Filialisation du tout Cargo

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Filialisation du tout Cargo
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N° 41 ‐ Roissy ‐ Septembre 2009 Filialisation du tout Cargo : Laboratoire pour un gâchis ? Lors du Comité Central d’Entreprise extraordinaire du 04 septembre, la direction du Fret a présenté la « situation du Cargo » et confirmé la filialisation du tout cargo au profit de Martinair. Cette activité fait, depuis plusieurs mois au sein du groupe Air France/KLM, l’objet d’âpres discussions. Le second métier du groupe est secoué par la chute brutale des échanges. La crise de la mondialisation se traduit par une baisse marquée du volume (‐ 20 %) de fret transporté. Cette situation n’est pas sans conséquence sur le chiffre d’affaires des opérateurs. Dans ce marasme, Air France Cargo se situe dans la moyenne haute des compagnies. Il convient de rappeler que la performance négative de notre activité Cargo pour le premier trimestre de l’année IATA en cours 2009‐2010 reste nettement inférieure au coût de la couverture carburant (59 % des pertes totales du groupe), tout comme son résultat annuel demeure en deçà des sommes considérables (530 millions €) provisionnées en vue du paiement d’amendes pour une « affaire d’entente avec d’autres transporteurs sur les prix du fret aérien ». La conjoncture difficile que traverse notre activité Cargo ravive le débat du « core business » (cœur de métier). Ainsi, depuis que le transport de marchandises par voie aérienne est possible, deux écoles de managers s’affrontent. Les uns sont partisans d’un développement en interne, les autres d’une organisation en réseau, par le biais de sous traitants et/ou de filiales. Cette question avait été tranchée par Air France dans les années 90, après plusieurs conflits. Une politique ambitieuse s’est alors matérialisée par des efforts importants de la compagnie en termes d’investissements (plusieurs centaines de millions € sur 10 ans). L’outil industriel G1XL a pu être bâti et notre flotte s’étoffer et s’homogénéiser. Air France Cargo par le biais d’une politique commerciale ambitieuse s’est progressivement hissée parmi les meilleures et est devenue la référence du métier au sein de SKY Team. A l’époque, la direction d’Air France avait encore des « tonnes d’ambitions » pour son activité Cargo. La fusion/ privatisation intervenue en 2004 a permis des comparaisons osées, très ciblées. Chez KLM le recours à la précarité et à la flexibilité y est courant et organisé au travers d’accords entre la direction et les syndicats. Rapidement des dissensions ont vu le jour entre les équipes d’encadrement. La JCT (Joint Cargo team) sensée rapprocher les points de vue n’a pas tenu ses promesses. Le balancing act (équilibre dans la parité AF et KLM) s’est avéré un leurre. La prépondérance d’Amsterdam sur Roissy a été imposée sans discussion possible, théorisant les futures décisions. Le rachat de Martinair par KLM en pleine crise entérine cette dernière orientation. Contrairement à une idée avancée par la direction, Martinair n’est pas un partenaire. Cette compagnie low cost spécialisée dans le cargo est un outil sur mesure, acquis à bas prix par la poignée de financiers qui compose la holding pour modifier en profondeur les contours de l’activité Cargo du groupe. Selon la direction, « Martinair doit nous apprendre à devenir rentable ». Martinair est comme Transavia.com une compagnie à bas coûts néerlandaise. Sa structure de coûts est nivelée vers le bas. Une partie de ses activités est sous traitée. Son personnel est fortement précarisé. Son activité maintenance est délocalisée en Asie. La documentation et les plans de vol sont externalisés comme ses services RH depuis décembre 2008 (gestion paie, administration des ressources humaines). La direction considère que la masse salariale d’Air France n’est plus adaptée à l’exploitation du tout Cargo car il serait le « plus coûteux » des profils de fret (tout Cargo, Combi, Soutes). Cet argument à lui seul justifierait l’émergence de Martinair. Alors : ¾ Pourquoi avoir investi durant une décennie aussi massivement dans l’activité tout Cargo, si sa contribution est faible, voire structurellement déficitaire, comme le dit aujourd’hui la direction ? ¾ L’époque où nos cadres dirigeants défendaient prioritairement l’identité de la compagnie nationale est‐elle définitivement révolue ? Faut‐il prendre cela pour un désaveu infligé aux décideurs d’hier, le Président, l’ancien DG de la fonction Cargo d’Air France ? La logique d’un groupe financier aurait‐elle pris définitivement le pas sur toute autre considération ? Dans l’esprit de la direction, un changement de politique au niveau du Cargo « permettra de diminuer les sommes d’argent que nous versons régulièrement pour subventionner l’activité de transport de marchandises » (17 juillet 2008 – « Notre plan d’action face à la crise »). Les salariés d’Air France Cargo apprécieront la caricature. Ainsi, les salariés d’Air France Cargo devraient se contenter du remplissage des soutes. Ce type d’exploitation nécessite moins de compétences et donc requiert une moindre qualification des salariés. Son traitement peut être effectué par n’importe quel exploitant. De plus, compte tenu des impératifs de l’exploitation en escale, quelle assurance avons‐nous que le fret sera correctement traité ? Comment seront gérés au niveau de la QDS les contradictions entre le Passage et ce qui restera du fret Air France ? Le mobile est parfait. La chute des volumes à Roissy, du fait de la crise, justifierait l’abaissement du niveau des effectifs et donc un problème de surdimensionnement de l’outil industriel G1XL. La réduction des capacités décidée par le management conduit à une répartition partisane. La flotte tout Cargo est passée de 20 à 14 appareils, dont 5 sont basés à Roissy et 9 à Amsterdam. Au CCE, la direction a osé l’idée que l’image du Cargo serait dégradée à Roissy. Cette remarque ne nous a pas échappé. Ce qui est en fait une conséquence de la désorganisation générée par le départ de nombreux salariés (‐ 200 salariés au 01/01/2010) devient dans les propos de la direction une cause, qui va justifier une « revue de nos organisations ». Des centaines d’emplois sont impactés par cette stratégie de mutation vers le modèle low cost. L’ATGPE, signé par l’UNSA, la CFTC, FO et la CFDT est l’outil dont s’est dotée la direction pour réguler des « situations de sureffectif », qui dans le cas de notre activité Cargo relève de la « lowcostisation » du tout cargo au profit de Martinair. Attention, l’ATGPE empêche moins qu’il ne permet. Il ne prévoit qu’une obligation de moyens. Ce que la direction n’a pas pu faire dans les années 90, elle s’applique à le provoquer en balisant le terrain. La crise a bon dos. Aux stratégies à long terme succèdent des visées à court terme orientées vers la seule création de richesse pour les groupes d’actionnaires. L’activité tout cargo d’Air France est jugée trop chère par ces derniers. L’émergence dans le groupe de Martinair ne s’explique pas autrement. Ce changement de politique au niveau de l‘activité Cargo pourrait bien en annoncer d’autres ailleurs. Laboratoire pour un gâchis ? Le renoncement de notre outil de travail au profit d’une low cost spécialisée dans le Cargo, moribonde il y a encore quelques mois n’aura pas l’aval de la Cgt et de l’Ugict‐ Cgt. Le transport de marchandises par voie aérienne est un outil essentiel au fonctionnement de l’économie. Les politiques qui visent à accentuer les comparaisons de « coûts » au sein du groupe pour accélérer les restructurations en révisant les politiques industrielles antérieures doivent être combattues. Refusons la mise en friche de l’outil industriel et commercial Air France Cargo, performant et opérationnel. Ne laissons pas les compétences partir dans une filiale !