucineux borderline : c’est une néoformation dont la taille varie de 2 à 35 cm avec une moyenne de 6 à 10 cm de grand axe. Elle renferme un liquide épais mucoïde. Histologiquement l’épithélium, est cylindrique mucosécrétant plus ou moins papillaire reposant sur un stroma fibreux de type ovarien. Des lésions de dysplasie modérée à sévère sont présentes. Tumeur intracanalaire papillaire et mucineuse TIMP : elle correspond à des dilatations kystiques du canal de wirsung ou des canaux secondaires qui se révèlent souvent par des poussées récidivantes de pancréatite aigue. La TIMP se présente comme une formation kystique mesurant de 1 à 8 cm de grand axe parfois multiloculaire. Elle répond histologiquement à une prolifération tumorale faite de papilles plus ou moins florides tapissées par des cellules cylindriques mucosécrétantes présentant des lésions de dysplasie de grade varié. 29 - - Néoplasie intraépithéliale pancréatique (Pan.IN): la Pan.IN non décelée par des moyens usuels d’investigation clinique ou radiologique est identifiée habituellement au voisinage d’un adénocarcinome canalaire. Elle se subdivise en trois grades. La PanIN-1 correspond aux lésions de métaplasie pylorique et d’hyperplasie mucineuse simple ou papillaire. La PanIN-2 se définit par la présence de lésions d’hyperplasie atypique et de dysplasie de bas grade. Enfin la PanIN-3 répond à la lésion de dysplasie sévère ou carcinome in-situ. Tumeur solide et pseudopapillaire : c’est une tumeur rare dont la fréquence a augmenté ces dernières années (1- 2%). Elle est habituellement volumineuse limitée par une capsule fibreuse. Sa taille varie de 3 à 8 cm de grand axe. A la coupe, elle présente des zones pleines et des zones kystiques. Histologiquement, il s’agit d’une prolifération tumorale, faite de massifs et de structures pseudo papillaires, remaniée par de larges foyers de nécrose. Les cellules tumorales sont de taille petite à moyenne et renferment un noyau régulier et un cytoplasme clair. IV- Tumeurs malignes du pancréas exocrine : Les tumeurs malignes du pancréas exocrine sont de mauvais pronostic, souvent diagnostiquées à un stade avancé de leur évolution en raison de leur symptomatologie très discrète. Elles sont dominées par l’adénocarcinome canalaire. IV - I- Tumeurs épithéliales : 1- Adénocarcinome canalaire : Il représente la variété la plus commune du cancer du pancréas. 1- 1- Macroscopie : Il siège dans 60 à 70% des cas au niveau de la tête du pancréas. Sa taille varie de 1,5 à 5 cm avec un diamètre moyen de 2,5 à 3,5 cm. Il se présente habituellement comme une néoformation ferme, mal limitée de coloration blanchâtre ou jaunâtre parfois kystique. Les remaniements nécrotiques et hémorragiques sont inhabituels. 1- 2- Histologie : 1-2-1- Adénocarcinome canalaire dans sa forme commune : La plupart des adénocarcinomes canalaires sont bien à moyennement différenciés. Ils se caractérisent par une prolifération tumorale infiltrante faite de structures glandulaires imitant plus ou moins les canaux pancréatiques et enserrées dans un abondant stroma desmoplastique. Les adénocarcinomes bien différenciés sont constitués de glandes de grande et de moyenne taille parfois séparés par des canaux résiduels non tumoraux. Des structures cribriformes et pseudopapillaires peuvent s’observer. Les cellules tumorales sont cylindriques mucosécrétantes souvent claires. Le noyau nucléolé présente peu d’atypies. Les mitoses sont rares (<5/10 champsx40).Dans les adénocarcinomes moyennement différenciés les glandes sont plus petites et les atypies plus marquées. Les mitoses sont estimées de 6-10/10 champsx40.La mucosécrétion est irrégulière. Plus rares, les adénocarcinomes peu différenciés réalisent des glandes de très petite taille mêlées à des cordons, des travées et des massifs tumoraux. Des foyers malpighiens, fusiformes ou anaplasiques peuvent s’observer mais ne doivent pas dépasser 20% de la tumeur. Des foyers hémorragiques et nécrotiques sont observés. Les atypies nucléaires sont très marquées et les mitoses nombreuses estimées à plus de 10/10 champsx40. 1-2-2- Variantes histologiques : 30 *Carcinome adénosquameux (3-4%) : Il associe deux contingents glandulaire et épidermoïde. Le contingent épidermoïde doit dépasser 30% de la tumeur. *Carcinome indifférencié ou anaplasique (2-7%): Appelé également carcinome à cellules géantes, carcinome pléomorphe à grandes cellules et carcinome sarcomatoïde. Il se compose surtout de cellules de grande taille, éosinophiles, peu cohésives et pléomorphes, rondes à fusiformes. Le stroma est fibreux peu abondant. Il se caractérise par une coexpression de la vimentine et de la cytokératine par les cellules tumorales. *Carcinome indifférencié avec cellules géantes de type ostéoclastique : Variante rare du carcinome canalaire constituée de cellules fusiformes mêlées à des cellules géantes de type ostéoclastique non tumorales. Les cellules tumorales co-expriment focalement la cytokératine et la vimentine. Par contre les cellules géantes sont positives à la vimentine, au CD68 et au CD56 attestant leur nature macrophagique. *Carcinome mucineux non Kystique (1-3%) : Appelé également carcinome colloïde ou gélatineux dans lequel plus de 50% du tissu tumoral est fait de plages de mucines partiellement tapissées de cellules tumorales cubiques et mucosécrétantes. * Carcinome à cellules indépendantes en bague à châton : Adénocarcinome extrêmement rare exclusivement constitué de cellules tumorales en bague à châton. *Carcinome mixte canalaire et endocrine : Exceptionnel, la composante endocrine doit représenter au moins le tiers de la tumeur. 1-3- Immunohistochmie : Aucun marqueur immunohistochimique ne permet de trancher formellement en faveur de la nature pancréatique de l’adénocarcinome canalaire. Cependant les cellules tumorales expriment l’AntigèneCarcinoEmbryonnaire (ACE) et les cytokératines 7, 8, 18 et 19. 1-4- Cytogénétique : Les anomalies génétiques observés dans les cancers du pancréas exocrine sont représentées en premier lieu par la mutation du codon 12 du gène Ki-ras apparaissant très tôt dans la cancérogenèse pancréatique compte tenu de sa détection dans les tumeurs borderlines. Une mutation des gènes suppresseurs de tumeurs (p53, p16/MTS-1 et DPC-4/SMAD4 ) est également décrite. Leur mutation aboutit à la perte de leur fonction inhibitrice sur la prolifération cellulaire ce qui contribue à la progression tumorale. 2-Cystadénocarcinome séreux : Tumeur épithéliale maligne plurikystique mesurant de 2,5 à 12 cm. Elle réalise des papilles tapissées de cellules riches en glycogène se projetant dans des espaces kystiques. C’est une tumeur exceptionnelle dont uniquement 8 cas ont été rapportés dans la littérature. L’évolutivité lente de la tumeur fait qu’elle répond favorablement à la résection chirurgicale même lors de stades évolués. 3-Cystadénocarcinome mucineux : Tumeur volumineuse siégeant habituellement au niveau du corps et de la queue du pancréas. Elle est macroscopiquement kystique, multiloculaire, à contenu mucineux et limitée par une pseudocapsule fibreuse d’épaisseur variable. Histologiquement, la malignité est attestée par la présence de foyers d’infiltration du stroma. En l’absence de zones résiduelles de cystadénome mucineux présentant des signes de dysplasie, il est difficile de distinguer le 31 cystadénocarcinome mucineux d’un adénocarcinome canalaire kystisé ou d’une forme maligne de TIMP. 4- Carcinome intracanalaire papillaire et mucineux invasif ou TIMP dégénérée : Le carcinome intracanalaire papillaire et mucineux invasif survenant sur une TIMP répond histologiquement au stade infiltrant. Il correspond à l’existence de cellules tumorales isolées ou groupées en amas au-delà de la membrane basale du canal. L’existence d’une stroma réaction desmoplastique aide au diagnostic. Dans les stades plus avancés la prolifération tumorale répond à un adénocarcinome mucineux. En l’absence de zones résiduelles de TIMP avec signes de dysplasie, il est difficile de le distinguer d’un cystadénocarcinome mucineux d’un adénocarcinome kystisé. 5- Carcinome à cellules acineuses : Tumeur rare représentant moins que 1% des tumeurs pancréatiques. Elle est faite histologiquement de cellules de type acineux relativement monomorphes au cytoplasme granulaire PAS positif. 6- Pancréatoblastome : Tumeur rare de l’enfant faite de cellules blastiques uniformes d’agencement variable formant parfois des rosettes. 7- Tumeur solide et pseudopapillaire maligne : Sa présentation est identique à celle décrite avec les tumeurs borderlines. Les critères de malignité sont représentés par l’engainement périnerveux, les embols vasculaires et l’infiltration par contiguïté des tissus de voisinage. 8- Autres tumeurs : le carcinome oncocytaire, le cystadénocarcinome non mucineux pauvre en glycogène, le choriocarcinome, le carcinome à cellules claires, le carcinome à cellules ciliées, le carcinome micro glandulaire et le carcinome médullaire. IV - 2- Tumeurs non épithéliales ou conjonctives malignes: Les tumeurs conjonctives malignes du pancréas sont exceptionnelles. Elles sont représentées par les leiomyosarcomes et les tumeurs stromales malignes. IV - 3-Les lymphomes : Le lymphome primitif du pancréas est très rare. Il représente moins que 0, 5% des tumeurs pancréatiques. Ils sont habituellement de phénotype B : le lymphome diffus à petites cellules, le lymphome folliculaire, le lymphome B à grandes cellules. Enfin de ponctuels cas de lymphome T primitifs pancréatiques ont été rapportés. IV - 4- Tumeurs secondaires : Les métastases pancréatiques sont l’apanage des tumeurs très évoluées et sont généralement de découverte autopsique. Elles peuvent être de nature épithéliale ou non épithéliale. Cet envahissement métastatique peut se faire par contiguïté (à partir de l’estomac, du foie, des surrénales et du rétropéritoine), par voie lymphatique ou par voie hématogène. V – Tumeurs du pancréas endocrine : Les tumeurs neuroendocrines (TNE) du pancréas sont rares (0,5%). Leur découverte dépend de l’existence ou non d’une activité sécrétoire. Elles se caractérisent par leur très lente 32 évolution. Seule la présence de métastases ganglionnaires, hépatiques ou l’envahissement des organes de voisinage permet d’affirmer la malignité. Elle peuvent être uniques ou multiples s’intégrant dans le cadre des Néoplasies Endocriniennes Multiples I ou NEM I. Macroscopiquement, les TNE du pancréas se développent préférentiellement aux dépens du corps et de la queue du pancréas et sont le plus souvent grossièrement nodulaires, non encapsulées et blanc-rosâtres à la coupe. Toutefois, lorsqu’elles sont plus anciennes elles peuvent être le siège de remaniements kystiques, fibreux, calciques voire même osseux. Histologiquement, les TNE du pancréas sont habituellement composées de petites cellules cubiques, homogènes, pourvues d’un noyau central et d’un cytoplasme finement granuleux. Sur le plan architectural, ces tumeurs sont subdivisées en quatre groupes : solide, gyriforme (festonné, rubané), glandulaire et inclassé. Le stroma de ces TNE est richement vascularisé, siège parfois de dépôts amyloïdes surtout observés dans les tumeurs sécrétant l’insuline. La réaction d’argyrophilie mise en évidence par la coloration de Grimélius permet d’affirmer le caractère neuroendocrine de la tumeur. L’immunohistochimie confirme la nature neuro-endocrine et met en évidence une éventuelle sécrétion hormonale. La nature neuroendocrine est attestée par la positivité à la ChromogranineA, à la synaptophysine et à la NSE. La sécrétion hormonale est mise évidence en utilisant des anticorps spécifiques : Ac anti (glucagon, gastrine, insuline, somatostatine, sérotonine…….). La seule anomalie génétique connue dans les TNE du pancréas sporadiques ou développées chez des sujets atteints de NEM I est la délétion de la région 11q 13. VI- Classification pTNM des tumeurs pancréatiques : p : désigne pathology ( anatomie pathologique) T- Tumeur primitive : Tx : tumeur primitive non évaluable. T0 : pas de tumeur primitive démontrée. Tis : Carcinome in situ T1 : tumeur limitée au pancréas inférieure ou égale à 2cm de grand axe. T2 : tumeur limitée au pancréas supérieure à 2 cm de grand axe. T3 : tumeur étendue directement au duodénum et/ou à la voie biliaire et/ou aux tissus péripancréatiques. T4 : tumeur étendue directement à l’estomac et/ou à la rate et/ou au côlon et ou aux gros vaisseaux adjacents. N- Ganglions lymphatiques : Nx : ganglions régionaux non évaluables. N0 : pas de métastase ganglionnaire régionale. N1 : métastase ganglionnaire régionale. N1a : un seul ganglion régional atteint ; N1b : plusieurs ganglions régionaux atteints. M- Métastase à distance : Mx : présence de métastase à distance non évaluable. M0 : pas de métastase à distance. M1 : métastase à distance. 33 VII- Références : 1- Hamilton S.R., Aaltonen L.A. (Eds.) : World Health Organisation Classification of tumours. Pathology and Genetics of tumours of the digestive System. IRAC Press: Lyon 2000. 2- Torrisani J, Buscail L. Mécanismes moléculaires de la cancérogenèse pancréatique. Ann Pathol 2002 ; 22 : 349-55. 3- Bedossa P. Lésions néoplasiques intraépithéliales des canaux pancréatiques : nouvelles entités. Ann Pathol 2002 ; 22 : 357-66. 4- Fléjou JF, Scoazec JY. Pathologie du pancréas. Ann Pathol 2002 ; 22 : 347-8. 34 EPIDEMIOLOGIE DU CANCER DU PANCREAS EXOCRINE Dhiab T, Bouzaiene H, Bouzid T, Ben Hassouna J, Khomsi F, Dhouib R, Benna F, Boussen H, Gamoudi A, Héchiche M, Rahal K. Institut Salah Azaiez Avec un rapport Mortalité/Incidence de 0,99 aux Etats-Unis, le cancer du pancréas représente un challenge important, en effet l’incidence semble s’accroître. La mortalité, malgré l’amélioration de la prise en charge thérapeutique notamment les progrès de la réanimation et les traitements adjuvants, demeure élevée. De ce fait les études épidémiologiques tentent de réduire cette mortalité par une prévention primaire des principaux facteurs de risques et peut être un « dépistage » en essayant d’identifier des groupes à haut risque. I. Résultats de la série ATC : Sur les 381 malades présentant un adénocarcinome dans notre série, l’âge moyen était de 64,5 ans (extrêmes de 28 à 96 ans) (Fig 1). Il y avait 301 hommes et 180 femmes (sex ratio = 1,7). Fig 1 : Histogramme des ages 100 80 60 Fréquence 40 20 0 30,0 40,0 35,0 50,0 45,0 60,0 55,0 70,0 65,0 80,0 75,0 90,0 85,0 95,0 Age 140 120 100 80 F 60 H 40 20 0 20 30 40 50 60 70 80 90 35 II. Epidémiologie descriptive : A. INCIDENCE : L’incidence du cancer du pancréas exocrine est variable mais en augmentation dans beaucoup de pays. En Tunisie (le registre des cancers du nord 1994), ce cancer représente le cinquième cancer digestif avec une incidence de 1,8/100000 chez la femme et 2,2/100000 chez l’homme. En France le cancer du pancréas représente le quatrième cancer digestif après celui du colonrectum, de l’estomac et de l’œsophage. En 2000, 4887 nouveaux cas ont été diagnostiqués. Il représente la 6ème cause de décès par cancer tous stades confondus. Aux Etats Unis, il représente la 4ème cause de décès par un cancer, ce qui dénote d’un pronostic péjoratif, le nombre de nouveaux cas est estimé à 30000 chaque année. Les différents études épidémiologiques insistent sur les fortes disparités d’incidence en effet celle-ci est 5 à 7 fois plus importante dans les pays à « haut risque » que ceux à « bas risque ». B. AGE : L’incidence du cancer du pancréas augmente de façon linéaire avec l’âge. Dans la série de L’ATC 2005, l’âge moyen au moment du diagnostic est de 65 ans (28-96 ans) (fig 1). Dans le registre du cancer du nord de la Tunisie pour l’année 94, 72,5% des cancers sont diagnostiqué entre 60 et 80 ans. Ce cancer est rare avant 50 ans avec seulement 2,7% des patients diagnostiqués. En France l’âge moyen en 2000 est de 69 ans, moins de 5% des patients diagnostiqués ont moins de 50 ans. Aux Etats Unis, l’âge moyen est de 69 ans aussi avec près de 50% des patients âgés de plus de 75 ans. C. SEXE : L’incidence du cancer du pancréas est plus élevée chez l’homme que chez la femme tous âges confondus, toutefois, le sex-ratio diminue avec l’âge. L’incidence qui semble s’accroître chez la femme dans certains pays est pour certains en rapport avec une exposition à des facteurs de risques tel que le tabac. Dans le registre du nord, le sex-ratio est de 1,55, dans la série de l’ATC 2005, il est de 1,7, les données concordent avec ceux de la littérature (tableau 1). D. DISPARITE RACIALE : Le ratio d’incidence du cancer du pancréas entre les départements français varie de 1,7 à 2,3 ; aux Etats Unis l’incidence est plus élevée dans la population noire de la Californie, de même que le taux de tumeurs évoluées non résécables et le taux de mortalité. L’impact du pays d’origine étudié notamment dans la population juive met en évidence une incidence plus élevée parmi les hommes nés en Europe ou aux Etats Unies par rapport à ceux nés en Israël. Aux Etats Unis cette incidence est 5 à 6 fois plus importante dans la population hispanique californienne que celle chinoise. Auteurs Sexe Age moyen ans Nombre de patients Hommes % 70 Femmes % 30 55 46 Bahi S 56 44 62 34 Dziri C 64,5 35,5 54 31 Rahal K 67 33 60 58 Berrada S 36 Cameron JL 54 46 63 201 Gudjonsson B 51,5 48,5 62 196 Ben Slima M 67 33 58,5 76 Hani ML 63 37 60 114 ATC 2005 61 39 65 459 Tableau 1 : Variations du Sex Ratio dans la littérature E. INFLUENCE DES MIGRATIONS ET DES FACTEURS SOCIOECONOMIQUES : L’incidence du cancer du pancréas des japonais immigrés aux Etats Unis est plus élevée que dans la population au Japon ; certaines études ont signalé une incidence qui semble plus élevé dans les populations à bas revenus et aux conditions socio-économiques défavorables. III. Epidémiologie analytique : Les facteurs de risque du cancer du pancréas restent mal connus malgré une reconnaissance de l’implication de différents agents. A. TABAC : Le tabagisme multiplie le risque de cancer du pancréas par 3, environ 30% des cancers du pancréas lui seraient attribuables. Des dysplasies ainsi que des atypies dans les cellules canalaires pancréatique ont été observés à l’autopsie de sujets fumeurs. Dans plusieurs enquêtes une relation dose-effet a pu être observée avec un risque d’autant plus élevé que la consommation est plus forte. La lutte anti-tabac serait un moyen de prévention en effet le risque est réduit de moitié 2 ans après l’arrêt du tabac et disparaît à 10 ans. B. REGIME ALIMENTAIRE : Certaines études suggèrent un effet favorisant de la consommation de viande et graisse animales tandis que le rôle « Protecteur » des fruits et légumes est constamment retrouvé. Les anti-oxydants tels que le bétacarotène ne semblent pas diminuer le risque. C. ALCOOL : Dans une étude prospective réalisée par HEUCH sur 16713 Norvégiens, le risque était 5 fois plus élevé chez les grands consommateurs d’alcool. Une autre étude finlandaise publiée en 1974 par Hakulinen a permis de noter une incidence élevée du cancer du pancréas dans une population de grands buveurs d’alcool comparée à la population générale. Par contre, une étude récente menée par Ye en Suède et publiée en 2002 n’a pas permis de retenir l’alcool comme facteur de risque de cancer du pancréas. D. CAFE : La responsabilité du café dans la survenue du cancer du pancréas a été suggérée pour la première fois en 1970 par Stocks. Depuis, de nombreux auteurs ont étudié la consommation de café sans impact du tabac sur le risque de survenue de cancer du pancréas avec des résultats discordants mais de toute évidence cet effet est très faible voire insignifiant pour certains. 37 E. RADIATIONS IONISANTES : L’exposition des modeles animaux à une irradiation augmente le risque de survenue d’un cancer pancréatique. Chez l’homme, les études menées auprès des survivants aux bombes atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki n’a pas mis en évidence d’augmentation de l’incidence du cancer du pancréas. Il est toutefois signalé que des adénocarcinomes du pancréas ont été rapportés chez des patientes irradiées dans l’enfance pour hémangiome ; des patients irradiés avec des doses plus élevées pour pathologies malignes n’ont pas augmenté leur risque de développer un cancer pancréatique. F. EXPOSITIONS PROFESSIONNELLES : Dés 1973 Wynder rapportait une fréquence anormalement élevée du cancer du pancréas chez des ouvriers et chimistes exposés à la naphtylamine et à la benzidine. L’industrie du cuir qui utilise des colorants a été aussi rapportée comme facteur de risque. D’autres professions notamment la métallurgie, l’industrie de l’Aluminium, l’exposition au DDT semble augmenter le risque de survenue d’un cancer du pancréas. G. FACTEURS FAVORISANTS : 1. La pancréatite chronique : Le risque d’apparition d’un cancer du pancréas chez des patients atteints de pancréatite chronique est un sujet de controverse, en effet la plupart des études épidémiologiques ont l’inconvénient d’évaluer l’association de ces deux maladies chez des patients issus de séries multicentriques. La pancréatite chronique non héréditaire est soit d’origine alcoolique soit en rapport avec des problèmes biliaires. La survenue d’une pancréatite chronique précède environ de 10 ans l’apparition d’un cancer toutefois le diagnostic est rendu souvent plus difficile. En effet, les symptômes sont souvent les mêmes, le terrain de survenue aussi. De même la survenue d’un cancer du pancréas peut induire, via l’obstruction, des signes histologiques de pancréatite. Actuellement on pense que si la filiation pancréatite chronique - cancer existe, elle ne représente qu’un très faible pourcentage de cancers pancréatiques. 2. Diabète : Le diabète accompagne fréquemment le cancer du pancréas. En effet l’association diabète cancer est retrouvée dans prés de 15 % des cas. Pour certains auteurs la fréquence augmente avec l’évolution du diabète pour d’autres elle diminue de 3,2 durant les 5 premières années à 1,3 après 10 ans du diagnostic du diabète. 38 3. Facteurs héréditaires : Un certain nombre d’études suggèrent une association cancer du pancréas et cancers familiaux, en effet dans certaines familles le risque est 5 à 10 fois plus élevé que dans la population générale. Les principaux syndromes héréditaires associés au cancer du pancréas sont la Human Non Polypoid Colonic Cancer (HNPCC), le cancer du sein avec anomalies du BRCA 2, l’Ataxie télangiectasie, le syndrome de Von Hippel-Lindau…(tableau 2). Maladie Anomalie chromosomique Cancer du pancréas familial HNPCC ? Remarques 5 à 10 fois plus de risque de cancer du pancréas 2,3 Certains patients peuvent développer un cancer pancréatique Syndrome de Van HippelLindau 3p25 Les tumeurs neuro-endocrines du pancréas sont fréquentes Pancréatite héréditaire 7q35 Risque cumulé d’au moins 30 % de cancer du pancréas BRCA 2 13 La plus fréquente des mutations héréditaire menant à un cancer du pancréas Syndrome de Peutz-Jeghers 19p Mutation qui contribue à la survenue de cancer héréditaire et sporadique Ataxie-télangiectasie 11q Le cancer du sein est le plus fréquent, quelques cas de cancer du pancréas. 17p13.1 Déficit en p53, risque modéré de cancer du pancréas Syndrome de Li-Fraumeni Tableau 2 : Maladies héréditaires et cancer du pancréas. En conclusion L’incidence du cancer du pancréas est en augmentation principalement dans les pays développés, les principales études confèrent un effet important aussi bien aux facteurs génétiques qu’environnementaux. La consommation de Tabac augmente le risque mais son impact est moins important que pour les cancers du poumon, de la vessie et du larynx. Le régime riche en fibre et vitamine C semble protéger contre la survenue d’un cancer notamment pancréatique, enfin certains facteurs environnementaux en rapport avec une exposition professionnelle ont été signalés. 39 Références : 1. Albert B. Lowenfels, P. Maisoneuve. Epidémiology and prevention of pancreatic cancer. JPN J Oncol 2004 ; 34(5) 238-44. 2. K.J. Chang, G. Parasher, C. Christie. Risk Of pancreatic adenocarcinoma. 3. Cancer 2005 ; 103(2) 349-57. 4. E.B. Gold. Epidemiology of and risk factors for pancreatic cancer. Surg Oncol Clin North America 1998 ; 7(1) 67-83. 5. M.H. Pascual, E.F. Herrero, M.J. Castillo Fé. Rev Esp Enferm Dig 2004 ; 96(10) 71422. 6. A.M. Bouvier (2003). Evolution de l’incidence et de la mortalité par cancer en France de 1978 à 2000. 7. M. Ben Abdallah (1994). Registre du cancer du Nord Tunisie. 8. Ahlegren J.D. Epidemiology and risk factors in pancreatic cancer. Semin Oncol 1996 ; 23 241-50. 9. Belhassine E. Cancer du pancréas exocrine. Expérience de l’Institut Salah Azaiez. Thése Médecine Tunis 2000. 40 DIAGNOSTIC CLINIQUE ET BIOLOGIQUE DES CANCERS DU PANCRÉAS Amouri A., Abdelkafi T., Boudokhane M., Helali K., Morjane A., Fodha M Service de Chirurgie C H U de Mahdia Le cancer du pancréas est souvent diagnostiqué à un stade avancé de la maladie. Le pancréas est un organe profond. De ce fait les tumeurs pancréatiques sont caractérisées par leur latence clinique. Les signes d’appel sont en général en faveur de l’extension de la tumeur. Dans la grande majorité des cas le diagnostic est fait au stade de tumeur non résécable en raison de métastases ganglionnaires ou hépatiques, ou d’une extension vasculaire (2,4,6). En l’absence d’autres alternatives thérapeutiques, l’amélioration du pronostic doit passer par une précocité du diagnostique. 1. Résultats de notre série : Les signes fonctionnels d’appel retrouvés chez les malades de notre série sont présentés dans le tableau 1. La répartition des signes en fonction de la localisation tumorale est présentée dans le tableau 2. Bien entendu, les signes de choléstase prédominent dans le groupe Signe Nombre % Aucun signe 5 Ictère 302 62,9 Décoloration des selles 184 38,3 Prurit 175 36,5 Douleurs abdominales 362 75,4 Tableau 1 : Prévalence des signes fonctionnels Localisation Céphalique Corporéale caudale Corporéo caudale Corporéo céphalique Toto pancréatique Petit pancréas Ictère 284 74,3% 2 10,5% 2 9,1% 2 7,1% 9 45% 0 0% 3 75% Déc. selles 176 46,1% 0 0% 0 0% 2 7,1% 3 15% 0 0% 2 50% Prurit 162 42,4% 0 0% 1 4,5% 2 7,1% 7 35% 0 0% 2 50% Douleurs Abd. 279 73% 17 89,5% 20 90,9 24 85,7 18 90% 3 100% 1 25% Tableau 1 : Prévalence des signes fonctionnels en fonction de la localisation tumorale Les signes d’examen physique retrouvés chez nos malades sont présentés dans le tableau 3. La répartition de ces signes en fonction de la localisation tumorale sont présentés dans le tableau 4. 41 Signe Nombre % Ictère 329 68,( Masse abdominale 55 11,5 Hépatomégalie 123 25,6 Grosse vésicule 107 22,3 Ascite 16 3,3 Troisier 8 1,7 Tableau 3: Prévalence des signes fonctionnels Localisation Céphalique Ictère Masse abdominale Hépatomégalie Vésicule palpable. Ascite 306 40 106 102 11 80,1 10,5% 27,7% 26;7% 2,9 % Corporéale 2 3 0 0 1 10,5 15,8% 0% 0% 5,3% % caudale 2 6 6 0 1 9,1% 27,3% 27,3% 0 4,5 3 3 0 1 Corporéo 3 caudale 10,7 10,7% 10,7% 0% 3,6% % Corporéo 13 3 7 4 2 céphalique 65% 15% 35% 20% 10 Toto 0 0 0 0 0 pancréatique 0% 0% 0% 0% 0% Petit pancréas 3 0 1 1 0 75% 0% 25% 25% 0% Tableau 4 : Prévalence des signes en fonction de la localisation tumorale Troisier Total 6 1,6% 382 0 0% 19 1 4,5% 1 3,6% 22 0 0% 0 0% 0 0% 20 28 3 4 Les examens biologiques n’ont qu’un apport limité dans le diagnostic des tumeurs pancréatiques. En général ils permettent de détecter ou de confirmer une choléstase. Le dosage de l’antigène carcino embryonnaire n’a été effectué que dans 49 cas (10,8%). Son taux était élevé dans 33 cas (66%). Le dosage du CA 19/9 a été effectué dans 77 cas (14%). Son taux était élevé dans 45 cas (58%). 2. Les Circonstances Diagnostiques : Manifestations cliniques évocatrices Les signes cliniques du cancer du pancréas ne sont pas spécifiques et sont souvent tardifs. Les 2/3 des cancers du pancréas se développent au niveau de la tète. L’ictère et la douleur sont présents dans 90% des cas soit de façon isolée soit associée (2,5,6). * l’ictère : Présent chez la majorité des malades, il s’agit d’un ictère choléstatique, progressif, évoluant d’un seul tenant sans tendance à la régression. L’ictère est souvent initialement isolé et 42 qualifié de ce fait d’ictère Nu (2, 6, 7). L’ictère est l’apanage des cancers des la tète du pancréas, il est secondaire à une obstruction de la portion intra-pancréatique de la voie biliaire principale. Cet ictère de type choléstatique, est associé à des urines foncées, des selles décolorées, un prurit qui peut être important, responsable de lésions de grattage. Le prurit peut précéder l’apparition de l’ictère. Dans les cancers du corps et de la queue du pancréas, qui sont à distance du confluant biliopancréatique, l’ictère fait défaut. Dans certains cas, l’ictère est le résultat de métastases hépatique multiples (7 cas dans notre série) (2,4,6,7). *Les douleurs : Elles sont de mauvais pronostic. Elles témoignent souvent d’un envahissement des organes de voisinage. En cas de cancer du corps du pancréas, les douleurs sont plus précoces, elles sont très intenses, en rapport avec un envahissement du plexus solaire. Les douleurs de type solaire, sont typiquement, de siège épigastrique ou au niveau de l’hypochondre gauche, intenses, transfixiantes, irradiant vers le dos, insomniantes avec une recrudescence nocturne. Ces douleurs sont assez souvent aggravées par l’alimentation et le décubitus dorsal. La position penchée en avant, soulage partiellement ces douleurs. * L’amaigrissement : est parfois très important. L’association ictère et douleurs abdominales dans un contexte d’amaigrissement et d’une altération de l’état général est très évocatrice d’un cancer du pancréas. Il s’agit généralement de formes à un stade avancé non résécable (2,4,6). L’examen clinique : En cas de cancers de la tète du pancréas, l’examen clinique va mettre en évidence l’ictère cutanéo-muqueux. L’ictère va apparaître dés que les chiffres de bilirubine dépassent 35 moles/litre. L’examen peut mettre en évidence des lésions de grattage en rapport avec le prurit. La palpation d’une grosse vésicule, en présence de l’ictère, témoigne d’un obstacle situé audessous de l’abouchement du canal cystique. Un gros foie à bord antérieur mousse de choléstase peut être palpé. L’examen va apprécier l’importance de l’amaigrissement avec surtout une fonte musculaire. Quel que soit le siége de la tumeur, l’existence d’une masse épigastrique ou de l’hypochondre gauche est rare. Autres circonstances de découvertes (2,4) : Pour les tumeurs évoluées, le diagnostique peut se faire devant : *une ascite témoignant d’une carcinose péritonéale *des métastases hépatiques parfois volumineuses. *des métastases pulmonaires, cérébrales ou osseuses. *une symptomatologie de sténose duodénale. Le diagnostic de cancers du pancréas peut être fait plus rarement devant des manifestations cliniques peu évocatrices (2,4) : Des douleurs abdominales atypiques Des troubles du transit Une pancréatite aiguë Une hémorragie digestive haute Une thrombophlébite migrante et récidivante Un diabète récent ou une aggravation d’un diabète jusque là bien équilibré 43 Ces signes ne sont pas directement évocateurs de cancers du pancréas, mais leur apparition, surtout chez un sujet de la cinquantaine, doit faire réaliser des examens complémentaires pour les expliquer. Diagnostic Biologique (2,6,7) : En cas d’ictère, la biologie va monter une choléstase, elle va rechercher le retentissement sur la fonction hépatique. *la bilirubine est augmentée avec une nette prédominance conjuguée. Dans l’obstacle complet et persistant (c’est le cas des cancers de la tète du pancréas), la bilirubine s’élève rapidement pour atteindre un plateau en trois semaines. Elle peut atteindre 500 micrmoles/l .En cas d’insuffisance rénale associée avec chute de l’excrétion urinaire de la bilirubine conjuguée, le taux peut largement dépasser 500micromoles/l . * Les phosphatases alcalines : En cas d’obstacle tumoral l’élévation est importante supérieure à trois fois la normale. Une élévation modérée peut se voir dans toutes les maladies du foie. * les gamma glutamyl-transpeptidases : Elles évoluent de la même manière que les phosphatases alcalines. Il faudra se méfier de certains faux négatifs. En effet, elles peuvent être élevées chez l’alcoolique et après prise de médicaments inducteurs enzymatiques. * 5’Nucléotidases : Spécifiques de la cholestase, elles évoluent de façon parallèle aux phosphatases alcalines. * les aminotransférases : Elles peuvent être très élevées mais elles sont non spécifiques de cholestase extra hépatique. - Une allongement du Temps de Quick témoigne d’un déficit en vitamine K dont l’absorption intestinale nécessite la présence de bile. - Une glycémie élevée est fréquemment retrouvée en cas de cancers du pancréas. Elle peut être révélatrice dans certains cas. - Une anémie carentielle par sténose duodénale ou de type inflammatoire. - Une polyglobulie rentrant dans le cadre d’un syndrome paranéoplasique. Les marqueurs tumoraux: A- Marqueurs biochimiques classiques type carbohydrate : Cancers et néoantigènes Plusieurs situations cliniques peuvent poser des problèmes de diagnostic différentiel entre un cancer du pancréas et une pancréatopathie bénigne dont la prise en charge et le pronostic sont différents. Dans ces cas, les marqueurs biologiques peuvent être des outils diagnostics performants. Un marqueur biologique tumoral devrait idéalement répondre à certains critères qui sont : -Une sensibilité de 100% traduisant une positivité chez tous les patients atteints -Une spécificité de 100% traduisant une négativité chez tous les sujets indemnes Donc idéalement un marqueur biologique tumoral devrait permettre d’affirmer la nature maligne s’il est positif (valeur prédictive positive) et d’éliminer la malignité s’il est négatif (valeur prédictive négative). Ces objectifs ne sont pas encore atteints. CA19-9 (2,7,8) Le test CA19-9 utilise un anti-corps monoclonal (identifié par Kaprowski et all en 1978) reconnaissant un antigène (appelé lui aussi Ag CA19-9). Cet antigène est présent à la surface des membranes de certaines cellules et il est principalement secrété dans le sérum. 44 Certains sujets n’exprimant pas l’antigène de Lewis (Ag du groupe sanguin), ceux là ne peuvent exprimer le CA19-9 même en présence d’un adénocarcinome du pancréas. Le CA19-9 n’est pas spécifique des cellules tumorales malignes, il est exprimé de façon physiologique par de nombreuses cellules épithéliales : les cellules canalaires pancréatiques, des voies biliaires, de l’estomac, du colon et des glandes salivaires. Des taux élevés de CA19-9 sont rapportés au cours des tumeurs malignes gastriques ou colorectales. L’élévation est plus marquée en cas de cancers du pancréas ou des voies biliaires. Les adénocarcinomes pancréatiques s’accompagnent d’une élévation franche du taux de CA19-9 et ceci à l’inverse des tumeurs endocrines ou indifférenciées du pancréas. Le taux de positivité du CA19-9 a été fixé par Steinberg et all à 37 U/ml avec une sensibilité de 83% et une spécificité de 80%. A un taux de 75 U/ml, la spécificité est de 90%. L’augmentation du seuil de positivité, améliore la spécificité du dosage au dépend de la sensibilité (beaucoup de faux négatifs). Le taux de CA19-9 est corrélé avec le volume de la tumeur. La sensibilité du test passe de 60% pour les tumeurs < à 2 cm, à 90 à 95% pour des tumeurs de plus de 5 cm. Des taux de CA19-9 > 600 U/ml sont corrélés avec le caractère non resécable de la tumeur. Une augmentation du taux de CA19-9 peut survenir dans diverses pathologies digestives malignes ou bénignes : *syndromes choléstatiques et ceci quel que soit le siège et nature de l’obstacle. L’élévation est plus marquée en cas de sepsis. *pancréatopathies : L’élévation est plus marquée en cas de pancréatite aiguë que en cas de pancréatite chronique. L’association d’un ictère à une pancréatite chronique s’accompagne de taux très élevés de CA19-9, rendant ce test non fiable pour différencier entre nodule de pancréatite chronique et cancer du pancréas. *hépathopathies : la stéatose, la fibrose et la cirrhose hépatique, s’accompagnent d’une élévation du CA19-9 pouvant atteindre 100à 200 U/ml. *l’élévation du CA19-9 est moindre en cas de cancers colorectaux, hépatocarcinomes et d’adénocarcinomes gastriques. De même une élévation du CA19-9 peut être observée en cas de cancer du poumon et du sein. En conclusion le CA19-9 est un test non adapté pour différencier entre une pancréatopathie bénigne et maligne surtout en présence d’ictère. De même le CA19-9 ne permet pas un diagnostic précoce du cancer du pancréas. Autres marqueurs biochimiques classiques (2,7,8) * le CA50 : ce marqueur à une sensibilité et une spécificité moindre à celle du CA19-9 mais il a l’intérêt d’être positif chez les sujets de groupe sanguin Lewis négatif. * le DU-PAN-2 : précurseur du CA19-9, à une sensibilité et spécificité comparables à celle du CA19-9 * le SPan-1 : A une sensibilité identique à celle du CA19-9 avec une spécificité moindre. * CAM17-1 : A une sensibilité identique à celle du CA19-9. Il a l’avantage d’être indépendant du taux de bilirubine et surtout une forte spécificité (100% pour les patients sains et 90% en cas de pancréatite chronique). * Lantigène carcino embryonnaire (ACE) : cet antigène est exprimé dans les cancers colorectaux, gastriques et pancréatiques. Si l’ACE est utile pour la surveillance des cancers colorectaux opérés pour détecter des récidives pré cliniques, sa sensibilité et sa spécificité sont faibles en cas de cancer du pancréas. De même l’ACE peut être élevé dans certaines pathologies telles que pancréatite chronique et maladie cholestatique. L’ACE se trouve aussi élevé chez les fumeurs. 45 Les Marqueurs Génétiques (2,7,8) Mutation de Ki-ras : Le gène Ki-ras joue un rôle primordial dans la régulation de la transduction du signal prolifératif induit par les facteurs de croissance. La recherche de la mutation de Ki-ras peut se faire sur pièce opératoire, sur un prélèvement cellulaire par cyto-ponction, sur le suc pancréatique obtenu par tubage duodénal ou par CPRE ou un prélèvement des selles. Certaines lésions coliques type adénome ou cancer peuvent être porteuses de la mutation de Ki-ras et donc limitent l’intérêt diagnostique sur prélèvement des selles en cas de suspicion de cancer du pancréas. La recherche de mutation de Ki-ras paraît une technique prometteuse pour un diagnostic précoce du cancer du pancréas vu que ces mutations sont précoces (à un stade infra radiologique). Gène p 53 : Des mutations du gène p53 sont retrouvées dans 50 à 60% des cancers humains. Ce gène joue un rôle essentiel dans la régulation de la division cellulaire et permet l’activation des systèmes de réparation de l’ADN ou de l’élimination des cellules lésées. La spécificité des mutations du gène p53 dans le cancer du pancréas est de 80 à 96%. D’autres marqueurs génétiques sont étudiés : - deleted in colon carcinoma DCC1 - deleted in pancreatic carcinoma DPC4 - transforming growth factor - multi tumor suppressor gene L’objectif de ces études est de trouver des marqueurs sensibles et spécifiques permettant un diagnostic précoce. 3. Conclusion Le seul traitement curatif du cancer du pancréas est la chirurgie d’exérèse. La résécabilité est de l’ordre de 10 à 15% au moment du diagnostic. Vu l’absence jusqu'à maintenant d’autres alternatives thérapeutiques. L’amélioration du pronostic passe impérativement par une précocité du diagnostic à un stade ou la résection curatrice est faisable. Références: 1. Arcidiacone PG, Rossi M. Coeliac plexus neurolysis JOP 2004, Jul 315-21 2. Barman PL, Bechingham IJ Pancreatic tumor-clinical revue. BMJ, 322, March 2001 3. Bronge WR, Lowers G., Sahani D, Fernandez Cystic neoplasm of the pancreas 4. Cancer du pancreas Curr probl cancer, July-august 2002 5. Kristine S., Spinelli MD, Travis C. Cystic pancreatic neoplasm Annal of surgery, 239,5, May 2004 6. Lesur G, Sauveret A, Levy P , Belghithi J., Bernards P.Cancer du pancréas exocrine EMC hépatologie 7-106-A10.1995 7. Pages P, Bertholeny P., Paradayrol L.Marqueurs tumoraux du cancer du pancreasEMC hépatologie 7.106-A-15-1998 8. Takher AS , Palanieppas, Dhingsa R Recent developpement in diagnosis of pancreatic cancer BMJ 2004, 329, 668-73 46 IMAGERIE DES TUMEURS DU PANCREAS L. Ben Farhat, L. Dridi, L.Rezgui, L. Hendaoui Service de radiologie, Hôpital Mongi Slim – La Marsa I. TUMEURS MALIGNES DU PANCREAS Malgré les progrès importants et continus en imagerie pancréatique, le pronostic du cancer du pancréas reste mauvais avec une survie globale à 5 ans inférieure à 3 % (25, 29). L’adénocarcinome développé à partir de l’épithélium canalaire du pancréas exocrine est la tumeur pancréatique maligne la plus fréquente, puisqu’elle représente 75 à 90 % de l’ensemble des tumeurs du pancréas (25, 29). Le but principal de l’imagerie est de faire un bilan d’extension de la maladie afin de sélectionner les patients pouvant bénéficier d’un traitement curatif. I. 1 IMAGERIE DIAGNOSTIQUE Quelle que soit la méthode d’imagerie, le cancer du pancréas se manifeste par des signes directs et des signes indirects. Ces derniers peuvent être les seuls signes présents en cas de tumeur de petite taille. I. 1.1 Echographie L’échographie est l’examen d’imagerie de première intention dans le bilan de douleurs abdominales ou d’ictère. Elle permet d’établir le diagnostic positif de tumeur du pancréas et de participer au bilan d’extension locorégional. Résultats Signes directs L’adénocarcinome pancréatique se traduit typiquement en échographie par une formation hypoéchogène, à contours flous pouvant déformer ou non les contours de la glande (fig. 1, fig. 2). La sensibilité de cet examen dans le diagnostic est variable dans la littérature. Elle est comprise entre 55 et 90 % (3). Les principales limites de l’échographie en dehors des limites techniques classiques sont : les tumeurs de taille inférieure à 2 cm, les tumeurs situées dans le pancréas gauche et les lésions diffuses à tout ou une partie du pancréas. Signes indirects Ce sont une dilatation du canal de Wirsung (diamètre supérieur à 2 mm) en amont de la lésion (fig. 2) ; une dilatation de la voie biliaire principale et des voies biliaires intrahépatiques (fig. 3-4), lorsque la lésion se situe dans la tête du pancréas ; une atrophie parenchymateuse en amont de l’obstacle et un pseudo-kyste secondaire à une pancréatite aigue d’amont. L’échographie a une excellente sensibilité pour la détection des deux premiers signes. I. 1. 2 Tomodensitométrie (TDM) La TDM est l’examen fondamental pour le diagnostic et le bilan d’extension du cancer du pancréas (20, 22, 29). 47 a- Technique Les études récentes (5, 12, 14, 16, 17, 31) utilisent deux hélices pour l’étude du cancer du pancréas. La première centrée sur le pancréas utilise une collimation de 3 à 4 mm au temps de rehaussement pancréatique (45 secondes après le début de l’injection). La seconde a pour but l’étude du foie et de la cavité péritonéale au temps de rehaussement hépatique (70 secondes après le début de l’injection) et utilise une collimation de 5 à 7 mm. Le choix d’un temps pancréatique (débutant 40 à 45 secondes après l’injection) dans la première hélice, se justifie par un rehaussement maximal du pancréas et simultané de l’axe veineux mésentérique et des structures artérielles (fig. 5). La technologie des scanners multicoupes permet l’acquisition de coupes millimétriques avec conservation d’une bonne résolution permettant d’obtenir des reconstructions vasculaires d’excellente qualité (1, 12, 14, 17, 31). b- Résultats Signes directs La sensibilité de la TDM est excellente dans la détection tumorale en matière de cancer du pancréas. Elle dépasse le plus souvent 90 % (5, 8, 15, 25, 31). L’adénocarcinome du pancréas se traduit typiquement par une masse hypodense au temps pancréatique de la TDM hélicoïdale (9, 17) (fig. 6). Cependant ce caractère hypodense de la lésion n’est retrouvé que dans 80 à 90 % des cas (8, 12). Le syndrome de masse peut être difficile à mettre en évidence en cas de tumeur de petite taille ne déformant pas les contours de la glande ou de tumeurs isodenses au pancréas (fig.7). Signes indirects Ces signes sont parfois isolés et dépendent du siège de la tumeur * Dilatation des voies biliaires : Une dilatation des voies biliaires est visible dans 86 % des cas de tumeur céphalique (24). La dilatation de la voie biliaire principale (fig. 8) est plus importante et plus fréquente que celle des voies biliaires intra-hépatiques (fig. 9). Une dilatation de la vésicule biliaire est souvent associée. * Dilatation du canal pancréatique : La dilatation du canal de Wirsung n’est pas constante. Elle est notée chez 88 % des patients en cas de tumeur céphalique (fig. 10) et dans 50 % des cas environ dans les tumeurs corporéales (8). L’association des deux signes sus cités réalise le classique signe de dilatation bicanalaire très évocateur du diagnostic de cancer du pancréas (fig. 11). * Atrophie parenchymateuse d’amont : L’atrophie parenchymateuse d’amont est secondaire à l’obstruction canalaire (fig. 12). Elle se voit dans 82 % des cancers se présentant avec une dilatation du canal pancréatique principal (8). En pratique la présence d’une atrophie partielle du pancréas doit attirer l’attention sur l’éventuelle présence d’une tumeur pancréatique qui siègera alors à la jonction pancréas atrophique pancréas non atrophique. * Pseudo-kyste d’amont : La présence d’un pseudo-kyste est secondaire à une pancréatite d’amont. C’est un signe indirect rare. Il n’est noté que dans 8 à 10 % des cas (8). Il peut poser des problèmes de diagnostic différentiel avec une poussée de pancréatite aigue. 48 I. 1. 3 Imagerie par résonance magnétique (IRM) Les performances de l’IRM se sont améliorées avec les progrès techniques. Son principal avantage est de pouvoir faire une étude des canaux biliaires et pancréatiques grâce aux séquences de cholangio-pancréatographie par IRM ainsi qu’une imagerie vasculaire grâce aux séquences angiographiques. a- Technique Pour donner les meilleurs résultats diagnostiques, l’IRM doit répondre à plusieurs impératifs techniques : une machine à haut champ, des gradients puissants et rapides, l’utilisation d’antennes de surface dédiées. Les séquences utiles au diagnostic et au bilan d’extension du cancer du pancréas sont : les séquences en pondération T1 avec saturation de la graisse, les séquences d’imagerie rapide en écho de gradient pondérées en T1 après injection de chélates de gadolinium et les séquences pondérées T1 sans et avec injection de chélates de gadolinium (9, 20, 27). b- Résultats L’avantage de l’IRM est sa meilleure sensibilité (avoisinant 90%), par apport à l’échographie et à la TDM dans la détection des signes directs de tumeur pancréatique plus particulièrement dans les lésions de petite taille (13, 28). L’adénocarcinome pancréatique est hypointense par rapport au pancréas sain sur les séquences en pondération T1 avec saturation de la graisse et sur les séquences rapides en écho de gradient après injection de chélates de gadolinium (9). Les études ayant conclu à la supériorité de l’IRM par rapport à la TDM en matière de détection tumorale, ont le défaut d’avoir comparé l’IRM à la TDM incrémentale (19, 28). En ce qui concerne les signes indirects la sensibilité de la TDM dépasse celle de l’IRM (5, 31), justifiant son utilisation de première intention pour le diagnostic de cancer du pancréas. I. 1.3 Echo-endoscopie C’est un examen d’imagerie précis pour établir le diagnostic et le bilan d’extension d’un cancer du pancréas (19, 23). Il était le premier concurrent de la TDM avant l’introduction du mode hélicoïdal. L’écho-endoscopie est donc aujourd’hui un examen de troisième intention réservé à des indications particulières. a- Technique L’écho-endoscopie utilise des sondes de haute fréquence permettant grâce à la proximité de la glande pancréatique d’avoir une image de haute résolution. L’étude de la tête du pancréas se fait par l’introduction de la sonde dans le duodénum. Celle du pancréas gauche s’effectue par voie transgastrique. Comme toute technique d’imagerie, l’écho-endoscopie a des limites. Elle ne permet pas de faire un bilan d’extension complet surtout en cas de recherche de métastases. L’examen est incomplet en cas de sténose digestive infranchissable ou en cas de montage chirurgical digestif. C’est enfin un examen très opérateur dépendant. b- Résultats La sensibilité de l’écho-endoscopie dans le diagnostic des adénocarcinomes du pancréas est supérieur à 90 % (19, 23). Cet examen est particulièrement performant dans les lésions inférieures à 2 cm. 49 L’aspect écho-endoscopique typique d’un adénocarcinome du pancréas est une formation hypoéchogène hétérogène à limites irrégulières. Les séries récentes ayant comparé l’écho-endoscopie à la TDM hélicoïdale (6, 15), montrent que les performances de la TDM se sont rapprochées de celles de l’écho-endoscopie. I. 2 BILAN D’EXTENSION Le but de l'imagerie est de rechercher une contre-indication à l'exérèse. Les critères de non résécabilité sont différents d'un centre à l'autre et le choix des examens d'imagerie en est influencé. Les contre-indications les plus consensuelles à un geste d'exérèse à visée curative sont: la présence d'une carcinose péritonéale, de métastases hépatiques et un envahissement du tronc coeliaque, de l'artère hépatique ou de l'artère mésentérique supérieure. Les examens d'imagerie utilisés dans le bilan d'extension du cancer du pancréas sont nombreux: échographie, TDM, IRM, artériographie, transit œsogastroduodénal. I. 2.1 ENVAHISSEMENT VASCULAIRE a- Echographie Les critères d'envahissement vasculaire spécifique sont la déformation du vaisseau au contact de la tumeur, la thrombose ou l'englobement du vaisseau par la tumeur, un contact entre la tumeur et le vaisseau sur une longueur supérieure à 2 cm (fig. 13-16). Les différentes études réalisées concernant l'envahissement vasculaire en échographie ne sont pas concordantes. En effet quelques unes ont montré une excellente sensibilité avoisinant 90%. Ces bonnes performances n'ont pas été confirmées par des études comparatives en particulier celles avec l'écho-endoscopie (29). b- TDM Sémiologie : Les signes directs formels d'envahissement vasculaire par un adénocarcinome du pancréas en TDM sont : l'occlusion ou la thrombose; la sténose et l'englobement tissulaire circonférentiel des vaisseaux (fig.17-20) (8, 30). Les signes indirects d'envahissement vasculaire concernent l'envahissement veineux splénique ou mésentérique supérieur. Dans ce cas des collatéralités peuvent se développer à partir de la veine gastro-épiploïque ou à partir des arcades pancréatico-duodénales réalisant une hypertension portale segmentaire (fig. 19). L'existence d'une densification circonférentielle de la graisse péri-artérielle au niveau du tronc coeliaque ou de l'artère mésentérique supérieure est très fortement suspecte. Elle traduirait une diffusion tumorale au sein des lymphatiques péri-vasculaires (fig. 21). Résultats : Les principales séries ayant évalué les performances de la TDM en mode hélicoïdal sont concordantes et montrent une sensibilité variant de 80 à 91% et une spécificité de 89 à 100% (5, 11, 30). La TDM est considérée aujourd'hui comme l'examen de référence pour le diagnostic d'envahissement vasculaire. 50 c- Echo-endoscopie Les signes formels d'envahissement vasculaire sont: la présence d'un bourgeon tumoral endoluminal, l'absence de visualisation du vaisseau avec présence d'une circulation collatérale, l'engainement des vaisseaux par la tumeur. La sensibilité de l'écho-endoscopie pour la prédiction de l'envahissement vasculaire est très élevée avoisinant 95% (19, 23). Les séries récentes ayant comparé TDM hélicoïdale et échoendoscopie les trouvent équivalentes (6, 15). e- IRM La sensibilité de l'IRM pour la prédiction d'envahissement vasculaire varie de 70 à 90% (13, 18). Aucune étude comparant l'IRM à la TDM hélicoïdale n'a démontré de supériorité significative dans le bilan d'extension locale. I. 2. 2 ENVAHISSEMENT GANGLIONNAIRE a- Echographie Les ganglions cœliomésentériques ou pédiculaires (fig. 22) sont considérés envahis lorsque leur petit axe est supérieur ou égal à 10 mm. L'échographie est peu performante dans la prédiction d'envahissement ganglionnaire vue sa faible sensibilité pour la détection des ganglions péri-pancréatiques. b- TDM La sensibilité de la TDM pour le diagnostic d'envahissement ganglionnaire même en mode hélicoïdal reste très moyenne entre 54 et 77 % (5, 15). La principale limite étant la détection des adénopathies péri-pancréatiques. c- IRM L'IRM ne constitue pas un bon examen pour l'étude de l'envahissement ganglionnaire. Sa résolution spatiale est encore moins bonne que celle de la TDM. d- Echoendoscopie Les critères d'envahissement ganglionnaire à l'écho-endoscopie sont: un petit axe supérieur à 5 mm; le caractère hypoéchogène du ganglion, des limites nettes et un aspect arrondi (19). La sensibilité de l'écho-endoscopie pour prédire un envahissement ganglionnaire est estimée à 70% (19). Elle constitue le meilleur examen pour la détection des adénopathies péri-pancréatiques. 1. 2. 3 ENVAHISSEMENT HEPATIQUE ET PERITONEAL a- Echographie L'échographie permet la détection de 70 à 80% des métastases hépatiques ou péritonéales qui représentent une contre-indication formelle à une résection chirurgicale (24). b- TDM L’envahissement hépatique est bien apprécié en TDM hélicoïdale avec une sensibilité de 75% (fig. 22). La sensibilité est beaucoup moins élevée pour des lésions de petite taille (de l'ordre de 2 à 8 mm) (25). 51 La TDM n’est pas un bon examen pour la détection de la carcinose péritonéale (fig. 23) débutante. c- IRM L'IRM est performante dans la recherche de métastases hépatiques. Elle a les mêmes limites que la TDM pour la détection des lésions de petite taille. d- Echo-endoscopie L'écho-endoscopie n'a pas de place dans l'étude de l'envahissement péritonéal et hépatique. I. 3 BIOPSIE I.3.1 Indications La biopsie d'un adénocarcinome pancréatique n'est pas systématique. Elle s'impose dans deux circonstances: − Quand la tumeur n'est pas résécable. Le but est alors de ne pas méconnaître une tumeur dont la nature, le pronostic et la prise en charge pourraient être différents de ceux d’un adénocarcinome. Pour la prescription d’une chimiothérapie palliative ou néoadjuvante, il est préférable d’avoir une confirmation histologique de la lésion. − Quand il existe un doute diagnostic avec une lésion bénigne (adénome, pancréatite chronique,..) qui pourrait bénéficier d’un traitement moins agressif. 1.3.2 Technique et résultats La TDM est la technique de guidage la plus souvent utilisée pour la ponction transcutanée des tumeurs du pancréas (fig. 24). L'écho-endoscopie est la technique de guidage de référence en cas de tumeur de la tête du pancréas (23), en effet le risque de dissémination tumorale est moindre par voie transduodénale que par voie trans-cutanée. La précision diagnostique de la ponction-biopsie des tumeurs pancréatiques est élevée quelle que soit la technique de guidage utilisée. Elle est comprise entre 80 et 90% (10). La principale limite est une lésion de petite taille. II. TUMEURS RARES DU PANCREAS Les autres tumeurs du pancréas exocrine sont rares. La plupart d'entre elles sont exceptionnelles et leur sémiologie radiologique n’est souvent pas spécifique. La biopsie guidée par l'imagerie est ici fondamentale dans l'analyse de ces tumeurs rares. II. 1 LES AUTRESTUMEURS MALIGNES DU PANCREAS II.1.1 Lymphome L'atteinte primitive du pancréas au cours du lymphome est rare. Histologiquement il s'agit toujours d'un lymphome non hodgkinien. Cliniquement il s'agit souvent d'une altération de l'état général et d'un syndrome de masse abdominale (21). En imagerie le lymphome primitif du pancréas se traduit par un syndrome de masse focalisé ou diffus à l'ensemble de la glande pancréatique. Ces lésions sont caractérisées par un retentissement canalaire ou biliaire peu prononcé voir absent même si la lésion siège au niveau de la tête du pancréas. 52 Lorsque la lésion est très volumineuse, des zones de nécrose centrale peuvent être observées en imagerie. La présence, à distance du pancréas, d'adénomégalies rétropéritonéales et ou d'adénomégalies mésentériques est évocateur du diagnostic (21). La réalisation d'une biopsie guidée par l'imagerie en cas de suspicion de lymphome du pancréas est justifiée par l'existence d'une thérapeutique non chirurgicale efficace (chimiothérapie). II. 1. 2 tumeurs Secondaires Les tumeurs pancréatiques secondaires sont observées dans 3 à 10% (7). Il s’agit le plus souvent de localisations secondaires d’un cancer du sein, d’un cancer bronchopulmonaires en particulier les cancers à petites cellules, d’un mélanosarcome, d’un adénocarcinome du rein et de cancers colo-rectaux. Le délai d’apparition des lésions pancréatiques après le diagnostic de la tumeur mère est très variable en fonction de la nature du cancer primitif. Il peut atteindre 10 ans en cas du cancer du rein. Les métastases pancréatiques peuvent se présenter sous trois formes différentes : - une atteinte nodulaire multifocale très évocatrice mais rencontrée dans moins de 20% des cas ; - une atteinte nodulaire unifocale souvent de grande taille qui représente plus de 50% des cas ; - une atteinte diffuse de la glande pancréatique rencontrée dans 15 à 30% des cas (7). Ces lésions sont le plus souvent bien limitées, hétérogènes et sans retentissement canalaire, biliaire ou pancréatique (2). Le caractère hypervascularisé de la lésion est quasi pathognomonique de métastase de cancer rénal s'il existe une notion de néphrectomie dans les antécédents (2). II.1.3 Autres tumeurs malignes Le sarcome, le pancréatoblastome, le plasmocytome et le carcinome à cellules acinaires du pancréas sont exceptionnelles. Leur aspect en imagerie n'est pas spécifique. III. TUMEURS BENIGNES RARES DU PANCREAS III. I Lymphangiome Le lymphangiome kystique est une tumeur bénigne fréquemment rencontrée chez l'enfant en situation cervicale ou axillaire. La localisation pancréatique est très rare. La tumeur se présente comme une formation liquidienne contenant de multiples septas. Le diagnostic différentiel se pose avec les pseudo-kystes et les cystadénomes. III. 2 Lipome Le lipome intra-pancréatique est exceptionnel. Il doit être distingué des transformations lipomateuses du pancréas observées au cours du diabète ou chez le sujet âgé. L'aspect en imagerie est évocateur par la présence d'une densité graisseuse homogène au sein de la lésion. III. 3 Autres tumeurs bénignes L'hémangiome, le schwannome et la maladie de Castelman pancréatique sont exceptionnels et d'aspect non spécifique à l'imagerie. 53 Références : 1. Bolandi GW, O'Malley ME, Saez M et al. Pancreatic-Phase versus portal vein-phase helical CT of the pancreas: optimal temporal window for evaluation of pancreatic adenocarcinoma. 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J Radiol, 2003, 84: 484-496. 55 Figure 1 : Adénocarcinome du corps du Figure 2 : Adénocarcinome de la tête du pancréas en échographie; masse hypoéchogène pancréas en échographie ; masse hypoéchogène de la tête du pancréas (flèche) occasionnant une déformant les contours de la glande (flèche). dilatation du canal de wirsung en amont. Figure 3 : Adénocarcinome de la tête du pancréas en échographie ; dilatation de la voie biliaire principale en amont d’une lésion hypodense (flèche) de la tête du pancréas. Figure 4 : Adénocarcinome de la tête du pancréas en échographie ; dilatation de la voie biliaire principale et des voies biliaires intrahépatiques Figure 5 : Temps pancréatique en TDM ; Figure 6 : Adénocarcinome de la tête du rehaussement maximal du pancréas et simultané pancréas en TDM ; masse hypodense de la tête de l’axe veineux mésentérique et des structures du pancréas (flèche). artérielles. 56 Figure 7 : Adénocarcinome de la tête du Figure 8 : Adénocarcinome de la tête du pancréas en TDM; masse isodense de la tête du pancréas en TDM; dilatation de la voie biliaire pancréas ( flèche) déformant les contours de la principale et du canal pancréatique principal. glande. Figure 9 : Adénocarcinome de la tête du Figure 10 : Adénocarcinome du corps du pancréas en TDM ; dilatation des voies biliaires pancréas en TDM ; dilatation isolée du canal intra-hépatiques. pancréatique principal. Figure 11 : Adénocarcinome de la tête du Figure 12 : Adénocarcinome de la tête du pancréas en TDM ; dilatation bicanalaire. pancréas en TDM; atrophie pancréatique d’amont. 57 Figure 13 : Adénocarcinome du corps du pancréas en échographie; englobement du tronc spléno-mésarraïque par la tumeur avec image d’arrêt sur la lumière du vaisseau . Figure 14 : Adénocarcinome du corps du pancréas en Doppler couleur; envahissement de l’artère splénique visible entourée de part et d’autre par la tumeur. Figure 15 : Adénocarcinome du corps du pancréas en Doppler couleur; contact entre la tumeur et l’artère sur plus de 2 cm signant son très probable envahissement. Figure 16 : Adénocarcinome du corps du pancréas en Doppler couleur; importante circulation collatérale veineuse en rapport avec un envahissement veineux splénique. Figure 17 : Adénocarcinome du corps du Figure 18 : Adénocarcinome de la tête du pancréas en TDM; englobement des artères pancréas en TDM; envahissement de l’artère hépatique et du tronc cœliaque . hépatique et splénique. 58 Figure 19 : Adénocarcinome du corps du Figure 20 : Adénocarcinome du crochet du pancréas en TDM ; circulation veineuse pancréas en TDM; coulées tumorales rétrocollatérale au voisinage de la grande courbure péritonéales englobant les artères rénales. gastrique (flèche), témoignant d’un envahissement de la veine splénique. Figure 21 : Adénocarcinome du crochet du pancréas, en TDM; densification de la graisse autour du tronc cœliaque et de l’artère hépatique témoignant (flèche) de leur envahissement. Figure 22 : Adénocarcinome de la queue du pancréas en TDM; masse hypodense de la queue du pancréas associée à des adénopathies hilaires hypodenses et à une lésion hépatique secondaire. Figure 23 : Adénocarcinome du pancréas en Figure 24 : Adénocarcinome du corps du TDM ; ascite et épaississement péritonéal pancréas ; biopsie trans-gastrique de la tumeur localisé au niveau de la gouttière pariéto-colique sous repérage tomodensitométrique. droite en rapport avec une carcinose péritonéale. 59 IMAGERIE DES TUMEURS KYSTIQUES DU PANCREAS Les tumeurs kystiques du pancréas sont des tumeurs rares puisqu’elles ne représentent que 1% de l’ensemble des tumeurs pancréatiques (3). Cependant, compte tenu des différentes possibilités diagnostiques et des différents traitements que l’on peut proposer, la reconnaissance de ces entités est tout à fait cruciale. La plupart des tumeurs kystiques du pancréas sont des tumeurs épithéliales provenant de la glande exocrine. Ces lésions peuvent parfois comporter au sein de la même tumeur des composantes exocrines et endocrines. C’est la raison pour laquelle la microscopie électronique et les études immuno-histochimiques jouent un rôle important dans la caractérisation tissulaire. I. LES CYSTADENOMES SEREUX Les cystadénomes séreux sont encore appelés cystadénomes microkystiques ou cystadénomes riches en glycogène. Ils sont observés particulièrement chez lez femmes d’âge moyen (8) avec un sexe ratio supérieur à 1.5. Les cystadénomes séreux sont habituellement isolés, leur taille moyenne est de 4 cm et varie de 1.5 à 9 cm. Ils sont rarement symptomatiques, découverts fortuitement dans 5 à 30% des cas (8). Si les symptômes existent, il s’agit le plus souvent de douleurs abdominales (74% des cas), d’amaigrissement (16% des cas). Le retentissement biliaire ou pancréatique est rare (8). I. 1 IMAGERIE DIAGNOSTIQUE a- Radiographie standard La radiographie standard recherchera la présence de calcifications se projetant en regard de l’aire pancréatique, celles-ci s’observent dans environ 38% des cas (4). b- Echographie Si la lésion est composée de kystes inférieurs à 2 mm de diamètre, elle paraît échogène homogène bien limitée. Lorsque les kystes sont plus volumineux, on met en évidence une lésion d’échostructure mixte contenant des zones arrondies anéchogènes allant de quelques millimètres à 20 mm de diamètre séparées par des structures plus échogènes. Au sein de la lésion il peut exister une calcification apparaissant comme une image hyperéchogène avec cône d’ombre postérieur (4, 7, 15, 17). En Doppler, on peut retrouver des signaux vasculaires dans la lésion. c- TDM En TDM, les cystadénomes séreux sont des lésions bien limitées, hypodenses ou isodenses par rapport au pancréas. Les calcifications centrales sont mieux visibles qu’à l’échographie sous la forme d’hyperdensités (fig.1). Après injection intraveineuse de produit de contraste en bolus, il existe soit un rehaussement homogène de la lésion quand les kystes 60 sont millimétriques soit un rehaussement des travées fibreuses (fig. 2) séparant des zones arrondies hypodenses correspondant à des microkystes (4, 6, 7, 15, 17). d- IRM En IRM, le cystadénome séreux est hypointense sur les séquences pondérées en T1 et fortement hyperintense sur les séquences pondérées en T2 en raison des compartiments liquidiens qui le composent (11). Les calcifications centrales sont peu visibles et apparaissent hypointenses sur toutes les séquences. Les septa fibreux sont hypointenses en T2 et se rehaussent d’une façon tardive après injection de gadolinium (10). e- Echo-endoscopie L’aspect typique du cystadénome séreux en écho-endoscopie est celui d’une lésion feuilletée correspondant aux interfaces échographiques des travées fibreuses (2). I. 2 VALEUR DIAGNOSTIQUE DES EXAMENS L’échographie permet un diagnostic correct dans 63 à 78% des cas et la TDM dans 82 à 93% des cas (7, 8). L’IRM semble avoir des performances diagnostiques égales voire supérieures à celles de la TDM et de l’écho-endoscopie (8). Quand tous les arguments sont réunis le diagnostic de cystadénome séreux est évident. Une surveillance seule doit être effectuée en raison de la bénignité de la lésion. Si le diagnostic est douteux une ponction peut être proposée sous écho-endoscopie, ou TDM, comportant une analyse cytologique et un dosage des marqueurs tumoraux. Le taux d’ACE est normalement inférieur à 5 ng/ml. II. CYSTADENOMES MUCINEUX Les tumeurs kystiques mucineuses du pancréas sont des tumeurs bénignes à potentialité maligne ou déjà malignes au moment du diagnostic (cystadénocarcinomes) (16). Elles s’observent plus fréquemment chez les femmes d’âge moyen (8). Les cystadénomes mucineux se localisent préférentiellement au niveau du corps et de la queue du pancréas (70 à 90% des cas) (8). La taille de ces tumeurs varie de 1 à 20 cm, avec une moyenne comprise entre 5 et 6 cm. Les circonstances de diagnostic des cystadénomes mucineux sont superposables à celles observées dans les cystadénomes séreux. Il s'agit le plus souvent de douleurs abdominales (78% des cas). En revanche, les symptômes sont plus fréquents en cas de cystadénocarcinome où l'amaigrissement y est souvent associé (50% des cas). Un ictère s'observe dans un tiers des cas environ (8). II. 1 IMAGERIE DIAGNOSTIQUE 1. Radiographie standard La radiographie standard peut mettre en évidence des calcifications périphériques dans 16% des cas (4). 61 b- Echographie La sémiologie échographique des cystadénocarcinomes est variable. Habituellement ces tumeurs kystiques sont anéchogènes, bien limitées et entourées d'une paroi (fig. 3a). Ces lésions peuvent être uniloculaires ou multiloculaires et contenir des cloisons internes qui séparent les différentes cavités kystiques (7, 15). Le diagnostic est facile quand il s'agit d'une lésion kystique du pancréas et de signes d'extension tumorale comme des métastases ganglionnaires, hépatiques ou un envahissement vasculaire. Le diagnostic est également suspecté lorsque la lésion kystique s'associe à une composante charnue. c- TDM Les lésions kystiques mucineuses du pancréas sont arrondies, bien limitées et hypodenses. Après injection intraveineuse de produit de contraste, il existe un rehaussement de la paroi kystique et des cloisons lorsqu'elles existent (fig. 3b). L'injection de produit de contraste permet d'identifier plus facilement un épaississement nodulaire de la paroi. Le diagnostic est plus difficile quand il existe un épaississement pariétal irrégulier. d- IRM Sur les séquences pondérées en T1, les lésions sont soit hypointenses ou hyperintenses si leur contenu est riche en mucines. Sur les séquences pondérées en T2, les lésions sont fortement hyperintenses (fig. 4). L'IRM est particulièrement intéressante pour la mise en évidence de la prise de contraste de la paroi et des cloisons (10). e- Echo-endoscopie : Le cystadénome mucineux se présente en écho-endoscopie sous forme d'un ou de plusieurs macrokystes anéchogènes contenant ou non des cloisons intra-kystiques. La paroi épaisse est très bien identifiée. II. 2 VALEUR DIAGNOSTIQUE DES EXAMENS Dans une série incluant des cystadénomes séreux et des cystadénomes mucineux, l'échographie a correctement classé les tumeurs mucineuses dans 93% des cas et la TDM dans 95% des cas (7). La difficulté d’un diagnostic de bénignité ou de malignité de certitude justifie la résection chirurgicale systématique de ces lésions. La ponction avec étude des marqueurs tumoraux est surtout indiquée en cas de doute diagnostique (5). III. LES TUMEURS INTRACANALAIRES PAPILLAIRES ET MUCINEUSES DU PANCREAS (TIPMP) Ce sont des tumeurs rares reconnues pour la première fois par Ohashi en 1982 (12). Les critères anciennement établis reposaient sur : 1° une dilatation ectasique des canaux pancréatiques principaux, 2° une sécrétion de mucus épais à partir des canaux, 3° une ampoule de Vater béante contenant du mucus et 4° une tumeur canalaire papillaire sécrétant du mucus. 62 L'analyse de séries plus importantes mettent en évidence une prédominance masculine avec un sex-ratio de 1,5 et un âge moyen de 60 ans. Les lésions sont surtout localisées au niveau de la tête du pancréas (72%), moins souvent au niveau du corps (24%) et rarement au niveau de la queue (4%) (9, 14). La taille moyenne des lésions kystiques canalaires est de 3 cm de diamètre et varie de 0,2 à 12 cm. Les douleurs épigastriques sont le symptôme le plus fréquent (50%). La TIPMP est une lésion dysplasique et précancéreuse. La résection chirurgicale de toutes les zones hyperplasiques et dysplasiques représente le traitement de choix (9, 14). IMAGERIE L'imagerie des TIPMP comprend, d'une part la tumeur elle-même, et d'autre part les conséquences de production de mucine aboutissant à des cavités kystiques ou à une dilatation du canal pancréatique principal. Atteinte du canal principal : L’échographie et la TDM, mettent aisémment en évidence une dilatation diffuse ou segmentaire du canal pancréatique principal, associée dans les cas avancés, à une atrophie parenchymateuse (13, 14). Il est parfois possible d’observer la mucine sous la forme de spot hyperéchogène en échographie ou bien de calcification endocanalaire en TDM, traduisant les dépôts de calcium dans la mucine. Les autres examens vont apporter des arguments supplémentaires. Le cathétérisme rétrograde met en évidence la protrusion de la papille. L'écho-endoscopie ou l'IRM vont rechercher des dilatations minimes associées des canaux secondaires. En IRM, il est particulièrement intéressant d'effectuer des séquences d'imagerie canalaire (wirsungo-IRM) permettant de visualiser la dilatation canalaire sous la forme d'une hyper intensité franche. Sur les séquences pondérées en T1, le signal endocanalaire dépend du contenu protéique des sécrétions (10, 14). Atteinte des canaux secondaires : Cette entité est caractérisée par une dilatation ectasique des canaux secondaires aboutissant à des lésions uni ou multiloculaires à contours lobulés. Ces lésions sont principalement observées dans la tête (fig.5) et dans le processus unciné. Les dilatations dans le corps ou la queue du pancréas sont plus rares (fig. 6) (1, 14). Une lésion localisée à un canal secondaire est difficile à distiguer d’un cystadénome séreux. L'argument définitif est la communication de ces lésions kystiques avec les canaux principaux. Cette communication est facile à mettre en évidence en wirsungo-IRM (fig. 7), en écho-endoscopie et lors de l'opacification rétrograde du canal de Wirsung. Bilan préopératoire : Après l'étape diagnostique, le rôle de l'imagerie est : - de déterminer le siège exact des lésions ; - de rechercher l'existence éventuelle d'une dégénérescence maligne. Ceci peut être difficile surtout quand le carcinome est de petite taille. On s'aidera à la fois des signes directs: mise en évidence d'un arrêt franc sur le canal de Wirsung et d'une 63 masse intra-pancréatique; mais également sur les signes indirects: obstruction biliaire, extension ganglionnaire et vasculaire. IV. AUTRES TUMEURS KYSTIQUES Les autres tumeurs kystiques sont beaucoup plus rares que les tumeurs précédemment décrites. L’adénocarcinome mucineux, le sarcome kystique, la tumeur endocrine kystique, le lymphangiome pancréatique, le tératome kystique et le schwannome kystique. Ces lésions n'ont pas de caractéristique typique à l'imagerie et le diagnostic est fait généralement par l'examen anatomopathologique. V. LESIONS KYSTIQUES NON TUMORALES V. I. Kyste vrai du pancréas Le kyste vrai du pancréas est rare. Elle proviendrait d'une segmentation anormale des canaux primitifs du pancréas. La plupart de ces lésions sont découvertes dans l'enfance. En échographie et en tomodensitométrie, elle représente une masse anéchogène et hypodense sans prise de contraste pariétale. V. II. Polykystose L'atteinte pancréatique au cours d'une polykystose est rare et s'observe dans environ 10% des cas. V. III. Maladie de von Hippel-Lindau L'atteinte du pancréas au cours de la maladie de von Hippel-Lindau n'est pas rare (56% des cas). Les lésions pancréatiques sont habituellement des kystes asymptomatiques. V. IV. Kyste hydatique Le kyste hydatique du pancréas est extrêmement rare. Le diagnostic repose sur l'épidémiologie, la sérologie et éventuellement la présence de calcifications périphériques. VI. CONCLUSION L'imagerie, essentiellement représentée par l'échographie, la TDM et l'IRM, joue un rôle majeur dans le diagnostic et la caractérisation des lésions kystiques du pancréas. Les autres explorations (écho-endoscopie, opacification rétrograde) sont indiquées lorsque la caractérisation d'une lésion kystique est difficile et dans le bilan d'extension des TIPMP. 64 Références : 1. Barbe L, Ponsot P, Vilgrain V et coll. Tumeurs intra-canalaires papillaires mucineuses pancréatiques. Aspects cliniques et morphologiques chez 30 malades. Gastroenterol Clin Biol, 1997, 21 : 278-286 2. Bhutani MS. Role of endoscopic ultrasonography in the diagnosis and treatement of cystic tumors of the pancreas. JOP 2004, 5 (4) : 266-272. 3. Cubilla AL, Fitzgerald P. Cancer of the pancreas (non endocrine) : a suggested morphologic classification. Semin Oncol, 1979, 6 : 285-297. 4. Friedman AC, Lightenstein JE, Dachman AH. Cystis neoplasms of the pancreas. Radiological-Pathological correlation. Radiology, 1983, 149 : 45-50. 5. Hammel P, Levy P, Voitot H et al. Preoperative cyst fluid analysis is useful for the differential diagnosis of cystic lesions of the pancreas. Gastroenterology, 1995, 108 : 1230-1235. 6. Itai Y, Ohhashi K, Furui S et al. Microcystic adenoma of the pancreas : spectrum of computed tomographic findings. J. Comput Assist Tomogr, 1988, 12 ; 797-803. 7. Johnson CD, Stephens DH, Charbonneau JW et al. Cystic pancreatic tumors : CT and sonographic assessment. AJR, 1988, 151 : 1133-1138. 8. Levy M, Levy P, Hammel P et coll. Diagnostic des cystadénomes et cystadénocarcinomes du pancréas : étude de 35 cas. Gastroenterol Clin Biol, 1995, 19 : 189-196. 9. Madura JA, Wiebke EA, Howard TJ et al. Mucing hypersecreting intraductal neoplasms of the pancreas : a precursor to cystic pancreatic malignancies. Surgery 1997, 122 : 786-793. 10. Mergo PJ, Helmberger TK, Buetow PC et al. Pancreatic neoplasms : MR imaging and pathologic correlation. RadioGraphics, 1997, 17 : 281-301. 11. Minami M, Itai Y, Ohtomo K et al. Cyst neoplasms of the pancreas : comparison of MR imaging with CT. Radiology 1989, 171 : 53-56. 12. Ohashi K, Murakami Y, Takekoshi T, et al. Four cases of "mucin-producing" cancer of the pancreas on specific findings of the papilla of Vate. Prog Dig Endos 1982, 20 : 348-351. 13. Procacci C, Graziani R, Bicego E et al. Intraductal mucin-producing tumors of the pancreas : imaging findings. Radiology, 1996, 198 : 249-257. 14. Valette O, Cuilleron M, Debelle L et al. Imagerie des tumeurs intracanalaires papillaires du pancréas : revue de la littérature. J Radiol 2001, 82 : 633-45. 65 15. Vilgrain V, Menu Y, Lorphelin JM, Nahum H. Cystadénomes pancréatiques. Pièges et limites du diagnostic radiologique. J Radio, 1987, 68 : 455-463. 16. Warshaw AL, Compton CC, Lewandrowski K et al. Cystic tumors of the pancreas. New clinical, radiologic and pathologic observations in 67 patients. Ann Surg, 1990, 4 : 432-445. 17. Wolfman NT, Ramquist NA, Karstaedt N, Hopkins MBC. Cystic neoplasms of pancreas : CT and sonography. AJR, 1982, 138 : 37-41. 66 Figure 1 : Cystadénome séreux typique en Figure 2 : Cystadénome séreux typique en TDM sans injection de produit de contraste; lésion TDM avec injection de produit de contraste; hypodense de la tête du pancréas contenant des rehaussement des cloisons intra-kystiques. calcifications (flèche). Figure 3a : Cystadénome mucineux à Figure 3b : Cystadénome mucineux en TDM l’échographie ; lésion kystique homogène de la avec injection de produit de contraste ; formation kystique à paroi propre contenant des cloisons queue du pancréas. rehaussées (flèche). Figure 4 : Cystadénome mucineux bénin à Figure 5 : TIPMP en TDM avec injection ; l’IRM ; la lésion est en fort hypersignal enT2. dilatation des canaux secondaires de la tête du pancréas en « grappe de raisin ». 67 Figure 6 : TIPMP en IRM; visibilité des canaux pancréatiques secondaires dilatés au niveau de la queue du pancréas (flèche) sur une séquence fortement pondérée en T2. Figure 7 : TIPMP sur une séquence de wirsungoIRM ; dilatation des canaux secondaires de la tête (flèche blanche) associée à un nodule hypointense au sein d’une dilatation canalaire (flèche noire). 68 DONNEES DE L'IMAGERIE DANS NOTRE SERIE RESULTATS Le nombre total de patients était de 495, colligés au cours de la période allant du début de l'année 1999 à la fin de l'année 2003. Echographie Cet examen a été réalisé chez 96% de ces patients et a montré une masse pancréatique dans 80,6% des cas. Le siège de la masse était céphalique dans 73% des cas, corporéal dans 6,5% des cas et caudal dans 5,5% des cas. Le diagnostic de siège de la masse a été correctement réalisé à l'échographie dans 87% des tumeurs céphaliques, 50% des tumeurs corporéales, 80% des tumeurs caudales et 75% des tumeurs de l'uncus. La masse était hypoéchogène dans 56,5 % des cas. Sa taille moyenne était de 3 cm avec des extrêmes allant de à cm. La dilatation des voies biliaires était présente dans 68 % de toutes les lésions et 79 % des localisations céphaliques. Il existait une ascite dan 6,3 % des cas, des nodules hépatiques dans 14 % des cas, des adénomégalies dans 10 % des cas. Un envahissement de la veine porte était présent dans 1,7 % des cas et de l'artère mésentérique supérieure dans 2,7 % des cas. TDM Un examen TDM abdominal a été réalisé chez 86% des patients. La technique de réalisation de la TDM était différente d'un centre à l'autre. Le siège de la masse était céphalique dans 70% des cas, corporéal dans 7,7% des cas, caudal dans 5,4% des cas et dans le petit pancréas dans 1% des cas. La TDM était capable de localiser correctement le siège de la lésion dans 92% des lésions céphaliques, 94% des lésions corporéales, 100% des lésions caudales et 100% des tumeurs de l'uncus. La taille de la masse était de 3,18 cm en moyenne avec des extrêmes allant de à cm. Une dilatation des voies biliaires était présente dans 70% des cas de toutes les lésions et dans 80% des tumeurs céphaliques. Il existait des nodules hépatiques dans 16,6% des cas, une ascite dans 6% des cas, des adénomégalies dans 25% des cas. Un envahissement du tronc porte était présent dans 11,3% des cas. L'artère mésentérique supérieure était envahie dans 20% des cas. COMMENTAIRES Quoique cette série rétrospective soit hétérogène du point de vue réalisation et technique des examens, il en ressort des conclusions évidentes : - L'échographie et la TDM étaient les examens le plus souvent réalisés pour l'exploration d'une pathologie pancréatique surtout tumorale. - La visualisation directe de la tumeur pancréatique a été réalisée dans 80% des cas à l'échographie et dans 85% des cas à la TDM. - Le siège de la lésion a été correctement précisé aussi bien par l'échographie que par la TDM pour les tumeurs céphaliques, alors que 50 % des tumeurs corporéales avaient échappé à l'échographie, ce qui concorde avec les données de la littérature. 69 - - La fréquence de la dilatation des voies biliaires présente dans 79 % des cas des tumeurs céphaliques à l'échographie et 82 % des cas en tomodensitométrie avoisine celle de la littérature (86 % des tumeurs céphaliques). L'envahissement vasculaire concernant la veine porte et l'artère mésentérique supérieure était mieux étudié en TDM qu'en écho Doppler. Seulement, il est difficile de confronter les données de la TDM à celles de la chirurgie vu qu'un bon nombre de patients n'a pas été opéré et que le doute sur un envahissement vasculaire en imagerie, en particulier artériel, peut contre-indiquer lui-même une chirurgie curative. Le diagnostic d'adénomégalies a été réalisé plus souvent en TDM qu'à l'échographie mais ni le siège ni l'aspect de ces adénomégalies n’a été précisé. La TDM était légèrement supérieure à l'échographie dans la détection des lésions hépatiques secondaires. La TDM et l'échographie étaient équivalentes dans le diagnostic de l'ascite. L'écho-endoscopie et l'IRM étaient absentes dans cette série quoique leur apport dans les tumeurs pancréatiques ne soit plus à démontrer. 70 LE BILAN D'EXTENSION DE L'ADENOCARCINOME PANCREATIQUE : QUELS EXAMENS DEMANDER ET DANS QUEL ORDRE? Hani M.A, Ben Achour J, Bouasker I, Chaker Y, Miloudi N, Bedoui R, Nouira R, Zoghlami A, Najah N. Service de chirurgie Beau Séjour – Hôpital Charles Nicolle Le développement des nouvelles méthodes d'imagerie au cours de la précédente décennie permet actuellement de réaliser un bilan d'extension de plus en plus précis pour un cancer du pancréas. Cette évaluation précise doit pouvoir faciliter la décision thérapeutique afin de diminuer le taux de laparotomies à visée uniquement exploratrice et réserver la chirurgie aux seuls malades pouvant en tirer bénéfice. Toutefois, les examens complémentaires capables d'évaluer l'extension d'un cancer du pancréas sont nombreux. Leur réalisation systématique pour tous les malades serait irrationnelle et éminemment coûteuse et dès lors une question se pose: quels sont les examens utiles au bilan d'extension d'un cancer du pancréas ? Le but de ce travail est d'essayer d'apporter des réponses à cette question. En effet, les examens stricto sensu "utiles" sont variables en fonction des malades (durée d'évolution, état général, présence de signes physiques évocateurs d'une tumeur avancée, de métastases hépatiques ou de carcinose péritonéale), et des caractéristiques de la tumeur primitive, essentiellement sa localisation au niveau de la tête, du corps ou de la queue du pancréas et sa taille. De ce fait, une stratégie s'impose pour réaliser le bilan d'extension d'un cancer du pancréas privilégiant à chaque fois les examens à haut rendement diagnostique, les moins invasifs et les moins coûteux pouvant faciliter la décision thérapeutique. De plus, ce bilan devra être suffisamment sensible pour ne pas opérer un malade qui ne pourra avoir une intervention à but curatif et suffisamment spécifique pour ne pas le récuser à tort (1). RESULTATS DE NOTRE SERIE Le bilan d’extension loco-régional des carcinomes pancréatiques s’est basé, dans notre série, essentiellement sur les résultats de l’échographie couplée au doppler, et à la tomodensitométrie (TDM) réalisés respectivement chez 96% et 85,7% de nos patients. L’examen écho-endoscopique n’a été réalisé que dans 5,5% des cas. L’échographie a mis en évidence un envahissement de l’axe veineux mésentérico-portal dans 8 cas (1,7%) et de l’artère mésentérique supérieure dans 13 cas (2,7%). La tomodensitométrie a mis en évidence un envahissement de l’axe veineux mésentérico-portal dans 48 cas (11,3%) et de l’artère mésentérique supérieure dans 84 cas (19,8%). La sensibilité de l’échographie dans la détection des extensions retouvées par la TDM est donc de 16,6% pour l’envahissement de l’axe veineux mésentérico portal et de 15,5% pour l’envahissement artériel. L’écho-endoscopie a permis de mettre en évidence un envahissement veineux dans 8 cas (30%) et aucun envahissement artériel. L’examen physique a permis de trouver une adénopathie sus claviculaire gauche dans huit cas. La détection d’une carcinose péritonéale s’est basée sur l’examen physique, l’échographie abdominale, et la tomodensitométrie. Cliniquement, une ascite a été détectée chez 16 malades (3,3%). L’échographie abdominale a mis en évidence une ascite dans 17 cas (4,4%) et la tomodensitométrie a mis en évidence une ascite et/ou des nodules péritonéaux dans 13 cas (3,4%). 71 Les métastases hépatiques ont été détectées par l’échographie et la TDM. L’échographie a permis de détecter 64 cas (13,5%). La TDM a détecté 67 cas (14,1%). Le tableau 1 compare les résultats de l’échographie et de la TDM dans le diagnostic des métastases hépatiques chez les patients chez qui ces examens ont été réalisés simultanément. Les deux examens étaient discordants dans 35 cas soit 48% des 72 cas diagnostiqués par les deux examens simultanément. Les discordances étaient plus fréquentes pour l’échographie (24/72=33,3%) que pour la TDM (11/72=15,3%) (p<10-3). Métastases hépatique échographie Oui Métastases hépatiques TDM Oui NON 37 11 Non Total Total 48 24 317 341 61 328 389 Tableau 1 : Comparaison entre les résultats de l’échographie et de la TDM dans le diagnostic des métastases hépatiques. Les métastases pulmonaires ont été détectées par la radiographie du thorax et/ou par TDM thoracique. La radiographie du thorax systématique a permis de détecter 16 cas de métastases pulmonaires. La TDM thoracique, pratiquée dans seulement 22 cas a permis de détecter 10 cas de métastases pulmonaires. Le faible nombre des TDM thoraciques réalisées ne nous autorise pas à étudier les discordances entre ces deux examens. DISCUSSION Le but du bilan d'extension Une fois le diagnostic de cancer du pancréas retenu, le bilan d'extension va permettre d'évaluer la dissémination tumorale loco-régionale et à distance. Cet inventaire préthérapeutique va permettre de classer les malades en deux groupes: le premier groupe est celui des malades justiciables d'une chirurgie d'exérèse à visée curative. Le second groupe est celui des malades non justiciables d'une exérèse à visée curative pour lesquels, seul un traitement palliatif peut être proposé. Dans ce groupe, le bilan d'extension va permettre d'orienter le geste thérapeutique soit vers la chirurgie, soit vers l'endoscopie et/ou la radiologie interventionnelle(s). En dehors de ces deux groupes, il en existe un troisième beaucoup plus restreint correspondant aux tumeurs localement avancées, à priori non résécables, mais pour lesquelles une radio-chimiothérapie néo-adjuvante a été réalisée en vue d'une résection secondaire (2). Dans ce groupe, le bilan d'extension après radio-chimiothérapie néo-adjuvante va permettre d'en évaluer les résultats avant d'envisager une résection à visée curative ou un traitement palliatif (2). Les moyens actuels du bilan d'extension Pendant longtemps, seules l'échographie abdominale et la tomodensitométrie conventionnelle en mode séquentiel étaient à la base du bilan d'extension d'un cancer du pancréas. Actuellement, les avancées techniques ont permis un véritable bond en avant avec l'arrivée de nouveaux examens. La tomodensitométrie en mode hélicoïdal permet de prédire de la non résécabilité dans pratiquement 100% des cas en plus de ses possibilités de reconstructions anatomiques tridimensionnelles par l'intermédiaire de coupes très fines de 2 mm donnant des 72 images beaucoup plus précises que la tomodensitométrie en mode séquentiel (3, 4). L'échoendoscopie a également permis un essor considérable dans l'exploration de la pathologie pancréatique. Un échographe miniaturisé situé à l'extrémité d'un fibroscope à vision foroblique va permettre d'explorer le pancréas à travers l'estomac et la deuxième portion du duodénum. Ainsi localisé au plus près de la glande, et avec une profondeur de pénétration des tissus par les ultrasons de 5 à 10 cm, cet appareil va permettre d'apprécier l'extension locorégionale ganglionnaire, vasculaire et aux organes de voisinage. Quant aux performances de l'IRM dans le bilan d'extension d'un cancer du pancréas, elles sont similaires à celles de la tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec, de surcroît, une interprétation plus difficile des images (3). Le seul avantage de cet examen reste l'absence d'injection de produit de contraste utile chez les malades allergiques aux dérivés iodés (3). Un examen encore plus récent est la Tomographie à Emission de Positrons (PET) associée à l'injection de 18F- 2- fluoro-2- deoxyD-glucose (FDG). Le principe de cet examen repose sur l'augmentation du métabolisme du glucose dans les cellules cancéreuses et ce produit, analogue au glucose s'accumule dans les cellules cancéreuses pancréatiques en quantité supérieure au reste des cellules ce qui permet de différencier le tissu tumoral des tissus environnants (4). Néanmoins, les troubles du métabolisme du glucose observés dans le diabète qui est souvent associé au cancer du pancréas peuvent réduire la sensibilité de cet examen qui est encore en début d'évaluation (5). Plus classique est la laparoscopie dans le cadre du bilan d'extension d'un cancer du pancréas. Cet examen, nécessitant une anesthésie générale est réalisé comme ultime étape du bilan d'extension peut être couplé à l'écho-laparoscopie afin de mettre en évidence des métastases hépatiques ou des nodules de carcinose péritonéale de petite taille ayant échappé aux examens d'imagerie dont la biopsie et l'examen extemporané vont permettre d'adapter au mieux le geste thérapeutique (6). La laparoscopie peut également permettre le prélèvement de liquide de lavage péritonéal afin de mettre en évidence des cellules tumorales (7). Enfin, nous citerons la fibroscopie digestive et le transit oeso-gastro-duodénal qui sont réalisés en cas de sténose digestive haute laissant suspecter un envahissement du duodénum ou plus rarement de l'estomac et l'artériographie qui n'a actuellement pratiquement plus de place dans le bilan d'extension d'un cancer du pancréas. L'évaluation de l'extension d'un cancer du pancréas Le bilan d'extension d'un cancer du pancréas va s'attacher à déterminer la dissémination tumorale loco-régionale et à distance. Sur le plan loco-régional, cette dissémination intéresse essentiellement les ganglions péri-pancréatiques, l'axe veineux mésentérico-portal, l'artère mésentérique supérieure, le tronc coeliaque ou l'artère splénique et enfin les structures digestives adjacentes au pancréas essentiellement le deuxième duodénum et l'estomac, mais également la racine du mésocôlon transverse ou du mésentère, le hile de la rate ou la surrénale gauche. A distance, la dissémination tumorale peut se faire par voie lymphatique et atteindre les ganglions situés à distance de la tumeur appelés ganglions du troisième relais de localisation coeliaque, inter-aortico-cave, sous rénale gauche ou para-rénale gauche. La dissémination par voie hématogène va être à l'origine de métastases à distance atteignant par ordre de fréquence le foie, les poumons, les surrénales, l'os, le cerveau et la peau. Par voie péritonéale, c'est l'atteinte du péritoine pré-pancréatique qui va être le point d'essaimage des métastases péritonéales. Pour rester classiques, nous étudierons d'abord l'extension locorégionale puis l'extension à distance. 73 Le bilan d'extension loco-régionale L'extension ganglionnaire A l'échographie, les adénopathies métastatiques se présentent comme des masses habituellement hypoéchogènes et polylobées. Cependant leur mise en évidence par cet examen reste difficile du fait de l'interposition des gaz digestifs dans près de 15% des examens (8) si bien que la sensibilité de cet examen est inférieure à 20% pour l'extension ganglionnaire métastatique (9). La tomodensitométrie en mode séquentiel est également un examen peu performant pour l'évaluation de l'extension ganglionnaire. Les ganglions envahis apparaissent sous forme de masses arrondies hypodenses qui ne peuvent êtres détectées que si leur taille dépasse les 2 centimètres (10). Même en mode hélicoïdal, la tomodensitométrie reste peu performante avec une sensibilité comprise entre 54 et 77% pour la détection de métastases ganglionnaires loco-régionales (11, 12). Il en est de même pour l'IRM dont la sensibilité pour le diagnostic de métastases ganglionnaires est de 76% (13). Actuellement l'écho-endoscopie constitue l'examen le plus performant pour l'évaluation de l'extension ganglionnaire (14). Les ganglions envahis apparaissent sous forme de masses hypoéchogènes, arrondies, bien limitées et de taille supérieure ou égale à 5 mm. La précision diagnostique de cet examen varie de 70 à 84% rendant cette technique supérieure à toutes les autres techniques d'imagerie (9, 10, 15, 16). L'extension vasculaire L'extension tumorale vasculaire reste souvent mal appréciée par l'échographie du fait de l'interposition des gaz digestifs. La sensibilité de cet examen reste inférieure à 40% (9). Lorsqu'elle est combinée au Doppler, la précision diagnostique de l'envahissement vasculaire peut être améliorée (8), en particulier pour l'envahissement artériel avec une sensibilité de 60% et une spécificité de 93% (17). Cette technique non invasive n'a pas été assez évaluée et des études complémentaires pourraient mieux préciser son rôle dans l'appréciation de l'extension vasculaire. La tomodensitométrie en mode séquentiel est également un examen peu sensible dans l'évaluation de l'extension vasculaire avec une sensibilité de 36% (9). Cependant, lorsque l'acquisition des images au cours de cet examen est adaptée à l'étude des vaisseaux pancréatiques, réalisant une angiographie, cette sensibilité peut atteindre 88% (7). Cet examen, encore de pratique courante en Tunisie a été détrôné par la tomodensitométrie en mode hélicoïdal qui permet une meilleure appréciation de l'extension vasculaire. Les critères formels d'envahissement veineux sont la présence d'une thrombose (Fig.1)ou la diminution du calibre du vaisseau (Fig.2)(18). 74 Figure 1: Tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec reconstruction en coupe coronale. Thrombose de la veine porte, de la veine mésentérique supérieure et de la veine splénique (pointes de flèches) avec infiltration tumorale du corps du pancréas (flèche). A B Figure 2: Tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec reconstruction en coupe coronale. A: Sténose de la veine porte (flèche) due à l'engainement par la tumeur pancréatique. B: Masse de la tête du pancréas (flèche) comprimant et envahissant la veine porte. D'autres critères d'envahissement ont été étudiés prospectivement par Lu utilisant une échelle de 0 à 4 pour la gradation de l'englobement circonférentiel de la veine mésentérique supérieure, même en absence de sténose (Fig.3). Le grade 1 correspond à l'englobement de la veine sur moins du quart de sa circonférence alors que le grade 4 correspond à l'englobement de la veine sur toute sa circonférence (19). 75 A B Figure 3: Tomodensitométrie en mode hélicoïdal. A: Petite tumeur de la tête du pancréas (flèche) se développant contre la veine mésentérique supérieure (pointe de flèche blanche). Le contact avec la veine intéresse moins de la moitié de la circonférence: grade 2 de la classification de Lu. B: Tumeur de l'uncus pancréatique (flèche) envahissant la veine mésentérique supérieure. Le contact tumoral avec la veine (pointes de flèches blanches) est supérieur à la moitié de sa circonférence. En plus de ces signes directs d'envahissement veineux, il existe des signes indirects représentés par le développement d'une circulation veineuse collatérale péri-pancréatique en cas d'envahissement de la veine mésentérique supérieure ou péri-gastrique en cas d'envahissement de la veine splénique (Fig.4)(11). A B Figure 4: Tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec reconstruction en coupe coronale. A: Tumeur du corps et de la queue du pancréas avec envahissement de la veine splénique (flèche). B: Circulation veineuse collatérale péri-gastrique secondaire à l'occlusion de la veine splénique. Quant à l'envahissement artériel (Fig 5 et 6), les mêmes critères d'englobement circonférentiel du vaisseau définis par Lu peuvent être appliqués mais cette classification reste discutée par Nakayama car la présence de tissus fibreux ou inflammatoires entourant les artères reste rare rendant l'utilisation de cette classification moins performante pour l'évaluation de l'extension 76 artérielle (20). C'est pour cela que Horton préfère plutôt se baser sur les modifications de calibre vasculaire et des tissus mous péri-vasculaires après reconstruction (21). Figure 5: Tomodensitométrie en mode hélicoïdal montrant une tumeur de la tête du pancréas (Flèches droites) envahissant l'artère mésentérique supérieure (flèche courbe) et l'artère hépatique (pointe de flèche) Figure 6: Tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec reconstruction sagittale révélant une masse pancréatique (flèche) se développant entre le tronc coeliaque et l'artère mésentérique supérieure dont le calibre est réduit (pointe de flèche). Quoiqu'il en soit, la sensibilité de la tomodensitométrie en mode hélicoïdal dans l'évaluation de l'extension vasculaire aussi bien veineuse que artérielle est comprise entre 75 et 100% (12, 22-24), alors que la spécificité est supérieure ou égale à 90% dans certaines études (12, 25, 26), voire même de 100% dans d'autres études (18, 23, 24). De ce fait, avec une sensibilité et une spécificité de près de 100%, la tomodensitométrie en mode hélicoïdal peut permettre une bonne appréciation de l'extension vasculaire, en particulier artérielle (11) qui constitue classiquement une contre-indication à une exérèse du fait des difficultés de reconstruction artérielle et de la faible survie à distance (27). Par contre, si la tomodensitométrie en mode hélicoïdal ne diagnostique pas un envahissement veineux limité, l'enjeu est moins important puisqu'il reste toujours possible de réaliser une résection veineuse avec la pancréatectomie sans en compromettre les résultats (28). La spécificité proche de 100% permet également d'éviter toute perte de chance aux malades ayant une lésion potentiellement résécable (7). En ce qui concerne l'IRM, elle ne semble pas supérieure à la tomodensitométrie en mode hélicoïdal pour la détection de l'extension vasculaire (25). Sa sensibilité a été évaluée à 83% et sa spécificité à 96% chez 34 malades vérifiés chirurgicalement (13) et sa précision 77 diagnostique à 90% (29). En écho-endoscopie, la précision diagnostique de l'envahissement vasculaire peut atteindre 91% (30). Cependant la mise en évidence d'un envahissement mésentérico-portal semble plus simple et plus fiable que celle de l'envahissement artériel (31) et ceci serait en rapport avec la taille tumorale qui, lorsqu'elle dépasse les 4 cm, a tendance à éloigner le transducteur des vaisseaux (32). Le critère formel d'envahissement en échoendoscopie est la présence d'un thrombus dans l'axe mésentérico-portal mais d'autres critères peuvent suggérer cet envahissement : Une disparition du liseré hyperéchogène entre la tumeur et la veine porte avec une sensibilité de 78% et une spécificité de 79% ou encore une irrégularité de la paroi de la veine porte avec une sensibilité de 60% et une spécificité de 100% (33). Quoiqu'il en soit, et d'une façon globale, la spécificité de l'écho-endoscopie varie actuellement entre 67 et 97% (24, 31) faisant que l'évaluation par cet examen seul peut ne pas faire porter l'indication de résection pancréatique chez un malade dont la tumeur est en fait résécable. Enfin, l'ultime examen pour apprécier l'extension vasculaire est la laparoscopie couplée à l'écho-laparoscopie. Sa sensibilité varie de 67 à 92% (34, 35) ce qui laisse penser qu'elle pourrait diminuer le taux de résécabilité des tumeurs initialement jugées résécables. En fait, d'après une étude récente portant sur 297 malades présentant une tumeur péri-ampullaire, elle n'a permis de bien classer après laparotomie que 20 malades sur 39 (51%) jugés non résécables et 145 malades sur 208 (69%) jugés résécables (6). En plus, cet examen étant coûteux et associé à une prolongation de la durée moyenne d'hospitalisation de 4,3 jours dans cette étude, les auteurs ont conclu à l'absence de réel bénéfice de cet examen. L'extension au duodénum et à l'estomac Elle survient dans les tumeurs évoluées et se traduit cliniquement par un syndrome de sténose digestive haute associé à des troubles ioniques en cas d'envahissement duodénal ou prépylorique. Cet envahissement sera apprécié par l'endoscopie digestive haute et confirmé par des biopsies. Le transit oeso-gastro-duodénal autrefois largement pratiqué n'est actuellement plus d'aucune utilité avec l'avènement de la tomodensitométrie en mode hélicoïdal (7). Le bilan d'extension à distance L'extension métastatique hépatique Les métastases hépatiques peuvent être uniques ou multiples, et apparaissent à l'échographie sous forme d'images d'échogénicité variable, habituellement hypoéchogènes qui entraînent des modifications des contours hépatiques lorsqu'elles sont périphériques. Elles sont faciles à individualiser lorsqu'elles sont de grande taille mais dans les cancers du pancréas, il s'agit le plus souvent de petites métastases de l'ordre du centimètre difficiles à mettre en évidence du fait de leur taille et de la dilatation associée des voies biliaires (7). Ainsi, lorsque l'échographie ne montre pas de métastases hépatiques, on en découvre chez 1 malade sur 5 au cours de la laparotomie (7). La tomodensitométrie en mode séquentiel avec injection de produit de contraste permet également de détecter la présence de métastases hépatiques. Elles apparaissent bien limitées et hypodenses et sont faciles à diagnostiquer lorsqu'elles siègent en plein parenchyme hépatique alors que leur diagnostic est plus difficile lorsqu'elles sont périphériques. Toutefois, les performances de la tomodensitométrie en mode séquentiel ne dépassent guère celles de l'échographie (7). Actuellement, la tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec prise de clichés au temps portal permet le diagnostic de métastases hépatiques même de petite taille de l'ordre du centimètre avec une sensibilité de 75 à 91% (12, 22) et une spécificité de 86% (22). Le taux de métastases hépatiques méconnues par la tomodensitométrie en mode hélicoïdal chez les malades ayant une tumeur potentiellement résécable varie de 7 à 16% (12, 24). Les résultats de l'IRM sont à peu près similaires à ceux 78 de la tomodensitométrie en mode hélicoïdal avec une sensibilité de 82% et une spécificité de 100% mais pour l'ensemble des tumeurs périampullaires (13). La laparoscopie seule ou couplée à l'écho-laparoscopie peut également être proposée pour la détection des métastases hépatiques non visibles par l'imagerie et leur biopsie pour un diagnostic de certitude mais les progrès actuels de la tomodensitométrie en mode hélicoïdal en limitent l'intérêt (7). De plus, les divers travaux ayant évalué la laparoscopie seule ou associée à l'écho-laparoscopie sont critiquables du point de vue de l'inclusion des malades malgré leurs bons résultats avec une sensibilité de 93 à 97% et une spécificité de 100% en cas de preuve histologique (34-37). L'extension métastatique péritonéale Dans ce cas, l'échographie va montrer une ascite isolée ou plus rarement des nodules de carcinose péritonéale qui peuvent être détectables lorsque leur taille est supérieure à 2 cm. Malgré les performances indiscutables de l'échographie pour détecter un épanchement intrapéritonéal, cet examen reste peu performant pour le diagnostic de carcinose péritonéale. Lorsque l'échographie ne laisse pas suspecter de carcinose péritonéale, elle s'avère présente en per-opératoire chez 1 malade sur 10 (7). Les performances de la tomodensitométrie en mode séquentiel sont à peu prés similaires a celles de l'échographie. Le gain de résolution de la tomodensitométrie en mode hélicoïdal donne une meilleure précision pour le diagnostic de carcinose péritonéale. Celle-ci est n'est découverte que dans 6 à 7% des cas en per-opératoire lorsque la tomodensitométrie en mode hélicoïdal ne la suspecte pas (23, 24). Quant au rôle de l'IRM dans le diagnostic de la carcinose péritonéale, il semble qu'il n'ait pas été étudié car nous n'en avons pas trouvé trace dans la limite de notre recherche bibliographique. Enfin, la laparoscopie peut être utile pour le diagnostic de carcinose péritonéale en particulier chez les malades présentant une ascite isolée et chez qui des nodules tumoraux de petite taille n'ont pas été visualisés à la tomodensitométrie en mode hélicoïdal. A ce titre, la laparoscopie a permis de découvrir des métastases hépatiques ou péritonéales chez 30% des malades évalués par tomodensitométrie en mode séquentiel et 15% des malades évalués par tomodensitométrie en mode hélicoïdal (38). Enfin la laparoscopie permet également de réaliser une cytologie du liquide de lavage péritonéal très utile en absence de nodules évidents de carcinose. La positivité de cet examen est corrélée à la présence de métastases à distance (39). L'extension métastatique pulmonaire Elle est rapidement suspectée par la radiographie du thorax qui sera au besoin complétée par une tomodensitométrie thoracique. Le diagnostic de certitude de métastase pulmonaire reste anatomo-pathologique après biopsie per-cutanée sous contrôle tomodensitométrique. Néanmoins, ce geste sera réservé aux suspicions de métastases pulmonaires isolées, chez un malade ayant une tumeur présentant tous les critères de résécabilité avec un bilan d'extension loco-régional et à distance strictement négatif. CONCLUSION Les examens à faire dans le cadre du bilan d'extension sont nombreux. Seule leur utilisation raisonnable en usant autant que faire se peut des examens les moins invasifs peut permettre un bilan d'extension précis aux moindres frais aussi bien pour le malade que pour la communauté. Dans la majorité des cas, l'échographie et la tomodensitométrie abdominale en mode séquentiel et à fortiori en mode hélicoïdal peuvent suffire à contre-indiquer une résection à visée curative en cas de métastases hépatiques, de ganglions du troisième relais envahis ou d'envahissement vasculaire évident. Lorsqu'on ne dispose pas de 79 tomodensitométrie en mode hélicoïdal, et que la tomodensitométrie en mode séquentiel laisse suspecter un envahissement ganglionnaire ou vasculaire, la place est à l'écho-endoscopie tout en sachant que cet examen est moins performant pour l'étude de l'envahissement artériel par rapport à l'envahissement veineux. L'IRM a pour le moment peu de place en Tunisie dans le bilan d'extension d'un cancer du pancréas puisqu'elle est peu disponible, plus coûteuse et qu'elle n'apporte pas de réel bénéfice par rapport à la tomodensitométrie en mode hélicoïdal ou à l'association tomodensitométrie en mode séquentiel et écho-endoscopie. Quant à la laparoscopie, elle devrait être réservée aux seuls malades présentant une tumeur à priori résécable mais pour lesquels la suspicion de diffusion métastatique à distance est forte en particulier en cas d'ascite isolée. REFERENCES 1- Lévy P, Boudet MJ, Zins M, Gayet B. 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Une lymphadénectomie plus ou moins étendue du pédicule hépatique, de la région coeliaque, du pédicule mésentérique supérieur, voire même de la région aortico-cave est nécessaire en complément de l’exérèse viscérale. Selon Child (1943), le rétablissement de la continuité se fait sur la première anse jéjunale selon l’ordre suivant : pancréas puis voie biliaire puis estomac. Il s’agit d’une intervention difficile à cause de plusieurs facteurs notamment : - le terrain dénutri par l’affection néoplasique, ce qui favorise surtout le retard de cicatrisation ; - la nature même du tissu pancréatique qui est fragile, ce qui favorise le lâchage anastomotique en postopératoire ; - les complications vasculaires du fait de la complexité et de l’étroitesse des rapports vasculaires d’une part, et des thrombopathies secondaires à la rétention biliaire d’autre part. De nombreuses variantes dans l’étendue de l’exérèse et les modalités de rétablissement de la continuité pancréatique, biliaire et digestive sont rapportées (1). Nous exposerons d’abord l’intervention de Whipple (1935) car c’est la technique la plus répandue et la plus complète. Nous envisagerons ensuite les principales variantes techniques. A – L’INTERVENTION DE WHIPPLE 1 – Installation et voies d’abord : Le malade est installé en décubitus dorsal, les bras en croix. Le champ opératoire doit être large. La voie d’abord est soit une incision médiane sus et sous ombilicale, soit une incision bisouscostale. Le choix entre ces deux incisions est fonction des habitudes de l’opérateur mais surtout de la configuration de l’opéré. L’incision transversale bi sous costale est souvent préférée chez les sujets obèses à base thoracique large avec un angle xypho-costal obtus. L’incision médiane est réservée aux sujets longilignes. 2 – Exploration et évaluation de la résécabilité : Ce temps a pour but de juger les possibilités techniques et l’utilité d’un éventuel geste d’exérèse carcinologique. 84 a - L’exploration peropératoire Elle est conduite de manière centripète pour s’approcher progressivement de la tumeur. Elle comporte ainsi: - la recherche de métastases hépatiques par l’inspection et la palpation du foie, voire par l’échographie peropératoire. - la recherche de nodules métastatiques péritonéaux notamment au niveau des coupoles diaphragmatiques, du grand épiploon, des mésos, et du cul de sac de Douglas. - l’effondrement du ligament gastrohépatique permettant l’exploration du pédicule hépatique et la recherche d’adénopathies coeliaques et inter-aorticocaves. - l’exploration du pédicule mésentérique supérieur et la recherche d’adénopathies suspectes après décollement des premiers centimètres du jéjunum. Lorsqu’il existe des métastases hépatiques ou péritonéales, l’exérèse pancréatique doit être récusée. La présence d’un envahissement ganglionnaire histologiquement confirmé ne constitue pour la plupart des auteurs une contre indication à la DPC que s’il s’agit d’adénopathie du deuxième ou du troisième relais (2). b - Evaluation de la résécabilité de la tumeur : L’évaluation des possibilités techniques d’exérèse constitue un temps opératoire capital. Elle comporte trois temps fondamentaux : - un décollement coloépiploïque complet et un abaissement de l’angle colique droit donnant accès à l’arrière cavité des épiploons et permettant l’exploration du mésocolon transverse, des ganglions du pédicule mésentérique, de l’isthme et du corps pancréatiques. - un décollement du bloc duodéno-pancréatique ou manœuvre de Kocher. Il commence par une incision du péritoine pariéto-duodénal, parallèlement au deuxième duodénum en regard de sa partie moyenne. Il sera ensuite prolongé vers le haut jusqu’au niveau du bord inférieur du hiatus de Winslow, avec section du ligament porto-cave qui est toujours avasculaire, et vers le bas jusqu’au genu inférius. Le bloc duodéno-pancréatique peut alors être progressivement décollé du plan postérieur où se trouvent la veine cave inférieure, la veine génitale, l’aorte et les veines rénales. Cette manœuvre se fait facilement en l’absence d’envahissement tumoral. Ce décollement doit être poussé jusqu’au bord gauche de l’aorte. La manœuvre de Kocher renseigne rapidement sur une éventuelle infiltration néoplasique de l’espace rétro-péritonéal. Elle permet une première appréciation de l’extension tumorale à la veine porte ou aux vaisseaux mésentériques supérieurs. La fixation du processus unciforme aux vaisseaux mésentériques ou à la veine porte est incompatible avec une exérèse carcinologique. - le clivage entre la face antérieure de l’axe mésentéricoporte et la face postérieure du pancréas. C’est un temps capital et aucune décision d’exérèse ne doit être prise sans être sûre de l’absence d’infiltration néoplasique à ce niveau. Cette exploration se fait en longeant la face antérieure du troisième duodénum de droite à gauche et en venant au contact de la veine mésentérique supérieure. Après avoir dégagé cette veine du tissu celluleux qui l’entoure commence l’exploration de l’axe mésentérico-porte. Elle consiste à disséquer progressivement de bas en haut la face postérieure du pancréas en passant contre la face antérieure de la veine mésentérique supérieure. Trois situations de difficulté croissante peuvent se présenter. Soit le clivage est facile, il n’y a aucune adhérence entre l’isthme et la face antérieure de l’axe mésentérico-porte. Soit le clivage est difficile en raison d’adhérences plus ou moins serrées entre le pancréas et l’axe 85 mésentérico-porte, la dissection doit alors se faire pas à pas sous contrôle permanent de la vue. Soit enfin, le clivage est impossible du fait d’une infiltration néoplasique étendue à l’axe mésentérico-porte et cette situation constitue pour la plus part des auteurs une contre indication à l’exérèse (2). 3 – L’exérèse duodéno-pancréatique : Les différents temps de l’exérèse duodéno-pancréatique se chevauchent et leur ordre dépend du choix de l’opérateur. Dans un but purement diadactique toutefois ils vont être séparés en trois temps : supérieur, inférieur et moyen (3). Le temps supérieur comporte la section de l’estomac, la ligature des artères pylorique et gastro-duodénale, et la section de la voie biliaire. Le temps inférieur est celui de la section du jéjunum et du décroissement rétromésentérique. Enfin le temps moyen comprend la section du pancréas et de la lame rétroportale. a - Le temps supérieur : La résection gastrique : L’estomac est sectionné manuellement ou à la pince mécanique à la jonction du tiers inférieur et des deux tiers supérieurs après avoir réalisé une gastrolyse de la grande et de la petite courbure gastriques (certains auteurs réalisent une vagotomie tronculaire double associée à l’antrectomie). L’estomac proximal est refoulé vers le haut et la gauche. La dissection et ligature des artères gastro-duodénale et pylorique : L’estomac distal, est rabattu vers la droite ce qui laisse apparaître l’artère hépatique, artère de gros calibre qui chemine le long du bord supérieur du corps et de la tête du pancréas. La mise de cette artère sur lacs facilite sa dissection sur toute sa longueur et la résection du tissu cellulo-ganglionnaire environnant. L’artère pylorique est sectionnée à son origine. Elle naît habituellement de manière distale par rapport à l’artère gastro-duodénale, mais peut être en situation proximale. L’artère hépatique commune se divise 1 cm au dessus du bord supérieur du premier duodénum pour donner naissance à la gastro-duodénale. Cette artère est souvent très courte et doit être bien individualisée avant sa ligature et sa section qui devront porter le plus à distance possible de l’artère hépatique. La section de la voie biliaire principale : On réalise une cholécystectomie puis la voie biliaire principale est sectionnée immédiatement au dessus de l’abouchement du canal cystique. Une dissection du pédicule hépatique est ensuite réalisée de haut en bas vers le duodénum enlevant tout le tissu cellulolymphatique qui entoure le tronc porte. b - Le temps inférieur : La section du jéjunum : Le mésocolon et le côlon transverse sont relevés et l’intestin est refoulé vers la droite, exposant l’angle duodéno-jéjunal et le muscle de Treitz. Avant la libération de l’angle duodéno-jéjunal, une attention particulière doit être portée à la vascularisation de ce segment, car ce geste expose à des incidents du fait de la proximité de l’axe mésentérique supérieur et de nombreux vaisseaux qu’il émet ou reçoit. La variété de disposition vasculaire qui comporte le plus de risque est celle qui comporte un tronc artériel commun entre la première anse jéjunale et une artère pancréatico- 86 duodénale inférieure. Il faut dans ce cas faire porter la section jéjunale à 10 cm de l’angle de Treitz. L’anse jéjunale sous jacente bien qu’étant quelquefois vascularisée à partir d’une artère pancréatique, ne court aucun risque d’ischémie du fait de l’existence constante d’une arcade bordante avec les artères de la deuxième anse jéjunale. La libération de l’angle de Treitz commence par l’incision du péritoine le long du bord gauche du quatrième duodénum, puis la section du muscle de Treitz. La section du jéjunum porte habituellement au niveau de la partie moyenne de la première anse. Elle peut être réalisée par la pince à sutures mécaniques GIA. Le décroisement rétro mésentérique : Le décroisement consiste à faire passer la première anse jéjunale, le quatrième duodénum et la partie gauche du troisième duodénum à droite du pédicule mésentérique supérieur. Cette manœuvre est facilitée par une traction exercée sur des fils repères placés sur la tranche proximale de la première anse et passés sous le pédicule mésentérique. Une traction vers la droite permet de voire les différents vaisseaux qui se rendent au pédicule mésentérique et de les lier les uns après les autres. c - Le temps moyen : La section du pancréas : Elle se fait au niveau de l’isthme à gauche du pédicule mésentérique supérieur. Certains la réalisent au bistouri après protection par une lame métallique, de la face antérieure de l’axe mésentéricoporte. D’autres passent un lacs sous le pancréas qui permet de soulever la glande et facilite sa section. Après avoir repéré le canal de Wirsung, on réalise une hémostase des petits vaisseaux par ligature appuyée. Un point de traction placé au niveau du bord supérieur du pancréas caudal soulève le pancréas gauche et permet de libérer sa face postérieure sur environ 2 cm. Une traction sur des pinces de Babcock placées sur la tranche droite du pancréas facilitera la ligature des petites veines qui arriment la tête du pancréas au bord droit de la veine porte. C’est à ce moment de l’acte opératoire, et malgré une exploration per opératoire rassurante, que l’on se rend compte quelquefois que la tumeur infiltre la paroi de la veine porte. Certains abandonnent une pastille tumorale sur la veine et l’intervention est alors palliative ; d’autres appliquent un clamp de Satinsky sur le bord latéral de la veine et résèquent une pastille de paroi veineuse ; d’autres résèquent une courte portion de la veine porte et rétablissent la continuité par une anastomose termino terminale. La section de la lame rétroportale et la libération du pancréas rétro-veineux : La libération du pancréas rétro-veineux, c’est à dire du processus unciforme, nécessite la section de la lame rétroportale. Ce geste nécessite au préalable la section des veines pancréatico-duodénales postérieures supérieure et inférieure, ainsi que des petites veines du processus unciforme. Cette section libère le petit pancréas et permet de faire basculer vers la gauche, et au delà de l’artère mésentérique, l’ensemble du tronc mésentérico-porte grâce à deux lacs passés l’un au dessus l’autre au dessous de la veine splénique. L’intérêt de cette manœuvre est de faire apparaître la face antérieure de la lame rétro-portale dans sa totalité. Celle-ci peut alors être sectionnée de bas en haut. 4 – Rétablissement de la continuité pancréaticobiliodigestive : De très nombreux procédés ont été décrits pour rétablir la continuité digestive. Le plus commun est celui de Child où sont successivement remis en circuit sur l’anse jéjunale, le 87 pancréas, la voie biliaire et l’estomac. Ce circuit est simple et assure les impératifs physiologiques qui imposent d’une part un mélange rapide des sécrétions biliaires et pancréatiques et d’autre part la neutralisation de l’acidité gastrique résiduelle par le flux alcalin duodéno-pancréatique (4). a - L’anastomose pancréaticojéjunale : L’anastomose pancréaticojéjunale est effectuée en premier. C’est la plus délicate. Elle porte sur la première ou la deuxième anse jéjunale qui doit être bien vascularisée et arriver sans traction au contact du moignon pancréatique. Dans la technique de Child, elle est de type termino-terminal. Le diamètre du moignon pancréatique s’adapte en général à celui de l’intestin. Au cas contraire plutôt qu’une recoupe pancréatique permettant de réduire la discordance de calibre, on peut fondre le bord antimésentérique sur 1 à 2 cm pour agrandir le calibre du grêle. Souvent le canal de Wirsung est très proche de la paroi postérieure et risque de ce fait d’être pris dans l’anastomose. Dans ce cas on peut recentrer le Wirsung en reportant vers la gauche la section pancréatique. Lorsque le canal de Wirsung est dilaté, il ne court aucun risque pendant la réalisation de l’anastomose. Lorsqu’il est rétréci, on peut protéger sa lumière en y introduisant un petit tube en polyéthylène qui sera enlevé en fin d’exécution de l’anastomose. L’anastomose est effectuée en un seul plan par des points séparés de fil résorbable fin espacés de 3 mm, mordant 3 à 5 mm sur la tranche pancréatique et restant extra- muqueux sur le jéjunum. Les points de la partie moyenne du mur postérieur s’appuient en plus sur le canal de Wirsung. L’anastomose pancréaticojéjunale est de réalisation plus facile en cas de tumeur de la tête du pancréas qu’en cas de tumeur Oddienne du fait de la présence d’une pancréatite d’amont rendant le tissu pancréatique plus scléreux et donc mois friable. L’anastomose pancréaticojéjunale peut être renforcée par une invagination obtenue par des points séparés prenant le tissu pancréatique à 1,5 cm de sa tranche de section et la séreuse jéjunale à distance de l’anastomose. Le Wirsung est laissé ouvert sans être calibré par un drain. b - L’anastomose hépaticojéjunale : Elle est confectionnée à 15 à 20 cm en aval de la précédente. Elle est habituellement facile du fait de la dilatation du canal hépatique. Elle est terminolatérale effectuée par des points séparés au fil fin à résorption lente. c - L’anastomose gastrojéjunale : Elle siège à 40 cm en aval de la précédente. Il s’agit d’une anastomose de type Finesterer. L’anse afférente qui est longue doit être placée dans une position telle qu’elle prévienne toute possibilité de plicature. Certains réalisent deux à trois points d’amarrage entre le jéjunum et la face inférieure du foie, de part et d’autre de l’anastomose bilio-digestive, ce qui diminue la traction sur les sutures tout en donnant à l’anse une courbure adéquate. d - Le drainage intra-canalaire des voies biliaires et du pancréas : L’anastomose bilio-digestive de même que l’anastomose pancréatico-digestive sont menacées par le risque de fistule anastomotique. Le but du drainage intra canalaire est de 88 diminuer le risque de survenue des fistules anastomotiques mais surtout d’en atténuer les conséquences. CHILD (in 5) draine les anastomoses bilio-digestives par un drain en « T » dont une des branches est divisée en forme d’ « Y ». SEMB (6) utilise un drain en T pour l’anastomose bilio-digestive, introduit un drain perdu dans le canal pancréatique et décomprime l’anse anastomotique par une sonde introduite par une gastrotomie. BROOKS (7) utilise un drainage à la Vœlker pour l’anastomose bilio-digestive, place un drain perdu dans le canal pancréatique et décomprime l’estomac par une gastrostomie. La tendance actuelle est au drainage trans-anastomotique commun pour les deux anastomoses biliaire et pancréatique à la Vœlker. e - Le drainage péritonéal: Il est variable en fonction des difficultés opératoires et du choix de l’opérateur. Il peut être assuré par une lame de Delbet placée en sous hépatique, ou bien par des drains de Redon aspiratifs placés en regard de l’anastomose bilio-digestive. B) VARIANTES AU RETABLISSEMENT DE LA CONTINUITE 1- L’anastomose pancréatique : - Obstruction du canal de wirsung : L’anastomose pancréatique peut être protégée des sécrétions exocrines pendant la durée de la cicatrisation de celle-ci. Il s’agit d’une oblitération des canaux pancréatiques par une colle biologique qui sera lysée en quelques jours. Cette technique est déconseillée lorsque la glande restante est normale où le risque de survenue d’une pancréatite aiguë nécrosante est important. - Anastomose Wirsungojéjunale : Lorsque le canal de Wirsung est dilaté, il est possible de confectionner une anastomose Wirsungojéjunale terminolatérale au bord antimésentérique des premiers centimètres de l’anse montée. Cette anastomose comporte deux niveaux de suture : pancréaticojéjunale pour fixer la tranche de section pancréatique à la séreuse jéjunale, puis Wirsungojéjunale proprement dite entre la paroi du Wirsung et la muqueuse jéjunale. Cette anastomose peut être intubée par un drain qui ressortira dans l’anse jéjunale à la Vœlker. - Anastomose pancréatique isolée sur anse indépendante : Le but est de séparer l’anastomose biliaire de l’anastomose pancréatique dont le mélange précoce des sécrétions serait à l’origine de l’activation des enzymes de la digestion. En effet une fistule pancréatique pure entraîne moins de dégâts tissulaires qu’une fistule de suc activé. Pour se faire, l’anastomose biliaire porte sur une anse montée en Y longue, isolée à 40 cm de l’anastomose pancréaticojéjunale. L’anastomose gastrojéjunale est ensuite réalisée en aval du pied de l’anse. - Anastomose pancréaticogastrique : L’anastomose pancréatique peut porter non pas sur le jéjunum mais sur l’estomac. Cette variante connue depuis 1946, mais longtemps, peu utilisée, a pour avantages : - La proximité des moignons pancréatique et gastrique qui permet toujours une anastomose sans tension. 89 - L’acidité du milieu gastrique qui s’oppose à l’activation des enzymes pancréatiques ce qui protège l’anastomose, ainsi que la possibilité de réaliser un contrôle endoscopique. - La relative solidité de l’anastomose et le moindre risque de fistule pancréatique. Elle est réalisée sur la face postérieure de l’estomac. Habituellement, on commence par l’anastomose pancréaticogastrique en prenant le bord antérieur du pancréas aux berges de l’incision gastrique les plus proches de la grande courbure. L’estomac est alors rabattu vers le bas et la droite pour réaliser l’anastomose entre le bord postérieur du pancréas et la berge de l’incision gastrique la plus proche du pylore. 2 - L’anastomose gastrojéjunale : - Montages pour éviter le reflux des sucs pancréatiques et biliaires dans le moignon gastrique : Deux montages sont proposés : l’anastomose jéjunojéjunale latérolatérale au pied de l’anse montée sur l’estomac (anastomose selon Braun) et l’anastomose gastrojéjunale sur anse montée en Y (8 ). Ces deux montages favorisent la vidange gastrique, et doivent être associés à une vagotomie afin de réduire le risque d’ulcère anastomotique. - La conservation du pylore : C’est la principale variante de l’anastomose gastrojéjunale. Elle a été a été proposée pour éviter les conséquences fonctionnelles de la résection gastrique et de la vagotomie. Initialement décrite par Traverso et Longmire en 1978 (9) et exclusivement appliquée lorsque la DPC était indiquée dans le cadre d’une pathologie bénigne, ses indications se sont élargies à la pathologie carcinologique en particulier pour les tumeurs Oddiennes, à condition bien sûr qu’elle ne compromette pas la radicalité de l’exérèse (8). La DPC avec conservation du pylore ne permet pas le curage ganglionnaire hépatique et sous-pylorique. Une localisation tumorale proche du premier duodénum et du genu supérius semble donc contre-indiquer cette technique. En ce qui concerne le cancer de la tête du pancréas, elle n’est réalisée que par très peux d’auteurs. TRAVERSO ET LONGMIRE réalisent une section du duodénum 2 à 3 cm en aval du pylore puis lient les artères gastroépiploïque droite, gastroduodénale et pancréaticoduodénale inférieure. La vascularisation du pylore et du moignon duodénal est assurée par l’artère pylorique. Le rétablissement de la continuité comportant successivement, sur la deuxième anse jéjunale, une anastomose pancréaticojéjunale terminolatérale première, une anastomose hépaticojéjunale terminolatérale à 10 cm en aval et une anastomose duodénojéjunale à 70 cm en aval. Certains auteurs (10), en revanche, réalisent une anastomose duodénojéjunale première suivie de l’anastomose hépaticojéjunale et de l’anastomose pancréaticojéjunale. Résultats de notre série : Quarante quatre DPC ont été réalisées dans notre série. Trente cinq malades ont eu une résection antrale alors que neuf malades ont eu une conservation pylorique. Une anastomose pancréatico jéjunale a été réalisée dans 28 cas alors qu’une anastomose pancréatico gastrique a été réalisée dans 16 cas. L’anastomose pancréatico digestive a été intubée dans huit cas. Trois complications hémorragiques per opératoires ont été notées. 90 Références 1 - Guillemin G, Berard PH, Raymond A. Les pancréatectomies EMC – Tec Chir App Dig (3) 40880. 2 - Baumel H, Huguier M, Manderscheid JC, Kunin N. Kraimps JL, Sigrand C, Goudet P, Fabre JM. Le type d’exérèse in : Baumel H, Huguier M le cancer du pancréas exocrine : Diagnostic et traitement. Monographie de l’AFC Paris : Springer –Verlag ; 1991. 3 - Adloff M. – Cancer du pancréas exocrine. Medsi / Mc Paris: Graw – Hill : 1991. 4 - Lesur G, Sauvanet A, Lévy P, Belghiti J, Bernades P. Cancer du pancréas exocrine. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Traité d'hépatologie : 7-106-A-10 (1995). (4) 5 - Hess W. Duodeno-pancréatectomie cephalique et totale in : Hess W, Rohner A, Cirenei A, Akovbiantz A. Maladies des voies biliaires et du pancréas. Pathologie-Diagnostic-Traitement. Italie : PICCIN Padoue 1994 ; 1789 -1816. 6 - Semb BKH, Bjerkeset T. Modified gastrointestinal reconstruction after pancréaticoduodenal resection with particular reference to the prevention of postoperative biliary and pancreatic fistulas. Acta Chir Scand 181; 147: 685 – 91. 7 - Brooks JR. Surgery of the pancreas. Philadelphie : Scanders; 1983. 8 - Jaeck D, Boudjema K, Bachellier P, Weber JC, Asensio T et Wolf P. Exérèses pancréatiques céphaliques : duodéno-pancréatectomies céphaliques. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-880-B, 1998. (8) 9 - Traverso LW, Longmire WP. Preservation of the pylorus in pancreaduo-denectomy. Surg Gyn Obst 1978; 146 :959-62. 10 - Suzuki T, Imanura M, Kajiwara T, Kim HC, Miyashita T, Tobe T. A new method of reconstruction after pylorus-preserving pancreato-duodenectomy. World J Surg 1988; 12 : 645-50. 91 LES SPLENOPANCREATECTOMIES GAUCHES N. Larbi*, Z. Ben Mansour*, S. Rakrouki*, M. Ghilani*, R. Dhouib**, O. Ben Mansour*, M. Hassairi*, S. Bouchoucha* * Service de Chirurgie ** Unité d’Anatomie Pathologique Hôpital Régional de Zaghouan Les splénopancréatectomies gauches ou distales sont plus simples à réaliser mais d’indications rares en matière de cancers du pancréas n’intéressant que 3 à 10% des cas (1-4). C’est une résection qui emporte la partie du pancréas située à gauche de l’axe mésentéricoportal et la rate (fig.1). fig.1 : splénopancréatectomie gauche : étendue de l’exérèse BASES ANATOMIQUES Débutant à gauche de l’axe vasculaire mésentérico-portal, le pancréas gauche s’étend jusqu’au hile splénique avec lequel il contracte des rapports intimes. La vascularisation artérielle est sujette à plusieurs variations anatomiques, après sa naissance du tronc cœliaque, l’artère splénique longe le bord supérieur du pancréas corporéo-caudal et donne des branches au pancréas selon des modalités variables. Au niveau du hile splénique, elle donne des branches artérielles pancréatiques récurrentes, spléniques, et l’artère gastro-épiploique gauche. En revanche la vascularisation veineuse est plus régulière. Le drainage lymphatique s’effectue essentiellement par la voie splénique le long de l’artère et par la voie pancréatique longeant le bord inférieur du pancréas jusqu’aux ganglions paraaortiques. En cas d’obstacle, un reflux peut se produire vers le hile splénique. L’existence de courts trajets lymphatiques avant d’atteindre le canal thoracique explique la dissémination précoce des cancers du pancréas corporéocaudal (4). 92 ASPECTS TECHNIQUES Splénopancréatectomie corporéocaudale : Installation et Voie d’abord : Le malade est installé en décubitus dorsal ; le champ opératoire doit être large allant de la ligne mamelonnaire au pubis et étendu latéralement le plus loin possible sur les flancs. Une incision sous-costale gauche élargie vers la droite donne un excellent jour sur le bloc spléno-pancréatique. Cependant, chez certains patients longilignes, une incision médiane peut être plus adaptée. Exploration et évaluation de la résécabilité : Ce temps primordial a pour but de juger de la possibilité technique, de l’étendue de l’exérèse, et de son utilité. L’exploration chirurgicale est essentiellement visuelle et manuelle, faite à la recherche d’éventuels signes de diffusion carcinologique (nodules de carcinose péritonéale, métastases hépatiques, ascite, envahissement de la racine du mésentère et l’existence de ganglions manifestement métastatiques), rendant toute exérèse illusoire. Ces contre-indications deviennent relatives en cas de tumeur endocrine. On procède ainsi à la palpation soigneuse des coupoles diaphragmatiques, du foie, du péritoine, du tablier épiploïque, de l’intestin et de ses mésos (1). Ensuite on procède à une ouverture large de l’arrière cavité des épiploons par décollement colo-épiploïque et/ou par section du ligament gastro-colique. La dissection est poussée à gauche pour réaliser une ligature section des vaisseaux courts libérant ainsi la rate de la grande courbure gastrique. L’angle colique gauche est abaissé. L’estomac est ensuite récliné vers le haut et le colon transverse vers le bas. On arrive ainsi à assurer une excellente exposition du corps et de la queue du pancréas, et de la rate (fig.2). fig.2 : exposition de la région splénopancréatique La section du ligament gastro-colique est plus ou moins poussée à droite en fonction du siège de la section pancréatique. Le bord inférieur du corps et de la queue du pancréas est 93 libéré de la partie gauche de l’insertion de la racine du mésocolon transverse, et la veine mésentérique inférieure repérée. L’inspection et la palpation peuvent délimiter la tumeur : son siège, sa taille, ses rapports avec le parenchyme pancréatique restant et les organes de voisinage. L’échographie per-opératoire peut localiser une petite tumeur non palpable du pancréas corporéocaudal, explorer le parenchyme pancréatique céphalo-isthmique qui sera préservé et déterminer les rapports de la tumeur avec le canal de wirsung. L’adjonction de l’écho doppler per-opératoire permet d’étudier un éventuel envahissement vasculaire artériel ou veineux. A la fin de l’exploration, l’exérèse sera jugée possible ou pas (1,12). Technique opératoire : L’exérèse est le plus souvent menée de gauche à droite avec abord postérieur des vaisseaux. Une fois la résection décidée, on entame la procédure par (1,2,4): Dissection de l’artère splénique : L’artère hépatique commune est repérée au bord supérieur du pancréas au niveau de l’isthme et mise sur lacs vasculaire. Ensuite, sa dissection est menée vers le tronc cœliaque pour ainsi retrouver l’origine de l’artère splénique qui sera également mise sur lacs ou d’emblée ligaturée et sectionnée afin de limiter les pertes sanguines (fig.3). fig.3 : dissection et mise sur lacs des artères hépatique et splénique Mobilisation de la rate et de la queue du pancréas : La libération de la rate est débutée par section du sustentaculum lienis, puis décollement de la convexité splénique du diaphragme. La rate, empaumée, est progressivement luxée vers la région médiane. Le décollement de la face postérieure du corps et de la queue du pancréas de la région rétropéritonéale est assez aisé et exsangue. Il débute après section du péritoine pariétal postérieur au bord inférieur du pancréas, et sera menée jusqu’à l’aplomb du confluent splénomésaraïque. Contrôle des vaisseaux et section de l’isthme : 94 Le deuxième temps est le contrôle des vaisseaux spléniques. L’artère splénique déjà repérée et mise sur lacs, sera ligaturée et sectionnée. Dans certaines variations anatomiques, l’artère hépatique et/ou coronaire stomachique peuvent naître de l’artère splénique, il est alors prudent d’effectuer un clampage transitoire de celle ci avant sa section afin de vérifier que l’artère hépatique et coronaire stomachique restent bien battantes (5). La dissection est ensuite poursuivie à droite pour découvrir l’abouchement du tronc splénomésaraïque dans la veine porte. Le temps vasculaire est terminé par ligature-section de la veine splénique au contact du confluent splénomésaraïque et de la veine mésentérique inférieure, sauf si cette dernière se jette directement dans la veine mésentérique supérieure (5). La section de la veine peut se faire à sa terminaison sur l’axe veineux mésentérico-porte et l’hémostase du coté portal est faite au surjet de fil non résorbable (4). En cas d’hypertension portale segmentaire, il existe souvent des néo-veines développées entre le pancréas gauche et la rate, d’une part et les loges rénales et surrénaliennes, d’autre part. Le contrôle vasculaire peut être hémorragique. La ligature première de l’artère splénique facilite l’hémostase des néo-veines par coagulations ou ligatures (5). La dissection du pancréas peut être facilitée par l’utilisation du dissecteur à ultrasons, notamment pour individualiser le canal de wirsung (12). Après section vasculaire, la pièce splénopancréatique ne tient plus que par l’isthme (fig.4). Fig.4 : après section vasculaire, la pièce splénopancréatique ne tient que par l’isthme. 1 : veine splénique 2 : veine mésentérique supérieure 3 : veine mésentérique inférieure 4 : artère splénique La section de l’isthme pancréatique est réalisée au bistouri froid après mise en place de fils tracteurs (fig.5). La section est faite en gueule de requin si possible pour faciliter la fermeture de la tranche de section pancréatique. 95 fig.5 : section de l’isthme pancréatique au bistouri froid sur fils tracteurs Certains auteurs réalisent un examen anatomopathologique extemporané de la tranche de section pancréatique pour étendre l’exérèse à droite en cas d’envahissement. Traitement de la tranche de section pancréatique : La tranche de section pancréatique peut être traitée de plusieurs façons. En cas de cancers, le canal de wirsung étant le plus souvent perméable, la tranche peut être fermée par des points séparés au fil non résorbable 5/0 après avoir lié de façon élective le canal de wirsung au fil non résorbable (fig.6). On peut de même réaliser un agrafage mécanique de la tranche aux pinces automatiques TA ou GIA, procédé utilisée en cœlioscopie (8-10). On reproche à cette technique son caractère traumatisant pour le tissu pancréatique car elle l’écrase et exposerait à la survenue de fistules pancréatiques postopératoires. Pour diminuer les taux de ces fistules, allant de 5 à 25%, certains auteurs injectent dans la lumière du canal de wirsung de la colle biologique ou du Néoprène (1). fig.6 : fermeture par sutures de la tranche de section pancréatique 96 Dans le doute, si la perméabilité du canal de wirsung n’est pas certaine, on peut être amené à réaliser une anastomose pancréatico-digestive : pancréatico-jéjunale ou pancréatico-gastrique. Hémostase et drainage : En fin de procédure, l’hémostase doit être aussi parfaite que possible, notamment au niveau de la loge de splénectomie. Tout suintement mal drainé peut être à l’origine d’une collection ou d’une suppuration sous phrénique. Le drainage utilise un drain siliconé multitubulé mis à proximité de la tranche de section pancréatique. Le drainage aspiratif est déconseillé car il peut favoriser la survenue de fistules pancréatiques post-opératoires. Une épiplooplastie peut être réalisée par accolement de l’épiploon sur la tranche pancréatique (1,4). Variantes : Section première de l’isthme pancréatique avec abord antérieur des vaisseaux : Une section première de l’isthme réalisant une spléno pancréatectomie de droite à gauche peut être réalisée ( fig.7). fig.7 : splénopancréatectomie gauche avec section première de l’isthme pancréatique. L’artère splénique est sectionnée, la veine mésentérique inférieure est liée et la veine splénique est liée à sa terminaison sur le tronc porte (VP : veine porte, AMS : artère mésentérique supérieure, VMS : veine mésentérique supérieure, AS : artère splénique, VS : veine splénique, VMI : veine mésentérique inférieure) . Le premier temps consiste à disséquer la veine mésentérique supérieure abordée au niveau du bord inférieur de l’isthme du pancréas. On se porte ensuite au bord supérieur de l’isthme pour le libérer de la faux de l’artère hépatique. Le deuxième temps comporte la libération prudente de l’isthme pancréatique de l’axe veineux mésentérico-porte puis sa section. La tranche de section, le plus souvent souple en cas de cancer, peut être fermée à la pince automatique ou par sutures manuelles, le canal de wirsung est repéré et sa fermeture renforcée par suture au fil non résorbable (5). Le troisième temps est représenté par le contrôle des vaisseaux spléniques avec section de l’artère puis de la veine splénique. La résection est terminée par exérèse monobloc, de droite à gauche, du pancréas corporéocaudal et de la rate. Cette technique, dite encore approche « centrifuge » permet un contrôle vasculaire premier avant toute mobilisation et manipulation tumorale. Elle est recommandée en cas de tumeur volumineuse ou très distale (1,4,5). 97 Pancréatectomie distale avec conservation splénique : La conservation splénique se fait selon deux méthodes : soit avec préservation vasculaire et les vaisseaux sont disséqués dans ce cas jusqu’en amont du hile de la rate, soit sans préservation vasculaire et la rate est vascularisée dans ce cas par les vaisseaux courts et le pédicule gastro-épiploïque gauche qu’il faudra garder. Cette technique est d’indication discutable en cas de cancers du pancréas. La splénectomie constitue en effet un impératif carcinologique réalisant le curage ganglionnaire des ganglions du hile splénique. La pancréatectomie gauche avec conservation splénique trouve son indication dans les pathologies pancréatiques bénignes (1,5,6). Pancréatectomie médiane : Encore appelée pancréatectomie centrale. Elle consiste en l’exérèse du pancréas situé à gauche de l’artère gastro-duodénale et en dedans de la confluence splénomésaraïque. Elle est réservée aux tumeurs bénignes et ne semble pas indiquée en cas de cancers du pancréas (7). Pancréatectomie sous cœlioscopie : La faisabilité des résections pancréatiques sous cœlioscopie a été démontrée (8,9). La splénopancréatectomie gauche, ne comportant pas de geste de reconstruction biliaire ni digestive, est plus aisée, sous cœlioscopie, que la duodéno pancréatectomie céphalique (8). La tranche de section pancréatique est fermée par pince mécanique. La chirurgie laparoscopique du pancréas est réalisable selon deux procédures : soit de droite à gauche avec section première de l’isthme le plus souvent (fig.8), soit classiquement de gauche à droite (8-10). fig.8 : section première de l’isthme pancréatique avec splénopancréatectomie de droite à gauche. La tranche est fermée par pince mécanique Il a été réalisé des résections pancréatiques sous cœlioscopie pour tumeurs endocrines et tumeurs kystiques bien limitées non dégénérées (10). Cependant, moins de 2 % des résections pancréatiques sous cœlioscopie ont été réalisées pour tumeurs kystiques dégénérées (10,11). La laparoscopie, dans la chirurgie pancréatique, est en cours d’évaluation (11). Cependant, son apport dans l’exploration de la tumeur et l’évaluation de la résécabilité est indéniable. 98 Cette technique peut être améliorée par l’écholaparoscopie permettant de découvrir jusqu’à 30% de petites métastases ou d’envahissement vasculaire chez des patients pour lesquels l’imagerie préopératoire n’a pas détecté de contre-indications à la résection (12). Données de notre série : Sept malades porteurs de carcinomes ont subi une spléno pancréatectomie plus ou moins poussée à droite dans notre série. Les tumeurs caudales dans trois cas, corporéales dans trois cas, et corporéo caudale dans un cas. Toutes les interventions ont été menées par laparotomie. La durée de l’intervention a été entre 90 et 120 minutes (médiane = 210 minutes). La taille des tumeurs réséquée allait de 18 à 60 mm (médiane = 45 mm). Dans un cas, il y avait un envahissement du tronc spléno mésaraïque. Aucun incident per opératoire n’a été signalé. Trois malades ont nécessité une transfusion per opératoire d’au maximum trois culots globulaires. Références 1. Jaeck D, Boudjemaa K, Bachellier P, Weber JC, Asensio T, Wolf P Pancréatectomies gauches ou distales Encycl. Med. Chir, Techniques Chirurgicales, Appareil digestif 40-880 D, 1998 ; 6p 2. Guillemin G, Bérard Ph, Raymond A Les pancréatectomies Encycl. Med. Chir, Techniques Chirurgicales, Appareil digestif 4.3.03, 40880 3. Boermann PC, Beckingham IJ Pancreatic tumors BMJ 2001 ; 322 :721-3 4. Fagniez PL, Munoz Bongrand N Contrôle vasculaire au cours de la splénopancréatectomie gauche pour cancer Ann. Chir 1999 ; 53 :632-4 5. Goasguen N, Regimbeau JM, Sauvanet A Pancrétectomie gauche avec dissection « centrifuge » des vaisseaux spléniques Ann. Chir 2003 ; 128 : 57-61 6. 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Gregg HJ, Gagner M pancreaticoduodenal resection J Hepatobiliary Pancreat surg 2000 ; 7 : 21-27 100 DUODENOPANCREATECTOMIE TOTALE (DPT) Kallel W, Dhibi K, Nasr M, Ben Taher CH, Noomène F, Hamdi A. Service de chirurgie générale -Hôpital Fattouma Bourguiba Monastir I- Introduction : La duodenopancréatectomie totale (DPT) est une intervention majeure qui n’ajoute pas beaucoup de difficultés, ni de gravité immédiate, à la duodenopancréatectomie céphalique .Certains préconisent même cette exerèse pour se dispenser du temps d’anastomose wirsungojéjunale et se mettre à l’abri du risque de fistule pancréatique. II- Technique chirurgicale de la DPT. 1-Préparation de l’opéré : Cette intervention s’adresse le plus souvent à des patients dont la moyenne d’age est supérieure à 60 ans, dénutris par la maladie sous jacente. Cette préparation nécessite une bonne évaluation des grandes fonctions de l’organisme, la correction préalable des troubles de l’hémostase, de la fonction rénale, de l’anémie et l’amélioration de l’état nutritionnel et respiratoire (9,13). 2-Technique de la DPT proprement dit : A- Matériel chirurgical : Cette intervention ne nécessite pas de matériel spécifique .Cependant, il est souhaitable de disposer d’un appareil d’échographie per-opératoire muni d’une fonction Doppler et couleur, d’un amplificateur de brillance pour réaliser une cholangiographie. L’acquisition d’un bistouri à ultra sons ou d’un bistouri harmonique peuvent améliorer les conditions opératoires en facilitant la dissection .Un jeu de clamps vasculaires pour artères et veines et des instruments de chirurgie fine ou mieux de microchirurgie, si des reconstructions artérielles s’avéraient nécessaires, sont utiles( 8,9 ) . B- La Duodénopancréatectomie totale (DPT) : Les circonstances d’exécution de la DPT sont doubles : La DPT peut être indiqué d’emblé de principe : la résection sera menée en monobloc ou suite à une résection pancréatique droite ou gauche qui a été déjà réalisée ( fig. 1). 101 Fig 1 : Duodénopancréatectomie totale. Délimitation de la zone d’exérèse. -a - Phase de résection : - Voie d’abord : La laparotomie tranversale bi sous costale est la voie d’abord la plus utilisée, car elle permet une très bonne exposition de l’ensemble du bloc duodéno-pancreatico-splénique en situation transverse à l’étage sus-mésocolique (8,16). - L’exploration : C’est un temps important qui va permettre de juger de la resécabilité de la tumeur. En cas de DPT, on accordera plus d’attention au tronc coeliaque et à ces branches. Elle permet d’évaluer la mobilité de la tumeur par rapport à ces axes artériels et l’existence ou non des métastases ganglionnaires ou des coulées tumorales envahissant ces artères. Cette exploration est menée à travers le petit épiploon qui est effondré, le lobe hépatique gauche est récliné vers le haut et la petite courbure gastrique est abaissée. Les trois artères sont disséquées à leur origine et débarrassées des ganglions qui les entourent . (fig. 3). Le repérage de l’artère gastrique gauche est très important car, en fin d’intervention, apres antrectomie, cette artère constituera le seul axe artériel vascularisation l’estomac. A cette phase de l’intervention, il est opportun de tester la mobilité de l’isthme pancréatique par rapport à la veine porte rétro-pancréatique .Donc on explorera manuellement et échographiquement les rapports de l’axe mésentérico-porte avec l’isthme (8). Un large décollement colo-épiploique est ensuite pratiqué, pour aborder l’arrière –cavité des épiploons .La grande courbure gastrique est réclinée vers le haut et le colon transverse est abaissée permettant une bonne exposition de la face antérieure de l’ensemble du pancréas (fig. 4). - Cholécystectomie, manœuvre de Kocher, dissection des éléments vasculobiliaires du pédicule hépatique et mobilisation de l’isthme pancréatique : Ces étapes sont identiques à celles de l’opération de Wipple .C’est à ce stade qu’est pratiqué le curage ganglionnaire pédiculaire hépatique et coeliaque, avec mise à nu des éléments vasculobiliaires du pédicule hépatique . -Mobilisation de la queue du pancréas et de la rate, gastrectomie partielle : Pour réduire les pertes sanguines durant cette étape et permettre une vidange splénique, l’artère splénique est sectionnée et liée à son origine sur le tronc coeliaque. 102 Libération de la rate de ses attaches diaphragmatiques et coliques .La rate, solidaire de la queue du pancréas est luxée vers l’avant et vers la droite. Section du ligament gastrocolique et des vaisseaux courts. Libération de la grande courbure gastrique de préférence à distance de la paroi gastrique afin de préserver l’arcade vasculaire gastro-épiploique droite .L’antrectomie est achevée après gastrolyse de la petite courbure .Une vagotomie tronculaire double peut être réalisée à ce stade .Le décollement splénopancréatique se poursuit ainsi de gauche à droite prudemment jusqu’à libération de la face antérieure de l’artère mésentérique supérieure (fig. 5-6). Fig 2 : L’exploration à travers le petit épiploon vérifie l’absence d’envahissement du tronc coeliaque et de ses branches : artère hépatique, artère splénique, et ertère gastrique gauche. Le foie gauche est récliné vers le haut ; l’estomac est récliné vers le bas Fig 3 : Un large décollement colo épiplooïque permet l’abord de l’arrière cavité des épiploons et l’exposition de la face antérieure de l’ensemble de la glande pancréatique. L’estomac est récliné vers le haut et le mésocolon transverse est abaissé. 103 Fig 4 : Anatomie de la confluence veineuse mésentérico porte. La veine gastrique gauche, grêle et fragile en l’absence d’hypertension portale, s’abouche au bord supérieur de la confluence mésentéricoportale. Fig 5 : Le décollement spléno pancréatique caudal s’effectue de la gauche vers la droite jusqu’au bord gauche de la racine du mésentère. -Dissection des vaisseaux rétropancréatiques : Apres décollement de la rate et du pancréas caudal, les vaisseaux rétropancréatiques sont abordés par la gauche. La face postérieure du pancréas corporéal est progressivement libérée de gauche à droite, par rapport à la face antérieure de l’artère mésentérique supérieure. La veine splénique est sectionnée et liée en amont de sa confluence avec les veines mésentériques supérieure et inférieure .La confluence spléno mésentérique inférieure peut s’effectuer de façon plus caudale vers la gauche : dés lors ,devant un envahissement tumoral veineux à la face postérieure du pancréas corporéo caudal, l’exérèse nécessite le sacrifice de la veine mésentérique inférieure sans que cela entraîne des répercussions sur le drainage veineux colo rectal à condition que les veines mésentériques supérieure et porte restent perméables (fig. 8). 104 Apres section ligature de la veine splénique, le corps et l’isthme du pancréas sont séparés du confluent mésentéricoporte qui reste en arrière (fig. 9). La dissection est ensuite poursuivie vers la droite par la libération de la tête du pancréas et de l’uncus pancréatique par rapport à la face antérieure et au bord droit de l’axe mésentéricoporte. Fig -6 : Duodénopancréatectomie céphalique sans conservation du pylore : Le moignon gastrique est artérialisé par la seule artère gastrique gauche. La veine gastrique gauche assure la quasi-totalité du drainage veineux. 105 Fig 7 : Ligature de la veine splénique Fig 8 : Le temps gauche est terminé -b- Rétablissement de la continuité biliaire et digestive : Plusieurs techniques de rétablissement de la continuité sont proposées après DPT .Quel que soit le montage ,le rétablissement est effectué à l’aide de la première anse jéjunale montée à l’étage sus-mésocolique .Il comporte une anastomose hépaticojéjunale première suivie d’une gastroentéroanastomose. C’est le montage réalisé le plus fréquemment. L’anastomose hépatico-jéjunale est confectionnée en términolatéal, entre le canal hépatique sectionné sous la convergence biliaire et la première anse jéjunale. 106 La gastroéntero anastomose est réalisée ensuite, à environ 60 cm en aval de l’anastomose hépaticojéjunale afin d’éviter tout reflux dans les voies biliaires. En cas de conservation pylorique, la gastroentéroanastomose est remplacée par une anastomose duodénojéjunale término-latérale (4, 8, 9,16). III- Indications de la DPT: Les principales indications de la DPT sont les tumeurs pancréatiques de localisation céphalocorporéale ou étendues à la quasi-totalité voire à la totalité de la glande pancréatique (7, 8, 12,18). Plus rarement, la DPC est motivée par la présence d’une tumeur multifocale intéressant plusieurs segments du pancréas. Selon certains auteurs (3, 5,8 ,10), La DPT est indiquée systématiquement en cas d’adecocarcinome de la tête du pancréas permettant ainsi • D’éviter le risque de récidive sur le moignon restant, ceci est justifié surtout devant le caractère muli-focal du cancer dans 30 % des cas (2, 8,12). • D’éviter un pancréatite postopératoire, une fistule pancréatique. • De faire un curage ganglionnaire plus large et une éradication des foyers microscopiques. Cependant, les études n’ont pas démontré jusqu’ici la supériorité de la DPT par rapport à la DPC (1, 8,16). En l’absence d’étude contrôlée, il n’est pas possible devant ces résultats de recommander la pancréatectomie totale de principe. Ses indications nous paraissent se limiter à trois circonstances : • L’existence macroscopiquement évidente d’un cancer multifocal extirpable, sans métastase ce qui est très rare (2). • Une tranche de section de pancréatectomie partielle envahie, ce qui s’observe dans 10 % à 30 % des cas (2 ,8). Et implique un examen anatomopathologique pendant l’intervention. • Un pancréas particulièrement friable, dont la suture serait précaire, ce qui est inhabituel (2,17). La DPT peut être discutée dans le traitement des tumeurs mucineuses intracanalaires du pancréas. Selon les cas, l’indication doit être posée d’emblée soit avant l’intervention , au terme des explorations morphologiques et endoscopiques, soit en per-opératoire en fonction des constatations chirurgicales ou des données de l’examen extemporané de la tranche de section pancréatique , ou encore secondairement , après pancréatectomie partielle (10,13 ) . IV- Conséquences thérapeutiques de la DPT: La DPT peuvent entraîner des effets secondaires non négligeables liés à l’insuffisance pancréatique exocrine totale et au déficit de sécrétion endocrine (diabète instable) qui altèrent considérablement le confort de vie des opérés (1,7, 8). Le diabète après pancréatectomie totale est essentiellement caractérisé par l’augmentation de la sensibilité à l’insuline et la tendance à l’hypoglycémie sévère imprévisible et difficilement contrôlable (8, 13,16). En plus de diabete, une substitution insuffisante de la fonction exocrine du pancréas induit une malabsorption par mal digestion des substrats caloriques. Il faut donc veiller à adapter cette substituer pour minimiser la stéatorrhée et renforcer l’efficacité des enzymes pancréatiques , en diminuant le PH acide de l’estomac ,par l’emploi 107 au long cours d’inhibiteurs de la pompe à protons à la posologie commercialisée la plus faible (13) . Donc une prise en charge précoce du diabète et de l’éducation des patients en milieu spécialisé ; permettrait d’obtenir un équilibre métabolique satisfaisant. V- Données de notre série : Un seul malade de notre série a eu une duodénopancréatecomie totale du fait d’une tranche pancréatique envahie. l’évolution de ce cas a été favorable. VI - Conclusion La DPT est une intervention majeure difficile mais qui n’ajoute pas beaucoup de difficultés, ni de gravité immédiate à la DPC .Cependant, elle ne comporte plus de drainage pancréatique ni de risque de fistule pancréatique. Les indications de la DPT ne doivent pas être méconnues en cas des tumeurs pancréatiques. Elle peut être indiquée devant l’extension des lésions, le caractère multifocale et la récidive tumorale. REFERENCES 1- Bartoli FG, Arnone GB, Ravera G, Bachi V. Pancreatic fistula and relative mortality in malignant disease afterpancreaticoduodenectomy. Review and statistical meta-analysis regarding 15 years of literature. Anticancer Res. 1991 Sep-Oct; 11(5):1831-48. 2-Baumel H,Huguier M,Fabre JM,Houry S,Domergue J: Le traitement des cancers du pancréas exocrine. 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Ann Surg .1988, 208, 541-553 109 PLACE DE LA LYMPHADENECTOMIE DANS LE CANCER DE LA TETE DU PANCREAS H.TRIKI, M.MAHMOUDI, M.BEN SLIMA, K.MISSAOUI, B.GHARIANI, A.HELALI, MMAKHLOUF, E.FERJANI, H.HOUISSA, F.SEBAI Service de Chirurgie Générale « B » du C-H-U La Rabta. 1) Introduction La Duodéno-Pancréatectomie Céphalique standard, telle que décrite en 1935 par WHIPPLE, continue à être l’intervention la plus adoptée dans l’exérèse du cancer de la tête du pancréas KTP (8.18) En revanche, bien que le taux de mortalité opératoire y soit faible < à 2% (8), le taux de survie à 5 ans reste décevant ne dépassant pas 10% (8). Parmi ces survivants 40% (8) décèdent par récidive tumorale en rapport avec des métastases ganglionnaires microscopiques méconnues à l’intervention initiale, ou déjà présentes à distance des ganglions régionaux. Ce pronostic fâcheux a poussé plusieurs chirurgiens à essayer d’être plus agressifs en modifiant les modalités de résection. Cette tendance datant depuis plus de 30 ans, a débuté avec FORTNER (5) , qui en 1973 a publié les premiers résultats de sa pancréatectomie qu’il qualifie de « Régionale » au cours de laquelle il associe à la procédure de WHIPPLE une exérèse plus large du tissu cellulograisseux rétro-duodénopancréatique et une résection-reconstruction des gros vaisseaux (tronc porte et veine mésentérique supérieure), malgré une mortalité et une morbidité élevées et l’absence d’amélioration évidente du taux de survie dans cette population à échantillon très réduit (5,8) , certaines conclusions intéressantes ont pu être retenues : CUBILLA (3) ainsi que FORTNER (6) ont pu démontrer que plus du tiers des patients ayant subi cette pancréatectomie régionale avaient des métastases ganglionnaires sur des ganglions non enlevés habituellement par la simple procédure standard de WHIPPLE ; forts de ces résultats, plusieurs équipes (7,8,9,11,12,13,14,17,18) ont essayé de développer des techniques intermédiaires d’exérèse combinant à la fois une plus grande efficacité carcinologique et une morbidité moindre. Un grand nombre de chirurgiens Japonais ont répondu à cette proposition (9,12,13,14,16,18) en réalisant une DPC avec un curage ganglionnaire plus extensif qu’ils ont qualifié de lymphadénectomie extensive (LAE) par opposition à la lymphadénectomie standard de WHIPPLE : LAS Dans la littérature (7,8,10,12,14,17) , ces deux techniques de curage associées à la résection duodéno-pancréatique, ont été comparées entre elles pour étudier l’impact sur la morbidité, la mortalité et surtout la survie à long terme. 3 grandes études comparatives : * Une étude Japonaise Rétrospective et Multicentrique publiée en 1998 (12) présentée par MUKAIYA sur 461 KTP réséqués. * Une étude Allemande Prospective à propos de 72 KTP réséqués publiée en 2000 par H.BRUNS (7). * Une étude Italienne Prospective Multicentrique Randomisée à propos de 81 KTP réséqués publiée par PEDRAZOLLI. ont été analysées. 110 2) TECHNIQUES DE LA LYMPHADENECTOMIE Deux variantes de curage sont décrites : a. La lymphadénectomie standard (LAS) (7,8,9,12,17) : qui résume le curage réalisé systématiquement avec l’intervention de WHIPPLE et qui consiste a emporter en bloc sur la pièce de duodéno-pancréatectomie céphalique, les ganglions retro-et supra-duodénaux, mais aussi retro-pancréatiques dont le réseau se réunit dans le tissu cellulo-graisseux dense formé par la lame rétroportale. En haut seront emportés les ganglions prépyloriques et ceux du ligament hépato-duodénal (H.BRUNES, ISHAKAWA). b. La lymphadenectomie extensive : LAE (7,8,9,12,17) A la LAS s’associe un évidement cellulo-graisseux depuis le tronc coeliaque jusqu’au pédicule mésentérique inférieur emportant obligatoirement les plexus nerveux périvasculaires aboutissant à une énervation rétropéritonéale extensive (plexus splanchnique, solaire, latéroaortiques…, toute la graisse autours des pédicules rénaux et le tissu intermédiaire. Une résection segmentaire de la veine porte ou de la veine mésentérique supérieure avec reconstruction vasculaire est exceptionnellement associée (8,12). 3) RESULTATS COMPARATIFS DES DEUX TYPES DU CURAGE 3-1 Analyse de la mortalité : La revue de la littérature montre que la mortalité opératoire globale est de 5,5% (7) et qu’elle est 1,5 à 2 fois plus élevée avec la LAE (7). Dans l’étude Allemande (7), 46 patients ont eu une LAE et 26 patients ont eu une LAS, la mortalité opératoire était respectivement de 6,5 % et de 3,8 % (p< 0,05). Dans l’étude multicentrique Japonaise (12) réunissant l’expérience de 77 centres et regroupant sur 461 KTP, 293 ont eu une LEA et 167 une LAS, l’auteur fait état de 18 décès avant le 30ème jour post-opératoire sur toute la série, tous curages confondus, sans préciser le taux de mortalité propre pour chaque groupe. Il conclut cependant que ce taux élevé à 3,6% serait en rapport direct avec la LEA puisqu’elle représente 63,5% des curages de la série. En revanche, l’étude Italienne (17) comparant 40 LAS à 41 LAE, PEDRAZOLLI n’a noté aucune différence significative entre les deux groupes : 2/40 (5%) et 2/41 (5%) avec p>0 ,05. 3-2 Analyse de la morbidité : Dans l’étude Allemande (7) H.BRUNES a fait état d’une morbidité spécifique dans le groupe LEA (46/72) représentée par une diarrhée invalidante et prolongée même après un an chez 76% des patients. Aucune explication objective n’a été notée dans la littérature mais il est suggéré que ceci pourrait être attribué à l’énervation rétropéritonéale extensive emportant plexus solaire, splanchnique, laléro-aortique et périmésentérique lors du curage (7). Dans l’étude Japonaise (12) la morbidité était représentée par les pertes sanguines évaluées au cours de l’intervention, sensiblement plus élevées avec la LAE. En effet MUKAIYA rapporte des déperditions sanguines estimées à 1482 ml ± 116 ml pour LAS contre 1632 ml ± 75 ml pour LAE (p < 0,05). 111 Dans l’étude Italienne (17) PEDRAZOLLI n’a noté en revanche aucune particularité à la morbidité après LAE vs LAS avec les mêmes incidences de fistules pancréatiques, d’abcès sous phréniques, de fistules entéro-cutanées et de pancréatite aiguë sur moignon. Enfin l’analyse du facteur : « durée opératoire » n’a pas été développée dans ces séries sauf pour PEDRAZOLLI (17) qui n’a noté aucune différence significative entre les deux curages. 3-3 Analyse de la survie : Le taux de survie est sous la dépendance de plusieurs facteurs parmi eux un facteur déterminant : l’extension ganglionnaire. En effet, le caractère lymphophile et l’extension lymphatique très précoce de ce cancer est actuellement parfaitement établie ; NAGAI (13), a démontré que des tumeurs de petite taille :T1, T2, peuvent s’associer à des métastases ganglionnaires microscopiques, à distance même des ganglions péripancréatiques. Un grand nombre de séries vient confirmer ces constatations (1,4,11,15,16) Dans le groupe des patients classés Stade I et II (UICC), NAGAKAWA (16) a noté un taux de survie à 5 ans encourageant à 71,4% après LAE , il était de 74,1% pour H.BRUNS (7).Une amélioration du taux de survie à 3 ans et 5 ans, ressort de l’étude de SATAKE (18 ) dans les deux 1ères classes TNM du stade I ( T1 etT2 tous N-) et pour ces mêmes classes H.BRUNS note un bénéfice à réaliser la LAE puisque à 5 ans tous les patients ayant eu la LAS sont tous décédés alors qu’il fait état d’une survie au-delà de 6 ans à17,8% pour ceux qui ont eu la LAE. En revanche, ces conclusions ne ressortent pas dans l’étude Japonaise (12) la plus exhaustive de MUKAIYA, où l’auteur ne révèle aucun bénéfice statistiquement significatif de la LAE sur la survie à 3 ans et à 5 ans quel que soit le stade UICC de la tumeur mais il arrive à conclure que ce n’est pourtant pas la LAE qui conditionne le taux de survie, mais plutôt l’envahissement ganglionnaire. En effet, en comparant les groupes N-/LAR et N+/LAE, il note que le taux de survie à 3 ans dans le premier groupe est de 35% contrastant avec un taux nul dans le 2ème groupe et le fait que sa série comportait 327 KTP de SIII, soit 71% de la série, expliquerait l’absence de gain en survie. Pour souligner cette large discordance entre les auteurs, ISHIKAWA (10) avance des résultats encourageant l’adoption de la LEA comme méthode de curage et sur une série prospective de 53 KTP, la survie à 3 ans était nulle dans le groupe N+/LAS et de 27% dans le groupe N+/LAE. En conclusion : Il se dégage de la revue de la littérature, une large discordance dans les résultats des lymphadénectomies pour le cancer ductulaire de la tête du pancréas, cette discordance est notée au sein même des équipes Japonaises à attitude plus agressive et aux séries plus larges. Le curage ganglionnaire pour KTP, n’a pas atteint de nos jours le niveau convainquant pour être adopté systématiquement comme pour les autres cancers digestifs les plus fréquents (Colon, Rectum, Estomac, Œsophage….) où la lymphadénectomie a bien intégré le protocole thérapeutique. 112 Ceci étant, alors que tous les auteurs s’accordent paradoxalement sur le caractère lymphophile et précoce de l’extension lymphatique au delà des relais péripancréatiques même pour les petites tumeurs T1. En se référant aux plus grandes séries particulièrement à celle de MUKAIYA, on peut retenir: - Qu’excepté l’augmentation des besoins transfusionnels lors de l’intervention et une diarrhée prolongée, la morbidité reste sensiblement inchangée entre les deux groupes. - Que la mortalité opératoire est plus élevée en cas de LAE : 1,5 à 2 fois celle de la LAR - Que le pronostic du KTP tient à l’extension ganglionnaire plutôt qu’au type de. curage ; le taux de survie à 3 ans : N-/LAR = 30% VS N+/LAE = 0% - Que la LAE n’a aucun bénéfice palpable su la survie à long terme quelque soit le stade UICC de la tumeur. Ce résultat paradoxal se trouve nettement contre carré par ISHIKAWA (10), NAGAKAWA, SATAKA et H.BRUNS. La LAE n’a pas amélioré le pronostic des KTP toutefois elle reste à proposer dans les cancers jeunes sans envahissement ganglionnaire (T1, T2 tous N-), vu la précocité de l’extension lymphatique de ce cancer redoutable. Références : 1. Bardaxoglou, E., Landen, Maddern, G.J., Buard, J.L., Meunier, B., Campion, J.P., Terblanche, J., Launois, B.: Total pancreatectomy and subtotal pancreaticoduodenectomy for the management of carcinoma of the head of the pancreas: an institutional experience and evolving trends. Dig. Surg. 13: 12, 1996 2. Cameron, J.L., Crist, D.W., Sitzmann, J.V., Hruban. R.H...J.K., Seidler, A.J., Coleman, J.A.: Factors influencing survival after pancreaticoduodenectomy for pancreatic cancer. Am. J. Surg, 161:120-125 , 1991 3. Cubilla, A.L., Fortner, J. Fitzgerald, P.J. : Lymph node involvement in carcinoma of the pancreas area. Cancer 41:880, 1978 4. Crist, D.W., Sitzmann, J.V., Cameron, J.L.: Improved hospital morbidity, mortality, and survival after the Whipple procedure. Ann. Surg. 206:358, 1991 5. Fortner, J.G.: Regional resection of cancer of the pancreas: a new surgical approach. Surgery 73:307, 1973 6. Fortner, J.G., Klimstra, D.S., Senic, R.T., Maclean, B.J.: Tumor size is the primary prognosticator for pancreatic cancer after regional pancreatectomy. Ann. Surg. 223:147, 1996 7. H.Bruns, D., Vogel, I., Luttges, J., Kloppel, G., Kremer, B.: Surgery for Ductal Adenocarcinoma of the Pancreatic Head : Staging, Complications, and Survical after Regional versus Extented Lymphadenectomy. World J. Surg. 24, 595 – 602, 2000. 8. Howard A. Reber, M.D.: Lack of Survival Benefit of Extented Lymph Node Dissection for Ductal Adenocarcinoma of the Pancreas : Retrospective Multi-institutional Analysis in Japan. World J. Surg. 22, 248 – 253, 1998. 113 9. Ishikawa O, Ohhigashi H, Sasaki Y, et al. Practical usefulness of lymphatic and connective tissue clearance for the carcinoma of he pancreas head. Ann Surg 1988; 208 : 216 – 220. 10. Ishikawa O. Surgical technique, curability and postoperative quality of life in an extended pancreatectomy for adenocarcinoma of the pancreas. 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Ohta, T., Nagakawa, T., Ueno, K., Kayahara, M., Mori, K., Kobayashi, H., Takeda, T., Miyazaki, I.,: The mode of lymphatic and local spread of pancreatic carcinomas less than 4.0 in size. Int. Surg. 78:208, 1993 17. Pedrazzoli, S., Dicarlo, V., Dionigi, R., Moska, F., Pederzoli, P: Standard Versus Extented Lymphadenectomy Associated with Pancreatoduodenectomy of the Head of the Pancreas. Ann. Surg. 28:4, 508- 517, 1988 18. Satake, K., Nichikawa, H., Yokoma, H., Kawazoe, Y., Kin, K. : Surgical Curability and Prognosis for standard versus extented resection for T1 carcinoma of the pancreas. Surg. Gynecol. Obstet. 175:259, 1992 114 L’ENVAHISSEMENT VASCULAIRE DANS LE CANCER PANCREATIQUE : DIAGNOSTIC ET INTERET DE LA RESECTION VASCULAIRE Bouhafa A.. Khelifi S. Ben Maamar A. Agrebi W.Ajmi C. Hadfi M. Cherif R. Letaief A Service de Chirurgie. Hôpital Habib Thameur I. Introduction : Le cancer du pancréas (CP) est souvent un adénocarcinome pancréatique, c’est un cancer de très mauvais pronostic fréquemment associé à un envahissement ganglionnaire métastatique et à une extension aux vaisseaux contigus au pancréas (1,2) . Le taux de résécabilité ce cancer est faible( 3, 4) en effet, bien que les progrès médicaux et chirurgicaux contribuent à une meilleure prise en charge du CP, la résection tumorale qui reste le meilleur traitement curatif permettant une survie appréciable n’est pas toujours possible (5) . Les études récentes qui font état d’une amélioration de taux de résécabilité, rapportent des taux élevés de résection vasculaire en particulier veineuse porte (6). 1) Quels sont les critères d’envahissement vasculaire ? 2) Quelle est la technique opératoire à adopter ? 3) Existe t-il un bénéfice réel à la résection vasculaire concernant: La résécabilité, la mortalité, la morbidité et la survie ? II. La place des explorations dans le diagnostic de l’envahissement vasculaire : L’envahissement vasculaire est basé sur l’imagerie médicale (7,8), plusieurs études ont montré que l’échographie, l’écho endoscopie, le scanner et l’IRM sont capables d’évaluer l’envahissement vasculaire (7) 1- L’échographie trans-cutanée associée au Doppler couleur peut étudier les rapports vasculaires de la tumeur pancréatique (7). Pour Tmigama et Coll (9), comparant chez 33 patients cet examen à l’angiographie, aux données opératoires et aux données anatomo-pathologiques : Chez 22 patients non opérés les résultats de l’échographie sont comparables avec l’artériographie et la capacité de cet examen a détecter la présence, l’absence d’envahissement vasculaire et le taux de résécabilité est respectivement de 79 %, 95 % et 88%. Chez les 11 patients opérés, la sensibilité et la spécificité de cet examen à évaluer l’envahissement vasculaire est respectivement de 60 % et 93 % avec un taux de détection de l’envahissement artériel égal à 87 % plus élevé que celui du scanner ( 72 %) et l’angiographie( 91 %). Mais cet examen est opérateur dépendant et peut être gêné par les gaz. 2- Le scanner spiralé est actuellement le scanner à Détecteurs multiples (multi-barettes) avec imagerie tri-dimensionnelle et reconstruction de l’anatomie équivalente à celle de l’artériographie (5,7,10) a montré son efficacité à prédire le stade 115 tumoral avec un taux d’exactitude de 77-90% (5) et un taux de prédire la non résécabilité proche de 100 % (5). L’interprétation du scanner doit préciser (11): . l’absence de métastases extra pancréatiques. . l’état de la veine porte, du confluant mésentérico portal et de la veine splénique. . l’absence d’envahissement tumoral de l’artère mésentérique supérieure. La sensibilité de l’examen scannographique à détecter l’envahissement vasculaire est variablement estimée dans la littérature. Dans des études relativement anciennes, la sensibilité varie de 36 % à 64 %, alors que dans les études plus récentes, le scanner hélicoïdal avec temps artériel et veineux et coupes fines à travers le pancréas est suffisant avec une sensibilité de 80% et une spécificité de 100% (11)(12). • • • pour Diehl, l’envahissement vasculaire est correctement identifié dans 88 % des cas (13). Pour Furukawa et Coll, la sensibilité, la spécificité et l’exactitude à détecter une infiltration vasculaire est respectivement de 83 %, 100 % et 89 % (14). Pour Lu et Coll, la sensibilité est de 84 % et la spécificité est de 98 % (15). 3. L’écho-endoscopie (EE) : L’écho-endoscopie est supérieure au scanner dans l’étude de l’envahissement vasculaire du CP (7). Pour Midwter étudiant chez 48 patients, a comparé l’efficacité de l’écho-endoscopie au scanner à détecter un envahissement vasculaire trouve que la sensibilité et la spécificité est respectivement 81 % Vs 56 % et 86 % Vs 100%. La sensibilité et la spécificité de l’écho-endoscopie Vs scanner a évaluer l’envahissement de la veine mésentérique supérieure et la veine porte 81 % Vs 56 % (16). Cependant, elle est moins performante que le scanner à évaluer l’envahissement de l’artère mésentérique supérieure(AMS). 4. L’IRM : Bien que l’apport de l’IRM dans l’étude des tumeurs pancréatiques et leurs rapports vasculaires est certain, il permet l’étude de la tumeur et ses rapports et évite les risques de l’injection IV du produit de contraste et de l’irradiation ionisante, il ne semble pas offrir plus d’avantages que le scanner. L’introduction de l’IRM a séquences rapides a amélioré l’apport de cette modalité d’imagerie : pour Trede (17) dans une étude prospective de 58 patients, l’IRM à séquences rapides montre une sensibilité, une spécificité et un taux de resécabilité respectivement de 95,7%, 93,5% et 80,4% supérieur à ceux du scanner et de l’échographie respectivement de 85,1%, 87,2% ,76,6% et 74,4%, 87,2% et 69,2%. Il conclut que l’IRM à séquences rapides est supérieur aux autres modalités d’imagerie. 5. La laparoscopie et l’écho-laparoscopie La laparoscopie et l’écho-laparoscopie constituent pour certains auteurs la procédure finale de la stadification tumorale permettant d’éviter un excès de laparotomie exploratrice. Cependant si la laparoscopie pourrait diagnostiquer une métastase hépatique ou une carcinose péritonéale non mise en évidence par l’imagerie, son bénéfice pour la stadification des cancers localement évolués du pancréas est controversé (18,8). 116 • • Nieveen Van Dijkum, étudiant 297 patients conclut que le bénéfice de la laparoscopie est faible ; en effet seulement 75 % des tumeurs classées résécables le sont effectivement, alors que le taux de détection des tumeurs non resécables est de 35 % seulement (18). Plusieurs études prospectives (8) ont montré que la laparoscopie est capable d’évaluer l’envahissement vasculaire des cancers pancréatiques avec une diminution du taux de laparotomies exploratrices. Cependant, pour la réussite de cette approche, la laparoscopie doit être associée à une écho-laparoscopie et effectuée avec un nombre suffisant de trocarts, une dissection correcte du petit épiploon, un abaissement du colon droit, un décollement duodénopancréatique et une ouverture de l’arrière cavité des épiploons. 6. L’artériographie n’est plus utilisée pour évaluer l’extention vasculaire du CP ; elle est moins sensible que la tomodensitométrie et l’écho-endoscopie pour le diagnostic de l’envahissement vasculaire. En pratique, le scanner spiralé et au mieux celui à multiples détecteurs est le plus souvent suffisant pour la stadification et la recherche d’envahissement vasculaire. Celui-ci peut être complétée par écho-endoscopie ou un IRM séquence rapide pour affiner l’études des rapports vasculaires des tumeurs localement évoluées ou à défaut par la laparoscopie . Enfin, malgré ces moyens de diagnostic, des métastases péritonéales peuvent échapper aux explorations, les cancers jugés résécables en pré-opératoire ne le sont pas en per-opératoire (19). Dans certains cas, l’envahissement vasculaire veineux ne peut être affirmé avec certitude avant la laparotomie (11). En effet, certaines adhérences tumorales aux vaisseaux notamment ceux du système porte peuvent s’avérer inflammatoires (18). III- Les critères d’envahissement vasculaire retenus en pré opératoire. D’importance inégale, les principaux termes désignant l’envahissement vasculaire rapportés dans la littérature (10,20) sont : • • • • • • • • La disparition de l’interface tumeur-vaisseau L’engainement vasculaire par la tumeur Le contact de la tumeur avec le vaisseau La sténose de vaisseau La thrombose de vaisseau Les signes d’hypertension portale segmentaire tronculaire La compression vasculaire La réduction segmentaire du calibre de vaisseau. L’évaluation de la non resécabilité est variable selon les auteurs : • • L’envahissement de l’artère mésentérique supérieur et du tronc coeliaque est considéré comme une contre indication à l’exérèse par la plus part des auteurs. Quand la tumeur envahit la VP ou la VMS, les critères de non résécabilité sont variablement appréciés :l’ engainement supérieur à 50 % de la circonférence d’un vaisseau (10) avec une sensibilité de 91 % et une spécificité de 92 % (20) 117 • • • • Le simple contact égal ou supérieur à 50 % avec une sensibilité de 84 % et une spécificité de 94 % (10). L’envahissement étendu du systéme porte. Pour certains auteurs, quand le ¼ de la circonférence du vaisseau est englobé, 100 % des tumeurs sont non résécables (10) Des essais de classification sont rapportés dans la littérature : LU(15), classe l’envahissement l’importance du contact de la veine avec la tumeur Loyer(19) propose une classification de 6 grades allant de A quand le plan graisseux entre le vaisseau et la tumeur est conservé au grade F quand la tumeur le sténose complètement ; 95% des classées A et B sont des tumeurs résécables sans résection veineuse , 47% des tumeurs de grade D nécessitent une résection veineuse alors que celles classées grades E et F sont non résécables. IV – Contre indication à la résection vasculaire Pour la plus part des auteurs, les métastases hépatiques l’envahissement ganglionnaire à distance (7), la carcinose péritonéale et l’envahissement de l’AMS (5,22 , 27, 24) ainsi que celui du tronc coeliaque constituent une contre indication à la résection pancréatique . La résection des tumeurs avec envahissement limité de la VMS et de la veine porte , sujet à controverse dans les années 90 (22) est de plus en plus rapportée dans les études récentes (6, 25, 26,28). L’envahissement isolé des petites branches vasculaire comme l’artère gastro-duodénale n’ empêche pas la résection (15). Une résection vasculaire est proposée si les explorations morphologiques montrent un envahissement inférieur à l’hémi-circonférence de la veine porte(11). V – La résécabilité du CP envahissant les vaisseaux. Le taux de résécabilité est faible allant de 2,6 % dans les centres non spécialisés à 22% dans les centres spécialisés (3). Les seules études qui ont rapporté des taux relativement élevés des tumeurs réséquées sont celles qui comportent un taux élevé de résection étendue duodéno-pancréatique et des vaisseaux du système porte (6, 29, 30,31). Ainsi selon le registre japonais de CP, alors que l’envahissement veineux de système porte est présent dans 50,87 % des cas, le taux de résécabilité est de 40% et une duodénopancréatectomie associant une résection veineuse porte est réalisée chez 40% des patients (6). Dans la même série, le taux de résection veineuse était de 17,6% en 1981 est de 33,6% en 2000. Le taux de résection artérielle est de 3,5 % en 1981 et 1,5 % en 2000. Pour Akimasa Nakao (4) 210 sur 314 cancers pancréatiques sont traités par une duodénopancréatectomie étendue entre 1981 et 2000, le taux de résécabilité est de 63,7% . 146 des patients ont eu une résection de la veine porte (73%) et 11 une résection artérielle (5,5 %). 118 Ainsi, pour certains auteurs, il faut une chirurgie agressive dont le but est d’augmenter le taux de résécabilité (8) mais quelle chirurgie agressive ? et existe-t-il un bénéfice réel de la résection vasculaire. VI – La résection duodéno-pancréatique (DP) associée à la résection vasculaire. La duodénopancréatectomie céphalique (intervention est Wipple) date de 1935, elle constitue la base du traitement du cancer du pancréas (32). La 1ère résection et reconstruction de la veine mésentérique supérieure lors d’une DP a été réalisée par Moore en 1951 (33). En 1973, Fortner (32) a développé l’exérèse étendue dite pancréatectomie régionale. Le but de cette intervention est d’améliorer le taux de résécabilité du cancer du pancréas et assurer des marges de résection sans résidu tumoral(Ro) (34).Cette intervention était associée à des taux élevés de mortalité élevés. La DP régionale consiste en l’exérèse en bloc du pancréas, des vaisseaux majeurs attenant au pancréas (veine porte, veine mésentérique, AMS et tronc coeliaque) des tissus mous, des ganglions péri-pancréatiques et ceux rétro-péritonéaux . La résection est étendue de l’hiatus oesophagien à l’artére mésentérique inférieure et jusqu’aux hiles rénaux (34) tableau 1 (35). La résection de la veine porte, définie comme une résection de la VMS et de la veine porte au contact du pancréas (29) est actuellement, de plus en plus acceptée comme option du traitement de CP avec suspicion d’envahissement de la veine porte (35). Il n’y a pas de consensus concernant la meilleure technique de l’abord et de la résection et la reconstruction de la veine porte durant la DP (21). Quand la veine porte ne peut être séparée de la tumeur durant l’intervention après squelettisation des gros vaisseaux (tronc coeliaque, artère hépatique, artère mésentérique et veine mésentérique, un envahissement de la veine porte est suspecté (29) et selon l’étendue de l’adhérence, une résection type Wedge ou segmentaire est pratiquée. Eléments de technique opératoire: La dissection totale du pancréas avant de procéder à la section veineuse expose largement la veine porte et permet un court clampage de la veine porte et une mobilisation de celle-ci permettant la resection facile jusqu’à 3cm de veine et une suture bout à bout de la veine. Le clampage n’excède souvent pas 1Omn et la stase intestinale n’est pas majorée, la moyenne opératoire de la DP est de 8h40mn (35), il n’existe pas de problèmes majeurs post-opératoire. Quand il n’y a pas de métastase à distance ou une totale occlusion de la VP; après abaissement du colon droit et décollement duodéno pancréatique, le rétro-péritoine et l’artère mésentérique supérieure sont évalués indemnes de lésion néoplasique, le bord inférieur du pancréas est alors disséqué pour accéder à la veine porte . Dissection complète du pédicule hépatique avec résection des tissus péri-vasculaires et des ganglions du hile hépatique , ceux de l’artère hépatique et du tronc coeliaque et ligature de l’artère gastro-duodénale; section de la VBP. Le colon droit mobilisé , l’artère mésentérique supérieure individualisée, est libérée du pancréas après ligature des petites branches sur son bord droit et les tissus lymphatiques à destinée pancréatique 119 Le jéjunum est abordé par section du ligament de Treitz, individualisation section de 10-20 cm du jéjunum proximal, il est mobilisé et on complète la libération de l’AMS de gauche à droite, ainsi l’AMS est complètement libérée du petit pancréas (processus unciforme). Après transection gastrique ou duodénale , le jujénum libéré est sectionné et décroisé . Pour une résection segmentaire de la veine porte ou de la veine mésentérique supérieure, le pancréas est libéré de la veine splénique jusqu’à la gauche de la jonction VMS et VP. Section pancréatique à ce niveau, le veine splénique est ligaturée et dérivée ; la tête pancréatique devient alors fixée uniquement au site de l’adhérence tumorale. Tous les tissus autours de la VP et la VMS sont disséqués circonférentiellement. La VP et la VMS deviennent alors complètement libérées de la bifurcation porte en avant jusqu’à la veine colique moyenne en bas. La veine porte est alors sectionnée entre 2 champs, la pièce opératoire tombe, on commence alors la reconstruction vasculaire. La plupart des auteurs pratiquent l’anastomose termino-terminale par suture directe ou avec l’interposition de greffon veineux à partie de la veine jugulaire, saphène interne, iliaque externe (31, 7, 23, 5, 21,30,26) ou par du gortex. Dans certains cas,quand la résection veineuse est limitée à la wedge une veinoraphie latérale par un patch veineux à partir de la saphène a été utilisé. Une large résection de la veine porte d’une tumeur localement évoluée nécessite une section de la veine splénique et sa dérivation sur la veine mésentérique inférieure ou une réimplantation à la veine mésentérique supérieure. En effet, la ligature simple peut entraîner une hypertension portale segmentaire avec parfois une hémorragie sévère par rupture de varices oesophagiennes (40). Un cathéter de pontage veineux mésentérico-porte est développée pour éviter la stase intestinale veineuse (30). 2-3 cm du confluent veineux mésentérico-porte peut être réséqué et reconstruit par anastomose termino-terminale sans besoin d interposition de greffon veineux ou prothèse. Différents types de résection veineuse peuvent être réalisés (fig ). 1 : une petite résection latérale ou tangentionnelle ou du mur postérieur de la veine réparée par suture ou patch saphène. 2 : quand la confluence mésentérique avec la veine splénique est atteinte, ligature de la veine splénique et anastomose termino-terminale. 3 : quand la tumeur envahit largement la veine, la suture ne peut pas être faite sans tension : interposition de greffon. 4 : quand envahissement limité VP ou VMS, anastomose termino-terminale avec conservation veine splénique ou interposition de greffon est nécessaire si la mobilité de la VP est limitée à cause de la conservation de la confluence VP et veine splénique. Les autres résections vasculaires sont rarement pratiquées. • • Artère hépatique quand l’envahissement est limité à l’origine de l’artère gastroduodénale et quand une artère hépatique droite est adhérente à la tumeur. Résection de la face antérieure de la veine cave inférieure. 120 VII. Evaluation du bénéfice de la résection veineuse des DP pour CP. Dans le passé la non possibilité de libérer la tumeur de la veine porte est considérée comme un signe de maladie localement avancée et constitue une contre-indication à la résection pancréatique et ceci à cause du risque opératoire accru et la faible survie chez les patients ayant eu une résection de la veine porte (6-7). La pancréatectomie régionale type I Fortner avec résection de la ponction pancréatique de la VP ou de la VMS n’a pas amélioré la survie (25) et était associée à une mortalité élevée égale à 21%. Au milieu des années 1990 des études ont montré la faisabilité de la resction de la veine porte avec des ttaux acceptables de mortalité(8-10in38) Dans les études récentes la mortalité a baissé, son taux varie de O à 8% (37), elle est inférieure à 5% dans les DP avec résection vasculaire La mortalité et la morbidité est équivalente à celle des DP standard. Elle est fonction du volume de malades opéré et de l’expérience des chirurgiens (11) (18) Cependant le bénéfice en terme de survie est toujours controversé, des études ont montré une amélioration de la survie des patients avec résection de la VP (21,29,39,25), d’autres études ont montré une faible survie (6,8,24,35,38). Actuellement, Ceux qui doivent bénéficier de la résection sont les patients à petite tumeur proche ou adhérente de la veine porte qui durant la chirurgie se prêtent à la résection veineuse avec une certitude d’avoir des marges de résection saines (Ro) (39). L’absence de marge envahie est le meilleur garant d’une chirurgie radicale. Une survie supérieure à 2ans est observée uniquement quand la résection est R0. Chez les patients qui ont eu une résection veineuse et Ro il n’y a pas de différence significative avec ceux qui ont eu une DPC standard (11). La résection R1 a un mauvais Pronostic sans relation avec la taille ni le siège de la tumeur cependant les patients répondent mieux à la chimiothérapie (5). Chez les patients, une résection majeure veineuse doit être envisagé si on peut obtenir une resection Ro (11) La resection R0 comprend une lymphadénectomieétendue qui suggère une survie augmentée(19). Il n’existe pas de différence significative concernant la mortalité et la survie entre les duodéno-pancréatectomie standard et celle avec curage lymphatique étendu cependant quand les ganglions sont envahis la courbe du survie est la meilleure chez les patients qui ont une lymphadenectomie étendue (32) d’autres études rapportent une survie meilleure chez les patients qui ont bénéficié d’une lymphadénectomie étendue (32) .Ceci suggère une corrélation entre l’envahissement porte , l’envahissement ganglionnaire et de marges de résection positives , l’envahissement de plexus nerveux et envahissement des tissus péri-pancréatiques. Les patients avec envahissement porte histologiquement prouvé ont un plus mauvais Pronstic probablement à cause de la difficulté d’avoir de marges de résection saines. 121 VIII. CONCLUSION La résection de la veine porte augmente potentiellement les chances de marge de résection saine chez des patients sélectionnés. La resection tumorale et les progrés du traitement adjuvent sont susceptiles d’améliorer la survie du cancer du pancréas. Reférences : 1. Brennam MF, Kinsella TJ, Casper ES : Cancer of the pancreas. In : De Vita VT, Hellman S, Rosenberg SA (Eds;). Cancer : Principles & Pratrice of Oncology. Philadelphia, PA : JB Lippincott, Co ; 1993 ; pp. 849-882. 2. Wasrshaw AL, Fernandez-del Castillo F : Pancreatic carcinoma. N. Engl J Med 1992 ; 326 ; 455-465. 3. Bramhall SR, Allum WH, Jones AG et al. Treatment of survival in 13,560 patients with pancreatic cancer, ans incidence of the disease, in the West Midlands : an epidemiological study. 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Au moment du diagnostic, seuls 5 à 30% [1] des patients peuvent prétendre à une chirurgie potentiellement curative. Ceci laisse ainsi une large indication aux traitements palliatifs. Les traitements palliatifs n’améliorent pas la survie mais le confort des patients en permettant la disparition des symptômes : ictère, vomissements et/ou douleurs au prix d’une morbidité minimale. Le traitement palliatif peut être réalisé par des techniques chirurgicales ou non chirurgicales. Le traitement palliatif chirurgical consiste en une anastomose bilio-digestive associée ou non à une gastro-entéro-anastomose et/ou une splanchnicectomie peropératoire. Ce traitement dépend des symptômes donc du siège de la tumeur qui est le plus souvent céphalique. La résection palliative proposée par certains auteurs reste à discuter vu le taux de morbimortalité élevé pour des patients dont la survie est courte. La voie d’abord laparoscopique, vu les avantages liés aux suites opératoires potentiellement plus simples, représente un atout chez des patients souvent fragiles dont l’espérance de vie est limitée. L’indication du traitement chirurgical palliatif peut être posée d’emblée ou décidée en per opératoire si la résection s’avère être impossible ou non curative. Résultats de notre série : Deux cent cinquante et un carcinomes pancréatiques (51,5%) ont subi une intervention chirurgicale à visée palliative. A Hépatico jéjunale A Cholédoco duodénale Gastro entérostomie GEA + A Hep Jej GEA + A Chol duod Total Fréquence 2 64 23 21 106 216 Pour cent 1 30 11 10 49 100,0 Tableau 1 : Répartition des interventions chirurgicales palliatives Il est à noter que le nombre des interventions d’exérèse à visée palliative ou à postériori palliative est difficile à apprécier sur cette étude rétrospective. Il s’agissait dans tous les cas de tumeurs céphaliques ou corporéo céphaliques. La mortalité post opératoire globale était de 16 malades (6,4%). Cent quatre vingt sept malades ont eu des suites opératoires simples. Quarante huit patients ont présenté des complications non létales. Vingt neuf malades ont présenté des complications médicales non spécifiques. Deux malades ont présenté une hémorragie post opératoire. Huit malades ont présenté une fistule digestive externe. Six malades ont présenté une péritonite post opératoire. 125 Méthodes : Le traitement chirurgical palliatif a pour but de traiter les symptômes de la maladie et peut consister en plusieurs gestes qui peuvent être associés au cours de la même intervention [2,3]. La voie d’abord : Classiquement la voie d’abord qui donne le meilleur jour sur la région sous hépatique est l’incision sous costale droite qui peut être élargie à la demande à gauche, si on prévoit un geste sur l’estomac ou le grêle. Cependant la voie laparoscopique actuellement bien maîtrisée pour la pathologie biliaire avec la possibilité de réaliser des sutures intracorporelles peut être proposée pour les dérivations biliaires isolées dans certains centres spécialisés. L’exploration : Le premier temps opératoire, comme pour toute chirurgie, est exploratoire pour confirmer le diagnostic de tumeur pancréatique et évaluer son degré d’extension suspecté aux explorations morphologiques. Elle recherchera un envahissement des organes de voisinage et/ou vasculaire, des métastases ganglionnaires, hépatiques et/ou péritonéales. En fait le but princeps de cette exploration est de vérifier si le programme chirurgical palliatif prévu est utile et bien réalisable. Les dérivations biliaires : L’ictère est le maître symptôme des cancers de la tête du pancréas par la compression cholédocienne qu’ils occasionnent. Et c’est le prurit féroce qui lui est associé qui est le plus gênant. Plusieurs types d’anastomoses sont décrits utilisant d’un coté soit la vésicule soit la voie biliaire principale et d’un autre coté soit le duodénum soit une anse jéjunale en « y » à la ROUX qui peut être montée en trans-mésocolique ou en précolique. Les anastomoses sont réalisées au fil à résorption lente, au points séparés ou au par des surjets, selon les habitudes et la conformation anatomique du patient. Le drainage tubulaire juxta anastomotique est conseillé vu le risque de fistules biliaires sur ces terrains à mauvais pouvoir de cicatrisation. Les anastomoses sur la voie biliaire principale : Sont les anastomoses les plus fréquemment réalisées. Elles ne peuvent être envisagées que lorsque l’accès à voie biliaire principale est possible et n’est par barré par une coulée ganglionnaire pédiculaire ou une important cavernome porte. Elles utilisent essentiellement le canal hépatique commun après cholécystectomie et sont plus souvent réalisées en latéral qu’en terminal. Les anastomoses terminales sont plus pourvoyeuses de fistules que les anastomoses latérales vu la dévascularisation occasionnée par la libération de la voie biliaire principale sur toute sa circonférence. Anastomose cholédoco-duodénale (figure n°1) : Elle a l’avantage d’être de réalisation rapide utilisant 2 structures contiguës. Pour une dérivation latéro-latérale, la voie biliaire principale est disséquée de façon à pouvoir réaliser une anastomose large pour prévenir les obstructions alimentaires. L’incision cholédocienne est transversale, la duodénale est longitudinale sur son bord supérieur. Pour une dérivation termino-latérale, la voie biliaire principale est disséquée sur toute sa circonférence et sectionnée à un niveau permettant une anastomose sans traction. Le moignon distal est fermé avant la réalisation de l’anastomose. Anastomose cholédoco-jéjunale (figure n°2) : Elle est plus longue à réaliser, mais prévient les reflux alimentaires. Elle est le plus souvent réalisée en latéro-latéral qu’en termino-latéral sur une anse montée en « y »à la ROUX. 126 Les anastomoses sur la vésicule biliaire : Sont réalisées moins fréquemment et ne peuvent être envisagées qu’en l’absence d’envahissement de la convergence cystico-cholédocienne. La perméabilité du canal cystique est vérifiée par la réalisation d’une cholangiographie après ponction à l’aiguille au niveau de la future zone anastomotique. Du fait de la distension vésiculaire, l’anastomose se fait sans tension. La vésicule est vidée et l’endroit de la ponction élargi selon un axe transversal. Habituellement les anastomoses sur la vésicule biliaire ne sont réalisées que lorsque la voie biliaire principale n’est pas accessible. Anastomose cholécysto-duodénale (figure n°3) : A l’avantage d’être la plus simple et la plus rapide à réaliser, le duodénum est incisé sur 2 à 3 cm. Anastomose cholécysto-jéjunale (figure n°4) : Moins rapide, elle permet d’éviter la proximité de la tumeur qui pourrait rapidement envahir le montage, en utilisant une anse exclue en « y » selon Roux. L’anastomose est réalisée en latéro-latéral après fermeture du moignon jéjunal. La dérivation digestive : Est réalisée par une anastomose gastro-jéjunale au point le plus déclive de l’estomac, mais aussi à distance du processus tumoral. Pour le cancer de la tête du pancréas, elle est réalisée si possible sur la face postérieure de l’estomac en trans-mésocolique, le plus près possible du pylore et de la grande courbure. Pour le cancer du corps ou de la queue envahissant le mésocolon transverse, l’anse jéjunale est passée en précolique (figure n°5) et anastomosée sur la face antérieure de l’estomac. L’anastomose est située à environ 30 cm en aval de l’angle de Treitz. L’estomac et le jéjunum sont adossés en latéro-latéral par deux hémi-surjets de fil à résorption lente sur une longueur de 10 cm environ. Une sonde gastrique est passée en trans-anastomotique, cathétérisant l’anse efférente. L’association à une vagotomie tronculaire pour prévenir un ulcère anastomotique n’est pas nécessaire chez ces patients dont la survie est courte. L’ulcère anastomotique et par conséquence les hémorragies digestives sont prévenus par la prise d’anti-sécrétoire. Les splanchnicectomies : Consistent à une interruption de l’innervation splanchnique soit par section des nerfs à des niveaux différents de leur trajet, soit par neurolyse chimique. Leur but est le traitement de la douleur. Plusieurs types de splanchnicectomies chirurgicales peuvent être proposées : Chimique : Lors d’une laparotomie pour chirurgie palliative, il est possible d’associer une splanchnicectomie chimique. Celle-ci est réalisée par un abord de l’aorte abdominale au dessus du tronc coeliaque. Elle consiste en une injection de 20 cc de phénol à 6% ou d’alcool à 50% en rétropéritonéal de part et d’autre de l’aorte en s’assurant d’être en extravasculaire par une aspiration première. Chirurgicales : La splanchnicectomie doit être bilatérale pour être efficace sur la douleur. Elle peut être réalisée par voie abdominale ou thoracique. La voie abdominale : C’est la voie d’abord classique. Deux techniques sont possibles : La splanchnicectomie trans-hiatale : est réalisée par abord de l’espace inframédiastinal postérieur. Sa réalisation est presque toujours possible car le site 127 opératoire est loin du processus tumoral. La profondeur de cet espace dépend de la conformation du patient et peut nécessiter un élargissement de l’orifice hiatal. Le nerf splanchnique droit est abordé entre le corps vertébral à proximité du canal thoracique en avant et en dedans de la grande veine azygos et réséqué sur 2 à 3 cm. L’abord du nerf splanchnique gauche est plus profond et nécessite le réclinement de l’aorte à droite. Il est réséqué également sur 2 à 3 cm. La voie rétro-pancréatique : le ganglion coeliaque droit est abordé et réséqué sur la face antérieure du pilier droit du diaphragme entre l’aorte et la veine cave inférieure après un large décollement duodéno-pancréatique. La résection du ganglion coeliaque gauche nécessite l’ouverture de l’arrière cavité des épiploons, le réclinement du pancréas vers le haut et du mésocolon transverse vers le bas afin d’exposer la veine rénale gauche et le flanc gauche de l’aorte. La résection intéresse la corne gauche du ganglion et la partie terminale du nerf splanchnique. L’accès au ganglion coeliaque gauche peut être barré par un envahissement tumoral massif rétro-péritonéal. La voie thoracique : Elle permet comme la voie trans-hiatale d’aborder les nerfs splanchniques. L’intervention est réalisée par thoracoscopie. Le patient est installé soit en décubitus latéral et nécessite une deuxième installation pour le coté contro-latéral, soit en décubitus ventral qui évite le changement de position d’une thoracoscopie à l’autre. 3 ou 4 trocarts sont nécessaires. La plèvre médiastinale est incisée pour accéder au plan nerveux. Après résection nerveuse, l’intervention est terminée par un drainage pleural. Les résections à visée palliative : Malgrè sa mauvaise réputation, certains auteurs se sont intéressés la résection palliative et son éventuel bénéfice sur la survie. Elle consiste en une duodéno-pancréatectomie ou une pancréatectomie gauche selon le siège de la tumeur (techniques décrites dans un chapitre précédent). La résection céphalique peut être étendue à l’axe veine avec reconstruction ou interposition veineuse. Dans la résection gauche la rate est emportée de principe, une résection colique transverse peut s’avérer nécessaire en cas d’envahissement. La résection est dite palliative s’il persiste un résidu tumoral qu’il soit microscopique (R1) ou macroscopique (R2). Résultats: La chirurgie palliative a longtemps été la seule arme thérapeutique du cancer du pancréas. Les dérivations biliaires ont pour but de traiter l’ictère et le prurit féroce qui l’accompagne. La mortalité des anastomoses bilio-digestives et de 13 à 20 % en fonction du type de dérivation réalisée : 20% pour les anastomoses sur la vésicule biliaire et 13 à 14% pour les anastomoses sur la voie biliaire principale. La morbidité est de 26 à 35 % représentée essentiellement par la fistule biliaire [4]. Le taux de récidive de l’ictère et de l’angiocholite est faible. Les dérivations sur la vésicule sont réalisées de nécessité quand l’accès à la voie biliaire principale et impossible. Les résultats de l’anastomose cholédoco-duodénale et de l’anastomose hépatico-jéjunale sont équivalents. La première étant de réalisation plus rapide, elle est préférée par la plupart des équipes. L’alternative aux dérivations biliaires chirurgicales et la mise en place de « stent » dans la voie biliaire principale par voie endoscopique [5]. Les travaux comparants les deux méthodes notent des taux de mortalité et de morbidité plus faibles mais un taux de récidive de l’ictère plus important 9 à 36% et 20% de sténose duodénale [6-8]. En présence d’une sténose duodénale au moment de la dérivation biliaire une gastro-entéroanastomose s’impose. Pour plusieurs auteurs une dérivation digestive associée, même en 128 dehors d’une obstruction duodénale est toujours souhaitable vu le risque de la voir apparaître au cours de l’évolution. Elle n’augmente ni la mortalité ni la morbidité et ne fait que rallonger l’intervention d’une vingtaine de minutes [3,7-9]. Les douleurs sont retrouvées chez 70 % des patients au moment du diagnostic. Ces douleurs sont attribuées à une compression ou à un envahissement des plexus cœliaques qui assurent l’innervation du pancréas et des organes sus-mésocoliques. Ainsi, elles sont plus fréquemment et rapidement retrouvées dans l’évolution des cancers corporéo-isthmiques où elles représentent souvent le premier symptôme. Lorsqu’une laparotomie est réalisée et que l’exérèse tumorale n’est pas réalisable, un traitement chirurgical de la douleur peut néanmoins être effectué. La neurolyse chimique est un geste rapide qui n’aggrave ni la mortalité ni la morbidité. Son efficacité est de 70 à 80% et dure 4 mois. A l’opposé, les splanchnicectomies tran-shiathales ou thoracoscopique ou les exérèses des ganglions coeliaques, sont plus difficiles à réaliser, rallongent considérablement le temps opératoire avec une morbidité propre de l’ordre de 6% [3] Devant une survie moyenne faible (8 mois) des patients traités par une chirurgie palliative et l’amélioration des résultats des résections pancréatiques avec une mortalité inférieure à 10% et une morbidité de 30% environ [1,11,12,13] certains auteurs ont proposé une résection pancréatique palliative pour les tumeurs localement avancées. Il semble d’après les séries à faibles effectifs qu’il y ait une amélioration de la survie moyenne : 11 à 17 mois. Cependant ces résections sont soit réalisées dans des centres experts ou bien la nature non curative de l’intervention est découverte à la lecture histologique de la pièce opératoire (R1). Indications : Pour la majorité des auteurs la chirurgie palliative est contrindiquée chez les patients âgés en mauvais état général, tarés ou métastatiques dont la survie est courte. Elle est essentiellement indiquée chez les patients en bon état général de moins de 70 ans et qui présentent une tumeur localement avancée ou non résécable [7-10,15]. Il consiste en une double dérivation : cholédoco-duodénale ou accessoirement une hépaticojéjunale associée à une gastro-entéro-anastomose. Une neurolyse chimique peut être associée chez les patients qui sont algique en pré opératoire. Les résections palliatives restent réservées aux centres experts. Conclusion : Le cancer du pancréas demeure un cancer de mauvais. Le traitement chirurgical palliatif a pour but d’améliore la qualité de vie sans pour autant être grevé d’une lourde mortalité et morbidité nécessitant une hospitalisation longue chez des patients dont la survie est courte. L’intervention de choix reste la double dérivation biliaire et digestive. 129 Figure n°1 : Anastomose cholédoco-duodénale Figure n°2 : Anastomose cholédoco-jéjunale latéro-latérale sur anse montée à la ROUX Figure n°3 : Anastomose cholécysto-duodénale Figure n°5 : colique Gastro-entéro-anastomose Figure n°4 : Anastomose cholécysto-jéjunale pré- 130 REFERENCES 1- Baulieux J, Delpero J.R. Traitement chirurgical du cancer du pancréas : les exérèses à visée curative. Ann. Chir. 2000 ; 125 : 609-17. 2- Weber J.C, Gonzales N, Bachellier P, Wolf P et Jaeck D. Traitement chirurgical palliatif des cancers du pancréas. Encycl Méd Chir. Elsevier SAS, Paris, Techniques chirurgicales Appareil digestif, 40-894, 2000. 3- Bali B, Deixonne B. Technique des splanchnicectomies. Encycl Méd Chir. Elsevier SAS, Paris, Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-895, 1996. 4- Huguier M, Baumel H, Manderscheid JC, Houry S. Surgical palliation for unresected cancer of the exocrine pancreas. 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Service de chirurgie Viscérale Hôpital Militaire de Tunis. I/ Introduction : Le cancer du pancréas est une affection fréquente, selon le registre des cancers NordTunisie, il occupe la quatrième place des cancers digestifs, il vient après le cancer de l’estomac, du colon et celui du rectum. Le cancer du pancréas évolue à bas bruit et son diagnostic est souvent fait à un stade tardif . Malgré l’apparition de moyens de diagnostic performants, en particulier l’écho endoscopie, le taux de malades résécables lors du diagnostic reste faible : 20% (1) et le taux de survie à cinq ans reste très bas 15 à 20% pour les meilleures séries (1). Ainsi les résections pancréatiques à visée curative restent peu nombreuses et la majorité des malades sont souvent proposés pour des traitements palliatifs pour améliorer leur qualité de survie. Les deux tiers des cancers du pancréas siègent au niveau de la tête, quatre vingt cinq pour cent de ces malades ne sont pas résécables au moment du diagnostic et la majorité d’entre eux se présentent avec un ictère et/ou des douleurs et/ou une obstruction digestive haute. Le traitement palliatif a pour but d’agir sur ces trois facteurs. Ce traitement est classiquement chirurgical. Depuis une quinzaine d’années, sont apparues plusieurs techniques non chirurgicales réalisées en per cutané soit per endoscopie. II / Le traitement de l’ictère : 70 à 85% des patients ayant un cancer du pancréas présentent un ictère et ils sont vus à un stade avancé (III et IV) et la tumeur n’est plus résécable ; ils sont ainsi proposés pour des traitement palliatifs. L’ictère est souvent associé à un prurit, des nausées et une anorexie ce qui aggrave le pronostic. Depuis 1982 , l’ictère peut être traité par la mise en place d’une prothèse plastique par voie endoscopique ou moins souvent percutanée. Figure 1 : Radiographie d’une double prothèse biliaire drainant les deux canaux hépatiques. 132 Certains travaux randomisés ont comparé le traitement palliatif endoscopique au bypass chirurgical ; ils ont montré que le nombre de fuites biliaires et d’angiocholite est plus important pour le bypass chirurgical, alors que la rechute de l’ictère à distance est plus fréquente pour les prothèses endoscopiques(2). Une autre série rétrospective comparative portant sur 107 malades a comparé le stent biliaire au bypass chirurgical et a montré un taux de succès comparable pour les deux méthodes mais un taux de morbidité (7.3% vs 24%), un taux de mortalité (3.6% vs 16%) et un séjour hospitalier moyen (10j vs 26j) en faveur du traitement endoscopique de l’ictère.(3). La possibilité du brossage canalaire pour un examen cytologique est un autre avantage pour la méthode endoscopique (4). Le choix du traitement palliatif ne pose pas de problème pour les malades non opérables ou à haut risque opératoire ou pour les récidives tumorales, il devient difficile pour les malades en bon état général et ayant une espérance de vie prolongée. En effet l’avantage de la voie endoscopique diminue avec le temps, puisque au bout de 3 à 4 mois on est obligé de changer la prothèse dans 50% des cas (4). Certaines améliorations ont été apportées au matériel et l’utilisation depuis 1990 de prothèses métalliques auto expansives diminue nettement ce risque d’obstruction et de rechute de l’ictère mais ce sont des prothèses définitives qu’on ne peut plus enlever pour les changer en cas d’obstruction ; des améliorations du matériel sont en cours par pallier cet inconvénient. III / Le traitement de l’obstruction duodénale : Moins de 5% des malades ayant un cancer du pancréas se présentent avec une obstruction duodénale au moment du diagnostic (1) et 13 à 20% des malades vont présenter une obstruction duodénale au cours de leur survie (1- 4). Plusieurs publications ont montré l’intérêt de la mise en place de prothèse auto expansive par voie endoscopique pour les sténoses duodénales néoplasiques. Park (in 8) a montré la faisabilité du stent duodénal pour obstruction néoplasique due au cancer de la tête du pancréas avec un taux de succès immédiat de 67 à 87% et un taux de complications élevé de 25% ; les complications observées sont : les perforations, les fistules et l’hémorragie digestive (5). Figure 2 : Transit opaque à travers une prothèse duodénale. L’usage de ces prothèses reste limité à cause de leur faible taux de succès, le taux élevé de complications et la disposition en cadre du duodénum qui limite la lumière de la prothèse. 133 IV / Le traitement de la douleur : Quatre vingt cinq pour cent des malades présentant un cancer du pancréas avancé ont des douleurs au moment du diagnostic (6). Ces douleurs sont le résultat de plusieurs facteurs : -L’extension tumorale aux terminaisons nerveuses du plexus splanchnique. -La distension de l’arbre biliaire. -La distension des canaux pancréatiques en amont de la tumeur. - Les douleurs secondaires aux explorations invasives et à la chimiothérapie. Dans la majorité des cas les douleurs du cancer du pancréas sont typiquement localisées au niveau de la région sus ombilicale, évoluent de façon continue, et irradient au dos. Parfois elles sont localisées uniquement au dos. Contrairement au traitement non chirurgical de l’ictère réservé aux tumeurs non extirpables, les traitements non chirurgicaux de la douleur sont indiqués pour tous les malades opérés ou non opérés. A- Les traitements non chirurgicaux « invasifs » : 1-Le stent biliaire : Le stent biliaire peut améliorer les douleurs d’origine biliaire dues à la distension de l’arbre biliaire, ces douleurs peuvent s’améliorer ou même disparaître à la mise en place de la prothèse biliaire. 2-Le stent pancréatique : Dans 15 pour cent des cas les douleurs du cancer du pancréas siègent au niveau de la région épigastrique et/ou de l’hypocondre gauche, elles sont déclenchées par la prise alimentaire, irradient en arrière, et sont calmées spontanément au bout d’une à deux heures après le repas. Ces douleurs sont expliquées par la distension des canaux pancréatiques et peuvent être contrôlées par la mise en place d’un stent pancréatique (6). Cette distension des canaux pancréatiques peut être confirmée par la CPRE ou la BiliIRM. Le stent pancréatique n’est pas encore de pratique courante, il peut améliorer les douleurs d’origine canalaire pancréatique ; en effet parmi 355 malades présentant un cancer pancréatique Costamagna (6) a mis en place un stent pancréatique chez 55 d’entre-eux dont 50 pour cause de douleurs canalaires pancréatique secondaires à un cancer du pancréas. Il a observé une disparition totale des douleurs dans 61% des cas, une diminution partielle des douleurs dans 26% des cas et un échec dans seulement 13% des cas. En plus de son efficacité contre la douleur, ces prothèses peuvent améliorer l’état nutritionnel des malades en perméabilisant les canaux pancréatiques. 3-Les splanchnicectomies : -La splanchnicectomie percutanée sous scanner : elle consiste à infiltrer le plexus coeliaque par voie postérieure, de part et d’autre du tronc coeliaque par de l’alcool absolu, cette technique améliore les douleurs mieux que les antalgiques par voie systémique mais ce bénéfice tend à la baisse avec le temps (7). Cette approche est toujours postérieure et certaines paraplégies ont été décrites (8). - Plus récemment on a décrit une autre voie d’accès au plexus splanchnique, par voie endoscopique et sous contrôle écho endoscopique on a pu pratiquer la splanchnicectomie par voie antérieure, ceci permet d’éviter les racines nerveuse rachidienne pour diminuer le risque de paraplégie. 134 Figure 3 : Schéma de la splanchnicectomie sous écho endoscopie. ( Arcidiacono PG ; Rossi M JOP 2004).(9) Cette technique a permis une diminution significative des douleurs à court terme chez 78% des malades et seulement chez 30% des malades à long terme (10). Certains incidents ont été décrits pour cette voie d’accès au plexus splanchnique : Hypotension orthostatique, diarrhée transitoire, abcès rétro péritonéal, para parésie et pseudo anévrysme.(11-12-13) Par voie percutanée ou par endoscopie, il n’y a pas de différence significative en ce qui concerne le contrôle de la douleur (14-15). B- Les traitements pharmacologiques de la douleur (16): Le traitement médical de la douleur du patient cancéreux doit respecter plusieurs principes : - Il faut préférer la voie orale. - Leur administration doit être systématique pour prévenir les douleurs et en cas de besoin prescrire des doses supplémentaires en cas de crise. - Conserver le maximum d’autonomie et de confort d’existence au patient. - Traiter systématiquement les symptômes secondaires du traitement antalgique : nausées, troubles du transit, anxiété ou dépression. 1- Les antalgiques non morphiniques : Ce sont les analgésiques du palier I de l’échelle de l’OMS, ils doivent être prescris en première intention et peuvent être associés à tous les produits des autres paliers. Ils sont rangés en deux grandes classes. -Les antalgiques antipyrétiques : Ce groupe est constitué par le paracétamol, ce dernier est le produit antalgique le plus utilisé. Il a une demi vie de 2 heures, et doit être administré à la dose de 50 mg/ Kg/ 24 heures toutes les 4 heures. Son principal effet secondaire est une hépato toxicité le faisant contre indiquer en cas d’atteinte hépatique. -Les antalgiques anti inflammatoires : L’aspirine ou acide acétyl salycilique est connu de longue date pour ses propriétés antiinflammatoire (6 g/ 24 heures), antipyrétique et antalgique à la dose de 3 g/ 24 heures. Ses effets secondaires peuvent en limiter la prescription particulièrement au niveau gastrique, rénal et cutané en plus de l’effet antiagrégant plaquettaire irréversible pendant une dizaine de jours. Les AINS : Il en existe plusieurs classes et leur effet antalgique est voisin de l’aspirine ; en cas d’emploi prolongé leur prescription doit mettre en balance les effets antalgiques et le risque de survenue des effets secondaires gastrique, rénal, hépatique et hématologique. 135 2- Les antalgiques morphiniques : -Les morphiniques mineurs : sont les antalgiques du palier II de l’OMS et sont représentés par 3 produits : La codéine ; prescrite par voie orale à la dose de 3 à 5 mg/ Kg / jour, elle est 10 fois moins puissante que la morphine et souvent associée aux antalgiques non morphiniques, sa demi vie est de 4 heures. Ses effets secondaires sont ceux de la morphine : somnolence, nausées et constipation. Le dextropropoxyphène ; il est 15 fois moins puissant que la morphine ; administré à la dose de 5 à 10 mg/ Kg/ jour par voie orale, il a une demi vie longue avec un risque d’accumulation chez les insuffisants rénaux. Il existe soit sous forme pure : (antalvic® : 60 mg de dextropropoxyphène ) ou associé au paracétamol ( di-antalvic® : 30 mg de dextropropoxyphène et 400 mg de paracétamol). Ses effets secondaires sont ceux de la codéine avec en plus le risque d’hypoglycémie et de rectite pour la forme rectale. L’extrait d’opium : (lamaline) ; c’est une association orale d’opium ( 10 mg par gélule ), de caféine, de belladone et de 300 mg de paracétamol. Les peises doivent être répétés toutes les 4 à 6 heures. Une forme rectale est aussi disponible. -Les morphiniques majeurs ; sont les antalgiques du palier III de l’OMS : Le buprénorphine ( Temgesic®) , il existe sous forme de comprimés à 0.20 mg par voie sublinguale et en ampoule injectable IM de 0.3 mg, c’est un antalgique puissant dont la durée d’action est de 8 heures. Sa tolérance peut être mauvaise chez certains patients : nausées, vomissements, vertiges et somnolence. Le dextromoramide ( palfium®) administré par voie orale ou parentérale, il a une durée d’action faible et il est réservé pour la prévention des douleurs lors de certains actes d’explorations ou chirurgicaux. La péthidine (dolosal®) : Il est intéressent par son effet atropinique antispasmodique, mais l’accumulation de ses métabolites le fait contre indiquer chez les malades à risque convulsif et chez les insuffisants hépatiques. Le chlorydrate de morphine : Il constitue le produit de référence du traitement de la douleur cancéreuse moyenne ou sévère. La morphine ne comporte pas d’effet plafond et elle existe sous nombreuses formes : orale sublinguale, intra nasale, transcutanée , intra rectale et parentérale. Des formes à libération retard sont commercialisée pour palier aux 6 prises journalières répétées de la forme classique : (moscontin®) à la dose de 1 mg/ Kg/ jour, les doses seront augmentées de 50% en cas de non réponse et l’évaluation de la douleur doit se faire de façon rapprochée ; tous les 2 à 3 jours. L’augmentation de sa posologie au cours du temps permet de garder une bonne efficacité. Un certain nombres de règles sont à connaître : -L’ordonnance se fait sur un carnet à souche. -Les souches doivent être conservés le plus longtemps possible. -La posologie doit être indiquée en toutes lettres. -La durée du traitement est limité à 7 jours d’où la nécessité de refaire les ordonnances. Lorsque la voie orale n’est plus possible, on peut utiliser la voie sous cutanée, les doses doivent être divisées par deux ; ou la voie transdermique en utilisant les patchs de fentanyl ( durogesic®) qui permettent une libération continue de fentanyl sur une période de 72 heures et sont indiqués chez les malades ayant des douleurs constantes dans le temps. 136 V- Conclusion : Le cancer du pancréas est une affection fréquente et de très mauvais pronostic ; plus de 80% des malades sont proposés pour un traitement palliatif. Ceux qui sont dans un état général altéré, à haut risque opératoire, sont proposés pour les traitements non opératoires. Avec le développement des moyens endoscopiques non opératoires qui deviennent de plus en plus fiables, les traitements non opératoires peuvent être indiqués même pour des malades en bon état général; ils ont des résultats immédiats meilleurs que le traitement chirurgical en terme de mortalité et de morbidité mais leur avantage s’estompe avec le temps. Le choix sera donc en fonction de la chance de survie chez ces malades. Les malades qui ont une tumeur localement avancée ou avec des métastases et dont la chance de survie n’excède pas 6 mois sont proposés pour la palliation non chirurgicale ; alors que les malades qui ont une tumeur non résécable et une chance de survie prolongée sont proposés pour la palliation chirurgicale. Références : 1- De Braud F; Cascinu S; Gatta G. Cancer of pancreas. Critical Reviews in Oncology/ Hematology 2004 ; 50 : 147-55. 2- Smith AC ; Dowsett JF ; Russel RC et al. 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Effect of neurolytic celiac plexus block on pain relief, quality of life, and survival in patients with unresectable pancreatic cancer. JAMA 2004; 291: 1092-9. 8- Eisenberg E, Carr DB, Chalmers CT. Neurolytic celiac plexus block for treatment of cancer pain; a meta analysis. Anesth Analg 1995; 80: 290-5. 9Arcidiacono P G; Rossi M Celiac plexus neurolysis. JOP. J Pancréas 2004; 5: 315-21. 10- ersema MJ; Wiersema LM. Endosonography guided celiac plexus neurolysis. 137 Gastrointest Endosc 1996; 44: 656-62. 11- Chan VW. Chronic diarrhea: an uncommon side effect of celiac plexus block. Anesth Analg 1996; 82: 205-7. 12- Navarro-Martinez J; Montes A; Comps O ; Sitges-Serra A. Retroperitoneal abcess after neurolytic celiac plexus block from the anterior approach. RegAnesth Pain Med 2003; 28: 528-30. 13- Kumar A; Tripathi SS; Dhar D; Bhattacharya A. A case of reversible paraparesis following celiac plexus block. RegAnesth Pain Med 2001; 26: 75-8. 14- Rykowski J J: Hilgier M. 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Malgré une meilleure compréhension de la biologie du cancer du pancréas, la survie médiane, à ce stade, est de 4 à 6 mois. Seuls 10% des malades sont résécables. La résection chirurgicale améliore le pronostic mais la survie médiane ne dépasse pas 11 à 18 mois. Les échecs sont dus aux récidives locales, ou aux métastases hépatiques ou les 2, survenant les 2 premières années après la chirurgie. D’où l’intérêt d’un traitement systémique, associé à la radiothérapie, en adjuvant dans les formes résécables, ou dans les formes localement avancées. LA CHIMIOTHERAPIE DANS LES FORMES METASTATIQUES. Le cancer du pancréas métastatique est fréquemment résistant aux traitements standards de chimiothérapie. Un grand nombre d’agents cytotoxiques ont été étudiés, mais les résultats, aussi bien de la monochimiothérapie que des associations, en terme de taux de réponse et de survie globale, sont décevants. Avant 1996, le seul traitement reconnu efficace était le 5-FluoroUracile (5-FU). Il a été utilisé en bolus, en perfusion continue de 5 jours, ou en perfusion continue jusqu’à la progression. Seul ou en association avec des modulateurs biochimiques tel que l’Acide Folinique ou l’Interféron alpha, les taux de réponse étaient de moins de 20% et la survie médiane était de 6 mois. L’EORTC a utilisé le 5-FU à fortes doses (2,6 g/m² en perfusion continue de 24 heures) en hebdomadaire associé à l’Acide Folinique (500 mg/m²). Le taux de réponse était de 9% (aucune rémission complète) et la survie médiane était de 19 semaines (1). Les associations sont égales ou légèrement supérieures au 5-FU en monothérapie, en terme de taux de réponse mais la survie médiane reste inchangée. L’EORTC a initié des études avec Cisplatine, Ifosfamide, Epirubicine et d’autres associations à base d’Epirubicine. Cependant, le mauvais état général des patients, en phase métastatique, rend mauvaise la tolérance de la chimiothérapie. Ainsi, les nouveaux protocoles avaient pour but d’utiliser des associations moins toxiques. Ducreux et coll. ont rapporté une étude associant le protocole LV5FU2 (utilisé dans les cancers colo rectaux), au Cisplatine à la dose de 50 mg/m² au jour 2. Le taux de réponse était de 29% (dont une rémission complète), la survie médiane était de 9 mois, et la survie à 1 an de 25%, avec une bonne tolérance (2). Ce même auteur a évalué, par une étude randomisée de phase II, l’association Oxaliplatine + 5-FU en perfusion continue de 4 jours, versus Oxaliplatine seul, versus 5-FU en perfusion continue seul. L’association s’est révélée plus efficace que la monothérapie mais le taux de réponse n’était que de 10% et la survie médiane de 9 mois, avec une bonne tolérance (3). Depuis 1996, la Gemcitabine a été approuvée dans le traitement du cancer du pancréas, suite aux résultats de l’étude randomisée de phase III, publiée par Burris et coll., comparant la Gemcitabine à la dose de 1000 mg/m²/semaine en perfusion de 30 minutes, 7 semaines sur 8 puis 3 semaines sur 4, au 5-FU à la dose de 600 mg/m² par semaine (4). Cette étude, sur 126 139 patients, a rapporté un taux de réponse de 5,4% avec la Gemcitabine contre 0% avec le 5-FU. La survie médiane était significativement supérieure pour la Gemcitabine (5,7 mois contre 4,4 mois pour le 5-FU ; P<0,002). La survie à 1 an était de 18% pour la Gemcitabine, contre 2% pour le 5-FU. Le bénéfice clinique était significativement plus important avec la Gemcitabine (diminution de la consommation d’antalgiques, prise de poids et augmentation du PS) : 24 % contre 5% avec le 5-FU. Cette étude a démontré la supériorité de la Gemcitabine par rapport au 5-FU. Cependant, le taux de réponse reste bas et la survie médiane inférieure à 6 mois. Ainsi, cette drogue a été utilisée selon un schéma différent optimisant son administration : 10 mg/m²/min. (perfusion à dose fixe ou Fixed Dose Rate Infusion) par une équipe américaine, où la Gemcitabine est utilisée à la dose de 1500 mg/m² en 150 minutes, et comparée à la dose de 2200 mg/m² en 30 minutes (5). Avec le nouveau schéma, la survie médiane s’est modestement améliorée (5 mois pour le traitement standard et 8 mois pour le nouveau schéma ; P= 0,013). Cependant, la toxicité hématologique était plus importante. De ce fait, la Gemcitabine a été étudiée en association avec le 5-FU. Plusieurs études menées par l’ECOG n’ont pas pu clarifier l’activité de cette association. Une étude de phase III a comparé la Gemcitabine seule (1000 mg/m²/semaine, 3 semaines sur 4), à l’association Gemcitabine et 5-FU (bolus de 500 mg/m²/semaine, 3 semaines sur 4). Il n’a pas été retrouvé d’amélioration de la survie, mais la Gemcitabine seule était mieux tolérée (6). Des études in vitro et in vivo ont démontré une synergie entre la Gemcitabine et le Cisplatine. De plus, plusieurs essais cliniques ont rapporté une activité significative de cette association dans d’autres cancers (tel que le cancer du poumon), ce qui a motivé son utilisation dans le cancer du pancréas, en phase II. Les taux de réponse varient de 11 à 31% avec une survie médiane de 7 à 8 mois. Collucci et coll. ont comparé la Gemcitabine (1000 gm/m²/semaine, 3 semaines sur 4), à l’association Cisplatine (25 mg/m²/semaine) et Gemcitabine (7). Sur les 107 patients étudiés, le taux de réponse était plus élevé avec l’association (26% contre 9% ; P= 0,02), mais il n’y avait pas de différence en terme de survie médiane (30 sem. contre 20 sem.). Une étude autrichienne multicentrique de phase II a comparé la Gemcitabine seule à l’association avec Capécitabine (2500 mg/m² per os du jour 1 au jour 7). Parmi les 83 patients étudiés, les taux de réponse étaient de 14% et 17% respectivement avec des survies médianes de 8,2 mois et 9,5 mois (P= 0,29) (8). Plus tard, El-Rayes et coll. ont rapporté une étude de phase II, associant Gemcitabine (1000 mg/m²/sem., 3 sem. sur 4), Cisplatine (50 mg/m² jours 1 et 15) et 5-FU en perfusion continue (175 mg/m² jours 1 à 15). Sur 47 patients inclus, la survie à 6 mois était de 66%, la survie à 1 an de 34% et la survie médiane à 8,5 mois. Le taux de réponse était de 26% (9).Cette association semble efficace et bien tolérée. Mais, ce résultat devrait être confirmé par une étude de phase III. La première association qui s’est révélée supérieure à la Gemcitabine seule est le protocole PEF-G, rapporté, en 2001, par une équipe de Milan, dans une étude de phase II, associant Cisplatine (40 mg/m²), Epirubicine (40 mg/m²), Gemcitabine (600 mg/m² jours 1 et 8) et 5-FU (200 mg par jour pendant 4 semaines) (10). Cette association a été comparée à la Gemcitabine seule (1000 mg/m²/semaine, 7 semaines sur 8 puis 3 semaines sur 4), par la même équipe, dans une étude de phase III (11). Le taux de réponse était significativement supérieur avec l’association (40% contre 8,5% ; P<0,001). Mais la survie à 1 an était de 38% pour l’association contre 22% (P= 0,06). De plus, ce protocole était hématotoxique (neutropénie et thrombopénie significativement plus fréquentes). La Gemcitabine a été étudiée, également, en association avec les nouvelles drogues : • Gemcitabine + Oxaliplatine + 5-FU à fortes doses, hebdomadaire. • Gemcitabine + Cisplatine + UFT (per os). • Gemcitabine + Docétaxel (Taxotère). 140 • Gemcitabine + Capécitabine vs Gemcitabine + Oxaliplatine vs Capécitabine + Oxaliplatine. Les taux de réponse variaient de 20 à 30%. La survie médiane variait de 7 à 9 mois. L’Irinotécan seul a permis d’obtenir les mêmes résultats, mais, en association à la Gemcitabine, comparée à la Gemcitabine seule, le taux de réponse était significativement supérieur : 16% versus 4,4%. Par contre les survies n’étaient pas significativement différentes (12). De même, l’association de la Gemcitabine avec les anticorps monoclonaux anti-VEGF (Vascular Epidermal Growth Factor), tel que Bevacizumab (Avastin) ou Cetuximab (Erbitux) est en cours d’évaluation. L’association avec Bevacizumab semble plus encourageante, avec une survie médiane de 12,4 mois et une survie à 1 an de 54% (13). Mais, l’association avec Cetuximab ne paraît pas aussi efficace. En effet, la survie médiane n’était que de 7,1 mois et la survie à 1 an de 31,7% (14). Ainsi, malgré toutes les associations étudiées, le taux de réponse et la survie médiane restent faibles. Ce qui a motivé des recherches plus poussées, de nouveaux agents pouvant avoir une activité plus importante. Une variété d’anomalies moléculaires ont été identifiées dans le cancer du pancréas, touchant le proto-oncogène « Ras ». Les mutations K-ras sont responsables de l’activation permanente de l’oncoprotéïne K-ras, retrouvée dans 70 à 90% des adénocarcinomes du pancréas. De nouveaux agents sont en développement tel que l’inhibiteur de la farnesyltransférase (Tipifarnib), l’inhibiteur de la métallomatrix protéïnase (BAY 12-9566), l’ISIS-2503, un inhibiteur de l’expression de l’ARNm du H-ras humain (15, 16, 17, 18). Ces agents sont étudiés seuls ou en association avec la Gemcitabine. Les résultats préliminaires ont démontré leur bonne tolérance. Les résultats en terme de réponse et de survie ne sont pas décisifs, vu le faible nombre de patients inclus dans ces études, jusqu’à présent. LE TRAITEMENT ADJUVANT PAR CHIMIORADIOTHERAPIE. Malgré les progrès de la chirurgie dans le cancer du pancréas, la survie médiane reste faible : 11 à 18 mois. Ainsi, il est important d’identifier un traitement post-opératoire efficace si on veut améliorer ces résultats à long terme. Contrairement aux autres cancers gastro-intestinaux, la littérature concernant le traitement adjuvant des cancers pancréatiques réséqués est pauvre, vu la rareté de ces formes, d’une part, et le mauvais état général des patients en postopératoire, d’autre part. Les essais randomisés publiés ne sont pas concluants pour pouvoir utiliser le traitement adjuvant en routine. Chimiothérapie adjuvante. La première étude qui a montré un bénéfice de la chimiothérapie adjuvante, en terme de survie médiane est celle de Bakkevold, en 1993 (19). Il s’agit d’une étude randomisée portant sur un petit nombre de malades : 61 patients. La chimiothérapie a consisté en une association de 5-FU (500 mg/m²), Adriamycine (40 mg/m²) et Mitomycine C (6 mg/m²), toutes les 3 semaines, 6 cycles. La médiane de survie était significativement plus importante dans le groupe chimiothérapie (23 mois contre 11 mois). Cependant, la différence de la survie à 5 ans n’était pas statistiquement significative. Une étude randomisée japonaise menée sur 158 patients utilisant la Mitomycine C et le 5-FU pendant 1 an après la chirurgie, n’a pas démontré de bénéfice de la chimiothérapie adjuvante (20). Ce bénéfice n’a été retrouvé que dans une seule étude ESPAC-1 (European Study Group for Pancreatic Cancer), qui sera détaillée plus loin. 141 La chimioradiothérapie adjuvante. La radiothérapie du cancer du pancréas est délivrée, généralement, en utilisant 3 ou 4 faisceaux. La dose de 40 Gy ne doit pas être dépassée, pour les faisceaux antéropostérieurs (sur la moelle épinière). Les photons de haute énergie (>10 MV) sont généralement préférés bien que les énergies plus basses soient utilisées. Le volume cible est le lit tumoral, les ganglions péri pancréatiques et para aortiques entre D11 et L3, tout en délimitant les organes à risque : le foie, le rein droit, le rein gauche, la moelle épinière. Dans certains centres spécialisés expérimentés, la radiothérapie basée sur le scanner, permet de délivrer des doses de 50,4 à 54,1 Gy en concomitant avec la chimiothérapie avec une toxicité aigue et tardive acceptable. La radiothérapie peut être délivrée de 2 façons: soit de façon continue, soit en 2 séries (splitcourse). Les études de phase III menées par le Groupe d’Etude des Tumeurs GastroIntestinales (GITSG), par l’EORTC (European Organization for the Research and Treatment of Cancer) et l’ESPAC (European Study Group for Pancreatic Cancer), ont utilisé la radiothérapie en « split-course » qui consiste en 2 séries de 20 Gy (2 Gy/séance, total 40 Gy), avec un repos de 2 semaines entre les 2 séries. Cependant, les protocoles plus récents utilisent la méthode continue à la dose de 45 Gy (1,8 Gy/séance, 5 séances par semaine) sans interruption, suivie d’une surrimpression sur le lit tumoral avec une marge de tissu normal, à la dose de 5,4 Gy pour obtenir une dose totale de 50,4 Gy. La méthode « split-course » a l’avantage de permettre aux tissus sains ayant subi une toxicité aigue (tel que l’épithélium gastro-intestinal et la moelle osseuse), de se réparer. Cependant, la radiothérapie conformationnelle, basée sur le repérage par scanner, de façon spécifique à chaque patient, réduit le volume des organes normaux irradiés ainsi que la dose qu’ils reçoivent. Ceci permet d’éviter l’interruption du traitement, qui pourrait sélectionner des clones de cellules tumorales. Certains pensent que le « split-course » permet l’administration d’une chimiothérapie concomitante pour réduire le risque de développement tumoral en dehors des volumes irradiés et/ou pour obtenir une synergie entre la radiothérapie et la chimiothérapie au niveau des volumes irradiés. Cependant, il n’y a pas de consensus quant à l’approche optimale. Les essais randomisés de chimioradiothérapie adjuvante. Dans les années 80, fut publiée la première étude prospective randomisée menée par le GITSG comparant la pancréatico duodenectomie seule (n = 22), à cette chirurgie suivie d’une chimioradiothérapie (n = 21). La radiothérapie a été délivrée en 2 séries de 20 Gy, séparées de 2 semaines de repos (total = 40 Gy). La chimiothérapie a comporté du 5-FU en bolus (500 mg/m²) jours 1 à 3 de chaque série de radiothérapie. Puis, la chimiothérapie a été poursuivie à la même dose de façon hebdomadaire pendant 2 ans ou jusqu’à la progression de la maladie (21). La survie médiane a été significativement améliorée dans le groupe traité par chimio radiothérapie (20 mois contre 11 mois ; P = 0,05), ainsi que la survie à 2 ans (43% contre 18% ; P = 0,05). En incluant 30 patients de plus, au groupe « chimio radiothérapie », les résultats après 2 ans, étaient similaires aux premiers (22). Cependant, cette étude comporte des limites : (1) le faible nombre de patients : 43 patients en 7 ans ; (2) 24% des patients du groupe « chimio radiothérapie » ont commencé leur traitement adjuvant tardivement, après 10 semaines (délai optimal pour grand nombre d’investigateurs) ; (3) 28% des patients avaient un envahissement ganglionnaire et les patients ayant une marge de résection envahie étaient exclus. Ainsi, la généralisation des résultats de cet essai est discutée. Cependant, malgré ces limites, la chimio radiothérapie adjuvante, utilisant le 5-FU pendant et après la radiothérapie, est devenue de plus en plus utilisée aux USA. Plus tard, en 1999, l’EORTC a publié les résultats d’une étude multicentrique de phase III, comparant la chirurgie seule à la chirurgie suivie d’une chimio radiothérapie, utilisant le 5-FU 142 en perfusion continue (500 mg/m²) jours 1 à 3 de chaque série de radiothérapie (23). Le 5-FU n’a pas été poursuivi après la radiothérapie. Sur 114 patients inclus, la survie médiane du groupe chimio radiothérapie était de 17,1 mois (n = 60), contre 12,6 mois dans le groupe chirurgie seule (n = 54). La survie à 2 ans était de 34% et 26% respectivement (P = 0,099). Les taux de rechute locorégionale étaient similaires. L’EORTC avait conclu qu’il n’y avait pas de bénéfice démontré au traitement adjuvant par chimio radiothérapie. Cependant, dans cette étude, 20% des patients randomisés dans le bras « chimio radiothérapie » n’ont pas reçu ce traitement (refus du patient, mauvais état général, progression de la maladie) et ils sont analysés comme s’ils l’avaient reçu. De plus, dans cette étude, la chimiothérapie n’a pas été poursuivie après la radiothérapie. Enfin, la puissance de cet essai était faible car le nombre de patients était insuffisant pour pouvoir détecter une différence de 10 à 15% en terme de bénéfice clinique. Le groupe ESPAC a étudié le rôle de la chimio radiothérapie adjuvante par un essai multicentrique randomisé. En particulier, l’étude ESPAC-1 s’est intéressée à l’effet de la chimiothérapie et la chimio radiothérapie adjuvante (24). Cet essai a utilisé un plan factoriel 2 x 2, sur 289 patients, répartis en 4 groupes : un groupe traité par chimio radiothérapie seule (2 séries de 20 Gy avec 2 semaines de repos et 5-FU en bolus à 500 mg/m² jours 1 à 3 de chaque série) (n = 73) ; un groupe traité par chimiothérapie seule (Acide Folinique à 20 mg/m² suivi de 5-FU en bolus à 425 mg/m² jours 1 à 5 tous les 28 jours, 6 cycles) (n = 75) ; un groupe traité par chimio radiothérapie puis chimiothérapie (n = 72) et un groupe non traité (n = 69). Dans le but d’inclure le maximum de malades, 188 autres patients ont été randomisés pour recevoir ou pas une chimiothérapie adjuvante et 68 patients pour recevoir ou pas une chimio radiothérapie adjuvante. De plus, d’autres patients non randomisés ont été étudiés. De 1994 à 2000, 541 patients ont été randomisés. Une toxicité grade ¾ a été rapportée dans 27% des cas du groupe chimiothérapie. Sur les 353 patients analysés, la survie médiane était de 15,5 mois chez les 175 patients traités par chimio radiothérapie, contre 16,1 mois pour les 178 patients non traités par chimio radiothérapie. Sur 238 patients, la survie médiane était de 19,7 mois chez les patients traités par chimiothérapie, contre 14 mois pour les 235 patients n’ayant pas reçu de chimiothérapie. La différence est significative (P = 0,0005) en faveur de la chimiothérapie. Vingt cinq % des patients traités par chimiothérapie étaient vivants après 40 mois. Cette différence reste significative, en analysant tous les malades, randomisés ou pas, traités ou pas par chimiothérapie. Malgré l’utilisation d’une chimiothérapie peu efficace (5-FU), la survie à 5 ans était significativement supérieure dans le groupe chimiothérapie (21% contre 8% ; P = 0,009). Par contre, elle était significativement inférieure dans le groupe chimio radiothérapie par rapport au groupe « pas de chimio radiothérapie » (10% contre 20% ; P = 0,05). Il est clair, dans cette étude, qu’il n’y a aucun bénéfice de la chimio radiothérapie. Par contre, le bénéfice est net pour la chimiothérapie adjuvante. La méthodologie de cette étude a été critiquée. Enfin, une équipe japonaise a étudié l’avantage de la résection sur la chimio radiothérapie pour les formes résècables d’emblée, localement avancées (25). Elle a comparé la chirurgie seule (n = 20), à la chimio radiothérapie sans chirurgie (n = 22). La chimiothérapie a comporté du 5-FU à 200 mg/m²/j et la radiothérapie a été délivrée à la dose de 50,4 Gy. La survie à 1 an du groupe chirurgie était significativement plus élevée que celle du groupe chimio radiothérapie (62% contre 32% ; P = 0,05), ainsi que la médiane de survie (17 mois contre 11 mois ; P<0,03). La chimioradiothérapie à base de Gemcitabine. La Gemcitabine a un pouvoir radio sensibilisant sur les cellules du cancer pancréatique. Cependant, ce pouvoir a été observé également sur les tissus sains, en pratique clinique ; d’où 143 la nécessité soit de réduire la dose de Gemcitabine par rapport à la dose efficace en traitement systémique, soit de réduire la dose de radiothérapie. Allen et coll. ont publié, récemment, une étude de phase I, utilisant la Gemcitabine à pleine dose (1000 mg/m²/sem. x 3 sem. sur 4), en concomitant avec la radiothérapie étalée sur 3 semaines, avec une escalade de dose (24 Gy en fractions de 1,6 Gy puis une escalade de 0,2 Gy par fraction). Un autre cycle de Gemcitabine a été administré après la radiothérapie (26). Le but de cette étude était de déterminer la dose maximale tolérée, de radiothérapie délivrée sur le lit tumoral. Les patients avaient des facteurs de mauvais pronostic : marge de résection envahie, ganglions envahis. La radiothérapie utilisée était de type conformationnel. La toxicité limitante était gastro-intestinale. La survie médiane était de 16,5 mois. La dose maximale tolérée était de 39 Gy. Malgré la réduction de dose de radiothérapie et la réduction du volume irradié (seul le lit tumoral), le contrôle local était satisfaisant. Vingt six des 32 patients ont rechuté à distance (dont 6 avec une rechute locale ou régionale). Cette étude a été complétée par une étude de phase II, utilisant la dose de 36 Gy (2,4 Gy par fraction). Il serait intéressant de comparer le 5-FU à la Gemcitabine en concomitant avec la radiothérapie. Ainsi, il n’y a pas de consensus international concernant le traitement adjuvant du cancer du pancréas. D’autres études de phase III sont nécessaires pour confirmer sa place. 5-FU ou Gemcitabine avant et après chimio radiothérapie à base de 5-FU, en traitement adjuvant. Parmi les études en cours, l’essai RTOG 9704 est une étude randomisée comparant le 5-FU (250 mg/m²/j en perfusion continue pendant 3 à 4 semaines) à la Gemcitabine (1000 mg/m²/sem. x 3 sem./4), associés à une chimio radiothérapie à base de 5-FU. Trois cycles de chimiothérapie sont administrés : un avant la chimio radiothérapie et 2 après. La radiothérapie est délivrée à la dose de 50,4 Gy en 28 séances. Une stratification par statut ganglionnaire, diamètre tumoral et marge de résection a été réalisée. Cette étude va permettre de déterminer le rôle de la Gemcitabine par rapport au 5-FU en adjuvant, de démontrer la possibilité d’administrer le 5-FU en perfusion continue en concomitant avec la radiothérapie en étalement classique et en continue, et de cerner la valeur pronostique du statut ganglionnaire, de la taille tumorale et de la positivité de la marge de résection. La chimio immuno radiothérapie adjuvante. Dans le but d’obtenir, à la fois une radio sensibilisation locale et une synergie cytotoxique systémique, le groupe de Virginia-Mason Clinic a récemment clôturé une étude de phase II, utilisant du Cisplatine (30 mg/m² bolus/sem.), l’interféron alpha, comme radio sensibilisant (3 millions d’unités en sous-cutané, un jour sur 2) et 5-FU (200 mg/m² en perfusion continue sur 5 sem.) avec la radiothérapie (50 Gy en 25 séances), en adjuvant, dans les cancers du pancréas réséqués (27). Quatre vingt cinq % étaient N +. Sur les 17 premiers patients, la survie à 2 ans était de 84% contre 54%, dans la série historique du GITSG (P = 0,04). La toxicité était élevée : plus de 50% de grade ¾ et 35% d’hospitalisations. La chimio immunothérapie régionale. Une équipe grecque a étudié une autre méthode de traitement adjuvant, qui est la chimio immunothérapie locorégionale, dans une étude de phase III, qui a comporté 128 patients (N +), divisés en 3 groupes (28). Le 1er groupe a eu une chirurgie seule (n = 40), le 2ème a eu une chirurgie suivie d’une chimiothérapie intra artérielle (AMS) par Gemcitabine, au jour 1,Carboplatine et Mitoxantrone au jour 2, et Mitomycine C et 5-FU, Acide Folinique, au jour 3, et 5-FU et Acide Folinique aux jours 4 et 5 (n = 45). Le 3ème groupe a eu une chirurgie suivie d’une chimiothérapie artérielle (comme le 2ème groupe) plus une immunothérapie 144 régionale par Interleukine-2 en intra artériel pendant 10 jours (n = 43). Le traitement est administré tous les 2 mois la 1ère année, puis tous les 4 mois la 2ème et 3ème années, puis tous les 6 mois pour les années suivantes. Les survies à 2 ans et à 5 ans sont de 29% et 0% dans le 1er groupe, 52% et 10% dans le 2ème groupe et 65% et 18% dans le 3ème groupe. L’amélioration de la survie dans le 3ème groupe est statistiquement significative (P = 0,02). Le traitement semble être bien toléré. Cependant, la toxicité régionale de la chimio immunothérapie n’a pas été bien clarifiée. D’autres études sont nécessaires pour confirmer ces résultats. LA RADIOTHERAPIE PEROPERATOIRE ASSOCIEE A RADIOSENSIBILISANT PR-350 (DORANIDAZOLE) DANS TRAITEMENT DES FORMES LOCALEMENT AVANCEES UN LE La radiothérapie per opératoire a été initialement rapportée au Japon, par Abe et Arakawa, pour minimiser l’irradiation des structures normales. L’utilisation des électrons de haute énergie permet de délivrer de fortes doses de radiothérapie pour induire un effet tumoricide. Une étude de phase III a été publiée par Sunamura, utilisant la radiothérapie per opératoire sans résection, à la dose de 25 Gy, précédée, 10 à 40 min. avant, d’une perfusion d’un radio sensibilisant PR-350 (2000 mg/m²), en perfusion de 25 min. ou d’un placebo (29). Deux semaines après la chirurgie, une radiothérapie externe par des photons de 10-14 MV est délivrée à la dose de 40 Gy en 20 séances, sur le lit tumoral avec une marge de 1 à 3 cm prenant les ganglions régionaux. Quarante huit patients ont été étudiés. 47,4% du groupe traité par PR-350 ont répondu contre 21,7% du groupe contrôle, mais la différence n’est pas significative (P = 0,1067). A 6 mois, le taux de réduction tumorale, dans le groupe traité, a significativement augmenté ( p =0,0274). La survie médiane est de 318 jours, dans le groupe traité, contre 303 jours dans le groupe contrôle. La survie à 1 an était de 36,4% dans le groupe traité, contre 32% dans le groupe contrôle (NS). Ainsi, il est important de clarifier le mécanisme de résistance à la radiothérapie pour développer des stratégies efficaces. LA CHIMIOTHERAPIE DANS LES FORMES LOCALEMENT AVANCEES NON RESECABLES. Les premières études de chimio radiothérapie concomitante, à base de 5-FU, dans les formes non résécables, ne semblent pas pouvoir améliorer le taux de résécabilité de ces patients. Pour cela, le 5-FU a été remplacé par la Gemcitabine, qui a une activité supérieure par rapport au 5FU, et un pouvoir radio sensibilisant remarquable. Cependant, même cette association ne semble pas améliorer considérablement les résultats obtenus par le 5-FU. Une étude de phase I a été menée par Wolff et coll., utilisant la Gemcitabine avec une escalade de dose (en commençant à 400 mg/m²/sem. x 7 sem.) avec la radiothérapie (30 Gy en 10 séances), à la recherche de la dose maximale tolérée (30). Elle a étudié 18 patients. La toxicité digestive et hématologique n’ont pas permis une augmentation des doses. La DMT retenue est 350 mg/m². Quarante huit % des patients ont répondu au traitement (24% de réponse mineure et 24% de réponse partielle). Un patient a pu être réséqué. La survie médiane était de 6 mois. La survie à 1 an des patients répondeurs était de 66% et celle des patients à réponse partielle de 75%. D’autres études ont rapporté cette association avec une DMT supérieure à 500 mg/m² de Gemcitabine. Cependant, la radiothérapie a été délivrée à 1,8 Gy par fraction, ce qui explique la meilleure tolérance de la Gemcitabine à cette dose. Par ailleurs, la Gemcitabine a été 145 utilisée à faibles doses, en 2 injections par semaines avec la radiothérapie à 50,4 Gy. La DMT était de 60 mg/m² (31). Une étude de phase I, rapportée par Muler et coll., a utilisé une association de Gemcitabine et Cisplatine en concomittant avec la radiothérapie, avec une escalade de dose de Cisplatine (32). La Gemcitabine a été administrée à la dose de 1000 mg/m²/sem. x 3 sem./4, et le Cisplatine de 30 à 50 mg/m². La radiothérapie conformationnelle a été délivrée à la dose de 36 Gy (2,4 Gy par fraction). Un 2ème cycle de chimiothérapie était administré après la radiothérapie. La survie médiane était de 10,7mois. Sur les 18 patients traités, le taux de réponse était de 17% et 2 malades ont pu être réséqués. La DMT était de 50 mg/m². Selon une étude italienne qui a évalué l’escalade de dose de radiothérapie combinée à une chimiothérapie par 5-FU (1000 mg/m² jours 1 à 4 et jours 21 à 24 en perfusion continue), la toxicité tardive était plus importante pour les doses élevées (59,4 Gy), sans corrélation avec le taux de réponse, ni avec la survie. La survie médiane était de 9 mois. Le taux de réponse était de 12%. Ainsi, la dose de radiothérapie recommandée était de 50,4 Gy (33). Une équipe européenne a étudié la perfusion régionale abdominale hypoxique par balloncathéter, utilisant la Mitomycine C et le Mélphalan. Aucun bénéfice n’a été retrouvé en terme de réponse, ni en terme de survie. De plus, la toxicité de cette procédure écarte son utilisation en pratique courante (34). D’autres études sont mises en place, à la recherche des meilleures schémas d’administration tel que la Gemcitabine à 10 mg/m²/min. qui semble plus efficace, ainsi que d’autres drogues nouvelles telle que l’Oxaliplatine, la Capécitabine, l’Erlotinib (inhibiteur de l’EGFR tyrosine kinase, comme radiosensibilisant), le Paclitaxel… LA CHIMIOTHERAPIE PREOPERATOIRE (NEOADJUVANTE) OU CHIMIORADIOTHERAPIE DANS LES FORMES LOCALISEES. Le but de ce traitement est de démarrer précocement un traitement systémique pour cette maladie qui est générale dès le diagnostic. Ce traitement permet aussi d’améliorer les taux de résection R0, de diminuer la morbidité post-opératoire chez les patients ayant une maladie rapidement progressive et de pouvoir traiter un grand nombre de patients par chimio radiothérapie, qui auraient pu ne pas en bénéficier si la récupération post opératoire se prolongeait. Les premières études pilotes de chimio radiothérapie pré opératoire ont utilisés la dose de 45 à 50 Gy, pour la radiothérapie avec 5-FU en perfusion continue 300 mg/m² ou 1 g/m² sur 4 jours avec Mitomycine C. L’étude de phase II de l’ECOG a rapporté une toxicité hématologique et hépatique importante avec une survie médiane de 16 mois (35). Une étude française a évalué la réponse histologique à la chimio radiothérapie adjuvante (36). La chimiothérapie a été à base de 5-FU en perfusion continue de 5 jours et Cisplatine (80 mg/m²). Sur 61 patients, 34,5% n’ont pas été opérés pour une progression de leur maladie, et 65,5% ont été réséqués. Trois patients avaient une réponse histologique complète, et 9 une réponse majeure. Le taux de réponse était de 47,5%. La survie médiane des patients ayant une réponse majeure ou complète était significativement supérieure à celle des autres patients (P<0,005). La survie médiane de tout le groupe est de 13 mois, celle des patients réséqués de 26,6 mois. L’étude du M. D. Anderson a testé l’association 5-FU, Paclitaxel, Gemcitabine avec une radiothérapie à la dose de 30 à 50,4 Gy. Elle a obtenu une survie médiane de 21 mois (37). Ces résultats sont encourageants mais en l’absence d’étude de phase III, on ne peut pas tirer de conclusions quant à une amélioration de la survie. De plus, ce traitement risque de retarder la chirurgie ou d’altérer l’état général des patients. Par conséquent, cette chimioradiothérapie préopératoire reste à l’étape d’investigation. 146 CONCLUSION Le traitement du cancer du pancréas continue à poser des problèmes de prise en charge. Sa chimiorésistance fait de lui un cancer très grave. Malgré une meilleure compréhension de sa biologie moléculaire, les répercussions cliniques sont encore décevantes. La chirurgie reste le seul moyen susceptible d’améliorer la survie de ces patients. Mais, seule, elle reste insuffisante. Beaucoup reste à faire pour déterminer le rôle d’un traitement adjuvant par chimiothérapie, radiothérapie, immunothérapie, et d’autres nouvelles drogues plus ciblées (targeted). REFERENCES. 1. R.E.N. Van Rijswijk, K. Jeziorski, D.J. TH. Wagener, J.-L. Van Laethem, S. Reuse, B. Baron, J. Wils, for the EORTC GastroIntestinal Tract Cancer Cooperative Group. Weekly high-dose 5-fluorouracil and folinic acid in metastatic pancreatic carcinoma : a phase II study of the EORTC GastroIntestinal Tract Cancer Cooperative Group. European Journal of Cancer 2004, 40, 2077-2081. 2. J. Taïeb, T. Lecomte, J. Ezenfis, P. Artru, E. Mitry, V. Boige, M.-C. Clavero-Fabri, J.-N. Vaillant, P. Rougier, M. 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Neoadjuvant chemoradiation for adenocarcinoma for the pancreas. Treatment variables and survival duration. Ann. Surg.Oncol. 2001, 8, 123-132. 149 LES INDICATIONS THERAPEUTIQUES POUR LES ADENOCARCINOMES PANCREATIQUES B. GHARIANI , N. ARFA, L. GHARBI , S. SAYARI∗ ∗ , H. MESTIRI, MT . KHALFALLAH. Service de Chirurgie Générale, Hopital Mongi Slim. Service de Chirurgie Générale, Hopital Charles Nicolle∗. Elles dépendent essentiellement de l’état général du malade et de l’extension tumorale. 1 / le terrain : L’existence de tares en décompensation ou d’un état de cachexie avancé constitue une contre indication à la chirurgie. Il est également classique de dire que l’âge avancé interdit l’exérèse. Cependant cette limite d’âge est régulièrement revue à le hausse par la majorité des équipes. 2 / L’extension tumorale : • Les tumeurs métastatiques : La présence de métastases à distance : ganglion de Troisier, métastases hépatiques, pulmonaires, carcinose péritonéale constituent autant de contre indication à l’exérèse chirurgicale. Les options thérapeutiques devant ce type de malade impliquent des mesures palliatives. Vu que leur espérance de vie ne dépasse pas dans la majorité des cas 5 à 6 mois, une palliation non chirurgicale est préférée. La place d’une chimiothérapie palliative pour ces cas reste mal définie dans la littérature. • Les tumeurs localement avancées : Les structures dont l’envahissement constitue un challenge dans le traitement du cancer du pancréas sont essentiellement vasculaires. Il y a encore quelques années, ce type d’envahissement constituait une contre indication à la résection. Actuellement, une exérèse de la veine porte et / ou mésentérique supérieure est possible en cas d’envahissement limité de celles-ci. La présence d’un envahissement artériel coeliaque ou mésentérique supérieur est par contre plus problématique. Pour ces malades, se discute un traitement palliatif. Le choix entre palliation chirurgicale et non chirurgicale dépend de l’espérance de survie du malade. Si cette survie semble courte, la préférence sera donnée aux palliations non chirurgicales. Si l’état général des patients semble conservé, une palliation chirurgicale sera préférée. Là encore, le consensus est loin d’être obtenu. Dans ce groupe de malades, l’apport d’une radio chimiothérapie néoadjuvante semble donner des résultats prometteurs. Plusieurs cas ont été rapportés où une exérèse secondaire a pu être réalisée. Les possibilités de guérisons définitives de ce type de malade par ces protocoles ne sont pas encore démontrées. • Les tumeurs localisées à la glande pancréatique : Elles constituent une indication idéale à une exérèse chirurgicale carcinologique. - Pour les localisation céphaliques : une duodénopancréatectomie céphalique. Dans ce cadre, le mode du rétablissement de la continuité pancréatico digestive, et la conservation, ou non du pylore, sont toujours sujets à polémique. Quoi qu’il en soit, cette intervention reste toujours une intervention lourde. - Pour les localisation corporéales et/ou caudales, une spléno pancréatectomie caudale ou corporéo caudale est indiquée. 150 Le problème de l’étendue du curage ganglionnaire associé à cette exérèse, est encore matière à controverse et reste pour le moment une affaire d’école. La place d’une chimiothérapie ou d’une radio chimiothérapie adjuvante reste à définir. 151 FACTEURS PRONOSTIQUES ET SURVIE DES CANCERS PANCREATIQUES Arfa N, Ben Abid S, Gharbi L, Haoues N, Mechri M, Mestiri H, Khalfallah Mt. Service de Chirurgie Hopital Mongi Slim. La Marsa Introduction Les facteurs pronostiques jouent un rôle important en oncologie médicale. Ils permettent de guider la conduite thérapeutique. Les résultats en terme de survie des cancers du pancréas traités se sont améliorées, indépendamment de la baisse significative du taux de morbidité et mortalité opératoire (1, 2). Les raisons de cette amélioration sont sans doute multifactorielles. Les modifications des techniques chirurgicales et les thérapeutiques complémentaires ont pu participer à ces progrès (1). Une meilleure stadification des malades et une prise en charge multidisciplinaire ont permis de mieux codifier les conduites. En dehors de la dissémination de la maladie, trois facteurs majorent le pronostic des cancers pancréatiques : l’envahissement ganglionnaire, l’extension vasculaire et le caractère curatif de la résection (4). Dans ce chapitre on va essayer de répondre à travers une revue de la littérature récente à 3 questions essentielles : - Jusqu’où faut-il étendre le curage ganglionnaire en terme de survie ? - Quel est l’intérêt des résections vasculaires associées aux pancréatectomies? - La notion de marge de résection rétroportale et son impact sur la survie ? Le caractère curatif de l’exérèse chirurgicale Seule une exérèse chirurgicale curative permet d’espérer une survie à 5 ans tous stades confondus autour de 20% (5). Au moment du diagnostic seulement 10% des malades sont accessibles à une exérèse chirurgicale (2). Les meilleurs résultats sont observés sur des tumeurs de petite taille (<2 cm), sans extension vasculaire ou métastatique (stade I-II de L’UICC) (2). La majorité des malades réséqués sont initialement classés stade II, III, ou IV. 50 à 80 % d’entre eux vont présenter au cours de la première année post-opératoire une évolution métastatique, une carcinose péritonéale voire une récidive locorégionale (2). Le statut ganglionnaire La classification japonaise des différents relais ganglionnaires des cancers pancréatiques est la classification la plus utilisée (figure 1). 152 Figure 1 : les différents relais ganglionnaires d’un cancer de la tête du pancréas(2) L’envahissement ganglionnaire est un facteur pronostique indépendant dans plusieurs études multi variées des facteurs de survie (4, 5, 6,7) (figure 2). Figure 2 : survie à 5 ans en fonction du stade évolutif initial de la tumeur (8). Selon cette classification et en dehors d’un envahissement ganglionnaire massif du troisième relais documenté (origine du tronc coeliaque ou adénopathies retroperitoneales para aortiques) l’exérèse pancréatique n’est pas justifiée. En effet, la survie en cas d’envahissement ganglionnaire para-aortique reste très faible (figure 3) (7, 8, 9). 153 Para Ao node negative (n=25) Para Ao node positive (n=9) Figure 3 : survie des patients réséqués et ayant des ganglions paraaortiques positifs (2) Il n’y a pas de données actuelles suffisantes pour recommander une lymphadénectomie étendue qui inclue un curage coeliaque et lomboaortique (2). Les résultats des différents types de curage ganglionnaire n’ont montré aucun bénéfice significatif en terme de survie à long terme (tableau 1) Mais selon les recommandations de l’UICC en 2000, et les données de la littérature, un nombre de 10 ganglions au moins est nécessaire pour définir le stade de la maladie (7,8,9,10). Tableau 1 : résultats des différents types de curage ganglionnaire dans la littérature (12). 154 L’envahissement vasculaire Contrairement à l’envahissement de l’artère mésentérique supérieure, l’envahissement veineux n’est pas une contre-indication formelle à l’exérèse pancréatique (2, 9). La résection veineuse latérale ou tronculaire offre des chances de survie comparable à celles observées après exérèse pancréatique sans résection veineuse (12, 13,15). En revanche lorsque l’extension néoplasique concerne plus de la moitié de la circonférence veineuse, la survie des malades réséqués est inférieure à celle des malades non réséqués (tableau 2) (15). Auteur Yeo (8) Takahashi (9) Harrisson (10) Leash (11) Baulieux (12) Van Geenen (13) Bachellier (14) Nakagohri (15) Année 1995 1995 1996 1998 1998 2001 2001 2003 N malades 25 63 53 31 20 34 31 33 Survie % 13 (3 ans) 14 (4 ans) <10 (5 ans) 22 mois 16 (3 ans) 14 mois 22 (2 ans) 15 mois Tableau 2 : résultats des DPC avec résection veineuse (15) L’envahissement veineux a été classé selon son importance en 4 types : PVo lorsque la veine n’est pas atteinte, PV1 lorsqu’il existe une atteinte limitée et hémi circonférentielle, PV3 lorsque l’atteinte est circonférentielle et PV4 lorsque la lumière de la veine est complètement obstruée (11,12). Dans ce travail prospectif la survie chute de façon significative en fonction de l’importance de l’extension veineuse (figure 6). Figure 4 : survie en fonction de l’importance de l’extension veineuse (12) Dans le groupe PV1, l’examen histologique a noté un envahissement néoplasique de la veine dans 50 à 80 % des cas. Le taux significatif d’adhérences « inflammatoires » justifie les résections veineuses limitées. 155 Les marges de résection chirurgicale L’existence d’une marge de résection positive est un facteur pronostique indépendant de la survie dans les études multi variées (2, 3, 4, 8, 9, 10, 11,15). L’étude des marges, pancréatique, cholédocienne, et gastrique ou duodénale ne suffit pas pour classer les malades. Il est actuellement recommander d’étudier la « marge pancréatique rétro péritonéale » représentée par la lame tissulaire pancréatique qui se termine au bord droit et à la face postérieure de l’artère mésentérique supérieure (14,15). L’envahissement des marges rétro péritonéales ou rétro portales divise la survie moyenne par deux (10,6 mois vs 22,7 mois lorsque cette marge de résection est saine) (13,14). Cette marge ne peut être étudiée que si le pancréas « rétro vasculaire » est réséqué en totalité. Figure 7 : survie à long terme en fonction de l’existence ou non d’une marge veineuse portale (pl) ou rétropéritonéale (dpm) positives (14). Conclusion La chirurgie reste le seul traitement curatif des adénocarcinomes pancréatiques. Malgré l’amélioration des résultats observées au cours de la dernière décennie les survivants à long terme restent peu nombreux. L’essor des traitements combinés radio-chimiotherapie et chirurgie curative pourrait contribuer à améliorer la survie des patients. 156 Références 1. Ishikawa O, Ohigashi H, Saski Y, Kabuto T, Furukawa H, Nakamori S, et al. Practical grouping of positive lymph nodes in pancreatic head cancer treated by an extended pancreatectomy. Surgery 1997; 121:244-9 2. Perdrazzoli S, DiCarlo V, Dionigi R, Mosca F, Perdrazoli P, Pasquali C, et al. Standard versus extended lymphadenectomy associated with pancreatoduodenectomy in the surgical treatment of adenocarcinoma of the head of the pancreas: a multicenter, prospective, randomized study. 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Labbane** * Service de Chirurgie Générale - Hôpital Menzel Bourguiba. ** service de GASTRO-ENTEROLOGIE – Hôpital Menzel Bourguiba. _________________________________________________________ La prise en charge des tumeurs kystiques du pancréas (TKP) a évolué au cours de ces dernières années eu égard à la qualité de l’imagerie actuelle, à l’apport de l’endoscopie et de la pancréatographie IRM, mais aussi grâce à une meilleure connaissance de leur mode de présentation. Ces TKP représentent 20% des lésions kystiques du pancréas, et malgré leur relative rareté, elles occupent une place importante dans la pathologie pancréatique (1) La classification de Klöppel (2) permet de distinguer : Les tumeurs épithéliales avec par ordre de fréquence décroissante : • Les cystadénomes séreux (CS). • Les cystadénomes mucineux (CM) • Les cystadénocarcinomes (CK) • Et les tumeurs intracanalaires et mucineuses (TIPMP). Ces trois dernières forment les tumeurs mucineuses du pancréas (TMP) et représentent 54% de la totalité des tumeurs kystiques du pancréas. Deux autres tumeurs épithéliales demeurent très rares : • • Les tumeurs pseudo-papillaires et solides (TPPS). Les tumeurs neuro-endocrines (TNE). Les tumeurs non épithéliales. Les pseudo-tumeurs kystiques. La démarche diagnostique et les problèmes thérapeutiques posés par ces tumeurs kystiques sont différents. Elles constituent un groupe hétérogène. Seul leur potentiel évolutif est d’importance. Cette démarche diagnostique s’appuie sur des données cliniques, biologiques (choléstase biologique, marqueurs tumoraux) et morphologiques (TDM, IRM, écho-endoscopie de seconde intention) permettant de : Confirmer l’origine intra-pancréatique de la tumeur. Caractériser la lésion kystique en précisant : le nombre de kystes, le contenu liquidien et son homogénéité, la présence de calcification afin de différencier la bénignité de la malignité. Préciser le retentissement canalaire (VBP, canal de Wirsung) et vasculaire (axes veineux splénique et mésentérico-porte). Et de proposer un diagnostic étiologique. 160 Parmi les tumeurs kystiques du pancréas d’origine épithéliale, le cystadénome et les tumeurs canalaires (TIPMP) représentent plus de 90% des cas. 161 TUMEURS EPITHELIALES CYSTADENOMES SEREUX (CS) : • Ils sont les plus fréquents des TKP (30%). • Ils peuvent se définir comme des tumeurs microkystiques, d’origine épithéliale et de nature bénigne. • La prédominance féminine est nette (86%). • L’âge moyen des malades est autour de 60 ans. • Dans près de 40% des cas, la tumeur est céphalique. • Circonstances de découverte : o Découverte par un examen morphologique chez un patient asymptomatique : 20%. o Les signes les plus fréquents sont les douleurs épigastriques et la masse abdominale. o Lors d’une complication : compression canalaire (VBP, canal de Wirsung) ou vasculaire (HTP segmentaire) exceptionnellement lors d’une rupture tumorale (hémopéritoine). • Association pathologique avec une néoplasie extra-pancréatique, une maladie de Van Hippel Lindan, une tumeur ampullaire ou pancréatique (10%). • Le diagnostic de CS repose sur des critères morphologiques : o La précision diagnostique du scanner atteint 80% devant une tumeur microkystique (plus de 6 microkystes de moins de 2 cm, centrés par des calcifications) (4). o L’IRM permet de caractériser les microkystes. o L’aspect feuilleté est caractéristique en écho-endoscopie. • Les données biochimiques du liquide de ponction n’ont aucune valeur (faible concentration d’ACE et de CA19-9; liquide acellulaire). • Les indications thérapeutiques se partagent entre la simple surveillance du CS asymptomatique lorsqu’il est bien documenté (une échographie annuelle) et l’exérèse chirurgicale adaptée à la nature bénigne d’une tumeur symptomatique, responsable de compression canalaire (VBP ou canal de Wirsung) ou de diagnostic incertain (cystadénocarcinome séreux exceptionnel, cystadénome mucineux confondu avec un CS à formes macrokystiques très rares ou enfin cystadénome pseudosolide) CYSTADENOMES MUCINEUX (CM) : • • • • • • • • • • • Ils représentent 28% des TKP. Ce sont des tumeurs épithéliales macrokystiques uni ou multiloculaires, Faisant partie des tumeurs mucineuses du pancréas TMP, caractérisées par un risque d’évolution vers la dégénérescence. Du point de vue macroscopique, le CM réalise le plus souvent une masse arrondie, lisse, pouvant atteindre 10 à 15 cm de diamètre. A la coupe, sa paroi est épaissie de 4 à 5 cm de couleur blanchâtre avec des franges papillaires. Le contenu est mucoïde ou gélatineux. Histologiquement, l’épithélium unistratifié cylindrique est mucipare. Ces CM concernent essentiellement des sujets féminins (87%). L’âge médian est de 50 ans. La localisation est corporéo-caudale dans ¾ des cas (1). Dans ¼ des cas, le CM est asymptomatique, de découverte fortuite. Les principaux signes révélateurs se résument dans plus de 2/3 des cas à l’existence de douleurs abdominales (5). Le diagnostic de la nature de la TKP est rendu possible grâce à l’imagerie, l’échoendoscopie et la pancéatographie rétrograde endoscopique (PRE) : 162 o Ce diagnostic est facile, chez une femme sans antécédents pancréatiques qui présente sur la TDM un volumineux kyste, bien limité, localisé à gauche, dont la paroi se rehausse après injection. o En revanche, l’existence d’un kyste de 3 cm de diamètre de siège céphalique pose un problème diagnostic. Dans ce cas l’écho-endoscopie apporte des précisions en faveur d’une lésion mucineuse : contenu hyperéchogène, riche en mucus, végétation endokystique, dont la ponction ramène un liquide épais, visqueux, difficile à aspirer, riche en mucus, à concentration élevée en ACE (> 400 ng/ml) et CA 72.4, contenant des cellules mucipares (4) le diagnostic de CM est également difficile en cas de tumeur communicante avec le système canalaire pancréatique (6% des cas) aggravant le risque de confusion avec un pseudokyste. o o o o o La pancréatographie rétrograde endoscopique (PRE) met en évidence le caractère non communiquant avec le canal de Wirsung. Le principe d’une exérèse pancréatique réglée comme seul traitement est admis, en raison du risque d’évolution maligne. Le diagnostic de cette tumeur ne peut être établi qu’après un examen anatomopathologique complet de la pièce de résection pancréatique. L’intérêt d’une biopsie extemporanée est limité puisqu’elle ne permet un diagnostic de tumeur mucineuse qu’une fois sur deux en raison du caractère incomplet du revêtement épithélial. Mais la présence de ce revêtement permet d’éliminer le pseudokyste (8) Deux autres diagnostics différentiels : - Les kystes carcinomateux (3%). - et les tumeurs endocrines kystiques (Nle dia < 2cm). CYSTADENOCARCINOMES PANCREATIQUES (CK) : • • • • • • • • Les CK représentent 15% des TKP. Ils sont définis comme des carcinomes localisés ou massifs développés au dépend d’une lésion kystique, limitée par un revêtement épithélial cylindrique muco-sécrétant. Le critère de malignité est représenté par la présence de formation papillomateuse intrakystique et d’atypies cellulaires. La filiation directe entre cystadénome mucineux et cystadénocarcinome est établie. La prédominance féminine est moins marquée que pour les CM (66%). L’âge moyen est de 65 ans. La localisation céphalique a été notée dans la moitié des cas. Sur le plan clinique : les principaux signes révélateurs sont les douleurs abdominales (80%), l’ictère se voit dans 30% des cas. La palpation d’une masse abdominale est retrouvée dans 15% des cas, un diabète sucré contemporain à la découverte du CK est noté dans 15% des cas également. Le diagnostic des CK est morphologique, biologique et cytologique. o L’aspect tomodensitométrique est celui d’un gros kyste à paroi irrégulière et épaisse, parfois calcifiée à contenu partiellement solide. Une ponction se discute en cas de doute diagnostique avec un pseudokyste, devant une tumeur fistulisée dans le canal de Wirsung, devant une tumeur non résécable ou de métastases : la concentration d’ACE est très élevée avec présence de cellules malignes. o La pratique d’une écho-endoscopie est limitée par la taille de ces tumeurs L’erreur diagnostique la plus fréquente est la confusion d’un CK avec un pseudokyste. 163 • • • • • • • Ce faux kyste du pancréas peur être soupçonné sur les antécédents de pancréatite ou de traumatisme, sur l’imagerie, la paroi est moins régulière. Un autre diagnostic différentiel, c’est le kyste hydatique du pancréas. Nous accordons dans ce cas, une importance au contexte endémique, à l’immunologie hydatique et à l’existence d’une autre localisation (hépatique ou pulmonaire). Le traitement des CK est une résection pancréatique réglée avec curage ganglionnaire de principe. L’extension de l’exérèse aux organes de voisinage (et à l’axe veineux mésentéricoporte) si nécessaire est justifiée. Le taux de résécabilité atteint 75%. L’envahissement ganglionnaire est noté dans 25% des cas. La survie à 5 ans des CK réséqués dépasse 50%. Par contre le pronostic des CK non résécables en raison de l’extension loco-régionale ou métastatique se rapproche de celui des adénocarcinomes. Après résection à visée curative, une radiochimiothérapie adjuvante semble justifiée. TUMEURS INTRACANALAIRES PAPILLAIRES ET MUCINEUSES (TIPMP) Si la tumeur villeuse du canal de Wirsung décrite en 1975 par Caroli (9) et l’ectasie canalaire mucineuse du pancréas (ECM) rapportée par Itai et Ohhashi, une décennie plus tard (10) présentent des différences morphologiques, ces deux entités, présentent en revanche, un seul et même processus prolifératif sur le plan évolutif. Leur potentiel malin est maintenant bien établi. • Notre but est de rappeler l’histoire naturelle, l’approche diagnosique et le traitement de ces tumeurs, dont la dernière dénomination anglophone adoptée récemment par l’Organisation mondiale de la Santé OMS est celle de « intraductal papillary mucinous tumor » à laquelle correspond la terminologie francophone de tumeur intracanalaire papillaire mucineuse du pancréas (TIPMP). NOSOLOGIE • • Depuis la première description par Frantz en 1959 de ces tumeurs papillaires et kystiques du pancréas (20), peu de publications ont été réalisées. La majorité des patients rapporté dans la littérature mondiale durant les années 80 proviennent du Japon (10,12,21). Elles ont fait l’objet depuis 1986 de plusieurs publications. L’intérêt croissant suscité par ces tumeurs papillaires et kystiques tient d’abord à leur polymorphisme. C’est la raison pour laquelle de nombreux termes ont été utilisés dans la littérature. 1. Nous mentionnons la tumeur villeuse du canal de Wirsung, décrite par Caroli et qui répond également à diverses appellations : polype villeux, adénome villeux papillaire, papillome, tumeur papillaire intra canalaire (22). Il s’agit de tumeur de topographie préférentiellement céphalique, localisée au canal principal, plus rarement elle s’étend dans les canaux secondaires. Macrosopiquement, l’aspect est celui d’un polype sessile, ou alors d’une tumeur étendue constitutée de franges flottant dans la lumière canalaire, enrobées de mucus. En amont, le canaL de Wirsung et les canaux collatéraux sont dilatés (19). 164 Histologiquement : il s’agit d’une prolifération de cellules cylindriques mucosécrétantes avec atypie cytonucléaire (dysplasie). Plus rarement des carcinomes intracanalaires sont décrits. 2. L’Ectasie canalaire mucineuse (ECM) est une lésion kystique récemment décrite par Itai (10). Elle se caractérise par la dilatation kystique des canaux collatéraux pancréatiques, bordés par un épithélium unistratifié comportant de nombreuses cellules mucosécrétantes (13,14,17,18). Le point de départ de l’affection est la métaplasie mucineuse. Ces dilatations kystiques sont de siége préférentiellement céphalique, ou plus rarement multifocal ou diffus. Là également, des atypies cytonucléaires ou des zones de transformation carcinomateuse ont pu être signalées. Comme l’ont rappelé Halphen et al (24), la filiation entre ces lésions et la néoplasie avait été fortement suspectée. Nagai et al (18) ont rapporté des arguments histologiques concernant la séquence adénome hyperplasie - cancer dans le cadre des ECM. • Enfin, ces deux lésions peuvent être associées, comme en témoignent les observations rapportées par Partensky et al (28), si bien que ces deux entités (tumeur papillaire intracanalaire et ECM) représentent un même processus prolifératif, intéressant préférentiellement soit le canal principal, soit les canaux secondaires. De plus, l’analyse génétique (mutation séquentielle de gènes K-ras ou de la p53) apporte également des éléments en faveur de cette carcinogenèse progressive (26). • L’appellation de TIPMP adoptée par l’OMS dans le but de mettre fin à ces disparités, regroupe trois variétés de tumeur (16). La variété bénigne : intraductal papillary mucinous adenoma. La variété intermédiaire : qualifiée de border line (uncertain malignant potential) : « intraductal papillary mucinous tumour with moderate dysplasia ». Et, la troisième variété qui est la tumeur maligne : « intraductal papillary mucinous carcinoma » • Ce terme TIPMP ne préjuge donc pas du caractère bénin ou malin de la prolifération des néoformations intracanalaires pancréatiques sécrétantes de mucus, d’architecture villeuse, plane, micropapillaire ou papillaire. Elles entraînent une dilatation du canal de Wirsung et des canaux secondaires. Ces dilatations peuvent s’étendre au delà des sites de prolifération épithéliale. Ces lésions peuvent coexister au sein d’une même tumeur. • Il apparaît justifié de regrouper sous cette terminologie commune de TIPMP des lésions qui restent voisines au plan histologique et qui posent des problèmes diagnostiques et thérapeutiques communs. EPIDEMIOLOGIE Jusqu’en 1986, la TIPMP n’a fait l’objet que de rares publications, essentiellement au Japon. Depuis, plusieurs publications sont apparues. Toutefois la plupart des observations ont été rapportées sous forme de cas isolés ou de courtes séries. • Kuroda et al ont colligé en 1991 : 187 observations qui représentent l’ensemble des cas rapportés au Japon entre 1980 et 1990 (27). • Barbe en 1997 a rapporté 271 cas dans la littérature de langue anglaise (28) • Kimura en 1998 a recensé 244 observations rapportées dans la littérature japonaise, européenne et américaine. (19). • Cuillerier et al en 1998 ont rapporté une série collective franco-belge de 41 malades (19). 165 • Dans un travail récent, 30 malades consécutifs présentant une TIPMP ont été analysés entre 1980 et 1995 (23) à l’hôpital Beaujon. Bien qu’il soit encore trop tôt pour parler d’une véritable augmentation des TIPMP, il semble que l’on assiste depuis quelques années à une évolution sensible de la présentation clinique de ces tumeurs. Cette pathologie est rare avant l’âge de 50 ans (27). L’âge moyen de découverte des lésions bénignes est plus précoce (28). Elles surviennent 2 fois sur 3 chez un sujet de sexe masculin, mais il ne semble exister aucune prédisposition liée au sexe (25). Elle est plus fréquente au cours de la 6ème décennie avec un sex ratio compris entre 2 et 3. Enfin, l’âge moyen au moment de l’intervention est de 60 ans (13,30). SIGNES D’APPEL • • • • • • Le tableau clinique révélateur habituel est fait de douleurs abdominales, sans caractère spécifique. Ces douleurs correspondent à des crises de pancréatite aiguë lorsqu elles s’accompagnent d’une élévation des enzymes pancréatiques. La sécrétion mucineuse avec formation de bouchons de mucus est la cause vraisemblable de la dilatation des canaux et des crises de pancréatite aiguë. L’obstruction canalaire par la tumeur elle-même en est une deuxième explication. Toujours est-il que la répétition des poussées est le principal mode de révélation (50% des cas). Les manifestations cliniques d’insuffisance pancréatique exocrine ou endocrine, corollaire de l’atrophie du parenchyme pancréatique, se voient dans 20% des cas. Elles témoignent de la longue évolution de la maladie, se traduisant par des stéatorrhées, des diarrhées, et un amaigrissement. La plupart des malades présentent donc des symptômes non spécifiques, douleurs abdominales, diarrhées, alors que très peu de malades décrivent des symptômes évocateurs d’une affection bilio-pancréatique : ictère choléstatique (25) ou Wirsungorragie (16). Toutefois, l’ancienneté des symptômes au moment du diagnostic (2 - 30 ans) plaide en faveur d’une évolution lente. La présence d’une pancréatite d’amont atrophique, ainsi que l’existence de signes d’insuffisance pancréatique endocrine et/ou exocrine vont dans le sens d’une évolution lente de la maladie (23). Cependant, certains malades significativement plus âgés au moment de la chirurgie, avaient un délai entre le début des symptômes et la chirurgie plus court. Ils se sont révélés porteurs d’une tumeur maligne invasive. Ceci avait suggéré l’existence d’un groupe de tumeurs d’évolution plus rapide chez des personnes plus âgées et plus rapidement symptomatiques (19). Mais nous pensons que ceci encore plaide en faveur de la filiation forme bénigne - forme maligne. Aucune autre différence significative dans les modes de présentation clinique n’a été retrouvée entre les tumeurs malignes invasives et les tumeurs dysplasiques (qualifiées de TIPMP malignes et TIPMP bénignes (25) ), contrairement aux résultats de certains auteurs japonais (38) qui ont noté une fréquence significativement supérieure de diabète dans le groupe de tumeurs malignes. Enfin, le diagnostic de TIPMP peut être posé de façon fortuite dans un quart des cas, à l’occasion d’un bilan sanguin systématique avec élévation de l’amylasémie ou d’un examen d’imagerie sans signe d’appel pancréatique particulier. BILAN PRE-OPERATOIRE : La contribution au diagnostic de TIPMP se fait par différentes explorations : 166 1. L’imagerie : met toujours en évidence une ou plusieurs lésions d’aspect kystique dans le pancréas. Il s’agit de dilatation des canaux pancréatiques qui peut être considérable. L’absence d’obstacle pancréatique ou ampullaire identifiable en aval de la dilatation est évocatrice du diagnostic de TIPMP. Les images kystiques peuvent adopter une disposition en grappe de raisin. L’origine canalaire de l’affection peut être difficile à affirmer sur les différentes techniques d’imagerie en coupe. Le contenu canalaire mucoïde est soit homogène, soit hétérogène notamment à l’échographie où un aspect finement granité peut se voir. Les parois kystiques sont fines. Lorsque ces parois sont vues, les végétations tumorales de ces parois, prennent l’aspect d’image endokystiques échogènes à l’échographie et hyperdense au scanner, se rehaussant après opacification intraveineuse. Le parenchyme pancréatique est souvent atrophique. Les calcifications sont inhabituelles, de même que la dilatation des voies biliaires en cas de localisation céphalique de la TIPMP. La TDM avec injection montre un rehaussement pariétal et contribue à établir une carte lésionnelle précise. Ainsi en pratique, l’échographie montre la présence de lésions uni ou multikystiques, ovalaires ou arrondies, à contenu homogène ou hétérogène, sans septum, ni épaississement de la paroi, ni calcification intrakystique. La taille des kystes est réduite de 4 à 20 mm. La localisation la plus courante est la tête du pancréas et plus précisément le processus uncinatus. Cette localisation présente un intérêt pour l’orientation diagnostique. La localisation isthmique a été rapportée (16) et la forme corporéo-caudale reste exceptionnelle (35.). Le canal de Wirsung est dilaté même au delà des zones pathologiques et les parois du canal peuvent présenter des végétations intracanalaires correspondant à des dépôts de mucosités. Les renseignements fournis par la TDM sont superposables à ceux fournis par l’échographie avec une sensibilité supérieure. La communication des kystes avec le canal pancréatique principal est mieux aperçue. 2. La cholangio-pancréato-IRM (CPRM) : permet d’obtenir une cartographie des canaux pancréatiques et biliaires. Elle pourrait se substituer à la CPRE en raison de son caractère non invasif. Elle est en cours d’évaluation. 3. L’écho-endoscopie (EE) : permet l’exploration des canaux pancréatiques par mini-sonde intracanalaire. Elle montre la présence des néoformations ou de matériel mucoïde au sein des voies canalaires dilatées. C’est un examen de deuxième intention : lorsque l’approche diagnostique initiale par échographie et scanner n’est pas concluante, il est préférable de programmer l’EE avant la CPRE qui reste une exploration invasive. Cette EE comporte l’exploration des canaux pancréatiques et leurs communications avec les dilatations kystiques. En outre, la ponction avec étude cytologique et dosages des marqueurs tumoraux intrakystiques (ACE et CA19.9) peut être faite. Cette exploration garde cependant des limites dans cette indication et ne permet pas de se dispenser de la CPRE, notamment lorsqu’elle ne montre pas de de bouchons muqueux au sein des voies canalaires pancréatiques dilatées. Palazzo et al (35) ont montré que l’EE estime mal l’étendue de la maladie dans 40% des cas. Quant à la différenciation des lésions (malignes ou bénignes), sa sensibilité est de 88%. 4. Le cathétérisme rétrograde endoscopique de la papille (CPRE) avec opacification rétrograde du canal de Wirsung, permet de visualiser l’aspect endoscopique de la papille. Le signe le plus couramment retrouvé est l’excrétion de mucosités épaisses et verdâtres. Cet orifice peut être béant ou renflé voire bourgeonnant. 167 La Wirsungoscopie transpapillaire à l’aide de babyscope peut visualiser une végétation intrakystique. Au cours de l’examen, pourront être réalisés des prélèvements : biopsiques trans-papillaires d’une tumeur proximale, ou cytologiques après stimulation de la glande pancréatique par la sécrétine. Les résultats de l’analyse restent décevants (caractère pauci-cellulaire de la sécrétion pancréatique). Le dosage de la sialomucine dans le suc pancréatique semble être plus intéressant. La recherche d’une mutation sur le gène K-ras effectuée sur les sucs pancréatiques et sur les prélèvements biopsiques, particulièrement pour la quantification du potentiel de dégénérescence est plus prometteuse. La cholangio-pancréatographie rétrograde est l’examen clef qui permet d’affirmer le diagnostic. Les clichés radiologiques montrent une dilatation totale ou segmentaire du canal de Wirsung dans 90% des cas. Une fistule pancréatico-duodénale peut se voir. On peut retrouver des déficits de remplissage à type de moules radio-transparents dus à la présence d’amas de mucosité épaisses. Mais c’est l’abouchement large des images kystiques au canal pancréatique principal associé aux signes précédemment décrits qui permet d’affirmer le diagnostic. On peut trouver également des canaux secondaires dilatés au niveau du processus uncinatus, ou plus généralement au niveau de la tête. Selon la classification de KURODA (27), on distingue à ces TIPMP trois sous types tumoraux : a) type canal principal (le canal de Wirsung est dilaté et est le siége prédominant de la tumeur ; b) type branches collatérales (seule les branches collatérales du canal de Wirsung sont dilatées, le canal de Wirsung a un diamètre normal et est indemne de tumeur ; c) type mixte : (la tumeur touche à la fois le canal de Wirsung et les branches collatérales). 5. Il a été montré que la sphinctérotomie endoscopique (SE) pouvait soulager les symptômes et prévenir les crises de pancréatite subaiguë récidivante en levant l’obstruction canalaire constituée par les bouchons muqueux. Cette SE n’est pas un traitement à visée curative en raison du haut potentiel de dégénérescence de la TIPMP (16). 6. Les marqueurs tumoraux : le dosage de l’antigène carcino-embryonnaire ACE ou du CA19.9 est décevant, car médiocrement spécifiques et sensibles (23). L’élévation de l’ACE semble plus intéressante que celle du CA19.9 qui est parfois augmenté dans le liquide intrakystique et qui doit dans ce cas faire évoquer en premier lieu une TIPMP ou un cystadénocarcinome (16). Ce dosage n’étant pas contributif pour déterminer le caractère bénin ou malin des TIPMP (37) ; certains attribuent à l’examen cytologique des sécrétions pancréatiques après administration de sécrétine la possibilité de différencier les formes bénignes des formes malignes avec une sensibilité et une spécificité de 100% (38). Trois explorations doivent donc être réalisées chez un malade suspect d’avoir une TIPMP permettant de répondre à 3 questions essentielles : - quel est le degré de certitude du diagnostic ? - quelle est la localisation et l’extension des lésions ? - s’agit-il d’une forme bénigne ou d’une forme maligne ? • Les anomalies constatées sur la TDM et l’EE et sur le CPRE permettent un diagnostic de certitude. • Cependant l’EE et le CPRE sous estiment l’étendue des lésions successivement dans 25 et 14% des cas ; surtout lorsqu’il s’agit d’une dilatation globale du canal principal. 168 • Enfin, la prévalence élevée des lésions malignes (72%) ne se retrouve pas dans toutes les séries. Il est intéressant de noter que les formes malignes sont moins fréquentes dans les atteintes isolées des canaux secondaires (35). • Les signes tomodensitométriques en faveur de la malignité : un syndrome de masse, ou composante solide au niveau des kystes ; des adénopathies ; un envahissement vésiculaire et les métastases. Les signes écho-endoscopiques qui évoquent la malignité : l’atteinte du canal principal, les lésions volumineuses des canaux secondaires, une dilatation marquée du canal principal (> 10 mm) et les nodules muraux. DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS Il convient de considérer quelques diagnostics qui peuvent prêter à confusion avec les TIPMP : o La pancréatite chronique (PC) à calculs radiotransparents qui peuvent simuler des bouchons à mucus à l’intérieur des canaux. Ce diagnostic peut-être difficile à porter, car au cours des TIPMP d’authentiques lésions de PC peuvent se voir. Mais les données épidémiologiques et la topographie diffuse des lésions canalaires objectivées par la pancréatographie permettront le diagnostic. o Les cystadénomes, classiquement non communicants avec les canaux pancréatiques peuvent être suspectés. L’imagerie et surtout la pancréatographie permettent de redresser le diagnostic. LE TRAITEMENT : o o o • • • Le traitement des TIPMP est résolument chirurgical (mortalité entre 0 et 5%). Cette attitude repose sur la fréquence élevée des formes malignes invasives, mais également le nombre important de tumeurs en dysplasie sévère. Ni l’imagerie ni les autres investigations ne permettent à coup sûr de faire la part des formes de dysplasie minime ou modérée qui risquent d’évoluer vers des tumeurs invasives. A l’exclusion d’exceptionnelles conditions d’opérabilité défavorable, le diagnostic de TIPMP doit conduire à l’indication opératoire, en raison également des risques d’obstruction pancréatique aiguë (pancréatite) et chronique (insuffisance pancréatique). L’intervention la plus fréquemment réalisée, du fait de la localisation préférentielle de la tumeur au niveau de la tête pancréatique, est la duodéno-pancréatectomie céphalique (DPC). L’extension tumorale, peut nécessiter une pancréatectomie subtotale avec conservation de la partie distale de la queue afin de prévenir la survenue d’un diabète. L’étendue de l’exérèse reste donc un problème au plan chirurgical si l’on veut éviter la récidive adénomateuse ou carcinomateuse à partir des voies canalaires du pancréas. Il faut donc adapter l’étendue de l’exérèse pancréatique à la prolifération tumorale. La pancréatoscopie per-opératoire permet de vérifier l’absence de prolifération tumorale au niveau du magma pancréatique laissé en place. L’examen extemporané de la tranche de section et des adénopathies satellites est recommandé. 169 La morbidité de ces résections réalisées sur parenchyme pancréatique fibreux reste importante liée surtout à la fistule pancréatique (14%). • La pancréatectomie totale (PT) ne doit être décidée que lorsqu’elle représente le seul procédé qui permet une exérèse de la totalité du matériel tumoral avec une marge de résection saine. • Particulièrement dans les formes de TIPMP qui intéressent le canal principal avec risque de multifocalité dans les canaux secondaires et devant la difficulté technique de surveiller le moignon pancréatique par CPRM et EE ou par CPRE, certains ont pu faire considérer la PT comme l’opération de choix en cas de TIPMP avec dilatation diffuse du canal de Wirsung (25). LE PRONOSTIC • Le pronostic des TIPMP bénignes opérées semble bon. Il n’existe pas de récidive (35). • Le pronostic des TIPMP malignes est mal connu. o o une analyse de la littérature fait état d’un taux de survie à 5 ans de 75% (21). les facteurs significativement associés à la malignité sont : - L’envahissement vasculaire et ganglionnaire, la dilatation de la VBP, l’extension tumorale extra-pancréatique, et l’atteinte de la tranche de section pancréatique après résection (25% de survie à 4 ans). - Le pronostic des TIPMP demeure favorable même si le risque de dégénérescence paraît relativement élevé (2/3 des cas). Ce pronostic est nettement meilleur que celui des adénocarcinomes exocrines du pancréas (16). - C’est dire l’importance d’un traitement précoce et complet après un diagnostic topographique pré-opératoire le plus précis possible. En conclusion : La TIPMP est une lésion kystique de description récente. Elle se manifeste le plus souvent par une pancréatite aiguë. La différenciation entre ce type de tumeur et les autres lésions kystiques du pancréas est souvent difficile. Sachant : 1) le pourcentage élevé de carcinomes invasifs (40%) et carcinomes in situ (20%) ainsi que l’extension canalaire pancréatique diffuse (50%). 2) L’absence de facteur prédictif pré-opératoire clinique pour le diagnostic des tumeurs malignes invasives. 3) Le mauvais pronostic des tumeurs opérées au stade de carcinome invasif, surtout en cas d’ envahissement ganglionnaire et extra-pancréatique. Cela souligne la nécessité d’une exérèse chirurgicale précoce, au stade de dysplasie pour avoir un meilleur pronostic post-opératoire. 170 L’indication doit être posée soit avant l’intervention au terme des explorations par l’imagerie, l’EE et la CPRE, soit en per-opératoire en fonction des constatations per-opératoires et des données de l’examen extemporané de la tranche de section pancréatique, ou encore secondairement, après pancréatectomie partielle. Les constatations de lésions proliférantes intracanalaires en per opératoires, ou sur l’examen anatomo-pathologique post-opératoire, doivent logiquement conduire à étendre la pancréatectomie si nécessaire jusqu’à la totalisation. TUMEURS PSEUDOPAPILLAIRES ET SOLIDES DU PANCREAS (TPPS) • • • • • • • • • Ce sont des tumeurs rares à potentiel malin. Elles représentent 4% des TKP. Le diagnostic repose sur le contexte et l’imagerie : Elles concernent essentiellement des jeunes filles et des femmes jeunes dans 82% des cas. L’âge moyen est de 26 ans. Elles se révèlent dans la moitié des cas par une masse abdominale qui peut être douloureuse dans 1/3 ces cas. Dans 10% des cas, la découverte est fortuite sur un examen morphologique ou en peropératoire. Un autre mode de révélation : les métastases péritonéales et/ou hépatiques synchrones. Ces TPPS sont de volumineuses tumeurs d’une dizaine de centimètres de diamètre. Elles sont bien limitées par une capsule. L’aspect est souvent celui d’une masse solide partiellement kystifiée du fait des phénomènes nécrotiques et hémorragiques. L’aspect peut être kystique. o o o o o Le rehaussement de la paroi au scanner, l’hétérogénéité du contenu, les calcifications sont les signes les plus fréquents. L’IRM est l’examen de référence. La ponction et la biopsie sont contre-indiquées en raison des risques de dissémination intra-péritonéales, liés au traumatisme tumoral. Généralement le traitement des TPPS est nécessairement une exérèse pancréatique réglée en raison de leur caractère potentiellement malin mais limité. Le pronostic de ces tumeurs réséquées est en règle excellent. La simple énucléation expose à l’abandon d’un reliquat capsulaire et à la récidive. Mais quelques tumeurs s’avèrent très agressives avec métastases hépatiques ou péritonéales et sont donc de mauvais pronostic. TUMEURS NEURO-ENDOCRINES KYSTIQUES (TNE) : • • • • • Ces tumeurs ne représentent que 2% des TKP. La moitié d’entre elles sont des TNE sporadiques non sécrétantes. L’autre moitié s’inscrit dans un contexte de néoplasie endocrine multiple de type 1 (NEM1) qui se caractérise par la multiplicité des tumeurs pancréatiques sécrétantes et non sécrétantes. Dans 1/3 des cas, ces TNE kystiques sont malignes, ce qui justifie leur exérèse. En dehors du contexte de NEM1 (glandes intéressées : pancréas, estomac, duodénum, parathyroïdes, hypophyse, thyroïde, cortico- surrénales), le diagnostic pré-opératoire 171 • s’appuie sur l’écho-endoscopie, la cytoponction, l’IRM et l’apport de la scintigraphie (octréoscan) qui rechercheront des tumeurs dont le diamètre est inférieur à 2 cm. En fait l’examen histologique et immuno-histo-chimique de la tumeur permet le diagnostic. TERATOMES MATURES (KYSTES DERMOIDES) • • • • • • Ils sont des tumeurs épithéliales de type kystique. Ces tumeurs sont très rares (20 cas rapportés). Ils sont liés à un défaut de migration des cellules germinales. L’imagerie découvre une tumeur bien limitée à contenu hétérogène du fait de la présence de calcifications, de cheveux. La présence d’un contingent graisseux peut aider au diagnostic. Ils sont traités par simple énucléation. TUMEURS NON EPITHELIALES : • • • • Ce sont les tumeurs conjonctives à forme kystique. Elles regroupent les tumeurs vasculaires et non vasculaires. La tumeur vasculaire la moins rare est le lymphangiome kystique du pancréas qui se présente comme une tumeur kystique cloisonnée. Les autres tumeurs non épithéliales sont exceptionnelles : Le leiomyosarcome dont l’aspect kystisé témoigne de remaniements nécroticohémorragiques. Les métastases intra-parenchymateuse peuvent présenter un aspect pseudokystique. PSEUDOTUMEURS KYSTIQUES DU PANCREAS : • Leur origine est congénitale. • Elles ne cancérisent pas. • Elles regroupent : o Le kyste congénital unique : 2 variétés : − Les kystes entérogènes. − Les kystes lympho-épithéliaux. o Il se voit chez l’enfant et l’adulte jeune. Son contenu est séreux. L’imagerie donne une masse anéchogène et hypodense. Ce kyste est le plus souvent asymptomatique. Mais quelques cas de volumineux kystes compressifs ont été rapportés. Le diagnostic différentiel se fait avec CS macrokystique. Les kystes multiples ou polykystose pancréatique : - peuvent être isolés. - ou associés à une polykystose hépato-rénale. - ou surtout à une maladie de Van Hippel Lindan (la polykystose est pathognomonique). 172 o L’indication opératoire est portée en cas de compression biliaire. CONCLUSION 2 types de lésions réunissent 90% des tumeurs kystiques du pancréas : • • • • Les cystadénomes séreux (30%) qui sont des tumeurs bénignes ; ils ne nécessitent en général qu’une surveillance. Les tumeurs mucineuses (60%) à potentiel malin, qui englobent les cystadénomes mucineux bénins et malins et les TIPM. Ces tumeurs doivent être réséquées chirurgicalement. Le cystadénocarcinome mucineux représente la forme maligne des tumeurs kystiques mucineuses. Le diagnostic erroné de pseudokyste entraîne un retard de prise en charge dans ¾ des cas. La TIPMP dont les symptômes révélateurs sont liés à une obstruction canalaire pancréatique, intermittente et récidivante (crise de pancréatites aiguës ou stéatorrhée témoignent d’une insuffisance pancréatique). Le bilan morphologique endoscopique aide à affirmer le diagnostic à la recherche de signes évocateurs d’une lésions maligne et à guider l’étendue de la résection pancréatique. 173 BIBLI0GRAPHIE 1) Le Borgne J., De Calan L, Partensky C. Les tumeurs kystiques du pancréas. I Vol, Monographies de l’Association Française de chirurgie – Paris : Arnette 1997 - : 190 pp. 2) Kloppel G, Solea E, Langnecker DS. Histological typing of tumors of the exocrine pancreas. 2nd ed ; Berlin Spinger 1996. 3) Le Borgne J. Les tumeurs kystique du pancréas. 18èmes Journées Nationale de Formation Continue en Hépato-gastroentérologie. 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Les premières se traduisent par un syndrome tumoral, les secondes par une symptomatologie plus évocatrice en raison des effets des hormones produites par la tumeur. Les insulinomes représentent 75% des TEP et les gastrinomes (syndrome de ZollingerEllison) 25%, les autres formes étant rarissimes. Ces tumeurs peuvent être uniques et sporadiques ou multiples (touchant le pancréas mais aussi l’hypophyse, les parathyroïdes, la thyroïde, les surrénales). Elles s’intègrent alors dans une néoplasie endocrine multiple (NEM) d’origine génétique. Elles peuvent être diagnostiquées par leurs manifestations cliniques classiques, par la présence d’hormones dans le sérum, et au moyen de la tomodensitométrie dynamique employant des produits de contraste administrés par voie intraveineuse ou orale. Souvent, elles sont difficiles à mettre en évidence en pré opératoire et parfois même au cours de l'intervention. Leur repérage est actuellement grandement aidé par l'échographie peropératoire au contact même du pancréas II- MATERIEL ET METHODES Sur les 508 cancers du pancréas de notre série nous avons collige 5 cas de TEP soit une fréquence d’environ 1%. Il s’agit de 4 hommes et d’une femme d’age moyen de 56ans avec des extrêmes de 35 et 73ans. Le tableau clinique a été domine 3 fois par un ictère de type néoplasique ; une angiocholite aigue dans 1 cas et dans le dernier cas une douleur abdominale avec amaigrissement. Le diagnostic préopératoire retenu dans 4 cas a été une tumeur pancréatique et dans le ème 5 cas une angiocholite aigue lithiasique. La masse pancréatique siègeait au niveau de la tête dans 3cas au niveau du corps dans un cas et au niveau de la queue dans un cas. Il a été pratiqué : - Trois résections pancréatiques (Duodéno-pancréatectomie céphalique chez 2 patients et spléno-pancréatectomie corporéocaudale dans 1 cas). - Une double dérivation suivie de 3 cures de chimiothérapie dans un cas. - Une abstention thérapeutique devant la présence de métastases hépatiques dans 1 cas. Le diagnostic de TEP a été retenu sur les données de l’examen anatomopathologique (pièce opératoire, biopsie ganglionnaire) 178 III- Résultats Le délai moyen de consultation a été de 250 jours. L'échographie pratiquée dans tous les cas a permis de découvrir une masse dans 4 cas. Le TDM pratiquée dans 5cas a permis de montrer la masse de préciser son siège et sa taille (40mm en moyenne) dans tous les cas. Elle a permis également de découvrir un nodule hépatique non vu à l'écho dans un cas. La chirurgie s’est soldée par un décès post opératoire par sepsis, chez l’un des patients ayant eu une DPC. Les suites étaient simples avec une survie à 4ans pour l’autre cas. 3 patients étaient perdus de vue. IV- DISCUSSION A-Sur le plan anatomopathologique La dernière classification internationale des tumeurs endocrines par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), publiée en 2000 intègre des données cliniques, histologiques et moléculaires (in 3). Elles y sont séparées en trois groupes de malignité croissante : - Les tumeurs endocrines bien différenciées d’évolution bénigne ou incertaine. - Les carcinomes endocrines bien différenciés. - Les carcinomes endocrines peu différenciés. 1-Tumeurs endocrines bien différenciées La grande majorité des tumeurs endocrines pancréatiques est bien différenciée et leur aspect histologique caractéristique est le plus souvent suffisant pour reconnaître leur nature endocrine. 2-Tumeurs endocrines peu différenciées Elles sont rares, représentant environ 10 % des tumeurs endocrines pancréatiques. Elles correspondent à des tumeurs malignes (carcinomes) au pronostic défavorable. Il existe un petit nombre de tumeur dont les caractéristiques sont intermédiaires entre les tumeurs endocrines bien et peu différenciées (2). 179 Tableau I. – Classification OMS 2000 des tumeurs endocrines du pancréas (3) 1-Tumeur endocrine bien différenciée • Comportement bénin : tumeur confinée au pancréas, pas d’angioinvasion, taille < 2 cm, CFG et 2 % Ki-67+/ 10 CFG. o Fonctionnelle : insulinome seulement* o Non fonctionnelle • Comportement incertain : tumeur confinée au pancréas, angioinvasion ou taille 2 cm, > 2 mitoses/10 CFG, > 2 % Ki-67+/ 10 CFG. o Fonctionnelle : insulinome, gastrinome, vipome, glucagonome, somatostatinome ou syndrome hormonal inapproprié. o Non fonctionnelle 2 mitoses/10 2-Carcinome endocrine bien différencié : tumeur maligne de bas grade - Seuls critères formels de malignité : invasion organes contigus et/ou métastases. Critères très souvent présents, non formels : angioinvasion, engainements périnerveux, taille 3 cm, 2 à 10 mitoses/ 10 CFG, > 5 % Ki- 67+/10 CFG. Fonctionnelle : insulinome, gastrinome, vipome, glucagonome, somatostatinome, ou syndrome hormonal inapproprié. Non fonctionnelle. 3-Carcinome endocrine peu différencié : tumeur maligne de haut grade - Invasion organes contigus et métastases à distance : très fréquente. Angioinvasion et engainements périnerveux nombreux, nécrose, >10 mitoses/10 CFG, > 15 % Ki67+/10 CFG, p53+ : critères très souvent présents. -Les tumeurs mixtes exocrines-endocrines Elles sont classées à part. On y distingue a. Les tumeurs composites, qui comportent une proportion variable de cellules endocrines et exocrines formant deux contingents séparés ; b. Les tumeurs combinées qui comportent une proportion variable de cellules endocrines et exocrines intimement mélangées c. Les tumeurs amphicrines, exceptionnelles, dont les cellules présentent à la fois des caractères exocrines et endocrines. Les tumeurs composites sont rares dans le pancréas. La présence de quelques cellules endocrines éparses au sein d’un adénocarcinome ne doit pas faire porter le diagnostic de tumeur composite. Ce terme doit être réservé aux tumeurs qui contiennent au moins 30 % de cellules endocrines. Le pronostic de ces tumeurs est celui de la composante exocrine, qui peut être de type canalaire ou acineux -Les lésions pseudo-tumorales Un chapitre à part leur est réservé : a. La nésidioblastose est caractérisée par une hypertrophie des cellules endocrines au sein d’îlots de Langerhans irréguliers de taille variée au pourtour des canaux pancréatiques. Elle se développe chez le nouveau né. Elle est rare chez l’adulte, parfois secondaire à des lésions de pancréatite chronique ou bien accompagnant une 180 tumeur endocrine dans le cadre d’une maladie de von Hippel Lindau ou d’une néoplasie endocrine multiple de type 1 ; b. La dysplasie endocrine est définie comme une lésion mesurant moins de 0,5 mm de diamètre dérivant des îlots de Langerhans remplacés par des cellules présentant des atypies modérées, avec prédominance anormale d’un des 4 types cellulaires A, B, D ou PP. Tumeur Syndrome Pancréas % Duodénum % Maligne % MEN % Insulinome Hypoglycémie 100 0 10 6 Gastrinome Synd Z E 38 38 (20 autres localisations) 70 25 Vipome Choléra pancréatique 85 15 40 1 Glugagonome Rash diabète thrombophlébite 100 0 70 3 Somatostatinome Stéatorrhée diabète lithiase biliaire 50 50 78 1 Ghfome Acromégalie 90 10 30 30 ACTH Synd cushing 100 0 100 0 Tab 2: Caractéristiques des TEP (7) B-Sur le plan diagnostique Les tumeurs endocrines duodéno-pancréatiques sont rares, c’est une des raisons pour lesquelles le diagnostic n’est souvent fait qu’avec retard, même quand il existe des symptômes. - Sur le plan clinique, on distingue : o Les tumeurs dites fonctionnelles c’est-à-dire avec des symptômes liés à la sécrétion tumorale (syndrome de Zollinger- Ellison). o Les tumeurs dites non fonctionnelles, c’est-à-dire sans symptômes liés à une sécrétion tumorale. Les tumeurs dites non fonctionnelles sont néanmoins le plus souvent sécrétantes. Elles sécrètent des peptides (dosables dans le sérum ou le plasma ou mis en évidence dans les cellules tumorales), mais sans expression clinique. Il y a 4 modes principaux de révélation des tumeurs endocrines duodénopancréatiques: 1) Un syndrome fonctionnel en cas de tumeur fonctionnelle, avec parfois des complications de l’hypersécrétion tumorale, 2) Un syndrome tumoral pancréatique, souvent de découverte fortuite, 3) Des métastases hépatiques dont la biopsie montre qu’elles sont de nature endocrine, et 4) La découverte d’une tumeur pancréatique dans l’exploration d’un syndrome de prédisposition héréditaire : néoplasie endocrine multiple de type 1 (NEM 1) beaucoup plus fréquemment que maladie de von Hippel Lindau. 181 La démarche diagnostique comporte les étapes suivantes : 1) Le diagnostic positif de la nature endocrine de la tumeur et de son type, et du degré de différenciation, 2) La recherche d’une NEM 1, et 3) La localisation des tumeurs primitives et de leurs éventuelles métastases. Le but de cette démarche est de préparer la prise en charge thérapeutique qui dépend principalement : - de l’existence ou non d’un syndrome fonctionnel et de son type, - de l’existence ou non de métastases (essentiellement hépatiques), - de l’existence ou non d’une NEM 1 et enfin - du degré de différenciation tumorale, sachant que les étapes diagnostiques et thérapeutiques sont souvent mêlées, particulièrement en cas de symptômes liés à la sécrétion tumorale que l’on traite sans tarder. 1-diagnostic de la nature endocrine de la tumeur et de son type a-Insulinomes Les insulinomes sont les plus fréquentes des tumeurs endocrines du pancréas. Elles sont malgré tout rares avec une incidence de 4 cas par million de personnes (6). L’âge moyen de survenue est de 47 ans et on retrouve 60% de femmes pour 40% d’hommes. 95% environ sont bénins et 7% s’intègrent dans une néoplasie endocrinienne multiple de type I. Les manifestations cliniques, qui sont des symptômes d’hypoglycémie, surviennent essentiellement pendant le jeûne, notamment le matin de bonne heure ou lorsqu’un repas est sauté ou durant l’effort. Ces symptômes associent, à des degrés variables, des troubles de la vision, des comportements anormaux, des sueurs, des faiblesses musculaires, des sensations de faim, une anxiété, des palpitations. Parfois même, lorsque le diagnostic est retardé, certains patients sont traités pour des troubles psychiatriques, voire pour des crises comitiales depuis des années. Le diagnostic d’hypoglycémie organique repose essentiellement sur la triade de Whipple qui inclut : 1. des symptômes d’hypoglycémie survenant à jeun. 2. au moment des symptômes, une glycémie inférieure à 45mg/100ml. 3. une disparition des symptômes lors de l’administration de glucose par voie orale ou par voie intraveineuse. Le diagnostic biologique de l’insulinome est sur l’existence d’une hypoglycémie associée à un taux élevé ou inapproprié d’insulinémie sanguine. Le rapport entre le taux d’insuline et taux de glucose doit être, dans cette situation, de plus de 0.4. Dans les cas douteux, on peut réaliser un test de jeûne jusqu’à 72h (épreuve de Cohn), consistant en un régime à 1200 kCal, pauvre en hydrates de carbone (50g/j) suivi d'un jeûne de 36h avec des prélèvements biologiques réguliers et pendant les malaises. On s’aperçoit alors que la plupart des patients deviennent symptomatiques au bout de 24h. Les prélèvements trouvent des taux de glycémie bas associés à des taux d’insulinémie élevés. Dans des cas particuliers, où le diagnostic est difficile, ou si l’on a un doute sur des injections subreptices d’insuline par le patient lui-même (hypoglycémie factice), on peut réaliser des dosages de pro-insuline et de C-peptide. Les tests d'insulino-sécrétion comme l'hyperglycémie provoquée orale (HGPO) montrent une réponse explosive. Le test au tolbutamide n'est plus utilisé. 182 Le diagnostic différentiel consiste, bien entendu, à éliminer les autres causes d’hypoglycémie, étiologies multiples incluant notamment des injections subreptices d’insuline, la prise de médicaments contenant de l’insuline, la prise de sulfamides hypoglycémiants l’insuffisance rénale, les défaillances hépatiques les défaillances surrénaliennes, les défaillances cardiaques… b- Gastrinome ou syndrome de Zollinger-Ellison Décrit pour la première fois par Zollinger et Ellison en 1955, il est lié à l'hypersécrétion de gastrine par une tumeur endocrine (gastrinome) qui entraîne une stimulation de la sécrétion gastrique acide. Le gastrinome est situé dans 40% des cas dans le pancréas. La malignité est observée dans 50 à 70% des cas. L'association à d'autres endocrinopathies néoplasiques est possible dans le cadre d'une NEM de type I (7) C'est une maladie rare mais grave car en l'absence de diagnostic topographique préopératoire ou même opératoire, de résécabilité, ou en présence de signes de malignité ou de néoplasie endocrinienne multiple (NEM), le pronostic est encore dans de nombreux cas pessimiste. Sur le plan clinique, les ulcères sont sévères, multiples, récidivants et de localisation atypique (par exemple jéjunaux) parfois associés à une diarrhée chronique avec malabsorption secondaire à l'hypersécrétion pancréatique avec inactivation de la lipase (cette hypersécrétion est en rapport avec une augmentation de la sécrétine). De fait, l'état général est fortement altéré. Une autre circonstance de découverte est la récidive ulcéreuse post-opératoire alors qu'aucune étude du chimisme n'a été effectuée. Notons les formes atypiques actuellement plus fréquentes du fait de l'efficacité des traitements antisécrétoires (85% au moment du diagnostic). c-les autres TEP rares 1-Vipome ou syndrome de Verner-Morrison ou encore choléra pancréatique. 65% sont des femmes. L’age moyen au diagnostic est de 47 ans (8) La symptomatologie est celle d'une diarrhée sécrétoire: - Diarrhée de volume important, 3-10 l, hydrique couleur urine ou thé clair ; très riche en électrolytes. - Persistante lors de l'épreuve du jeûne. Le transit peut être discrètement accéléré. Les désordres hydro électrolytiques sont fréquents. 2-Glucagonome Ce sont des tumeurs peu fréquentes développées à partir des cellules A. Elles se traduisent dans 75% des cas par un diabète associé à des lésions dermatologiques: 'érythème migrateur nécrosant' , ou parfois une stomatite, une glossite ou une diarrhée. 3-Somatostatinome Ce sont des tumeurs exceptionnelles développées à partir des cellules D. Dans les cas typiques, elles entraînent une altération de l'état général, une diarrhée avec stéatorrhée, une achlorhydrie gastrique et un diabète modéré. 2-la recherche d’une NEM 1 La recherche d’une NEM 1 est une étape indispensable dans la prise en charge de toute TEP, même métastatique, car sa présence modifie le traitement chirurgical, nécessite 183 une enquête génétique dans la famille, ainsi qu’une prise en charge spécifique des endocrinopathies associées et une surveillance longue car la guérison n’est jamais obtenue (9). Incidence An/105 Symptômes Epreuve Métas.hép (%) Guérison (%) Insulinome 75-100 Hypoglycémie Jeûne 8-15 90 Gastrinome 50-60 Ulcère +diarrhée Synd Zollinger Ellison Test à la sécrétine 25 30 Tumeur non fonctionnelle > 50 Fortuite Synd Tumoral > 60 < 40 VIPome 3-5 Diarrhée aq. profuse Hypokaliémie Achlorydrie 25 20 Glucagonome 1-2 Erythème N. Migrateur Diabète Cachexie 40 30 0,1 Lithiase vésiculaire, Diabète, Stéatorrhée, Achlorhydrie 50 ? Tumeur Somatostatinome Jeûne (-) Diarrhée sécrétoire Pentagastrine Tolbutamide Calcium Tableau 2 : principales tumeurs endocrines du pancréas (13) La NEM 1 est une maladie génétique autosomique dominante dont le gène, situé sur le chromosome 11, a été cloné. Elle est définie sur le plan clinique par l’association de plusieurs endocrinopathies : * l’hyperparathyroïdie (quasi constante), * l’adénome hypophysaire (42 %) sécrétant ou non * l’atteinte endocrine pancréatique (40-70 %) * l’atteinte surrénalienne (20- 50 %) souvent non fonctionnelle * et d’autres atteintes plus rares, dont les tumeurs endocrines bronchiques et thymiques (5 %) et les ECLomes fundiques en cas de SZE La prévalence de la NEM 1 varie très largement selon le type de TEP (tableau I). Elle est de 20-25 % en cas de SZE, mais est plus faible avec les autres types tumoraux. Il n’y a pas de donnée fiable pour les tumeurs non fonctionnelles. En cas de NEM 1, les tumeurs pancréatiques sont toujours multiples et le plus souvent de petite taille Les tumeurs sont de différents types (non fonctionnelles et fonctionnelles) chez un même malade. Un syndrome fonctionnel (SZE par exemple) peut être associé à un autre syndrome fonctionnel (insulinome), ce qui se voit exceptionnellement en l’absence de NEM 1. La multiplicité des tumeurs est un signe qui doit faire suspecter la NEM 1, car les tumeurs endocrines sporadiques (sans NEM 1) sont pratiquement toujours uniques. Dans le cas particulier du SZE associé à la NEM 1, il existe dans environ 80 % des cas des gastrinomes multiples situés dans la paroi duodénale Le diagnostic génétique n’est facile que si le malade appartient à une famille connue avec NEM 1 dans laquelle l’anomalie génétique a été typée. En effet, il y a pratiquement autant d’anomalies génétiques différentes qu’il y a de familles, ce qui rend difficile la 184 détection d’une telle anomalie chez un individu isolé. Il n’y a pas de corrélation phénotypegénotype 3-Le diagnostic de localisation a- insulinome Le diagnostic de localisation est important en préopératoire car pratiquement 20% des insulinomes ne peuvent être ni vus, ni palpés en per-opératoire. A l’heure actuelle, on peut recommander, comme examen préopératoire la réalisation d’une échoendoscopie, qui est l’examen le plus sensible et le plus spécifique. L’utilisation du scanner peut être intéressante mais cet examen est moins sensible que l’échoendoscopie. La place de l’IRM reste encore à déterminer en sachant, comme pour le scanner, que les lésions sont le plus souvent de moins d’1cm de diamètre, ce qui explique la mauvaise sensibilité de ces examens. Dans des cas difficiles, où les examens d’imagerie conventionnels n’ont pas permis de mettre en évidence la lésion, on peut aller jusqu’à réaliser des dosages veineux portaux par voie trans-hépatique, qui permettent de régionaliser la lésion. Enfin, c’est souvent la palpation per-opératoire et l’échographie per-opératoire qui sont intéressantes pour parfaitement localiser l’insulinome (10) b- gastrinome Les examens d'imagerie classiques même couplés ne mettent en évidence le gastrinome que dans la moitié des cas. Ils ont le mérite de retrouver les métastases hépatiques et les adénopathies signant la malignité. Actuellement, l'examen essentiel est l'échoendoscopie qui permet la détection de 60% des tumeurs méconnues au scanner. L'artériographie sélective ne met en évidence que le 1/4des gastrinomes. Les dosages hormonaux étagés sont à peine plus efficaces. Mais la certitude n'est apportée que par la découverte opératoire de la tumeur par échographie et transillumination duodénale peropératoires, avec étude anapathologique (structure endocrine) et immunohistochimique (mise en évidence d'une sécrétion de gastrine) de la pièce chirurgicale. En conclusion : L'échoendographie(EE) est devenue incontournable pour mettre en évidence des lésions pancréatiques endocrines (sensibilité 93% spécificité 95%) (1). L’artériographie, le cathétérisme portal avec prélèvements sélectifs, la scintigraphie à l'octréotide sont des examens à réaliser en seconde intention (2). Le diagnostic le plus difficile reste celui des gastrinomes extra pancréatiques. L’association endoscopie, EE et scintigraphie à l'octréotide a une sensibilité > à 90%. La nécessité de réaliser une EE même en cas de lésion visualisée par échographie ou TDM peut permettre de détecter d'autres localisations dans le pancréas faisant discuter le syndrome de NEM même en l'absence de localisations tumorales extra pancréatiques identifiables. Le traitement en particulier chirurgical sera alors à reconsidérer. Enfin les performances de la ponction sous EE sont excellentes même pour des tumeurs de moins d'1 cm de diamètre ce qui peut permettre le diagnostic de tumeur endocrine non sécrétante 185 Fig 1 : Algorithme diagnostic (18) C-sur le plan thérapeutique 1-Principes du traitement Le traitement médical doit corriger les troubles métaboliques secondaires aux secrétions hormonales suivi d'une résection tumorale. Pour les insulinomes Le traitement chirurgical peut être une énucléation ou une résection en fonction de la localisation de la tumeur de sa relation avec le canal pancréatique de son potentiel malin et de l'existence ou non de métastases. Lors de la laparotomie l'exploration de la totalité du pancréas à la fois de façon visuelle et bi manuelle doit être faite. L'échographie per opératoire permet de localiser les petites tumeurs non palpables et permet d'étudier la proximité de d'une structure canalaire. Ces 2 moyens permettent de localiser la majorité des insulinomes. La laparoscopie pour les insulinomes bénins peut être utilisée moyennant une localisation exacte des lésions ou l'utilisation de l'écho per coelioscopique. Pour les gastrinomes, 80-90% des tumeurs sont localisées au niveau du « triangle du gastrinome » (limité en dehors par le cystique et la VBP en bas par le genus inférius et en dedans par l'isthme pancréatique). Les mêmes gestes sont préconisés en plus d’une palpation du duodénum après un large décollement duodéno-pancréatique. L’endoscopie per-opératoire avec transillumination est également très utile. 2-L’hormonothérapie Le traitement anti sécrétoire est indiqué dans la phase pré opératoire et en cas de contre indication à la chirurgie. * Le diazoxide a prouvé son efficacité sur les hypoglycémies des insulinomes. * Les IPP sont le traitement de choix dans le syndrome de ZE. * L’octréotide donne un véritable soulagement dans les tumeurs sécrétantes. 186 3-la chirurgie Insulinome Le traitement chirurgical dépend de la localisation de la tumeur. Il va de la simple énucléation à la résection pancréatique. Dans le cas de tumeur maligne, il est recommandé de traiter tous les gîtes tumoraux et de faire des résections pancréatiques associées parfois à des résections hépatiques (8). Syndrome de ZE Le traitement curatif est une exérèse chirurgicale de la tumeur lorsque c’est possible. L'alternative non chirurgicale est représentée par un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons à forte dose (par ex: oméprazole 80mg/j en moyenne) à titre définitif ou temporaire en attendant la chirurgie. La gastrectomie totale est devenue exceptionnelle. Le contrôle du débit acide de base est la méthode de surveillance la plus adaptée avec l'endoscopie. 4-Chimiothérapie Du fait de la rareté de ces tumeurs et de leur relatif bon pronostic peu d’agents chimiothérapiques ont été évalués dans des études contrôlées. La streptozotocine (STZ) est la plus largement utilisée et son association avec l’adriamycine est le plus souvent recommandée pour les TEP malignes. Broder et Carter dans une large série (52patients) ont rapportés une réponse positive dans 37% des cas et une régression de la taille tumorale de plus de50% dans54%des cas (6). L’association STZ+5FU ou doxorubicine donne une réponse complète ou partielle de 40% à 63% avec une rémission de 7 à 23mois (14). Il semble que l’association STZ+5FU ou doxorubicine est le traitement le plus efficace des TEP (rémission de plus de 2ans ; médiane de survie de 2ans). En général les tumeurs sécrétantes répondent mieux que les tumeurs non sécrétantes et par mis elles l’insulinome et le Vipome sont particulièrement sensibles à la STZ seule ou associée. 5-L’embolisation artérielle Les métastases hépatiques des TEP sont hyper vascularisées. Les résultats de l’embolisation de l’artère hépatique sur la régression tumorale et la diminution de la sécrétion hormonale sont spectaculaires. De longues rémissions sans complications (10-30 mois) ont été observées (6). L’embolisation suivie d’une chimiothérapie séquentielle avec la Doxorubicine et la Decarbazine alternées et l’association STZ+5FU ont un avantage sur l’embolisation seule en terme de régression tumorale (79% vs 53%) et de médiane de survie (35 mois vs 9mois) (6). Ces procédures sont actuellement recommandées pour les TEP avec métastases hépatiques quand les traitements conventionnels sont inefficaces ou quand la chirurgie est trop risquée. En conclusion Pour le schéma thérapeutique on peut retenir celui de la société française de gastroentérologie (18). *Critères d’opérabilité des tumeurs endocrines pancréatiques - Recherche de tares viscérales 187 - Le contrôle optimal de l’hypersécrétion hormonale et de ses conséquences biologiques (tumeur et sécrétions associées, hypercalcémie de l’hyperparathyroïdie par exemple) doit être obtenu avant la chirurgie. - L’anesthésiste doit être prévenu d’éventuels traitements indispensables pendant les périodes per et post-opératoires (inhibiteur de la pompe à protons en cas de SZE, analogues de la somatostatine en cas de syndrome carcinoïde, contrôle de la glycémie en cas d’insulinome …). Si les métastases hépatiques sont bien différenciées, il faudra toujours envisager leur résection sinon chirurgie de cytoréduction de la masse tumorale primitive et secondaire. En s’aidant éventuellement d’autres techniques de destruction tumorale (radiofréquence). *En l’absence de métastases hépatiques : - En l’absence de NEM 1 : indication de la chirurgie d’exérèse, même en cas d’extension régionale, sauf risque opératoire trop élevé. En cas de NEM 1 : indication d’une chirurgie limitée à des situations particulières: tumeurs de plus de 2 cm, insulinome, glucagonome, VIPome ou autre tumeur fonctionnelle symptomatique malgré le traitement. *En cas de métastases hépatiques Il est souhaitable de réséquer lorsque c’est possible les métastases hépatiques synchrones ou métachrones. - En cas de tumeur bien différenciée, le traitement des métastases hépatiques non résécables est en général indiqué si elles sont évolutives selon les critères OMS ou RECIST (imagerie à 3 mois, puis tous les 6 mois par scanographie ou IRM) ou si elles restent symptomatiques malgré le traitement symptomatique. - En cas de tumeur indifférenciée, une chimiothérapie est indiquée. 188 La surveillance des traitements antitumoraux médicaux est clinique, biologique et morphologique. Elle est effectuée tous les 3 à 4 cycles pour les tumeurs bien différenciées et tous les 2 cycles pour les tumeurs peu différenciées. Le traitement est arrêté en cas de progression tumorale ou toxicité médicamenteuse. a) Métastases hépatiques résécables Résection chirurgicale des métastases, éventuellement complétée par d’autres techniques de destruction tumorale, et résection de la tumeur primitive. Pas de traitement complémentaire à visée antitumorale. Pour les tumeurs duodéno-pancréatiques bien différenciées et en présence d’une contreindication chirurgicale : indication d’une chimiothérapie (adriamycine-streptozotocine). Elle sera associée à une destruction par voie percutanée des métastases hépatiques (radiofréquence). b) Métastases hépatiques non résécables TEP bien différenciées: - Traitement de la tumeur primitive : Indications très sélectionnées de chirurgie en fonction des complications potentielles et des possibilités ultérieures de transplantation. - Traitement des métastases hépatiques : i. Métastases non progressives et non symptomatiques, envahissement hépatique < 50% : SURVEILLANCE ii. Métastases progressives et/ou symptomatiques malgré le traitement et/ou envahissement hépatique > 50% : - en l’absence de métastases extra-hépatiques: o Adriamycine-Streptozotocine ou 5FU-Streptozotocine (si contre-indication à l’adriamycine). o Chimioembolisation en absence de contre-indications [4,5] - en présence de métastases extra-hépatiques : o Adriamycine-Streptozotocine ou 5FU-Streptozotocine (si contre-indication à l’adriamycine) [3]. Tumeurs endocrines peu différenciées : Chimiothérapie d’emblée (CDDP-étoposide). 189 190 D- Sur le plan pronostic Le pronostic des TEP est généralement meilleur que celui des adénocarcinomes ductulaires. Dans une étude rétrospective comportant 50 TEP Chu et coll ont retrouvés une médiane de survie de 40 mois et une survie à 1; 2 et 5 ans respectivement de 84% 69% et 36% (5). Les facteurs de bon pronostic retenus dans leur étude univariée sont: La résection curative de la tumeur primitive L’absence de métastases hépatiques Le traitement agressif des métastases hépatiques métachrones V- CONCLUSION Les TEP sont un groupe hétérogène de tumeurs capables de produire des hormones actives aboutissant à des syndromes clinques variées mais distincts. Plusieurs progrès ont été réalisés ces dernières années Découverte de nouveaux peptides et de nouveaux syndromes L’établissement d’un diagnostic préopératoire Un diagnostic de localisation de plus en plus précis La disponibilité de meilleurs traitements efficaces Une prise en charge multidisciplinaire joue un rôle important. 191 VI- REFERENCES 1-Anderson MA Capenter S Thompson NW. Endoscopic ultrasound is highly accurate and directs management in patients with neuroendocrine tumors of the pancreas Am J gastroenterol 200;95;2271-7 2-Anne COUVELARD, Michèle FELCE-DACHEZ, Claude DEGOTT. Classification histologique des tumeurs endocrines du pancréas. Gastroenterol Clin Biol 2003; 27:1S15-1S19 3-Annette Fritscher-Ravens. Endoscopic ultrasound and neuroendocrine tumors of the pancreas. J pancreas 2004;5(4)273-281 4-Benoit T. Classification et facteurs pronostiques et moléculaires des tumeurs endocrines du pancréas. Ann pathol 2002 ;22 ;367-74 5-Chu QD,Hill HC ;Douglas HO. Predictive factors associated with long term survival in patients with neuroendocrine tumors of the pancreas. ann surg oncol 2002;9;855-862 6-chung-yau Lo;Sheung-Tat Fan. Endocrine tumours of the pancreas. Ann.coll.surg.HK 2001-5-110-115 7-Fontaine P;Debussche X. Insulinomes. EMC hepathologie 7-107-A-30; 1995; 8-Gerard M. Doherty. Pancreatic Endocrine Tumors. Problems in General Surgery 2003; 20: 112–124 9-Gouzi JL Pradere B. Vipome ou syndromed de Vermer-Morrison. EMC hepatologie 7-107-A-50 ;1994 10- Cadiot G; Callender G, Mignon M. L’identification du gêne de la NEM 1 consequences sur la prise en charge de TEP. Hepato gastro 1998; 5: 83-85 11- Cadiot G, Mignon M. Strategie diagnostique des tumeurs endocrines duodenopancreatiques. Gastroenterol clin biol 2003 ;27 : 1s6-1s14 12- Saisho H, Yamaguchi T. Diagnostic imaging for pancreas cancer. Pancreas 2004; 28; 273-278 13-John david horwht, Gress GF Defining the diagnostic algorithm in pancreatic cancer J pancreas 2004;5(4);289-303 14-Oberg K 192 chemothérapy in management of neuroendocrin tumors Endocrinol Metabol.Clin.North Am 1993 ;22 ;941-52 15-Shuji isaji yashifumi kawarada shinji uemoto Classification of pancreatic cancer Pancreas 2004;28;231-234 16-société nationale française de gastroentérologie Tumeur endocrine du pancréas www.snfge.org 17-Tumeurs endocrine digestives et pancreatique SNFGE 2001 18-Schema thérapeutiques Thesaurus de bonne pratique 193 LES CYSTADENOCARCINOMES PANCREATIQUES F. Derbel, F. Harrabi, M . Ben Haj Hamida, R. Beyrouti, A. Mahmoudi, A. Mtimet, A. Khenissi, MS. Abdelkéfi, J. Mazhoud, F. Hmila, Y. Dahmane, A. Ben Ali, R. Letaief, RBH Hamida Service de chirurgie générale et digestive Hôpital Sahloul. Sousse Introduction: Les tumeurs kystiques du pancréas représentent environ 5 % des tumeurs du pancréas. Les cystadénomes séreux et mucineux représentent environ 10 % des lésions kystiques pancréatiques. Le problème essentiel est leur caractère potentiellement malin, notamment pour les formes mucineuses. Les cystadénomes séreux sont habituellement bénins bien que des cas de dégénérescence aient été rapportés[1]. Les cystadénocarcinomes pancréatiques sont définis comme des carcinomes développés sur un revêtement épithélial de nature cylindrique, mucosécrétant reposant sur un stroma de type ovarien. Notre étude a comporté 5 cas de cystadénocarcinome pancréatique. Matériel Et Méthodes : Cinq cas de cystadénocarcinomes pancréatiques ont été colligés, parmi 508 observations de tumeurs malignes du pancréas. Il s’agit de 3 femmes et de 2 hommes. L’âge moyen est de 62,4 ans avec des extrêmes de 49 et 77. Resultats : Sur le plan clinique, les symptômes d’appel étaient : Des douleurs abdominales dans 2 cas Un ictère de type rétentionnel associé à un prurit et une altération de l’état général dans 2 cas Une diarrhée liquidienne avec stéatorrhée dans un cas. Sur le plan morphologique : Une échographie et un scanner abdominal ont été réalisés dans tous les cas. Ils ont montré une masse céphalique dans deux cas l’une de 4 et l’autre de 3cm sans métastase hépatique ou d’envahissement vasculaire. Cette masse était associée à une dilatation des voies biliaires. L’aspect de la lésion évoquait une tumeur kystique dégénérée dans un cas. Dans le 3ème cas, il existait une dilatation isolée des voies biliaires sans lésion pancréatique ni duodénale. Dans un cas , la masse était de siège corporéo-caudal de 13 cm de diamètre d’aspect macrokystique évoquant un cystadénome dégénéré avec un envahissement du tronc porte et présence de métastases hépatiques. Pour le 5ème malade, la lésion siégeait au niveau du corps et de la queue du pancréas mesurant 5 cm d’aspect multikystique évoquant une Tumeur intra papillaire et mucineuse du pancréas sans dilatation des voies biliaires ni extension à distance. 194 Les marqueurs tumoraux (ACE et CA19-9) n’ont été réalisés que chez deux malades. Ils étaient normaux dans un cas et élevés à 5000 dans l’autre cas. La biopsie percutanée pré-opératoire, réalisée dans un seul cas chez le patient porteur d’une volumineuse tumeur avec métastase hépatique, a permis de confirmer le diagnostic de cystadénocarcinome. Le diagnostic préopératoire retenu était : Un cystadénocarcinome du pancréas dans 4 cas Une tumeur intra-papillaire et mucineuse ( TIPMP) dans un cas. Seuls 4 patients ont été opérés. Le patient porteur d’une volumineuse lésion corporéale de 13 cm avec métastase hépatique n’a pas été opéré du fait de l’âge avancé et l’extension à distance de la tumeur. Les constations opératoires sont conformes aux données de l’imagerie sauf dans un cas où il a été découvert des métastases hépatiques diffuses sous forme de miliaire qui n’ont pas été vues sur le bilan morphologique pré-opératoire. Les gestes réalisés chez les 4 patients opérés sont : Une duodénopancrétaectomie céphalique dans deux cas. Le rétablissement de la continuité a été une anastomose pancrético-jéjunale dans un cas et pancrético-gastrique dans l’autre. Une splénopancrétatectomie dans un cas Une double dérivation biliaire et digestive sur une anse montée pour la tumeur céphalique avec métastases hépatiques diffuses. L’examen extemporané des métastases hépatiques réalisé dans ce cas avait montré une métastase d’un cystadénocarcinome papillaire. Les suites opératoires des malades réséqués ont été simples dans deux cas et compliquées d’une fistule de l’anastomose pancréatico-jéjunale dans un cas, celle-ci a bien évolué sous sandostatine. L’examen anatomopathologique des pièces de résection a permis de conclure qu’il s’agissait d’un cystadénocarcinome mucineux dans 3 cas. Les suites à distance : Trois malades ont été perdus de vue dès la sortie. Le patient non réséqué qui a eu une double dérivation a été revu 7 mois après l’intervention, il garde un état général moyen. Une patiente ayant eu une DPC a développé 12 mois après l’intervention une carcinose péritonéale. Elle est décédée six mois après le diagnostic de la carcinose. DISCUSSION : A/ Epidémiologie : Les tumeurs kystiques du pancréas sont rares. En 1990, seulement, 400 cas ont été rapportés dans la littérature [2,3]. Les lésions pancréatiques kystiques peuvent être classées en tumeurs bénignes et en tumeurs malignes ou à potentiel malin. Le cystadénocarcinome mucineux est trouvé dans approximativement 1% de tous les carcinomes pancréatiques [1, 4]. Le cystadénome mucineux est classé comme une lésion kystique à potentiel malin. 195 B/Anatomie Pathologique : Les tumeurs kystiques du pancréas comprennent selon la classification de Klöppel : les tumeurs épithéliales avec par ordre de fréquence décroissante les cystadénomes séreux, les cystadénomes mucineux(CM), les cystadénocarcinomes (CK), et les tumeurs intracanalaires et mucineuses (TIPMP), les tumeurs non épithéliales, et les pseudotumeurs. Les tumeurs mucineuses du pancréas (CM, CK et TIPMP) sont les plus fréquentes des tumeurs kystiques pancréatiques et représentent 54 % de la totalité des tumeurs kystiques pancréatiques [4]. On peut observer dans les tumeurs kystiques mucineuses des plages de malignité juxtaposées à des zones bénignes, nécessitant pour être mises en évidence un grand nombre de coupes histologiques (dans 2 cas de Compagno, 47 et 66 coupes ont dû être examinées pour trouver un foyer malin) . La dégénérescence semble survenir de novo au sein d'un kyste, apparemment bénin, après une évolution plus ou moins longue, comme le prouvent certaines observations de kystes traités par marsupialisation ou résection partielle, ayant dégénéré tardivement en cystadénocarcinomes . Les éléments de malignité à rechercher devant une tumeur kystique mucineuse sont : - macroscopiques : en dehors d'une infiltration capsulaire, d'un envahissement de voisinage, ou de métastases évidentes, les cystadénocarcinomes ont souvent l'apparence d'un cystadénome mucineux basal. Il faut noter l'importance du compartiment solide et la présence d'un liquide hémorragique. - histologiques : un épithélium atypique (polymorphisme cellulaire, anomalies cytonucléaires modérées, tendance à former des papilles) doit faire suspecter, pour Compagno, la présence d'un cancer associé. Ainsi, sur 41 tumeurs kystiques mucineuses rapportées, il notait 33 épithéliums atypiques, associés dans 19 cas à un adénocarcinome, et dans beaucoup d'autres cas l'examen histologique avait été considéré comme insuffisant. L'épithélium peut avoir une malignité évidente avec une activité mitotique intense, mitoses anormales et monstruosités cellulaires formant des structures papillaires se développant vers la lumière du kyste et vers le stroma, qui peut être envahi par des structures glandulaires adénocarcinomateuses plus ou moins différenciées. L'envahissement vasculaire et surtout lymphatique est précoce. Pour Compagno, il ne semble donc pas licite de conserver la distinction classique entre cystadénome mucineux et cystadénocarcinome, toutes les tumeurs kystiques mucineuses devant être considérées comme malignes, au moins sur le plan thérapeutique. Les cystadénocarcinomes correspondent habituellement à des adénocarcinomes bien différenciés, à faible grade de malignité, avec une évolutivité lente, locale, l'extension péripancréatique et les métastases étant tardives (ganglions, foie, poumons, os...), contrairement à l'adénocarcinome excrétotubulaire. Cependant, des cas d'évolution rapide sont possibles. Les métastases peuvent être aussi révélatrices de la maladie. De façon générale, l'exérèse chirurgicale curative est souvent possible, même en cas d'envahissement ganglionnaire péripancréatique, avec une survie nettement supérieure à 196 l'adénocarcinome : 68 % à 5 ans pour Hodgkinson. En fonction du grade histologique (classification de Broders ), la survie à 5 ans pour les tumeurs de grade 1 est de 4 % et pour les tumeurs de grade 2 de 24 %. C/Filiation cystadénome-cystadénocarcinome : La filiation cystadénome-cystadénocarcinome du pancréas est établie, néanmoins, il existe des arguments en contradiction de cette filiation. En faveur de cette filiation l’histoire clinique antérieure à la découverte du cystadénocarcinome, l’âge moyen au moment du diagnostic et les constations histologiques. En effet, certains cystadénomes bénins suivis pendant des années traités par dérivation interne se sont transformés en cystadénocarcinome plusieurs années après la dérivation. La série de l’AFC et des séries dans la littérature appuient cette hypothèse de la lente transformation d’un cystadénome mucineux en cystadénocarcinome après plusieurs années d’évolution [4]. Le 2ème argument en faveur de cette filiation est l’âge moyen du diagnostic du CK qui est sensiblement supérieur à celui du CM. Le 3éme argument est la coexistence au sein de la même tumeur d’un revêtement mucineux bénin, de lésions dysplasiques et de carcinome dans 46% des cas. En revanche, trois éléments sont en contradiction avec la filiation. En effet, la différence sensible du sex- ratio, la topographie préférentielle des deux types de tumeur et accessoirement leur taille respective. Malgré ces éléments, la filiation CM –CK est fortement argumentée par la mise en évidence de formes de passage entre les deux tumeurs dans plus de la moitié des cas sur des documents anatompathologiques des résections pancréatiques pour CK. Par conséquent, l’exérèse complète et systématique de toute tumeur kystique mucineuse du pancréas même de taille inférieure à 5 cm ne peut être remise en cause. D/ Circonstances de découverte -L’âge moyen des tumeurs mucineuses est en moyenne de 50 ans (40-60). -Il existe une indiscutable prédominance féminine dans les deux types. La tumeur peut être asymptomatique et de découverte fortuite sur un examen d’imagerie. En effet, dans une série Japonaise, une échographie abdominale a permis de découvrir de façon fortuite une tumeur kystique du pancréas potentiellement maligne chez 5000 malades asymptomatiques. Les tumeurs malignes, telles que les cystadénocarcinomes sont rarement découvertes de façon fortuite. Cependant près de 15% d’entre elles seraient asymptomatiques [2, 3] -Des symptômes sont retrouvés dans 65-75% des cas. Ce sont le plus souvent des douleurs abdominales (pas nécessairement liées à la lésion pancréatique : il s'agit alors de découverte fortuite) qui conduisent à la réalisation d'une échographie qui elle-même met en évidence la lésion du pancréas; il peut s'agir plus rarement de la palpation d'une masse, d'un amaigrissement; -rare est la révélation par une complication : HDH par rupture de VO, compression de la VBP donnant lieu à un ictère (qui fait alors suspecter un C. mucineux ou un cystadénocarcinome). La localisation des tumeurs kystiques est corporéale ou caudale dans 85% des cas. Les tumeurs varient en dimension de 1.5 à 15 centimètre. 197 E/ diagnostic d’imagerie (5,6,7) 1-Cystadénome séreux(CS) En échotomographie, l'aspect est celui d'une masse tumorale souvent échogène, en rapport avec la multiplicité des fines cloisons séparant de nombreux petits kystes plus volumineux, de 5 à 20 mm de diamètre ; des zones anéchogènes à fines parois peuvent être observées en périphérie de la masse ou divergeant d'un centre plus échogène pouvant contenir des calcifications. En TDM, avant injection de produit de contraste, la tumeur est souvent homogène, à l'exception des calcifications centrales, avec une densité supérieure à celle de l'eau, variant de 10 à 40 UH. L'injection de produit de contraste, suivant la technique d'angioscanner, va révéler la structure interne de la tumeur, avec un rehaussement important des fines cloisons séparant les multiples petits kystes et de la zone centrale, alors que le contenu intrakystique reste de densité inchangée, donnant un aspect typique en « nid d'abeilles » parfaitement corrélé à l'aspect macroscopique. Les limites de la tumeur sont également mieux précisées après injection par le rehaussement intense de la paroi de la lésion. La wirsungographie rétrograde montre habituellement une compression extrinsèque du canal de Wirsung. En effet, l'adénome microkystique est une tumeur non communicante, à la différence de certaines formes de tumeurs mucineuses. L' IRM, grâce à la possibilité de coupes dans les trois plans de l'espace et la réalisation d'images rapides en écho de gradient afin d'étudier les rapports vasculaires, semble une bonne méthode d'investigation lors du bilan préopératoire de ces volumineuses lésions . Cependant, aucun travail reposant sur l'étude morphologique n'a permis jusqu'alors de distinguer ces tumeurs des cystadénomes mucineux. 2-Cystadénome Mucineux (CM) Il s’agit d’une tumeur potentiellement maligne (pouvant évoluer vers le cystadénocarcinome) touchant 6 fois plus souvent la femme que l’homme, habituellement entre 40 et 50 ans. La localisation corporéo-caudale est nettement prédominante, puisque retrouvée dans 70 à 90 % des cas. La taille est variable, allant de 1 à 20 cm. Les tumeurs de moins de 3 cm de diamètre sont le plus souvent bénignes, alors que les tumeurs de plus de 8 cm de diamètre sont souvent malignes. D’un point de vue anatomo-radiologique, le cystadénome mucineux est une tumeur macro-kystique qui peut être uni ou multiloculaire. L’échographie montre une lésion anéchogène, liquidienne, uni ou multi-kystique, avec présence de cloisons internes, souvent épaisses et peut parfois montrer l’existence d’excroissances qui naissent de la paroi périphérique du kyste ou de ses cloisons. L’aspect écho-endoscopique est superposable, montrant plus facilement les cloisons, et il est assez caractéristique quand le contenu du ou des kystes est épais ou présente un sédiment déclive. La paroi de la tumeur est parfois épaisse et il existe des calcifications ou des ébauches de calcifications périphériques plutôt arciformes dans 15 % des cas. La tomodensitométrie montre une lésion hypodense bien limitée, habituellement ronde, et met en évidence des calcifications périphériques dans 15 % des cas. En revanche, les cloisons sont le plus souvent invisibles avant l’injection et mal visibles après l’injection. Les végétations endo-kystiques peuvent être facilement mises en évidence par la tomodensitométrie lorsqu’elles sont 198 volumineuses. Le diagnostic différentiel principal par ordre de fréquence est le pseudo-kyste, conduisant en cas d’erreur à la réalisation de dérivations kysto-jéjunales ou de drainages percutanés, ou à une simple surveillance. A l’inverse, un certain nombre de cystadénomes séreux dans une forme macro-kystique peuvent être considérés à tort comme des cystadénomes mucineux, et conduire à des exérèses inutiles. De plus, il existe parfois des remaniements inflammatoires autour des cystadénomes mucineux ce qui peut compliquer encore le diagnostic. C’est la raison pour laquelle l’analyse du liquide ponctionné à l’intérieur de la lésion kystique est utile chaque fois qu’il existe un doute diagnostique, situation assez fréquente en pratique. 3-Cystadénocarcinome(CK) Il s’agit d’une tumeur maligne qui touche aussi souvent l’homme que la femme, ce qui est a priori paradoxal compte tenu du sexe ratio des cystadénomes mucineux bénins. Cette tumeur survient le plus souvent entre 55 et 65 ans et deuxième paradoxe, a une localisation céphalique dans 60 % des cas (alors que les cystadénomes mucineux sont localisés dans la tête du pancréas dans 10 à 30 % des cas selon les séries). De fait, une tumeur macro-kystique d’allure mucineuse touchant la tête du pancréas chez un homme de 65 ans, a une haute probabilité d’être un cystadénocarcinome. Il s’agit d’une tumeur macro-kystique, uni ou multiloculaire, présentant assez souvent des végétations pariétales. La dégénérescence peut être minime, limitée à une petite portion de la paroi de la tumeur kystique ou être évidente avec présence d’une masse tumorale en périphérie du kyste. Le diagnostic est aisé lorsqu’il existe des signes de malignité sous la forme d’une masse tumorale, d’adénopathies d’allure maligne ou d’un envahissement vasculaire ou de métastases hépatiques. En cas de forme macro-kystique, d’allure bénigne, en échographie ou en tomodensitométrie, c’est l’écho-endoscopie qui est la plus performante pour détecter des signes suggérant la malignité, notamment lorsqu’il existe une végétation pariétale envahissant le parenchyme pancréatique adjacent avoisinant. Figure 1 Aspects TDM de cystadénocarcinomes du pancréas 199 Figure 2 Aspect IRM d’un cystadénocarcinome mucineux du pancréas F/ PONCTION DES LÉSIONS KYSTIQUES DU PANCRÉAS Les limites de l’imagerie pour le diagnostic des lésions kystiques du pancréas ont incité à développer d’autres méthodes d’approche diagnostique telle que la ponction du liquide intra-kystique, avec étude des marqueurs biochimiques et tumoraux[6,7]. Ce recueil peut être effectué par voie échographique, par voie scanographique, mais il est apparu que la meilleure technique à proposer était la ponction écho-endoscopiquement guidée. La ponction écho-endoscopiquement guidée a deux avantages importants en pratique par rapport aux ponctions externes : — d’une part, elle a un avantage en terme d’efficacité, puisqu’elle permet d’accéder à des lésions kystiques de très petite taille, de l’ordre du cm (des kystes plus petits peuvent être ponctionnés mais cela a peu d’intérêt, car un minimum de un millilitre de liquide est nécessaire à l’analyse). L’utilisation de l’écho-endoscopie permet de plus un accès plus direct et moins dangereux aux lésions kystiques céphaliques, et caudales — le deuxième avantage consiste à minimiser le risque d’essaimage de cellules tumorales le long du trajet de ponction, notamment en cas de lésion kystique céphalique, puisque le trajet de ponction pourra faire l’objet d’une exérèse lors de la duodénopancréatectomie céphalique s’il s’agit d’une tumeur maligne ou potentiellement maligne. Pour les lésions corporéo-caudales, le trajet de ponction est réduit à quelques mm, ce qui minimise considérablement le risque d’essaimage. A ce jour, aucun essaimage de cellules tumorales n’a été rapporté après ponction écho-endoscopiquement guidée d’une lésion kystique pancréatique. Un certain nombre de dosages peuvent être effectués dans le liquide des lésions kystiques du pancréas. Il s’agit de l’amylase, de la lipase, du dosage de l’antigène carcino-embryonnaire, du CA 19-9, du CA 72-4, des mucines M1 et de manière plus récente, la recherche de la mutation Ki-Ras dans le liquide de ponction. 1- Cystadénome séreux Un ACE inférieur à 5 ng/ml détecte 100 % des cystadénomes séreux. Cependant, la spécificité n’est que de 90 %, et la valeur prédictive positive est de l’ordre 200 de 60 %. Un CA 19-9 inférieur à 150, affirme le diagnostic de cystadénome séreux, mais la sensibilité de ce chiffre n’est que de 60 %. Un ACE supérieur à 5 ng/ml, un CA 19-9 supérieur à 50.000, une amylase supérieure à 5.000 excluent le diagnostic de cystadénome séreux. 2-Tumeur mucineuse (cystadénome mucineux, cystadénocarcinome, TIPMP) Un CA 19-9 supérieur à 50.000 détecte 75 % des tumeurs mucineuses. Un ACE supérieur à 400, un dosage des mucines M1 supérieur à 1.200 et un dosage du CA 72-4 supérieur à 25, affirment le diagnostic de tumeur mucineuse. Un ACE inférieur à 5, et un CA 19-9 inférieur à 150 excluent le diagnostic de tumeur mucineuse. Le diagnostic d’une tumeur kystique du pancréas repose sur l’analyse des données cliniques et d’imagerie aux premiers rangs desquelles l’échographie, la tomodensitométrie, puis lorsque cela est nécessaire, l’écho-endoscopie et la wirsungographie. L’imagerie par résonance magnétique avec notamment la pancréato- IRM peut être utile, mais sa valeur diagnostique n’est pas encore validée. Dans les cas difficiles, et notamment en cas de lésion macro-kystique, ou en cas de lésion de petite taille, une ponction au mieux par voie écho-endoscopiquement guidée avec recueil du liquide pour analyse des marqueurs (amylase, lipase, CA 19-9, ACE, CA 72-4, mucines) et étude cytologique ou histologique du matériel recueilli augmente les chances d’arriver à un diagnostic exact, afin de sélectionner les malades ayant une lésion potentiellement maligne qui doit faire l’objet d’une résection chirurgicale, et éviter aux malades ayant une lésion bénigne sans potentiel évolutif, une sanction chirurgicale particulièrement lourde et mutilante. G/TRAITEMENT DES TUMEURS KYSTIQUES DU PANCREAS : Du fait de la nature maligne ou du potentiel malin des tumeurs kystiques du pancréas, la plupart des auteurs pensent qu’elles devraient être réséquées à l’exception des cystadénomes séreux[. Ces lésions sont considérées comme tumeurs bénignes et ne nécessitent pas de résection chirurgicale sauf si la lésion est symptomatique. Le seul problème de la prise en charge de ces lésions kystiques est qu’il n’existe aucun examen qui peut prédire de la nature histologique de la lésion, et certains auteurs ont proposé la résection de toute lésion kystique du pancréas [6,7,8] Une résection doit théoriquement être proposée en cas de tumeur kystique maligne, potentiellement maligne ou douteuse. La décision est plus difficile en cas de lésion de petite taille inférieure à 2 cm, car le risque de transformation maligne de ces lésions est assez faible. Cette décision doit tenir compte du terrain et de l’état général du patient. Le bénéfice supposé de l’exérèse de la lésion et les risques d’une exérèse pancréatique, même limitée, doivent être mis en balance [9, 10, 11,12,13]. Le type de résection doit tenir compte de la nature de la lésion, sa taille et sa localisation et de l’expertise des chirurgiens. En effet, une tumeur maligne doit être réséquée selon une intervention réglée( duodénopancréatectomie céphalique, pancréatectomie gauche). Une pancrétectomie médiane doit être envisagée en cas de lésion isthmique d’allure bénigne. Une énucléation pancréatique peut également se discuter pour une tumeur d’allure bénigne située suffisament à distance du canal de wirsung( 2-3 mm) et si les rapports avec les vaisseaux péripancréatiques et le duodénum le permettent. CONCLUSION Les tumeurs kystiques du pancréas sont des tumeurs rares mais à potentialité maligne. La connaissance de leur sémiologie clinique, radiologique, échoendoscopique, biochimique doit conduire à proposer à bon escient une intervention chirurgicale dont la morbidité et la 201 mortalité ne sont pas nulles et à ne respecter que les tumeurs asymptomatiques sans aucun risque de dégénérescence. 202 Références : 1-K. Alsaad, R. Chetty Serous cystic neoplasms of the pancreas Current Diagnostic Pathology 2005; 11: 102-9 2-D. Govender Mucinous cystic neoplasms of the pancreas Current Diagnostic Pathology 2005; 11: 110-6 3. Le Borgne J Cystic tumors of the pancreas. Br J Surg 1998; 85: 577-9 4- J Le Borgne, L. De Calan, C. Partensky, P. Moussu et l’AFC Les cystadénocarcinomes pancréatiques sont-ils des cystadénomes mucineux dégénérés Chirurgie 1998 ; 123 : 373-8. 5- L. Palazzo , P. Hammel, CH. Cellier, PH. Ruszniewski Les tumeurs kystiques du pancréas Acta Endoscopica 2000 ;30 6- P. Hammel Intérêt diagnostique de l’analyse du liquide de ponction des lésions kystiques du pancreas: données actuelles, limites et perspectives J Radiol 2000 ; 81 : 487-90 7- LL. Ooi, GH. Ho, SP. Chew, CH. Low, KC. Soo. Cystic tumours of the pancreas: A diagnostic dilemma. Aust N Z J Surg 1998;68:844–6 8- MA. Talamini, R. Moesinger, CJ. Yeo, B. Poulose, RH. Hruban, JL. Cameron, HA. Pitt. Cystadenomas of the pancreas:Is enucleation an adequate operation? Ann Surg 1998;227: 896–903. 9-JM. Kiely, A. Nakeeb, RA.. Komorowski, SD. Wilson, HA. Pitt. Cystic Pancreatic Neoplasms: Enucleate or Resect? J Gastrointest Surg 2003;7:890–7 10- PJ. Allen, DP. Jaques, M. D’Angelica, WB. Bowne, KC. Conlon, MF. Brennan Cystic Lesions of the Pancreas: Selection Criteria for Operative and Nonoperative Management in 209 Patients J Gastrointest Surg 2003;7:970–7 11-SiechM,TrippK, Schmidt-RohlfingB, et al. Cystic tumours of the pancreas: Diagnostic accuracy, pathologic observations and surgical consequences. Langenbecks Arch Surg 1998;383:56–61. 12- L. Hashimoto , RM.Walsh , D. Vogt, JM. Henderson, J. Mayes, R. Hermann Presentation and management of cystic neoplasms of the pancreas. J Gastrointest Surg 1998;2: 504–8. 13- KS. Spinelli, TE. Fromwiller, RA. Daniel et al. Cystic pancreatic neoplasm. Observe or operate Ann Surg 2004; 239: 651-9 203 LES TUMEURS INTRACANALAIRES PAPILLAIRES ET MUCINEUSES DU PANCREAS (TIPMP) S.Boujelben, W.zouari, A.Gharbi, S.Louhichi, N.Affes, A. Ghorbel, R. Mzali, M.I.Beyrouti. Service de chirurgie générale. CHU H. Bourguiba Sfax I- Introduction : Les tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses du pancréas (TIPMP) sont des tumeurs rares , caractérisées par une prolifération adénomateuse intracanalaires pancréatiques d’architecture papillaire sécrétant du mucus et entrainant une dilatation du canal de wirsung et/ou des canaux secondaires. Le pronostic de ces tumeurs est marqué par le risque de transformation maligne. De nombreuses terminologies ont été utilisées pour désigner ces tumeurs endo-canalaires(1): papillomatose, ectasie canalaires mucineuse, mucin-hypersecreting tumor. Depuis 1996, l’organisation mondiale de la santé a regroupé toutes ces nominations sous le terme de tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses du pancréas (in 1). Ce terme a été adopté pour désigner trois variétés de tumeurs : - bénigne : « adénome intracanalaire papillaire et mucineux » - borderline : «adénome intracanalaire papillaire et mucineux avec dysplasie modérée » - maligne : « carcinome intracanalaire papillaire et mucineux » Ces trois variétés peuvent coexister au sein d’une même tumeur. Cette coexistence suggère une filiation entre ces différents aspects que certains ont comparé à la filiation adénomecancer colique ( 2, 3). La fréquence des formes malignes de TIPMP varie de 40 à 50% selon les séries (1, 4). Cette terminologie de TIPMP, regroupant des tumeurs de malignité différente pose en pratique des problèmes diagnostiques et thérapeutiques. II- Epidémiologie : Ces tumeurs représentent 0,5% des tumeurs pancréatiques retrouvées sur des séries autopsiques, 7,5% des tumeurs pancréatiques diagnostiquées cliniquement et 16,3% des tumeurs pancréatiques réséquées (5). Elles sont deux fois plus fréquentes chez l’hommes (1, 5, 6). L’âge moyen de survenue est de 65 ans. La découverte des lésions bénignes se fait à un âge plus jeune que celle des lésions malignes, ce qui est un argument supplémentaire en faveur de la filiation forme bénigneforme maligne. La tête du pancréas et notamment le crochet constituent le siége de prédilection par rapport aux localisations corporéo-caudales. Les formes diffuses sont plus rares (7). III- Classifications : Kuroda (in 7) a classé ces tumeurs en trois sous types : 1- type canal principal (le canal de wirsung est dilaté et est le siége prédominant de la tumeur) 204 2- type branches collatérales (seules les branches collatérales du canal de wirsung sont dilatées, le canal de wirsung est normal) 3- type combiné (la tumeur intéresse à la fois le canal de wirsung et les branches collatérales). Un autre auteur japonais, Furukawa(8), avait proposé une classification en quatre sous types ( schéma 2): 1- dilatation globale du canal de wirsung 2- dilatation localisée du canal de wirsung 3- dilatation kystique des branches collatérales 4- dilatation fusiforme des branches collatérales A B C Schéma 1 : Classification de Kuroda : (A) Type canal principal ; (B) Type branches collatérales ; (C) Type combiné Schéma 2 : Classification de Furukawa 205 IV- Circonstances de découverte : Des poussées de pancréatite aigue récidivante représentent la circonstance de découverte la plus fréquente. Ces poussées attirent l’attention lorsqu’elles persistent sans étiologie connue. Elles sont vraisemblablement secondaires à une obstruction canalaire par le mucus et sont rarement sévères. Les douleurs abdominales sont aussi fréquentes, mais elles ne sont en général pas typiques de douleurs pancréatiques. D’autres signes peuvent s’observer : - Ictère par compression de la voie biliaire principale (presque uniquement dans les formes malignes) - Diarrhée avec stéatorrhée, diabète témoignant d’une obstruction chronique - Exceptionellement, wirsungorragie. Il est à noter qu’un certain nombre de TIPMP est diagnostiqué fortuitement à l’occasion d’une imagerie réalisée pour explorer une autre pathologie. V- Diagnostic : Le diagnostic repose sur les moyens d’imagerie et d’endoscopie 1- Imagerie : L’échographie, la tomodensitométrie et l’IRM abdominales mettent en évidence une ou plusieurs lésions kystiques dans le pancréas. Ces lésions peuvent prendre une disposition en « grappe de raisin» traduisant en réalité une dilatation du canal de wirsung ou des canaux pancréatiques secondaires. L’absence d’obstacle pancréatique ou ampullaire identifiable en aval de la dilatation est évocatrice du diagnostic. Les parois kystiques sont fines, le contenu canalaire est généralement homogène et le parenchyme pancréatique en regard des kystes est atrophique. En pratique, deux signes principaux évoquent le diagnostic : une tumeur kystique et une dilatation canalaire sans obstacle. 2-Endoscopie de la région papillaire : Typiquement, on observe une papille dilatée avec écoulement de mucus. Cet aspect ne s’observe que dans 38 à 55% des cas (1, 9). Cet aspect ne se verrait que dans les formes atteignant le canal pancréatique principal. 3- Cartographie canalaire pancréatique : CPRE- CPRM L’opacification rétrograde du canal de wirsung permet de montrer une dilatation des canaux pancréatiques sans obstacle. Les bouchons de mucus peuvent géner la progression du produit de contraste, voir le stopper. Dans ces cas, la cholangio pancréatographie par résonance magnétique (CPRM) examen non invasif, permet d’avoir une cartographie complète des dilatations canalaires. 4- Echo endoscopie : Elle permet de mettre en évidence une dilatation segmentaire ou diffuse du canal pancréatique principal, de détecter des nodules intracanalaires dans les types canal principal ou de multiples kystes dans les types branches collatérales. 206 Les performances de ces différentes méthodes pour le diagnostic d’une TIPMP sont variables : - L’échographie et le scanner seuls sont souvent insuffisants pour différencier une TIPMP d’une tumeur kystique mucineuse du pancréas, d’une pancréatite chronique obstructive ou même d’un adénocarcinome ductulaire du pancréas. - Une cartographie canalaire réalisée au mieux par une CPRM offre une performance diagnostique élevée. - L’écho endoscopie est devenue de même de plus en plus performante. Aithal et al.(10) ont démontré que l’écho endoscopie avait une sensibilité de 86% , une spécificité de 99%, une valeur prédictive positive de 78%, et une valeur prédictive négative de 99% pour le diagnostic de TIPMP. A B TIPMP type branches collatérales diffuse. (A) TDM; (B) CPRM C Endoscopie papillaire : Béance de la papille avec issue de mucus. VI- Appréciation de la malignité : Après l’étape du diagnostic positif, l’appréciation du caractère bénin ou malin des lésions est un élément essentiel pour la démarche thérapeutique. Cette appréciation repose sur la confrontation des données de la tomodensitométrie, de l’échoendoscopie et de la CPRE (ou de la CPRM). L’efficacité de ces examens a été respectivement de 72, 94 et 83% dans une étude (1) et de 76, 79 et 76% dans une autre étude (12). Les signes évoquant la malignité sont (11) : -Une dilatation du canal de wirsung de plus de 10mm. -Des lésions kystiques supérieures à 40mm de diamètre. -Présence de nodules intramuraux de plus de 10mm de diamètre. Par ailleurs, les formes symptomatiques, le type canal principal, les sténoses de la voie biliaire principale et du canal de wirsung sont autant des critères prédictifs de malignité. D’autres explorations ont été utilisées pour le diagnostic de malignité mais leur intérêt n’est actuellement pas encore validé vu les discordances des résultats publiés. Il s’agit : - De ponctions guidées des nodules muraux sous échoendoscopie. - De l’analyse cytologique du suc pancréatique. - Du dosage des marqueurs tumoraux (ACE, CA19-9) dans le suc pancréatique. - De la wirsungoscopie. Son intérêt semble évident bien que la présence de mucus dans le canal pancréatique principal soit un facteur limitant important. Elle permet, par des biopsies étagées, de délimiter les lésions dégénérées sur un canal de wirsung dilaté dans sa totalité. 207 - De l’échographie endocanalaire couplée à la wirsungoscopie permet d’augmenter la précision diagnostique pour différencier les lésions néoplasiques des lésions non néoplasiques, et des lésions invasives des lésions non invasives. En cas de suspicion de malignité, l’autre souci est de savoir si les lésions sont invasives ou si elles sont encore limitées à l’épithélium canalaire. La mise en évidence de lésions envahissant le parenchyme pancréatique et/ou d’atteinte extra pancréatique (adénopathies, organes de voisinage) témoigne d’un diagnostic tardif au stade de carcinome invasif. VII- Extension des lésions : L’extension des lésions pose un problème difficile et cependant crucial car son évaluation joue un rôle important dans la prévision de l’étendue de l’exérèse chirurgicale. La confrontation des données du scanner, de l’échoendoscopie et de la CPRE permet une évaluation plus précise de l’étendue des lésions. Les lésions de l’épithélium canalaire sont observées dans les zones de dilatation canalaire segmentaire et au voisinage des nodules muraux. Cependant, la sous évaluation peut aller jusqu’à 25% (1). En cas de dilatation globale du canal principal, l’extension des lésions est la plus difficile à juger. Du fait de l’hypersécrétion de mucus, la dilatation canalaire peut se produire en amont et en aval de la tumeur, rendant difficile l’identification précise de son siége. La wirsungoscopie pourrait être utile quand le mucus est présent en grande quantité. Mais elle reste à évaluer. Il semble que les lésions tumorales soient dans la majorité des cas segmentaires et continues (1). Ce qui permet de considérer une exérèse suffisante en absence d’envahissement de la tranche de section pancréatique. Bien que cela ne peut être affirmé en l’absence d’étude histologique complète du pancréas. A coté de l’extension intracanalaire, le bilan préopératoire, doit rechercher, en cas de TIPMP maligne, uneinvasion du parenchyme pancréatique. La démarche thérapeutique est alors comparable à celle des adénocarcinomes pancréatiques communs. Au total devant une TIPMP, le bilan clinique et les différentes explorations doivent répondre à trois questions : - Existe-t-il des critères prédictifs de malignité ? - Quelle est l’étendue réelle des lésions ? - En cas de malignité confirmée, s’agit-il d’un carcinome in situ ou invasif ? VIII- Traitement : Compte tenu des difficultés du diagnostic de malignité des TIPMP, de la fréquence élevée des cancers et du caractère imprévisible de l’évolution, le traitement des TIPMP doit être chirurgical, sauf contre indication liée à l’âge ou au terrain (1,4). La planification du traitement chirurgical dépend de l’orientation pré et per opératoire en faveur de la bénignité ou malignité des lésions. Les TIPMP dont la malignité a été prouvée (biopsies pré ou per opératoires) ou ayant des facteurs prédictifs de malignité doivent être traitées de la même manière que les adénocarcinomes pancréatiques à partir du moment où elles ont envahie le parenchyme pancréatique. En absence d’envahissement du parenchyme pancréatique, une résection pancréatique avec un curage limité aux ganglions péri pancréatiques est suffisante. 208 En absence de preuve histologique pré opératoire de malignité, et pour les lésions qui paraissent limitées aux canaux pancréatiques, situation la plus fréquente, la démarche dépend du type de TIPMP : - Type branches collatérales ; L’existence de symptômes, de nodules muraux suggérant la malignité impose une résection complète des lésions. Lorsque les lésions sont segmentaires, toutes les variantes de résection pancréatiques partielles sont possibles (duodénopancréatectomie céphalique, pancréatectomie gauche, pancréatectomie centrale). En cas de tumeur asymptomatique sans nodules muraux, une attitude abstentionniste avec surveillance rapprochée tout les trois mois (échographie, scanner, CPRE) peut être prônée (1). Cependant, chez ces malades aucun examen ne pourra éliminer formellement un carcinome in situ ou un carcinome micro invasif. De ce fait certains auteurs, comme Maguchi et al. (in 5) avaient recommandé la résection pour des tumeurs suspectes: taille > 25mm, nodules muraux > 6mm de diamètre et/ou dilatation du canal pancréatique > 7 mm de diamètre. Lorsque les lésions sont diffuses à toute la glande avec un potentiel malin limité, un canal de wirsung normal, chez des malades asymptomatiques, une surveillance pourrait être proposée. En effet, si un traitement devra être entrepris, il ne peut s’agir que d’une pancréatectomie totale. - Type canal principal ou combiné ; La malignité est fortement suspecte. L’indication d’une résection chirurgicale est alors formelle. L’étendue de la résection pancréatique doit tenir compte des données de l’échographie per opératoire, de la wirsungoscopie pré ou per opératoire et de l’examen extemporané de la tranche de section pancréatique. Une pancréatectomie totale peut être parfois nécessaire, mais sa réalisation doit toujours tenir compte de ses conséquences sévères à savoir l’insuffisance pancréatique exocrine et endocrine. Sachant que les TIPMP affectent souvent des sujets âgés et que leur croissance est souvent lente, la réalisation d’une telle résection doit être mise en balance avec les risques postopératoires. IX- Pronostic : Le pronostic des TIPMP tout stade confondu est globalement meilleur que celui de l’adénocarcinome pancréatique dans sa forme commune. La survie sans récidive des TIPMP avec lésions de dysplasie de haut grade est comprise, après résection complète, entre 85 et 100% (12,13). Les quelques cas de récidives rapportées seraient en rapport avec la possibilité d’une micro invasion de la tranche de section pancréatique non détectée par l’examen extemporané. Après résection d’une forme carcinomateuse invasive de TIPMP, Kimura et al. (13) rapportent une survie de 74% à 5 ans (nettement supérieure à celle de l’adénocarcinome pancréatique commun). Dans ces cas le pronostic dépend essentiellement de l’envahissement ganglionnaire. Assurer un bon pronostic d’une TIPMP, réside donc plus dans la prévention du carcinome invasif, par un diagnostic précoce suivi d’une chirurgie emportant la totalité des lésions dysplasiques non encore invasives. 209 X- Conclusion : Connaissant leur excellent pronostic le diagnostic de TIPMP doit être porter au stade de dysplasie. L’association d’une tomodensitométrie, d’une échoendoscopie et d’une cartographie canalaire pancréatique (CPRE ou CPRM) est souvent suffisante pour porter le diagnostic. En absence d’examen pouvant écarter formellement un cancer in situ, l’exérèse pancréatique doit être indiquée sans délai chaque fois qu’elle peut se faire avec un risque opératoire mesuré. L’échographie, la wirsungoscopie per opératoire et l’examen extemporané de la tranche de section pancréatique doivent aider à réaliser une exérèse radicale des lésions. 210 Références : 1- Barbe l , Ponsot ph, Vilgrain v et al. Tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses pancréatiques. Gastoenterol Clin Biol, 1997 ; 21 : 278-86 2- Payant MJ,Xerri L,Moncada K and al.Villous adenoma of main pancreatic duct : a potentially malignant tumor ? Am J Gastroenterol 1990; 85: 459-63 3- Halphen M, Hoang C, Hautefeuille P et al. 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