Explication de texte Bachelard

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Explication de texte Bachelard
Charlène Lozano
TS1
« La science, dans son besoin d'achèvement comme dans son principe, s'oppose
absolument à l'opinion. S'il lui arrive, sur un point particulier, de légitimer l'opinion,
c'est pour d'autres raisons que celles qui fondent l'opinion ; de sorte que l'opinion a, en
droit, toujours tort. L'opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins
en connaissances. En désignant les objets par leur utilité, elle s'interdit de les
connaître. On ne peut rien fonder sur l'opinion : il faut d'abord la détruire. Elle est le
premier obstacle à surmonter. Il ne suffirait pas, par exemple, de la rectifier sur des
points particuliers, en maintenant, comme une sorte de morale provisoire, une
connaissance vulgaire provisoire. L'esprit scientifique nous interdit d'avoir une
opinion sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous ne
savons pas formuler clairement. Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et
quoi qu'on dise, dans la vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes.
C'est précisément ce sens du problème qui donne la marque du véritable esprit
scientifique. Pour un esprit scientifique, toute connaissance est une réponse à une
question. S'il n'y a pas eu de question, il ne peut y avoir connaissance scientifique.
Rien ne va de soi. Rien n'est donné. Tout est construit. »
Gaston Bachelard, La formation de l’esprit scientifique.
Explication de texte.
Par définition, la science s’oppose à l’opinion. En effet, cette dernière
constitue un jugement sans fondement rigoureux et est souvent dénoncée dans
la mesure où le jugement se donne de façon abusive sur les apparences d’un
savoir ; alors que pour les Grecs, la science représente une connaissance à la
fois éminente, universelle et théorique : la philosophie est cette science
suprême. À quoi reconnaît-on qu’une connaissance est scientifique ? Comment
assurer la véracité d’un savoir scientifique s’il a toujours la possibilité d’être
réfutée ? Dans ce texte, Bachelard remet en cause l’opinion mais pas la vérité
scientifique. Pour lui, la science ne peut être que vraie puisque la science nait
de faits observés, sur des questions, sur des problèmes basés sur des
observations. Or contrairement à l’opinion qui s’appuie sur des idées
subjectives, la science a pour vocation de donner une solution à ces problèmes,
elle s’appuie sur des expériences qui sont prouvées grâce à la connaissance, à
la véracité d’autres faits observés.
Pourquoi donc remettre en cause l’opinion qui par nature s’oppose à la science
alors que la science a pour vocation de dire la vérité? La science n’est-elle pas
indépendante à l’opinion ? Dans ce cas pourquoi avoir peur de l’influence de
l’opinion sur la science ?
La construction du texte est relativement claire et s’ordonne autour de
trois grands axes. Le premier axe qui annonce l’idée directrice du texte («La
science… de les connaître »). Dans ce premier axe, Bachelard affirme que la
science s’oppose à l’opinion et que celle-ci ne fait que rester dans le superficiel
sans s’appuyer sur des faits concrets. La science ne s’appuie que sur des faits
légitimés, cette thèse sera reprise en conclusion. Puis dans la deuxième étape
du raisonnement («On ne peut rien fonder… d’eux-mêmes »), l’auteur dénonce
les erreurs que peut poser l’opinion sur la science. Puis il explique la théorie
même de la science qui s’appuie sur la naissance de problèmes observés qui
seront démontrés. Enfin dans sa troisième partie («C’est précisément… tout est
construit ») l’auteur vient prouver sa thèse : la science a une vocation : dire la
vérité à travers la connaissance des problèmes posés qui ont été démontrés.
Dans un premier moment («La science… de les connaître »), Bachelard
avance trois thèses fondamentales qui sont justifiées et expliquées dans la suite
du texte. Si la science légitime l’opinion dans certains cas, c’est pour des
raisons particulières que celles qui fondent l’opinion puisque celle-ci a pour
vocation d’être fausse.
La première thèse de Bachelard est très directe. Pour lui la science
s’oppose complètement à l’opinion et fait preuve de raison «la science, dans
son besoin d’achèvement comme dans son principe s’oppose absolument à la
science ». Cette première phrase du texte est mise en avant par l’utilisation de
l’adverbe «absolument » comme si pour Bachelard c’était impossible de
concevoir les faits scientifiques sur des opinions. Comment donc faire pour
distinguer la science de l’opinion ?
Tout d’abord, l’opinion n’est que mensongère et trompeuse. Bachelard
met en avant le fait que la science est là pour prouver des choses vraies et que
l’opinion ne cesse de l’empêcher d’atteindre son but, dans son besoin
d’achever ce qui est commencé. L’opinion «a en droit toujours tort », ce qui
voudrait dire que l’opinion ne fait que nous induire en erreur et nous mène sur
le mauvais chemin, on ne suit plus les normes. Or la science est une norme
universelle puisqu’elle est la même pour tous, n’importe notre provenance, nos
idéaux… Si l’opinion a toujours tort en droit, cela veut dire que pour
Bachelard, n’importe d’où provienne l’opinion et sur quel sujet elle porte, elle
a toujours tort.
D’où une deuxième conséquence, si l’opinion ne s’appuie pas sur des normes
elle est par conséquent subjective et propre de l’homme. Elle empêche donc la
science d’avancer puisqu’il n’y a pas de vérité objective. La science cherche à
prouver une réalité universelle et donc une vérité universelle. C’est en cela que
l’opinion s’oppose à la science.
La seconde thèse de Bachelard renforce la première en insistant sur le
fait que l’opinion ne pense pas, elle ne se fonde par sur des faits démontrés.
Non seulement l’opinion est erronée mais elle ne sait penser, elle ne possède
pas de fondement et limite la capacité de l’homme à découvrir son
environnement «elle s’interdit de les connaître ». Dire que l’opinion ne pense
pas constitue un défis puisque si l’opinion ne pense pas cela veut dire qu’elle
ne s’appuie par sur des faits concrets et donc par définition ne peut s’opposer à
la science qui elle fait preuve de raison. «L’opinion pense mal ; elle ne pense
pas » en mettant en avant la démarche que l’opinion pense mal voire qu’elle ne
pense pas soulève l’aspect subjectif de la pensée. La pensée est propre est
l’homme, et témoigne de notre personne. L’action de penser fait référence au
fait de croire, d’avoir l’idée de quelque chose, or croire s’oppose au savoir
puisque la croyance n’est pas démontrée, elle ne fait preuve que d’hypothèses
jamais confirmées. L’opinion interprète, elle croie détenir la vérité, posséder
des connaissances mais en réalité elle ne fait que détenir des perceptions ou les
transformer en une autre utilité «elle traduit des besoins en connaissances ».
Par ailleurs, l’opinion ne cherche pas à connaître son intériorité mais ne reste
que dans le superficiel contrairement à la science qui cherche à comprendre le
plus petit détail «elle s’interdit de les connaître ».
Garantir que l’opinion ne pense pas veut dire que l’opinion
contrairement à la science ne s’appuie pas sur des faits démontrés mais sur une
réalité subjective. L’opinion reste toujours superficielle, elle ne cherche qu’à
satisfaire ses besoins en s’évitant d’aller plus loin. Elle se pose elle même des
obstacles pour son développement en évitant d’aller au-delà des pensées.
Dans cette première partie du texte, Bachelard allègue le fait que
l’opinion a pour vocation de s’opposer à la science et qu’elle ne fait que
provoquer des illusions et n’affirme pas la réalité. Il s’agit désormais d’en
expliquer la raison et comment la science fait pour ignorer l’opinion.
En un deuxième temps de son raisonnement («On ne peut rien fonder…
ne se posent pas d’eux-mêmes»). Dans cette partie Bachelard met en avance le
processus de naissance d’un problème et dont la science à pour vocation d’y
résoudre. Il justifie le fait que l’opinion est un obstacle contre la science. Pour
cela il va dans une première partie procéder à anéantir l’opinion puis dans une
deuxième partie il va expliquer la naissance du raisonnement scientifique qui
fait preuve de raison. Comment donc éliminer l’opinion et laisser place au
problème scientifique ?
Il part tout d’abord d’un constat. Alors que l’opinion guide la pensée
humaine, il faut la détruire d’après Bachelard puisque si on arrive à l’accepter
de manière momentanée elle ne fait que nous tromper et ne nous permet pas
faire preuve de raison. Puis en un deuxième temps il va exposer le fait que la
science nait de problèmes. En effet celle-ci consiste a observer des faits qui
sont différents des faits observés au préalable, puis elle émet des hypothèse sur
ses nouvelles observations. Enfin il s’agit de prouver la véracité de cette
hypothèse puisqu’une hypothèse sans preuve ne vaut rien. Mais comment
éliminer l’opinion si elle est propre à l’homme ? Comment fonder l’esprit
scientifique sans l’opinion alors que celle-ci guide les faits ?
Tout d’abord, pour être objective la science doit se débarrasser de
l’opinion «on ne peut rien fonder sur l’opinion : il faut d’abord la détruire ». En
effet l’opinion est considérée comme douteuse, illusoire ou fausse voire
dangereuse lorsqu’elle cherche à s’imposer en dissimulant la faiblesse de ses
fondements sous les apparences de la plus claire certitude. La science possède
de nombreux obstacles mais le premier d’entre eux est de surmonter l’opinion.
Par cela on entend que l’opinion est un obstacle épistémologique qui empêche
la connaissance scientifique de se constituer. Il ne s’agit pas de laisser la
s’infiltrer dans la pensée ou de croire posséder une connaissance qui n’est pas
vraie «il ne suffirait pas, par exemple, de la rectifier sur des points particuliers,
en maintenant, comme une sorte de morale provisoire, une connaissance
vulgaire provisoire ». En disant que l’opinion constitue une connaissance
vulgaire provisoire, Bachelard déplie le fait que le savoir n’est que superficiel,
que ce n’est pas le fait de savoir mais croire que l’on sait alors que l’on ne sait
pas. L’opinion nous donne donc une mauvaise définition du savoir. Le savoir a
été prouvé, démontré, par des faits réels contrairement au fait de croire qui
dépend de notre opinion, de nos perceptions, qui n’est pas prouvé. Croire nous
donne une fausse approche de la réalité puisque l’on croit détenir la vérité mais
ce n’est qu’une illusion. Il est donc nécessaire de se débarrasser de l’opinion «il
faut d’abord la détruire » sans quoi tout le reste du raisonnement scientifique
est faux puisqu’il ne fait pas appel au savoir mais à la croyance.
Si nous donnons sens à notre opinion, c’est notre opinion qui aurait
toujours raison. Or la raison est prouvée sur la connaissance scientifique.
«L’esprit scientifique nous interdit d’avoir une opinion sur des questions que
nous ne comprenons pas », la science est cette science qui a pour finalité
d’expliquer ce qui est inconnu, d’en donner des preuves, de le prouver à travers
les démonstrations. La naissance de la science prend place avec la naissance de
problèmes, de doutes «avant tout il faut savoir poser des problèmes ».
L’apparition même du problème fait que la science existe. Ce qu’il faut savoir
c’est savoir comment découvrir les problèmes, les problèmes sont des points
sur lesquels on s'interroge, ce sont des questions qui prêtent à discussion, qui
font l'objet d'argumentations, de théories diverses, en particulier dans le
domaine de la connaissance. Or pour résoudre des problèmes il faut savoir les
poser et pour poser des problèmes il faut savoir qu’il y a un problème, un
obstacle «les problèmes ne se posent pas d’eux-mêmes ».
Suppression de l’opinion, laisser place à la raison savoir formuler des
problèmes scientifiques sont des bases pour la science. La raison doit dépasser
l’opinion et doit permettre de pouvoir discerner le problème scientifique. Le
problème scientifique ne se pose que de faits réels, observés, prouvés ; c’est ce
qui est sa base et le problème posé, son origine.
Le dernier temps du texte introduit pas la locution « c’est » («c’est
précisément… tout est construit ») vient confirmer la thèse posée au début du
texte. L’auteur explique le fondement de l’esprit scientifique et son évolution
pour arriver à trouver une solution, une explication. Pour Bachelard tout
s’explique à travers la science, tout problème a une réponse raisonnée. Pour
cela, il va tout d’abord mettre en avant le fait que le problème est la raison pour
que la science existe puis dans un deuxième temps il va expliquer comment le
raisonnement scientifique procède. Comment donc concilier problème et
solution ?
En premier lieu, Bachelard justifie le fait que le problème soulevé soit la
naissance du raisonnement scientifique. En effet, sans problème il n’y a pas de
raisonnement scientifique et donc pas de science. Or la science existe pour
expliquer tout ce qui n’est pas à notre à notre portée. Sans la science nous ne
pourrions rien expliquer, ce ne serait que des suppositions, des idées
subjectives qui fondent l’opinion. La science d’après Bachelard donne une
explication à notre vie, sans laquelle nous serions comparable à des animaux :
nous ne saurions pas, la vie ne serait qu’un bon moment passé. «C’est
précisément ce sens su problème », le mot problème est mis en valeur car c’est
grâce à lui que la science nait, qu’elle peut se développer, avancer. Sans
problème il n’y a pas de science, sans science il n’y a pas de raisonnement
scientifique, sans raisonnement scientifique il y a que l’opinion. Le problème
est donc la substance même de la science.
Par ailleurs, Bachelard explique que le problème scientifique n’est pas
une spontanéité et qu’il possède un fondement. L’esprit scientifique possède
toujours une réponse. Cependant contrairement à l’opinion, cette réponse est
construite, prouvée, démontrée d’où le véritable enjeu de la science. La
démonstration est cette science qui a une validité universelle, seul l’esprit
humain est capable d’un tel exploit : établir la validité universelle d’une
proposition, en quoi consiste sa vérité. «Rien ne va de soi. Rien n’est donné.
Tout est construit », Bachelard donne l’explication raisonnée du fait que
l’opinion soit un ennemi pour la science. La science qui est basée sur la
démonstration détient une validité universelle alors que l’opinion ne représente
que le regard subjectif d’une ou de plusieurs personnes. L’auteur met en valeur
la science qui fait preuve de la raison, unique à l’homme, alors que l’opinion
nous en éloigne. Dans cette optique, l’opinion ne représente qu’une illusion de
posséder la vérité. Dans ce cas, on entend par vérité le caractère des jugements
capables de fonder un accord universel entre les esprits.
Dans ce texte, Bachelard nous propose une définition de vérité, qui est
le caractère des jugements capables de fonder un accord universel entre les
esprits. Le mot vérité est synonyme, dans ce cas d’objectivité. L’objectivité en
science passe par la rigueur, l’impartialité, l’honnêteté. La science d’après
Bachelard est donc cette vérité qui est universelle et propre de l’homme. La
science est là pour répondre à des problèmes, la science fait preuve de raison.
Or la raison d’après Descartes est cette faculté de distinguer le vrai du faux. La
méthode rationnelle sera dans ces conditions constituée par un ensemble de
règles, dont l’application conduit, avec certitude au résultat.
Quels enseignements peut-on tirer en définitive de ce texte ? Nous nous
étions demandés pourquoi l’opinion était remise en question alors qu’elle avait
pour vocation d’être fausse. À travers le déroulement du texte, Bachelard nous
explique pourquoi l’opinion constitue tellement un ennemi pour la science. En
effet, celle ci ne fait pas preuve de raison, elle est subjective et ne se base pas
sur la démonstration qui est la base de la science. Dans cette optique, la science
est donc un mouvement dialectique de la raison aux faits, de l’expérience à la
théorie et c’est de ce mouvement que proviennent les progrès de la science. La
science a pour vocation d’être vraie et sa mission est de trouver la réalité même
si cela peut mettre un certain temps. À travers ce texte, l’auteur nous donne
concrètement son point de vue, son jugement. Pour lui l’opinion n’est que
trompeuse et nous mène sur le mauvais chemin, il ne faudrait pas qu’elle
existe. Alors que la science représente cette sagesse, celui qui travaille la
science, la recherche, est un sage. Dans ce cas la sagesse est cette faculté de
pouvoir discerner avec la raison, faire preuve de raison, de discernement. Par
ailleurs, l’auteur fait appel à la théorie cartésienne qui est fondée sur la raison.
Or si elle est fondée sur la raison, cela veut dire que c’est un principe
d’explication de cause. Ce texte nous donne une vision objective de la science
et qui a pour vocation d’être vraie. Cela ne veut pas forcément dire qu’elle
détient toute la vérité mais qu’elle s’efforce pour pouvoir la trouver.

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