rock en scope - Philharmonie de Paris

Transcription

rock en scope - Philharmonie de Paris
André Larquié
président
Brigitte Marger
directeur général
sommaire
interview de Donn Alan Pennebaker
page 5
samedi 11 décembre à 16h30
Searching for Jimi Hendrix
Jimi Plays Monterey
page 8
samedi 11 décembre à 20h
Depeche Mode 101
page 15
dimanche 12 décembre à 15h
Alice Cooper
Ziggy Stardust and the Spiders from Mars
page 15
vendredi 17 décembre à 20h
Keep On Rockin’
page 16
samedi 18 décembre à 16h30
Comin’ Home
Remembering Otis
page 16
samedi 18 décembre à 18h
rencontre
filmer la musique, l’expérience du cinéma direct
page 17
samedi 18 décembre à 20h
Woodstock Diary
page 18
dimanche 19 décembre à 11h
Jimi Plays Monterey
Sweet Toronto
page 19
dimanche 19 décembre à 15h
Monterey Pop, the Summer of Love
page 20
dimanche 19 décembre à 17h
Don’t Look Back
page 20
biographies
page 21
Co-initiateur dans les années soixante avec Richard Leacock et les frères Maysles
des techniques du cinéma direct (appelé en France « cinéma vérité »), Donn
Alan Pennebaker est l’auteur d’une série de films sur le rock’n’roll qui comptent parmi les chefs-d’œuvre du film musical. Préparée par Christian Labrande,
cette présentation sur grand écran de l’ensemble de ces films est une première
en Europe. Pour tous les amateurs de rock’n’roll, le nom de D. A. Pennebaker est
associé à deux documents mythiques réalisés au milieu des années soixante :
Don’t Look Back et Monterey Pop. Le premier reste le portrait le plus juste d’un
Dylan corrosif et acerbe à souhait ; le second, le meilleur portrait d’une génération
saisie au prisme d’une de ses célébrations musicales exemplaires.
Pour réaliser Monterey, il fallut des dizaines d’heures de pellicules qui restent
souvent un précieux matériel d’archivage. En témoignent les trois documentaires
sur Jimi Hendrix, Otis Redding et Janis Joplin réalisés par D. A. Pennebaker et Chris
Hegedus à partir de ce matériel inédit. Dans le cycle sera également présenté
Woodstock Diary, le nouveau montage racontant à partir de toute une série de
documents musicaux inédits l’aventure du fameux festival américain.
Sweet Toronto et Keep on Rockin’ concernent un autre festival, celui de Toronto
qui réunit en 1969 John Lennon et Eric Clapton et, en 1972, les quatre légendes
du rock que sont Jerry Lee Lewis, Little Richard, Chuck Berry et Bo Diddley.
L’année suivante, les caméras de Pennebaker étaient présentes pour filmer le
dernier concert londonien de Ziggy Stardust (alias David Bowie).
D. A. Pennebaker poursuit aujourd’hui son œuvre de documentariste dans des
sujets les plus divers où la musique occupe toutefois une place importante. En
témoignent Depeche Mode 101, réalisé en 1989 à l’occasion de la tournée du
groupe anglais au Rose Bowl, et surtout Searching for Jimi Hendrix qui montre l’influence de la musique du guitariste chanteur sur un éventail très large de musiciens,
de Laurie Anderson à Chuck D. et autres représentants de la génération rap.
La rencontre du samedi 18 décembre à 18h permettra au public d’interroger
les deux réalisateurs (D. A. Pennebaker et Chris Hegedus) sur l’origine et la postérité de leur travail.
partenaire
de la cité de la musique
rock en scope
interview
zoom arrière
cité de la musique : Dans quelles circonstances
avez-vous tourné Don’t Look Back ?
Donn Alan Pennebaker : Peu avant qu’Albert
Grossman, le producteur de Bob Dylan, ne me propose de suivre Dylan en tournée en 1965, j’avais envisagé de faire un film avec les Rolling Stones ; mais le
projet n’a jamais abouti. Je sentais que cette scène
musicale bourgeonnante allait rapidement porter ses
fruits. J’avais vu les Beatles dans un club à Hambourg
au début des années 60. Ils étaient très bruyants,
débordaient d’énergie, et je savais que quelque chose
de phénoménal était en marche. Ils me rappelaient
ces groupes noirs que j’allais voir à Chicago : des
musiciens qui ne passaient pas à la radio, qui n’avaient
aucun succès commercial, mais qui fédéraient un
public. Quand on m’a demandé de filmer Dylan en
tournée en Angleterre, j’ai tout de suite accepté car
j’étais prêt. Pour moi, Dylan faisait de la road music,
comme les musiciens noirs itinérants. Il y a des contes
de fée qu’on ne peut vivre que sur la route, pas en
restant chez soi.
c. m. : L’année suivante, en 1966, vous accompagnez à nouveau Dylan en Angleterre pour Eat The
Document, film qu’il n’a jamais voulu sortir. On peut
y voir, notamment, la fameuse scène où Dylan, passablement défoncé, discute avec John Lennon à
l’arrière d’une berline.
D. A. P. : J’ignore quelles substances il avait ingurgitées, mais il était vraiment mal. John et moi avons dû
le sortir de la voiture et le monter dans sa chambre
d’hôtel, alors qu’il vomissait partout… Lennon vouait
beaucoup d’admiration à Dylan. Les trois autres
Beatles indifféraient profondément Dylan, et quand
Paul McCartney lui faisait écouter ses nouvelles chansons, il s’ennuyait. Il n’était intéressé que par John
et les deux hommes étaient très liés.
4 | cité de la musique
rock en scope
c. m. : Vous avez aussi côtoyé Jimi Hendrix, en 1967
au festival de Monterey, puis en 1968 lors du tournage de Awake At Generation. Quelle impression
vous a-t-il faite ?
D. A. P. : Musicalement, je l’ai perçu comme un ovni.
Humainement, en dehors de l’image de rock star qui
émanait de lui, Hendrix était probablement la personne la plus simple, la plus gentille et la plus facile à
vivre que j’ai connue. Je ne l’ai jamais vu s’énerver
ou être arrogant envers qui que soit.
c. m. : Et Otis Redding ?
D. A. P. : A Monterey, Otis Redding a fait quelque
chose de très courageux. Il a joué du rhythm’n’blues
devant des hippies blancs venus écouter de la
musique psychédélique. Malheureusement, il est mort
peu après et n’a pas jamais pu bénéficier des retombées de sa prestation.
c. m. : On vous retrouve ensuite au festival de Toronto
en 1969. Vous y filmez, entre autres, John Lennon
dont c’est le premier concert depuis que les Beatles
ont arrêté la scène en 1966.
D. A. P. : Peu avant d’aller à Toronto, John m’a téléphoné et je lui ai dit que je projetais de filmer Chuck
Berry, Bo Diddley, Little Richard et Jerry Lee Lewis à
ce festival. Il m’a répondu que ces rockers étaient
ses héros d’enfance et qu’il voulait allait jouer à Toronto
avec le Plastic Ono Band, un nouveau groupe improvisé comprenant Eric Clapton à la guitare solo, Klaus
Voorman à la basse, Alan White à la batterie et Yoko
Ono aux chœurs. John en avait marre des Beatles, il
voulait passer à autre chose. Le film terminé, je suis
allé à Londres le montrer à John et à Yoko. Ce jour-là,
le producteur Phil Spector était avec eux. Quand John
a vu le film, il était tellement excité qu’il m’a demandé
de lui prêter les bandes afin de les utiliser pour graver
son premier album en public, Live Peace In Toronto
1969. J’étais d’accord, mais Phil Spector voulait
remixer l’enregistrement, ce à quoi je me suis farounotes de programme | 5
rock en scope
chement opposé. Je ne voulais pas que l’on trafique
le son de mes bandes, et surtout que Spector disparaisse dans la nature avec les masters, ce qui était
sa grande habitude ! J’ai fini pas les remettre discrètement à John Lennon et il les a utilisés tels quels.
c. m. : Ce film révèle également un nouveau venu,
Alice Cooper. Etiez-vous prêt à subir un tel chaos
bruitiste et métallique ?
D. A. P. : Quand j’ai commencé à filmer, je n’avais
pas la moindre idée de qui il s’agissait. Je me suis
simplement dit que c’était la femme plus laide que je
n’avais jamais vu. Je n’ai réalisé qu’au milieu du
concert qu’Alice Cooper était un homme…
c. m. : Et Bowie, vous l’avez aussi pris pour une
femme ?
D. A. P. : A l’époque de Ziggy Stardust, il était dans un
état lamentable. J’ignore ce qu’il prenait, mais ça le
rendait dingo. Le voir sur scène était fabuleux, mais en
privé, il pétait les plombs et mentait constamment !
Propos recueillis par Frédéric Lecomte
le 21 novembre 1999, à New York.
6 | cité de la musique
rock en scope
samedi 11 décembre
16h30
amphithéâtre du musée
Searching for Jimi Hendrix
1998 ; 60’ ; réal. : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus ; v.o. ;
avec Neville and Sheena Staple, Los Lobos, Laurie
Anderson, Roseanne Cash, The blind Boys of Alabama,
Charlie Musselwhite, Taylor Dayne, Cassandra Wilson,
Chuck D., Mark Isham, Los Illegals.
En quelques courtes années, Jimi Hendrix est devenu
une référence pour la musique de son temps. Imité
mais inimitable, son style a marqué le blues, le rock, et
même le jazz. Réalisé au milleu des années quatrevingt, ce documentaire de Pennebaker souligne l’influence exercée par Hendrix sur quelques rappers et
rockers qui sont filmés interprétant et commentant la
musique de Hendrix. Parmi ceux-ci : Laurie Anderson,
Los Lobos, Cassandra Wilson et Chuck D…
Jimi Plays Monterey
1985; 50’ ; réal. : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus; vostf;
avec Jimi Hendrix
Les images de Hendrix mettant le feu à sa guitare
sont devenues une légende. Elles ont aussi contribué à la fortune du documentaire de Pennebaker,
Monterey Pop, qui ne montrait toutefois qu’un trop
court extrait de la prestation du génial guitariste. Jimi
Plays Monterey qui s’ouvre sur une partie documentaire avec la voix de Brian Jones, montre l’intégralité
de cette prestation avec des pièces de légende
comme Foxy Lady, Purple Haze, Hey Joe…
notes de programme | 7
rock en scope
extraits des interviews La cité de la musique n’ayant pu obtenir qu’une version originale non sous-titrée du film Searching for Jimi,
Searching for Jimi
nous proposons une traduction d’extraits des interviews, privilégiant les moments où les musiciens rencontrés par D. A. Pennebaker et Chris Hegedus
s’expriment sur l’influence de Jimi Hendrix.
Louie
(du groupe Los Lobos)
« Avec Jimi, il y avait un truc qui traversait tout, qui
parlait directement à ton âme. Je ne comprenais rien
à ce qui se passait. Je ne comprenais pas ce qui
m’arrivait. Un jour, Hendrix s’est pointé, et il a démarré
tout de suite avec Spanish Castle Magic ; et voilà, je
n’en croyais pas mes oreilles. J’étais comme un
gamin, sur le cul. On dit que la bonne musique, ou
la bonne peinture, ça te traverse, mais il y en a toujours
un peu qui passe à côté. Là, ça m’a traversé comme
une fusée et ça m’a transformé. »
Laurie Anderson
« Nous démarrons une recherche sur Jimi sur le Net. Je
n’ai pas encore trouvé la chanson que j’ai choisie,
1983... ; elle n’est pas très connue. Je l’ai choisie parce
qu’elle a ce magnifique da-da-da-da, cette mélodie
superbe, presque orchestrale, qui revient plusieurs fois.
J’ai fait deux versions du début : l’une est plutôt rapide,
et l’autre est une copie très servile de 1983 – A
Mermaid I Would Be. Je l’ai analysée sur mon ordinateur, mesure par mesure, en me disant : « Bon, à la
mesure 32, il y a cette reprise, et il y a cette note de
basse... » Au bout du compte, je me suis retrouvée
avec un ordinateur qui fait en moins bien ce que ces
types réussissaient avec leurs instruments électriques. »
Stoker
« Quand j’ai commencé à écouter ces disques, j’ai
trouvé que ce type était vraiment bon. Je ne savais
pas qui c’était. Quand j’étais gamin, j’écoutais beaucoup de soul, beaucoup de Motown, et ce que je
trouvais cool, ce qui me plaisait avec ce type, c’est
qu’à ses débuts, il avait joué avec James Brown. »
8 | cité de la musique
rock en scope
Roseanne Cash
« Jusque-là, tous les gens que j’admirais musicalement étaient plutôt refoulés sur le plan sexuel… En
tout cas, c’était sans risque. Jimi est le premier musicien que j’aie rencontré qui… Tout y était. C’était à la
fois effrayant et très excitant. Tu sais, ça faisait vraiment peur. A quatorze, quinze ans, j’étais vraiment
subjuguée et c’était très fascinant. Tout était là, le
sexuel et le spirituel… comme ça, devant toi. Le jour
de sa mort, j’ai porté un brassard noir au lycée. »
The Five Blind Boys
of Alabama
« Ce n’était pas un chanteur, c’était un guitariste.
Aussi, nous, nous avons essayé de mettre du feu
dans cette chanson parce que... parce que, bref,
cette chanson, on l’adore. »
Charlie Musselwhite
« Je suis arrivé en Californie en 1967. Je venais de
Chicago ; je n’y suis jamais retourné. C’était
l’époque des radios underground, qui passaient de
la musique nouvelle. On a entendu le disque de ce
type qui s’appelait Jimi Hendrix. C’était un truc vraiment différent, mais qui gardait le vrai feeling du
blues. Ça avait la même puissance que le blues,
mais ça partait dans une autre direction. Pour cette
chanson, Hear My Train A’Coming, c’est Kevin
Morrow, mon manager, qui a dit : “Je crois que tu
vas aimer ça. Ecoute surtout les paroles, je crois
qu’elle vont te plaire.” Alors j’ai écouté avec attention… Je me sentais concerné parce que ça me
rappelait ma propre histoire : partir de Memphis,
quitter la galère… quand il est encore temps de se
tirer. Je me disais que peut-être je reviendrais un
jour, que je partais dans un vieux tacot pourri, et que
je reviendrais en Cadillac. »
notes de programme | 9
rock en scope
Taylor Dane
« Je pense que Jimi Hendrix avait cette profonde
sensibilité au blues. C’est évident. Jimi Hendrix était
un Noir qui ressentait réellement le soul, avec les
influences du rhythm & blues, bien sûr, et toutes ces
textures sonores qu’il créait, ces choix mélodiques
qui me faisaient complètement disjoncter… et sa
voix... Je vivais avec un type qui était complètement
fou de lui, et il y avait toujours des livres qui traînaient ; et moi, je lisais toutes ces informations, ces
biographies. C’était super de lire des choses sur lui,
son sexe en bronze... Quand tu as quinze ans, ça
marque. Enfin, c’était plutôt cool. »
Cassandra Wilson
« Vous savez, la première fois que j’ai entendu Jimi
Hendrix, je ne comprenais pas du tout où il voulait
en venir. D’abord, je ne comprenais pas les paroles,
et la musique était tellement dingue… Il était vraiment en avance sur son époque, musicalement.
Les trucs qu’il faisait, les sons qu’il créait, des
couches de son... On a dit la même chose pour
décrire la musique de Coltrane. Mais la façon dont
Jimi manipule le son est incroyable ; c’était
incroyable pour l’époque, et c’est encore incroyable
aujourd’hui. »
Chuck D.
« Je suis ce qu’on appelle « the hundred verse kid »
(« le gosse aux cent vers »). J’en aligne en général
une cinquantaine avant d’arriver ici. (...) Pendant ma
première tournée avec les Beastie Boys en 1987, un
mec du groupe emportait avec lui ses disques préférés, dont Foxy Lady. Quand j’entendais Foxy Lady
– ça passait tous les soirs – , ça me mettait dans un
état… Je me disais qu’un de ces jours, j’allais me le
faire en rap. »
10 | cité de la musique
rock en scope
Mark Isham
« Miles Davis était mon dieu, et quand j’ai vu que
Miles écoutait Jimi, qu’il était influencé par Jimi… Il y
a beaucoup de musique de Miles à la fin des années
60 et 70 qui vient de Hendrix. Et puis, tout d’un coup,
c’est devenu cool. »
Los Illegals
« Quand l’album Electric Ladyland est sorti, j’avais
un ami dans un club automobile, et tous les fauchés
se retrouvaient chez lui le week-end et écoutaient des
trucs sirupeux, des vieux tubes. Et moi, entre les morceaux, j’arrivais et je changeais le disque, je balançais Hendrix et… c’était cool parce que Hendrix leur
plaisait aussi.
Les côtés les plus sombres me prenaient bien la tête.
Mais il y avait aussi ce côté magnifique, comme dans
Little Wing, surtout, surtout Little Wing. Tout le monde
a en tête une femme qu’il considère comme sa « petite
aile ». La mienne, c’est cette fille de treize, quatorze
ans, qui porte tous ces trucs révolutionnaires du
Mexique pendant la Révolution. Aujourd’hui, les filles
de cet âge se demandent si elles vont gagner au
concours de majorettes, tandis que cette fille devait se
battre, porter les armes, souffrir dans les rues et dans
les champs, simplement pour aider sa famille à manger. Mais au lieu de les aider à cultiver la terre, elle
part se battre. C’était ça, pour moi, ma « Little Wing ».
Je crois que si Jimi était ici aujourd’hui, il se brancherait là-dessus, il prendrait son pied avec ce que
nous sommes en train de faire… cette version hybride de chansons axées sur la guitare. Comme avec
le cha-cha-cha, avec le heavy metal, le mambo, le
heavy mambo, ce genre de truc. Ce que je préfère,
moi, c’est le flamenco metal. »
notes de programme | 11
rock en scope
Laurie Anderson
« A l’époque, ça ne me branchait pas. Cette attitude, les fringues, la marge, tu comprends... Quand
j’ai entendu parler du projet, je me suis dit : c'est
cool, mais c’est pas mon style ; je ne connais pas
vraiment sa musique, je ne sais pas de quoi ça parle.
La première fois, je suis passée à côté. En fait, ce
n’est pas seulement la mélodie et le travail vocal qui
m’accrochent, c’est le paysage sonore qu’il
construit dans ses chansons. La façon qu’il a de
commencer avec ses crrr-crrr-crrr... A l’époque, faire
ça avec une guitare, c’était vraiment audacieux. »
Chuck D.
« C’est Jimi qui a lancé tout ce bordel. Ce bordel
avec la guitare, plusieurs pistes, ce bordel intersidéral… Les génies sont tous comme ça : de leur
vivant, on les qualifie d’excentriques, de bizarres.
S’il te plaît, traite-moi d’enculé ordinaire. (...) Quand
je parle de liberté, c’est la liberté de s’exprimer dans
le champ du rap ou dans le champ de la musique
d’aujourd’hui, sans se faire exclure, sans qu’on
dise… « mais qu’est-ce qu’il fout celui-là ? ». »
Los Lobos
« Mon père et mon ami Bobby King m’ont emmené
à un concert. On avait des places tout en haut,
c’était à Philadelphie ; et je me souviens, il y avait une
scène tournante, ça s’appelait le Palestrum. Donc,
j’ai pris mon appareil photo, et j’y suis allé… Je ne
voulais pas trop m’approcher parce que c’était un
vrai zoo, mais je me rappelle que je suis tombé dans
une sorte de trou, qu’il y avait une masse mouvante
de gens ; et la scène tournait, et tout l’endroit tournait. A un moment, quelqu’un m’a poussé quasiment contre la scène, et j’ai levé les yeux. J’avais
mon appareil, Jimi passait devant moi tout le temps.
Il faisait chaud comme en plein été, et il fumait littéralement… Il dégageait une sorte de fumée, de
vapeur ; c’était incroyable. Jamais je n’oublierai ça. »
12 | cité de la musique
rock en scope
Laurie Anderson
« Là, quand il arrive à ce passage, tu sais : « walk
through the noise to the sea… » , on ne sait pas très
bien où on va, mais ça n’a pas d’importance ; je suis
un peu coincée à cet endroit, j’essaie de comprendre… « It’s too bad that her friends can’t be
with us today, the machines that they built never
save us, that’s what they say, that’s why they’re
coming with us today ». Moi, je me demande de qui
il parle ? et pourquoi ? et qui nous sommes ? et qui
ils sont ? et quelle machine ils ont construit ? Disons
que je réduis ça à quelques mots, en essayant de
reprendre ceux que je comprends le mieux. Peutêtre que je détesterais si quelqu’un faisait comme
ça avec une de mes chansons.
Jimi a aussi des mots magnifiques, comme
« Starfish and giant ferns greet us with a smile, before our heads go under we take our last look at the
killing noise, way of the out of style ». Out of style, la
façon d’être hors style, way of the out of style. Je ne
sais pas ce que ça veut dire, mais j’aime comment
ça sonne. »
Roseanne Cash
« Pour moi, ça avait à voir avec Dieu, pour tout ce
qui a à voir avec Dieu dans la musique, l’art et le
sexe. »
The Five Blind Boys
of Alabama
« Merci Jésus… »
notes de programme | 13
rock en scope
samedi 11 décembre
20h
amphithéâtre du musée
Depeche Mode 101
1989; 120’ ; réal. : D. A. Pennebaker, Chris Hegedus et David
Dawkins ; produit par Frazer Pennebaker ; vostf ; avec Martin
Gore, David Gahan, Andrew Fletcher et Alan Wilder.
Quand il fut approché pour faire un film sur le groupe
anglais « sans batteur et sans manager », D. A.
Pennebaker en ignorait tout. Depeche Mode était
pourtant déjà un phénomène de société que le réalisateur s’efforce de faire comprendre à travers ce long
reportage sur la tournée américaine du groupe qui
se termina par le cent-unième concert du groupe,
celui donné au Rose Bowl de Los Angeles devant
quelque 70.000 spectateurs.
dimanche 12 décembre
15h
amphithéâtre du musée
Alice Cooper
1969 ; 15’ ; réal. : D. A. Pennebaker ; v.o.
Violence et délire à leur apogée dans cette prestation
de Alice Cooper au Festival de Toronto 1969. Le document réalisé par Pennebaker donne une idée du climat
d’extrême violence que dégageait l’Alice Cooper Horror
Show à ses débuts. Le cirque et le décorum prennent
le pas sur la musique, tant il est vrai que la violence
s’exerce aussi à l’intérieur du groupe…
Ziggy Stardust
and the Spiders from Mars
1973 ; 90’ ; réal. : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus ;
vostf ; avec David Bowie, Mick Ronson, Trevor Bolder et
Mick Woodmansy.
Le dernier concert de Ziggy Stardust (alias David
Bowie) à Londres. En plein milieu d’une « Bowiemania »
planétaire, le chanteur décidait de mettre fin aux aventures intersidérables de son groupe. Malgré les conditions difficiles de tournage, le film réalisé entre la scène
et les coulisses restitue bien le climat paroxystique de
l’événement.
14 | cité de la musique
rock en scope
vendredi 17 décembre
20h
salle des concerts
Keep On Rockin’
1972 ; 100’ ; réal : D. A. Pennebaker ; v.o ; avec Little
Richard, Chuck Berry, Bo Diddley et Jerry Lee Lewis.
Un des films tirés par Pennebaker du Rock’n’roll revival concert 1969 de Toronto. A l’affiche figurait le
« carré d’as « du rock’n’roll de l’époque héroïque,
soit (par ordre d’apparition) Bo Diddley, Jerry Lee
Lewis, Chuck Berry et Little Richard. Pas un de leurs
tubes ne manque au programme de ce revival saisi
par les caméras attentives de Pennebaker.
samedi 18 décembre
16h30
amphithéâtre du musée
Comin’ Home
1991 ; 30’ ; réal : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus ;
vostf ; avec Janis Joplin, Big Brother and the Holding
Company (James Curley, David Getz, Sam Andrew et
Peter Albin).
Un portrait en action de Janis Joplin. Comin’ Home
montre l’intégralité de l’extraordinaire prestation de
Janis à Monterey. Ces images alternent avec diverses
séquences de travail en studio de la chanteuse et ses
instrumentistes. Le reportage est évocateur du climat de tension auquel arrivent les musiciens après
une fastidieuse journée de mise en place.
Remembering Otis
1989 ; 50’ ; réal : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus
vostf ; avec Otis Redding, The MGís, Sam and Dave et
The Mar-Keys.
Le concert a été filmé en collaboration avec le producteur américain Douglas pour rendre hommage à
l’un des plus grands artistes de l’industrie musicale.
Le film rassemble les meilleures compositions d’Otis
Redding comme Shake, Try a little Tenderness et
Respect. Il présente aussi des images rares de la
tournée Stax Volt en Europe, avec des artistes comme
Booker T et les MG’s, Sam et Dave, les Mar-Keys.
notes de programme | 15
rock en scope
samedi 18 décembre
18h
amphithéâtre du musée
filmer la musique,
l’expérience du cinéma direct
Jeanne-Martine Vacher, présentation
rencontre
avec la participation de :
Donn Alan Pennebaker, Chris Hegedus, Richard
Leacock, réalisateurs
Christian Labrande, directeur artistique de Classique
en images
Au début des années soixante, la mise au point de
technique de tournage avec un matériel léger et silencieux bouleversa la manière de concevoir le travail
documentaire, et particulièrement dans le domaine de
la musique. D.A. Pennebaker et, avant lui, Richard
Leacock furent à la pointe de ce mouvement baptisé génériquement cinéma direct et qui connut de
multiples avatars, notamment en France avec le
cinéma vérité.
Cette séance est illustrée par un document filmé de
D. A. Pennebaker, Daybreak Express (5’), réalisé en
1953 sur une musique de Duke Ellington.
16 | cité de la musique
rock en scope
samedi 18 décembre
20h
salle des concerts
Woodstock Diary
1994 ; 170’ ; réal : Chris Hegedus, Erez Laufer et
D. A. Pennebaker ; vostf.
Les dizaines d’heures de performances filmées à l’occasion du festival de Woodstock constituent un matériel qui pourrait donner lieu à une infinité de documents,
comme les mille milliards de poèmes de Queneau.
A partir d’un nouveau montage produit par Alan
Douglas et réalisé par D.A. Pennebaker, voici avec
ce Woodstock Diary une chronique a posteriori du
célèbre festival. Ce film comprend de nombreuses
séquences musicales non inclues dans le montage
initial (supervisé, on le sait, par Martin Scorcese) qui
alternent avec une série d’interviews des promoteurs
de cette délirante entreprise. Ceux-ci évoquent, 25
ans après, le pari que fut la mise sur pied de
Woodstock, le bras de fer avec les autorités locales et
le marchandage de dernière minute avec tel ou tel
groupe soudain assoiffé de royalties…
notes de programme | 17
rock en scope
dimanche 19 décembre
11h
salle des concerts
Jimi Plays Monterey
1985; 50’ ; réal. : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus; vostf;
avec Jimi Hendrix.
Les images de Hendrix mettant le feu à sa guitare
sont devenues une légende. Elles ont aussi contribué à la fortune du documentaire de Pennebaker,
Monterey Pop, qui ne montrait toutefois qu’un trop
court extrait de la prestation du génial guitariste. Jimi
Plays Monterey qui s’ouvre sur une partie documentaire avec la voix de Brian Jones, montre l’intégralité
de cette prestation avec des pièces de légende
comme Foxy Lady, Purple Haze, Hey Joe…
Sweet Toronto
1988; 60’ ; réal : D. A. Pennebaker et Chris Hegedus; vostf;
avec John Lennon, The Plastic Ono Band, Eric Clapton, Chuck
Berry, Jerry Lee Lewis et Little Richard.
Extrait du Toronto Peace Festival de 1969, une grande
fête du rock au profit des associations pour la paix.
Après des extraits des prestations de Chuck Berry,
Jerry Lee Lewis et Little Richard, était offert le clou
du festival : les extatiques circonvolutions vocales de
Yoko Ono régnant sur son Plastick Ono Band qui
n’en peut mais… Eric Clapton et John Lennon
contemplent la dame avec une sorte de circonspection gênée. Un moment historique !
18 | cité de la musique
rock en scope
dimanche 19 décembre
15h
salle des concerts
Monterey Pop, the Summer of Love
1968 ; 90’ ; réal : D. A. Pennebaker ; v.o.
avec Canned Heat, Simon and Garfunkel, The Jefferson
Airplane, Janis Joplin, Eric Burdon et les Animals, The Who,
Country Joe and the Fish, Otis Redding, Jimi Hendrix, The
Mamas and the Papas, Ravi Shankar.
L’œuvre qui devait fonder un genre. Il y a eu le film
de rock d’avant et après Monterey Pop. Le festival
arrivait en pleine vague psychédélique – 1967 était
l’année de Sergent Pepper – et le succès du film projeta sur la scène américaine les noms de Jimi Hendrix,
Otis Redding et Janis Joplin en leur donnant un nouveau public. Pennebaker parvenait à réaliser le portrait
d’un festival – et, au delà, d’une époque.
dimanche 19 décembre
17h
salle des concerts
Don’t Look Back
1966 ; 90’ ; réal. : D. A. Pennebaker ; vostf (ARTE).
Portrait d’un jeune musicien en colère et en tournée.
Un grand classique du documentaire musical. La
scène initiale où l’on voit Dylan (et Alan Ginsberg)
effeuiller les pages est un chef-d’œuvre de mise en
scène musicale. Le ton de Dylan et l’acidité de ses
propos – la scène de l’anti-interview avec le journaliste
est un modèle de détournement – font que le miracle
se poursuit tout le film durant. Et la musique admirablement filmée… on entend beaucoup Dylan (Gates
Of Eden, It’s All Over Now Baby Blue, Subterranean
Homesick Blues, The Times They Are Changin’…)
mais aussi Joan Baez et, à l’occasion d’une rencontre
surprise, un certain Donovan.
Christian Labrande
notes de programme | 19
rock en scope
biographies
Donn Alan Pennebaker
Né en 1925 dans l’Illinois,
Donn Alan Pennebaker
reçoit tout d’abord une formation d’ingénieur au
M.I.T. et sort diplômé de
l’université de Yale. Après
avoir fondé sa propre
entreprise puis travaillé
dans une agence de publicité, il connaît sa première
expérience cinématographique en assistant
Francis Thompson sur N.Y.
N.Y. Initié ainsi aux bases
de la réalisation, il tourne
en 1953 son premier
court-métrage Daybreak
Express, avec un objectif
grand angle qu’il fabrique
lui-même. Sur une
musique de Duke
Ellington, ce voyage
impressionniste à travers
New York en train aérien
fait figure de précurseur du
clip musical. Il est d’ailleurs
très remarqué par la critique. En 1959,
Pennebaker rejoint Richard
Leacok, Albert Maysles et
Robert Drew autour d’un
projet soutenu par la
« Time Inc. » visant à promouvoir le film comme
moyen d’expression au
service du journalisme. Les
20 | cité de la musique
« Drew Associates » élaborent la première caméra 16
mm avec son synchronisé
portable ; elle sera mise
d’emblée au service de
leurs projets cinématographiques. C’est ainsi qu’ils
produisent une série de
documentaires télévisés,
Living Camera, qui remportera un grand succès.
Ces documentaires aux
thèmes extrêmement
variés ont en commun une
véritable philosophie de la
réalisation, connue sous le
nom de « direct cinema »
ou « cinéma vérité ». Alors
que le documentaire traditionnel repose sur la
narration et la mise en
scène, le documentaire
issu du cinéma vérité bannit toute préparation pour
restituer la réalité dans son
immédiateté, comme si
elle se déroulait sous nos
yeux. En 1964,
Pennebaker et Leacok
fondent leur propre entreprise « Leacok
Pennebaker, Inc. ». En
1966, sur une proposition
d’Albert Grossman, l’agent
de Bob Dylan, Pennebaker
réalise Don’t look back, un
film sur la tournée anglaise
de Bob Dylan. Suit
Monterey Pop dont le succès projette les noms de
Jimi Hendrix, Otis Reding
et Janis Joplin sur la scène
américaine en leur donnant
un nouveau public. Ce film
inaugure toute une série
de documentaires sur le
rock, de Woodstock à
Keep On Rockin’. Parmi
ses films récents : Original
Cast Album, Company,
Dancers in School, The
Children’s Theatre of John
Donahue, Ziggy Stardust
and the Spiders from
Mars, Town Bloody Hall.
En collaboration avec sa
femme Chris Hegedus,
Pennebaker réalise The
Energy War, Rockaby ainsi
qu’un documentaire sur le
festival de danse organisé
en 1983 par la State
University of New York et la
Brooklyn Academy of
Music. Par ailleurs,
Pennebaker a enseigné à
mi-temps au C.C.N.Y., été
membre du comité de
consultation de la Jerome
Foundation et du National
Endowment for the Arts.
Depuis quelques années,
la société « Pennebaker
Associates », dirigée par
Frazer, le fils de
Pennebaker, a réalisé plusieurs vidéos sur la
musique et tourné
Depeche Mode 101, un
long-métrage sur le groupe
rock en scope
anglais du même nom.
D’autre part, elle archive
des concerts historiques
comme ceux de Janis
Joplin et Otis Redding à
Monterey.
Chris Hegedus
est tout d’abord réalisatrice à l’Université du
Michigan Hospital où elle
filme des opérations chirurgicales. Après s’être
installée à New York, elle
effectue le montage de
Town Bloody Hall pour D.
A. Pennebaker. En 1978,
avec Pat Powell et D. A.
Pennebaker, elle réalise
The Energy War, un soap
opera politique de cinq
heures sur la bataille du
président Jimmy Carter au
Congrès en faveur de la
réglementation de l’énergie
naturelle. Ce film scelle une
intime collaboration entre
D. A. Pennebaker et Chris
Hegedus. Plusieurs documentaires aux thèmes très
variés en résulteront :
DeLorean brosse le portrait
du constructeur automobile du même nom ;
Rockaby filme la répétition
de la pièce de Samuel
Beckett ; Dance Black
America relate le festival
organisé par la Brooklyn
Academy of Music ; The
Music Tells You présente
Branford Marsalis et son
trio ; le film The War Room,
retraçant la première campagne électorale de Bill
Clinton, est nominé aux
Academy Awards et reçoit
le prestigieux D.W. Griffith
Award du meilleur documentaire par le National
Board of Review.
technique
régie générale
Olivier Fioravanti
régie lumières
Guillaume Ravet
régie son
Gérard Police
notes de programme | 21

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