Sclérose en plaques
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Sclérose en plaques
PARCOURS DE SOINS DR Dossier coordonné par Brigitte Némirovsky Conseillère scientifique Pr Catherine Lubetzki ([email protected]) Département des maladies du système nerveux Groupe hospitalier La Pitié-Salpêtrière, Paris Sclérose en plaques Adapter le parcours de soins à l’hétérogénéité des chemins 1 étape étape 000. Diagnostic précoce : l’IRM, examen clé. Dr Anne-Caroline Papeix 000. Comment annoncer la maladie. Pr Thibault Moreau étape cliniques 3 2 000. Le médecin du travail face au risque de désinsertion professionnelle. Pr Sophie Fantoni-Quentin 000. Choix des traitements spécifiques : décision complexe, souvent collégiale. Pr Bruno Stankoff 000. Rééducation et réadaptation : maintenir qualité de vie et vie sociale. Dr Michèle Mane, Dr Lucie Gagneur, 000. Prendre en charge les symptômes dès le début de la maladie. Dr Hélène Zéphir 000. Éducation thérapeutique : « mieux vivre avec la maladie ». Marie-Hélène Colpaert tome 137 | n° 3 | mars 2015 Pr Philippe Thoumie { 000. Troubles cognitifs : possibles dès les stades initiaux. Pr Bruno Brochet, Dr Aurélie Ruet 000. Accompagnement psycho-médico-social : l’indispensable trait d’union. Entretien avec Laetitia Capelli 000. Répondre à la forte demande d’autonomisation des patients. Entretien avec Bernard Gentric 000. Bilan de la maladie: évolutivité, handicap, facteurs du pronostic. Pr Jean Pelletier 000. Troubles vésico-sphinctériens : importante de l’évaluation de première ligne. Pr Gérard Amarenco 000. Nouveaux traitements de fond : impact sur l’organisation des soins. Dr Élisabeth Maillart 000. Dix-sept réseaux, un objectif majeur : l’approche globale de la maladie. Dr Véronique de Burghgraeve 000. Une clinique rennaise spécialisée, inspirée du modèle canadien. Pr Gilles Edan, Dr Emmanuelle Le Page 000. Le design du parcours de soins reste imposé par l’évolutivité de la maladie. Entretien avec le Pr Michel Clanet LE CONCOURS MéDICAL | 1 { PARCOURS DE SOINS étape 1 Sclérose en plaques Diagnostic précoce : l’IRM, examen clé Dr Anne-Caroline Papeix ([email protected]), département des maladies du système nerveux, groupe hospitalier La Pitié-Salpêtrière, Paris La sclérose en plaques (SEP) est la deuxième cause de handicap acquis de l’adulte jeune. Les avancées récentes de la recherche médicale ont considérablement modifié sa prise en charge. Ainsi, les progrès de l’imagerie permettent désormais un diagnostic dès les stades précoces de la maladie, et les grandes avancées ces dernières années dans le domaine de la recherche en immunologie ont permis la mise au point de plusieurs traitements efficaces pour la prévention des rechutes de la maladie dès ses premières manifestations. Cependant, le bénéfice de ces traitements reste modeste sur le handicap à long terme, et une prise en charge multidisciplinaire reste indispensable. L es premières manifestations de la maladie ne sont pas toujours évidentes à reconnaître. La grande diversité des symptômes puis leur disparition spontanée en quelques jours rendent leur identification souvent difficile. Les premiers symptômes : souvent difficiles à identifier Les premiers symptômes peuvent être très gênants ou à l’inverse discrets, n’incitant pas toujours à consulter un médecin. Il n’est pas rare non plus qu’ils soient interprétés à tort comme des manifestations non neurologiques. Des fuites urinaires sont ainsi bien souvent mises sur le compte de précédentes grossesses, et des vertiges sur un dysfonctionnement de l’oreille interne alors que ces signes peuvent être une des premières manifestations de la maladie. Si les premiers symptômes de la SEP sont parfois discrets et transitoires n’incitant pas toujours de ce fait à consulter un médecin, dans certains cas, ils Symptômes les plus fréquents de la sclérose en plaques • Flou visuel d’un œil • Fourmillements d’un membre • Lourdeur d’un membre • Troubles de l’équilibre • Boiterie • Vertiges • Surdité 2 | LE CONCOURS MéDICAL • Besoins urgents d’uriner • Différents symptômes peuvent être associés. Il peut également s’y associer une fatigue inhabituelle ou des troubles de la concentration peuvent d’emblée être très gênants et associés à une fatigue inhabituelle ou à des troubles de concentration. Ainsi, une baisse d’acuité visuelle douloureuse, des troubles sensitivomoteurs des quatre membres, des difficultés de marche et de l’équilibre peuvent inaugurer la maladie. Une diplopie ou une paralysie faciale s’observent plus rarement (encadré). Ces premiers symptômes s’installent en quelques jours, et peuvent disparaître spontanément ou après des perfusions de corticoïdes ; c’est le cas des formes évoluant par poussées. Dans les formes évoluant sur un mode progressif, les symptômes s’installent de façon plus insidieuse et s’aggravent lentement de façon irréversible. Une grande variabilité individuelle et interindividuelle La SEP est une maladie neurologique chronique multifocale. Ses signes sont très variés chez un même individu et très variables d’un sujet à l’autre. Cette diversité de symptômes s’explique par la dissémination des plaques de démyélinisation qui sont distribuées au hasard de l’inflammation. Les plaques peuvent ainsi être localisées au niveau du nerf optique, de l’encéphale, de la moelle épinière et du cervelet. Une névrite optique se manifeste généralement par un flou visuel ou une tache opaque au centre du champ de vision associé souvent à une douleur localisée autour de l’œil, et dont l’intensité augmente lors des mouvements de l’œil. D’autres manifestations visuelles sont possibles, comme une diplopie en rapport avec une paralysie de la sixième paire crânienne. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques Des paresthésies des membres, du torse ou de la face, un fauchage ou un steppage limitant le périmètre de marche, durant quelques jours ou quelques semaines, orientent vers une atteinte des voies sensitivomotrices sur leur trajet médullaire ou cérébrale. Le signe de Lhermitte (sensation de décharge électrique dans les membres à la flexion du cou) est le plus souvent le signe d’une myélite cervicale. Des réflexes vifs, diffusés, polycinétiques, un signe de Babinski, une abolition des réflexes cutanés abdominaux sont les signes d’examens témoins d’une irritation pyramidale, spécifique d’une atteinte du système nerveux central. Une marche instable, avec des embardées, avec élargissement du polygone de sustentation, des gestes maladroits imprécis, une écriture brouillonne sont les témoins d’une plaque sur les voies cérébelleuses. Le besoin impérieux d’uriner est un des premiers symptômes fréquents de la maladie. Il s’associe à des envies d’uriner répétées suivies d’émission de petite quantité d’urine. À l’inverse, une dysu- 1 2 3 rie peut être observée, nécessitant une pression pelvienne manuelle pour chaque miction. Ces symptômes très fréquents sont le signe d’une dyssynergie vésico-sphinctérienne secondaire à une plaque médullaire. Le diagnostic repose sur un faisceau d’arguments Dans les formes évoluant par poussées, ces symptômes et signes cliniques s’installent généralement en quelques jours pour être au maximum en deux à trois semaines, puis s’atténuent en quatre à six semaines. Dans 40 % des cas, des séquelles plus ou moins invalidantes persistent. La réalisation de perfusion de méthylprednisolone en intraveineux au rythme d’une perfusion de 1 g trois à cinq jours de suite accélère le délai de récupération sans pour autant modifier le pronostic à moyen terme. IRM cérébrale en coupe axiale (Séquence FLAIR - séquence T1 après injection de gadolinium) tome 137 | n° 3 | mars 2015 LE CONCOURS MéDICAL | 3 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques En cas de suspicion, comment aller vers la confirmation du diagnostic ? Si l’identification de l’origine neurologique de ces symptômes constitue une première étape indispensable pour établir le diagnostic, la réalisation d’examens d’imagerie et de tests biologiques est une deuxième étape nécessaire pour avancer vers un diagnostic plus précis. L’IRM permet de visualiser les lésions responsables des symptômes. Leur taille, leur localisation, l’intensité de leur signal renseignent sur leur nature. Dans la SEP, l’IRM révèle sur les séquences pondérées en T2 des hypersignaux de forme ovoïde, de taille supérieure à 3 mm, disséminés dans la substance blanche (illustration p. X). Au niveau encéphalique, leur disposition est le plus souvent perpendiculaire à l’axe des ventricules. Au niveau médullaire, les hypersignaux sont surtout observés à l’étage cervico-dorsal et le plus souvent de localisation postérieure. Sur les séquences pondérées en T1, les plaques les plus Tableau 1. Diagnostic de SEP selon les critères de McDonald(2) révisés (2010) Dissémination spatiale Dissémination temporelle ≥ une lésion T2 dans au moins deux des quatre territoires du système nerveux central considérés comme caractéristiques de SEP • juxta-cortical • périventriculaire • sous-tentoriel • médullaire* Une nouvelle lésion T2 et/ou une lésion prenant le gadolinium sur une IRM de suivi quel que soit le moment de l’IRM initiale La présence simultanée de lésions asymptomatiques rehaussées ou non par le gadolinium à n’importe quel moment *En cas de syndrome médullaire ou du tronc cérébral, les lésions symptomatiques sont exclues des critères diagnostiques et ne participent pas au compte des lésions. Tableau 2. Immunomodulateurs et premier événement neurologique Présentation clinique du SCI Traitement CHAMPS5 Avonex 30 µg/semaine Mono-symptomatique 2 HS T2 (dont 1 ovalaire ou périventriculaire) 44 % ETOMS4 Rebif 22 µg/semaine Mono- (39 %) et polysymptomatiques 4 HS T2 35 % BENEFIT3 Bêtaféron 8 MUI/2 jours Mono- (53 %) et polysymptomatiques 2 HS T2 (> 3 mm) 50 % PRECISE6 Copaxone 20 mg/j Monosymptomatique 2HS T2 (> 6 mm) 45 % TOPIC7 Tériflunomide 14 mg/j Mono- et polysymptomatiques 2 HS T2 (> 3 mm) 43 % SCI :syndrome clinique isolé 4 | LE CONCOURS MéDICAL IRM % de réduction de 2e événement/ placebo Étude anciennes apparaissent en hyposignal. L’injection de produit de contraste permet d’identifier les plaques les plus récentes. Ainsi l’IRM encéphalique renseigne sur le siège, le nombre et l’âge des plaques. Dans certaines situations, les informations apportées par l’IRM manquent de spécificité, et d’autres examens sont nécessaires pour préciser la nature des lésions. La ponction lombaire apportera des informations sur la composition en cellules, en sucre et protéines du liquide céphalo-rachidien (LCR). La recherche de protéines spécifiques de l’inflammation dans le LCR renseigne sur l’état inflammatoire du cerveau, des nerfs optiques et de la moelle épinière. Si le taux de certaines protéines, comme les immunoglobulines, est augmenté dans le LCR, alors qu’il est normal dans le sang, cette synthèse intrathécale d’immunoglobulines est le signe qu’il existe une inflammation au sein du système nerveux central. Les potentiels évoqués renseignent sur le fonctionnement des nerfs et en particulier sur la vitesse de conduction de l’influx électrique. Ces examens électrophysiologiques peuvent donner des informations sur la vitesse de conduction des voies motrices, sensitives ou visuelles. Les prélèvements sanguins sont surtout utiles pour éliminer des diagnostics de maladies qui miment la SEP, notamment des maladies inflammatoires générales qui affectent le système nerveux central mais aussi d’autres organes (sarcoïdose, maladie de Behçet, lupus ou le syndrome de Goujerot-Sjögren). Certaines maladies infectieuses vont aussi être recherchées, telles que la maladie de Lyme. Aucun test clinique, radiologique ou biologique ne permet à lui seul d’établir le diagnostic de SEP. Le diagnostic repose donc sur un faisceau d’arguments cliniques, biologiques et radiologiques. Des critères tenant compte de tous ces éléments permettent, s’ils sont remplis, de porter le diagnostic : différents critères ont été proposés, ayant tous pour objectif de faire la preuve que la maladie est une affection chronique, démyélinisante et inflammatoire du système nerveux central. Longtemps, les critères de Poser(1) ont prévalu. Ils ont ensuite été supplantés par les critères de McDonald(2) qui donnent une place plus importante à l’IRM. Ces critères révisés en 2010 (tableau 1) permettent un diagnostic précoce de la maladie. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques 1 2 3 Un diagnostic précoce est-il possible et nécessaire ? Les avancées récentes de la recherche médicale ont révolutionné la prise en charge de la SEP. Ainsi, les progrès de l’imagerie ont permis un diagnostic dès les stades précoces de la maladie, et les grandes avancées ces dernières années dans le domaine de la recherche en immunologie ont permis la mise au point de plusieurs traitements efficaces pour la prévention des rechutes de la maladie. Certains d’entre eux comme les interférons bêta 1a ou 1b, l’acétate de glatiramère, sont utilisés depuis une dizaine d’années dès les stades précoces de la maladie. Récemment, des traitements par voie orale (tériflunomide, diméthylfumarate) peuvent être prescrits dès que le diagnostic de SEP est porté selon les critères de McDonald 2010 (2), soit dès le premier événement clinique. Ces autorisations d’utilisation ont été délivrées à la suite de plusieurs études de phase III(3-7) qui avaient révélé leur efficacité en prévention des poussées dès le premier événement clinique (tableau 2) sauf pour le diméthylfumarate, qui n’a pas fait l’objet d’une étude spécifique après un premier événement clinique isolé. Bien que ces études n’aient montré qu’un effet modeste sur le handicap à long terme, plusieurs études apportent des arguments en faveur d’un traitement précoce dans les formes de la maladie évoluant par poussées. Ainsi Scarfali et al.(8) ont montré que le nombre élevé de poussées durant les deux premières années était corrélé à la sévérité du handicap à long terme. Weinshenker et al.(9) se sont intéressés à la corrélation entre le délai séparant les deux premières poussées et le handicap à long terme : plus celui-ci était court plus le handicap à long terme était sévère. Enfin, des études d’imagerie ont révélé que l’atrophie cérébrale, témoin d’une perte neuronale, apparaissait très précocement dans l’évolution de la maladie, dès les premiers signes cliniques(10). Plus celle-ci était importante plus l’évolution clinique était péjorative, notamment marquée par l’apparition précoce de troubles cognitifs(11) et par la survenue d’un handicap à long terme(12). Les traitements immunomodulateurs ayant un effet sur la prévention des poussées après un premier événement neurologique et ayant un effet bénéfique sur le volume cérébral à cinq ans(13) pourraient modifier le pronostic à long terme. tome 137 | n° 3 | mars 2015 La SEP est une maladie neurologique chronique invalidante dont les manifestations cliniques sont polymorphes. Grâce aux progrès de l’imagerie, son diagnostic est désormais possible dès le stade de début. Sa prise en charge repose sur l’instauration précoce de traitements immunomodulateurs modifiant l’évolution de la maladie et sur les soins d’une équipe pluridisciplinaire impliquée dans l’information et l’éducation thérapeutique. • La ponction lombaire recherche une synthèse intrathécale d’immunoglobulines L’auteure déclare… 1. Poser CM, P aty DW, Scheinberg L, et al. New diagnostic criteria for multiple sclerosis: guidelines for research protocols. Ann Neurol 1983;13(3):227-31. 2. Polman CH, Reingold SC, Banwell B, et al. Diagnostic criteria for multiple sclerosis: 2010 revisions to the McDonald criteria. Ann Neurol 2011;69(2):292-302. 3. Kappos L, Polman C, Freedman MS, et al. Treatment with interferon beat 1b delays conversion IFN beta 1-b delays conversion to clinically definite and Mac Donald MS in patients with clinically isolated syndromes. Neurology 2006;67:1242-9. 4. Filippi M, Rovaris M, Inglese M, et al. Interferon beta-1a for brain tissue loss in patients at presentation with syndromes suggestive of multiple sclerosis: a randomised, double-blind, placebo-controlled trial. Lancet. 2004;364(9444):1489-96. 5. Jacobs LD, Beck RW, Simon JH, et al. Intramuscular interferon beta 1a therapy initiated during a first demyelinating event in multiple sclerosis. N Engl J Med 2000;343:898-904. 6. Comi G, Martinelli V, Rodegher M, et al. Effects of early treatment with glatiramer acetate in patients with clinically isolated syndrome. Mult Scler 2013;19(8):1074-83. 7. Miller AE, Wolinsky JS, Kappos L, et al; TOPIC Study Group. Oral teriflunomide for patients with a first clinical episode suggestive of multiple sclerosis (TOPIC): a randomised, double-blind, placebo-controlled, phase 3 trial. Lancet Neurol 2014;13(10):977-86. 8. Scalfari A, Neuhaus A, Degenhardt A, et al. The natural history of multiple sclerosis: a geographically based study 10: relapses and long-term disability. Brain 2010;133(Pt 7):1914-29. 9. Weinshenker BG, Rice GP, Noseworthy JH, et al. The natural history of multiple sclerosis: a geographically based study. 4. Applications to planning and interpretation of clinical therapeutic trials. Brain 1991;114:1057-67. 10. Fisher E, Lee JC, Nakamura K, et al. Gray matter atrophy in multiple sclerosis: a longitudinal study. Ann Neurol 2008;64(3):255-65. 11. Deloire MS, Ruet A, Hamel D, et al. MRI predictors of cognitive outcome in early multiple sclerosis. Neurology 2011;76(13):1161-7. 12. Fisher E, Rudick RA, Simon JH, et al. Eight-year follow-up study of brain atrophy in patients with MS. Neurology 2002;59(9):1412-20. 13. Khan O1, Bao F, Shah M, et al. Effect of disease-modifying therapies on brain volume in relapsing-remitting multiple sclerosis: results of a five-year brain MRI study. J Neurol Sci 2012;312(1-2):7-12. LE CONCOURS MéDICAL | 5 { PARCOURS DE SOINS étape 1 Sclérose en plaques Comment annoncer la maladie Pr Thibault Moreau ([email protected]), service de neurologie, CHU de Dijon L’annonce du diagnostic de sclérose en plaques (SEP) constitue une étape inoubliable pour le malade. La seule prononciation des mots « sclérose en plaques » fige le malade dans un état de brutale sidération émotionnelle. Ainsi, très vite, une surdité émotionnelle accompagne la poursuite du discours du neurologue. Plusieurs « guidelines », pour une « bonne annonce », ont été proposés, associant des recommandations logistiques, de comportement et d’accompagnement dépendant des cultures mais plus souvent adaptées à un groupe de malades qu’à un individu seul face à un neurologue(1, 2). L’ anxiété, la peur, la dépression surviennent fréquemment lors de la période d’annonce, mais d’autres réactions sont aussi observées, comme le déni, la culpabilité, la colère, l’anéantissement, le repli, l’acceptation. L’expression mais aussi la durée ou la succession de ces étapes sont variables d’un patient à l’autre, et pas facilement prévisibles. Cela peut surprendre, voire dérouter les soignants qui connaissent l’enjeu capital de cette annonce diagnostique. Trois étapes successives Sur un plan juridique, l’annonce diagnostique doit permettre de respecter la liberté de choix de la personne et sa dignité, et favoriser sa capacité à organiser sa vie. Sur un plan déontologique, le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose (article 35 du code de déontologie médicale). Trois grandes étapes doivent se succéder pour une « bonne annonce » : le processus de l’annonce, le contenu de l’annonce, les dispositions à prendre après l’annonce (tableau). ̶ Pour le processus de l’annonce, il est recommandé que le médecin spécialiste qui a établi le diagnostic l’annonce de façon explicite dans un lieu approprié permettant un entretien singulier et une écoute facilitée. ̶ Concernant le contenu de l’annonce, le discours doit être clair et simple, en établissant un plan opérationnel de prise en charge globale. ̶ Après l’annonce, le médecin doit être disponible pour reprendre ou enrichir les informations déjà données lors d’une consultation rapprochée. Parfois, mais pas obligatoirement, une équipe composée d’une infirmière, d’un psychologue et d’un psychiatre peut aider le neurologue annonceur qui reste néanmoins – et doit rester – responsable de la cruelle étape. De plus, l’équipe soignante appréciera l’apport, le moment d’intervention possible d’un aidant, selon les désirs et le choix du patient(3). L’approche des stratégies de « coping », une base utile en pratique L’annonce du diagnostic de SEP fige le malade dans un état de brutale sidération 6 | LE CONCOURS MéDICAL En fait, les recommandations, le bon sens et l’expérience ne suffisent généralement pas pour une bonne annonce diagnostique. Un savoir-faire, un partage d’expérience sont bien souvent nécessaires. L’approche des stratégies de « coping », sûrement un peu théorique, illustre pour le neurologue la complexité de l’attitude du malade face tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques Tableau. Annonce diagnostique de la sclérose en plaques* Processus de l’annonce Contenu de l’annonce Disposition après l’annonce Le neurologue qui a établi le diagnostic annonce le diagnostic de façon explicite • Consultation longue et dédiée • Processus d’annonce adapté au rythme d’appropriation du patient • Rendez-vous de consultation ultérieure à prévoir • À la demande du patient, l’annonce est partagée avec une personne de son choix • Lieu d’annonce approprié à une écoute facilitée • Neurologue disponible sans sollicitation extérieure Rappeler les informations déjà connues du patient énoncées lors de la démarche diagnostique (IRM, ponction lombaire…) • Parler clair, concis, loyal sans éluder le mot « sclérose en plaques » • Être à l’écoute du malade, en le laissant réagir et exprimer ses émotions • Évaluer son niveau de compréhension et répondre à ses questions • Points positifs à aborder : - mise en avant des capacités préservées du patient - proposition d’une stratégie thérapeutique - évocation d’évolution favorable - maintien des projets de vie (même si parfois adaptés) : grossesse, travail, loisirs, voyages, sport • Toute cette démarche se fera le plus souvent en plusieurs consultations successives avec retour sur certaines étapes mal comprises ou nécessitant plus d’informations • Toute la démarche du contenu de l’annonce sera incluse dans le compte-rendu au médecin traitant • Le patient et la famille doivent pouvoir être revus rapidement par le neurologue annonceur ou par un membre de son équipe (psychologue, infirmière) • Les dispositifs d’éducation thérapeutique, de soutien psychologique de prise en charge médico-sociale multidisciplinaire doivent être proposés au patient, sans les imposer • Des documents ou des références de sites web validés seront donnés au malade * Dérivé de « Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : annonce et accompagnement du diagnostic. La recommandation de bonne pratique ». HAS 2009. à la mauvaise nouvelle, si difficile à prévoir ou à apprécier(4, 5) (encadré). Des échelles peuvent évaluer les stratégies de « coping » utilisées par le patient dès l’annonce diagnostique, ce qui peut aider à comprendre certains comportements, à adapter des prises en charge et à établir des projets adaptés à chaque un patient. Par exemple, il a été montré que l’anxiété face à l’annonce diagnostique était atténuée par une information loyale et complète sur la maladie, même chez les malades utilisant un « coping » fondé sur l’émotion(7). Oser parler de la maladie dès son annonce est donc en fait plus rassurant que générateur d’angoisse, même chez les malades les plus vulnérables. Humanité et partage d’expérience : appui fondamental des avancées médicales La démarche diagnostique, dans la SEP, s’est considérablement modifiée cette dernière décennie : le diagnostic est aujourd’hui établi très vite grâce aux critères standardisés en cours, parfois sans signes cliniques ou symptômes permanents ; une stratégie thérapeutique est disponible dès le premier épisode unique, même avec des médicaments par voie orale peu contraignants, et une information complète, voire débordante, est aujourd’hui proposée au malade sur Internet. Malgré toutes ces avancées, le neurologue expérimenté sait que cette annonce diagnostique reste une étape cruelle qui va changer la vie du patient, souvent jeune, en face de lui, qu’il va fissurer ses projets de vie, blesser son environnement et tome 137 | n° 3 | mars 2015 À propos des stratégies de « coping » Les stratégies de « coping » correspondent aux efforts spécifiques à la fois comportementaux et psychologiques que la personne fait pour mieux tolérer et minimiser les événements stressants. Deux stratégies principales ont été d’abord identifiées : le coping sur l’émotion, où l’anxiété, la mauvaise qualité de vie sont habituelles ; le coping sur la tâche, plus opérationnel, avec des stratégies actives de compensation accompagnées d’une meilleure qualité de vie, fréquemment rencontré chez les hommes. Puis le coping fondé sur la recherche de soutien social et celui sur l’évitement ont été individualisés(6). introduire la peur du lendemain. Nos fantastiques progrès diagnostiques, de prise en charge et thérapeutiques ne doivent pas balayer l’humilité, la nécessité de partager avec d’autres professionnels l’humanité indispensable à cette étape d’annonce diagnostique. • L’auteur déclare… 1. Clanet M, Gayot Pigois C. Annonce du diagnostic et information des patients atteints de SEP. Rev Neurol 2001;157(8-9):1153-6. 2. Ford HL, Johnson MH. Telling your patient he/she has Multiple Sclerosis. Postgrad Med J 1995;71:449-52. 3. Moreau T. L’annonce du diagnostic. La Lettre du neurologue 2014; vol XVIII, n° 6. 4. Lazarus RS, Launier R. 1978. Stress-related transactions between person and environment. In Perspectives in lnteractional Psychology, ed. L. A. Pervin, M. Lewis, 287-327. New York: Plenum. 5. McCabe MP, McKern S, McDonald E. Coping and psychological adjustment among people with multiple sclerosis. J Psychosom Res 2004;56(3):355-61. 6. Endler, Norman S, Parker, James DA. Assessment of multidimensional coping: Task, emotion, and avoidance strategies. Psychological Assessment 1994;6:50-60. 7. Moreau T, Schmidt N, Joyeux O, et al. Coping strategy and anxiety evolution in multiple sclerosis patients initiating interferon-beta treatment. Eur Neurol 2009;62(2):79-85. LE CONCOURS MéDICAL | 7 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS étape 2 Sclérose en plaques Bilan de la maladie : évolutivité, handicap, facteurs du pronostic Pr Jean Pelletier ([email protected]), AP-HM, hôpital de La Timone, pôle de neurosciences cliniques, service de neurologie, CHU La Timone, Marseille La sclérose en plaques (SEP) est actuellement considérée comme une seule entité, représentée par une atteinte inflammatoire démyélinisante du système nerveux central. Toutefois, les mécanismes impliqués dans sa physiopathologie apparaissent multiples (inflammation, démyélinisation, perte axonale). De la même façon, l’expression phénotypique peut être variée, représentée par une grande hétérogénéité à la fois inter- et intra-individuelle. À ce jour, il n’existe aucun marqueur tant au niveau clinique que biologique et radiologique qui permette de prédire son évolution à l’échelle individuelle(1, 2). Toutefois, les connaissances issues du suivi de grandes cohortes de patients apportent des informations pertinentes sur l’évolution naturelle de la maladie, mais ces données ne sont pas toujours applicables au suivi des patients à un échelon individuel. Dans le cadre de la mise en place d’un programme personnalisé de soins adapté à chaque patient, il est donc indispensable de pouvoir s’appuyer sur des profils évolutifs bien définis, des échelles de handicap reproductibles et des facteurs prédictifs sensibles à l’évolution de la maladie. Ce n’est qu’en tenant compte de ces différents paramètres que la prise en charge pourra être optimisée et synonyme d’une prise en charge de qualité au niveau individuel. L’ L’échelle EDSS évalue essentiellement le handicap en termes de troubles de la marche 8 | LE CONCOURS MéDICAL évolutivité de la maladie est définie par la classification de Lublin et Reingold(3), qui individualise trois formes évolutives : la forme rémittente-récurrente, la forme secondairement progressive, et la forme progressive primaire (figure 1). • La forme rémittente-récurrente (RR) est représentée par la survenue de poussées disséminées dans le temps et dans l’espace, qui reflètent la présence d’un processus inflammatoire focal. Elle représente le mode évolutif inaugural le plus fréquent dans la maladie (85 %). Une poussée est définie par l’apparition de nouveaux symptômes ou la réapparition ou l’aggravation de symptômes antérieurement connus, d’une durée supérieure à 24 heures, en dehors de tout contexte fébrile. Ces poussées surviennent de façon aléatoire mais peuvent être favorisées par des facteurs déclenchants ou favorisants (infections, stress). Elles peuvent ou non être responsables de séquelles synonymes de l’installation ou de l’aggravation d’un handicap. • La forme secondairement progressive (SP) correspond à l’évolution naturelle d’une forme RR vers une forme progressive. La progression secondaire est représentée par une accumulation progressive du handicap, soit de façon linéaire dans le temps, soit grevée de poussées surajoutées. La progression est définie par une aggravation continue des symptômes neurologiques sur une période minimale de six mois. Les données de la littérature font état d’un délai moyen de passage à la forme SP 15 à 20 ans après le début de la maladie. • La forme progressive primaire (PP) correspond à une évolution d’emblée progressive, dès le début de la maladie, responsable de la constitution d’un handicap qui s’installe et s’aggrave de façon continue, parfois associé à des poussées surajoutées. La progression continue ne pourra donc être affirmée qu’après un recul suffisant (au moins un an). Cette forme évolutive reste rare, ne représentant que 15 % des patients. Intérêt et limites de la classification en formes évolutives Cette classification a un impact majeur sur le versant diagnostique de la maladie (signes neurologiques disséminés dans le temps et dans l’espace concernant la forme RR, progression continue du handicap dans les formes SP et PP) et surtout sur les modalités de prise en charge thérapeutique. En effet, si les poussées traduisent la composante inflammatoire du processus pathologique, argumentée par l’apparition de nouvelles lésions à l’IRM, la phase rémittente de la maladie sera tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques sensible aux traitements immunomodulateurs et immunosuppresseurs. En revanche, ces mêmes traitements n’auront pas d’impact sur la phase progressive, liée à une perte axonale chronique qui reflète un processus de neurodégénérescence. La relation exacte entre ces deux aspects physiopathologiques (inflammation et neurogénérescence) reste toutefois débattue, notamment concernant l’impact de l’inflammation dans la constitution de l’évolution progressive dans les formes SP. Cette classification comporte toutefois un certain nombre de limites, concernant notamment les formes progressives, et son application à l’individu reste parfois difficile. Tout d’abord, il est indispensable de bénéficier d’un recul suffisant (au moins un an) pour affirmer que la forme est progressive. En effet, la constitution d’un handicap irréversible et son aggravation progressive nécessitent d’éliminer formellement des facteurs d’aggravation ponctuelle qui pourrait participer à accentuer le handicap fonctionnel. Par ailleurs, l’évolution sur un fond progressif de la maladie peut être émaillée de poussées surajoutées, rendant difficile l’appréciation du mode évolutif entre une forme rémittente avec séquelles et une forme progressive avec poussées. Un délai de six mois pour considérer que le handicap est irréversible est nécessaire, permettant notamment d’être à distance suffisante d’une poussée (et de sa récupération). L’évaluation du handicap repose sur une démarche pluridisciplinaire L’approche du handicap fonctionnel d’un patient atteint de SEP nécessite de pouvoir évaluer toutes les fonctions potentiellement atteintes par la maladie. Un certain nombre d’entre elles pourront être évaluées de façon objective par l’examen clinique : motricité, sensibilité, oculomotricité et fonction cérébelleuse. D’autres, en revanche, telles que la fatigue, les troubles cognitifs, les perturbations visuelles et les troubles urinaires et intestinaux, devront faire appel à des explorations paracliniques et/ou à des échelles et des tests ou des échelles spécifiques. L’échelle d’évaluation du handicap qui reste la référence dans la SEP est l’Expanded Disability Status Scale (EDSS)[4] (tableau 1, p. X). Cette échelle permet effectivement d’évaluer les grandes perturbations fonctionnelles engendrées par la maladie. Il s’agit d’une échelle ordinale qui est toutefois principalement centrée sur la capacité du patient à déambuler, et elle évalue tome 137 | n° 3 | mars 2015 Clasification des formes évolutives de SEP Les trois formes pricipales Les formes progressives détaillées Forme rémittente-récurente Forme secondairement progressive sans poussée Forme secondairement progressive Forme secondairement progressive avec poussées Forme progressive primaire sans poussée Forme progressive primaire Forme progressive primaire avec poussées donc essentiellement le handicap en termes de troubles de la marche. En particulier, elle reflète plus précisément le niveau de handicap et son aggravation à partir du score EDSS 4 (apparition de la limitation du périmètre de marche). D’autre part, un même score global peut à la fois traduire un handicap lié à une perturbation d’une seule fonction (motrice) ou à l’association de plusieurs déficits, rendant la cotation du score global très variable en fonction de l’examinateur. Enfin, il existe avec cette échelle une variabilité intra-individuelle très importante qui peut être en rapport avec des événements influençant le niveau de handicap (poussées, épisodes d’infection, fatigue, fortes chaleurs). La valeur du score global en termes de handicap irréversible (EDSS confirmé) ne peut donc être retenue que si celui-ci est confirmé après un délai qui permet de limiter l’impact des fluctuations (notamment motrices et sensitives) et de la récupération dans les suites d’une poussée. Un délai de six mois est habituellement considéré comme pertinent. Les modifications du score EDSS global seront donc principalement en rapport avec les poussées et les éventuelles séquelles qui leur sont secondaires jusqu’au niveau d’EDSS 4 (limitation du périmètre de marche). En revanche, l’aggravation du score EDSS à partir du niveau EDSS 4 permettra plus particulièrement de quantifier l’aggravation pro- LE CONCOURS MéDICAL | 9 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Tableau 1. Échelle EDSS (Expanded Disability Status Scale) - Échelle de cotation du handicap 0.0 Examen neurologique normal (tous les paramètres fonctionnels [PF] à 0 ; le niveau du PF mental peut être coté à 1) 1.0 Pas de handicap, signes minimes d’un des PF (c’est-à-dire niveau 1 sauf PF mental) 1.5 Pas de handicap, signes minimes dans plus d’un des PF (plus d’un niveau 1 à l’exclusion du PF mental) 2.0 Handicap minime d’un des PF (un niveau 2, les autres niveaux 0 ou 1) 2.5 Handicap minime dans deux PF (deux niveaux 2, les autres niveaux 0 ou 1) 3.0 Handicap modéré d’un PF sans problème de déambulation (un PF à 3, les autres à 0 ou 1 ; ou 3 ou 4 PF à 2, les autres à 0 ou 1) 3.5 Handicap modéré dans un PF sans problème de déambulation (1 PF à 3 et 1 ou 2 PF à 2 ; ou 2 PF à 3 ; ou 5 PF à 2) 4.0 Indépendant, debout 12 heures par jour en dépit d’un handicap relativement sévère consistant en un PF à 4 (les autres à 0 ou 1), ou l’association de niveaux inférieurs dépassant les limites des degrés précédents. Capable de marcher 500 m sans aide et sans repos 4.5 Déambulation sans aide, debout la plupart du temps durant la journée, capable de travailler une journée entière, peut cependant avoir une limitation dans une activité complète ou réclamer une assistance minimale ; handicap relativement sévère, habituellement caractérisé par un PF à 4 (les autres à 0 ou 1) ou l’association de niveaux inférieurs dépassant les limites des grades précédents. Capable de marcher 300 m sans aide et sans repos 5.0 Déambulation sans aide ou repos sur une distance d’environ 200 m ; handicap suffisamment sévère pour altérer les activités de tous les jours (habituellement, un PF est à 5, les autres à 0 ou 1 ; ou association de niveaux plus faibles dépassant ceux du grade 4.0) 5.5 Déambulation sans aide ou repos sur une distance d’environ 100 m ; handicap suffisant pour exclure toute activité complète au cours de la journée 6.0 Aide unilatérale (canne, canne anglaise, béquille), constante ou intermittente, nécessaire pour parcourir environ 100 m avec ou sans repos intermédiaire 6.5 Aide permanente et bilatérale (cannes, cannes anglaises, béquilles) nécessaire pour marcher 20 m sans s’arrêter 7.0 Ne peut marcher plus de 5 m avec aide ; essentiellement confiné au fauteuil roulant ; fait avancer lui-même son fauteuil et effectue le transfert ; est au fauteuil roulant au moins 12 h par jour 7.5 Incapable de faire quelques pas ; strictement confiné au fauteuil roulant ; a parfois besoin d’une aide pour le transfert ; peut faire avancer lui-même son fauteuil ; ne peut y rester toute la journée ; peut avoir besoin d’un fauteuil électrique 8.0 Essentiellement confiné au lit ou au fauteuil, ou promené en fauteuil par une autre personne ; peut rester hors du lit la majeure partie de la journée ; conserve la plupart des fonctions élémentaires ; conserve en général l’usage effectif des bras 8.5 Confiné au lit la majeure partie de la journée, garde un usage partiel des bras ; conserve quelques fonctions élémentaires 9.0 Patient grabataire ; peut communiquer et manger 9.5 Patient totalement impotent, ne peut plus manger ou avaler ni communiquer 10.0 Décès lié à la SEP 10 | LE CONCOURS MéDICAL Détail de la cotation des paramètres fonctionnels de l’échelle EDSS • Fonction pyramidale 0. Normale 1. Perturbée sans handicap 2. Handicap minimal 3. Paraparésie ou hémiparésie faible/modérée ; monoparésie sévère 4. Paraparésie ou hémiparésie marquée ; quadriparésie modérée ; ou monoplégie 5. Paraplégie, hémiplégie ou quadriparésie marquée 6. Quadriplégie V. Inconnue • Fonction cérébelleuse 0. Normale 1. Perturbée sans handicap 2. Ataxie débutante 3. Ataxie du tronc ou d’un membre modérée 4. Ataxie sévère touchant tous les membres 5. L’ataxie ne permet plus la réalisation de mouvements coordonnés V. Inconnue • Fonction du tronc cérébral 0. Normale 1. Examen anormal, pas de gêne fonctionnelle 2. Nystagmus modéré ou autre handicap modéré 3. Nystagmus sévère, faiblesse extra-oculaire, handicap modéré d’autres nerfs crâniens 4. Dysarthrie ou autre handicap marqué 5. Dans l’impossibilité d’avaler ou de parler V. Inconnue • Fonction sensitive 0. Normale 1. Perception des vibrations ou reconnaissance de figures dessinées sur la peau seulement diminuée 2. Légère diminution de la sensibilité au toucher, à la douleur ou du sens de la position, et/ ou diminution modérée de la perception des vibrations (ou de figures dessinées) dans 3 ou 4 membres 3. Diminution modérée de la sensibilité au toucher, à la douleur ou du sens de la position, et/ou perte de la perception des vibrations dans 1 ou 2 membres ; ou diminution légère de la sensibilité au toucher ou à la douleur dans tous les tests proprioceptifs dans 3 ou 4 membres 4. Diminution marquée de la sensibilité au toucher ou à la douleur ou perte de la perception proprioceptive, isolées ou associées, dans 1 ou 2 membres ; ou diminution modérée de la sensibilité au toucher ou à la douleur et/ou diminution sévère de la perception proprioceptive dans plus de 2 membres 5. Perte de la sensibilité dans 1 ou 2 membres ; ou diminution modérée de la sensibilité au toucher ou à la douleur et/ou perte de la sensibilité proprioceptive sur la plus grande partie du corps en dessous de la tête 6. Perte de la sensibilité en dessous de la tête V. Inconnue • Transit intestinal et fonction urinaire 0. Normal 1. Rétention urinaire légère ou rares mictions impérieuses 2. Rétention urinaire modérée et mictions impérieuses fréquentes ou incontinence urinaire rare ; constipation ou épisodes diarrhéiques 3. Incontinence urinaire fréquente 4. Nécessité d’une cathétérisation pratiquement constante 5. Incontinence urinaire 6. Incontinence urinaire et fécale V. Inconnue • Fonction visuelle 0. Normale 1. Scotome et/ou acuité visuelle supérieure à 0,7 2. Œil atteint avec scotome ; acuité visuelle comprise entre 0,4 et 0,7 3. Œil atteint avec large scotome, ou diminution modérée du champ visuel mais avec une acuité visuelle maximale (avec correction) de 0,2 ou 0,3 4. Œil le plus atteint avec diminution marquée du champ visuel et acuité visuelle maximale (avec correction) de 0,1 à 0,2 ; ou niveau 3 et acuité maximale de l’autre œil de 0,3 ou moins 5. Œil le plus atteint avec acuité visuelle maximale (correction) inférieure à 0,1 ; ou niveau 4 et acuité visuelle maximale de l’autre œil de 0,3 ou moins 6. Niveau 5 plus acuité visuelle maximale du meilleur œil de 0,3 ou moins V. Inconnue • Fonction cérébrale (ou mentale) 0. Normale 1. Altération isolée de l’humeur (n’interfère pas avec le score EDSS) 2. Diminution légère de l’idéation 3. Diminution modérée de l’idéation 4. Diminution marquée de l’idéation (« chronic brain syndrome » modéré) 5. Démence ou « chronic brain syndrome » sévère V. Inconnue • Autres fonctions 0. Pas d’altération 1. Toute autre perturbation neurologique attribuable à la SEP (à spécifier) V. Inconnue tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques gressive de la maladie. En particulier, les scores EDSS 6 (nécessité de recourir à une aide unilatérale à la marche) et EDSS 6,5 (aide permanente et bilatérale à la marche) puis EDSS 7 (recours au fauteuil roulant) représentent des niveaux de handicap irréversible correspondant à des étapes charnières dans la progression de la maladie. Les limites de l’échelle EDSS reposent surtout sur la prise en compte insuffisante de certains symptômes qui participent de façon importante à la constitution du handicap dans cette affection. En particulier les troubles cognitifs, qui sont fréquemment et précocement rencontrés dans la maladie (prévalence de 40 à 60 % selon les études), nécessitent d’être évalués. Le retentissement de ces perturbations sur les conditions de vie du patient, notamment socio-professionnelles, et leur impact en termes de handicap doivent être appréhendés(5). Un certain nombre de batteries standardisées (Brief Repeatable Battery for Neuropsychological Tests, BCcogSEP) permettent d’évaluer les perturbations neuropsychologiques le plus fréquemment rencontrées et qui prédominent sur la mémoire de travail, les capacités attentionnelles, les fonctions exécutives, le raisonnement abstrait, la perception visuo-spatiale et la vitesse de traitement de l’information(6, 7). Elles nécessitent toutefois d’être effectuées par des psychologues et sont assujetties à des temps de passation importants. Pour pallier les limites de l’EDSS concernant notamment la prise en compte des troubles cognitifs, une échelle composite d’évaluation du handicap a été proposée (Multiple Sclerosis Functional Composite [MSFC])[8-10]. Cette échelle comporte la mesure du temps de marche sur une distance de 8 m, la mesure du temps pour effectuer un test de dextérité manuelle, et un test cognitif centré sur la mémoire de travail et l’attention. De la même façon, les troubles sphinctériens, en particulier urinaires (voir article p. X), sont fréquents (prévalence de 40 à 90 % selon les études) et précoces dans cette affection(11). Ils participent à altérer le confort et la qualité de vie des patients et ils peuvent entraîner des complications infectieuses, elles-mêmes responsables de poussées ou d’aggravation de la maladie. Ils sont responsables d’un véritable « handicap social ». Le recours à des questionnaires détaillés, à un calendrier mictionnel et à la mesure du résidu post-mictionnel permet une première évaluation des troubles tome 137 | n° 3 | mars 2015 1 2 3 (pollakiurie, dysurie, incontinence, rétention). Un bilan échographique vésical et rénal ainsi que la réalisation d’un bilan urodynamique sont souvent indispensables afin d’appréhender plus précisément les perturbations et de proposer une prise en charge adaptée de ces troubles. Par ailleurs, il est indispensable de tenir compte des troubles dépressifs, anxieux et émotionnels qui s’avèrent très fréquents (prévalence supérieure à 50 %) quel que soit le stade évolutif de la maladie mais particulièrement à la phase précoce et dans L’EDSS doit être associée à d’autres échelles la phase progressive(12, 13). L’impact de ces troubles sur la vie quotidienne des patients et de leur famille justifie leur recherche systématique afin d’assurer une prise en charge adaptée. Enfin, l’échelle EDSS ne tient pas compte de la fatigue fréquemment rencontrée dans cette affection (prévalence de 50 à 90 % selon les études), facteur de handicap souvent mis en avant par les patients atteints de SEP. La quantification du degré de fatigue et son retentissement sur les performances fonctionnelles des patients, tant physiques que cognitives, doit être intégrée à l’évaluation globale du niveau de handicap. Celle-ci est réalisée par l’intermédiaire d’échelles adaptées à la pathologie (Modified Fatigue Impact Scale [MFIS])[14, 15]. L’ensemble de ces troubles est responsable d’un retentissement majeur sur la qualité de vie des patients atteints de SEP. Celle-ci peut être appréhendée par des échelles de qualité de vie (SEP-59, MSQOL-54, MusiQol) qui peuvent apporter des renseignements pertinents sur les conséquences socio-professionnelles de la maladie(16-19). L’évaluation du handicap doit donc reposer sur une démarche pluridisciplinaire associant neurologue, médecin de médecine physique et de réadaptation, urologue, psychiatre et psychologue. Il faut par ailleurs tenir compte de facteurs influençant le niveau de handicap, soit transitoires, telles que les fluctuations motrices ou sensitives, soit permanentes, telles que les séquelles liées aux poussées et l’évolution progressive de la maladie. LE CONCOURS MéDICAL | 11 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Tableau 2. Facteurs pronostiques Facteurs de bon pronostic Facteurs de mauvais pronostic ➽ âge de début précoce ➽ 1re poussée monosymptomatique ➽ Neuropathie optique inaugurale ➽ Récupération complète de l’épisode inaugural ➽ Long intervalle entre les 2 premières poussées ➽ âge de début tardif ➽ 1re poussée polysymptomatique ➽ A tteinte inaugurale du tronc cérébral et du cervelet ➽ Séquelles après l’épisode inaugural ➽ Court intervalle entre les 2 premières poussées ➽ F réquence élevée des poussées dans les 2 premières années ➽ S ynthèse intrathécale en IgM à la ponction lombaire ➽ A ctivité inflammatoire importante à l’IRM initiale (T1 gadolinium) ➽ C harge lésionnelle T1 et T2 importante sur l’IRM initiale ➽ Atrophie cérébrale sur l’IRM initiale ➽ A ugmentation de la charge lésionnelle en T1, T2 et de l’atrophie cérébrale lors des 5 premières années Facteurs du pronostic global et facteurs pronostiques de l’évolution à long terme L’étude de grandes cohortes de patients atteints de SEP suivis de façon longitudinale a permis d’apporter des informations précises concernant le pronostic global à moyen et long termes et les facteurs qui peuvent l’influencer(20-23). L’évolution individuelle reste difficile à prédire Tout d’abord, l’espérance de vie des patients atteints de SEP ne semble pas être influencée de façon importante par la maladie. Toutefois, l’espérance de vie des patients reste globalement inférieure à celle de la population générale, et semble être grandement influencée par le niveau de handicap. Les patients lourdement handicapés (EDDS > 8) présentent en effet un taux de mortalité 10 fois supérieur à la population générale. D’autres facteurs pourraient avoir un effet délétère sur la survie : sexe masculin, forme de début progressive primaire, première poussée polysymptomatique et fréquence élevée des poussées lors des deux premières années d’évolution. L’évaluation du handicap repose dans la très grande majorité de ces études observationnelles sur l’EDSS. Les principaux repères qui peuvent être utilisés correspondent aux niveaux de handicap liés aux troubles de la marche(24). Ainsi, le délai 12 | LE CONCOURS MéDICAL moyen d’atteinte dans la forme RR de l’EDSS 4 (limitation du périmètre de marche) est de huit ans, de l’EDSS 6 (aide à la marche avec une aide unilatérale) de vingt ans et de l’EDSS 7 (recours au fauteuil roulant) de trente ans. Le délai de survenue de l’EDSS 6 est de sept ans dans les formes PP. Ces délais moyens pourraient toutefois être modifiés dans les années à venir, en rapport avec l’utilisation précoce des traitements de fond qui sont prescrits depuis maintenant vingt ans dans la forme RR et qui ont vraisemblablement un impact en termes de retard de l’apparition et de l’aggravation du handicap. Il faut par ailleurs encore une fois tenir compte du fait que l’échelle EDSS évalue essentiellement la marche. Le pronostic de la maladie ne se limite pas aux troubles de la marche mais doit considérer d’autres paramètres : troubles cognitifs, troubles visuels et atteinte des membres supérieurs, ou bien encore troubles génito-sphinctériens, responsables de conséquences importantes sur les activités professionnelles et la qualité de vie des patients. De plus, et du fait de la variabilité intra-individuelle du niveau de handicap, il est indispensable que le niveau du score EDSS soit confirmé sur une période de suivi de six mois (en particulier après une poussée) afin que celui-ci puisse traduire de façon précise le degré de handicap irréversible. Des facteurs pronostiques de l’évolution de la maladie en termes de valeur prédictive du handicap à long terme ont été décrits de façon reproductible et fiable à l’échelle du groupe mais restent difficiles à appliquer à l’individu(25). L’âge de début de la maladie, les symptômes inauguraux, la charge lésionnelle sur l’IRM initiale, la fréquence des poussées et l’augmentation de la charge lésionnelle dans les premières années d’évolution sont des éléments pertinents à prendre en compte dans l’évaluation des facteurs prédictifs du handicap (tableau 2). Toutefois, et malgré la valeur prédictive de ces facteurs identifiés dans de grandes cohortes, aucun de ces marqueurs ne peut prédire de façon certaine l’évolution de la maladie à l’échelle individuelle. L’évaluation multidisciplinaire : prérequis pour un programme personnalisé de soins La SEP reste une affection caractérisée par une grande hétérogénéité, tant concernant son mode d’expression clinique que son évolution. La mise en place d’un programme personnalisé tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques de soins adapté à chaque patient nécessite de prendre en compte des éléments spécifiques à un patient donné mais surtout de mettre en place une évaluation multidisciplinaire permettant d’approcher les différents facteurs responsables de l’apparition et de l’aggravation du handicap dont étape 2 1. Confavreux C, Compston A. The natural history of multiple sclerosis. In: McAlpine’s Multiple Sclerosis. 4th Edition. Compston A, editor. Churchill Livinstone Elsevier, London; 2006:183-92. 2. Compston A, Confavreux C. Histoire naturelle de la sclérose en plaques. Press Med 2010;359-62. 3. Lublin FD, Reingold SC. Defining the clinical course of multiple sclerosis: results of an international survey. National Multiple Sclerosis Society (USA) Advisory Committee on Clinical Trials of New Agents in Multiple Sclerosis. Neurology 1996;46(4):907-11. 4. Kurtzke JF. Rating neurologic impairment in multiple sclerosis: an expanded disability status scale (EDSS). Neurology 1983;33:1444-52. 5. Reuter F, Audoin B, Rico A, et al. Troubles cognitifs. Rev Neurol (Paris) 2009; 165 S4:S113-22. 6. Rao SM, Leo GJ, Bernardin L, et al. Cognitive dysfunction in multiple sclerosis. I. Frequency, patterns, and prediction. Neurology 1991;41:685-91. 7. Dujardin K, Sockeel P, Cabaret M, et al. La BCcogSEP : une batterie courte d’évaluation des fonctions cognitives destinées aux patients la prévention doit rester l’objectif prioritaire de la prise en charge au niveau individuel. • L’auteur déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles (essais cliniques, travaux scientifiques et conférence) pour Novartis Pharma, Biogen Idec, Teva, Merck Serono, Sanofi, Genzyme, et avoir été pris en charge (transport, hôtel, repas) à l’occasion de déplacement pour congrès par Novartis Pharma, Biogen Idec, Teva, Merck Serono, Sanofi, Genzyme. souffrant de sclérose en plaques. Rev Neurol (Paris) 2004;160:51-62. 8. Cutter GR, Baier ML, Rudick RA, et al. Development of a multiple sclerosis functional composite as a clinical trial outcome measure. Brain 1999;122(Pt 5):871-82. 9. Fischer JS, Rudick RA, Cutter GR, et al. The Multiple Sclerosis Functional Composite Measure (MSFC): an integrated approach to MS clinical outcome assessment. National MS Society Clinical Outcomes Assessment Task Force. Mult Scler 1999(4):244-50. 10. Rudick RA, Cutter G, Baier M, et al. Use of the Multiple Sclerosis Functional Composite to predict disability in relapsing MS. Neurology 2001;56:1324-30. 11. De Ridder D, Van Der Aa F, Debruyne J, et al. Consensus guidelines on the neurologist’s role in the management of neurogenic lower urinary tract dysfunction in multiple sclerosis. Clin Neurol Neurosurg 2013;115(10):2033-40. 12. Ghaffar O, Feinstein A. The neuropsychiatry of multiple sclerosis: a review of recent developments. Curr Opin Psychiatry 2007;20(3):278-85. 13. Janssens AC, van Doorn PA, de Boer JB, et al. Anxiety and depression influence the relation between disability status and quality of life in multiple sclerosis. Mult Scler 2003;9:397-403. 14. Multiple Sclerosis Council for Clinical Practice Guidelines. Fatigue and multiple sclerosis: evidence-based management strategies for fatigue in multiple sclerosis. 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Prognostic factors in a multiple sclerosis incidence cohort with twenty-five years of follow-up. Brain 1993;116(Pt 1):117-34. 21. Confavreux C, Vukusic S, Adeleine P. Early clinical predictors and progression of irreversible disability in multiple sclerosis: an amnesic process. Brain 2003;126(Pt 4):770-82. 22. Tremlett H, Zhao Y, Rieckmann P, et al. New perspectives in the natural history of multiple sclerosis. Neurology 2010;74(24):2004-15. 23. Leray E, Yaouanq J, Le Page E, et al. Evidence for a two-stage disability progression in multiple sclerosis. Brain 2010;133(Pt 7):1900-13. 24. Confavreux C, Vukusic S, Moreau T, et al. Relapses and progression of disability in multiple sclerosis. N Engl J Med 2000;343(20):1430-8. 25. Renoux C. Natural history of multiple sclerosis: long-term prognostic factors. Neurol Clin 2011;29(2):293-308. Choix des traitements spécifiques : décision complexe, souvent collégiale Pr Bruno Stankoff ([email protected]), AP-HP, hôpital Saint-Antoine, Paris Le paysage thérapeutique de la sclérose en plaques (SEP) a considérablement évolué ces vingt dernières années, pour actuellement représenter l’un des champs les plus actifs de la neurologie clinique. La totalité des traitements spécifiques non symptomatiques cible la composante inflammatoire de la maladie. Nous disposons actuellement de multiples molécules dont l’intensité d’action varie en puissance, mais dont certaines conduisent à des effets secondaires parfois graves. La décision thérapeutique doit prendre en compte la sévérité de la forme clinique à traiter, l’efficacité démontrée de la thérapeutique, le libellé de l’AMM et le risque potentiel pour le sujet. L es choix thérapeutiques complexes justifient souvent le recours à des avis d’experts en réunion collégiale. Des discussions sont encore vives concernant le choix d’une stratégie thérapeutique d’induction, où un traitement initial puissant permettrait d’obtenir une rémission durable, et une stratégie d’escalade, où l’intensité de la thérapeutique tome 137 | n° 3 | mars 2015 est adaptée à l’évolution clinique sous un premier traitement. Mais les recommandations actuelles favorisent encore la prudence face au risque iatrogène, et après avoir abordé le traitement des poussées, nous adopterons ici une dichotomie non exclusive séparant les traitements de première ligne de ceux de « recours en seconde ligne ou plus ». LE CONCOURS MéDICAL | 13 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Le syndrome grippal est l’effet secondaire le plus fréquent des interférons bêta. Le traitement des poussées cliniques Il repose sur l’administration de hautes doses de méthylprednisolone, classiquement réalisée par voie intraveineuse, à raison de 1 g/j, le plus souvent sur 3 jours consécutifs. Mais les doses peuvent exceptionnellement aller jusqu’à 5 ou 10 g au total en fonction de la sévérité de la poussée. Les perfusions de méthylprednisolone sont en général effectuées dans un cadre hospitalier, mais, lorsque cela est possible localement, l’existence d’un réseau de soins (voir articke p. X) permet de les réaliser à domicile. Parfois, une corticothérapie orale rapidement dégressive sur 15 jours est prescrite dans les suites des perfusions. Dans un avenir proche, l’administration par voie orale d’une dose identique (1 g/j) de méthylprednisolone pourrait remplacer le traitement actuel, des études récentes ayant démontré une non-infériorité de cette modalité sans risque supplémentaire. En cas de poussée sévère faisant suspecter un risque de séquelles, le traitement peut être complété par la réalisation d’échanges plasmatiques (de 5 à 7 au total) en unité de soins intensifs. Les traitements dits de « première ligne » Les interférons bêta Plusieurs molécules sont disponibles (Avonex, Rebif, Betaferon, Extavia), toutes par voie injectable, les autres voies d’administration n’ayant pas été démontrées actives. Leur efficacité est globalement similaire, la voie IM étant associée à une action plus lente. Les différences résident principalement dans le mode et le rythme d’administration. Les interférons bêta réduisent la fréquence des poussées d’environ 30 % dans les formes rémittentes certaines. Ils sont également indiqués après un syndrome cliniquement isolé, correspondant à la 14 | LE CONCOURS MéDICAL première poussée de la maladie si les critères diagnostiques actualisés sont validés. Les interférons injectés par voie sous-cutanée sont aussi indiqués dans les formes secondairement progressives avec poussées surajoutées. L’effet secondaire principal est le syndrome pseudogrippal, qui nécessite le plus souvent une prémédication par traitement antalgique et antipyrétique. Surviennent aussi des complications locales cutanées, le plus souvent bénignes mais possiblement dysesthétiques et exceptionnellement graves, avec des nécroses cutanées. Des modifications de l’humeur ont été décrites (bien qu’il ne s’agisse pas en général de syndromes dépressifs caractérisés) ainsi qu’un risque rare de majoration des épilepsies non équilibrées. Exceptionnellement, des cas de microangiopathie thrombotique grave avec risque d’hypertension sévère et d’insuffisance rénale ont été rapportés. Un suivi biologique (NFS et dosage des enzymes hépatiques) est recommandé. L’acétate de glatiramère (Copaxone) Ce médicament est administré par voie sous-cutanée (20 mg par injection) quotidiennement dans les formes rémittentes de SEP. Son efficacité est identique à celle des interférons, et il possède les mêmes indications dans les syndromes cliniquement isolés et les formes rémittentes. Ce traitement, comme les interférons, n’a pas fait la preuve indiscutable de son efficacité sur la progression du handicap. Les effets secondaires sont de plusieurs types : 1) une réaction au site d’injection, fréquente (érythème, douleur, prurit, induration sous-cutanée, lipodystrophie) ; 2) une rare réaction immédiate systémique après certaines injections (réaction transitoire associant vasodilatation, dyspnée, oppression thoracique, palpitations ou tachycardie) ; cette réaction systémique ne se reproduit en général pas lors des injections suivantes, et ne conduit en règle pas à l’arrêt du traitement. Des réactions allergiques sont possibles mais rares. Le tériflunomide (Aubagio) Disponible en France depuis peu (médicament d’exception), ce médicament a obtenu l’AMM dans les formes rémittentes de SEP. Il inhibe de façon réversible une enzyme clé impliquée dans la synthèse des bases pyrimidiques utiles à la réplication de l’ADN lymphocytaire, et réduit ainsi l’activation et la prolifération des lymphocytes T et B. À la dose de 14 mg/j (une prise), il diminue le risque tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques annualisé de poussées d’environ 30 % et réduit l’accumulation de handicap par rapport au placebo. Les principaux effets secondaires sont des infections en règle peu sévères, une cytolyse hépatique, une alopécie modérée, une légère élévation de la pression artérielle. Des effets tératogènes ont été décrits chez l’animal, et la demi-vie très prolongée (possible persistance dans l’organisme plus d’un an) justifie la pratique d’une procédure d’élimination à base de cholestyramine ou de charbon en cas de grossesse, d’effet indésirable, ou de nécessité d’arrêt rapide. Une contraception efficace est indispensable. L’acide diméthylfumarique (BG-12, Tecfidera) Ce médicament active la voie Nrf2, favorisant une réduction de la production des radicaux libres. Il réduirait le taux des cytokines pro-inflammatoires (TNF-alpha, IL-1 bêta et IL-6), favoriserait la différenciation TH2 et réduirait l’activation de la microglie. En phase 3, il diminue le taux annualisé de poussées de 45 à 53 % et a permis de réduire le handicap dans un essai sur deux. Il a obtenu récemment une AMM dans les formes rémittentes de SEP. Les principaux effets secondaires sont des épisodes de bouffées congestives après les prises, des troubles digestifs parfois pénibles avec douleurs, nausée, diarrhée, des épisodes infectieux. Des cas de lymphopénies parfois sévères et prolongées ont été rapportés, et un cas de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) est récemment survenu chez un patient lymphopénique, justifiant 1 2 3 une surveillance de la numération. Actuellement, ce traitement est disponible en rétrocession hospitalière impliquant de justifier de l’absence d’alternative à son utilisation. Les traitements dits de « seconde ligne » Plusieurs traitements ont démontré une efficacité supérieure aux traitements de première ligne dans la prévention des poussées. Cependant, certains risques et effets secondaires parfois graves restreignent leur indication aux formes très actives de SEP, et justifient une surveillance étroite. La mitoxantrone (Elsep) est le premier traitement à avoir été approuvé en deuxième intention. Il s’agit d’une molécule antinéoplasique de la famille des anthracyclines qui inhibe la topoisomérase de type II, utilisée comme agent immunosuppresseur. Plusieurs études ont montré qu’elle réduisait le nombre de poussées, l’apparition de nouvelles lésions rehaussées par le gadolinium et la progression du handicap. L’efficacité de la mitoxantrone se maintient plusieurs mois après l’arrêt du traitement. Les effets secondaires (leucémie et insuffisance cardiaque), bien que rares, peuvent survenir également après l’arrêt du traitement et doivent être dépistés de façon systématique pendant cinq ans. Le natalizumab (Tysabri) est un anticorps monoclonal humanisé dirigé contre l’intégrine alpha 4 (VLA4), exprimée à la surface des lymphocytes activés et des monocytes. Cette molécule bloque l’interaction VLA4/VCAM, empêchant ainsi le passage Tableau 1. Traitements de « première ligne » Traitement Interférons bêta (Rebif, Extavia, Betaferon [SC], Avonex [IM]) Mécanisme d’action Indication Efficacité en phase III Principales contre-indications Risques sérieux à considérer Immuno-modulation : réduction de l’activation lymphocytaire Th1 et du passage de la barrière hémato-encéphalique SEP d’évolution rémittente ; Dès la première poussée ; Formes secondairement progressives avec poussées surajoutées Réduction d’environ 30 % de la fréquence des poussées Dépression sévère au moment de l’initiation Hypersensibilité Acétate de glatiramère (Copaxone [SC]) Immuno-modulation : switch lymphocytaire Th1-Th2 SEP d’évolution rémittente, Dès la première poussée Réduction d’environ 30 % de la fréquence des poussées Hypersensibilité Tériflunomide (Aubagio, 14 mg) [voie orale] Immuno-modulation : Réduit la prolifération des lymphocytes activés SEP rémittente Dès le diagnostic Réduction d’environ 30 % de la fréquence des poussées Grossesse, allaitement, immunodépression Cytolyse hépatique Effet tératogène chez l’animal Diméthylfumarate, BG-12 (Tecfidera) [voie orale] Active la voie du stress oxydatif nrf2 : effet immunomodulateur en voie de démembrement SEP rémittente Dès le diagnostic Réduction d’environ 40-50 % de la fréquence des poussées Hypersensibilité LEMP (exceptionnel) si lymphopénie chronique sévère Inf-B1a (IM et SC) Exceptionnelles microangiopathies thrombotiques Inf-B1b (SC) tome 137 | n° 3 | mars 2015 LE CONCOURS MéDICAL | 15 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Tableau 2. Traitements de « seconde ligne » Traitement Mécanisme d’action Indication Efficacité en phase III Principales contre-indications Risques sérieux à considérer Natalizumab (Tysabri) Anticorps monoclonal anti a4-integrine; Bloque le passage de la barrière hématoencéphalique Immunosuppresseur ciblé SEP rémittente active malgré un traitement immunomodulateur bien conduit En première ligne de SEP rémittente sévère > 60 % de réduction de la fréquence des poussées Immuno-dépression hypersensibilité LEMP : stratification du risque nécessaire Hypersensibilité Fingolimod (Gilenya) Agoniste inverse des récepteurs S1P ; Séquestre les lymphocytes (sauf T effecteur mémoire dans les organes lymphoïdes secondaires Immunosuppresseur ciblé SEP rémittente active malgré un traitement immunomodulateur bien conduit En première ligne de SEP rémittente sévère Environ 50 % de réduction de la fréquence des poussées Immunodépression Hypersensibilité Hépathopathie sévère Bradycardie avec BAV à l’introduction Œdème maculaire Cytolyse Mitoxantrone (Elsep) Immunosuppresseur dérivé des anthracyclines SEP agressive avec séquelles, rémittente ou secondairement progressive Jusqu’à 80 % de réduction de la fréquence des poussées Cardiopathies immunodépression hémopathies Atteinte myocardique, Infections, Leucémie différée Alemtuzumab (Lemtrada) Anticorps monoclonal anti-CD52 immunosuppresseur SEP rémittente active > 50 % de réduction de la fréquence des poussées (comparateur actif) Immunodépression Thyroïdites (> 20 %) Purpura thrombopénique Néphropathies auto-immune L’auteur déclare participer ou avoir participé à des essais cliniques pour Biogen, Genzyme, Sanofi, Teva, Novartis ; à des activités de conseil et des conférences pour Novartis, Teva, Genzyme, Sanofi, Biogen, Merck ; il déclare un soutien à la recherche par Genzyme, Merck ; et avoir été pris en charge (transport, hôtel, repas) à l’occasion de déplacement pour congrès par Teva, Novartis, Biogen, Genzyme. 1. O’Connor PW, Oh J. Diseasemodifying agents in multiple sclerosis. Handb Clin Neurol. 2014;122:465-501. doi: 10.1016/ B978-0-444-52001-2.00021-2. 2. Cross AH, Naismith RT Established and novel diseasemodifying treatments in multiple sclerosis. J Intern Med. 2014 Apr;275(4):350-63. 16 | LE CONCOURS MéDICAL des cellules immunocompétentes à travers la barrière hémato-encéphalique. L’administration intraveineuse de natalizumab diminue la fréquence annualisée des poussées d’environ 60 %. Les résultats des essais thérapeutiques ont objectivé, par rapport au placebo, une diminution d’environ 40 % du risque d’aggravation du handicap neurologique à deux ans. Cependant, des cas de LEMP ont été rapportés. Le risque global est d’environ 3/1 000 et se majore en fonction des facteurs de risque identifiés, de 0,1/1 000 en l’absence de facteur à plus de 1/100 en cas de traitement prolongé plus de 2 ans, d’immunosuppression antérieure et de sérologie JC positive. L’AMM permet l’utilisation du natalizumab en deuxième ligne pour les formes très actives de la maladie malgré un traitement par interféron bêta, et en première ligne pour les formes sévères et d’évolution rapide. Le fingolimod (Gilenya), avec une AMM identique à celle du natalizumab, constitue actuellement une alternative thérapeutique de seconde ligne. Cet immunosuppresseur sélectif est un ligand des récepteurs sphingosine-1-phosphate et permet une séquestration des lymphocytes dans les organes lymphoïdes, à l’origine d’une lymphopénie périphérique et d’une diminution du nombre de lymphocytes pénétrant dans le système nerveux central. Ce traitement oral (1 comprimé de 0,5 mg/j) diminue la fréquence annualisée des poussées d’environ 55 %, et réduit l’accumulation de handicap associé aux poussées. Les principaux effets secondaires – survenue d’une bradycardie ou plus rarement d’un bloc auriculo-ventriculaire lors de l’instauration du traitement – nécessitent un monitoring cardiaque en milieu hospitalier lors de la première prise du médicament. La survenue potentielle de complications infectieuses, notamment la réactivation de virus du groupe Herpes, justifie un suivi régulier. Le fingolimod peut également être responsable de la survenue d’un œdème maculaire en général au premier trimestre, d’une cytolyse hépatique ou d’une HTA. L’alemtuzumab (Lemtrada) est un anticorps monoclonal humanisé anti-CD52, induisant une déplétion très profonde et prolongée des lymphocytes B et T. Dans les formes rémittentes, il diminue la fréquence des poussées de 55 % par rapport à un comparateur actif, l’interféron bêta. Chez les patients rémittents en échec d’un immunomodulateur, il a aussi démontré une réduction de la progression du handicap comparativement à Rebif. Il a obtenu une AMM européenne dans les formes actives de SEP rémittentes, mais son utilisation actuelle est restreinte à la réalisation de protocoles de phase IV ou à des demandes d’importation. Des effets secondaires parfois graves (purpura thombopénique, thyroïdites fréquentes, syndrome de Goodpasture) ont été signalés. • tome 137 | n° 3 | mars 2015 étape 2 Sclérose en plaques 1 2 3 Prendre en charge les symptômes dès le début de la maladie Dr Hélène Zéphir ([email protected]), université de Lille, clinique neurologique, hôpital Roger-Salengro, CHRU de Lille La prise en charge symptomatique est primordiale dès le début de la sclérose en plaques (SEP). Si le traitement de fond a pour but de limiter l’accumulation des lésions et donc de limiter le handicap, les séquelles acquises dès les premières manifestations de la maladie doivent être entendues, recherchées et dans la mesure du possible expliquées, soulagées et accompagnées. Il faut souligner qu’avant de considérer l’aggravation d’un symptôme préexistant comme une possible poussée de la maladie, il convient de rechercher toute « épine irritative » à cette aggravation (constipation, infection virale ou bactérienne, et notamment infection urinaire, escarre, déshydratation, hyperthermie, etc.). L e recours à une équipe pluridisciplinaire formée à la prise en charge de la SEP et à son handicap permettra une meilleure organisation des soins : kinésithérapeute, médecin rééducateur fonctionnel, urologue, psychologue, neuropsychologue, orthophoniste. Nous n’aborderons pas ici les troubles neuro-urologiques ni les troubles cognitifs traités ailleurs dans ce dossier (voir pp. XX). Spasticité : kinésithérapie, antispasmodiques, voire chirurgie Par définition, la spasticité s’exprime sur les muscles antigravidiques (extenseurs aux membres inférieurs et fléchisseurs aux membres supérieurs) et s’exacerbe avec la répétition du mouvement. Elle est responsable de raideur, de spasmes et de douleurs. La kinésithérapie est la clé de la prise en charge via un travail d’étirement nécessairement régulier qui peut être quotidien pour les patients les plus invalidés. Les antispastiques oraux (dantrolène, baclofène) doivent être instaurés progressivement pour mieux définir la dose efficace antispastique en évitant l’hypotonie et le risque de chute. Le traitement permet surtout de réduire les spasmes. L’association des antispastiques n´a jamais démontré sa supériorité par rapport à l’utilisation d’une seule molécule. La pompe à baclofène posée en intrathécal est discutée lorsque la spasticité difficilement réductible est douloureuse, qu’elle empêche les soins et entrave le confort du patient. Les benzodiazépines peuvent être proposées en raison de leur propriété myorelaxante, mais certaines sont sédatives. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Les injections intramusculaires de toxine botulinique n’ont d’intérêt que lorsque la spasticité est focalisée par exemple sur un muscle adducteur ou un triceps sural, l’indication est posée par un médecin de rééducation fonctionnelle, en général en add-on therapy. Il peut exister un échappement thérapeutique. Les dérivés du cannabis (Sativex) en spray oral seront proposés à une minorité de patients (les plus invalidés) et en add-on therapy, avec une période initiale de titration (encadré 1). Dans les cas extrêmes de spasticité irréductible avec parfois rétraction tendineuse, il peut être proposé une intervention chirurgicale pour ténotomie. Troubles de la marche : rééducation, fampridine Plus que la marche, le déplacement doit être considéré dans sa globalité. La marche intègre à la fois des 1. Dérivés du cannabis et SEP Sativex a pour composants le delta-9-tétrahydro-cannabidiol (THC) et le cannabidiol (CBD). Les outils de mesure objective de la spasticité, tels que l’échelle d’Ashworth utilisée par la première étude randomisée contrôlée vs placebo et en double aveugle testant Sativex dans la SEP, n’ont pas permis de montrer un effet bénéfique à court terme mais seulement significatif à partir de 27 semaines de traitement(1). Les résultats positifs des études de phase III sur la spasticité sont modestes et portent essentiellement sur l’auto-appréciation subjective du patient(2,3). Rappelons que l’étude évaluant Sativex dans la prise en charge de la douleur est négative(4), et que son intérêt dans la prise en charge de l’incontinence urinaire dans la SEP reste incertaine(5). Déjà disponible dans certains pays d’Europe, ce médicament est attendu en France pour 2015, mais ne sera proposé vraisemblablement qu’en add-on therapy à d’autres antispastiques. Une période d’essai et d’évaluation sur quatre semaines avec titration sera nécessaire avant de poursuivre ou non le traitement. Les effets indésirables portent essentiellement sur l’effet sédatif, les fonctions cognitives et les difficultés de concentration. LE CONCOURS MéDICAL | 17 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques La marche est un des paramètres majeurs de l’évaluation de la SEP dimensions de motricité pure mais aussi d’équilibre et de capacités sensitives, notamment proprioceptives. La marche est l’un des paramètres majeurs d’évaluation physique dans la maladie. Son altération passe par la réduction du périmètre de marche et/ ou la nécessité d’une aide au déplacement (canne, béquilles, aide humaine, déambulateur). Il est souvent difficile psychologiquement pour le patient d’accéder à l’ensemble des outillages qui peut lui permettre un meilleur déplacement et donc une meilleure autonomie sans y voir forcément une progression dans la maladie. La problématique du déplacement peut être facilitée grâce à l’approche fonctionnelle des équipes de rééducation. La fampridine (4-aminopyridine) agit sur les canaux potassiques voltage-dépendants (potassium-bloqueurs), ce qui permet de prolonger le potentiel d’action moteur musculaire. Il s’agit d’un traitement symptomatique oral qui a démontré son efficacité pour améliorer la marche dans deux études de phase III(6,7) [encadré 2]. Constipation : petits moyens, parfois moyens extrêmes Il s’agit d’un symptôme fréquent qui peut être aggravé par l’immobilité des patients les plus invalidés. 2. Fampridine et troubles de la marche dans la SEP Les études rapportent chez les répondeurs (40 % des patients quelle que soit la forme avec un score EDSS entre 4 et 7), une amélioration de la vitesse de marche de 25 à 30 % (test des 25 pieds, soit environ 8 m). Cependant, ce traitement symptomatique n’empêche en aucun cas l’évolution de la maladie et donc du handicap. Il doit être prescrit par un neurologue, et une évaluation de son efficacité sur la vitesse de marche est nécessaire pour le poursuivre au-delà de 15 jours. La fampridine est contre-indiquée dans les troubles du rythme cardiaque, en cas d’insuffisance rénale et en cas de comitialité. Par ailleurs, quelques interactions médicamenteuses sont possibles, notamment avec la cimétidine, l’amantadine et les bêtabloquants. 18 | LE CONCOURS MéDICAL Le fécalome est une éventualité classique dans la prise en charge de la maladie. Les conseils pour une alimentation fibreuse et une hydratation suffisante sont primordiaux mais pas toujours faciles à mettre en œuvre chez des patients qui craignent de voir favoriser leurs troubles urinaires. Les laxatifs osmotiques sont de prise orale régulière aisée. Lorsque la constipation est opiniâtre, il peut être proposé un système de lavement colique à l’eau tiède (Peristeen ; prescription par un gastroentérologue ou par un médecin de rééducation fonctionnelle). Dans les cas extrêmes, un mitrofanoff peut être proposé (pour des lavements coliques hauts réguliers), ou parfois une colostomie définitive. La rétention fécale peut s’accompagner d’impériosités anales et de fuites fécales. Outre des laxatifs osmotiques, il peut être conseillé d’utiliser des suppositoires d’Eductyl ou des lavements intrarectaux pour favoriser la vidange rectale et prévenir les fuites. Si les fuites fécales sont rebelles et liquidiennes, il est possible de proposer de la cholestyramine (Questran) pour mouler les selles. Il faut se méfier des diarrhées appelées « fausses diarrhées de constipation », dues à la liquéfaction du bout distal du fécalome et qui doivent amener à mieux gérer la constipation et non à donner des antidiarrhéiques. Fatigue : aucun médicament n’a fait la preuve de son efficacité Il s’agit d’une des principales plaintes des patients (90 % d’entre eux) dès le début de la maladie, mais les mécanismes ne sont pas vraiment éclaircis. L’évaluation n’est pas aisée, et il faut prendre en compte et gérer les facteurs confondants que sont la dépression, l’anxiété et les facteurs iatrogènes ainsi que l’ensemble des « épines irritatives » qui peuvent l’aggraver. La fatigue physique peut être associée à un déconditionnement, et la prise en charge kinésithérapique peut être bénéfique, associée à un reconditionnement à l’effort pour les patients les plus valides. De nombreuses molécules ont été testées (amantadine, aspirine, 3,4-aminopyridine, modafinil), mais aucune n’est validée efficace (8-11). Certains patients peuvent être particulièrement sensibles à l’hyperthermie (infection, chaleur, déshydratation : c’est le phénomène d’Uhthoff). La gestion de la cause du phénomène permet l’amélioration clinique du patient. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques Troubles sensitifs : instauration progressive de divers traitements antalgiques Ils sont particulièrement fréquents (50 à 70 % des patients selon les séries) et peuvent se présenter sous la forme de troubles proprioceptifs (sensation d’étau, d’eau qui coule…) ou de troubles plus rarement nociceptifs (brûlures, piqûres). Là encore, leur exacerbation doit faire rechercher et gérer « l’épine irritative ». La prise en charge de ces sensations (paresthésies, dysesthésies) n’est pas différente de celle des douleurs dites neuropathiques. Il est classique d’utiliser les molécules antiépileptiques comme la gabapentine, la prégabaline. Certains antidépresseurs (amitriptyline, duloxétine) sont également proposés dans les douleurs chroniques. Les phénomènes douloureux paroxystiques peuvent justifier de benzodiazépines. L’instauration de ces différents antalgiques doit être progressive, et les patients doivent être prévenus des effets indésirables notamment sédatifs. Les névralgies du trijumeau sont traitées de la même façon que la névralgie essentielle du trijumeau, le traitement de fond de première intention étant la carbamazépine. Lorsque la prise en charge médicamenteuse de cette névralgie n’est pas suffisante, une thermocoagulation neurochirurgicale du noyau du V peut être proposée(12). Si le premier épisode de névralgie du V peut être considéré comme une poussée de la maladie, cette névralgie évolue ensuite indépendamment, et la prise en charge est donc centrée sur l’antalgie. Dépression : soutien psychothérapeutique, voire antidépresseurs Plus fréquente que dans d’autres pathologies neurologiques chroniques, la dépression est décrite chez 50 à 70 % des patients, avec un taux de suicide 2,3 fois plus élevé que dans la population générale. La dépression dans la SEP survient en général sur un mode anxieux et retentit sur la qualité de vie, les interactions sociales et professionnelles. Si la dépression n’est pas décrite en relation avec le handicap ou la charge lésionnelle, deux moments difficiles sont décrits en rapport avec la maladie : le diagnostic et la mise en route du traitement. Ces deux moments n’en font souvent plus qu’un en raison des moyens plus rapides de diagnostic mais aussi de la nécessité d’un traitement précoce, parfois dès le premier événement. Un soutien psychothérapique peut s’avérer nécessaire ainsi que tome 137 | n° 3 | mars 2015 l’introduction d’antidépresseurs (habituellement, des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine). Enfin, les interférons bêta ne créent pas la dépression et ils ne sont pas contre-indiqués chez un patient aux antécédents de mélancolie ou de tentatives de suicide, mais il est préconisé de les introduire dans une situation « thymiquement » favorable et stable. Syndrome cérébelleux : kinésithérapie, ergothérapie, neurostimulation parfois Outre l’ataxie et l’hypotonie, la gêne présentée par le patient concerne la dysmétrie dans les gestes avec parfois des tremblements volitionnels empêchant toute préhension. Aucun médicament n’a montré son efficacité pour gérer ces difficultés physiques. La seule approche initiale est une prise en charge kinésithérapique et rééducationnelle ergothérapique pour améliorer le geste, contrer l’hypotonie axiale et prévenir la chute. Lorsque le tremblement volitionnel des membres supérieurs est particulièrement invalidant, l’intérêt d’une neurostimulation des noyaux thalamiques(13) peut être discuté avec le neurochirurgien. Ce geste, dont l’efficacité reste encore débattue, ne sera décidé qu’en fonction de la charge lésionnelle du patient, de l’hypotonie sous-jacente. Troubles de la déglutition : rééducation orthophonique puis stomie Ils peuvent être d’origine bulbaire ou pseudobulbaire et sont en rapport direct avec le pronostic vital de la maladie. Leur approche doit être abordée suffisamment précocement pour prévenir le risque de dénutrition, de pneumopathie d’inhalation et de mort subite. Initialement, une rééducation orthophonique peut être proposée afin de préciser et renforcer les postures en situation de prise alimentaire ou de boissons mais aussi de conseiller sur les textures alimentaires. Lorsque la situation est associée aux complications sus-citées, il faut aborder l’intérêt de la jéjunostomie ou de la gastrostomie garantissant aisément les apports journaliers caloriques et hydriques mais aussi médicamenteux. Le geste est réalisé de façon chirurgicale et n’empêche pas la poursuite d’une alimentation orale appelée « plaisir » dont le patient et l’entourage doivent comprendre le caractère nécessairement restreint. • L’auteure déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour l’entreprise Bayer, Biogenidec, Novartis, Merck, Sanofi, Genzyme, Teva et avoir été prise en charge (transport, hôtel, repas), à l’occasion de déplacement pour congrès, par ces mêmes entreprises. 1. Zajicek JP, Sanders HP, Wright DE, et al. Cannabinoids in multiple sclerosis (CAMS) study: safety and efficacy data for 12 months follow up. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2005;76(12):1664-9. 2. Collin C, Davies P, Mutiboko IK, et al. Sativex Spasticity in MS Study Group. Randomized controlled trial of cannabis-based medicine in spasticity caused by multiple sclerosis. Eur J Neurol 2007;14(3):290-6. 3. Novotna A, Mares J, Ratcliffe S, et al. Sativex Spasticity Study Group. A randomized, double-blind, placebocontrolled, parallel-group, enricheddesign study of nabiximols* (Sativex(®)), as add-on therapy, in subjects with refractory spasticity caused by multiple sclerosis. Eur J Neurol 2011;18(9):1122-31. 4. Langford RM, Mares J, Novotna A, et al. A double-blind, randomized, placebo-controlled, parallel-group study of THC/CBD oromucosal spray in combination with the existing treatment regimen, in the relief of central neuropathic pain in patients with multiple sclerosis. J Neurol 2013;260(4):984-97. 5. Freeman RM, Adekanmi O, Waterfield MR, et al. The effect of cannabis on urge incontinence in patients with multiple sclerosis: a multicentre, randomised placebocontrolled trial (CAMS-LUTS). Int Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct 2006;17(6):636-41. 6. Goodman AD, Brown TR, Krupp LB, et al.. Sustained-release oral fampridine in multiple sclerosis: a randomised, doubleblind, controlled trial. Lancet 2009;373(9665):732-8. 7. Goodman AD, Brown TR, Edwards KR, et al. A phase 3 trial of extended release oral dalfampridine in multiple sclerosis. Ann Neurol 2010;68(4):494-502. 8. Rosenberg GA, Appenzeller O. Amantadine, fatigue, and multiple sclerosis. Arch Neurol 1988;45(10):1104-6. 9. Sheean GL, Murray NM, Rothwell JC, et al. An open-labelled clinical and electrophysiological study of 3,4 diaminopyridine in the treatment of fatigue in multiple sclerosis. Brain 1998;121(Pt 5):967-75. 10. Weinshenker BG, Penman M, Bass B, et al. A double-blind, randomized, crossover trial of pemoline in fatigue associated with multiple sclerosis. Neurology 1992;42(8):1468-71. 11. Stankoff B, Waubant E, Confavreux C, et al. Modafinil for fatigue in MS: a randomized placebo-controlled double-blind study. Neurology 2005;64(7):113943. 12. Berk C, Constantoyannis C, Honey CR. The treatment of trigeminal neuralgia in patients with multiple sclerosis using percutaneous radiofrequency rhizotomy. Can J Neurol Sci 2003;30(3):220-3. 13. Ayache SS, Ahdab R, Neves DO, et al. Thalamic stimulation restores defective cerebellocortical inhibition in multiple sclerosis tremor. Mov Disord 2009;24(3):467-9. LE CONCOURS MéDICAL | 19 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS étape 2 Sclérose en plaques Troubles vésico-sphinctériens : importance de l’évaluation de 1re ligne Pr Gérard Amarenco ([email protected]), AP-HP, service de neuro-urologie, hôpital Tenon, Paris Les troubles vésico-sphinctériens sont fréquents au cours de la sclérose en plaques (SEP), atteignant près de 80 % des patients. Révélateurs de la maladie dans 6 % des cas, ils engagent toujours le pronostic fonctionnel et majorent le handicap social et/ou psychologique déjà souvent important. Plus rarement, le pronostic vital est en jeu en raison du risque potentiel de dégradation uronéphrologique. Si la compréhension exacte de leur mécanisme physiopathologique repose sur les explorations urodynamiques, souvent une simple évaluation de première ligne permet d’éliminer des conditions qui nécessiteraient un avis spécialisé et d’instaurer un traitement améliorant, dans la majorité des cas, la qualité de vie des patients. L es troubles vésico-sphinctériens au cours de la SEP sont d’un extrême polymorphisme en raison du caractère multifocal des lésions de démyélinisation et de l’évolution par poussées successives, de l’existence conjointe ou secondaire d’une atteinte urologique, et enfin de l’existence possible « d’épines irritatives » (escarres, fécalome, lithiase vésicale ou rénale). Détrusor hyperactif le plus souvent Les troubles urinaires sont d’autant plus prononcés que le syndrome pyramidal des membres inférieurs est important. Les signes irritatifs à type d’hyperactivité vésicale dominent la symptomatologie (80 % des cas) : impériosité, pollakiurie, incontinence par impériosité, nycturie. Algorithme FLUE-MS permettant une évaluation et un traitement de première ligne au cours de la sclérose en plaques V1 Dépistage drapeaux rouges UTI ≥ 3/an ou fébrile Douleurs lombaires per-mictionnelles Chimiothérapie, EDSS ≥ 6 Homme ≥ 55 ans Écho anormale : lithiase / diverticules vessie / dilatation haut appareil / RPM ≥ 100 mL Prescription écho VR Évaluation gène urinaire V2 Gènes impériosté et dysurie < 1 Écho normale et RPM < 100 mL Gène impériosté ≥ 1 Suivi à 6 mois Gène dysurie ≥ 1 Traitement a-bloquant (3 mois) Gène dysurie ≥ 1 V3 Traitement anticholinergique (3 mois) Écho PM Gène impériosté Gène dysurie < 1 Écho PM ≥ 100 Gène impériosté < 1 Écho PM < 100 Gène ≥ 1 Consultation spécialisée de neuro-urologie avec recueil sur 3 jours (horaire des mictions et fuites éventuelles/urée, créatinine) V1 : première consultation ; V2 : deuxième consultation ; V3 : troisième consultation ; écho VR : échographie vésico-rénale ; UTI : infections urinaires ; RPM : résidu post-mictionnel 20 | LE CONCOURS MéDICAL tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques Ces signes sont le plus souvent secondaires à un détrusor hyperactif. La dysurie et la rétention sont moins fréquentes (20 %) et sont le fait d’une hypoactivité détrusorienne ou d’une dyssynergie vésico-sphinctérienne. Ces divers signes peuvent être associés entre eux et s’accompagner de troubles anorectaux (dyschésie, incontinence fécale) et génito-sexuels (hypo-érection, troubles de l’éjaculation, hypo-orgasmie) en raison de la proximité anatomique des centres de contrôle neurologique de ces différentes fonctions. Les explorations urodynamiques permettent de préciser le mécanisme physiopathologique des troubles. La cystomanométrie met le plus souvent en évidence (50 à 80 % des cas) une hyperactivité détrusorienne, le détrusor n’étant hypoactif que dans 20 % des observations. Cette hyperactivité vésicale est souvent corrélée à l’existence d’un syndrome pyramidal bilatéral. Une dyssynergie est mise en évidence dans 50 à 80 % des vessies hyperactives et dans près de 100 % des cas de dysurie-rétention. Cette dyssynergie, dont la présence est bien corrélée à l’existence d’une spasticité périnéale et/ou d’un signe de Babinski, constitue un facteur de risque potentiel de dégradation vésicale, voire du haut appareil (reflux vésico-rénal, diverticules, infections hautes ou basses). Stratégie de première ligne au cours des troubles urinaires de la SEP : bien codifiée Cette stratégie de première ligne (FLUE MS) a fait l’objet très récemment d’un travail collaboratif et d’une validation (figure). La première étape consiste à éliminer des conditions qui doivent impérativement faire référer le patient dans un service spécialisé en raison de la complexité et de la spécificité de l’évaluation et de la prise en charge : infections urinaires fréquentes ou fébriles, douleurs lombaires per-mictionnelles, chimiothérapie, score EDSS > 6, homme de plus de 55 ans. La prescription de l’échographie vésico-rénale est indispensable permettant d’éliminer résidu post-mictionnel ou altérations vésico-rénales, conduisant là encore à référer le patient. Si ces conditions ne sont pas présentes et si la gêne évaluée très simplement par l’UBQMS (encadré) est significative, un traitement d’épreuve par anticholinergique est recommandé tome 137 | n° 3 | mars 2015 Évaluation de la gêne par le questionnaire UBQMS au cours de la sclérose en plaques 1. Gène concernant l’hyperactivité vésicale 2. Gène concernant la dysurie Êtes-vous gêné dans votre vie quotidienne par des besoins urgents d’uriner ou par des fuites d’urines précédées d’un besoin impérieux d’uriner ? 0 : pas du tout 1 : un peu 2 : beaucoup 3 : énormément Êtes-vous gêné dans votre vie quotidienne par la nécessité de pousser pour uriner, par le sentiment de mal vider la vessie ou par le temps trop long que vous mettez à vider la vessie ? 0 : pas du tout 1 : un peu 2 : beaucoup 3 : énormément en cas d’hyperactivité vésicale et un traitement alphabloquant en cas de dysurie. En cas de persistance des troubles, le patient est alors référé en centre spécialisé pour discussion d’injection de toxine botulique intradétrusorienne ou de neuromodulation par électrostimulation du nerf tibial en cas d’hyperactivité vésicale et d’instauration d’autosondages en cas de dysurie avec rétention. L’utilisation de desmopressine est aussi possible en cas de nycturie par son action de diminution de la diurèse. En cas d’échec se discutent ensuite des techniques chirurgicales (entérocystoplastie d’agrandissement, neuromodulation S3). Les troubles urinaires participent au multi-handicap de la SEP. Leur prise en charge est désormais devenue très efficace dans la majorité des cas. Un traitement de première ligne est toujours possible après une simple évaluation. • L’auteur déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour l’entreprise Astellas, Rotapharm, Pfizer et avoir été pris en charge (transport, hôtel, repas), à l’occasion de déplacement pour congrès par Wellspect, Coloplast, Allergan. 1. Amarenco G, Chartier-Kastler E, Denys P, et al. First-line urological evaluation in multiple sclerosis: validation of a specific decision-making algorithm. Mult Scler 2013;19(14):1931-7. 2. Andersen J, Bradley W. Abnormalities of detrusor and sphincter function in multiple sclerosis. Br. Journal of Urol 1976;48:193-8. 3. Blaivas J, BhimanI G, Labib K. Vesico-urethral dysfunction in multiple sclerosis. J Urol 1979;122:342-7. 4. Fowler C, Kerrebroeck P, Nordembo A, et al. Treatment of lower urinary tract dysfunction in patients with multiple sclerosis. Journal of Neurology, Neurosurgery and Psychiatry 1992;55:986-9. 5. Sirls L, Zimmern P, Leach G. Role of limited evaluation and agressive medical management in multiple sclerosis: a review of 113 patients. J Urol 1994;151:946-50. 6. Summers J. Neurogenic bladder in the women with multiple sclerosis. J Urol 1978;120:555-6. LE CONCOURS MéDICAL | 21 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS étape 2 Sclérose en plaques Troubles cognitifs : possibles dès les stades initiaux Pr Bruno Brochet ([email protected]), Dr Aurélie Ruet, service de neurologie, CHU de Bordeaux L’atteinte cognitive est fréquente dans la sclérose en plaques (SEP)[1]. Elle peut être présente dès les stades initiaux de la maladie, syndrome radiologiquement isolé(2), syndrome cliniquement isolé (SCI)[3], formes rémittentes débutantes et formes progressives primaires. Globalement, sa fréquence est estimée selon les stades entre 25 et 80 %, selon les définitions retenues (figure). Elle est plus fréquente et sévère dans les formes progressives primaires que dans les formes rémittentes(4), avec une fréquence maximale dans les formes progressives secondaires(5). Elle concerne plusieurs domaines cognitifs(1). L’ atteinte la plus fréquente est celle de la vitesse de traitement de l’information qui prédomine largement dans les stades précoces et dont le ralentissement peut avoir des conséquences sur les performances dans certains domaines spécifiques, comme la mémoire épisodique, l’attention et les fonctions exécutives. Plus la maladie est évoluée plus des atteintes spécifiques sont observées pour la mémoire épisodique verbale et visuo-spatiale, la mémoire de travail et les fonctions exécutives(1, 4). L’atteinte spécifique de l’attention semble en revanche plus rare(4, 6). Fréquence de l’atteinte cognitive pour au moins un, deux ou trois domaines cognitifs dans un échantillon de 98 patients atteints de SEP comparés à 416 sujets sains appariés en fonction de l’âge, du sexe et du niveau d’éducation. Méthodologie détaillée in (4) 80 % % (n = 98) 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 % Un niveau éducatif plus élevé ou un entraînement cognitif régulier peut contribuer à limiter les troubles cognitifs par la constitution d’une réserve cognitive(7, 8). La précocité des troubles a une valeur pronostique péjorative certaine Les troubles cognitifs ont un retentissement notable sur la vie quotidienne (6). Dès les stades précoces de la maladie, ils retentissent sur la qualité de vie liée à la santé, indépendamment des troubles moteurs(9). En particulier, le ralentissement de la vitesse de traitement de l’information est responsable de difficultés professionnelles et parfois de perte d’emploi, indépendamment des troubles moteurs, dès le début de la maladie(9, 10). Plus que la charge lésionnelle et l’atrophie cérébrale, la présence de troubles cognitifs au début de la maladie reflète l’existence d’une atteinte tissulaire diffuse extralésionnelle cérébrale(11, 12). À un stade plus avancé, ils sont corrélés à l’atrophie cérébrale corticale et profonde(13, 14). Cette corrélation avec le dommage tissulaire diffus explique probablement la valeur pronostique péjorative de la présence d’un déficit cognitif précoce. En effet, au début de la forme rémittente, il est prédictif d’une aggravation motrice dans les années à venir(15). L’évaluation doit être précoce et fondée sur des tests neuropsychologiques 0 au moins 1 domaine 22 | LE CONCOURS MéDICAL au moins 2 domaines au moins 3 domaines Repérer les déficits cognitifs est important dès le début de la maladie dans le cadre de tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques l’évaluation du pronostic de la maladie et pour proposer des prises en charge afin d’en limiter les conséquences. La plainte cognitive du patient ou les autoquestionnaires de symptômes cognitifs(16, 17) ne sont pas fiables pour dépister une atteinte cognitive. Les plaintes cognitives sont mieux corrélées aux scores de dépression qu’aux résultats des tests cognitifs. L’évaluation cognitive doit reposer sur la réalisation de tests neuropsychologiques. Plusieurs batteries de tests cognitifs ont été proposées. La Brief Repeatable Battery (BRB)[6] et la Minimal Assessment of Cognitive Function in Multiple Sclerosis (MACFIMS)[18] évaluent la vitesse de traitement de l’information, la mémoire épisodique, la mémoire de travail et plus ou moins les fonctions exécutives. Elles requièrent entre 30 minutes et une heure d’administration par un neuropsychologue. Une batterie d’évaluation courte, la Brief International Cognitive Assessment for Multiple Sclerosis (BICAMS)[19], d’une durée de 15 minutes, a été proposée pour réaliser une évaluation minimale de la vitesse de traitement et de la mémoire, réalisable plus facilement en routine. La BICAMS comprend le Symbol Digit Modalities Test (SDMT), test de vitesse de traitement, les 5 premiers essais du California Verbal Learning test-II, test d’apprentissage verbal, et les 3 premiers essais du Brief Visual Memory Test-revised (BVMT-R). Le SDMT est le test le plus fréquemment perturbé dans la plupart des études, et il a été proposé comme tests de screening(17) car il permet de repérer plus de 80 % des patients atteints de troubles cognitifs. Une évaluation ne peut cependant se résumer à un test. La plupart des tests ont un important effet de pratique (test-retest) qui en rend l’utilisation répétée parfois difficile. Pour limiter cette difficulté, un test informatisé de vitesse de traitement proche du SDMT mais avec moins d’effet d’apprentissage a été validé en français, le Computerized Speed Cognitive Test (CSCT)[20]. tome 137 | n° 3 | mars 2015 1 2 3 L’espoir de la rééducation cognitive Il existe quelques données montrant que certains traitements de fond comme l’interféron et le natalizumab ont un effet positif pour limiter les troubles cognitifs(21). En revanche, à ce jour, aucun traitement symptomatique n’a montré son efficacité sur le long terme(21). La rééducation cognitive est un domaine en plein essor dans la SEP. Après un certain nombre d’études de méthodologie insuffisante(22), des études bien conduites sont réalisées, montrant un effet sur l’activation cérébrale en imagerie fonctionnelle(23) ou un effet clinique notamment sur la mémoire(24). D’autres études prometteuses sont en cours. • Les auteurs déclarent… 1. Brochet B. Prevalence, profile and functional impact of cognitive impairment in multiple sclerosis. In Cognitive Impairment in Multiple Sclerosis, Amato MP (Elsevier) Milano, 2011; pp. 1-8. 2. Lebrun C, Blanc F, Brassat D, et al. CFSEP. Cognitive function in radiologically isolated syndrome. Mult Scler 2010;16:919-25. 3. Reuter F, Zaaraoui W, Crespy L, et al. Frequency of cognitive impairment dramatically increases during the first 5 years of multiple sclerosis. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2011;82:1157-9. 4. Ruet A, Deloire M, Charré-Morin J, et al. Cognitive impairment differs between primary progressive and relapsing-remitting MS. Neurology 2013;80:1501-8. 5. Huijbregts SC, Kalkers NF, de Sonneville LM, et al. Differences in cognitive impairment of relapsing remitting, secondary, and primary progressive MS. Neurology 2004;27;63:335-9. 6. Rao SM, Leo GJ, Bernardin L, et al. Cognitive dysfunction in multiple sclerosis. I. Frequency, patterns, and prediction. Neurology 1991;41(5): 685-91. 7. Bonnet MC, Deloire MS, Salort E, et al; AQUISEP Study Group. Evidence of cognitive compensation associated with educational level in early relapsing-remitting multiple sclerosis. J Neurol Sci 2006;251:23-8. 8. Sumowski JF, Wylie GR, Chiaravalloti N, et al. Intellectual enrichment lessens the effect of brain atrophy on learning and memory in MS. Neurology 2010;74:1942-5. 9. Ruet A, Deloire M, Hamel D, et al. Cognitive impairment, health-related quality of life and vocational status at early stages of multiple sclerosis: a 7-year longitudinal study. J Neurol 2013;260:776-84. 10. Morrow SA, Drake A, Zivadinov R, et al. Predicting loss of employment over three years in multiple sclerosis: clinically meaningful cognitive decline. Clin Neuropsychol 2010;24:1131-45. 11. Deloire MS, Salort E, Bonnet M, et al. Cognitive impairment as marker of diffuse brain abnormalities in early relapsing remitting multiple sclerosis. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2005;76:519-26. 12. Deloire MS, Ruet A, Hamel D, et al. MRI predictors of cognitive outcome in early multiple sclerosis. Neurology 2011;76:1161-7. 13. Calabrese M, Agosta F, Rinaldi F, et al. Cortical Lesions and Atrophy Associated With Cognitive Impairment in Relapsing-Remitting Multiple Sclerosis. Arch Neurol 2009;66:1144-50. 14. Benedict RH, Bruce JM, Dwyer MG, et al. Neocortical atrophy, third ventricular width, and cognitive dysfunction in multiple sclerosis. ArchNeurol 2006;63:1301-6. 15. Deloire M, Ruet A, Hamel D, et al. Early cognitive impairment in multiple sclerosis predicts disability outcome several years later. Mult Scler 2010;16:581-7. 16. Benedict RH, Munschauer F, Linn R, et al. Screening for multiple sclerosis cognitive impairment using a self-administered 15-item questionnaire. Mult Scler 2003;9:95-101. 17. Deloire MS, Bonnet MC, Salort E, et al. How to detect cognitive dysfunction at early stages of multiple sclerosis? Mult Scler 2006;12:445-52. 18. Benedict RH, Cookfair D, Gavett R, et al. Validity of the minimal assessment of cognitive function in multiple sclerosis (MACFIMS). J Int Neuropsychol Soc 2006;12:549-58. 19. Langdon DW, Amato MP, Boringa J, et al. Recommendations for a Brief International Cognitive Assessment for Multiple Sclerosis (BICAMS). Mult Scler 2012;18:891-8. 20. Ruet A, Deloire MS, Charré-Morin J, et al. A new computerised cognitive test for the detection of information processing speed impairment in multiple sclerosis. Mult Scle 2013;19:1665-72. 21. Amato MP, Langdon D, Montalban X, et al. Treatment of cognitive impairment in multiple sclerosis: position paper. J Neurol 2013;260:1452-68. 22. O’Brien AR, Chiaravalloti N, Goverover Y, et al Evidenced-based cognitive rehabilitation for persons with multiple sclerosis: a review of the literature. Arch Phys Med Rehabil 2008;89:761-9. 23. Sastre-Garriga J, Alonso J, Renom M, et al. A functional magnetic resonance proof of concept pilot trial of cognitive rehabilitation in multiple sclerosis. Mult Scler 2011;17:457-67. 24. Chiaravalloti ND, Moore NB, Nikelshpur OM, et al. An RCT to treat learning impairment in multiple sclerosis: The MEMREHAB trial. Neurology 2013;81:2066-72. LE CONCOURS MéDICAL | 23 { PARCOURS DE SOINS étape 2 Sclérose en plaques Éducation thérapeutique : « mieux vivre avec la maladie » Marie-Hélène Colpaert ([email protected]), cadre de soins, département des maladies du système nerveux, groupe hospitalier La Pitié-Salpêtrière, Paris Maladie chronique du système nerveux, touchant le plus souvent des sujets jeunes, la sclérose en plaques (SEP) est l’une des pathologies dans lesquelles l’éducation thérapeutique (ETP) a une place essentielle, en tant qu’aide pour mieux vivre avec la maladie. Initialement, cette démarche permet au patient de commencer à « apprivoiser » sa maladie car, dans les phases précoces, il est tout aussi important pour lui de pouvoir communiquer sur sa maladie que d’acquérir des connaissances. P ar la suite, en optimisant les connaissances sur la SEP, qu’il s’agisse des symptômes de la maladie, des différentes modalités évolutives, des traitements…, l’ETP a pour objectif de rendre le patient acteur de sa prise en charge. S’approprier la maladie et son traitement L’ETP permet ainsi de répondre aux très nombreuses interrogations du patient et de ses proches (par exemple : « Qu’est-ce qu’une poussée ? ; dois-je consulter en urgence en cas de poussée, à qui m’adresser ? Que dire à mes proches, à mon entourage professionnel ? Quelles sont les options thérapeutiques ? »). Cette appropriation de la maladie par le patient permet souvent de faciliter la vie quotidienne, notamment les relations avec l’environnement socio-professionnel et familial, et ainsi de préserver ou d’améliorer la qualité de vie. La prescription d’un traitement de fond, injectable ou non, est parfois difficile pour les patients, le plus souvent encore très autonomes lors de cette initiation, et qui peuvent vivre cette proposition thérapeutique comme un signe d’aggravation. La première étape est donc l’acceptation du principe du traitement, suivie (et associée) au choix de celui-ci. L’objectif est de favoriser l’adhésion au traitement, en sachant qu’une rupture d’observance Le patient doit pouvoir choisir parmi les traitements proposé par le neurologue 24 | LE CONCOURS MéDICAL des traitements de fond survient en moyenne dans 20 à 45 % des cas dans les deux ans qui suivent le début de celui-ci. Il ne s’agit donc pas simplement de former le patient à l’auto-injection, car il est démontré qu’un patient formé, informé et éduqué est plus observant que celui qui n’aurait pas pu bénéficier de ce type de prise en charge. Pour ce faire, il est impératif de favoriser l’écoute et la formulation tant des émotions que des questionnements divers et variés ; le patient n’étant pas considéré comme un élève à qui l’on donne une liste de recommandations et d’interdits. Placé en condition d’acteur actif et grâce aux connaissances qu’il acquiert, le patient prend le pouvoir de décider de commencer son traitement et souvent de le choisir parmi ceux proposés par son neurologue référent afin de l’inclure dans sa vie socioprofessionnelle. Le programme MOTIV SEP de la clinique de la sclérose en plaques de La Salpêtrière Environ 6 000 patients atteints de SEP sont suivis dans le département des maladies du système nerveux (environ un tiers des patients viennent pour un second avis et seront ensuite suivis par une autre équipe de neurologie, et deux tiers des patients sont suivis régulièrement dans le service). Ces patients sont soit des « première fois », avec la problématique de l’annonce diagnostique (voir article p. X) ; soit des « initiations ou des changements de traitements », soit des suivis (habituellement semestriels). Description du programme MOTIV SEP Le programme d’information et d’ETP a vu le jour en 2005. Il a été construit sur un modèle utilisé alors pour les patients atteints d’une infection tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Initialement ciblé sur les initiations de traitement (chaque année, environ 400 patients sont mis sous traitement de fond de première intention), il s’est rapidement élargi avec l’objectif d’une approche globale de la pathologie. Ainsi, le programme intègre les composantes cognitives, émotionnelles, comportementales et sociales qui permettent une approche centrée sur la personne afin de favoriser le « mieux-vivre avec la maladie , d’anticiper et de réduire les obstacles de l’observance. Validé par l’ARS, le programme MOTIV SEP est proposé dans le département MSN pour tout patient non hospitalisé débutant un traitement de fond ou désireux de se familiariser avec la maladie. La prise en charge proposée s’appuie sur des concepts fondamentaux de l’ETP, les textes et définitions de l’OMS ainsi que les textes règlementaires régissant la profession infirmière. Le programme répond aux directives de la circulaire DHOS/E2/F/ MT2A/2008/236 du 16 juillet 2008 relative au financement de la mission d’intérêt général (MIG) « Actions de prévention et d’éducation thérapeutique relatives aux maladies chroniques » et portant sur la mise en place d’un suivi de l’activité d’ETP dans les établissements de santé. Le programme est coordonné par un cadre de soins ayant bénéficié d’une formation en ETP de 40 heures au minimum et animé par une équipe pluridisciplinaire. Il est prolongé par un suivi paramédical par le biais de rendez-vous en consultation ou d’un suivi téléphonique. Structuré en sessions successives (encadré), et organisé en séances collectives ou individuelles, MOTIV SEP se déroule sur trois jours : deux jours consécutifs, puis une journée environ six semaines plus tard. Les groupes sont constitués de 8 patients et sont ouverts aux proches (nous conseillons aux patients de venir avec une personne de leur entourage quotidien, familial ou amical). L’équipe d’ETP est constituée de 5 personnes : une infirmière cadre de soins (coordinatrice), une infirmière référente, une neurologue, une psychologue, une assistante sociale. Chaque session du programme est coanimée par le cadre de santé et l’un des intervenants médical ou paramédical. Après la fin du programme, un suivi paramédical est mis en place, avec appel téléphonique systématique ou rendez-vous à 1 mois, 3 mois, 6 mois et 1 an. Nous remettons aussi aux patients l’adresse courriel du cadre de santé et de l’infirmière. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Modalités d’accès des patients Le plus souvent, c’est le neurologue référent du patient qui lui parle de la possibilité d’être pris en charge dans le programme d’ETP. Cette proposition est généralement (mais pas toujours) faite lors d’une décision d’initiation d’un traitement de fond. À la fin de sa consultation, le neurologue dirige le patient vers le cadre de santé qui le reçoit en entretien, immédiatement ou dans les plus brefs délais pour un entretien motivationnel d’environ 30 minutes. Cet entretien comprend plusieurs étapes : une présentation du programme des trois jours ; le remplissage de la fiche de renseignement individuelle et du dossier éducatif individuel ; un moment d’écoute, de réconfort et de réponses aux questions déjà très nombreuses. Le patient repart en ayant ou non donné son accord pour participer aux réunions. En effet, très souvent, l’annonce de débuter un traitement le bouleverse ; il pense que sa maladie évolue, il est sous le choc de la nouvelle et a parfois besoin de réfléchir. Il dispose des numéros de téléphone qui lui permettront d’appeler pour donner son accord dès qu’il aura pris sa décision. Nouvelles compétences, nouvelles relations Sessions du programme MOTIV SEP MOTIV SEP/J1 14H00 – 15H30 avec les IDE 9H30 - 10H45 avec les IDE – Présentation croisée – Attentes des participant(e)s en tour de table – Présentation du programme – Test de connaissances 11H – 13H – Exposé par un médecin du service : La Sclérose en Plaques + questions des participant(e)s 13H – 14H Déjeuner – Connaître les symptômes de la SEP (avec outils pédagogiques) – Connaître les différents intervenants auxquels le patient peut faire appel (liste des contacts remise) – Connaître la définition d’une poussée et savoir quoi faire et à qui s’adresser 15H30 – 16H avec kes IDE – Évaluation de la journée en tour de table / Présentation de la journée suivante MOTIV SEP/J2 9H30 - 13H avec les IDE – Présentation par les infirmières de tous les matériels d’injection * manipulation par les participant(e)s des différents « stylos » injecteurs – Débat-discussion en groupe – Anticiper les obstacles à la prise de traitement – Réaliser un planning thérapeutique individualisé – Savoir quoi faire pour réduire les effets secondaires du traitement 14H – 15H – Exploration de degré d’adhésion au traitement (reprise des échelles remplies à la main) 15H – 16H30 avec la psychologue – Identifier le degré de soutien de l’entourage – Comment parler de la maladie et des symptômes ? Avec outils pédagogiques MOTIV SEP/J3 13H30 – 15H30 9H30 - 10H45 – « Depuis que je prends mon traitement, qu’est-ce qui se passe ? » ; vécu de l’injection – « De quoi ai-je besoin ? » – Impact du traitement dans la vie quotidienne. Vécu de l’injection 10H – 12H30 – Vivre avec la fatigue – Réduction du stress – Confort eet qualité de vie 12H30 – 13H30 Déjeuner Les journées du programme MOTIV SEP, riches en émotion et en apprentissage pour tous, soignants et soignés, permettent aux patients et à leurs proches de mieux connaître leur pathologie mais aussi de débuter en confiance le traitement. Pour preuve, quelques mots des patients : « J’avais un sac à dos qui pesait une tonne ; à l’issue de ces trois jours, il est très léger. Face au début de traitement, je m’en faisais une montagne, ces trois jours ont fait de cette montagne un chemin plat tout tracé ». Pour les soignants, ce sont de nouvelles compétences et de nouvelles relations centrées sur le patient et ses besoins d’information qui sont développées. • – Questions Sociales : * Préparation des questions par les participants * Débat-discussion avec une assistante sociale 15H30 – 16H – Ma vie, mes projets : J’ai ma maladie, mais j’ai ausi une vie, des valeurs, des projets 16H – 16H30 – Test de connaissance – Évaluation des jounées par les patients(e)s L’auteure déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. LE CONCOURS MéDICAL | 25 { PARCOURS DE SOINS étape 3 Sclérose en plaques Nouveaux traitements de fond : impact sur l’organisation des soins Dr Élisabeth Maillart ([email protected]), département des maladies du système nerveux, groupe hospitalier La Pitié-Salpêtrière, médecin coordinateur du parcours de soins dans la SEP, IHU-A-ICM, Paris La prise en charge de la sclérose en plaques (SEP) s’est complexifiée ces dernières années du fait de la mise sur le marché de nouveaux traitements de fond ayant permis d’élargir l’arsenal thérapeutique, au prix d’effets secondaires parfois graves. Depuis 2007, avec la commercialisation du natalizumab (Tysabri), l’utilisation de ces traitements, dont l’efficacité et surtout la tolérance doivent être évaluées rigoureusement, a modifié l’articulation de la prise en charge entre ville et hôpital. Cette collaboration à différentes étapes de la prise en charge doit s’inscrire dans le cadre plus large d’un parcours de soins impliquant de multiples acteurs en ville et à l’hôpital, avec au centre le patient atteint d’une SEP. E n cas de situation clinique complexe, le neurologue référent peut solliciter un avis dès l’entrée dans le parcours de soins pour discuter des options thérapeutiques au sein d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) [encadré]. Mais notre propos concerne l’étape suivante du parcours de soins : l’évaluation et l’efficacité de la tolérance des traitements sur les premiers mois puis l’organisation du suivi neurologique sur le moyen et le long terme selon la forme évolutive de la maladie en précisant les modalités de la collaboration ville-hôpital lorsque celle-ci s’impose. SEP et RCP Les modalités des RCP sont précisées par la Haute Autorité de santé (rapport actualisé de la HAS, avril 2014). Ces réunions regroupent, habituellement au sein d’une unité hospitalière spécialisée, plusieurs neurologues et neuroradiologues experts de la SEP. À partir des informations fournies par le neurologue référent, un avis diagnostique et/ou une décision thérapeutique collégiale sont rendus. 26 | LE CONCOURS MéDICAL Suivi de l’efficacité et de la tolérance des traitements au cours des premiers mois L’efficacité et la tolérance des traitements instaurés chez les patients SEP seront surveillées par le neurologue traitant (libéral ou hospitalier). Il est nécessaire que le médecin traitant soit informé des effets indésirables potentiels de ces traitements de manière à les dépister précocement et à adresser le patient au neurologue le cas échéant. Le profil de tolérance et les axes de surveillance dépendent de la situation clinique et de la molécule utilisée (tableau 1). La mise en œuvre d’un programme d’éducation thérapeutique permet – avec l’aide d’une infirmière référente – de former le patient sur ses traitements, ce qui facilite la transmission d’informations vers d’autres professionnels amenés à intervenir dans son parcours de soins. Traitement de fond pour un patient suivi pour une SEP de forme rémittente (tableau 2) • Prescription initiale, délivrance et surveillance possibles en ville Les traitements de première ligne immunomodulateurs injectables (interféron bêta-1a/Avonex et Rebif, interféron bêta-1b/Betaferon et Extavia, acétate de glatiramère/Copaxone) et oraux (tériflunomide/Aubagio, diméthyl-fumarate/Tecfidera) peuvent être prescrits en ville, sans implication directe de l’hôpital. L’efficacité est évaluée par le neurologue référent grâce à un suivi régulier, avec la possibilité de consulter rapidement en cas d’apparition de nouveaux symptômes. L’évaluation de la tolérance repose sur un interrogatoire dirigé et sur la réalisation régulière d’examens biologiques. • Traitements nécessitant une collaboration entre ville et hôpital Traitement de première ligne : nouveaux immunomodulateurs oraux Depuis mars 2014, le diméthyl-fumarate est disponible en France, pour le moment en rétrocession hospitalière, avec une délivrance mensuelle du traitement. Une délivrance en officine est attendue dans les mois à venir. Traitement de deuxième ligne − Le fingolimod (Gilenya) est un immunosuppresseur oral dont la première prise doit impérativement avoir lieu en hospitalisation de jour avec un monitorage continu du rythme cardiaque pendant au minimum six heures du fait du risque de bradycardie sévère. La prescription initiale puis le tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques renouvellement semestriel sont effectués par un service de neurologie hospitalier. Dans l’intervalle, le fingolimod peut être prescrit par un neurologue libéral. Ce traitement doit être pris consciencieusement, à raison d’un comprimé par jour. Tout oubli pendant les deux premières semaines nécessite une nouvelle introduction en hospitalisation de jour. Le lien avec le pharmacien d’officine est indispensable le jour de l’introduction pour que le fingolimod soit disponible en officine dès le soir même. Le médecin traitant doit être informé des risques d’effets secondaires, en particulier de la lymphopénie parfois rapide (baisse de 20 à 30 %). Il existe par ailleurs des risques de diminution d’efficacité du fingolimod en cas d’association avec des inducteurs enzymatiques (comme la carbamazépine). Une carte et un livret d’information sont remis au patient le jour de l’introduction, et il lui est conseillé de les présenter à son pharmacien et à son médecin traitant, en cas de prescription d’un nouveau traitement. − Le natalizumab (Tysabri) est réservé à l’usage hospitalier uniquement et administré en perfusion intraveineuse en hôpital de jour toutes les quatre semaines. Une carte et un livret d’information sont remis au patient le jour de l’introduction. Une complication rare et grave est liée à la réactivation du virus JC au niveau encéphalique à l’origine d’une leuco-encéphalopathie multifocale progressive (LEMP), contre laquelle il n’existe pas de traitement efficace. Un dépistage précoce est indispensable pour tenter d’éviter des séquelles neurologiques sévères, voire le décès du patient. Une information du patient, de son entourage et des professionnels de santé impliqués dans le parcours de soins est primordiale (kinésithérapeute, orthophoniste, infirmière, médecin traitant, neuroradiologue…). Ainsi, tout symptôme neurologique nouveau chez un patient à risque doit être signalé en urgence au neurologue. De même, toute nouvelle lésion sur l’IRM d’un patient à risque doit être considérée comme une suspicion de LEMP : l’IRM doit être complétée par des séquences particulières et le neurologue doit être informé en urgence. Sur le plan pratique, le statut sérologique du virus JC peut être nécessaire pour la stratification du risque de LEMP et la décision thérapeutique en cas de prescription de natalizumab. Le prélèvement sanguin ne peut avoir lieu que dans un établissement de santé privé ou public. − La mitoxantrone (Elsep) est un immunosuppresseur non spécifique indiqué dans les formes tome 137 | n° 3 | mars 2015 Tableau 1. Récapitulatif des bilans recommandés pour la surveillance des traitements dans la sclérose en plaques COURT TERME (1-6m) interféron bêta NFS plaquettes, TA m1, m2, m3 MOYEN TERME (6-12m) LONG TERME (> 12m) NFS plaquettes, TA régulièrement* urée, créatinine, BU régulièrement* acétate de glatiramère pas de surveillance particulière tériflunomide NFS plaquettes régulièrement* TA/2 semaines TA/2 mois* PA régulièrement diméthyl-fumarate fingolimod NFS, plaquettes m6 NFS, plaquettes m12 NFS, plaquettes 1 à 2/an* TA, urée, créatinine, BU m3 et m6 TA, urée, créatinine, BU m12 TA, urée, créatinine, BU 1 à 2/an* NFS, plaquettes, TA m1, m3 et m6 NFS, plaquettes, TA m9 et m12 NFS, plaquettes, TA 1 à 2/an* PA régulièrement OCT à m3-m4 natalizumab bilan immunologique tous les 3 m** sérologie virus JC tous les 6 m, si sérologie précédente négative mitoxantrone NFS, plaquettes 2/m NFS, plaquettes 1/3 m jusqu’à 5 ans après l’arrêt ETT à m6 ETT 1/an jusqu’à 5 ans après l’arrêt fampridine urée, créatinine au moins 1/an Tableau réalisé à partir des données du Vidal et de l’ANSM (des bilans plus fréquents peuvent être demandés en fonction des habitudes des équipes médicales). * Plus fréquemment en fonction des signes cliniques. ** Si initial anormal. Légende : BU : bandelette urinaire ; ETT : échographie cardiaque transthoracique, m : mois ; NFS : numération formule sanguine ; OCT : optical coherence tomography, pour dépister un œdème maculaire ; PA : pression artérielle ; TA : transaminases. Tableau 2. Modes de prescription des traitements dans la SEP Neurologue libéral Neurologue hospitalier Interféron bêta, acétate de glatiramère Prescription I, R I, R Teriflunomide I, R I, R I, R I, R +/- R I, R Diméthylfumarate* Fingolimod Natalizumab I, R Mitoxantrone I, R Fampridine I, R I, R Légende : I : prescription Initiale, R : Renouvellement de prescription, * rétrocession hospitalière en cours. agressives de SEP dont l’utilisation a diminué depuis l’arrivée du natalizumab. La prescription, la délivrance et l’administration sont obligatoirement hospitalières, réservées aux neurologues des services spécialisés, LE CONCOURS MéDICAL | 27 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Schéma de l’organisation des soins chez le patient SEP NEUROLOGUE HOSPITALIER NEUROLOGUE LIBÉRAL Aide à la décision thérapeutique (RCP) Efficacité et tolérence des traitements (1re et 2e ligne) Protocoles thérapeutiques Consultation multi-disciplinaire Éducation thérapeutique Efficacité et tolérance des traitements de 1re ligne PARAMÉDICAUX Kinésithérapeute Orthophoniste Inifirmière Centre expert SEP Plan maladies neurodégénérataives Pharmacien HOSPITALIER Médicaments réservés à l’usage hospitalier Rétrocession PATIENT PHARMACIEN D’OFFICINE Prévention de la rupture du traitement MÉDECIN TRAITANT Tolérence des traitements Tableau 3. Suivi neurologique proposé aux patients SEP en fonction de leur forme évolutive Traitement Forme rémittente 1re ligne Neurologue libéral Neurologue hospitalier 1/6 mois Recours ou en binôme, 1/6 mois 2e ligne Forme progressive si besoin 1/6 mois 1/6 mois voire 1/9-12 mois si stabilité Recours Essai thérapeutique avec une hospitalisation de jour tous les mois pendant six mois. Le neurologue doit informer le patient des effets attendus et des éventuels effets secondaires à court, à moyen et à long terme (cardiotoxicité, risque de leucémie aiguë estimé à 1/600 environ, risque d’aménorrhée parfois définitive chez les femmes de plus de 35 ans). Une surveillance est indispensable à moyen et à long terme : échographie cardiaque tous les ans pendant cinq ans, et la numération tous les trois mois pendant cinq ans afin de dépister ces complications tardives. Traitement de fond pour un patient suivi pour une SEP de forme progressive L’auteure déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles : essais cliniques et travaux scientifiques (laboratoires Novartis, Biogen, Roche), des activités de conseil (Board médico-scientifique pour le laboratoire Novartis), conférences pour le laboratoire Teva, et avoir été prise en charge (transport, hôtel, repas), à l’occasion de déplacement pour congrès, par les laboratoires Teva, Biogen et Novartis. 28 | LE CONCOURS MéDICAL À l’heure actuelle, il n’y a pas de traitement de fond validé pour les formes progressives de SEP, à l’exception de la mitoxantrone, dans certains cas précis. Ces dernières années, des essais thérapeutiques de phase III se sont multipliés pour tester de nouvelles molécules, parfois efficaces dans les formes rémittentes. Les patients intéressés pour participer à des essais thérapeutiques peuvent être adressés par le neurologue libéral aux centres d’investigations cliniques des centres hospitaliers. Traitement symptomatique La fampridine (Fampyra) est un traitement symptomatique, qui permet d’améliorer la capacité de marche des patients SEP présentant une fatigabilité à l’effort. La prescription initiale est rédigée par un neurologue pour quatorze jours, après un test de marche chronométré. Le traitement sera reconduit par un neurologue après quatorze jours s’il permet une amélioration du temps de marche et que la tolérance est correcte. Un contrôle annuel de la clairance de la créatinine est nécessaire. Les risques d’interactions médicamenteuses doivent être connus du médecin traitant : contre-indication de la cimétidine (Tagamet), prudence recommandée en cas d’association avec le propranolol (parfois prescrit en cas de tremblement sévère). Collaboration neurologue/médecin traitant, collaboration ville/hôpital Une collaboration étroite entre le neurologue et le médecin traitant est indispensable pour le bon déroulement du parcours de soins du patient SEP. L’efficacité des traitements est évaluée par le neurologue, ainsi que leur surveillance. Cependant, la multiplication des traitements employés, les effets secondaires, qui peuvent nécessiter une prise en charge en urgence ou qui peuvent survenir à long terme, rendent nécessaires l’implication du médecin traitant et du patient (séminaires d’éducation thérapeutique). Le centre hospitalier est impliqué à différentes étapes de la prise en charge, notamment pour le suivi neurologique partagé des patients selon la forme évolutive de la maladie (tableau 3). En cas de situation complexe, quelle que soit la forme évolutive, il peut être proposé au patient une prise en charge globale de la pathologie et du handicap engendré : consultation multidisciplinaire au sein des centres hospitaliers, inclusion dans un réseau de soins dédié à la SEP… Dans un avenir proche, la mise en place du Plan maladies neurodégénératives 2014-2019 (dont la SEP fait partie) permettra notamment de renforcer la coordination entre le médecin traitant et le neurologue et d’augmenter l’accès à l’expertise avec la création de centres experts dédiés à la SEP. • tome 137 | n° 3 | mars 2015 étape 3 Sclérose en plaques 1 2 3 Accompagnement psycho-médico-social : l’indispensable trait d’union Propos recueillis par Brigitte Némirovsky «L orsqu’un patient intègre le réseau, l’infirmière, la psychologue ou moi-même évaluons sa situation dans sa globalité afin de déterminer ses besoins et ses attentes. Mon rôle consiste ensuite à informer la personne sur ses droits sociaux et à l’accompagner de manière ponctuelle afin qu’elle puisse bénéficier des aides prévues », précise Laetitia Capelli. La problématique de l’emploi et les questions de budget En premier lieu, il convient de vérifier si la prise en charge des soins au titre de l’affection de longue durée (ALD) est bien en place. « La question du maintien dans l’emploi est aussi primordiale tout particulièrement dans le cadre de cette maladie invalidante qui touche des personnes jeunes, pointe-t-elle. J’informe la personne sur ses droits (réduction du temps de travail, mi-temps thérapeutique, pension d’invalidité, etc.) et je m’appuie soit sur la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), soit sur le service social de la caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France (CRAMIF) qui accompagne les patients, ainsi que les services d’appui au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés (SAMETH). En cas de problématique particulière, nous pouvons être amenés à contacter le médecin du travail, mais habituellement la situation est gérée en amont. » tome 137 | n° 3 | mars 2015 Vérifier l’équilibre financier de la personne et de son foyer est impératif : en cas de difficultés du fait de la maladie, l’assistante de service social alerte éventuellement un autre service social en vue d’un accompagnement adapté. « Mon rôle consiste aussi à évoquer la question de la protection juridique en cas de troubles cognitifs importants du patient qui, par exemple, peuvent le mettre en difficulté financière, signale Laetitia Capelli. De même, la question de l’assurabilité se pose fréquemment et, si nécessaire, j’oriente les patients vers un service juridique. » Les aides pour l’adaptation du logement « Dans le même temps, nous évaluons le bien-être de la personne dans son lieu de vie (accessibilité…). Il m’arrive parfois d’adresser un courrier pour argumenter la demande de relogement de l’intéressé au bailleur social si la personne est en grande difficulté pour sortir de son domicile et qu’il n’y a pas d’ascenseur, par exemple. Nous listons tout ce qui peut poser des problèmes au quotidien en fonction de l’évolution de la maladie. Concernant l’aménagement du domicile, le patient, s’il est éligible, peut bénéficier de la prestation de compensation du handicap (PCH) pour aménager son domicile (via la MDPH). Je travaille en relation avec le service social de la CRAMIF, les MDPH, les services communaux d’action sociale et, DR La sclérose en plaques est l’archétype de maladie chronique où la prise en charge des patients doit être pensée et organisée de façon globale, à la fois au plan médical, psychologique et social, les professionnels de ces trois champs devant travailler en synergie. C’est ce que propose aux patients le réseau SINDEFI (www.sindefi.org/) comme l’explique Laetitia Capelli, assistante de service social au sein de ce réseau depuis 2007. pour les patients de plus de 60 ans, avec le centre local d’information et de coordination (CLIC) pour l’attribution éventuelle de l’allocation personnalisée pour l’autonomie (APA) », explique Laetitia Capelli. Aides humaines : une résistance psychologique n’est pas rare Faire venir une aide extérieure (auxiliaire de vie, services de soins infirmiers à domicile [SSIAD]…), c’est faire entrer la maladie chez soi, et ce n’est pas facile à accepter, aussi bien pour la personne malade que pour le(s) proche(s), surtout quand il faut se rendre à beaucoup de consultations, car le domicile « reste un des seuls endroits où on peut oublier la maladie ». De fait, les aides humaines proposées aux personnes qui ne sont plus en capacité d’accomplir seules les gestes essentiels de la vie quotidienne sont souvent difficilement acceptées par celles-ci : si un conjoint ou un proche est aidant au quotidien depuis un certain temps, « il est très délicat de briser cette relation ». Le risque est que l’aidant familial s’épuise, ce qui va avoir un impact relationnel et altérer le moral de la personne malade et de l’aidant. « Il faut trouver le bon consensus avec la famille et le patient, s’ils ne suivent pas nos préconisations ; même si c’est difficile, il faut respecter ce décalage entre ce que nous jugeons utile et le souhait des personnes à qui revient la décision. » LE CONCOURS MéDICAL | 29 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques étape 3 Ainsi, pour mettre en place les aides à domicile, « je m’appuie beaucoup sur mes collègues psychologues (besoin d’un accompagnement psychologique ponctuel) et parfois aussi sur l’infirmière qui met en évidence avec eux le lien entre les difficultés liées à la maladie et les aides qui peuvent leur être apportées (matérielles, humaines) en réexpliquant au besoin la maladie. Nous travaillons donc en réseau interne dans un premier temps et ensuite, en accord avec la personne malade, nous orientons celle-ci vers les partenaires adéquats pour un suivi de proximité. Nous travaillons aussi en partenariat avec les services hospitaliers, pour les retours à domicile, sans toutefois nous substituer à eux ». Des problématiques majeures parfois sans réponse Inversement, si du fait de l’évolution de la SEP une prise en charge en maison d’accueil spécialisée s’avère nécessaire, « mon rôle consiste à trouver un établissement ; nous disposons pour cela d’un annuaire ressource. Mais le manque de structures et le refus de certaines d’entre elles d’accueillir des personnes de moins de 60 ans peut déboucher sur des impasses », déplore Laetitia Capelli. Autre problème majeur non résolu : « les formes rémittentes ne sont pas “assez handicapantes” pour remplir les critères d’éligibilité de la PCH, mais celles-ci provoquent néanmoins des symptômes invalidants (fatigue, fatigabilité, troubles cognitifs…) ; il faut alors se tourner vers d’autres organismes tels que les mutuelles, par exemple, pour une demande de secours exceptionnel. Mais ces aides ne sont généralement ni pérennes ni suffisantes… ». • Laetitia Capelli ([email protected]) déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. Répondre à la forte demande d’autonomisation des patients C e besoin de formation thérapeutique, les patients l’expriment pour eux-mêmes et pour leurs proches. En effet, « malgré les efforts, un déficit d’information persiste vers le grand public, les patients et les aidants », déplore Bernard Gentric. « Or l’autonomisation des patients dans la gestion de leur maladie est essentielle en tant que vecteur de confiance et d’estime de soi, ce qui est “vital” pour les maladies dont le diagnostic s’accompagne d’un vrai choc, comme c’est le cas de la SEP », affirme-t-il. Si les plans d’organisation des parcours de soins élaborés depuis une vingtaine d’années pour un ensemble de maladies dans un domaine donné prenaient insuffisamment en compte les spécificités propres 30 | LE CONCOURS MéDICAL à chacune de ces maladies, « le dernier Plan maladies neurodégénératives 20142019 comble cette lacune, reprenant un axe prôné depuis quelques années par la Fondation ARSEP : la création de centres experts régionaux ou inter-régionaux labellisés SEP. Un progrès considérable aura été accompli à la condition que ces centres s’orientent vers une véritable prise en charge globale du patient, à la fois concrète et de proximité, depuis le diagnostic précoce et son corollaire, le temps d’annonce et l’esquisse du parcours de soins en présence des proches, jusqu’à la prise en charge des soins spécialisés et le suivi personnalisé », selon le vice-président de l’ARSEP. In fine, associer les patients à la structuration des parcours de soins est une orientation DR Lors des manifestations sportives régulièrement organisées depuis cinq ans au profit de la Fondation ARSEP (http://www.arsep.org/), les nombreux retours d’expérience recueillis auprès des malades et de leur entourage font apparaître la nécessité de développer les dispositifs visant à autonomiser les patients atteints de sclérose en plaques (SEP), souligne Bernard Gentric, vice-président de la Fondation ARSEP. Vice-président de la Fondation ARSEP, Bernard Gentric ([email protected]) a travaillé au ministère de la Santé pendant trois ans et a été membre du CA de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées (Agefiph) pendant dix ans. Il est lui-même atteint de sclérose en plaques. fondamentale, figurant dans le Plan maladies neurodégénératives 2014-2019 : « Croiser l’expérience empirique du patient avec celle du neurologue est essentiel d’autant plus qu’il s’agit de maladies complexes comme la SEP », insiste-t-il. • Bernard Gentric déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. tome 137 | n° 3 | mars 2015 étape 3 Sclérose en plaques Le médecin du travail face au risque de désinsertion professionnelle Pr Sophie Fantoni-Quinton ([email protected]), CHRU Lille, UF pathologies professionnelles et maintien dans l’emploi-employabilité, université Lille-2, Centre de droit et perspectives du droit, EA 4487 En raison de l’âge jeune des patients, de son caractère chronique et récidivant, des atteintes multifocales, de l’évolution vers une forme progressive dans la moitié des cas, la sclérose en plaques (SEP) a des conséquences socioprofessionnelles variables. Ces conséquences sont fonction de multiples facteurs et notamment du stade de la maladie, des troubles associés, des traitements et de la façon dont ils sont supportés, des comorbidités, de la formation initiale, du type et des conditions d’emploi occupé, etc. La sévérité de l’incapacité et des troubles cognitifs est souvent prédictive de la perte d’emploi. Si tous les domaines d’activité sont a priori ouverts aux patients porteurs d’une SEP, certains métiers peuvent parfois être ou devenir difficiles à occuper pour ces patients. À ceci, il faut ajouter que le monde du travail est de plus en plus exigeant et on y attend des qualités de polyvalence, de productivité, de performance ainsi que des capacités d’adaptation toujours plus grandes. L’ actuel marché du travail, très déprimé, achève de compliquer la situation en rendant plus difficile l’insertion ou la réinsertion professionnelle en cas de perte d’emploi. C’est pourquoi le maintien en emploi a une importance capitale quand on est titulaire d’un emploi. Pourtant, et même si les chiffres diffèrent beaucoup d’une étude à l’autre, et malgré les évolutions thérapeutiques, la désinsertion professionnelle atteint rapidement des taux importants, avec la moitié des patients perdant leur emploi entre neuf et quinze ans après le début de la SEP, et ce, parfois indépendamment d’une réelle perte de capacité de travail. Cela invite à préciser le rôle central du médecin du travail et de son équipe pluridisciplinaire dans la prévention de la désinsertion professionnelle, en coopération avec les autres professionnels de santé et de maintien en emploi. les contraintes du poste, en tenant compte des vulnérabilités particulières du salarié, et se positionne sur l’avis d’(in)aptitude. Étant le conseiller du salarié, le médecin du travail va prescrire la périodicité d’un suivi de santé adapté, de façon à accompagner le plus précocement possible les évolutions de la maladie. Le salarié peut par ailleurs voir le médecin du travail quand il le souhaite, qu’il soit en arrêt de travail ou pas. Si la pathologie survient ou s’aggrave Le médecin du travail : mobilisable tout au long de la vie professionnelle alors que le contrat est déjà en cours de réalisation, il est alors plus aisé d’obtenir une adaptation du poste de travail par l’intermédiaire du médecin du travail (art. L4624-1 du code du travail). En effet, à ce moment, la rupture d’un contrat de travail devra alors s’appuyer sur un motif réel et sérieux que ne constitue pas, en soi, une altération de la santé. En dehors du suivi de santé qu’il peut faire en collaboration avec des infirmiers de santé au travail, le médecin du travail a également une action en milieu de travail avec son équipe pluridisciplinaire. Ceci notamment pour évaluer les exigences, La réforme de la santé au travail de 2011 a renforcé la mission de maintien en emploi des services de santé, des médecins du travail et de leurs équipes pluridisciplinaires. Il existe en ce domaine un véritable enjeu d’efficacité et de précocité de prise en charge. Le médecin intervient à plusieurs moments de la vie du salarié, et il est le seul habilité à pouvoir émettre un avis d’(in)aptitude au poste de travail. Il s’assure, à l’embauche, et lors de chaque visite médicale, de l’adéquation de l’état de santé du travailleur avec tome 137 | n° 3 | mars 2015 Un patient sur deux perd son emploi neuf à quinze ans après le début de la SEP LE CONCOURS MéDICAL | 31 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Le cas particulier des fonctionnaires Les fonctionnaires des fonctions publiques d’État, hospitalières et territoriales ont des statuts particuliers et ne répondent pas aux règles des salariés du privé, ni pour leur contrat de travail, ni pour les questions d’aptitude ou d’inaptitude, ni pour leurs droits à congés, ni pour les risques de licenciement. À leur entrée dans la fonction publique, les futurs fonctionnaires doivent être déclarés aptes à la fonction par un médecin agréé, et même s’ils présentent une pathologie, dès lors que celle-ci est compatible avec l’exercice de la fonction, elle n’est pas forcément incompatible avec une aptitude. En cours d’exercice, leur statut leur permet de se voir octroyer des congés spéciaux par l’intermédiaire du comité médical. Si les droits statutaires aux congés des fonctionnaires sont spécifiques par rapport aux salariés du privé, en revanche le rôle du médecin du travail ou de prévention reste, dans ses grandes lignes, identique. 32 | LE CONCOURS MéDICAL la pénibilité des postes, des horaires de travail, et il peut proposer, sur la base de sa connaissance du milieu de travail, un aménagement physique ou organisationnel du poste ou d’autres mesures permettant le maintien dans l’emploi. En cas de dégradation de l’état de santé, et après que l’on ait étudié au fur et à mesure toutes les possibilités d’aménagement du poste de travail, si le salarié ne peut plus occuper son poste antérieur, une décision d’inaptitude peut être prise avec le médecin du travail. L’employeur aura alors un mois pour rechercher activement une solution de reclassement (en lien avec le médecin du travail), et à défaut il licenciera le salarié avec des indemnités au prorata de son ancienneté. Le salarié qui serait licencié en cas d’impossibilité de reclassement peut s’inscrire à Pôleemploi s’il est encore en capacité de travailler. Dans tous les cas, la reconnaissance de travailleur handicapé est cruciale car celle-ci permet de mobiliser des aides financières et matérielles pour que le salarié soit maintenu en emploi (grâce notamment aux cellules de maintien dans l’emploi) ou aidé dans sa démarche de réinsertion. Le médecin du travail est aussi le conseiller de l’employeur, dans le respect du secret médical : il établit une relation de confiance avec le salarié et il pourra ainsi mieux faire accepter les absences et autres nécessités d’adaptation du travail. Il réexamine régulièrement les ambiances de travail, les contraintes des postes. Intérêt des coopérations avec les autres acteurs de maintien en emploi Tout au long de l’évolution de la maladie, il est évident que si des difficultés en lien avec celle-ci surviennent au travail, des échanges dans le respect des règles déontologiques, entre les différents professionnels de santé qui prennent en charge le salarié, sont très utiles. L’équipe soignante qui suit le patient sera ainsi en mesure de préciser le pronostic, les capacités fonctionnelles et cognitives du salarié, données nécessaires pour la mobilisation des aides adéquates pour le maintien en emploi. En cas d’arrêt de travail prolongé ou répété, les coopérations avec le médecin-conseil, la mise en place des visites de préreprise afin d’anticiper le retour au travail paraissent fondamentales, de même qu’une articulation précoce avec les personnes ressources du maintien en emploi, internes et externes au service de santé au travail, et au besoin les services sociaux. Cette visite de préreprise est désormais systématique au-delà de trois mois d’arrêt et pourra être demandée auprès du médecin du travail par le médecin-conseil de l’Assurance maladie, le médecin traitant ou le salarié lui-même, directement auprès du service de santé au travail. À l’issue d’un arrêt de travail, mais désormais aussi (depuis la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012) sans arrêt de travail à temps complet en cas d’affection de longue durée, un temps partiel thérapeutique (TPT) peut être prescrit par le médecin traitant, à condition que l’employeur l’accepte (à noter que la Caisse d’assurance maladie ne notifie plus l’acceptation). Ce TPT est modulable en fonction de l’état de santé du salarié et a pour vocation une réadaptation progressive au travail, ce qui explique qu’il est limité dans le temps. Le médecin du travail préconisera son organisation, et l’Assurance maladie versera une indemnité journalière pour le temps non travaillé. Par ailleurs, si un salarié se trouve dans l’incapacité totale ou partielle de travailler, il peut prétendre à une pension d’invalidité de l’Assurance maladie, sous réserve de présenter une incapacité de travail d’au moins les deux tiers (et d’autres conditions administratives). Cette pension est attribuable indépendamment d’un arrêt de travail, et si elle n’est pas limitée dans le temps, elle est cependant révisable. Nécessité d’anticipation et d’interdisciplinarité avec l’accord du patient/salarié Plusieurs constats s’imposent : au-delà des situations où la personne atteinte de SEP ne peut pas ou plus travailler, il existe de nombreuses difficultés d’insertion et de maintien dans l’emploi, même en présence d’une forme de SEP compatible avec le travail. Ceci en raison notamment des craintes des employeurs, des collègues, du manque de soutien de l’entourage professionnel, du regard et des représentations des autres qui ont parfois du mal à comprendre une telle pathologie et l’asthénie qu’elle génère. Il existe par ailleurs une méconnaissance des outils, des acteurs et des droits de chacun qui pourraient aider à un meilleur maintien en emploi. Il faut surtout retenir qu’il y a une vraie nécessité d’anticipation, d’évaluation et d’échanges interdisciplinaires et de coopération (neurologue, psychologue, médecin traitant et médecin du travail) avec l’accord du patient/salarié pour prévenir la désinsertion professionnelle. • tome 137 | n° 3 | mars 2015 étape 3 Sclérose en plaques Rééducation et réadaptation : maintenir qualité de vie et vie sociale Dr Michèle Mane ([email protected]), Dr Lucie Gagneur, Pr Philippe Thoumie, service de rééducation neuro-orthopédique, hôpital Rothschild, Paris Jusqu’à il y a quelques années, la prise en charge en médecine physique et de réadaptation n’était pas proposée aux patients atteints de sclérose en plaques (SEP). Actuellement, elle est devenue indispensable, complémentaire des prises en charge neurologiques, quel qu’en soit le stade. Les facettes d’expression de la SEP étant multiples, la prise en charge en rééducation revêtira des modalités de réalisation très différentes selon les formes ou les stades, et malheureusement quelquefois des limites laissant la place à la réadaptation exclusive avec parfois utilisation de la domotique. La SEP affectant la qualité de vie physique, psychologique et sociale des patients, l’objectif est de réduire les incapacités et le handicap et de maintenir le plus longtemps possible l’autonomie dans la vie quotidienne. L es techniques utilisées ne sont pas spécifiques de cette pathologie, utilisant la composante multidisciplinaire commune aux différentes pathologies neurologiques mais avec des adaptations liées aux caractéristiques de la SEP, notamment la fatigabilité et le caractère évolutif. Quand et comment proposer la prise en charge ? • Il n’y a pas de limites temporelles à la mise en œuvre de la rééducation, laquelle doit de toute façon être précoce et adaptée aux objectifs qui sont fonction de l’Expanded Disability Status Scale (EDSS) (encadré 1), du profil évolutif et du mode de vie. D’après les recommandations de la HAS(1), la rééducation doit être mise en œuvre, y compris pour des EDSS bas, dès qu’apparaît une gêne quelle qu’en soit l’expression, et tout au long de son évolution. La prise en charge a sa place à chaque stade évolutif de la maladie, lors des poussées et en dehors des poussées, à la fois pour prévenir les complications et entretenir les acquis. • Il n’y a pas de spécificité dans les limites par rapport aux autres pathologies neurologiques. Mais la motivation est le critère primordial garant d’une efficacité des programmes de rééducation. Des syndromes dépressifs sévères peuvent être des facteurs limitants. C’est pourquoi une évaluation est indispensable, avec élaboration d’un projet de soins cohérent, par rapport à des objectifs réalistes auxquels le patient adhère, sans le laisser imaginer des résultats autres que ceux définis. Un contrat d’objectifs clairement énoncé permet d’éviter des déceptions après des tome 137 | n° 3 | mars 2015 prises en charge que les patients ont idéalisées. Les troubles cognitifs sévères, en particulier les atteintes mnésiques avec atteinte des capacités d’apprentissage, sont une limite aux programmes d’éducation thérapeutique et aux séjours de rééducation. • Le programme proposé doit être en adéquation avec un contrat d’objectif qui va s’adapter dans le temps(2). 1) Lors d’une poussée, la prise en charge est réduite et limitée à des séances de kinésithérapie d’entretien. L’objectif est surtout de limiter les complications neuro-orthopédiques de type rétractions et de lutter contre la spasticité. La prise en charge fait appel à des techniques passives de mobilisation musculaire et articulaire. La fatigue et le déconditionnement qu’elle entraîne sont au premier plan. 2) Après une poussée, la prise en charge s’oriente vers un travail de récupération ou bien de compensation. 3) Entre les poussées, l’objectif est à la fois de maintenir un état fonctionnel optimal et de prévenir les complications. 4) À distance, devant des séquelles ou lors des formes à évolution progressive, l’objectif est de préserver les différentes fonctions (de type préhension, déambulation, transferts) en optimisant l’ensemble des capacités résiduelles, en visant une marche sécurisée le plus longtemps possible avec évaluation des besoins d’aides techniques et diminution du risque de chute. • La prise en charge par un kinésithérapeute de ville est la base de départ et sera le fil conducteur alternant avec l’ensemble des autres programmes proposés. L’objectif est que la kinésithérapie soit LE CONCOURS MéDICAL | 33 1 2 3 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques 1. Adaptation de la rééducations selon l’EDSS EDSS entre 1 et 4 C’est souvent la fatigue qui est au premier plan, avec une boiterie qui se démasque au-delà d’un périmètre de marche propre au patient. Cette fatigue et le déconditionnement qu’elle entraîne sont une des premières cibles de la prise en charge en médecine physique et des programmes d’éducation thérapeutique. Le renforcement musculaire contribue à la gestion de la fatigue, et la pratique d’une activité physique régulière aérobie est nécessaire au maintien des acquis. Les patients doivent apprendre à reconnaître les signes avant-coureurs de cette fatigue, spécifiques à chacun mais souvent reproductibles, avec mise en place de stratégies. L’activité physique régulière prend toute sa place dans les programmes de reconditionnement. EDSS entre 4 et 6 Le tableau classique associe un trouble de la marche et de l’équilibre, une hypertonie spastique et une réduction du périmètre de marche. La prise en charge est axée sur l’auto-entretien avec les auto-étirements, les exercices musculaires et le travail de l’équilibre. Un traitement complémentaire de la spasticité doit être proposé (traitements oraux ou injections de toxine botulique). L’objectif est d’optimiser la marche avec des orthèses de type releveur ou une canne pour augmenter le périmètre de déplacement. La fatigue est gérée par le fractionnement. L’objectif est d’offrir une marche sécurisée le plus longtemps possible et de déterminer les besoins d’aides techniques. EDSS entre 6,5 et 7 Il s’agit classiquement des formes paraparétiques, sensitive ou cérébelleuse. La marche n’est possible que sur quelques pas, le fauteuil roulant manuel est indispensable. L’objectif de la prise en charge est la lutte contre la spasticité, source de douleur et d’attitudes vicieuses, l’entretien musculaire des chefs restant, le travail de l’équilibre debout mais aussi assis et, surtout, le travail du relevé de chute, de la préhension et de la marche. C’est la gestion au quotidien de la fatigue chez ces patients qui fait se poser la question de l’aide technique à la marche, voire du fauteuil roulant. Le refus fréquent du patient est le reflet de sa crainte devant l’aggravation neurologique. L’image négative de ces différentes aides à la déambulation doit être dédramatisée en insistant sur l’épargne énergétique qu’elles représentent, afin d’en faire « plus, plus longtemps ». Les entretiens doivent être multipliés et parfois élargis à la présence de la famille pour en expliquer l’intérêt. L’objectif est d’éviter la désocialisation, et c’est souvent le fauteuil roulant manuel ou électrique qui va permettre de associée à des exercices d’auto-prise en charge, qui sont la base à toute éducation thérapeutique(3). Afin d’intensifier les programmes et de faire apparaître l’aspect multidisciplinaire, des séjours de rééducation peuvent être proposés. Ces séjours sont de règle lorsque la pluridisciplinarité est requise, notamment s’il y a besoin d’intervention des ergothérapeutes, profession peu disponible en libéral. D’autre part, l’association à la kinésithérapie des autres rééducateurs que sont les orthophonistes, les psychologues et bien sûr les ergothérapeutes requiert des déplacements multiples pour suivre les programmes de rééducation et entraîne des difficultés d’organisation dans le temps et dans l’espace. Les structures de médecine physique regroupant ces différents thérapeutes permettent de simplifier la prise en charge Cette unité de lieu est souvent le premier motif de ces séjours. Le choix s’oriente soit vers des séjours en hospitalisation de jour, soit en hospitalisation complète ou de semaine (encadré 2, p. X). • L’évaluation de l’environnement, le conseil et la mise en place des aides techniques, l’éventuelle visite à domicile par les ergothérapeutes et l’évaluation médico-sociale complètent la prise en charge 34 | LE CONCOURS MéDICAL refaire sortir un patient. Le fauteuil électrique ou scooter peut parfois être envisagé précocement pour éviter la fatigue liée à la sollicitation des membres supérieurs. EDSS supérieur à 7,5 Ce sont les formes tétraparétiques ou cérébelleuse sévères, au stade de la perte de la marche, et c’est l’indication permanente du fauteuil manuel, voire électrique. Le travail de l’équilibre assis en kinésithérapie reste indiqué avec la prévention des complications. L’objectif est le maintien des possibilités de déplacement, incluant les transferts lit-fauteuil. Le rôle des ergothérapeutes est primordial à ce stade avec l’évaluation environnementale, l’adaptation de la commande du joystick du fauteuil roulant électrique, avec nécessité parfois de déplacer la commande en mentonnière ou têtière. C’est également parfois la place de la domotique et du contrôle de l’environnement. rééducative classique, afin de permettre le maintien au domicile de ces patients dépendants. Principes et techniques spécifiques de rééducation Les principes sont les mêmes que pour d’autres pathologies neurologiques, associant la prise en charge de la spasticité, du déficit moteur, des troubles de l’équilibre et le travail de la marche et de la préhension. Prise en charge du contrôle moteur Le déficit moteur est accessible à un renforcement sans aggravation de la spasticité ni de la fatigue(5). Des exercices d’éveil moteur ont pour objectif de stimuler la plasticité cérébrale. Le contrôle du tonus est fondamental, et l’objectif est de maintenir l’équilibre des actions agonistes et antagonistes. Dans les cas où la commande analytique reste de bonne qualité, le travail d’amélioration de la force permet d’enchaîner par le travail de l’endurance(6). Les exercices de base sont réalisés à la fois lors de la prise en charge avec le kinésithérapeute ou l’ergothérapeute mais doivent idéalement être renouvelés en dehors des séances tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques pour être auto-entretenus. Il n’y a pas d’exercices spécifiques de la SEP, mais il existe des indications particulières, comme le renforcement des ischio-jambiers pour lutter contre un recurvatum. Ce renforcement musculaire fait appel à des mobilisations actives en utilisant l’actif aidé analytique, pour initier les séances, p uis s’orientant secondairement sur le travail en position de fonction, équilibre, marche, préhension etc. L’utilisation du travail avec assistance robotisée, que ce soit du membre supérieur ou bien de la marche, fait partie des nouvelles technologies(7, 8). Prise en charge de la spasticité Pour l’inhibition de l’hypertonie spastique, les étirements musculaires passifs à vitesse lente sont à la base de tout programme. La prise en charge s’oriente vers l’inhibition de cette hypertonie spastique, lorsqu’elle existe car elle va gêner les mouvements volontaires, et le renforcement musculaire. Ces étirements doivent être réalisés par le kinésithérapeute ou l’ergothérapeute mais également par le patient en dehors des séances sur la base d’autoétirement. Ces étirements doivent être maintenus même en cas de traitement médicamenteux par voie générale type baclofène ou de traitement focaux de type injection de toxine botulique. Dans ce dernier cas, les muscles injectés doivent d’autant plus être étirés pour une potentialisation des effets. Prise en charge des syndromes cérébelleux Elle est axée à la fois sur le travail de la coordination avec un travail debout, pour corriger l’attitude cérébelleuse, et un travail assis sur plan instable. L’objectif est le travail des synergies, la récupération d’une stratégie de hanche, des exercices de relaxation et un travail de l’image de soi. L’utilisation d’aides techniques, type déambulateur lesté, voire lestage des membres supérieurs, apporte quelques résultats mais souvent décevants. Prise en charge des déficiences neurosensorielles Après un bilan détaillé, le travail s’oriente vers la prise de conscience initiale du trouble pour en stimuler les sensibilités restantes et augmenter la vigilance sensitive, développer les compensations sensorielles avec simulation sensitive et proprioceptive. Prise en charge du trouble de la marche et du trouble de l’équilibre L’origine de ce trouble est multifactorielle (sensorielle, visuelle, proprioceptive ou vestibulaire), tome 137 | n° 3 | mars 2015 liée à l’atteinte motrice et aux complications orthopédiques. Sa prise en charge est donc multisensorielle, faisant appel à des techniques complémentaires de stimulation des afférences visuelles et proprioceptives, associées à des exercices classiques de travail de l’équilibre statique et dynamique avec renforcement et endurance, afin de réduire le risque de chutes(9). Le trouble de la marche est la résultante d’anomalies intriquées : atteinte spastique, paralytique, ataxique, (proprioceptive visuelle ou vestibulaire) et/ou cérébelleuse. La prise en charge sera axée sur ces différentes déficiences avec en complément un travail fonctionnel de la marche avec ou sans l’aide technique adéquat (cannes, orthèses releveurs ou anti–recurvatum, etc.). Évaluation et prise en charge de la fatigue et du déconditionnement La fatigue est fréquente et précoce, et parfois une plainte isolée dans des formes modérées à EDSS bas. Liée à la maladie elle-même, elle est majorée par le déconditionnement qui en résulte. Elle n’est pas une limite à la rééducation et, au contraire, l’apprentissage de sa gestion fait partie des programmes d’éducation thérapeutique avec de bons résultats(10-12). Certaines conditions doivent être néanmoins respectées lors des séances de rééducation, avec une montée en intensité très progressive et alternance de temps de repos, ce qui pose le problème de la durée des séances en kinésithérapie de ville. L’activité doit être fractionnée en deçà du seuil de fatigue et les aides techniques doivent être proposées lorsqu’elles facilitent la réduction de la dépense énergétique. Ce fractionnement est un frein aux prises en charge libérales isolées dans les programmes de reconditionnement à l’effort et doit impérativement être complété par des exercices d’auto-prise en charge rendant le patient autonome dans sa rééducation à l’effort. Cette fatigue, très précoce, ne disparaît pas pour autant au cours de l’évolution et va concerner aussi les formes très évoluées même chez les patients dépendants. C’est le temps de maintien au fauteuil, la réalisation des transferts qui sont concernés. Le fractionnement peut se décliner de la même façon avec des exercices de verticalisation progressifs, du renforcement relayé par du travail passif ou des exercices de type entraînement assistés passifs ou actifs aidés ou robotisés. LE CONCOURS MéDICAL | 35 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques 2. Hospitalisation de jour vs hospitalisation complète ou de semaine À EDSS équivalent, il n’y a pas de différences dans les résultats de ces deux types de prise en charge (4). • L’hospitalisation de jour permet d’éviter les ruptures avec le milieu familial et social. Néanmoins, la rupture avec le milieu professionnel est souvent nécessaire car, même si ces programmes ne sont pas quotidiens, la fatigabilité de ce mode de prise en charge impose des temps de repos lors des journées d’inactivité. C’est d’ailleurs cette fatigabilité qui est à l’origine des limites à ce type d’intervention chez certains patients, faisant plutôt s’orienter vers l’hospitalisation complète ou de semaine. • La durée médiane des séjours en hospitalisation est de l’ordre de trois à quatre semaines avec ou sans retour au domicile le week-end. Ce choix est plutôt fait lorsque le périmètre de marche est inférieur à 100 m, lorsque les chutes sont fréquentes, avec des difficultés lors des transferts. L’hospitalisation complète s’impose pour les EDSS élevés supérieurs à 7 avec dégradation fonctionnelle récente ou si l’éloignement géographique rend les trajets incompatibles avec une prise en charge ambulatoire. La réadaptation à l’effort va comprendre des exercices à visée cardiorespiratoire, musculaire et fonctionnelle, s’inspirant des programmes d’entraînement de sportifs. Par exemple, marche sur tapis pour optimiser les capacités neuromusculaires à un moindre coût énergétique(13). Réadaptation et domotique Les auteurs déclarent… La médecine physique et de réadaptation comprend également l’adoption de moyens de compensation humains et matériels, pour compenser la perte d’autonomie, maintenir l’accessibilité du logement, de l’environnement, des véhicules, l’adaptation de la scolarité dans les formes très précoces ou, lorsqu’il est souhaité, le maintien d’une activité professionnelle. L’utilisation de la canne comme première aide technique fait partie de la première étape dans la réadaptation. Les aménagements horaires, l’adaptation du poste de 1. Conférence de consensus. La sclérose en plaques. Jeudi 7 et vendredi 8 juin 2001 Amphithéâtre Charcot, hôpital de La PitiéSalpêtrière, Paris. www.has-sante.fr 2. Octaviat JR, Coninx K. Adaptive personalized training games for individual and collaborative rehabilitation of people with multiple sclerosis. BioMed Research International 2014 (2014), article ID 345728, 22 pages. 3. Mayo NE, Bayley M, et al. The rôle of exercise in modifying outcomes for people with multiple sclerosis a randomized trial. BMC Neurol 2013;13:69. 4. Aydin T, Sariyidiz A, Guler M, et al. Evaluation of the effectiveness of home based or hospital based calisthenic 36 | LE CONCOURS MéDICAL exercises in patients with multiple sclerosis. Eur Rev Med Pharmacol Sci 2014;18(8):1189-98. 5. Ickman K, Simoens F, Nijs J, et al. Recovery of peripheral muscle function from fatiguing exercise and daily physical activity level in patients with multiple sclerosis: a case control study. Clin Neurol Neurosurg 2014;122:97-105. 6. Heine M, Hoogervorst EL, Hacking HG, et al. Validity of maximal exercise testing in people with multiple sclerosis and low to moderate levels of disability. Phys Ther 2014;94:1168-75. 7. Bastiaens H, Alders G, Feys P, et al. Facilitating robot-assisted training in MS patients with arm paresis: a procedure to travail ou du domicile, l’aide aux transports ne sont pas spécifiques et se conjuguent de la même façon dans l’ensemble des pathologies neurologiques entraînant un handicap. C’est également la place de la domotique, avec le contrôle environnemental du domicile, comme la commande des portes ou volets, la gestion de la lumière, etc. Une des limites de ces adaptations est l’obstacle financier. Les assistantes sociales ont donc un rôle fondamental, et le travail se fait en lien avec les maisons départementales du handicap (voir article p. X). Le travail en réseau, fondement d’un parcours de soins cohérent C’est depuis un peu moins de quinze ans que l’on a vu la médecine physique s’intéresser plus spécifiquement à la SEP. La prise en charge de cette pathologie s’est, en peu de temps, considérablement modifiée, avec à la fois l’essor des thérapeutiques médicamenteuses et, en parallèle, des programmes de rééducation dans des structures spécialisées en médecine physique. C’est d’ailleurs le travail en réseau entre médecin traitant, neurologue, médecin de médecine physique et rééducateurs libéraux qui est la base fondamentale du parcours de soins cohérent pour le bénéfice du patient. Néanmoins, en complément des différentes techniques (renforcement, stimulation proprioceptive ou réentraînement à l’effort), la reprise d’une activité physique adaptée régulière (ou au moins des exercices d’auto-prise en charge simples) doit être intégrée par les patients après une éducation thérapeutique. Le caractère évolutif de cette maladie doit aussi faire aborder la notion d’aide technique par le patient et sa famille afin de la dédramatiser et la faire accepter. L’objectif principal et de maintenir une qualité de vie à l’intérieur du domicile et d’en permettre la sortie pour le maintien d’une vie sociale. • individually determine gravity compensation. Rehabilitation Robotics (ICORR) 2011 IEEE Int Conf Rehabil:june 29-july 1;2011 8. Ruiz J, Labas MP, Triche EW, et al. Combination of robot-assisted and conventional body-weight-supported treadmill training improves gait in persons with multiple sclerosis: a pilot study. J Neurol phys Ther 2013;37(4):187-93. 9. Nilsagard YE, Von Koch LC, Nilsson M, et al. Balance exercise program reduced falls in people with multiple sclerosis- a single group pretest posttest trial. Arch Phys Med Rehabil 2014;95:2428-34. 10- Miho A, Finlayson ML. Meta-analysis of three different types of fatigue management interventions for people with multiple sclerosis; exercise, education and medication. Mult scler int.volume 2014 (2014), Article ID262350, 13 pages 11. Pilutti LA, Greenlee TA, Moti RW, et al. Effects of exercises training on fatigue in multiple sclerosis: a meta-analysis. Psychosom Med 2013;75(6):575-80. 12. Brichetto G, Rinaldi S, Spallarossa P, et al. Efficacy of physical therapy in multiple sclerosis as measured with the modified fatigue impact scale and ambulation index: a retrospective study. Neurorehabilitation 2013;33(1):107-12. 13. Gallien P, Nicolas B, Robineau S, et al L’entrainement physique et la sclérose en plaques. Ann Readapt Med Phys 2007;50(6):373-6,369-72. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques Dix-sept réseaux, un objectif majeur : l’approche globale de la maladie Dr Véronique de Burghgraeve ([email protected]), directrice Réseau SEP-Bretagne Les réseaux SEP ont pour objectif de favoriser et de coordonner l’accès aux soins du patient, de le rendre acteur et partenaire dans la prise en charge de sa maladie, de développer une approche globale à la fois médicale et psychosociale des conséquences au quotidien de la sclérose en plaques (SEP). D ix-sept réseaux sont repartis sur le territoire français (voir carte), regroupant les professionnels de santé mais aussi ceux du secteur psychosocial ; ils collaborent également avec les associations de patients et ils sont, pour la plupart, reconnus par les tutelles de santé. L’organisation de ces structures diffère selon les régions : certains réseaux disposent d’équipes mobiles se déplaçant au domicile des patients, d’autres ont plutôt renforcé la prise en charge de proximité en créant un maillage de professionnels impliqués et formés à la prise en charge de la SEP. Ces actions vers les professionnels sont centrées sur l’homogénéisation des pratiques, le développement de la formation, de la recherche, la mise en place de filières de soins qui permettent d’avoir accès, en fonction des besoins, aux neurologues, aux médecins de médecine physique et de réadaptation mais aussi aux centres experts, et aux consultations multidisciplinaires. Les actions destinées aux professionnels Elles proposent : – des réunions de concertation pour discuter des dossiers de patients, le recours si nécessaire aux consultations d’expertise ; – des procédures et protocoles (protocole de corticoïdes, procédure d’IRM, procédure de réentraînement à l’effort…) ; – des formations destinées aux professionnels médicaux et paramédicaux ; – un accès facilité aux essais thérapeutiques ; les réseaux peuvent même fournir le terreau pour leur mise en place (ainsi, le réseau SEP-Bretagne a montré la non-infériorité de l’administration per os de tome 137 | n° 3 | mars 2015 méthylprednisolone pour le traitement des poussées de SEP*) ; – une participation au recueil des données des patients selon une base spécifique EDMUS (voir encadré p. X) qui permet des études fondamentales pour comprendre l’évolution de la maladie. Les actions destinées aux patients Elles sont multiples : – séances d’éducation thérapeutique fondées sur des programmes validés par les ARS, pour la mise en place des traitements de fond (apprentissage des auto-injections), des auto-sondages, pour la connaissance et la gestion des différents symptômes de la maladie ; – réunions d’information et d’échange avec les patients et leurs accompagnements ; – mise en place de soutien psychologique, groupe de parole, accompagnement pour le maintien dans l’emploi en proposant une rencontre avec une assistante sociale, des consultations multidisciplinaires ; – des séjours de répit pour soulager les accompagnants en cas de handicap sévère. • L’auteure déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. * Le Page E, Veillard D, Laplaud VD, et al. Efficacy and safety of oral versus intravenous high-dose methylprednisolone in multiple sclerosis relapses, a randomized double blind trial (COPOUSEP). Presented at: 2014 Joint ACTRIMSECTRIMS Meeting; September 2014; Boston, MA. PS9.3 LE CONCOURS MéDICAL | 37 { PARCOURS DE SOINS Sclérose en plaques Une clinique rennaise spécialisée, inspirée du modèle canadien Pr Gilles Edan ([email protected]), Dr Emmanuelle Le Page, service de neurologie, CHU Rennes La sclérose en plaques (SEP) est une maladie complexe, lourde de conséquences d’un point de vue social, familial, professionnel. Elle s’exprime cliniquement de façon hétérogène, et devant la diversité des atteintes le neurologue seul est souvent démuni. Ne pas prendre en charge uniquement la maladie mais le malade dans sa globalité et rassembler autour de lui les compétences nécessaires pour répondre au mieux à ses besoins, tel est le concept que nous avons essayé de développer à Rennes en créant, en novembre 1996, la première clinique de la SEP en France dont la conception s’inspire fortement des « MS clinics » canadiennes. P 1. Recrutement essentiellement régional des patients dans l’ouest de la France • Département d’Illeet-Vilaine : environ 30 % • Région GrandOuest (Bretagne, Basse-Normandie, Mayenne, Sarthe, Pays de la Loire, Vendée) : 60 % • Autres départements : 10 % • 80 % des patients sont adressés par leur neurologue, les autres venant à la demande de leur médecin traitant 38 | LE CONCOURS MéDICAL lusieurs circonstances ont conduit à développer au CHU de Rennes une prise en charge spécifique de cette affection au sein d’une « clinique de la SEP» dont le recrutement est essentiellement régional (encadré 1) : – une raison « historique » : depuis sa création, le service de neurologie du CHU de Rennes a été reconnu comme un centre spécialisé pour la prise en charge de la SEP ; – une demande des patients et de leurs médecins traitants : cette maladie complexe aux conséquences multiples nécessite une approche multidisciplinaire. Ce type d’approche a été validé dans les pays anglo-saxons, notamment au Canada, où des cliniques se sont développées sur l’ensemble du territoire ; – participer à la recherche : recueillir des données parfaitement fiables, ce que permet l’organisation en clinique spécialisée. Une complémentarité avec le réseau de soins habituel du patient La clinique fonctionne tous les mardis de 8 h 45 à 18 h. Les patients venant pour la première fois doivent être adressés par leur neurologue et/ou leur médecin traitant de façon à disposer de toutes les informations nécessaires à l’analyse de leur situation (courriers, résultats d’examens complémentaires, IRM) et à inscrire clairement cette consultation dans un réseau de soins dans lequel le neurologue habituel et le généraliste gardent une place essentielle. Lorsque les patients sont suivis par un neurologue, c’est lui qui prend les décisions médicales et assure le suivi. Nous lui demandons de nous tenir informés de l’évolution de la maladie et des décisions prises. Les patients peuvent être revus à la clinique de la SEP une fois par an avec l’accord de leurs correspondants médicaux, cette structure proposant une aide à la décision thérapeutique et une prise en charge pluridisciplinaire lorsque la situation du patient le justifie. Analyse collégiale au terme de toute demi-journée de consultation Lors de la prise de rendez-vous, le patient reçoit certaines explications concernant le déroulement de la consultation : présence et rôle de chaque intervenant, consultation avec le neurologue d’une durée d’une heure et à la suite de celle-ci programmation possible d’une consultation avec un autre spécialiste. La durée de présence à la clinique peut donc varier d’une à plusieurs heures. Un patient qui voit plusieurs spécialistes dans la journée est accueilli en hôpital de jour, un repas étant prévu le midi. Lorsque l’attente doit se prolonger, un lit est gardé en hôpital de jour pour les patients le plus lourdement handicapés. Chaque demi-journée se termine par une réunion de l’ensemble de l’équipe pour permettre une analyse collégiale de la situation de chaque patient. L’équipe pluridisciplinaire réunit dix corps de métier Huit neurologues (exerçant au CHU, en secteur libéral, en centres hospitaliers généraux) assurent une consultation d’une heure. Dans le cas d’un premier contact, le neurologue retrace l’histoire de la maladie, puis pratique un examen neurologique. tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques Il discute ensuite avec le patient et sa famille. Le médecin interroge le patient sur divers problèmes pouvant interférer dans sa vie quotidienne : fatigue, moral, douleurs, troubles urinaires et sexuels. Le patient peut ainsi exprimer ses difficultés, le neurologue évaluant la situation et orientant le patient vers un autre intervenant si besoin. Souvent, les patients viennent pour un avis thérapeutique, le neurologue propose et discute les différents traitements adaptés au cas par cas, mais c’est le neurologue traitant qui prescrira le traitement et en assurera le suivi. Dix rééducateurs (travaillant à la clinique de la SEP, venant du CHU de Rennes, des centres de rééducation mutualiste de Bretagne et d’un hôpital général) assurent la consultation de rééducation fonctionnelle. L’objectif est de faire le point sur les différentes techniques permettant de restaurer une fonction, de développer des systèmes de compensation et d’apprendre à vivre avec un handicap. Spécialisés dans la prise en charge des patients atteints de SEP, ils prennent également en charge les troubles sphinctériens et sexuels liés à la maladie. Lors de la consultation, le médecin évalue la situation, élabore un projet de rééducation et adresse le patient au rééducateur le plus proche de son domicile. Les rééducateurs de la clinique de la SEP ont mis en place un réseau avec leurs collègues du Grand-Ouest, ce qui assure une prise en charge continue et optimale des patients. Le neuro-ophtalmologiste examine tout primo-consultant afin d’apprécier l’importance d’éventuels troubles visuels ou l’existence d’atteintes oculaires infracliniques. Cet examen servira d’examen de référence. Si besoin, l’ophtalmologiste voit aussi les patients à la suite de la consultation avec le neurologue. Il s’agit d’examens ophtalmologiques simples, avec parfois la réalisation d’un champ visuel. Les psychiatres assurent une consultation permettant au patient d’exprimer ses difficultés, voire sa souffrance, de faire le point avec le médecin qui conseillera une éventuelle orientation thérapeutique (prise en charge par un psychiatre, un psychologue, prescription médicamenteuse). L’assistante sociale répond aux questions concernant la prise en charge des soins, les droits au travail, l’éventuelle réorientation professionnelle ainsi que les aides et prestations diverses dont le patient peut bénéficier à domicile. Cette consultation est surtout un temps d’écoute et d’analyse des besoins dans le but d’une meilleure information et orientation. tome 137 | n° 3 | mars 2015 La diététicienne analyse les habitudes alimentaires du patient et répond aux questions pour parvenir à une alimentation équilibrée ; la consultation dure une heure. La généticienne travaille sur un ou deux programmes nationaux de recherche sur la susceptibilité génétique de la SEP auxquels la clinique de la SEP participe. Les patients répondant aux critères de l’une ou l’autre de ces études sont vus en consultation. Le médecin explique l’intérêt et le déroulement de ces recherches, les bénéfices attendus et les contraintes, en précisant que la participation à ces recherches est volontaire. L’épidémiologiste supervise le recueil des données médicales grâce au dossier informatisé European Databse for MUltiple Sclerosis (EDMUS, encadré 2) spécifique à la SEP. Deux secrétaires centralisent les demandes, planifient les consultations, envoient les rendez-vous et les informations et préparent les dossiers pour la consultation. Elles recueillent les données administratives et planifient les rendezvous à partir d’un parcours proposé par le neurologue responsable de la clinique de la SEP. Les jours suivants, elles envoient les comptes rendus aux différents correspondants médicaux. Quatre infirmières attachées de recherche clinique s’occupent plus particulièrement de l’information au patient concernant les essais thérapeutiques et de l’organisation de la clinique. Elles accueillent tous les consultants avant la visite avec le neurologue. Ce temps d’écoute et de parole est essentiel pour le patient. Il permet de déceler des problèmes pas toujours évoqués dans le dossier médical, de faire une première évaluation, de transmettre l’information au neurologue et éventuellement d’orienter le patient vers un autre intervenant. La clinique de la SEP fonctionne depuis maintenant dix-huit ans. Vingt patients y viennent chaque semaine (environ 800 patients par an). Cette structure s’inscrit de plus dans une démarche régionale de réseaux de soins (voir article p. X) mais reste fragile du fait de l’absence de dotation financière spécifique attribuée au CHU de Rennes. Le Plan national maladies neurodégénératives 2014-2019 pourrait lui assurer la pérennité, attendue par l’ensemble de l’équipe et des patients et peut-être diffuser son mode de fonctionnement vers chacun des grands centres experts qui prendront en charge la SEP. • 2. À propos de l’EDMUS Le dossier EDMUS utilisé dans plusieurs pays européens permet de centraliser des données standardisées au niveau de l’Europe et est un outil indispensable pour toute activité d’évaluation et toute recherche collaborative. Actuellement, plus de 5 000 patients ont un dossier EDMUS. La validation de chacun de ces dossiers est assurée par un technicien de recherche clinique supervisé par un épidémiologiste qui analyse l’ensemble des données. Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt. LE CONCOURS MéDICAL | 39 PARCOURS DE SOINS { entretien Sclérose en plaques Le design du parcours de soins reste imposé par l’évolutivité de la maladie Propos recueillis par Brigitte Némirovsky Depuis les années 1994-1995, avec la mise à disposition des premiers traitements de la SEP, des progrès importants dans la prise en charge sanitaire et médicosociale des patients ont été accomplis. Cependant, dans sa forme progressive, la SEP reste « une maladie orpheline de traitement », selon le Pr Michel Clanet (unité de neurologie générale et maladies inflammatoires du système nerveux, pôle neurosciences, hôpital Pierre-Paul-Riquet, CHU de Toulouse), président du comité de suivi du Plan maladies neurodégénératives 2014-2019. L’organisation des parcours de soins doit intégrer cette logique chronologique. DR L Pr Michel Clanet es progrès thérapeutiques ne doivent pas être uniquement lus au nombre de médicaments car « la problématique d’une maladie neurodégénérative demeure pour la SEP avec deux phases d’évolution », explique le Pr Clanet. Au début de la maladie et dans la période présymptomatique, une phase inflammatoire avec des poussées, liées à des mécanismes inflammatoires d’origine immunologique contre lesquels les traitements ont un impact. « Mais malgré ces traitements il n’est pas possible de manière absolument certaine de transformer l’évolution de la maladie et en particulier d’éviter la deuxième phase de la maladie, la phase progressive », déplore-t-il. La situation correspond alors à celle d’une maladie orpheline de traitement, avec, comme dans les autres maladies neurodégénératives, des restrictions, des incapacités et un handicap plus ou moins progressif. « L’accompagnement psychologique et médicosocial, le soin symptomatique sont alors des moments clé au cours desquels l’ensemble du réseau des professionnels concernés doit être à la fois compétent et coordonné. » Aucun traitement disponible dans la forme progressive Effectivement, poursuit le Pr Clanet, « il y a eu des progrès thérapeutiques mais ceux-ci n’empêchent toujours pas cette évolution vers une forme progressive. Aucun épidémiologiste sérieux n’est aujourd’hui capable de dire que l’on a changé grâce à nos traitements l’histoire naturelle de la SEP. Dans la phase progressive, aucun des traitements n’est pour l’heure efficace ». C’est pourquoi une alliance internationale (International progressive MS alliance [www//.progressivemsallaince.org/]) 40 | LE CONCOURS MéDICAL vient de se créer autour de la forme progressive de la SEP à des fins de recherche thérapeutique. Le parcours de soins du patient se décline dans cette logique chronologique car même si tous les patients ne deviennent pas progressifs ils sont encore beaucoup trop nombreux : « Certains étant non répondeurs à la thérapeutique, même aux traitements de plus en plus lourds et agressifs, avec des risques thérapeutiques élevés (alemtuzumab, natalizumab, mitoxantrone, etc.) qui permettent d’obtenir des rémissions sans toutefois empêcher la maladie de progresser », regrette le Pr Clanet, en faisant référence à un article paru très récemment dans Lancet Neurology*. Ce travail qui retrace la neuropathologie de la SEP, « une maladie dégénérative dès le début de l’évolution », présente les deux hypothèses physiopathologiques actuellement retenues : « Même si le concept qui prévaut aujourd’hui considère l’inflammation comme la cause de la dégénérescence nerveuse (hypothèse “outside in”), selon laquelle en agissant sur l’inflammation on prévient la dégénérescence, l’autre hypothèse reste encore en débat (“hypothèse Inside out”) ; selon cette dernière, l’inflammation accompagnerait les phénomènes de dégénérescence au niveau des cellules nerveuses mais ne serait pas le mécanisme initial de la maladie ». Des traitements immunologiques au médicament protecteur de l’axone L’industrie du médicament continue à développer des traitements immunologiques, soit immunomodulateurs, soit immunosuppresseurs, avec plus de sélectivité, mais l’offre pharmacologique reste dans le registre de traitements immunologiques qui n’ont aucun effet lors de la phase progressive tome 137 | n° 3 | mars 2015 Sclérose en plaques de la maladie. Celle-ci apparaît après dix à quinze ans d’évolution (comme l’a montré l’équipe du Pr Christian Confavreux), à partir d’un certain niveau de handicap (EDSS 4), dès lors que les patients commencent à avoir des troubles de la marche. « La maladie, qu’elle soit primaire progressive ou secondairement progressive, quel que soit le nombre de poussées antérieures, évolue alors de la même façon, inexorablement vers une évolution progressive », précise le Pr Clanet. « L’objectif qui doit être poursuivi par la recherche est d’empêcher cette évolution par une approche thérapeutique le plus tôt possible et la plus forte possible pour contrer les effets de l’inflammation… mais il faudra aussi réussir à prévenir la phase progressive en protégeant l’axone. Cette vision pragmatique permet de savoir où doit aller l’innovation thérapeutique dans cette maladie », assure-t-il. Réunir les moyens d’une alliance thérapeutique et d’un accompagnement global évolutif L’entrée dans le parcours de soins, au moment du diagnostic, ne se situe en général pas au début de la maladie (60 à 70 % des patients ayant déjà plusieurs lésions sur l’IRM). « Ce moment-là doit s’attacher à créer au plus vite l’alliance thérapeutique en réunissant les moyens de l’annonce diagnostique, les outils d’éducation thérapeutique qui permettent au patient de s’autonomiser dans la prise en charge puisque les traitements sont compliqués. Il faut donc pouvoir mobiliser les ressources humaines pour l’éducation thérapeutique et l’accompagnement psychologique. » Pour les étapes suivantes du parcours, une prise en charge spécialisée doit être prévue pour adapter le traitement en fonction de l’évolution et suivant l’éventualité d’événements neurologiques générant des restrictions ou des incapacités. « L’objectif est alors de s’appuyer sur les professionnels à même d’apporter un soin purement symptomatique adapté aux événements considérés », insiste le Pr Clanet, avant de poursuivre : « La SEP n’est pas seulement une maladie au seul sens sanitaire du terme, elle retentit aussi sur la personne, sur sa vie professionnelle, familiale, avec des situations de rupture qu’il faut s’efforcer de prévenir par un accompagnement et une aide tome 137 | n° 3 | mars 2015 puisés dans l’environnement du patient (le territoire, selon le terme administratif) ». Ainsi, pour les nombreux patients qui entrent dans la phase progressive avec des restrictions d’autonomie de plus en plus importantes (polyhandicap avec des troubles cognitifs, moteurs, sensoriels, vésico-sphinctériens), un accompagnement multidisciplinaire est nécessaire, par des personnes compétentes en réadaptation, en aides techniques et en accompagnement médicosocial. « La nécessité d’une coordination de parcours de soins complexes pour éviter les ruptures s’impose, avec pour objectif le maintien des patients dans leur environnement. Cela sous-entend, au-delà du binôme neurologue-médecin généraliste, pivot de l’ensemble, d’organiser le tissu environnemental sanitaire et médico-social pour mobiliser les ressources humaines nécessaires (infirmières, aides à domicile…) et aussi de prévoir des secteurs d’hébergement temporaire de répit et d’accompagnement, ce qui est une déclinaison commune à l’ensemble des maladies neurodégénératives. » Bientôt une vingtaine de centres experts labellisés SEP « Pour optimiser le parcours de soins de la SEP, il faut créer des pôles de ressources régionaux pour apporter la compétence pluriprofessionnelle dans les territoires. Ce type d’organisation permet d’exporter l’expertise vers l’environnement proche des patients ». Le Plan maladies neurodégénératives 2014-2019 tient compte de tous ces impératifs avec une volonté d’intégration sanitaire et médicosociale. Mais sur le terrain, cette volonté se heurte à beaucoup d’obstacles : millefeuilles médicosociaux dans les organisations, divers types d’intervenants, coordinations pas toujours optimales, difficultés de communication entre les différents intervenants. « C’est tout cela qu’il faut développer pour aller vers les conditions d’accompagnement sanitaires et médicosociales souhaitables. Comme cela a été fait pour la maladie d’Alzheimer (avec les centres mémoire de ressources et de recherche, CM2R) et pour la maladie de Parkinson, le plan prévoit de labelliser une vingtaine de centres experts SEP qui seront les centres de recours autour desquels s’organisera au niveau régional le parcours de soins de la personne atteinte de SEP. » • Michel Clanet ([email protected]) déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. * Mahad DH, Trapp BD, Lassmann H, et al. Pathological mechanisms in progressive multiple sclerosis. Lancet Neurology 2015;14:183-93. LE CONCOURS MéDICAL | 41