Mésogée N°64-2008 / 65-2009 - Museum d`histoire naturelle de
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Mésogée N°64-2008 / 65-2009 - Museum d`histoire naturelle de
Bulletin du Muséum d’histoire naturelle de Marseille Volumes 64|2008 65|2009 Mésogée Volumes 64|2008 / 65|2009 Mésogée Mésogée Volume 64 l 2008 et 65 l 2009 Bulletin du Muséum d’histoire naturelle de Marseille Ic Muséum d’histoire naturelle Marseille 2011 ISSN 0985-1016-X dépôt légal : mars 2011 Conception - Impression Ville de Marseille - Ceter Directeur de la revue : Review director Anne MEDARD-BLONDEL Directrice du Muséum d'histoire naturelle, Marseille Comité international de parrainage : International sponsorship board Louis BIGOT, Muséum d'histoire naturelle, Marseille, France. Mohamed BRADAI, INSTM, Salammbô, Tunisie. Michel BRUNET, Laboratoire de Paléontologie des Vertébrés, Poitiers, France. France DE BROIN, Institut de Paléontologie, MNHN, LA CNRS, Paris, France. Dominique DOUMENC, Laboratoire de Malacologie et Biologie des Invertébrés marins, MNHN, Paris, France. Giuliano FIERRO, Institut des Sciences de la Terre, Gênes, Italie. Patrice FRANCOUR, Laboratoire Environnement marin littoral, Université de Nice, France. André LANGANEY, Musée de l'Homme, Paris, France. Louis OLIVIER, Parc National du Mercantour, Nice, France. Panayotis PANAYOTIDIS, Centre Hellénique de Recherche Marine, Anavissos, Grèce. Jean-Claude QUERO, IFREMER, La Rochelle, France. Rachid SEMROUD, ISMAL, Wilaya de Tipaza, Algérie. Philippe TAQUET , Département Histoire de la Terre, MNHN, Paris, France. Denise VIALE, Laboratoire de Biologie marine, Université de Corté, France. Nardo VICENTE, CERAM, Marseille, France. Comité de rédaction : Redaction board Denise BELLAN-SANTINI, Station marine d'Endoume, Marseille, France. Gilles BONIN, Laboratoire de Biosystématique et d'Ecologie méditerranéenne, Marseille, France. Alain JEUDY DE GRISSAC PAMU, Sharm-El-Sheik, Egypte. Marc LAFAURIE, Laboratoire de Toxicologie Marine, Université de Nice, France. Jean PHILIP, Laboratoire de Sédimentologie et Paléontologie, Marseille, France. Comité d'édition : Edition board Sylvie PICHARD, Muséum d'Histoire Naturelle, Marseille, France. Philippe SIAUD, Muséum d'Histoire Naturelle, Marseille, France. MESOGEE, revue scientifique méditerranéenne, est la continuité du Bulletin du Muséum d'histoire naturelle de Marseille. Ce périodique publie en français ou en anglais, au rythme d'un volume annuel, des articles inédits dans les différents domaines des sciences naturelles.Les manuscrits doivent être conformes aux instructions aux auteurs et adressés, ainsi que toute correspondance, à : MESOGEE Muséum d'histoire naturelle Palais Longchamp F-13004 - MARSEILLE Téléphone : 04 91 14 59 50 Télécopie : 04 91 14 59 51 e-mail secrétariat d'édition: [email protected] Les manuscrits seront soumis par le comité de rédaction à l'examen de spécialistes français ou étrangers du sujet traité. Le Directeur de la publication fixe la liste des articles retenus pour chaque volume annuel. Tous les manuscrits doivent impérativement parvenir au Museum avant le 31 mai de l'année de parution. Les articles parus dans Mésogée sont listés et analysés dans la Base Pascal de l'INIST-CNRS. MESOGEE, Mediterranean scientific review, is the prolongation of the "Bulletin d'histoire naturelle de Marseille". It publishes, in French or in English, original papers in the different Natural Sciences matters, at the rate of one annual volume. Papers must be conform to the Guidelines of authors and send, with all other correspondence, to the Museum of Marseille (address over) The redaction committee will subject papers to international specialised referees. The review director fixes the list of agreed articles in each annual volume. All papers must imperatively be sent to the Museum before the 31st may of the publication year. Papers published in Mésogée are listed and analysed in the Pascal data base of INIST-CNRS. AVANT-PROPOS Au moment de la parution de ce numéro double 64/2008-65/2009, le Muséum vit au rythme de la biodiversité. Il est vrai que c’est là son lot quotidien depuis sa création. Mais 2010 est une année particulière. L’Organisation des Nations Unies a déclaré 2010 «Année internationale de la biodiversité» : les pressions anthropiques croissantes, urbanisation, démographie, pratiques agricoles, sont considérées aujourd’hui comme suffisamment préoccupantes pour justifier d’une attention particulière. Expositions, animations, ateliers, événementiels, publications, toute la programmation 2010 du Muséum de Marseille s’est inscrite dans ces problématiques. Mais finalement, qu’est-ce que la biodiversité ? La définition classique sur la diversité naturelle des organismes vivants est complétée par quelques mots qui s’appliquent particulièrement à ce double numéro de Mésogée : « Elle s’apprécie en considérant la diversité des écosystèmes, des espèces, des populations et celle des gènes dans l'espace et dans le temps, ainsi que l'organisation et la répartition des écosystèmes aux échelles biogéographiques. » En effet, observer le vivant, conserver des spécimens et publier ne sont pas des travaux inutiles, datant du siècle révolu de création de cette revue. Une observation de terrain non publiée est inexploitable par la communauté scientifique, comme, par exemple, la présence du seps strié Chalcides striatus dans les Alpes de Haute-Provence, qui bien que connue ne bénéficiait pas jusqu’à présent de publication (C. CARRERA et P. SIAUD). L’enrichissement des collections d’un Muséum n’est pas uniquement à but muséographique pour des expositions temporaires ou permanentes. Les nouvelles découvertes, les récoltes et les collections scientifiques permettent d’explorer les faunes et écosystèmes présents et passés. Ainsi B. LEFEBVRE et al. poursuivent l’étude des échinodermes de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental au Maroc à partir de nos collections et celles d’autres établissements français. Les interactions entre espèces constituent un champ disciplinaire vaste. L’étude de l’infestation des anguilles Anguilla anguilla par le nématode Anguillicola crassus dans l’estuaire du Mafrag (Algérie) par Z. BOUDJADI et al., en plus d’être la première étude menée sur le sud de la Méditerranée, permet de rapprocher les résultats d’études similaires. Dans son article sur le système tiques-lézards du nord-est de l’Algérie, Z. BOUSLAMA et al. nous alertent sur les parasites des tiques. Ces agents pathogènes nous renvoient au contrôle de la circulation des espèces protégées par la Convention de Washington, dont les reptiles. Les saisies fréquentes de tortues, souvent porteuses de tiques, sont autant de vecteurs de pénétration de pathologies exotiques sur le territoire français. Ces exemples illustrent une partie des sujets traités dans ce numéro et la revue Mésogée en général. Anne MEDARD-BLONDEL Directrice de publication Directrice - Conservatrice en Chef du Patrimoine du Muséum d’histoire naturelle de Marseille Résumé Le site de Bou Nemrou, situé dans le Tafilalt occidental (Anti-Atlas oriental, Maroc) compte parmi les rares gisements à préservation exceptionnelle (Lagerstätten) connus actuellement dans l’Ordovicien supérieur à avoir livré des restes d’organismes peu ou pas minéralisés, associés à une faune marine benthique abondante et diversifiée. Ce même gisement a également livré plusieurs niveaux très riches en échinodermes (starfish beds), dont la préservation est tout à fait remarquable. Elle résulterait de l’enfouissement rapide, in situ et de leur vivant, de véritables « prairies » à échinodermes par des dépôts de tempête. Les starfish beds de Bou Nemrou sont dominés par les éocrinoïdes et les stylophores, auxquels sont associés des crinoïdes, des cyclocystoïdes, des édrioastéroïdes et des ophiures. Il s’agit d’un assemblage caractéristique des eaux froides de la Province méditerranéenne. Ces niveaux pourraient témoigner de la colonisation opportuniste du fond marin par des populations denses d’échinodermes, suite à des pertubations environnementales. Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc) Bertrand LEFEBVRE1, Fleur NOAILLES1, Aaron W. HUNTER2, Elise NARDIN3, Serge REGNAULT4, Benjamin FRANZIN1, Peter VAN ROY5 & Khadija EL HARIRI6 UMR-CNRS 5125 Paléoenvironnements & Paléobiosphère, Université Lyon 1, France. 2The Natural History Museum, Londres, Royaume-Uni 3LMTG-Observatoire Midi-Pyrénées, Toulouse, France. 4-Muséum d’histoire naturelle, Nantes, France. 5-School of Geological Sciences, University College, Dublin, Irlande. 6-Faculté des Sciences et Techniques, Université Cadi Ayyad, Marrakech, Maroc. 1- [email protected] Mots-clés : Anti-Atlas, Maroc, préservation exceptionnelle, Lagerstätten, Ordovicien, échinodermes. Key words : Anti-Atlas, Morocco, exceptional preservation, Lagerstätten, Ordovician, echinoderms Mésogée Volume 64l 2008 The site of Bou Nemrou, in the Western Tafilalt (eastern Anti-Atlas, Morocco) is one of the very few Konservat-Lagerstätten known so far in the world to have yielded numerous remains of Late Ordovician softbodied fossils associated with an abundant and diverse marine benthic fauna. This locality has also yielded several levels (starfish beds) extremely rich in exquisitely preserved echinoderms. Their remarkable preservation possibly results from the rapid, in situ burial of large, particularly dense, living communities (echinoderm meadows) by storm deposits. The Bou Nemrou starfish beds are dominated by eocrinoids and stylophorans, associated with crinoids, cyclocystoids, edrioasteroids, and ophiuroids. This composition is typical of the cool assemblages of the Mediterranean Province. The Bou Nemrou starfish beds may result from the opportunistic colonisation of the sea-floor by dense populations of echinoderms, during short phases of environmental disturbance. Bien qu’ils soient apparus probablement dès la fin du Précambrien (il y a environ 630 millions d’années), les métazoaires (animaux pluricellulaires) ne se diversifient que bien plus tard, au cours du Paléozoïque inférieur, en deux étapes majeures. La plus ancienne (il y a environ 542 millions d’années), couramment désignée « explosion cambrienne », est caractérisée par l’apparition massive et relativement rapide (à l’échelle des temps géologiques) des plus anciens représentants connus de tous les principaux phylums (arthropodes, brachiopodes, chordés, échinodermes, mollusques, etc.) (Valentine et al., 1999 ; Lieberman, 2008). L’explosion cambrienne est également marquée par l’acquisition de squelettes biominéralisés chez de nombreux groupes d’invertébrés marins, ainsi que par un fort accroissement de la complexité des écosystèmes (réseaux trophiques, etc…; Butterfield, 2000 ; Vannier & Chen, 2005) et d’importantes modifications du milieu marin (« révolution agronomique » liée à une exploitation plus intense des fonds meubles par les organismes fouisseurs (Dornbos et al., 2005). Cette première étape est la plus spectaculaire et actuellement la mieux connue, en raison de la découverte de nombreux gisements dits « à préservation exceptionnelle » (« 7 Konservat-Lagerstätten »), dans lesquels les parties « molles » (peu ou pas minéralisées) des organismes peuvent être conservées (Butterfield, 2003) : Sirius Passett (Groënland, Cambrien inférieur, Conway Morris et al., 1987), Chengjiang (Chine, Cambrien inférieur, Chen, 2004, Hou et al., 2004, Zhu et al., 2005), Burgess Shale (Canada, Cambrien moyen, Conway Morris, 1986, Briggs et al., 1994, Caron & Jackson, 2006, 2008) ou encore les niveaux à « anthraconite » (« Orsten ») de l’Alum Shale (Suède, Cambrien supérieur, Müller & Walossek, 1985). Ces gisements fournissent une image plus complète de la biodiversité passée que la très grande majorité des sites fossilifères, dans lesquels seuls les restes biominéralisés sont conservés (squelettes s.l.). Introduction Abstract The starfish beds from the Late Ordovician Bou Nemrou KonservatLagerstätte, in the Western Tafilalt (Morocco) 8 Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). La seconde phase de diversification ou « grande biodiversification ordovicienne » (il y a environ 488 millions d’années) est caractérisée par un accroissement exponentiel de la diversité au sein de la plupart des phylums apparus au cours du Cambrien (Webby, 2004; Harper, 2006). Cette explosion de la biodiversité semble étroitement corrélée à une phase importante de diversification du microphytoplancton (acritarches notamment) (Servais et al., 2008). D’un point de vue écologique, elle se traduit par la colonisation de l’ensemble de la tranche d’eau et par une exploitation encore plus intensive et en profondeur des fonds marins. L’ampleur de la biodiversification ordovicienne demeure toutefois probablement largement sous-estimée car contrairement à l’explosion cambrienne, elle n’a été documentée jusqu’à présent qu’à partir d’assemblages constitués essentiellement de restes minéralisés. Très peu de gisements à préservation exceptionnelle ont été décrits dans l’Ordovicien. De plus, ils n’ont livré que des assemblages marins peu diversifiés, associés à des conditions environnementales très particulières (fonds anoxiques) : Winnieshiek (Ordovicien moyen, Canada ; Liu et al., 2006), Beecher’s trilobite bed (Etats-Unis, Ordovicien supérieur ; Whittington & Almond, 1987 ; Fortey, 2000) et surtout, Soom Shale (Afrique du Sud, Ordovicien supérieur ; Aldridge et al., 2001 ; Whittle et al., 2007). Au cours des dix dernières années, une douzaine de gisements à préservation exceptionnelle ont été découverts dans l’Ordovicien inférieur et supérieur de l’AntiAtlas marocain (Van Roy, 2006a). Contrairement à tous les Lagerstätten ordoviciens décrits jusqu’à présent, les sites marocains ont livré des assemblages marins particulièrement riches et diversifiés, dans lesquels abondent non seulement les formes « à squelette » (brachiopodes, échinodermes, mollusques, trilobites), mais aussi les empreintes laissées par d’autres types d’organismes généralement non fossilisés : démosponges, machaeridiens, différentes variétés de « vers », une diversité insoupçonnée d’arthropodes (aglaspidides, chélionellides, euryptérides, limules, marrellomorphes, …), ainsi que des organismes « médusoïdes » aux affinités plus énigmatiques, comme par exemple les eldonioïdes. L’analyse scientifique des Lagerstätten marocains débute à peine (Samuelsson et al., 2001 ; Van Roy 2006a, 2006b ; Van Roy & Tetlie, 2006 ; Botting, 2007 ; Vinther et al., 2008). Elle devrait offrir, à terme, l’opportunité inédite de pouvoir enfin comparer, à préservation équivalente, des assemblages marins riches et diversifiés de l’Ordovicien avec ceux, plus anciens, mais mieux documentés, du Cambrien. Dans la plupart des gisements à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien du Maroc, les échinodermes représentent, avec certains mollusques et les trilobites, l’un des constituants majeurs des assemblages fossiles (à la fois en nombre de taxons présents et en nombre d’individus). Dans certains horizons bien définis, ils présentent en outre la particularité de former des accumulations particulièrement denses (plus de 100 individus/m2), dominées par un ou deux taxons, et dans lesquelles les autres organismes (arthropodes, brachiopodes, mollusques) sont nettement plus rares que dans les niveaux immédiatement sus- et sous-jacents (Lefebvre, 2007 ; Lefebvre et al., 2007). De tels niveaux à échinodermes (souvent désignés « starfish beds ») ne sont pas rares au Paléozoïque, mais ils ne sont que très rarement associés à des gisements à préservation exceptionnelle : c’est le cas, par exemple, dans le célèbre Konservat-Lagerstätte d’Hunsrück (Allemagne, Dévonien inférieur ; Bartels et al., 1998). Cette note a pour objectif de décrire brièvement les principales caractéristiques (taxonomiques, taphonomiques, paléoécologiques, paléogéographiques, …) des niveaux à échinodermes découverts dans le gisement à préservation exceptionnelle de Bou Nemrou (Ordovicien supérieur basal), situé dans le Tafilalt occidental (Anti-Atlas oriental, Maroc). MATÉRIEL ET MÉTHODES B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les excavations du gisement de Bou Nemrou sont toutes situées dans les niveaux grésoquartzitiques attribués au Groupe du Premier Bani (Figure 3). La lithologie et les structures sédimentaires associées (rides, indices d’émersion) témoignent d’un milieu marin peu profond, au-dessus de la limite d’action des vagues de tempête (offshore supérieur à shoreface) (Van Roy, 2006a). Les échinodermes semblent concentrés dans au moins deux niveaux distincts, dans lesquels ils apparaissent en masse. Le reste de la faune est constitué de trilobites (Basilicus, Placoparia, Selenopeltis), d’arthropodes chélionellides (Duslia insignis), de conulaires, d’eldonioïdes, de machaeridiens et d’organismes vermiformes (Figure 1A). L’âge précis des niveaux à échinodermes est difficile à estimer (Darriwilien supérieur à Sandbien basal). Tous les essais de datation à partir de microfossiles (acritarches) se sont révélés jusqu’à présent infructueux (Van Roy, 2006a). La comparaison des assemblages d’échinodermes du gisement de Bou Nemrou avec ceux décrits dans l’Anti-Atlas central (où la série est davantage dilatée) montre toutefois qu’ils présentent davantage d’affinités avec ceux provenant de la Formation d’Izegguirène (Sandbien basal) qu’avec ceux, plus anciens, de la Formation 9 Mésogée Volume 64l 2008 Le Jbel Tijarfaïouine est un massif montagneux appartenant au domaine du Tafilalt occidental, dans l’Anti-Atlas oriental (Figure 2). Il est situé à environ mi-distance entre Msissi et Rissani, au Nord de la route reliant Alnif à Rissani. Le gisement de Bou Nemrou est situé sur le flanc Ouest de ce massif (carte géologique de Todrha-Maïder au 1/200000 ; Destombes, 2006a). Le massif de Tijarfaïouine représente une vaste structure monoclinale faiblement pentée vers le Sud-Est. Il est constitué d’une puissante série attribuée à l’Ordovicien moyen et supérieur (Destombes, 2006a, 2006b). L’Ordovicien moyen y est représenté par les argilites du sommet de la Formation du Tachilla (Darriwilien supérieur) que surmontent une centaine de mètres de dépôts siliciclastiques (grès, quartzites, argilites gréseuses), particulièrement riches en micas et dont la succession a été décrite en détail par Destombes (2006a). Ces dépôts représentent l’équivalent latéral du Groupe du Premier Bani (Darriwilien supérieur – Sandbien basal) qui constitue, dans l’Anti-Atlas central, une puissante barre grésoquartzitique (250 à 400 mètres d’épaisseur) et un élément géomorphologique majeur dans le paysage. Dans le massif de Tijarfaïouine, la transition entre les dépôts du Groupe du Premier Bani et ceux, sus-jacents et également siliciclastiques, de la base du Groupe du Ktaoua (Formation inférieure du Ktaoua, Sandbien inférieur – Katien inférieur) est particulièrement peu marquée. Le sommet de la série ordovicienne est représenté par la Formation supérieure de Tiouririne (Katien supérieur basal) que surmontent, en discordance, soit des grès quartzeux attribués au Groupe du Deuxième Bani (Hirnantien), soit des argilites et des grès de la base du Silurien (Llandovery) (Destombes, 2006a, 2006b). Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). Le gisement de Bou Nemrou, parfois également désigné KR-1 (Van Roy, 2006a) ou ECR-F4, consiste en plusieurs petites carrières artisanales ouvertes à flanc de colline dans le Jbel Tijarfaïouine (Figure 1B). Ces excavations, situées entre environ 1050 et 1090 mètres d’altitude, ont été creusées dès la fin des années 1990, afin d’en extraire des trilobites complets, souvent de grande taille (Selenopeltis, notamment). Au début des années 2000, elles ont connu un regain d’activité avec la découverte de nombreux fossiles énigmatiques (eldonioïdes) initialement interprétés comme des « méduses », puis avec l’exploitation commerciale des niveaux à échinodermes. Depuis plusieurs années, les grandes dalles de grès couvertes d’ophiures et d’éocrinoïdes provenant de ce gisement, sont régulièrement mises en vente chez les marchands locaux (Alnif, Erfoud), mais aussi sur internet et dans toutes les principales bourses de minéraux et fossiles d’Europe (Munich, Sainte-Marie-aux-Mines, …) et du monde (Tucson). Figure 2 Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). Localisation géographique du gisement de Bou Nemrou (Jbel Tijarfaïouine, Tafilalt occidental, Anti-Atlas oriental, Maroc). 10 d’Ouine-Inirne (Darriwilien terminal). En effet, ces derniers apparaissent relativement peu diversifiés et constitués exclusivement de mitrates (Anatifopsis, Aspidocarpus, Eumitrocystella), tandis que les niveaux sus-jacents de la Formation d’Izegguirène semblent plus diversifiés, avec notamment des cornutes (Scotiaecystis) et des ophiures (Gutiérrez-Marco et al., 2003), deux groupes largement représentés à Bou Nemrou. Figure 3 Position stratigraphique présumée du gisement de Bou Nemrou (indiquée par une étoile). Fm. supérieure du 2ème Bani Himantien Himantien Gr. du 2ème Bani Fm. inférieure du 2ème Bani Ashgill Fm. supérieur du Ktaoua Kralodvorien Katien Gr. du Ktaoua Fm. inférieure de Ktaoua Bérounien Sandbien Caradoc Dobrotivien (p.p) Fm. supérieur de Tiouririne Gr. du 1er Bani (p.p.) Fm. Izegguirène * La position stratigraphique est exprimée par rapport aux principales subdivisions de l'Ordovicien supérieur définies par la Sous-Commission Internationale de Stratigraphie de l'Ordovicien (ISOS), les échelles régionales utilisées pour les îles britanniques (Avalonia), l'Afrique du Nord et l'Europe du Sud-Ouest (Province méditerranéenne) et enfin, les différentes unités lithostratigraphiques identifiées dans l'Anti-Atlas (corrélations d'après Destombes et al., 1985 ; Elaouad-Debbaj, 1986 ; GutiérrezMarco et al., 2003 ; Bourahrouh et al., 2004 ; Webby et al., 2004). Le matériel d’étude examiné dans le cadre de cette étude provient essentiellement de la collection Reboul, déposée au Muséum d’Histoire Naturelle de Marseille (MHNM, 102 pièces). Du matériel complémentaire a été observé dans les collections publiques suivantes : Museum für Naturkunde, Berlin (MB, 1 pièce), Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes (MHNN, 3 pièces), Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse (MHNT, 26 pièces) et Université Claude Bernard - Lyon 1 (FSL, 6 pièces). DISCUSSION TAPHONOMIE Au cours de ces dernières années, la multiplication des expériences de taphonomie B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes du gisement de Bou Nemrou comptent parmi les «starfish beds» les plus diversifiés découverts à ce jour dans l'Ordovicien supérieur du Maroc (environ une quinzaine de taxons appartenant à au moins six classes différentes), voire de l'ensemble du domaine péri-gondwanien. Cependant, les assemblages de Bou Nemrou sont très largement dominés, en nombre d'individus, par les représentants de deux classes : les éocrinoïdes et les stylophores. Les éocrinoïdes ne sont connus que par un seul genre : Ascocystites (Régnault, 2007). Il s'agit d'une forme pédonculée, dont les individus, préservés couchés à plat sur le fond, plus ou moins alignés les uns à côté des autres, peuvent recouvrir de vastes surfaces (Figure 5). Les stylophores apparaissent beaucoup plus diversifiés, avec à la fois des cornutes (au moins trois formes présentes, dont Cothurnocystis, Milonicystis et Scotiaecystis (Figure 6) et des mitrates (Anatifopsis, Aspidocarpus, Diamphidiocystis et Eumitrocystella (Figure 4A). Cependant, certains stylophores (Anatifopsis, Eumitrocystella et Scotiaecystis) semblent nettement plus abondants que les autres. Les crinoïdes, bien que relativement rares, semblent assez diversifiés avec au moins deux formes présentes (Franzin, 2008). La plupart des individus observés sont de relativement petite taille (Figure 7B). Toutefois, la découverte d'un tube anal isolé de près de sept centimètres de long, appartenant vraisemblablement à un représentant des iocrinidés, suggère l'existence de formes beaucoup plus grandes (Figure 8B). Les édrioastéroïdes sont représentés par au moins deux formes différentes d'isorophides, dont tous les individus sont fixés sur la paroi externe de conulaires de grande taille (Sumrall & Zamora, 2007). Les ophiures sont relativement communes, mais apparemment peu diversifiées et représentées uniquement par des protastérides (Figures 7A, 8A). Enfin, les cyclocystoïdes ne sont connus que par un seul échantillon, remarquablement préservé, montrant les deux faces de l'organisme (L. Lacombe, comm. pers.). Deux autres classes d'échinodermes (étoiles de mer et somastéroïdes) ont parfois été mentionnées en provenance de Bou Nemrou (Lefebvre & Prandini, 2005a, 2005b ; Lefebvre et al., 2007), mais leur présence n'a pas été confirmée pour l'instant. Mésogée Volume 64l 2008 Dans le gisement de Bou Nemrou, les échinodermes sont particulièrement abondants (densité localement supérieure à 100 individus/m2) dans au moins deux horizons bien définis, dont la position stratigraphique a été précisée par Van Roy (2006a). Ils sont préservés dans des niveaux gréseux présentant une teinte rouge-violacée caractéristique, très riches en micas et dans lesquels la faune associée est particulièrement rare et peu diversifiée par rapport aux niveaux sus et sous-jacents. La préservation des échinodermes est tout à fait remarquable, puisque des structures particulièrement fragiles, telles que les appendices nourriciers (bras, brachioles, aulacophores) sont, dans la grande majorité des cas, conservés intacts et en parfaite connexion anatomique avec la thèque (Figure 4). De nombreux mitrates sont préservés avec leur aulacophore en position déployée. Chez les formes pédonculées (crinoïdes, éocrinoïdes), les tiges sont le plus souvent également préservées intactes, à l’exception de leur extrémité distale qui est absente chez tous les individus observés. Chez les formes les plus abondantes (par exemple, l’éocrinoïde Ascocystites), il est possible d’observer une très large gamme de tailles au sein de l’assemblage (Régnault, 2007). Lorsque des plaques de grès suffisamment larges sont disponibles, il est fréquent d’observer un certain alignement des individus selon une direction privilégiée. Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). RÉSULTATS 11 Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). expérimentale menées sur différents échinodermes actuels a permis de mieux comprendre les processus en cause dans leur préservation, mais aussi d’établir une «classification taphonomique» pour ces organismes (Brett et al., 1997). Celle-ci distingue trois catégories principales (notées de 1 à 3) au sein des échinodermes, en fonction de la résistance de leur squelette à la désarticulation. Les formes de type 1 (ophiures, étoiles de mer), qui possèdent les tests les plus fragiles, sont donc a priori les moins susceptibles d’être préservées dans le registre fossile. Inversement, le test des échinodermes de type 3 (oursins irréguliers), qui est formé d’éléments squelettiques (plaques) fortement suturés les uns aux autres, possède par conséquent un potentiel de préservation plus élevé. La grande majorité des échinodermes récoltés dans le gisement de Bou Nemrou possèdent des squelettes particulièrement fragiles, dont les éléments constitutifs ne sont suturés que de manière très lâche et/ou dont la cohérence devait être en grande partie assurée par des tissus mous (cyclocystoïdes, éocrinoïdes, édrioastéroïdes, ophiures, stylophores). Il s’agit donc d’échinodermes de type 1. Chez les crinoïdes, certaines formes pourraient être classées au sein du type 2, en raison de l’existence de modules squelettiques apparemment plus cohérents et résistants (par exemple, le tube anal des iocrinidés). 12 Par conséquent, la parfaite préservation de milliers d’échinodermes de type 1 apparaît tout à fait exceptionnelle et requiert des conditions environnementales et taphonomiques très particulières. En effet, les expériences de taphonomie expérimentale indiquent que, même dans un milieu calme, la désarticulation complète d’un squelette d’échinoderme de type 1 est un phénomène rapide, qui peut prendre de quelques jours à quelques semaines (Brett et al., 1997). Aussi, la préservation tout à fait remarquable de la très grande majorité des individus, dont même les appendices les plus fins et les plus délicats sont intacts et en parfaite connexion anatomique (Figure 4B), implique l’enfouissement très rapide de communautés entières d’échinodermes, probablement in situ et de leur vivant. Cette interprétation est en bon accord avec les données de la sédimentologie, qui indiquent que les niveaux à échinodermes semblent associés à des dépôts de fortes tempêtes. Il est donc probable que les échinodermes ont été enfouis, de manière quasi-instantanée par des dépôts de tempête suffisamment épais pour que les formes vagiles (ophiures, stylophores) ne puissent pas regagner la surface et demeurent piégées par cet afflux soudain de sédiments. La préservation de nombreux mitrates avec leur aulacophore en position déployée (Figure 4A) représente un argument supplémentaire en faveur de l’enfouissement rapide d’organismes vivants. En effet, les exemples de mitrates préservés avec leur aulacophore en position déployée sont extrêmement rares dans le registre fossile (Parsley & Gutiérrez-Marco, 2005). Cette posture est en général considérée comme la position de vie des mitrates (Lefebvre, 2003). Ces organismes sont généralement préservés avec leur appendice recourbé au–dessus de la thèque. Cette posture est le plus souvent interprétée comme une position de détresse et/ou résultant de la contraction post-mortem de cette structure (Lefebvre, 2003 ; Parsley & Gutiérrez-Marco, 2005). De plus, la préservation d’ophiures « figées » en train de capturer d’autres organismes (petits éocrinoïdes), manifestement pour s’en nourrir (Figure 8A), semble confirmer que les échinodermes ont été enfouis de leur vivant et de manière quasi-instantanée. La présence de formes pédonculées (crinoïdes, éocrinoïdes) préservées côte à côte avec des échinodermes manifestement épibenthiques (cornutes ; Figure 6A) indique que les formes pourvues d’une tige ne sont pas préservées en position de vie, mais qu’elles ont probablement été arrachées de leurs points d’ancrage et couchées sur le fond, vraisemblablement par un fort courant (alignement des individus). Elles ne sont pas en position de vie et elles ont donc subi un certain transport, comme le suggère d’ailleurs l’absence systématique de l’extrémité distale des tiges. Toutefois, la préservation tout à Toutefois, les caractéristiques décrites ci-dessus ne sont pas propres aux niveaux à échinodermes de Bou Nemrou. Elles se retrouvent en fait dans la très grande majorité des «starfish beds» fossiles (Fujita, 1992 ; Aronson & Blake, 1997 ; Lefebvre, 2007), comme par exemple dans le Cambrien inférieur et moyen de Chine (Parsley & Zhao, 2006 ; Zhao et al., 2007), l’Ordovicien moyen du Morbihan (Hunter et al., 2007), l’Ordovicien supérieur de Bohême et d’Ecosse (Ubaghs, 1979 ; Petr, 1989 ; Donovan et al., 1996), le Dévonien inférieur d’Allemagne (Bartels et al., 1998), le Carbonifère inférieur de l’Ohio (Kesling & Le Vasseur, 1971), le Trias moyen de Pologne (Zaton et al., 2007), l’Eocène terminal de l’Antarctique (Blake & Aronson, 1998) ou encore le Miocène supérieur et le Pliocène terminal du Japon (Ishida & Kurita, 1998 ; Ishida et al., 1998). Enfin, ces mêmes caractéristiques (fortes densités des individus, assemblages dominés numériquement par un ou deux taxon(s), faune associée rare) se retrouvent également dans la nature actuelle. Ainsi, certaines populations denses d’échinodermes (ophiures notamment) peuvent former un véritable tapis vivant (« prairie ») qui peut parfois totalement recouvrir le fond marin et s’étendre sur plusieurs dizaines à centaines de km2, comme par exemple, au large du Japon (Fujita & Ohta, 1989, 1990 ; Fujita, 1992 ; Aronson & Blake, 1997 ; Kogure & Nagasawa, 2004). La distribution B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI PALÉOÉCOLOGIE Outre une qualité de préservation tout à fait exceptionnelle des individus, les niveaux à échinodermes du gisement de Bou Nemrou présentent également un certain nombre de caractéristiques très particulières d’un point de vue paléoécologique : il s’agit d’accumulations relativement denses (localement, plus de 100 individus/m2), constituées quasi-exclusivement d’échinodermes (faune associée rare et peu diversifiée), qui ne s’observent que très ponctuellement dans la série, dans des horizons stratigraphiques bien définis. Malgré une diversité taxonomique relativement élevée (une quinzaine de taxons appartenant à six classes), ces assemblages sont en réalité largement dominés (en nombre d’individus) par une poignée d’espèces (l’éocrinoïde Ascocystites, associé à quelques stylophores). La composition taxonomique de ces niveaux apparaît donc très différente de celle du reste de la série, où la faune associée est nettement plus riche et diversifiée (brachiopodes, mollusques, trilobites) et où la contribution des échinodermes est nettement moindre. Mésogée Volume 64l 2008 L’analyse sédimentologique des niveaux ayant fourni des restes d’organismes peu ou pas minéralisés (chélionellides, eldonioïdes, « vers » ; Figure 1A) ne montre apparemment pas de différence significative, en terme de milieu de dépôt et de lithologies, avec les horizons à échinodermes. Il est probable que la préservation exceptionnelle de ces organismes résulte, tout comme celle des échinodermes, de leur enfouissement rapide, in situ, par des dépôts de tempête relativement épais. Toutefois, la lithologie (grès) et la présence de nombreuses traces fossiles (bioturbation importante) suggèrent l’existence d’une bonne oxygénation au niveau du fond, a priori peu favorable à la préservation de « parties molles ». D’autres processus taphonomiques ont donc dû probablement intervenir, comme par exemple le développement de voiles bactériens, qui auraient pû « sceller » les cadavres et empêcher leur dégradation (Van Roy, 2006a). Aucune trace de voile bactérien n’a été mise en évidence, jusqu’à présent, dans les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou ; aucune « partie molle » d’échinoderme (par exemple, pieds ambulacraires) n’a par conséquent été observée dans ce gisement. Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). fait exceptionnelle des individus pourvus d’un pédoncule (brachioles et bras intacts, en parfaite connexion anatomique) indique que leur transport a probablement été limité à la fois dans le temps et dans l’espace. Cette interprétation semble confirmée par la grande diversité des tailles observée au sein des individus de l’éocrinoïde Ascocystites (absence de tri) (Régnault, 2007). 13 Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). géographique et la densité des populations denses actuelles semblent en grande partie contrôlées par l’intensité de la prédation, la nature du substrat et le flux de matière organique. Toutefois, le fait que les échinodermes soient les seuls organismes à former de véritables prairies dans les grands fonds (étage bathyal) suggère que leur métabolisme leur permet de survivre dans des zones défavorables au maintien de représentants d’autres groupes, en particulier dans des zones où le flux de particules organiques est trop faible (environnements oligotrophes) (Emson, 1998). Par conséquent, la plupart des «starfish beds» fossiles, qui correspondent à l’établissement intensif mais très ponctuel (dans le temps et dans l’espace) de fortes densités d’échinodermes sont le plus souvent interprétés comme des assemblages opportunistes, capables de coloniser rapidement le fond marin en cas de perturbations temporaires des conditions environnementales, telles qu’une forte chute de la productivité, défavorable à la persistance d’autres groupes d’invertébrés marins (d’où une faune associée rare et peu diversifiée) (Aronson & Blake, 1997 ; Alvaro et al., 2001 ; Lefebvre, 2007). 14 Dans leur grande majorité, les échinodermes du gisement de Bou Nemrou possédaient un mode de vie suspensivore. Ils montrent un remarquable étagement au sein de la colonne d’eau, avec certains organismes qui filtraient immédiatement au niveau de l’interface eau-sédiment (0-5 cm ; cyclocystoïdes, ophiures, stylophores), d’autres capables de filtrer dans la partie basse de la tranche d’eau (de 5 à 15-20 cm au-dessus du fond ; petits éocrinoïdes et la plupart des crinoïdes), et enfin, certains d’entre eux, dont la longue tige leur permettait d’atteindre des hauteurs nettement plus conséquentes au sein de la colonne d’eau (à plus de 20 cm au-dessus du fond ; grands spécimens d’Ascocystites et de crinoïdes iocrinidés). Les édrioastéroïdes, malgré leur petite taille avaient également probablement accès à des zones relativement élevées au sein de la colonne d ‘eau, en raison de leur fixation sur la paroi externe de conulaires de grande taille. Enfin, l’observation d’ophiures préservées en train de saisir de petits éocrinoïdes à l’aide de leurs bras (Figure 8A) semble indiquer que ces astérozoaires pouvaient également, au moins occasionnellement, développer un mode de vie macrophage (nécrophagie ou prédation). Des observations comparables ont été réalisées chez des ophiures de l’Ordovicien supérieur de Bohême : plusieurs individus de l’espèce Bohemura jahni y sont préservés en train de capturer des hyolithes ou d’autres échinodermes (solutes) (Petr, 1989). AFFINITÉS DES FAUNES DE BOU NEMROU La composition de l'assemblage de Bou Nemrou, largement dominé par les éocrinoïdes et les stylophores, apparaît globalement très proche de celle de nombreux «starfish beds» découverts récemment dans l'Ordovicien inférieur de l'Anti-Atlas central (région de Zagora). Toutefois, dans le détail, ces assemblages présentent assez peu de taxons en commun (Anatifopsis) et, de plus, ils sont associés à des milieux de dépôt nettement différents : ceux de l'Ordovicien inférieur sont en général associés à des environnements plus calmes (plus profonds et/ou protégés). L'assemblage de Bou Nemrou montre également de fortes affinités avec celui décrit dans l'Ordovicien moyen (Formation d'Ouine-Inirne, Darriwilien supérieur) de Tizi n'Tanekfoult, dans l'Anti-Atlas central (Chauvel, 1971 ; Cripps, 1990 ; Beisswenger, 1994 ; Lefebvre, 2007). L'assemblage de Tizi n'Tanekfoult est quasi-exclusivement constitué de mitrates (Anatifopsis sp., Aspidocarpus discoidalis et Eumitrocystella savilli), dont les restes abondent dans des niveaux de tempête riches en micas flottés et particulièrement pauvres en faune associée (rares trilobites). Cependant, l'assemblage de Bou Nemrou est nettement plus diversifié que celui de Tizi n'Tanekfoult et les conditions de préservation sont différentes (la plupart des échinodermes provenant de Tizi n'Tanekfoult sont désarticulés). A l'exception du gisement de Tizi n'Tanekfoult, l'assemblage de Bou Nemrou ne B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Mésogée Volume 64l 2008 D'une manière générale, la plupart des taxons présents dans les niveaux à échinodermes du gisement de Bou Nemrou montrent de fortes affinités avec les assemblages décrits dans l'Ordovicien moyen à supérieur des autres régions de la Province méditerranéenne (Afrique du Nord, Alpes carniques, Bohême, Massif armoricain, Montagne Noire, Péninsule ibérique, Sardaigne, Turquie). Ainsi, l'éocrinoïde Ascocystites a été déjà signalé dans l'Ordovicien moyen de Normandie et du Portugal, ainsi que dans l'Ordovicien supérieur de Bohême (Barrande, 1887 ; Chauvel, 1941 ; Régnault, 1990 ; Young & Donovan, 1993). Chez les stylophores, en dehors de formes relativement cosmopolites (Anatifopsis, Cothurnocystis), la plupart des taxons de Bou Nemrou présentent un caractère typiquement « méditerranéen ». Le genre Aspidocarpus, par exemple, a été signalé également dans l'Ordovicien moyen et supérieur du Massif armoricain, ainsi que dans l'Ordovicien supérieur de Bohême (Ubaghs, 1979 ; Lefebvre 2000). La forme présente à Bou Nemrou semble d'ailleurs beaucoup plus proche morphologiquement de celle décrite en Bohême (A. bohemicus), que de celle présente dans l'Ordovicien moyen de Tizi n'Tanekfoult (A. discoidalis). Le genre Eumitrocystella n'a été décrit jusqu'à présent que dans l'Ordovicien moyen du Maroc (Beisswenger, 1994) ; il pourrait toutefois être également présent dans l'Ordovicien supérieur de Bohême. Le cornute Milonicystis n'était connu jusqu'alors que dans l'Ordovicien moyen (Darriwilien supérieur) du Massif armoricain (Chauvel, 1986). Le genre Scotiaecystis présente une assez forte distribution paléogéographique au cours de l'Ordovicien moyen et supérieur. La forme présente à Bou Nemrou semble toutefois beaucoup plus proche morphologiquement des taxons décrits dans l'Ordovicien moyen de Bretagne (S. guilloui) et de Bohême (S. bouceki), ainsi que dans l'Ordovicien supérieur d'Espagne (S. jefferiesi), que de ceux signalés dans l'Ordovicien supérieur de la marge orientale de la Laurentia (S. collapsa et S. curvata) (Bather, 1913 ; Ubaghs, 1968 ; Cripps, 1988 ; Gil Cid et al., 1996 ; Lefebvre & Vizcaïno, 1999). De même, les échantillons de Diamphidiocystis découverts à Bou Nemrou montrent beaucoup plus d'affinités avec la forme signalée dans l'Ordovicien Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental. (Maroc) présente pratiquement aucun point commun avec la plupart des faunes d'échinodermes décrites jusqu'à présent dans l'Ordovicien moyen et supérieur de l'Anti-Atlas (Choubert & Termier, 1947 ; Termier & Termier, 1947, 1950 ; Chauvel, 1966, 1969, 1977, 1978; Alvaro et al., 2007). En effet, celles-ci sont largement dominées par différents types de « cystoïdes » et, en particulier, par les aristocystitides (Aristocystites, Calix, Maghrebocystis, Phlyctocystis). Ces faunes n'ont livré, jusqu'à présent, aucun représentant de stylophore ou d'éocrinoïde (les deux groupes les plus abondants à Bou Nemrou), mais seulement de très rares exemplaires d'édrioastéroïdes. Inversement, aucun « cystoïde » (et notamment, aucun aristocystitide) n'a été découvert jusqu'à présent dans le gisement de Bou Nemrou. Il est probable que ces différences s'expliquent, au moins en partie, par des exigences écologiques distinctes. En effet, les aristocystitides sont toujours associés à des fonds meubles (le plus souvent vaseux) et à des environnements extrêmement calmes (milieux protégés et/ou en-dessous de la limite d'action des vagues de tempête) (Lefebvre & Fatka, 2003). Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou étant associés à des milieux de dépôt peu profonds et agités (shoreface à offshore supérieur), l'absence des aristocystitides y est donc finalement assez peu surprenante. Inversement, la très grande rareté des stylophores, voire des éocrinoïdes et des astérozoaires, dans les environnements de plateforme moyenne à distale de l'Ordovicien moyen à supérieur de l'Anti-Atlas est plus étonnante, car de fortes populations de ces organismes ont été signalées dans ce type d'environnements dans l'Ordovicien moyen à supérieur de Bohême et du Massif armoricain (Chauvel, 1941, 1981 ; Lefebvre, 1999, 2007 ; Lefebvre & Fatka, 2003 ; Hunter et al., 2007). Toutefois, dans ces deux régions, qui ont également livré des faunes abondantes d'aristocystitides, il convient de remarquer que « cystoïdes » d'une part, astérozoaires, éocrinoïdes et stylophores d'autre part, ne sont jamais associés dans les mêmes niveaux. 15 moyen de Bretagne (D. sp.), qu'avec celle décrite dans l'Ordovicien supérieur d'Amérique du Nord (D. drepanon) (Kolata & Guensburg, 1979 ; Chauvel, 1981 ; Lefebvre, 1999, 2000). La plupart des crinoïdes de Bou Nemrou sembleraient appartenir à une forme proche du genre Heviacrinus (W. Ausich, comm. pers.), déjà connu dans l'Ordovicien moyen d'Espagne et du Massif armoricain (Ausich et al., 2002, 2007). De même, les protastérides de Bou Nemrou pourraient être assez proches de Bohemura jahni, une ophiure déjà décrite dans l'Ordovicien supérieur de Bohême (Petr, 1989). Enfin, les édrioastéroïdes de Bou Nemrou pourraient témoigner d'affinités avec des formes laurentiennes (Sumrall & Zamora, 2007). Il convient toutefois de signaler que, contrairement aux taxons d'Amérique du Nord, les édrioastéroïdes « méditerranéens » demeurent fort peu connus. Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). CONCLUSION 16 Le gisement de Bou Nemrou, dans le Tafilalt occidental (Maroc), apparaît comme un site tout à fait remarquable qui a livré non seulement des restes abondants et exceptionnellement préservés d'organismes peu ou pas minéralisés (nombreux arthropodes, eldonioïdes, vers ...), mais aussi des assemblages diversifiés et particulièrement denses d'échinodermes. Leur composition apparaît tout à fait caractéristique des faunes froides (subpolaires) du domaine péri-gondwanien (Province méditerranéenne). Elle demeure à de nombreux égards très proche de celle des assemblages de l'Ordovicien inférieur à moyen de ces régions (domination des éocrinoïdes et des stylophores), tout en annonçant déjà certains changements (notamment, la part croissante des ophiures -et des astérozoaires en général-). Ces niveaux à échinodermes pourraient témoigner de brefs épisodes de colonisation du fond marin par des populations opportunistes. Leur exceptionnelle qualité de préservation résulte vraisemblablement de leur enfouissement rapide, in situ et de leur vivant, par des dépôts de tempête. Ce gisement offre donc un instantané (« snapshot ») de la vie marine il y environ 460 millions d'années. Remerciements Cette note est une contribution de l'équipe « Vie Primitive » de l'UMR CNRS 5125, qui s'inscrit dans le cadre du projet PICG 503 « Ordovician Palaeogeography and Palaeoclimate ». Les auteurs tiennent tout d'abord à remercier Roland et Véronique Reboul, qui ont non seulement collecté l'essentiel du matériel disponible pour cette étude, mais ont également fourni de très nombreux renseignements sur le gisement de Bou Nemrou. Les auteurs expriment également leurs plus vifs remerciements à Jacques Destombes pour son aide précieuse concernant la stratigraphie de l'Ordovicien du Maroc et pour tous les documents, souvent inédits, qu'il a gracieusement mis à leur disposition. Les auteurs tiennent également à remercier tous les conservateurs pour leur collaboration et leur aide pour l'accès aux échantillons : principalement Anne MédardBlondel et Sylvie Pichard (Muséum d'histoire naturelle de Marseille), mais aussi Pierre Dalous (Muséum d'histoire naturelle de Toulouse), Christian Neumann (Museum für Naturkunde, Berlin) et enfin, Abel Prieur (Université Lyon 1), qui a également réalisé une grande partie des clichés. Laurent Lacombe est également remercié pour toutes les informations qu'il a pû communiquer concernant l'unique exemplaire de cyclocystoïde. BL a bénéficié du soutien de la Communauté Européenne (Research Infrastructure Action under the FP6 Structuring the European Research Area Program) par le biais du projet Synthesys DE-TAF-4766 (Museum für Naturkunde, Berlin). AWH a bénéficié du soutien de la JSPS (Japan Society for the Promotion of Science) et de l'Université de Tokyo. B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. 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EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). B : Aspect de l'une des petites carrières en cours d'exploitation sur le site de Bou Nemrou (cliché R. Reboul). 22 Légende figure 4 Echinodermes du gisement de Bou Nemrou, Groupe du Premier Bani (Sandbien basal), Anti-Atlas oriental (Maroc) ; barres d'échelle : 1 cm (clichés A. Prieur). A : Un exemplaire du mitrate Anatifopsis sp. préservé en position de vie, avec l'aulacophore déployé en avant de la thèque, face au courant (MHNT.PAL.2005.0.161). B : Préservation exceptionnelle des brachioles chez un échantillon de grande taille de l'éocrinoïde Ascocystites sp. (FSL424998). Légende figure 5 Echinodermes du gisement de Bou Nemrou, Groupe du Premier Bani (Sandbien basal), Anti-Atlas oriental (Maroc) ; barres d'échelle : 1 cm. A : Association de plusieurs spécimens de grande taille, remarquablement préservés de l'éocrinoïde Ascocystites sp. avec plusieurs individus de petite taille du mitrate Eumitrocystella sp. (MB.E.6313 ) (cliché C. Neumann). B : Grande plaque de grès exposant de nombreux exemplaires de l'éocrinoïde Ascocystites sp. (FSL424998) (cliché A. Prieur). Figure 4 Figure 5 Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). Figure 3 23 Légende figure 6 Echinodermes du gisement de Bou Nemrou, Groupe du Premier Bani (Sandbien basal), Anti-Atlas oriental (Maroc) ; barres d'échelle : 1 cm (clichés A. Prieur). A : Association d'un exemplaire du cornute Scotiaecystis sp. avec deux spécimens de l'éocrinoïde Ascocystites sp. (MHNM.15690.49). Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). B : Face supérieure d'un échantillon du cornute Cothurnocystis sp. (MHNM.15690.4). 24 Légende figure 7 Echinodermes du gisement de Bou Nemrou, Groupe du Premier Bani (Sandbien basal), Anti-Atlas oriental (Maroc) ; barres d'échelle : 1 cm (clichés A. Prieur). A : Association d'un exemplaire d'ophiure protastéride avec trois petits spécimens de l'éocrinoïde Ascocystites (MHNM.15406.32). B : Exemplaire remarquablement préservé d'un crinoïde de petite taille, proche du genre Heviacrinus (MHNM.15406.5). Légende figure 8 Echinodermes du gisement de Bou Nemrou, Groupe du Premier Bani (Sandbien basal), Anti-Atlas oriental (Maroc) ; barres d'échelle : 1 cm (clichés A. Prieur). A : Spécimen d'ophiure protastéride préservé en train de saisir un éocrinoïde de petite taille, vraisemblablement pour s'en nourrir (MHNM.15690.92). B : Tube anal isolé d'un crinoïde iocrinidé de grande taille (MHNM.15690.89). Figure 7 Figure 8 Mésogée Volume 64l 2008 B. LEFEBVRE, F. NOAILLES, A. W. HUNTER, E. NARDIN, S. REGNAULT, B. FRANZIN, P. VAN ROY & K. EL HARIRI Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). Figure 6 25 26 Résumé Abstract Feeding habits of the Moroccan white sea bream, Diplodus sargus cadenati (Sparidae) of Nouadhibou coast (Mauritania). The study of the feeding habits of the Moroccan white sea bream Diplodus sargus cadenati, by analysis of the stomach contents concerned 513 specimens with Fork lengths ranging between 13,2 and 32,20 cm. This study shows that the vacuity coefficient varies significantly according to the seasons. A total of 37 prey species were listed, belonging to seventeen groups. This omnivore fish feeds, according to the index of relative importance (%IRI) defined by Pinkas et al. (1971), mainly on Crustacean Anomura (IRI % = 35,03) and on Mollusks Bilvalvia (IRI % = 13,25) and secondarily on Echinoderms and Fishes. Seaweeds, Annelida, Sipunculida, Priapulida and Procordae are additional preys. This feeding habit varies according to the size of the animal and seasons, but Crustacean and Mollusks remain preferential preys. Key words: Sparidae, Diplodus sargus cadenati, feeding habit, Nouadhibou, Mauritania. Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Mamadou DIA 1, Abdoulaye WAGUE 1 & Mohamed GHORBEL 2 1 2 - Institut Mauritanien de Recherche Océanographique et de Pêche, - Institut National des Sciences et Technologies de la Mer (INSTM), Centre de Sfax BP 1035, 3018 Sfax (Tunisie). Auteur correspondant : [email protected] Nouadhibou ([email protected]) Diplodus sargus cadenati (de la Paz, Bauchot & Daget, 1974) est un poisson commun le long de la côte ouest-africaine de Gibraltar au Cap Vert, aux îles Madères et Canaries. Au Nord, D. sargus cadenati se rencontre jusqu’au golfe de Gascogne. C’est une espèce côtière vivant en banc jusqu’à 150 m de profondeur sur des fonds rocheux faisant l’objet de pêche artisanale et industrielle (Fisher et al., 1981). Elle a été également signalée dans les étangs saumâtres (Quignard & Man-Wai, 1983 ; Rosecchi, 1985). Dans les îles du Cap Vert, c’est la sous espèce D. sargus lineatus qui remplace D. sargus cadenati et de l’Angola à l’Afrique du Sud c’est la sous espèce D. sargus capensis qui est rencontrée. En Méditerranée, elle est remplacée par la sous espèce D. sargus sargus (Fisher et al., 1981). Dans le Golfe Persique, c’est la sous espèce D. sargus kotschyi qu’on trouve (Abou-Seedo et al., 1990). L'analyse de l'alimentation des poissons est nécessaire pour la connaissance de leur écologie, de leur éthologie et de leur physiologie (Perrin, 1980). Cette analyse est également indispensable quant à la définition des conditions et des modalités de l’exploitation des poissons. En effet, en tenant compte du régime alimentaire des espèces de grande importance commerciale, on peut orienter la pêche vers les zones où elles sont 27 susceptibles d’être rencontrées et de déterminer une ou des techniques adaptées à leur capture (Anato, 1999). De nombreux auteurs se sont intéressés à l'étude du régime alimentaire du sar Diplodus sargus ; nous pouvons citer Rosecchi (1985) dans le golfe de Lion; Kentouri & Divanach (1986) en France ; Sanchez-Velasco & Norbis (1997) sur les côtes nord ouest de la Méditerranée ; Figueiredo et al, (2005) au Portugal. Dans cette étude, le choix de Diplodus sargus cadenati trouve sa justification par son ubiquité sur les côtes mauritaniennes, par le manque d’informations relatives à son écologie (alimentation etc.) dans cette zone et l’importance commerciale qu’il prend pendant la période des «arrêts biologiques». Cette période des arrêts biologiques, mise en place par le gouvernement mauritanien depuis 1995 dans le cadre du « plan d’aménagement du poulpe » est une période pendant laquelle la pêche démersale est interdite, deux fois par an, mai-juin et septembre-octobre. Alors que la pêche industrielle est totalement interrompue dès le début de cette période, la pêche artisanale ne l’est que 15 jours après et reprend 15 jours avant l’activité des chalutiers Mésogée Volume 64l 2008 Mots-clés : Sparidae, Diplodus sargus cadenati, Régime alimentaire, Nouadhibou, Mauritanie. Régime alimentaire du sar Introduction L’étude du régime alimentaire du sar, Diplodus sargus cadenati, par analyse des contenus stomacaux, a porté sur 513 spécimens de longueurs à la fourche variant entre 13,2 et 32,20 cm. Cette étude a montré que le coefficient de vacuité varie significativement en fonction des saisons. Au total 37 espèces proies appartenant à 17 groupes d’animaux et de végétaux ont été recensées. Ce poisson omnivore, selon l’indice d’importance relative (%IRI) défini par Pinkas et al. (1971) se nourrit principalement de Crustacés Anomoures (IRI % = 35,03) et de Mollusques Bivalves (IRI % = 13,25) et secondairement d’Echinodermes et de Poissons. Les Algues, les Annélides, les Sipunculiens, les Priapulides et les Procordés sont des proies complémentaires. Ce régime varie en fonction de la taille de l’animal et des saisons, mais les Crustacés et les Mollusques restent les proies préférentielles. industriels. Au cours de cette période, les poissons de grande valeur commerciale se raréfient et de nombreux poissons sans grande valeur marchande, parmi lesquels Diplodus sargus cadenati, deviennent très importants. MATÉRIELS ET MÉTHODES Figure 1 Position géographique de la zone d’étude (Nouadhibou au nord de la Mauritanie). Cette étude a été réalisé sur 513 individus de Diplodus sargus cadenati, provenant de la région de Nouadhibou (Figure 1), capturés au chalut à des profondeurs de 20 à 30 m, de mars 2008 à février 2009. Pour chaque poisson, la masse et la longueur à la fourche (de l’extrémité de la tête à la fourche caudale) ont été mesurées. Les longueurs à la fourche (Lf) sont comprises entre 13,2 et 32,2 cm (Figure 2) avec une longueur moyenne de 23,37 cm ± 2,7. Figure 2 Mésogée Volume 64l 2008 M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Distribution des fréquences selon la taille de l’échantillon étudié de Diplodus sargus cadenati de la région de Nouadhibou. 28 Les estomacs sont prélevés et conservés dans du formol à 7% pour une détermination ultérieure de leur contenu. Les contenus stomacaux sont pesés au centième de gramme près (0,01). Les proies sont identifiées, comptées sous la loupe binoculaire puis pesées par groupe d’affinité. Chaque fois que l'état des proies ingérées nous l'a permis, l'identification a été réalisée au niveau générique ou spécifique à partir de différents ouvrages : Schneider (1992), Fisher et al. (1981), Gonzalez-Perez (1995), Intes & Le Lœuf (1975), Lloris & Rucabado (1998). Pour les proies en état de digestion avancée et pour lesquelles il ne subsistait que des restes d'organes résistants au suc digestif tels que les soies de polychètes ou quelques pièces tégumentaires (carapace et certains appendices de crustacés), la détermination a été faite seulement au niveau de l'ordre ou de la classe. Pour les proies qui ne sont que partiellement avalées ou qui ont tendance à se fragmenter pendant la digestion, le comptage a été effectué sur des parties du corps facilement identifiables, telles que les yeux de crustacés, les disques des astérides, etc. Les coquilles abritant des pagures, ou bernard-l’ermite, ont été considérées comme des crustacés anomoures. Pour l'analyse quantitative des proies, nous avons compté le nombre de chaque item proie et déterminé la masse de ces proies à l'aide d'une balance de précision. Le nombre d'estomacs vides noté au cours de la dissection nous a permis de calculer le coefficient de vacuité : Cv = NEV x 100/NEE (NEV = nombre d’estomacs vides ; NEE = nombre d’estomacs examinés) Ce coefficient permet de repérer les périodes de faibles et intenses activités trophiques du poisson dans le temps. Les données numériques et la masse des proies nous ont permis de calculer certains indices alimentaires : • Fréquence d'occurrence d'une proie : f = NEi x 100 / NEP (NEi : nombre d'estomacs contenant la proie i ; NEP : nombre d'estomacs pleins) • Pourcentage en nombre d'une proie : Cn = Ni x 100 / NP (Ni : nombre de proies pour chaque item i ; NP : nombre total de proies) • Pourcentage en masse d'une proie : Cp = Mi x 100 / MP (Mi : masse de l’item i ; MP : masse totale des proies) M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. Nous avons également gestimé le niveau trophique par la formule établie par Pauly (2000) : Trophi = 1 + Σ j=1 DCij Trophj où Trophj est le niveau trophique de la fraction alimentaire j et DCij représente la fraction de j dans le régime alimentaire de l’espèce consommatrice i. Les algues, qui sont à la base de la chaîne alimentaire ont un niveau trophique fixé à 1 Froese et Pauly (in Fishbase, 2000). Le niveau trophique permet d’exprimer la position des différents organismes dans les spectres alimentaires qui définissent pour une large part les écosystèmes aquatiques notamment la relation existant entre les producteurs primaires et les consommateurs et certains autres composants comme les détritus (Stergiou & Polunin, 2000). La détermination du niveau trophique des différentes proies a été faite à partir de la liste établie par Froese & Pauly (2000). Quant aux Siponcles (Sipunculidae) et Priapulidés, nous nous sommes basés d’une part sur leur régime alimentaire (Pancucci- Mésogée Volume 64l 2008 L'item i peut être, selon le degré d'identification, un embranchement, une classe, un ordre, un genre ou une espèce. Pour le classement des proies, nous avons utilisé trois méthodes. - Hureau (1970), suivant la valeur du coefficient alimentaire, distingue : •les proies préférentielles : Q > 200 ; •les proies secondaires : 20 < Q < 200 ; •les proies accessoires : Q < 20. - Geistdoerfer (1975) propose un classement fondé à la fois sur Q et f et subdivise ainsi ainsi les proies en : •proies principales : Q > 100 (préférentielle : f > 30% ; occasionnelle : f < 30%) ; •proies secondaires : 10 < Q < 100 (fréquente : f > 10% ; accessoire : f < 10%) ; •proies complémentaires : Q < 10 (1er ordre : f > 10% ; 2ème ordre : f < 10%). - Pinkas et al. (1971) définit un indice d’importance relative des proies : IRI = f% x (Cn% + Cp%) que plusieurs auteurs dont Hacunda (1981), Cortes (1997) recommandent d’exprimer en pourcentage afin de faciliter la comparaison : % IRIi = (IRIi/Sni=1IRI) x 100 Les pourcentages IRI ont été calculés jusqu’au niveau spécifique. Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) • Coefficient ou quotient alimentaire : Q = Cp x Cn 29 Apadopoulou et al., 1999 ; Anonyme 2008) et d’autre part sur les travaux réalisés par Konstantinos & Karpousi (2002) et sur les données de Fishbase pour estimer leur niveau trophique. Pour l’analyse des variations saisonnières du comportement trophique et du régime alimentaire de D. sargus cadenati de la côte de Nouadibou, nous nous sommes basés sur les travaux de Dubrovin et al. (1991) qui divisent les saisons hydrologiques en Mauritanie (sur l'ensemble du plateau continental) en quatre : une saison froide (de janvier à mai) où la température moyenne est de 18,4°C ; une saison de transition froide-chaude (juin et juillet) où la température moyenne est de l'ordre de 23,3°C ; une saison chaude (d’août à octobre) où la température moyenne est de 25°C ; une saison de transition chaudefroide (novembre et décembre) où la température moyenne est de l'ordre de 20°C. Pour l’analyse des variations du régime alimentaire selon la taille, nous avons tenu compte de deux groupes de taille : Lf ≤ 22 cm (N=212) et Lf>22 cm (N=301). Pour comparer les différents paramètres relatifs au régime alimentaire entre les différentes classes de taille, les sexes et les saisons, nous avons utilisé le test χ2 et le test t de Student. Tous les calculs ont été faits au seuil α = 5% RÉSULTATS Coefficient de vacuité Sur 513 estomacs examinés, 106 étaient vides, ce qui donne un coefficient de vacuité moyen de 20,66%. Ce coefficient ne varie statistiquement pas avec le sexe, 18,36% chez les femelles et 20,74% chez les mâles (le test de Student par la méthode de Cochran-Cox donne t = 0,82 nettement inférieur à t critique = 1,96 et de même χ2 = 0,42 ; ddl =1 ; α = 5%). Par contre, l’étude de ce coefficient met en évidence des fluctuations saisonnières très significatives (χ2 = 36,18 ; ddl = 3 ; α = 5%) (tableau 1). En effet, les valeurs maximales sont enregistrées pendant la saison chaude. Ce coefficient diminue ensuite pour atteindre des valeurs minimales pendant les saisons froides et de transition froidechaude. Mésogée Volume 64l 2008 M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Tableau 1 Variations saisonnières coefficient de vacuité (CV) chez Diplodus sargus cadenati de la région de Nouadhibou. NEV : nombre d’estomacs vides NEE : nombre d’estomacs examinés 30 Mâles NEV NEE 16 99 2 34 Saison chaude 14 transition saison chaudee/ froide Total Saison froide Transition saison froide/chaude Femelles CV NEV échantillon total NEE CV 107 10,28 30 225 13,33 7 51 13,72 10 88 11,36 49 28,57 17 49 34,69 32 77 41,56 13 35 37,14 12 49 24,49 34 123 27,64 45 217 20,74 47 256 20,74 106 513 20,66 16,16 11 5,88 NEV NEE CV Composition du contenu stomacal Les 407 estomacs pleins examinés contiennent 3697 proies pesant 1021,08 g soit en moyenne 9,083 proies par estomac et une masse moyenne de 2,508 g par estomac. Ces proies appartiennent à 37 espèces et 17 grands groupes : Poissons osseux, Anomoures, Amphipodes, Brachyoures, Cirripèdes, Isopodes, Bivalves, Gastéropodes, Céphalopodes, Scaphopodes, Annélides, Echinodermes, Sipucunliens, Priapulides, Ascidies et Végétaux (tableau 2). D'après la classification de Geistdoerfer (1975), D. sargus cadenati se nourrit de Crustacés et de Mollusques (proies préférentielles) et secondairement d’Echinodermes et de Poissons. Les végétaux, principalement des algues sont des proies complémentaires de premier ordre, tandis que les Annélides, les Sipunculiens, les Priapulides et les Procordés IRI 16,95 0,25 16,71 46,68 32,43 25,06 3,93 16,46 5,16 7,86 7,86 10,57 0,98 0,74 0,74 0,25 0,25 6,88 5,90 5,90 1,97 1,97 7,13 0,74 1,47 8,85 0,49 47,42 31,20 0,25 0,25 1,23 1,23 7,86 7,86 2,21 0,98 1,23 0,49 0,25 0,25 0,74 0,98 0,25 0,74 1,97 0,25 1,72 0,25 0,25 3,19 2,95 0,25 0,25 0,25 0,25 0,25 0,74 0,74 0,25 0,49 0,49 0,25 17,44 Cn% 1,77 0,03 1,74 63,64 36,46 27,62 2,46 21,39 3,77 8,84 8,84 13,55 0,10 0,08 0,08 0,03 0,03 12,12 10,79 10,79 1,33 1,33 1,36 0,15 0,15 1,20 0,05 21,50 11,30 0,03 0,03 0,15 0,15 4,94 4,94 0,54 0,28 0,26 0,74 0,05 0,69 0,13 0,46 0,03 0,44 0,26 0,08 0,18 0,03 0,03 0,79 0,77 0,03 0,08 0,08 0,03 0,03 0,08 0,08 0,03 0,05 0,05 0,03 2,95 Cp% 13,24 0,18 13,06 20,43 14,98 12,46 1,86 8,80 1,80 2,51 2,51 0,26 1,00 0,87 0,87 0,13 0,13 2,75 2,00 2,00 0,75 0,75 1,45 0,28 0,28 1,17 0,00 15,02 8,92 <0,01 <0,01 0,05 0,05 2,45 2,45 1,18 0,97 0,21 0,27 0,01 0,27 0,43 1,85 <0,01 1,85 0,23 <0,01 0,22 <0,01 <0,01 0,76 0,76 0,01 0,01 0,01 0,02 0,02 0,01 0,01 0,00 0,02 0,02 0,03 1,59 23,40 <0,01 22,75 1300,07 546,06 344,21 4,58 188,36 6,76 22,23 22,23 3,52 0,10 0,07 0,07 <0,01 <0,01 33,27 21,55 21,55 1,00 1,00 1,96 0,04 0,04 1,41 0,00 322,88 100,73 <0,01 <0,01 0,01 0,01 12,09 12,09 0,64 0,27 0,05 0,20 <0,01 0,18 0,05 0,85 <0,01 0,81 0,06 <0,01 0,04 <0,01 <0,01 0,61 0,58 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 4,68 254,38 0,05 247,26 3924,678 1668,21 1004,51 16,99 497,12 28,70 89,27 89,27 145,94 1,08 0,70 0,70 0,04 0,04 102,26 75,39 75,39 4,09 4,09 19,98 0,32 0,64 20,98 0,03 1731,63 630,76 0,01 0,01 0,25 0,25 58,11 58,11 3,80 1,23 0,57 0,50 0,01 0,24 0,41 2,28 0,01 1,68 0,95 0,02 0,69 0,01 0,01 4,98 4,50 0,01 0,02 0,02 0,01 0,01 0,07 0,07 0,01 0,04 0,04 0,01 790,13 %IRI 5,34 <0,01 5,19 82,42 35,03 21,09 0,36 10,44 0,60 1,87 1,87 3,06 0,02 0,01 0,01 <0,01 <0,01 2,15 1,58 1,58 0,09 0,09 0,42 0,01 0,01 0,44 <0,01 36,36 13,25 <0,01 <0,01 0,01 0,01 1,22 1,22 0,08 0,03 0,01 0,01 <0,01 <0,01 0,01 0,05 <0,01 0,04 0,02 <0,01 0,01 <0,01 <0,01 0,10 0,09 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 1,66 Gastéropodes Crepidulidés Crepidula goreensis Cymatiidés Charonia rubicunda Cymatiidae indéterminés Muricidés indéterminés Nassariidés Bullia miren Nassariidés indéterminés Naticidés Natica sp. Naticidés indéterminés Tunidés Clavatula bimarginata Volutidés Cymbium sp. Gatséropodes indéterminés Céphalopodes Octopodidés Octopus vulgaris Sepiidés Sepia officinalis Céphalopodes indéterminés 29,48 9,34 9,34 0,98 0,74 0,25 1,47 0,98 0,49 0,49 0,49 0,25 0,25 3,69 3,69 2,46 2,46 17,44 2,95 0,25 0,25 0,25 0,25 2,46 8,89 1,43 1,43 0,10 0,08 0,03 0,23 0,10 0,05 0,05 0,10 0,05 0,05 1,02 1,02 0,31 0,31 5,59 0,31 0,03 0,03 0,03 0,03 0,26 3,79 0,44 0,44 0,16 0,14 0,02 0,05 0,01 0,01 <0,01 0,01 <0,01 <0,01 0,27 0,27 0,18 0,18 2,68 2,01 0,15 0,15 0,06 0,06 1,80 33,68 0,63 0,63 0,02 0,01 0,00 0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 0,27 0,27 0,05 0,05 14,95 0,62 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 0,46 373,95 17,50 17,50 0,26 0,16 0,01 0,41 0,11 0,03 0,03 0,05 0,01 0,01 4,76 4,76 1,19 1,19 144,13 6,84 0,04 0,04 0,02 0,02 5,06 7,85 0,37 0,37 0,01 <0,01 <0,01 0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 0,10 0,10 0,03 0,03 3,03 0,14 <0,01 <0,01 <0,01 <0,01 0,11 Tableau 2 Composition du régime alimentaire de D. sargus cadenati des côtes de Nouadhibou avec valeur des différents indices : f%: fréquence d’occurrence. Cn% : pourcentage en nombre d’une proie. Cp% : pourcentage en masse. d’une proie. Q : quotient alimentaire IRI : indice d’importance relative d’une proie. %IRI : pourcentage indice d’importance relative d’une proie. M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. f% Mésogée Volume 64l 2008 Item Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Q POISSONS Gobiidés Indéterminés CRUSTACES Anomoures Diogenidés Dardunus arrosor Dardunus callidus Diogenidés indéterminés Paguridés Pagurus sp. Amphipodes indéterminés Brachyoures Calappidés Calappa sp. Cancridés Cancer sp. Cirripèdes Balanidés Balanus sp. Lepadidés Lepas anatifera Décapodes nageurs Penaiidés Parapenaeus longirostris Décapodes indéterminés Isopodes indéterminés MOLLUSQUES Bivalves Arcidés Anadara senegalensis Astartidés Digitaria digitaria Cardidés Pavicardium sp. Carditidés Cardita ajar Cardita sp. Donacidés Donax sp. Iphigenia laevigata Glycimeridae indéterminés Mactridés Labiosa vitrae Lutraria sp Mytilidés Modiolus romboides Mytilidae indéterminés Ostreidés Striostrea denticulata Pectinidés Aequipecten flabellum Chlamys sp. Pholadidés Pholas campechiensis Pinnidés Atrina chantardi Solecurtidés Tagelus adansoni Solenidae indéterminés Spondylidés Spondylus sp. Veneridae indéterminés Bivalves indéterminés 31 sont des proies complémentaires de deuxième ordre. Le même ordre est obtenu par la méthode de Hureau (1970) et celle des IRI% (tableau 3). Au niveau des Crustacés Anomoures, les Dioginidae sont les plus représentés (21,09%) et plus particulièrement l’espèce Dardunus callidus (10,44%) ; chez les Bivalves, l’espèce Pavicardium sp. est la plus importante (1,22%) ; tandis que chez les Gastéropodes, l’espèce Crepidula goreensis a le pourcentage le plus élevé (0,37%). Dans le groupe des Echinodermes, c’est surtout les Echinides qui sont les plus fréquemment ingérés par D. sargus cadenati (7,72 %) (cf. tableau 2). Tableau 3 Méthodes utilisées Classements des proies selon les méthodes de Hureau (1970), Geistdorfer (1975) et Pinkas (1971) chez Diplodus sargus cadenati de la région de Nouadhibou Hureau (1970) Classement des proies Proies les proies préférentielles : Q > 200 Crustacés Anomoures Mollusques les proies secondaires : 20 < Q < 200 Echinodermes Téléostéens les proies accessoires : Q < 20 Annélides Sipunculiens Priapulidés Procordés Végétaux proies principales préférentielles Q>100 f>30% Crustacés Anomoures Mollusques Bivalves Occasionnelles Q>100 f<30% Geistdoerfer (1975) Mollusques Gastéropodes Téléostéens Echinodermes Echinides proies secondaires accessoires 10<Q<100 f<10% Crustacés Cirripèdes proies complémentaires de 1er ordre Q<10 f > 10% Crustacés Amphipodes Végétaux proies complémentaires de 2ème ordre Q<10 f<10% Annélides Sipunculiens Priapulidés Procordés % IRI (Pourcentage des indices d’importance relative des proies) Anomoures (35,03%) Bivalves (13,25%) Echinodermes (8,70%) Gastéropodes (7,85%) Végétaux (6,74%) Par ailleurs, le calcul du niveau trophique (tableau 4) a donné une moyenne de 3,32 ± 0,26. Ce qui nous amène à dire selon la classification de Konstantinos et Karpouzi (2002) que ce poisson est un omnivore avec une préférence pour les proies animales. En effet, il se nourrit essentiellement d'animaux benthiques : Crustacés Anomoures, Mollusques Bivalves et Gastéropodes de différentes espèces et Echinodermes (cf. tableau 2). Mésogée Volume 64l 2008 M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Pinkas et al. (1971) proies secondaires fréquentes 10<Q<100 f>10% 32 Tableau 4 Variations saisonnières du niveau trophique chez Diplodus sargus cadenati de la région de Nouadhibou. Niveau trophique 3,50 Transition Froide-Chaude 3,53 Ecart-type 0,041 0,026 Saison Froide Chaude Transition Chaude-Froide 3,03 2,96 0,155 0,625 Variations du régime alimentaire en fonction des saisons L’étude des variations saisonnières du régime alimentaire montre les mêmes catégories alimentaires au cours de ces quatre saisons (Figures 3 et 4). Cependant, l’importance relative des proies varie d’une saison à une autre. En effet, les fluctuations saisonnières du nombre des proies sont très significatives (χ2= 86,43 ; ddl = 24 ; p < 0,05). Il en est de même des variations saisonnières de la masse des proies (χ2= 273,25 ; ddl = 24 ; p < 0,05). En nombre, les Crustacés et les Mollusques restent toujours en tête de liste des proies ingérées, avec une dominance permanente des Crustacés dans l’alimentation. En masse, les poissons sont dominants pendant la saison chaude et les végétaux pendant la saison de transition chaude-froide. Par ailleurs, le maximum de nourriture en masse et en nombre est ingéré pendant la saison chaude. Figure 3 Variations en nombre des proies en fonction des saisons chez Diplodus sargus cadenati de la région de Nouadhibou Figure 4 Chez D. sargus cadenati de la région de Nouadhibou, le coefficient de vacuité est en moyenne de 20,66%, il ne varie pas selon le sexe mais varie selon les saisons. Ces variations sont liées, entre autres, aux phénomènes physiologiques et à la reproduction de l'espèce. Ce poisson a un régime omnivore préférentiellement basé sur les Crustacés et les Mollusques et secondairement sur les Echinodermes et les Poissons. Les Végétaux sont des proies complémentaires de premier ordre tandis que les Annélides, les Sipunculiens, les Priapulides et les Procordés sont des proies complémentaires de deuxième ordre. La plupart des Pagures rencontrés étaient encore dans des coquilles de Gastéropodes. Le nombre important de ces coquilles laisse supposer que D. sargus M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. DISCUSSION ET CONCLUSION Mésogée Volume 64l 2008 Variation du régime alimentaire en fonction de la taille Les variations du régime alimentaire selon la taille sont représentées dans le tableau 5. Les Crustacés et les Mollusques restent toujours les proies préférentielles pour les deux catégories de taille. Par ailleurs, le pourcentage de IRI des Anomoures et celui des Echinides augmentent avec la taille contrairement à ceux des Gastéropodes, des Poissons et des Végétaux qui diminuent avec la longueur. Le pourcentage de IRI des Bivalves qui semble identique pour les poissons des deux groupes de taille est significativement différent (χ2= 27,852 ; ddl = 1 ; p < 0,05). Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Variations en masse des proies en fonction des saisons chez Diplodus sargus cadenati de la région de Nouadhibou. 33 Tableau 5 Composition du régime alimentaire de D. sargus cadenati selon les catégories de taille. A : Lf ≤ 22cm B : Lf > 22cm A : Lf ≤ 22cm Item f% Cn% Cp% Q IRI %IRI Poissons 22,02 2,57 18,53 47,66 464,82 9,87 Crustacés Anomoures Amphipodes Brachyoures Cirripèdes Isopodes Décapodes Nageurs 42,26 27,98 7,14 1,19 5,36 0,00 8,93 60,18 39,40 12,44 0,14 8,55 0,00 1,81 18,24 14,01 0,24 0,54 1,79 0,00 2,19 1097,55 551,85 2,97 0,07 15,33 0,00 3,96 1494,15 90,56 0,80 55,40 0,00 35,72 31,73 1,92 0,02 1,18 0,00 0,76 Mollusques Bivalves Gastéropodes Céphalopodes Scaphopodes Indéterminés 48,21 29,17 32,14 2,38 5,95 0,60 28,14 13,27 13,41 0,28 1,11 0,07 15,38 8,71 4,81 1,48 0,37 0,01 432,76 115,64 64,50 0,41 0,41 <0,01 641,24 585,69 4,19 8,81 0,05 13,62 12,44 0,09 0,19 <0,01 Annélides 8,33 2,08 0,85 1,76 24,42 0,52 16,07 14,29 1,19 0,60 0,60 2,22 1,95 0,14 0,07 0,07 8,91 8,71 0,13 0,01 19,80 16,64 0,02 <0,01 <0,01 157,17 0,32 0,05 0,08 3,23 001 <0,01 <0,01 Sipunculiens 8,93 2,36 4,76 11,24 63,58 1,35 Priapulidés 1,19 0,21 0,96 0,20 1,40 0,03 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 Echinodermes Echinides Astérides Réguliers Indéterminés Ascidiacés Végétaux 23,81 16,35 389,22 8,27 indéterminés 45,24 15,39 696,18 14,78 B : Lf >22cm Mésogée Volume 64l 2008 M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL. Régime alimentaire du Sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie) Item 34 f% Cn% Cp% Poissons 13,39 1,42 10,93 Crustacés Anomoures Amphipodes Brachyoures Cirripèdes Isopodes Décapodes Nageurs 49,79 35,56 12,97 0,84 7,95 0,84 5,86 71,66 37,91 15,50 0,09 15,50 0,09 1,20 21,38 15,40 0,27 1,20 3,16 0,01 1,12 Mollusques Bivalves Gastéropodes Céphalopodes Scaphopodes Indéterminés 46,86 32,64 27,62 3,35 5,02 0,84 19,22 11,07 6,82 0,35 0,84 0,13 14,87 9,00 3,34 2,25 0,17 0,10 Annélides 11,72 3,14 Echinodermes Echinides Astérides Réguliers Indéterminés 20,08 18,83 1,26 0,42 0,00 4,38 4,21 0,13 0,04 0,00 Sipunculiens 5,86 0,80 Priapulide 0,00 Ascidiacés 3,35 Q IRI %IRI 15,49 353,65 1,19 1532,17 583,84 21312,08 57,49 4,16 1,09 0,11 414,52 48,98 0,01 0,00 14,40 1,34 71,90 0,19 <0,01 1,40 0,00 0,05 285,72 99,68 22,80 0,80 0,14 0,01 3547,12 721,92 10,18 1,56 0,10 11,97 2,44 0,03 0,01 <0,01 2,24 7,06 108,98 0,37 23,58 22,81 0,71 0,06 0,00 103,39 95,97 0,09 <0,01 0,00 2236,36 1,00 0,03 0,00 7,55 <0,01 <0,01 0,73 0,58 7,64 0,03 0,00 0,00 0,00 0,00 0,80 0,69 0,55 4,14 0,01 Végétaux 21,76 13,27 288,73 0,97 indéterminés 44,35 12,60 558,62 1,88 cadenati recherche surtout les Crustacés Anomoures et non les Mollusques. D’une part, la forme particulière des dents antérieures (incisives) lui permet de détacher ou d’arracher les proies des supports (Anomoures et Mollusques) (Coudre, 2001). D’autre part, les dents postérieures (molaires), bien robustes comme celles de tous les Sparidae (Fisher et al., 1981), lui permettent de broyer les carapaces des Crustacés, les coquilles des Mollusques et l’exosquelette des Echinides. Ce qui confirme les résultats que nous avons obtenus. D’une manière générale, la composition du régime alimentaire de D. sargus cadenati de la côte de Nouadhibou est semblable à celle trouvée par plusieurs auteurs dans différentes régions. Rosecchi (1985), qui a étudié le régime alimentaire de D. sargus cadenati, retrouve les mêmes catégories alimentaires dans le golfe de Lion ; toutefois les Végétaux, qui représentent des proies préférentielles dans les étangs, ne sont que des proies accessoires en milieu marin. Il faut noter que c’est surtout pendant le mois de décembre que les algues étaient dominantes dans le bol alimentaire. En effet, au cours de ce mois 75% des estomacs contenaient des végétaux et seuls 11 estomacs renfermaient d’autres proies avec les végétaux. Figueiredo et al. (2005) ont montré que D. sargus est un poisson omnivore diurne se nourrissant d’Algues, d’Echinodermes, de Vers, de Gastéropodes et d’Amphipodes. Gamito et al. (2003) trouvent que D. sargus, au Portugal se nourrit de petits Poissons, petits Crustacés, de Gastéropodes et de Bivalves. Ces auteurs montrent que d’une manière générale les Sparidés ont un large spectre alimentaire mais sont moins prédateurs que de nombreuses autres espèces avec lesquelles ils ont été étudiés et comparés (Anguilla anguilla, Halobatrachus didactylus, Mullus barbatus, les gobies). Pallaro et al. (2006) qui ont étudié D. vulgaris montrent que cette espèce se nourrit préférentiellement d’Echinides. Comme chez toutes les espèces du genre Diplodus, la forme des dents de D. sargus cadenati lui confère un régime alimentaire composé de Crustacés Décapodes, de Gastéropodes, de Bivalves, d’Annélides Polychètes, Crustacés Mysidacés, d’Amphipodes et de Polyplacophores. M. DIA , A. WAGUE & M. GHORBEL . Mésogée Volume 64l 2008 Abou-Seedo F., Wright J. M. & Clayton D. A., 1990. Aspects of biology of Diplodus sargus Kotschyi (Sparidae) from Kuwait bay. Cybium, 14(3): 217-223. Anato C. B., 1999. Les Sparidae des Côtes Béninoises : Milieu de vie, pêche, présentation des espèces et biologie de Dentex angolensis (Poll et Maul, 1953). Thèse de Doctorat d’état ès-Sciences Biologiques ; Univ. Tunis II ; Fac. Sci. Tunis. 277 p. Anonyme, 2008. The Phylum Priapulid :http://www.earthlife.net/inverts/priapulida.html. Cortes E., 1997. A critical review of methods of studying fish feeding based on analysis of stomach contents : application to elasmobranch fishes. 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CIESM Worshop Series, 12 : 1-100. 36 Résumé Abstract The native status of a ligneous species of the Sorbus hybrida L. agg. in France : the Legré sorb in the Lure mountain Settled populations of Sorbus from Sorbus hybrida L. agg., are well known in the upper area of Lure mountain (Alpes-de-hauteProvence, France) since the end of the 1960th years, as attested by several collected samples preserved in french herbariums. The origin of this taxon, nommed by the author Sorbus legrei in recent papers, must be discussed : introduction by foresters of the nordic species S. hybrida ? Separated and relictual area of S. hybrida ? Microendemic species ? This work try to answer this questions by analsys of fieldworks and bibliographical data, and researchs in herbariums. The find of some specimens collected by Ludovic Legré at the end of the XIXth century, preserved in Legré’s herbarium at the Natural history museum of Marseille (France) is a decisive information to give some answer : S. legrei is an endemic species of Lure mountain, as S. pseudofennica E.F. Warb in Scotland and S. borbasii Jaw. in Romania. Key words : Sorbus legrei, Sorbus hybrida, Sorbus mougeotii, Sorbus scandica, Sorbus intermedia, Rosaceae, new species, Alpes de Haute-Provence, Lure Mountain, Legré. de Sorbus hybrida L. en France : le sorbier de Legré à la montagne de Lure. Bruno CORNIER le Breuil, 42100 Rochetaillée -France. Nous avons décrit récemment (Cornier, 2009) deux nouvelles espèces de Sorbus. L'une de ces espèces, le sorbier de Legré (Sorbus legrei), présente sur la montagne de Lure, intéresse la Flore provençale. Nous ne revenons pas sur la description de cet arbre, sur les expériences de germination qui ont confirmé la conservation de ses caractères morphologiques dans la descendance issue de graine, ni sur son mode de multiplication probablement apomictique, tout ceci étant détaillé dans notre article précédent. Nous souhaitons traiter ici les questions concernant l'origine géographique de cet arbre. Lorsque Pierre Lieutaghi (1969) constate l'abondance de ce sorbier en montagne de Lure, au voisinage des crêtes, il hésite sur son identité et le nomme sorbier de Thuringe (S. x thuringiaca (Ilse) Fritsch). Puis il fait mention du sorbier de Finlande (S. hybrida L.), précisant que ce dernier est une espèce scandinave très proche, que rien, à première vue, ne distingue du sorbier de Thuringe. Or, le binôme S. x thuringiaca est habituellement utilisé pour désigner les hybrides occasionnels, instables, entre l'alisier blanc (S. aria (L.) Crantz) et le sorbier des oiseleurs (S. aucuparia L.). Ces hybrides sont relativement rares, et sont généralement isolés en compagnie des espèces parentes, le plus souvent dans des régions de montagne. La fréquence, voire l'abondance en certains secteurs de la montagne de Lure, d'un sorbier présentant une morphologie similaire à l'hybride occasionnel, conduisait à s'interroger sur la nature et l'origine de ce taxon. 37 Pierre Lieuthagi (com. pers. 1999) n'a constaté aucune variabilité dans les populations de ce taxon depuis ses premières observations à la fin des années 1960. Si lors de nos herborisations de 1998, 2001 et 2006, nous avons repéré quelques très rares intermédiaires entre S. legrei et S. aucuparia, et un arbuste pouvant correspondre à une hybridation S. aria x S. legrei, nous avons également constaté la grande stabilité morphologique des populations de S. legrei, ce que nos expériences de semis ont également confirmé. Puisqu'il ne pouvait s'agir de l'hybride instable S. aria x S. aucuparia, plusieurs hypothèses restaient envisageables. Ce sorbier n'aurait-il pas été introduit par des forestiers ? Il s'agirait alors de l'espèce scandinave S. hybrida. Le fait que Ludovic Legré, excellent explorateur de la montagne de Lure à la fin du XIXème siècle, n'ait jamais mentionné S. hybrida dans ses Mésogée Volume 64l 2008 Mots-clés : Sorbus legrei, Sorbus hybrida, Sorbus mougeotii, Sorbus scandica, Sorbus intermedia, Rosaceae, espèces nouvelles, Alpes de Haute-Provence, montagne de Lure, Legré. L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe Introduction Des populations stables d'un Sorbus du groupe de Sorbus hybrida L. sont bien connues dans la zone sommitalede la montagne de Lure (Alpes-de-hauteProvence, France) depuis la fin des années 1960, comme l'attestent plusieurs récoltes conservées dans des herbiers français. L'origine de ce taxon, que nous avons nommé S. legrei dans une récente publication, mérite d'être discutée : introduction de l'espèce nordique S. hybrida par des forestiers ? Aire disjointe et relictuelle de S. hybrida ? Espèce microendémique ? Cet article essaye de répondre à ces questions, en se basant sur des observations de terrain et sur des recherches dans la bibliographie ainsi que dans plusieurs herbiers. La découverte de quelques spécimens récoltés par Ludovic Legré à la fin du XIXème siècle, conservés dans l'herbier Legré au Muséum d'histoire naturelle de Marseille, constitue un élément déterminant pour répondre à ces interrogations : Sorbus legrei est une espèce endémique de la montagne de Lure à l'instar de S. pseudofennica E. F. Warb. en Ecosse et de S. borbasii Jáv. en Roumanie. publications (Legré, 1892, 1915), étayerait cette hypothèse. Pour avoir échappé aux observations de Legré, cette introduction serait alors récente (début du XXème), ou très localisée. Si par contre des éléments objectifs pouvaient permettre de valider l'indigénat de ce sorbier en montagne de Lure, il pourrait alors s'agir d'un foyer local d'apparition d'un taxon hybridogène, ou d'une aire disjointe, relictuelle, et jusqu'alors méconnue, de Sorbus hybrida, dont les populations ne seraient pas exclusivement nordiques. La présente publication a pour but de clarifier ces questions. MATÉRIEL ET MÉTHODE RECHERCHE DANS LES HERBIERS Une recherche dans la littérature botanique doit s'accompagner d'une exploration dans les herbiers. Celle-ci peut être consécutive à la recherche bibliographique et orientée par les indications trouvées dans certaines publications. Mais les herbiers conservent aussi de nombreuses informations qui n'ont jamais été publiées. La consultation des herbiers locaux ou régionaux, ainsi que des plus grands herbiers nationaux, peut apporter des indications précieuses. Des parts d'herbier correctement renseignées et conservées constituent de plus des données objectives apportant la preuve de la présence d'un taxon à une date et en un lieu donné. OBSERVATIONS DE TERRAIN L'étendue de l'aire de répartition d'un taxon peut constituer également un bon indice quant à l'ancienneté de sa présence. S'agissant en particulier d'un taxon ligneux, arborescent, sauf introduction massive ou caractère particulièrement envahissant, l'extension de l'aire de répartition demande du temps. En compléments des données fournies dans la bibliographie et par les étiquettes des herbiers, des observations de terrain peuvent être nécessaires. Lors de plusieurs expéditions, en 1998, 2001 et en 2006, nous avons essayé de préciser l'extension de la répartition de S. legrei sur le massif de Lure et à proximité. B. CORNIER Mésogée Volume 64l 2008 L’indigénat d’une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L.. en France : le sorbier de Legré à la montagne de Lure. RECHERCHES BIBLIOGRAPHIQUES Lorsqu'un taxon inhabituel ou inconnu est repéré dans un secteur donné, il est très utile de rechercher dans la littérature botanique. Des botanistes des siècles précédents ont-ils signalé ou décrit, d'une façon ou d'une autre, une plante pouvant correspondre à nos observations récentes ? Par ailleurs, s'agissant d'une espèce arborescente, le maintien d'un couvert forestier assez significatif dans la région concernée ou, au contraire, une déforestation quasi totale au cours du XVIIIème ou du XIXème siècle peut constituer un bon indice quant à l'ancienneté potentielle de la présence de cette espèce dans le secteur. Nous avons donc cherché également quelques éclaircissements sur ce point, le travail de « Restauration des Terrains de Montagne » (RTM) étant connu dans les Alpes du sud, notamment dans le massif du Ventoux, relativement proche de la montagne de Lure. 38 RÉSULTATS ET DISCUSSION DONNÉES BIBLIOGRAPHIQUES - Littérature botanique Dans Histoire Naturelle de la Provence (Darluc, 1784), l'auteur liste sur plus de trente pages les plantes de la montagne de Lure, classées selon le système sexuel de Linné. Aucun Sorbus, Pyrus ou Crataegus n'est mentionné aux pages 91-92 où sont traitées les espèces B. CORNIER Mésogée Volume 64l 2008 - Publications sur l'histoire de la forêt Dès la première moitié du XIXème, l'administration a tenté de soumettre les forêts au régime forestier. La politique française de restauration des terrains de montagne (RTM) s'est affirmée durant la seconde moitié du XIXème siècle, à la suite des grandes crues des années 1845-1860. En 1860, une loi de boisement a pour objectif de résoudre les questions d'érosion, par une politique de boisement systématique ne tenant guère compte des populations rurales. Cette loi rencontrera de fortes résistances jusqu'à son abrogation en 1874. « Ce n'est qu'à partir de la loi de 1882 que l'on peut légitimement parler de restauration des terrains de montagne » (Brugnot & Cassayre, 2002). Une étude récente sur les conflits forestiers au cours du XIXème siècle a pris pour exemple la montagne de Lure (Simon L. et al., 2007). Pour ce qui nous intéresse, les auteurs considèrent, d'après l'analyse des documents disponibles dans les archives départementales, que la montagne de Lure était toujours abondamment boisée durant la seconde moitié du XIXème, et que son boisement était de qualité. Les ventes autorisées par l'administration forestière, sans diminution notable durant cette période, attestent d'une ressource forestière importante, notamment de chênes et de hêtres, à RL’indigénat d’une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L.. en France : le sorbier de Legré à la montagne de Lure. de la « classe XII - Icosandrie », dans laquelle Linné plaçait les sorbiers et les alisiers. L'absence d'une indication pouvant correspondre à S. legrei n'a donc aucune signification, S. aria et S. aucuparia, certainement présents sur les hauteur de Lure à cette époque, n'étant pas davantage mentionnés dans cet inventaire partiel. La première indication sur le massif de Lure d'un Sorbus n'appartenant pas aux espèces les plus fréquentes a été publié par Ludovic Legré en décembre 1892, dans ses Additions à la flore de Provence. Dans une liste floristique, Legré mentionne «Sorbus scandica Fries, Basses-Alpes : Montagne de Lure», sans autre commentaire. A cette époque, ce binôme était habituellement utilisé par les botanistes français pour désigner l'arbre que nos flores actuelles nomment alisier de Mougeot (Sorbus mougeotii Soy. Will. & Godr.), espèce montagnarde présente du nord de l'Espagne jusqu'au sud-ouest de l'Allemagne. L'alisier de Mougeot, déjà connu des grands massifs montagneux français, était alors confondu avec une espèce scandinave, l'alisier de Suède (Sorbus intermedia (Ehrh.) Pers. = Sorbus scandica). La brève mention de Legré n'a donc pas attiré l'attention des botanistes. Récemment, les auteurs de Flora Iberica ont fait le choix d'inclure S. mougeotii dans S. intermedia, du fait d'une certaine ressemblance morphologique entre les deux taxons (Aedo et al, 1993). Ce choix n'est pas étayé par les études cytologiques, celles-ci montrant des différences significatives entre les génomes des deux espèces (NelsonJones et al., 2002). Il n'a d'ailleurs pas été adopté par tous en Espagne (Oria de Rueda Salgueiro, 2006). Il nous semble donc préférable de continuer à considérer S. mougeotii comme une espèce distincte de S. intermedia. Quelques précisions sur l'observation de Legré sont données dans les herborisations de Legré (1915). On retrouve mention de S. scandica les 24 et 31 juillet 1892, sur des itinéraires allant de Sisteron à Valbelle en passant par le chemin du Pas de Jean Richaud et le 6 juin 1892 «de Cruis à Peipin par la Combe de la Sapié et la crête.» Les indications de Legré seront reprises sous le nom de S. aria subsp. scandica par Laurent (1937). Manifestement, ce dernier veut désigner ainsi l'alisier de Mougeot, dont la morphologie est beaucoup plus proche de celle de S. aria, puisqu'il estime que ce taxon a été confondu avec S. aria dans les parties élevées des Alpes. Le catalogue de Laurent contient cependant une indication précieuse. Il mentionne en effet une localisation précise, le Pas-de-Jean-Richaud, d'après les herborisations et l'herbier de Legré. Puisque les herborisations indiquent seulement des itinéraires, la source de cette localisation ne peut se trouver que dans l'herbier de Legré. Nous y reviendrons. Plus tard, lors des premières versions de l'inventaire, en cours de réalisation, de la flore des Alpes-de-Haute-Provence, les données de Legré ont été initialement enregistrées sous le nom de S. mougeotii. 39 B.CORNIER Récoltes de Sorbus legrei dans divers herbiers au XXème siècle. Nous avons recherché les spécimens pouvant correspondre à S. legrei dans les plus grands herbiers français, Paris (P), Lyon (LY), Montpellier (MPU) et à Genève (G), ainsi que dans les herbiers de botanistes locaux (Bernard Girerd, Pierre Lieutaghi). Nous avons identifié S. legrei dans plusieurs de ces herbiers. Les récoltes que nous avons repérées ont été effectuées au cours d'une période restreinte à la fin des années 1960. Les binômes linnéens qui leur ont été attribuées par les récolteurs sont divers, mais correspondent tous à des taxons stables appartenant au groupe de S. hybrida L. ou à des hybrides instables S. aria x aucuparia. Nous citons ces récoltes par ordre chronologique : 40 Mésogée Volume 64l 2008 L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le sorbier de Legré à la montagne de Lure. proximité des villages et entre 1000 et 1400 m sur le versant sud, à la limite inférieure des pâturages d'estive. Sur le versant nord, bien que les coupes de sapins aient été plus rares du fait du relief rendant son exploitation difficile, le couvert forestier restait probablement assez dense. Il ne semble donc pas, pour ce qui concerne le Massif de Lure, que la situation ait pu justifier des plantations de protection. On peut supposer également que des bosquets d'arbres et arbustes ont toujours été plus ou moins présents entre 1400 et 1700 m sur le versant sud, dans la zone d'estive, ce dont les ventes de bois peuvent difficilement rendre compte, du fait d'une moindre qualité de production forestière des boisement d'altitude. Le sorbier des oiseleurs et, plus encore, l'alisier blanc, espèce héliophile, apprécient ces zones au couvert forestier moins dense. Or, le savoir-faire de la paysannerie locale ne devait pas négliger les alisiers et sorbiers, ces arbres de taille modeste, qui intéressaient sans doute moins les forestiers dont l'objectif était principalement la production de bois d'oeuvre. Au sujet du sorbier des oiseleurs (S. aucuparia), Desfontaines (1809) écrit en effet : « Le bois est dur, compacte, et employé par les tourneurs et les ébénistes; on en fait aussi des tables, des rayons de roue, des timons de charrette, et l'on fabrique avec les racines des cuillers et des manches de couteaux. » Cette description des usages peut être complétée par celle faite par Lieutaghi (1969) au sujet de l'alisier blanc (Sorbus aria) : « C'était autrefois le plus estimé des bois indigènes pour la fabrication des vis de pressoir, des chevilles et des pièces soumises aux tensions et aux frottement dans les roues des moulins. » Il est probable que Sorbus legrei, s'il était déjà présent sur le massif de Lure, a pu être occasionnellement utilisé à des destinations similaires, la qualité de son bois étant très certainement comparable à celle des ses proches parents. Compte tenu de ces éléments, il semble particulièrement improbable qu'un Sorbus ait été introduit depuis les contrées nordiques par les forestiers. Sorbus hybrida est une espèce méconnue en dehors de son usage ornemental dans les parcs et jardins, et sans intérêt reconnu pour des boisements forestiers. Si d'aventure des forestiers avaient été attentifs aux qualités mécaniques du bois des sorbiers, les espèces indigènes répondaient déjà aux besoins. - herbier Paul Litzler, intégré dans l'herbier général MPU : « S. x decurrens Hedl. Montagne de Lure. Plusieurs arbustes fructifiés dans la zone culminale versant Sud - 1/7/1966 ». Cette récolte a été effectué par P. Litzler, botaniste jurassien, lors d'une tournée d'herborisation dans le Sud-Ouest en compagnie de l'abbé Terré. (P. Litzler, com. pers.) - herbier Pierre Lieutaghi : « S. aria x aucuparia = S. x thuringiaca (Ilse) Fritsch. B.-A. Montagne de Lure. Pas de la Graille en redescendant sur Valbelle. Répandu. 21 juin 1967. » - herbier Gérard Aymonin, intégré dans l'herbier général P. : « Société Botanique de France. 94ème session extraordinaire, Alpes de Haute-Provence, sous la direction de A. Lavagne et coll. Sorbus sp. (x). Lure. 3 juil. 1967. Leg. G. G. Aymonin, Monique Keraudren. HB. GGA. N° 23098 ». Cette planche est complété par un determinavit : « Sorbus hybrida L. det. K.F. Hansen 19.10.1984. » - herbier Bernard Girerd : « x Sorbus semipinnata (Roth) Hedl. (S. aria x aucuparia). Montagne de Lure, près du col de la Graille. 3. VII. 1967 » La récolte de B. Girerd a sans doute été effectuée, comme celle de G. Aymonin, lors de la même excursion, au cours de la 94ème session extraordinaire de la SBF qui a eu lieu du 2 au 11 juillet 1967, et qui était intitulée "Alpes de Haute-Provence (Digne-Vars)" (Aymonin & Charpin, 1999). Nous n'avons pas pu localiser la « notice succincte polycopiée » qui aurait été distribuée lors de cette session, mais la période choisie laisse supposer des herborisations essentiellement orientée vers des zones d'altitude. Deux ans plus tard, du 12 au 17 mai 1969, la 96ème session de la SBF allait compléter le regard portée par ses membres sur les Alpes-de-Haute-Provence lors d'herborisations à plus faible altitude (Charpin, 1972), la montagne de Lure n'était plus alors au programme. - herbier Pierre Lieutaghi : « S. x thuringiaca (Ilse) Fritsch. = S. x semipinnata (Roth) Hedl. ? (S. aria x S. aucuparia). B.A. Montagne de Lure. 21/8/67. Adret de la Combe de la Sapée, vers 1650 m, rocaille à Hêtre, Rhamnus alpina, Viburnum lantana, Acer pseudoplatanus, Genista radiata et les parents. f. --> 16,5 cm. » Nous n'avons pas pour l'instant localisé d'autre récolte au XXème siècle. La concentration de ces récoltes sur une période de quatre ans s'explique peut-être par la perspective de la session extraordinaire de la SBF et par ses suites. Il serait cependant étonnant que cet arbre présentant une morphologie assez inhabituelle n'ait pas été observé et récolté par d'autres botanistes avant 1966, durant la première moitié du XXème siècle, voire durant le XIXème; du moins si sa présence est ancienne dans le Massif de Lure. Les autres récoltes dont nous disposons en herbier sont beaucoup plus récentes : 12 septembre 2003 (leg. P. Lieutaghi); 12 septembre 2004 et 31 mai 2006 (leg. Sébastien Della Casa); récoltes personnelles des 3 août 2001, 5 et 8 août 2006. B.CORNIER - herbier B. Cornier, leg. Pierre Lieutaghi (double de la récolte précédente) : « S. aria (L.) Crantz x S. aucuparia L. = S. x thuringiaca (Ilse) Fritsch. = S. x semipinnata (Roth) Hedl. ? B.-A. Montagne de Lure. Ubac du Pas de la Graille; bord de route ; niveau hêtraie : clairière sur éboulis vers 1400 m. 12 août 1968. [fruits d'un rouge sombre un peu brunâtre]. » Ce spécimen est le type choisi pour S. legrei. 41 Mésogée Volume 64l 2008 - herbier Pierre Lieutaghi : « S. aria (L.) Crantz x S. aucuparia L. = S. x thuringiaca (Ilse) Fritsch. = S. x semipinnata (Roth) Hedl. ? B.-A. Montagne de Lure. Ubac du Pas de la Graille ; bord de route vers 1400 m ; niveau hêtraie : clairière sur éboulis. 12 août 1968. [fruits d'un rouge sombre un peu brunâtre]. » Ce spécimen est un isotype de S. legrei. L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le Sorbier de Legré à la montagne de Lure. - herbier Pierre Lieutaghi : « S. aria (L.) Crantz x S. aucuparia L. = S. x thuringiaca (Ilse) Fritsch. = S. x semipinnata (Roth) Hedl. ? B.-A. Montagne de Lure. Pente calcaire à Genista radiata vers 1600 m, au Pas de la Graille (adret ensoleillé). 12 août 1968. » B.CORNIER 42 Mésogée Volume 64l 2008 L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le Sorbier de Legré à la montagne de Lure. - Observations de terrain En parcourant plusieurs secteurs de la montagne de Lure, nous avons pu effectuer plusieurs observations venant compléter les données bibliographiques et les indications des herbiers. En confrontant à la cartographie les localisations précises des récoltes d'herbier des années 1966-1969 et les indications de Legré, on constate leur concentration sur une zone relativement restreinte centrée sur le Pas de la Graille, à l'est du Massif de Lure. Les observations de terrain nous ont permis d'élargir assez fortement l'aire de répartition jusqu'alors relevée pour ce taxon. Celui-ci est en effet présent sur une quinzaine de kilomètres d'est en ouest dans la zone sommitale de la montagne de Lure. Si l'arbre avait été introduit, il aurait fallu que cette introduction soit largement répartie pour que son aire actuelle occupe une surface aussi importante. Nous avons pu vérifier aussi qu'il ne s'agissait pas seulement de quelques rares individus isolés. Sans être abondant, ce sorbier est présent en certains points du massif en proportion non négligeable par rapport aux autres Sorbus. Enfin, en différents points du massif, certains arbres aux troncs volumineux, pour ce type de taxon et à cette altitude, semblent être de vieux arbres, mais il n'est pas possible de déterminer leur âge sans étude complémentaire. Enfin, une observation par défaut s'est révélée décisive : l'absence de l'alisier de Mougeot sur le Massif de Lure ; Pierre Lieutaghi nous a confirmé de même n'avoir jamais observé cette espèce ici. A quoi pouvait alors correspondre le S. scandica indiqué par Legré, puisqu'il ne pouvait s'agir de S. mougeotii ? Laurent (1937) suggérant l'existence de récoltes de Legré, la recherche de l'herbier Legré s'imposait. - Récoltes de Sorbus legrei dans l’herbier de Ludovic Legré La localisation d'un herbier n'est pas toujours chose aisée. Les botanistes locaux contactés dans un premier temps ne savaient pas où l'herbier Legré était conservé, ni même si un herbier Legré existait encore. Localiser les institutions conservant des herbiers, et les herbiers eux-même devient heureusement plus facile grâce aux recherches rendues possibles par le développement d'Internet et par les bases de données en ligne. Ayant pu ainsi localiser l'herbier Legré au Muséum d'histoire naturelle de Marseille, nous sommes entré en contact avec Sylvie Pichard, responsable du Département Collections. Les premières recherches furent vaines : si les récoltes de Sorbus par Legré ont été rapidement localisées, celles-ci ne contenaient aucune part étiquetée « S. scandica ». La précision des données bibliographiques fournies par Legré et Laurent incitait cependant à pousser les recherches, et trois récoltes assez bien conservées de « S. scandica » furent finalement découvertes dans l'herbier Legré à un autre emplacement. L'analyse de la morphologie de ces spécimens ne laissait aucun doute. Il ne s'agissait pas de S. mougeotii (figure 1). Les récoltes de Legré correspondent par contre très bien à l'arbre observé à la fin des années 1960. La conservation des spécimens d'herbier récoltés par Legré apporte la preuve de la présence de ce taxon dans le massif de Lure dès l'été 1892. De plus, ces spécimens nous permettant de savoir avec certitude ce que Legré avait nommé S. scandica en 1892, nous pouvons affirmer la présence encore plus ancienne de ce taxon, puisque dans son relevé du 31 juillet 1892, Legré précisait que l’arbre portait des fruits. La combinaison des données bibliographiques, des observations de terrain et des informations fournies par les herbiers, avec au premier chef les récoltes de Legré conservées au Muséum d'histoire naturelle de Marseille, nous permettent d'affirmer que le sorbier de Legré (S. legrei) forme une population naturelle indigène présente depuis longtemps sur le Massif de Lure. Pour autant, ces observations ne sont pas décisives pour trancher entre l'hypothèse d'une aire disjointe de S. hybrida et celle d'un foyer local d'apparition d'un taxon hybridogène original. Ce sont les observations morphologiques figure 1 B.CORNIER Mésogée Volume 64l 2008 et les données cytologiques qui nous ont permis de confirmer la seconde hypothèse (Cornier, 2009), et d'attribuer un binôme au taxon de la montagne de Lure, S. legrei, comme il se devait. Nous considérons donc ce taxon comme une espèce endémique appartenant au groupe de S. hybrida. D'autres exemples d'espèces microendémiques du groupe de S. hybrida, présentant une morphologie assez proche, sont déjà connus dans d'autres régions d'Europe : S. pseudofennica E. F. Warb. sur l'île d'Aran (Ecosse) (Warburg, 1957 ; Robertson et al., 2004) et S. borbasii Jáv. au sud-ouest de la Roumanie (Jávorka, 1915). Pour parfaire la connaissance de S. legrei, il serait opportun d'essayer de déterminer l'âge des plus gros arbres, en utilisant la tarière. De nouvelles observations de terrain pourraient compléter les informations quant à l'étendue de la répartition de cette espèce, dans des zones encore peu prospectées, notamment sur le versant nord et aux alentours de la montagne Pélegrine. L'analyse de l'ensemble des herbiers de Provence pourraient aussi apporter des informations nouvelles. Par ailleurs, des études des marqueurs génétiques et de nouvelles études cytologiques, en vue de vérifier les premiers résultats de dénombrement chromosomique, pourraient être envisagées. Pour finir, nous mesurons ici, une fois de plus, l'importance pour la connaissance de la flore de la bonne conservation de l'ensemble des collections, et non seulement des spécimens types. Avec l'herbier Legré, associé à la publication de ses herborisations et au Catalogue de Laurent, le Muséum de Marseille dispose d'un remarquable outil de L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le Sorbier de Legré à la montagne de Lure. Echantillon sans déterminatio, provenant de la Monatgne et daté du 24 juillet 1892 de l’Herbier Legré. MHNM .13296 attribué à Sorbus legrei 43 travail. Remerciements Nous remercions tout d'abord Mme Sylvie Pichard pour les recherches effectuées dans l'herbier Legré au Muséum d’histoire naturelle de Marseille. Nous remercions également MM André Charpin (pour les recherches effectuées à l'herbier de Genève), Gérard Aymonin et Marc Pignal (herbier du Muséum national d’histoire naturelle), Peter Schafer (herbier de l’Université de Montpellier), Georges Barale (herbier du Muséum de Lyon), Pierre Lieutaghi, Paul Litzler, Edouard Cornier, Bernard Girerd, Pierre Pech, Sébastien Della Casa ; Mmes et Mlles Barbara Bürgel (Université Jean Monnet StEtienne)), Denise Cornier, Arja Tervonen (Metshaällitus, Finlande), pour l’aide apportée à ce travail, que ce soit sur le terrain, dans les herbiers et la bibliographie ou par correspondance. B.CORNIER 44 Mésogée Volume 64l 2008 L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le Sorbier de Legré à la montagne de Lure. RÉFÉRENCES Aedo C., Aldasoro J.J., 1993. Sorbus L. in Flora Iberica, Volume VI, p. 414-429. Aymonin G., Charpin A., 1999. Les sessions extraordinaires de la Société botanique de France. Journal de botanique n°10 : 81-87. Brugnot G., Cassayre Y., 2002. De la politique française de restauration des terrains en montagne à la prévention des risques naturels, in Favier (R.) (dir.), Les pouvoirs publics face aux risques naturels dans l’histoire, Grenoble, CNRS-Publications de la MSH-Alpes : 261-272. Charpin A., 1972. 96ème session extraordinaire : Sisteron et les « Alpes de lumière ». Bull. Soc. Bot. France, 116 : 377-379. Cornier B., 2009. Sorbus legrei (spec. nov.) et Sorbus remensis (spec. nov.) (Rosaceae), deux nouvelles espèces françaises. Bull. mens. Soc. linn. Lyon, 78 (1-2) : 27 – 46. Darluc M., 1784. Histoire naturelle de Provence, T. II. Desfontaines M., 1809. Histoire des arbres et arbrisseaux, T. II. Jávorka S., 1915. Kisebb megjegyzések és újabb adatok. III. közlomény (remarques mineures et données nouvelles, 3ème communication). Botanikai Közlemények, 14 : 98-109. Laurent L., 1937. Catalogue raisonné des plantes vasculaires des Basses-Alpes, Marseille, Tome 1 : 5761. Legré L., 1892. Additions à la flore de la Provence – Bulletin de la Société Botanique de France, 39 : 403. Legré L., 1915. Herborisations dans les Basses-Alpes. Bull. Soc sci. et litt. des Basses-Alpes, 4549. [ouvrage publié par Dessalle après la mort de Legré (1838-1904)] Lieutaghi P., 1969. Le Livre des arbres, arbustes et arbrisseaux, Robert Morel éd., vol. II : 1232-1255. Nelson-Jones E.B., Briggs D. et Smith A. G., 2002. The origin of intermediate species of the genus Sorbus. Theorical and Applied Genetics, 105 : 953-963. Oria de Rueda Salgueiro J.A., Martínez de Azagra Paredes A., Álvarez Nieto A., 2006. Botánica forestal del género Sorbus en España. Invest Agrar : Sist Recur For (2006) Fuera de serie : 166-186 Robertson A., Newton A. C. et Ennos R. A., 2004. Multiple hybrid origins, genetic diversity and population genetic structure of two endemic Sorbus taxa on the isle of Arran, Scotland. Molecular Ecology, 13 : 123-134. Simon L., Clément V., Pech P., 2007. Forestry issues and disputes in provincial regions during the 19th century : The example of the Lure mountains (France). Journal of Historical Geography, 33 : 335-351. Warburg E. F., 1957. Some new names in the British flora. Watsonia, 4 : 43-46. figure 12 B.CORNIER Mésogée Volume 64l 2008 L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le Sorbier de Legré à la montagne de Lure. Echantillon de Sorbus scandica provenant de la Montagne de Lure et daté du 31 juillet 1892 de l’Herbier Legré attribué à Sorbus legrei MHNM.13296.0 45 46 Mésogée Volume 64l 2008 L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le Sorbier de Legré à la montagne de Lure. B.Cornier Echantillon sans déterminatio, ni provenance ni date de récolte de l’Herbier Legr. attribué à Sorbus legrei MHNM.13296.0 figure 3 Résumé Abstract Diversity and bioecological outline of malacological fauna associated to Calycotome spinosa in the vicinity of Tlemcen (Algeria). A study of the diversity of malacofauna associated to Calycotome spinosa has been carried out in three stations around cities of Mansourah and Tlemcen, from november 2001 to august 2002. The specific malacological richness is estimated to be 21. Among these species, 4 are constant, 6 are accessory and 11 are accidental. The importance of snails fluctuates in the various stations, and along time (seasons and months). The Gastropoda prefer humidity and readly gather in winter and spring. In december, and january the specific richness is important in the first station. Euparypha pisana has a frequency to 95% in the second station. More, Macularia jourdaniana and Helicella virgata have a frequecy of 65% in the first station. Archelix zapharina, Helicella lauta and Cochicella acuta (Helicidae) are not present in the first and second station. In the same way, Milax nigricans (Milacidae) is rare in the first and third station (5%). Helicella pyramidata has an abundance equal to 15% in the first station and third stations.The abundance of Archelix lactea is equal to 15% in the three stations. Key words : Calycotome spinosa, malacofauna, diversity, bioecology, season, month, distribution, Tlemcen. de la faune malacologique associée au Calycotome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie) Amina DAMERDJI Département de Biologie- Faculté des Sciences Université Aboubekr BELKAÏD – Tlemcen – (Algérie). E-mail : [email protected] Plusieurs travaux sur la faunistique dans la région de Tlemcen ont été entrepris sur différentes espèces de plantes-hôtes. En effet dans la région steppique située au sud de Tlemcen une étude bioécologique sur la faune de Stipa tenacissima L. (Poacées) comprenant notamment des Gastéropodes (Khelil , 1984), a précédé une publication sur les Arthropodes dans la même région (Khelil, 1989). Des études bioécologiques sur la faune sont entreprises par la suite sur le diss Ampelodesma mauritanicum (Poiret) Durd et Shinz, 1895 (Poacées) dans la région de Tlemcen par Adjlani (1998) et Damerdji & Adjlani (1999) et sur le doum Chamaerops humilis Linné toujours aux alentours de Tlemcen par Bouhellou(1998) et Damerdji & Bouhellou (2002a, 2002b). Sur le Thym, Thymus ciliatus Desf. (Labiatae) une étude entomofaunique est réalisée par Kassemi (2001) puis sur la malacofaune proprement dite par Damerdji (2009). Sur le genêt (Fabacées), un inventaire faunistique est réalisé par Damerdji et Djedid, 2003 et la biocénose de cette espèce épineuse est étudiée par Damerdji & Djedid (2004). Des auteurs ont travaillé sur la taxonomie et la biogéoraphie des Gastéropodes de la péninsule ibérique et des îles baléares (Gomez, 1988 ; Altonaga et al., 1994; Puente, 1997). D’autres auteurs ont effectué des études sur les Mollusques terrestres dans des régions bien particulières d’Espagne telles la vallée de Najerilla (Ortiz de Zarate, 1991) 47 ou la commune de Valence (Ondina, 1988; Martinez-Orti, 1999). Gomez (1988) a dressé un catalogue des espèces de la région ibérique. Bigot & Aguesse (1984) traitent des variations de structure de 7 écosystèmes méditerranéens hautement caractéristiques du delta du Rhône (Camargue). Sur la malacofaune proprement dite Damerdji (1996) effectue une étude bioécologique de la zone steppique de la région de Tlemcen, travail que l’auteur complète au niveau des Monts de Tlemcen (Damerdji, 1997a), en prenant en considération l’impact des facteurs édaphoclimatiques sur les caractères conchyliologiques du peuplement malacologique terrestre dans la même région (Damerdji, 1997b). Là encore, aucun travail n’a été fait sur les Gastéropodes vivant sur Calycotome spinosa . Cette lacune justifie le présent travail. Mésogée Volume 64l 2008 Mots-clés : Calycotome spinosa, malacofaune, diversité, bioécologie, saisons, mois, répartition, verticale,Tlemcen. Diversité et aperçu bioécologique Introduction Une approche de la diversité de la malacofaune associée au genêt Calycotome spinosa a été réalisée dans trois stations des communes de Mansourah et Tlemcen (Algérie), de novembre 2001 à août 2002. La richesse spécifique des Gastéropodes est de 21 espèces. Quatre espèces sont constantes, 6 sont accessoires et 11 sont accidentelles. L’importance relative des escargots fluctue selon les stations, et suivant les mois et les saisons. Les Gastéropodes préférant une certaine humidité sont facilement prélevés en hiver et au printemps. En décembre et janvier, la richesse spécifique est importante dans la station 1. Euparypha pisana a une fréquence de 95% dans la station 2. De même, Macularia jourdaniana et Helicella virgata possèdent une fréquence de 65% dans la station 1. Archelix zapharina, Helicella lauta et Cochlicella acuta (Helicidae) sont absentes dans les stations 1 et 2. Parallèlement Milax nigricans (Milacidae) est faiblement présente dans la station1 et dans la station 3 (5%). Helicella pyramidata a une abondance de 15% dans les stations 1 et 3 stations. L’abondance d’Archelix lactea est de 15% dans les 3 stations. MATÉRIEL ET MÉTHODE CHOIX DU MATÉRIEL VÉGÉTAL Calycotome spinosa, famille des Fabaceae, sous-famille des Papilionoïdae, est un arbuste épineux pouvant atteindre 2 mètres de hauteur dans notre région. Les rameaux épineux sont fortement imbriqués. Les fleurs trifoliées de couleur jaune sont caractéristiques de la famille. Cette plante est fortement inflammable et contribue à la propagation des incendies. La racine porte habituellement des nodosités renfermant des bactéries permettant la fixation de l’azote atmosphérique. Les abeilles récoltent un nectar très sucré, peu abondant, à la base des tubes d’étamines. Station n° 1: Boudjemil Cette station se trouve entre la zone de Béni-Mester à l’ouest, le col du Juif (Boudjemil) à l’est et Darf et Eugab au nord. Elle est caractérisée par une altitude de 888 m, une pente de 45 à 50% et un taux de recouvrement de 40 à 50%. Elle est entourée par une zone pré-forestière où les espèces de l’Ononido-Rosmarinetea dominent et les espèces de Quercetea ilicis persitent encore. Nous avons trouvé dans cette station Chamaerops humilis (Palmaceae), Asparagus stipularis (Liliaceae), Olea europea (Oleaceae), Quercus ilex (Fagaceae), Ampelodesma mauritanicum (Poaceae) et Ceratonia siliqua (Cesalpineae). D’autres espèces arbustives et herbacées y ont une abondance-dominance faible : Thymus ciliatus (Labiatae), Urginea maritima, Asphodelus microcarpus (Liliaceae), Echium vulgare (Boraginaceae), Daphne gnidium (Thymelaceae), Anagallis arvensis (Primulaceae), Bellis annua, Calendula arvensis, Palenis spinosa (Asteraceae), Bromus rubens (Poaceae) et Ulex boivinii (Fabaceae). A. DAMERDJI Station n° 2: Champ de tir Cette station d’étude est située à l’ouest de l’agglomération d’Imama. Elle se trouve sur une dalle calcaire à une altitude de 747 m, avec un relief accidenté, une pente de 15 à 20% et un taux de recouvrement de 20 à 30%. Cette station est envahie par des plantes toxiques et /ou épineuses. Les espèces végétales dominantes sont : Chamaerops humilis (Palmaceae), Urginea maritima, Asphodelus microcarpus (Liliaceae), et Ulex boivinii (Fabaceae). Elles sont accompagnées d’herbacées peu abondantes avec un degré de couverture faible : Bellis annua, Pallenis spinosa, Calendula arvensis (Asteraceae), Daphne gnidium (Thymelaceae), Reseda alba (Resedaceae), Sinapsis arvensis (Brassicaeae), Asparagus albus, Asparagus stipularis (Lilaceae), Anagallis arvensis (Primulaceae), Bromus rubens (Paoceae). 48 Mésogée Volume 64l 2008 Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). LES STATIONS D’ÉTUDE Pour réaliser ce travail, trois stations situées dans les communes de Mansourah et de Tlemcen (1° 20’ W. ; 34° à 35° 30’ N.) sont prises en considération. Le choix des stations est effectué en tenant compte de l’abondance du Calycotome spinosa, de l’altitude ou de la pente. Du point de vue bioclimatique, les stations étudiées font partie de l’étage semi-aride à hiver tempéré. Station n° 3: Oudjlida Cette station est délimitée par la route nationale n° 22 et les bâtiments de la gendarmerie à l’ouest. Les limites nord et sud sont matérialisées par des terres agricoles et à l’est par une carrière et un quartier d’habitations. Elle est caractérisée par une pente moyenne de 12%, une altitude de 625 m et un taux de recouvrement de 30 à 40%. Les espèces végétales dominantes sont : Chamaerops humilis (Palmaceae), Mentha rotundifolia, Marrubium vulgare (Labiatae) et Urginea maritima (Liliaceae). Dans cette station, nous notons la présence des espèces herbacées et arbustives peu abondantes suivantes : Ulex boivinii (Fabaceae), Malva sylvestris (Malvaceae), Thapsia gargarina (Apiaceae), Thymus ciliatus (Labiatae), Daphne gnidium (Thymelaceae), Convolvulus altheoides (Convolvulaceae), Asparagus stipularis (Liliaceae), Pallenis spinosa, Atractylis humilis (Asteraceae) et l’espèce Olea europea (Oleaceae) avec un degré de recouvrement faible. MÉTHODOLOGIE Sur le terrain, 20 prélèvements sont effectués de novembre 2001 à août 2002. Les échantillons sont ramenés au laboratoire où les individus vivants et les coquilles vides sont séparés. La détermination des espèces se base surtout sur les caractères anatomiques et physiologiques des parties molles notamment les organes génitaux. La détermination des coquilles vides se fait sur des caractères morphologiques de taille, coloration et ornementation de la coquille. Le descriptif morphologique s’appuie sur l’étude biosystématique des Mollusques Gastéropodes Pulmonés terrestres de la région de Tlemcen dressé par Damerdji (1990). Parmi les indices écologiques de composition utilisés pour exploiter les résultats, il y a lieu de mentionner la fréquence d’occurrence et l’abondance ou fréquence centésimale. La fréquence d’occurrence d’une espèce est le rapport exprimé en pourcentage du nombre de prélèvements où cette espèce est notée au nombre total de prélèvements effectués : F = Pa x 100 P F = fréquence d’occurrence de l’espèce. Pa = nombre total de prélèvements contenant l’espèce prise en considération. P = nombre total de prélèvements faits. Arel = abondance relative de l’espèce prise en considération. Na, Nb, Nc = nombres d’ individus des espèces a, b, c. L’abondance relative renseigne sur l’importance de chaque espèce par rapport à l’ensemble des espèces présentes. Parmi les indices écologiques de structure, seuls les indices de diversité de Shannon et de l’équitabilité sont employés. Le calcul de ces indices permet d’évaluer la diversité faunistique d’un milieu donné et de comparer entre elles les faunes de différents milieux, même lorsque les nombres d’individus récoltés sont très différents (Dajoz, 1985). Les indices de Shannon s’expriment par la formule suivante : H’= - Σ q i log2 q i H’max = log2 S i = espèce étudiée S = nombre d’espèces q i = proportion d’une espèce i par rapport au nombre total d’espèces H’ = Indice de diversité exprimé en bits H’max = Diversité maximale exprimée en bits L’équitabilité (E) est définie comme le rapport de la diversité calculée à la diversité maximale. E= H’ H’max A. DAMERDJI Na Arel = Na + Nb + Nc +... x 100 49 Mésogée Volume 64l 2008 L’abondance relative d’une espèce correspond au rapport du nombre d’individus de cette même espèce au nombre total des individus toutes espèces confondues : Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). En fonction de la fréquence d’occurrence des espèces F, Dajoz(1985) distingue trois groupes : - les espèces constantes lorsqu’elles se retrouvent dans 50% ou plus des relevés effectués dans une même communauté ; - les espèces accessoires présentes dans 25 à 49 % des prélèvements ; - les espèces accidentelles avec une fréquence d’occurrence inférieure à 25 % des prélèvements. RÉSULTATS Les résultats portent sur l’inventaire des Gastéropodes récoltés sur le genêt, sur leur importance relative saisonnière et mensuelle, sur le calcul des indices écologiques et sur la répartition verticale de ces espèces. DIVERSITÉ DES ESPÈCES MALACOLOGIQUES RÉCOLTÉES SUR CALYCOTOME SPINOSA Le tableau 1 dresse la liste des espèces retrouvées sur le genêt selon la classification de Germain (1969 a et b). Au cours des récoltes faites entre novembre 2001 et août 2002 dans les 3 stations prospectées nous avons rencontré 163 espèces animales appartenant aux classes suivantes : Gastéropodes, Annélides, Crustacés, Myriapodes, Insectes, Amphibiens, Reptiles, Oiseaux et Mammifères (Djedid 2003; Damerdji & Djedid, 2004). La richesse spécifique des Gastéropodes est de 21. Ils sont répartis en 4 familles : Milacidae avec 1 espèce Milax nigricans, Sphincterochilidae avec 1 espèce Sphincterochila candidissima, Subulinidae avec 1 espèce Rumina decollata et la famille des Helicidae comportant deux sous familles : Helicinae avec 12 espèces réparties dans les genres suivants : Helix, Macularia, Archelix, Eobania, Euparypha et Alabastrina et celle des Helicellinae avec 2 genres : Helicella et Cochlicella. M ILACIDAE Milax (Lallementia) nigricans Phillipi, 1836 Tableau 1 S PHINCTEROCHILIDAE Sphincterochila (Leucochroa) candidissima Draparnaud, 1801 H ELICIDAE Helicinae Helix (Cryptomphalus) aspersa Müller, 1774 Macularia hieroglyphicula Michaud, 1833 Macularia jourdaniana Bourguignat, 1867 Archelix punctata Müller, 1774 Archelix lactea Michaud, 1831 Archelix juilleti Terver, 1839 Archelix zapharina Terver, 1839 Archelix polita punctatiana Gassies, 1856 Eobania vermiculada Müller, 1774 Euparypha pisana Müller, 1774 Alabastrina (Helix) soluta Michaud, 1833 Alabastrina (Helix) alabastrites Michaud, 1833 Helicellinae Helicella (Cernuella) virgata Da Costa, 1778 Helicella (Trochoïdea) pyramidata Draparnaud, 1865 Helicella lauta Lowe, 1831 Helicella (Cernuella) acompsia Bourguignat, 1864 Helicella (Xeromagna) terveri Michaud, 1831 Cochlicella acuta Müller, 1774 S UBULINIDAE Rumina decollata Linné, 1758 VARIATIONS DES ESPÈCES DE GASTÉROPODES RETROUVÉS SUR CALYCOTOME SPINOSA EN A. DAMERDJI FONCTIONS DES SAISONS. 50 Mésogée Volume 64l 2008 Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). Liste des espèces de Gastéropodes récoltés sur Calycotome spinosa Les résultats obtenus sont donnés dans la figure 1. En automne, les Gastéropodes sont plus diversifiés dans la station 1 avec une richesse de 10 espèces alors que la station 3 n’en compte que 4. En hiver, les Gastéropodes ont une richesse égale à 13 espèces dans les stations 1 et 3. Dans cette dernière le nombre d’espèces a triplé de l’automne à l’hiver. Au printemps, avec les conditions climatiques favorables, les Gastéropodes sont retrouvés dans les 3 stations avec une richesse identique de 14 (station 1 ) à 15 (stations 2 et 3). En été, ils sont toujours bien représentés avec une richesse égale à 13 dans la station 2 et 15 dans les stations 1 et 3. Figure 1 Variations saisonnières des récoltes de Gastéropodes sur Calycotome spinosa VARIATIONS MENSUELLES DES ESPÈCES DE GASTÉROPODES Les résultats concernant l’importance mensuelle des Gastéropodes sont donnés dans la figure 2. Les Gastéropodes sont présents lors des différents mois de prospection. En novembre, les Gastéropodes atteignent 10 espèces dans la station 1 et seulement 4 espèces dans la station 3. En décembre, une légère augmentation est observée dans les 3 stations. En janvier, février et mars la station 3 compte 9 espèces. A partir de février jusqu’en juin, la recrudescence de la richesse se généralise dans la station 2, avec toujours 9 espèces. En juillet, la richesse des Gastéropodes n’est plus que de 8 dans la station 2. Le mois d’août représente le mois le plus pauvre avec seulement 7 espèces malacologiques dans la station 1, 6 espèces dans la station 2 et 4 espèces dans la station 3. Figure 2 Variations mensulles du nombre d’espèces de Gastéropodeserécoltés sur Calycotome spinosa VARIATIONS MENSUELLES DES NOMBRES DE GASTÉROPODES RECENSÉES SUR CALYCOTOME SPINOSA DANS LES TROIS STATIONS - Application de la fréquence d’occurrence aux espèces d’escargots Cinq espèces sont considérées comme accidentelles, Sphincterochila candidissima, Archelix lactea, Alabastrina soluta, A. alabastrites et Helicella pyramidata . Six espèces, Milax nigricans, Archelix zapharina, A. juilletii, Helicilla lauta, H. acompsia et Cochlicella acuta sont très accidentelles avec des fréquences moyennes inférieures à 10%. - Abondance relative des escargots Euparypha pisana (Helicidae) a une abondance de 16,71% dans la station 2 et de 8,88% seulement dans la station 3. A. DAMERDJI EXPLOITATION DES RÉSULTATS PAR DES INDICES ÉCOLOGIQUES L’ensemble des espèces malacologiques inventoriées sont prises en considération pour le calcul des indices écologiques (tableau 2). 51 Mésogée Volume 64l 2008 Figure 3 Variations mensuelles du nombre d’individus de Gastéropodes récoltés sur Calycotome spinosa Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). Les résultats obtenus sont représentés dans la figure 3. Ils montrent l’importance des populations d’ escargots mois par mois, dans les 3 stations. Leur effectif varie de 78 individus en juillet à 9 en décembre dans la station 3. Il est à souligner que les Gastéropodes sont présents dans les 3 stations pendant tous les mois, y compris les plus chauds. Tableau 2 52 Stations Espèces malacologiques Station 1 Station 2 F% A% F% Milax nigricans 5 0,13 0 Sphincterochila candidissima 25 0,66 15 Macularia hieroglyphicula 35 0,8 30 Macularia jourdaniana 65 25,4 Helix aspersa 41 Archelix lactea Archelix punctata A% Station 3 Moy. FO% ) Classes de constance F% A% 0 5 0,06 3,33 Très accidentelle 0,23 10 0,18 16,66 Accidentelle 1,65 30 0,54 31,66 Accessoire 65 3,78 75 3,16 68,33 Constante 1 20 0,39 30 0,42 31,66 Accessoire 15 0,26 15 0,23 15 0,18 15 Accidentelle 45 1,40 30 0,55 20 0,79 31,66 Accessoire Archelix zapharina 0 0 0 0 10 0,12 3,33 Très accidentelle Archelix juilleti 15 0,73 0 0 0 0 5 Très accidentelle Archelix polita punctatiana 65 1,74 30 0,86 50 12 48,33 Accessoire Eobania vermiculada 65 2,94 65 2,44 65 2,67 65 Constante Euparypha pisana 90 9,17 95 16,71 70 8,88 85 Constante Alabastrina soluta 20 0,46 20 0,55 30 1,03 23,33 Accidentelle Alabastrina alabastrites 15 0,33 20 0,55 15 0,79 16,66 Accidentelle Helicilla (Cernuella) virgata 65 5,15 75 5,36 50 3,52 63,33 Constante Helicilla (Trochoïdea) pyramidata 10 0,53 15 0,47 15 0,48 13,33 Accidentelle Helicilla lauta 0 0 0 0 5 0,12 1,66 Très accidentelle Helicilla acompsia 5 0,46 5 0,23 10 0,85 6,66 Très accidentelle Helicilla (Xeromagna) terveri 20 1,47 25 1,57 30 1,15 25 Accessoire Cochlicella acuta 0 0 0 0 5 0,06 1,66 Très accidentelle Rumina decollada 45 1,40 25 0,63 15 0,24 28,33 Accessoire Archelix juilleti a une abondance de 0,73% dans la station 1 alors qu’elle est absente dans les stations 2 et 3. L’abondance de chacune des espèces Archelix zapharina et Helicella lauta est de 0,12% dans la station 3 alors qu’elles sont absentes des stations 1 et 2. La même valeur de l’abondance (0,06%) est trouvée pour Milax nigricans (Milacidae) et Cochlicella acuta (Helicidae) dans la station 3. - Indice de diversité ou de Shannon Les données du tableau 3 permettent de calculer l’indice de Shannon H’ dans les 3 stations. Cet indice rend compte du niveau de la diversité des espèces présentes. Il est le plus élevé dans la station 1et diminue dans la station 2 où 16 espèces seulement ont été dénombrées. - Indice d’équirépartition appliqué aux espèces d’escargots E1 = 0.80432113 E2 = 0.68148425 E3 = 0.7586009 L’équirépartition est supérieure à 0,80 au niveau de la station 1 par conséquent, les effectifs des différentes espèces (Sphincterochila candidissima et Archelix juilleti)ont tendance à s’équilibrer. Il faut noter que même dans les stations 2, l’équitabilité est élevée puisqu‘elle est égale à 0,68. Mésogée Volume 64l 2008 Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). A. DAMERDJI Indices écologiques des espèces de Gastéropodes récoltées sur Calycotome spinosa dans les différentes stations - Répartition verticale des Gastéropodes sur le genêt Le tableau 4 montre la répartition verticale des espèces de Gastéropodes sur le Genêt. Au niveau de la racine (R) une seule espèce malacologique est trouvée, Milax nigricans, qui recherche l’humidité au niveau racinaire. Au niveau de la surface du sol (Ss) la pédofaune est constituée par toutes les autres espèces recensées, groupe particulièrement caractéristique de cette strate. Nous y rencontrons Sphincterochila candidissima (Sphincterochilidae), Macularia jourdaniana (Helicidae) et Rumina decollata (Subulinidae). Toutes les espèces sauf Milax nigricans ont été trouvées à la surface du sol. Une seule espèce Sphincterochila candidissima se trouve éparpillée en surface du sol.. Les individus des autres espèces sont regroupées à l’intérieur même de la touffe d’alfa.. Au niveau de la tige (T) les Gastéropodes sont accrochés au niveau des épines de la tige. Nous y STATION 1 Pn STATION 2 Pn STATION 3 Pn Milax nigricans 2 0 1 Sphincterochila candidissima 10 3 3 Macularia hieroglyphicula 12 21 9 Macularia jourdaniana 38 48 52 Helix aspersa 15 5 7 Archelix lactea 4 3 3 Archelix punctata 21 7 13 Archelix zapharina 2 0 0 Archelix juilleti 11 0 0 Archelix polita punctatiana 26 11 20 Eobania vermiculada 44 31 44 Euparypha pisana 137 212 146 Alabastrina soluta 7 7 17 Alabastrina alabastrites 5 7 13 Helicella (Cernuella) virgata 77 68 58 Helicella (Trochoïdea) pyramidata 8 6 8 Helicella lauta 0 0 2 Helicella acompsia 7 3 14 Helicella (Xeromagna) terveri 22 20 19 Cochlicella acuta 0 0 1 Rumina decollada 21 8 4 TOTAL 469 460 434 19 16 19 H' en bits 3,41669784 2,725937 3,2224817 H'max en bits 4,24792751 4 4,24792751 E 0,80432113 0,68148425 0,75860091 Genre / espèces Milax nigricans R SS T + Sphincterochila candidissima + Macularia hieroglyphicula + + Macularia jourdaniana + + Helix aspersa + Archelix lactea + Archelix punctata + Archelix zapharina + Archelix juilleti + Archelix polita punctatiana + + Eobania vermiculada + + Euparypha pisana + + Alabastrina soluta + Alabastrina alabastrites + Helicella (Cernuella) virgata + Helicella (Trochoïdea) pyramidata + Helicella lauta + Helicella acompsia + Helicella (Xeromagna) terveri + Cochlicella acuta + Rumina decollada + + retrouvons 6 espèces : Helix aspersa, Macularia jourdaniana, M. hieroglyphicula, Archelix punctata, A. polita punctatiana et Euparypha pisana. Les Gastéropodes fabriquent un épiphragme pour pouvoir subsister aux conditions extrêmes. Au niveau des feuilles (F), il n’y a pas d’espèces de Gastéropodes sauf dans de très rares cas exceptionnels. 53 Mésogée Volume 64l 2008 Nombres d’espèces Tableau 3 Indice de diversité de Shannon Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). A. DAMERDJI STATIONS Espèces malacologiques Tableau 4 A. DAMERDJI 54 Mésogée Volume 64l 2008 Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). Répartition verticale des espèces de Gastéropodes sur Calycotome spinosa DISCUSSION Si nos relevés ont permis de dénombrer 21 espèces de Gastéropodes sur Calycotome spinosa, Adjlani (1998) a reconnu 13 espèces malacologiques sur Ampelodesma mauritanicum, Bouhellou1998) en observe 19 sur Chamaerops humilis et Kassemi (2001) également 19 sur Thymus ciliatus. Sur Rosmarinus officinalis sont dénombrées 18 espèces de Gastéropodes (Ladjmi, 1999 ; Damerdjiet al., 2005). Par ailleurs dans les monts de Tlemcen, Damerdji (1997a) a récolté 27 espèces d’escargots. De même dans la zone steppique située au sud de Tlemcen, Damerdji (1996) compte 15 espèces faisant partie de la malacofaune alors que Khelil (1984) n’en avait noté qu’une seule avec Leucochroa candidissima. Cette espèce actuellement dénommée Sphincterochila candidissima affectionne particulièrement les roches calcaires (Damerdji, 1990). S candidissima montre une forte adaptation morphologique, par son test épais et blanc qui doit la protéger des hautes températures pouvant sévir dans ces pelouses et son épiphragme corné à l’abri duquel elle entre en diapause. La bioécologie de la malacofaune retrouvée dans deux stations (Hafir et Zarifelt) des monts de Tlemcen indique la présence de 34 espèces à Hafir et 19 espèces à Zarifelt pendant les années 1999 et 2000. Certains caractères conchyliologiques particuliers dont la taille et la couleur distinguent les espèces susceptibles de s’élever en altitude (Damerdji, 2004a). Pendant cette même période, une étude portant sur la répartition des espèces malacologiques du littoral (Ghazaouet), en passant par Tlemcen (centre urbain), les monts (Hafir et Zarifelt), Maghnia (plaine) jusqu’à la zone la plus méridionale et steppique (El-Aricha) a permis de relever 5 espèces communes dans ces différents écosystèmes : Sphincterochila candidissima (Sphincterochilidae), Archelix lactea, A. punctata et A. zapharina (Helicidae) et Rumina decollata (Subulinidae). Il faut noter que 20 espèces, dont 14 Helicidae, sont considérées comme spécifiques (Damerdji, 2004b). A titre d’exemple, le cinquième écosystème considéré, la zone steppique, abrite 2 espèces d’Helicidae (Archelix bailloni et Helicella lemoinei). Dans son essai d’écologie quantitative sur les Invertébrés de la sansouire camarguaise, Bigot (1965) indique en nombre d’espèces les mollusques recueillis dans les principaux milieux de Camargue. Dans la sansouire, la richesse spécifique est estimée à 8. Les facteurs abiotiques et biotiques restent importants dans la variation de la taille des coquilles de Sphincterochila candidissima (Damerdji 2001). Cette espèce atteint en milieu xérophile comme à El-Aricha une forte abondance. Celle-ci est liée cependant à la dégradation du milieu (Damerdji, 1997b). S. candidissima est très localisé en Camargue où il est connu au domaine de la Tour du Valat et dans ses environs (Aguesse & Bigot, 1962). La population de S. candidissima de Camargue tend à montrer un net décollement des spires de la coquille (Altes, 1956). Engel (1957) signale sa présence principalement dans la sansouire basse et salée à Arthrocnemum glaucum. Par contre, E. pisana est commun dans toute la Camargue, où ses tests s’amassent sous les Salicornia fruticosa hébergeant de nombreux invertébrés. (Aguesse et Bigot 1962). D’autre part, il a été démontré l’impact des facteurs édapho-climatiques sur les caractères conchyliologiques du peuplement des Gastéropodes terrestres dans la région de Tlemcen (Damerdji, 1997b). Selon Bigot (1957) une faune importante représentant la majeure partie des ordres d’Invertébrés et à peu près tous les ordres d’insectes connus en Camargue, se réfugit dans les coquilles vides. Ces tests jconstituent un refuge idéal pour la faune contre les basses températures de l’hiver et contre la canicule. Ces tests sont aussi utilisés comme source de nourriture, voir même de lieu de ponte et de métamorphose. En 1971, Sacchi a étudié l’écologie comparée des Gastéropodes pulmonés des dunes méditerranéennes et atlantiques. Parallèlement, il est à remarquer que DAMERDJI (2002a) a constaté qu’en hiver, la richesse spécifique des escargots est élevée sur Chamaerops humilis avec 12 espèces. C’est également à cette saison que le nombre d’individus Macularia hieroglyphicula est le plusélevé sur le diss (Ampelodesma mauritanica (Damerdji, 2002b). Sur le doum (Chamaerops humilis), Bouhellou, en 1998 a recensé en janvier 6 espèces malacologiques dans la 1ère station. Ce même auteur, constate une diminution du nombre des espèces en juin. Sur le romarin, les fluctuations vont de 125 individus en avril et 31 en décembre (Damerdji et al., 2005). Dans l’étude effectuée sur Chamaerops humilis, Bouhellou (1998) a montré que les Gastéropodes occupent la seconde position du point de vue des effectifs avec 112 individus. La même constatation est faite par Adjlani (1998) sur Ampelodesma mauritanicum avec 98 individus. Sur le Romarin, Damerdji et al., (2005) retrouvent l’indice de diversité dans la 3ème station qui diminue dans la 1ère station. L’effectif le plus important concerne Euparypha pisana avec 137 individus dans la 1ère station et 212 individus dans la 3ème station. Damerdji et al., (2005) constatent l’équirépartition la plus élevée dans la 3ème station à romarin. Au niveau de la surface du sol, la majorité des Gastéropodes inventoriés s’y trouvent. Macularia, Archelix (Helicidae) et Milax gagates sont comptés parmi la pédofaune. (Damerdji & Adjlani, 1999). Au niveau de la tige du diss, 4 espèces de Gastéropodes sont notées. Ces espèces utilisent cette partie de la plante pour fabriquer leur épiphragme et s’y installer (Damerdji, 2002b). Seule l’espèce Euparypha pisana, difficile à reconnaître avec son polymorphisme , est retrouvée sur le stipe du doum (Chamaerops humilis) (Damerdji, 2002a). Sur le diss (Ampelodesma mauritanicum) nous avons retrouvé 2 espèces d’Helicidae considérées comme phytophages. Selon Khelil (1989), les individus de Sphincterochila candidissima sont des consommateurs de feuillage d’alfa (Stipa. tenacissima). Sur le doum, la surface foliaire étant rugueuse, les Gastéropodes fabriquent leurs épiphragmes pour pouvoir subsister aux conditions extrêmes. Adjlani M., 1998 – Contribution à l’étude bioécologique de la faune d’Ampelodesma mauritanicum (Poiret) Durd et Shinz, 1895 (Graminées) dans la région de Tlemcen. Thèse Ing. Ecol. Inst. Sci. Natu., Univ. Aboubekr Belkaid, Tlemcen, 117 p. Aguesse P. & Bigot L., 1962 – Complément à l’inventaire de la faune camarguaise : les Mollusques terrestres et des eaux douces et saumâtres. (5ème note). Rev. la Terre et la Vie, 1 : 82 - 90. Altes J., 1956 – Sur le polymorphisme de la coquille de L. candidissima, modalités et déterminisme. Bull. Mus. Hist. Nat. Marseille, 16 : 53 - 67. Altonaga K., Gomez B., Martin R., Prieto C.E., Puente A.I. & Rallo A., 1994 – Estudio faunistico y biogeografico de los Moluscos terrestres del norte de la Peninsula Iberica. Parlamento Vasco, Vitoria, 503 p. Bigot L., 1957 – Un microclimat important de Camargue : les coquilles vides de Mollusques. Rev. Terre et Vie, 2-3 : 211- 230. Bigot L., 1965 – Essai d’écologie quantitative sur les Invertébrés de la sansouire camarguaise. Imprimerie M. Declume, Lons-le-Saunier, 100 p. Bigot L., 1967 – Recherche sur les groupements de Gastéropodes terrestres : la constitution des « grappes ». Vie et Milieu, 18, C, 1 – 27. Bigot L. & Aguesse P., 1984 – Considération sur les adaptations de la faune des Invertébrés aux conditions particulières de fonctionnement des écosystèmes d’un delta méditerranéen (la Camargue A. DAMERDJI RÉFÉRENCES 55 Mésogée Volume 64l 2008 L’étude bioécologique de la faune malacologique du Genêt (Calycotome spinosa) dans les 3 stations de la région de Tlemcen, nous a permis d’inventorier 21 espèces lors des prélèvements effectués de novembre 2001 à août 2002. En hiver, les stations 1et 2 ont une richesse spécifique égale à 13. Les Gastéropodes sont retrouvés partout même pendant les mois les plus chauds. En effectif, c’est la station 3 et au mois de juillet où nous rencontrons le maximum d’individus. Sur les 21 espèces malacologiques analysées, 4 sont constantes, 6 accessoires, et les 11 autres sont accidentelles. Euparypha pisana (Helicinae, Helicidae) reste la plus abondante parmi toutes les espèces malacologiques analysées. C’est une espèce caractéristique de cette plante xérophile et épineuse. Le calcul de l’indice SHANNON-WEAVER varie entre 2,73 et 3,42 bits. Il est le plus élevé dans la station 1. L’équirépartition indique un équilibre entre les effectifs des différentes espèces présentes. Pour ce qui est de la répartition des Gastéropodes sur le genêt, la totalité des espèces inventoriées sont trouvées sur le sol. Enfin, si un certain nombre de résultats ont été dégagés au cours de cette étude, beaucoup de points restent à éclaircir, notamment la relation entre le niveau trophique et la malacofaune qui y est recensée. Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). CONCLUSION A. DAMERDJI Mésogée Volume 64l 2008 Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycoyome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie). 56 ou delta du Rhône). Bull. Mus. Hist. Nat. Marseille. 44 : 7- 17. Bouhellou B., 1998 – Contribution à l’étude bio-écologique de la faune de Chamaerops humilis (Doum) (Monocotylédones, Palmacées) dans la région de Tlemcen. Thèse Ing. Ecol. Inst. Sci. Natu., Univ. Aboubekr Belkaid, Tlemcen, 93 p. Dajoz, 1985 – Précis d’écologie. Ed. Bordas, Paris, 505 p. 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Damerdji A., 2001 – Impact des facteurs abiotiques et biotiques sur la taille des coquilles de Sphincterochila candidissima (Mollusca – Sphincterochilidae) dans la région de Tlemcen (Algérie). Rev. Semes., I.N.R.A.A., 9 : 101 – 109. Damerdji A., 2002a – La malacofaune associée au Doum : Inventaire – Aperçu bioécologique dans la région de Tlemcen (Algérie). Comm. orale, 2d International Congress of European Malacological Societies, 9 - 13 septembre 2002, Vigo. Damerdji A., 2002b – Contribution à l’étude bioécologique de la malacofaune du Diss (Ampelodesma mauritanicum) dans la région de Tlemcen (Algérie). Comm. orale, 2d International Congress of European Malacological Societies. 9 - 13 Septembre 2002, Vigo. Damerdji A., 2004a – Bioécologie de la malacofaune retrouvée dans 2 stations (Hafir et Zarifelt) des Monts de Tlemcen. Comm. Orale, Colloque méditerranéen sur la gestion durable des espaces montagnards. Univ. Aboubekr BELKAID, Tlemcen, - 10 – 11 octobre 2004. 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The presence of the parasitic swimbladder nematode, Anguillicola crassus, in eels of the aquatic ecosystem of the Northeast of Algeria, was recorded for the first time in 1999. The study of the evolutionary dynamics of parasitism reveals that the nematode A. crassus is present throughout the year in eels of the Mafrag estuary. This parasite infects 51% of eels examined with mean infestation intensity of 3,92 and mean abundance of 2,02 per fish. We note, elsewhere, that the prevalence, the intensity and the abundance show monthly variations ; the epidemiological values are highest in winter and spring period. The nematode A. crassus infects eels of all size at rates exceeding 46% ; however the large sized fish show rates of infestation exceeding 60%. The mean infestation intensity and abundance show maximum values in large sized eels. Key words : Anguilla anguilla; Anguillicola crassus, Mafrag estuary, swimbladder; Northeast of Algeria. anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). Zehaira BOUDJADI*, Mardja TAHRI, Nawel DJEBARI , Imane HAMZA et Mourad BENSOUILAH ** Laboratoire d’Ecobiologie des Milieux Marins et Littoraux Faculté des Sciences-Université Badji Mokhtar Annaba (Algérie) email:(*) [email protected] ; (**)[email protected] L’anguille européenne Anguilla anguilla est un poisson amphihalin, diadrome, thalassotoque tributaire des côtes, des lacs et rivières d’Europe et d’Afrique du nord. Cette espèce est exploitée à tous les stades de son développement et représente une ressource halieutique à grande valeur économique. Les stocks d’anguille montrent un déclin généralisé ayant pour origine la surpêche, la détérioration de l’habitat, la pollution, le parasitisme chronique (Moriarty, 1993). L’anguillicolose est l’une des plus importantes menaces naturelles pesant sur l’anguille ; cette parasitose a pour cause Anguillicola crassus, un ver nématode hématophage qui provient de l'Asie du Sud-Est et dont le réservoir naturel est l'anguille asiatique, Anguilla japonica (Kuwahara et al. 1974) ; la présence de ce parasite dans la vessie gazeuse de l’anguille est à l’origine de graves lésions. Selon Peters & Hartmann (1986), Anguillicola crassus a été introduit en Europe suite à l’importation de son hôte d’origine, l’anguille japonaise, Anguilla japonica. Les premiers cas d’anguillicolose ont été signalés dès 1982 en Allemagne (Neumann, 1985 ; Peters & Hartman, 1986), en Belgique (Belpaire et al. 1989a) et en Italie (Canestri-Trotti, 1987) ; par la suite, la présence du parasite est rapportée en France (Dupont & Petter, 1988). Depuis, le parasite a rapidement colonisé presque tous les pays 59 d’Europe et d’Afrique du Nord (Koie, 1991 ; Moravec, 1994 ; El Hilali et al. 1996 ; Maamouri et al. 1999 ; Meddour et al. 1999) et arrive actuellement dans le continent américain (Fries et al. 1996 ; Barse & Secor, 1999). Cette expansion rapide du parasite s’explique par le régime carnivore et opportuniste de l’anguille mais surtout par les caractéristiques biologiques propres à ce nématode, telless que sa grande fécondité et son aptitude à utiliser une grande diversité d’hôtes intermédiaires (Copépodes, Cyclopidés, Calanidés et Ostracodes) et d’hôtes paraténiques (Cyprinodontidés, Cyprinidés, Percidés) entrant dans le spectre trophique de l’anguille (Blanc, 1994), ainsi que la non sélectivité envers la taille de son hôte. Certains auteurs mettent en cause les introductions non contrôlées d’anguilles destinées aux repeuplements (Belpaire et al., 1989b). La présence de ce ver nématode dans la vessie Mésogée Volume 65l 2009 Mots-clés : Anguilla anguilla, Anguillicola crassus, estuaire du Mafrag, vessie gazeuse, Algérie. Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla Introduction La pêche de l’anguille Anguilla anguilla a débuté depuis déjà 3 décennies dans les divers plans d’eau du complexe de zones humides du Parc national d’El Kala. La présence du ver nématode parasite de la vessie gazeuse de l’anguille, Anguillicola crassus a été signalée en 1999 dans les hydrosystèmes du nord-est algérien. L’étude de la dynamique évolutive du parasitisme révèle que le nématode A. crassus est présent toute l’année chez les anguilles peuplant l’estuaire du Mafrag. Ce parasite infeste en moyenne 51% des anguilles examinées à des intensités d’infestation moyenne de 3,92 et une abondance de 2,02 vers/poisson examiné. Nous notons, par ailleurs, que la prévalence, l’intensité et l’abondance montrent des variations mensuelles ; c’est en période hivernale et printanière que les indices parasitologiques sont les plus élevés. Le ver nématode A. crassus infeste les anguilles de toutes les classes de taille à des taux dépassant 46% ; ce sont toutefois les spécimens de grande taille qui montrent les taux d’infestation dépassant 60%. L’intensité d’infestation et l’abondance montrent des valeurs maximales chez les anguilles de grande taille. gazeuse de l’espèce Anguilla anguilla est à l’origine de lésions graves et de taux de mortalité plus élevés que ceux observés chez Anguilla japonica, ceci aussi bien en milieu naturel qu’en élevage (Van Banning & Haenen, 1990 ; Molnar et al. 1991 ; Wurtz et al. 1996). En Algérie, peu de données sur l’anguillicolose sont disponibles du fait que peu de travaux sur les pathologies de l’anguille ont été entrepris depuis l’apparition de ce parasite dans les eaux continentales en 1999 (Meddour et al. 1999). Les études sur les pathologies de l’anguille ont été réalisées sur les principaux sites de pêches de ce poisson (Lacs Oubeira et Tonga et lagune El Mellah) que le Parc national d’El Kala abrite (Djebari et al. 2005). Par ailleurs ces études se sont juste intéressées à l’épidémiologie de l’anguillicolose sans aborder son évolution temporelle. L’objectif visé dans cette étude est de décrire la dynamique de l’évolution d’Anguillicola crassus chez les anguilles peuplant l’estuaire du Mafrag durant tout un cycle, d’un mois à l’autre et en fonction de la taille de l’hôte. Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUDJADI, M. TAHRI, N. DJEBARI I. HAMZA et M. BENSOUILAH Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). MATÉRIEL ET MÉTHODES 60 L’échantillonnage a été effectué mensuellement (à raison de 30 anguilles par mois) durant un cycle annuel, de juin 2007 à mai 2008, au niveau de l’estuaire du Mafrag (figure1) situé sur le littoral Est de l’Algérie (36°50'18.26''N et 7°57'27.81''E). Les anguilles, pêchées à l’aide de nasses, sont mises dans une glacière pour être transportées vivantes dans les meilleurs délais au laboratoire où elles seront soumises à un examen. Les anguilles sont plongées dans de l’eau (2 litres) contenant un anesthésiant à base d’huile de girofle (1 volume) et d’éthanol absolu (9 volumes) ; chaque anguille est mesurée à l’aide d’un ichtyomètre, de l’extrémité de la lèvre inférieure à l’extrémité de la nageoire caudale (Longueur totale), puis disséquée ; la vessie gazeuse est prélevée, isolée dans une boite de Pétri pour être sectionnée longitudinalement et observée minutieusement sous une loupe binoculaire. Les parasites présents, souvent vivants, sont récoltés et débarrassés du liquide hémorragique dans lequel ils baignent par rinçage à l’eau distillée. Ils sont par la suite dénombrés avant d’être fixés dans de l’éthanol 70% pour leur étude ultérieure (Kennedy, 1993). Les indices épidémiologiques rencontrés dans la littérature sont pour la majorité calculés selon Bush et al. (1997). Dans certains cas, les indices épidémiologiques ont dû être calculés à partir des données brutes. Nous avons alors utilisé la même méthode de calcul (Bush et al. 1997) : - La prévalence en pourcentage = nombre d’hôtes infestés x 100 / nombre d’hôtes examinés - Intensité moyenne = nombre total de parasites trouvés dans l’échantillon /nombre d’hôtes infestés -Abondance moyenne = nombre total de parasites trouvés dans l’échantillon /nombre total d’hôtes examinés Figure 1 localisation du site d’étude. RÉSULTATS Un total de 773 vers nématodes de l’espèce Anguillicola crassus ont été récoltés à partir des vessies natatoires de 360 anguilles jaunes et argentées, de longueurs comprises entre 24 et 74 cm, provenant de l’estuaire du Mafrag. Dynamique temporelle de l’infestation Le ver nématode A. crassus infeste en moyenne 51% des anguilles examinées. Nous notons une variation mensuelle des taux d’infestation qui sont compris entre 30% (en décembre) et 76,66% (en juin). Les prévalences moyennes saisonnières dépassent 44% en été et en automne, se rapprochent de 48% en hiver et atteignent 70% au printemps (figure 2). Figure 2 Le ver nématode A. crassus infeste toutes les classes de taille à des taux dépassant 46% (figure 4), mais ce sont les anguilles dont la taille dépasse 54 cm qui enregistrent les taux d’infestation supérieurs à 60% (plus de 61% et 63% des anguilles de la classe de taille [54-64[ et [64-74[ sont respectivement infestées). Z. BOUDJADI, M. TAHRI, N. DJEBARI I. HAMZA et M. BENSOUILAH Figure 3 Distribution d’Anguillicola crassus par classe de taille de l’hôte. Mésogée Volume 65l 2009 Les anguilles infestées par A. crassus hébergent en moyenne 3,92 vers ; des fluctuations mensuelles sont toutefois notées. Les valeurs enregistrées sont généralement comprises entre 3 et 5,71 spécimens, sauf en juillet, août et novembre où moins de 3 vers sont rencontrés dans la vessie natatoire (figure 3). Les valeurs de cet indice épidémiologique sont comprises entre 3,5 et 3,7 en été et en automne et dépassent 4 en hiver et au printemps. Les anguilles examinées abritent en moyenne 2,02 vers ; l’abondance des vers nématodes varie mensuellement : elle est comprise entre 0,9 (en juillet) et 3,66 (en juin) vers par anguille examinée (figure 3). C’est toutefois en période printanière que le ver A. crassus est le plus abondant (3,1 et 3,66 relevés respectivement en avril et en juin). Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). Distribution mensuelle de la prévalence d’Anguillicola crassus (estuaire du Mafrag). 61 Figure 4 Distribution de la prévalence d’Anguillicola crassus en fonction de la classe de taille de l’hôte, dans estuaire du Mafrag.. A. crassus est présent à raison de plus de 3 spécimens par vessie infestée. Nous notons toutefois que les individus des classes de taille [24-34[ et [54-64[ abritent plus de 4 vers/anguille infestée (figure 5). Les valeurs de l’abondance d’A. crassus dépassent généralement 2 parasites par anguille examinée sauf chez les spécimens des classes de taille [34-44] et [44-54] où moins de 2 parasites sont relevés (figure 5). Figure 5 Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUDJADI, M. TAHRI, N. DJEBARI I. HAMZA et M. BENSOUILAH Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). Distribution de l’intensité d’infestation et de l’abondance d’Anguillicola crassus par classe de taille de l’hôte (estuaire du Mafrag). 62 DISCUSSION Le ver nématode A. crassus infeste en moyenne 51% des anguilles examinées dans la présente étude. Il est toutefois noté une variation mensuelle des taux d’infestation qui sont compris entre 30% (en décembre) et 76,66% (en juin). Des taux d’infestation de l’ordre de 50% sont rapportés chez les anguilles de la lagune El mellah (Loucif et al., 2009). Par ailleurs, les résultats d’une campagne réalisée en 2005 dans ce même site d’eau saumâtre montrent que moins de 15% des anguilles sont infestées par A. crassus (Djebbari et al., 2005). Dans les plans d’eau douce, les prévalences, signalées par Loucif et al., (2009), sont de l’ordre de 68 et 60% respectivement dans les lacs Tonga et Oubeira. Ces prévalences sont assez proches des valeurs notées dans le Mafrag en période printanière. Dans les plans d’eau marocains, les taux d’infestation rapportés sont de 55,36% en eau saumâtre (dans l’estuaire de l’oued Sebou) contre 69% et 55% respectivement dans l’oued Loukkos et l’oued Moulouya (Lachheb 1997 ; El Hilali et al., 2005). Les valeurs de la prévalence relevées dans l’estuaire du Mafrag sont proches de celles notées au Maroc dans l’estuaire Moulouya (Rahou et al., 2001) et dans l’estuaire du Sebou (El Hilali et al., 2004-2005 ; Loukili & Belghyti, 2007) et en France, dans le delta du Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUDJADI, M. TAHRI, N. DJEBARI I. HAMZA et M. BENSOUILAH Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). Rhône (Levebvre et al., 2002). En Tunisie, Gargouri et al. (2006) rapportent, chez les anguilles de la lagune Ishkeul, des prévalences variant entre 4,5 (en juillet) et 35% (en mars). Des prévalences encore plus faibles sont enregistrées dans les lagunes de Ghar ElMelh et de Bizerte où le nématode n’est rencontré qu’en février, octobre et novembre dans le premier plan d’eau et uniquement en novembre dans le second. Ces mêmes auteurs notent par ailleurs que les anguilles ne présentent pas d’infestation par A. crassus dans la lagune de Tunis où la salinité est proche de 38 pour mille. Des variations mensuelles de la prévalence d’A. crassus sont rapportées par de nombreux auteurs. Dans l’estuaire Moulouya (Maroc), Rahou et al.(2001) signalent 0% (en août) et 70% (en avril), dans les lagunes tunisiennes, Gargouri Ben Abdallah & Maamouri, (2006) notent 4,35% (en juillet) et 35% (en mars), dans le delta du Rhône, Lefebvre et al. (2002) enregistrent 40% (en octobre) et 72% (en juin). Cette variation mensuelle des indices épidémiologiques serait liée aux fluctuations de la température : cette dernière aurait une influence aussi bien sur le développement larvaire du ver nématode dans l’eau et dans l’hôte intermédiaire (Petter et al., 1989 ; de Charleroy et al., 1989) que sur les anguilles fortement infestées (Lefebvre et al., 2002). Ces fluctuations saisonnières du taux d’infestation seraient, selon Lecomte-Finiger (1983), liées aux deux périodes critiques où l’anguille arrête de se nourrir, l’une en hiver quand la température baisse en dessous de 10°C et l’autre en été quand la température dépasse 30°C. Durant ces deux périodes, l’atteinte de l’anguille par le stade infestant du nématode serait limitée, ce qui engendrerait une baisse des taux d’infestation. Gibrat & Nielsen, (1985) notent que la principale phase active d’alimentation de l’anguille s’étale d’avril à septembre, avec un maximum d’avril à juin. Cette période représente la phase idéale pour le succès de la transmission de la larve à l’hôte intermédiaire ou paraténique. D’autres auteurs pensent que la faible prévalence estivale trouverait son explication dans le changement de régime de l’anguille qui, au départ, est basé sur l’ingestion d’annélides et petits crustacés, plus particulièrement les cyclops (hôte intermédiaire de ce parasite) pour devenir ichtyophage en juin-juillet (Sinha & Jones, 1966). Dans l’estuaire du Mafragh, l’amplitude de variation des intensités moyennes est similaire à celle relevée dans l’estuaire Moulouya (Rahou et al., 2001). Nos valeurs sont assez élevées par rapport à celle rapportées par Gargouri Ben Abdallah & Maamouri (2006) dans les lagunes du nord-est de la Tunisie (de 1 à 1,5 vers/poisson infesté) et par El-Hilali et al. (2004-2005) dans l’estuaire du Sebou au Maroc (0,31 à 1,12 vers/poisson infesté). Dans ce même site, Loukili & Belghyti (2007) trouvent des valeurs de l’intensité d’infestation légèrement plus élevées que celles de 2004 (2,91 à 4 vers/poisson infesté). C’est, par ailleurs, dans le Delta du Rhône que l’amplitude de variation la plus élevée est notée (1,5 à 7,7 vers/poisson infesté). L’enregistrement en période hivernale et printanière de valeurs moyennes de l’intensité et de l’abondance élevées est confortée par les données obtenues dans des biotopes similaires au Maroc (Rahou et al., 2001), en Tunisie (Gargouri Ben Abdallah & Maamouri, 2006) et en France (Levebvre et al., 2002). De nombreux travaux ont montré l’impact de la salinité et de la température sur la longévité des larves d’A. crassus. Ces auteurs rapportent qu’en eau douce, les larves libres peuvent vivre jusqu’à 3 à 4 semaines, mais en revanche, la durée de vie de ces larves est réduite à 3-4 jours si la rencontre avec l’hôte n’est pas réalisée et si la salinité du milieu est élevée, avec l'absence d’augmentation de la température (De Charleroy et al., 1987 ; 1989 ; Kennedy & Fitch, 1990 ; Schippers et al., 1991). Sauvaget et al. (2003) montrent que les taux d'infestation par A. crassus diminuent en fonction du gradient de salinité. Ils rapportent des taux d'infestation de 90% et 15% dans les eaux à faible salinité et à salinité élevée respectivement. Loukili & Belghyti, (2007) notent une baisse des indices épidémiologiques chez les anguilles de l’estuaire du Sebou quand la salinité, la conductivité et la charge polluante des eaux augmentent. 63 L’infestation par A. crassus touche toutes les classes de taille des anguilles de l’estuaire du Mafrag. Ce sont toutefois les anguilles de grande taille qui montrent les prévalences les plus élevées. Mais en ce qui concerne l’intensité d’infestation et l’abondance, les valeurs les plus élevées sont relevées aussi bien chez les spécimens de petite taille que ceux de grande taille. Cette hétérogénéité dans l’infestation de l’hôte est rapportée par El Hilali et al.,(2004-2005). Elle révèle la non sélectivité que montre A. crassus vis-à-vis de la taille de l’anguille. Dans l’estuaire Moulouya, Rahou et al., (2001) ne trouvent pas de corrélation entre la taille des anguilles et l’intensité d’infestation par A. crassus. Loukili & Belghyti (2007) signalent quant à eux que l’infestation touche particulièrement les poissons de petite taille du fait de leur comportement alimentaire basé sur l’ingestion d’annélides et de crustacés (Lecompte-Finiger, 1983), essentiellement des cyclops (hôte intermédiaire du parasite). Les poissons de grande taille se nourrissent de petits poissons et de crabes (Tesch, 1977). L’augmentation du parasitisme par A. crassus chez l’anguille s’expliquerait par la simplicité du cycle évolutif de ce parasite et par son adaptabilité à un grand nombre d’hôtes intermédiaires. Selon Kirk (2003), l’accumulation de larves chez l’hôte paraténique serait en faveur de l’augmentation rapide des valeurs épidémiologiques. Les niveaux élevés de l’infestation s’expliqueraient par l’absence de mécanismes de défense de l’anguille vis-à-vis de ce parasite allochtone. L’étude de l’évolution des larves d’A. crassus chez l’anguille japonaise et l’anguille européenne a montré que 60% des larves récoltées chez A. japonica étaient retrouvées mortes, encapsulées dans la paroi de la vessie gazeuse, mais, en revanche, aucune larve n’était morte chez A. anguilla. Il a été par ailleurs démontré que le développement des vers était significativement lent chez A. japonica comparé à celui noté chez A. anguilla (Knopf & Mahnke, 2004). Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUDJADI, M. TAHRI, N. DJEBARI I. HAMZA et M. BENSOUILAH Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). CONCLUSION 64 Du fait de l’absence d’importation d’anguilles vivantes, la présence d’Anguillicola crassus chez les anguilles peuplant les hydrosystèmes algériens ne s’expliquerait que par les repeuplements des plans d’eau (lacs et retenues de barrages) à l’aide d’alevins de diverses espèces de carpes, hôtes paraténiques hébergeant la forme larvaire infestante du ver nématode parasite, importées de Hongrie au début des années 90. Ces campagnes ont été initiées par le gouvernement, en vue de promouvoir la pisciculture et de lutter contre les phénomènes d’eutrophisation et de colmatage des canaux d’irrigation par la végétation. Dans l’estuaire du Mafrag, l’évolution des indices épidémiologiques d’A. crassus dépendrait essentiellement des variations de la température qui présente de gros écarts entre l’hiver et l’été. En ce qui concerne la salinité des eaux de l’estuaire, elle est basse et ne présente pas de grosses variations saisonnières, ce qui explique les taux d’infestation proches de ceux relevés dans les lacs d’eau douce (Tonga et Oubeira) de la région par rapport à ceux, relativement bas, de la lagune (Djebbari et al., 2009). Remerciements Cette étude a été menée dans le cadre d’un doctorat et d’un projet de recherche CNEPRU intitulé « l’utilisation de l’anguille européenne Anguilla anguilla comme bio indicateur de l’environnement aquatique : cas du complexe de zones humides du Parc national d’El Kala ». Je remercie vivement les personnes qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de ce travail. Z. BOUDJADI, M. TAHRI, N. DJEBARI I. HAMZA et M. BENSOUILAH Mésogée Volume 65l 2009 Barse A. M. & Secor D. H., 1999. An exotic nematode parasite of the American eel. Fisheries 24 (2): 6-10. Belpaire C., De Charleroy D., Grisez L. & Ollevier F. 1989a. 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Key words : Coleoptera, Dermestidae, Sefrania bleusei, morphology, biogéography, biology, collections. d'un Dermestidae remarquable : Sefrania bleusei Pic, 1899 (Coleoptera). Fabien FOHRER* et Michel MARTINEZ** * Centre Interrégional de Conservation et de Restauration du Patrimoine (CICRP) 21, rue Guibal, F-13003 Marseille. ** INRA, Unité d'Écologie animale et Zoologie agricole, 2 place Pierre Viala, F-34060 Montpellier cedex 01. [email protected]. [email protected].. f.r En juillet 2002, l'un d'entre nous (F. F.) a découvert, à Marseille, deux imagos morts du Coléoptère Dermestidae Sefrania bleusei Pic, à terre, sur une coursive du Centre Interrégional de Conservation et de Restauration du Patrimoine (CICRP). Depuis, cette espèce a été retrouvée chaque année (2003 à 2009), de février à mai, en différents endroits du CICRP. Au total c'est plus de 50 adultes et seulement 1 larve de S. bleusei qui ont été collectés dans ce centre. A notre connaissance il s'agit là des premières captures en France de cette espèce et, d'après les éléments ci-dessus, il apparaît clairement que ce Coléoptère est bien établi et s'est acclimaté au moins dans ce secteur de Marseille. Aussi nous croyons utile de signaler la présence sur notre territoire de ce remarquable Dermestidae et d'indiquer les éléments, connus de nous, de sa biologie et de sa distribution géographique. Enfin nous donnons une brève description de la femelle qui n'était jusqu'à présent pas connue. Mésogée Volume 65l 2009 Mots-clés : Coleoptera, Dermestidae, Sefrania bleusei, morphologie, biogéographie, biologie, collections muséographiques Sur la présence en France Introduction Les auteurs signalent pour la première fois la présence en France du Coléoptère Demestidae Sefrania bleusei. Des éléments sont donnés sur sa morphologie, sa distribution géographique et sa biologie. La femelle, jusqu'alors non connue, est brièvement décrite. L'espèce pourrait représenter une menace pour les collections muséographiques (animaux naturalisés, collections d'insectes, collections ethnographiques). 67 MATÉRIEL ET MÉTHODES NOTES À PROPOS DE LA DESCRIPTION ORIGINALE DE SEFRANIA BLEUSEI En 1899, Maurice PIC décrivit un nouveau genre monospécifique, à l'époque, de Coléoptère d'Algérie, Sefrania, dont l'espèce type fut nommée bleusei. Le nom générique se rapporte à la localité bien connue du sud algérien (Ain Sefra) et l'espèce fut dédiée à L. BLEUSE qui l’a découverte sur les vitres de la chambre qu'il occupait à Ain Sefra. PIC n’avait, pour matériel d'étude, que cinq exemplaires de cette espèce, apparemment des mâles. En 2004, HAVA a transféré l'espèce nord américaine Novelsis sabulorum Beal, 1984 dans le genre Sefrania. Ce genre compte donc à présent 2 espèces dont la répartition géographique est surprenante. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE D'après les éléments de la littérature, S. bleusei était jusqu'à présent seulement signalé en Algérie (loc. type) et au Maroc à Marrakech (Kocher, 1956) sous le nom d'Attagenus (Sefrania) bleusei. Dans une source Internet (site de M. Andreas Hermann) Sefrania bleusei est indiqué en Tunisie, en plus des pays précités. Par ailleurs ce spécialiste allemand nous a informé avoir déterminé plusieurs exemplaires de cette espèce provenant de Pologne. Apparemment il n'existe pas d'autres informations biogéographiques publiées sur ce Dermestidae. ELÉMENTS DE RECONNAISSANCE ET POSITION SYSTÉMATIQUE La femelle de S. bleusei n'était apparemment pas connue ou du moins pas décrite. Parmi les 13 spécimens français nous ne possédons que 3 femelles. De toute évidence les femelles sont nettement plus rares que les mâles ou bien leur biologie est différente, ce qui expliquerait qu'on les trouve moins fréquemment. Parmi les Dermestidae de notre faune, l’adulte mâle de Sefrania bleusei (voir photo) est facilement reconnaissable à sa forme allongée, ses antennes très particulières et la structure de ses tarses ; il possède en outre un ocelle frontal médian. Il mesure de 3,5 à 4 mm de longueur. Les élytres sont entièrement testacés jaunâtre, peu brillantes, revêtues de poils jaunâtres nombreux presque couchés. La tête est déprimée sur le front, assez dégagée du thorax, bien visible dorsalement et de même largeur que la partie antérieure du prothorax. Les antennes (Figure 1 ou photo 1) sont très particulières et suffisent à elles seules à caractériser le genre et l'espèce. Elles ont 11 articles et sont plus longues que la moitié du corps. Le dernier article est très grand, un peu aplati, presque aussi long que le reste de l'antenne. L'article 10 fait le tiers de la longueur de l'article 11 et il est un peu plus court que l'article 9. L'article 9 fait un peu moins du tiers de la longueur de l'article 11. Les articles 3 à 8 sont courts et compacts et moins larges que les trois suivants. Les articles 1 à 8 sont ensembles, aussi long que le 10ème. Les pattes (Figure 2) sont longues et fines. Les tarses sont au moins aussi longs que les tibias correspondants. Le premier article tarsal est court, il mesure 1/5 de la longueur du second article. L'édéage de S. bleusei est représentée en photographie sur l'excellent site Internet de A. Hermann (http://www.dermestidae.com/Sefraniableusei.html), consacré aux Dermestidae. La femelle présente la même allure générale et la coloration foncée du mâle (voir photo), elle s'en différencie cependant par plusieurs caractères morphologiques notables. Comme chez le mâle les antennes ont 11 articles (Figure 3 ou photo 3) mais les 3 derniers articles sont nettement plus courts que chez le mâle. Les articles 1 à 8 sont presque aussi longs que les 3 derniers réunis. Les pattes sont plus trapues et plus courtes. Les tarses sont nettement plus courts que les tibias correspondants (Figure 4). Mésogée Volume 65l 2009 F. FOHRER et M. MARTINEZ. Sur la présence en France d’un Dermestidae remarquable : Sefrania bleusei Pic, 1899 (Coleoptera). RÉSULTATS ET DISCUSSION 68 Sefrania bleusei appartient à la sous-famille des Megatominae et à la tribu des Attagenini. Par ses caractères morphologiques donnés ci-dessus, en particulier ceux relatifs aux antennes et aux pattes, cette espèce sera facilement reconnaissable des autres Dermestidae de notre faune. ELÉMENTS DE BIOLOGIE A. HERMANN nous a signalé que les exemplaires qu'il a vus provenant de Pologne ont été collectés sur des animaux naturalisés provenant d'un musée. Rappelons que les 5 exemplaires connus de la série typique d'Algérie ont été trouvés sur les vitres d'une chambre. Nous n'avons pas d'indication sur l'origine des spécimens connus du Maroc et de Tunisie. Concernant nos observations et captures nous avons peu d'informations biologiques mise à part une larve trouvée sur un Diptère mort. De toute évidence cette espèce a, comme beaucoup d'autres Dermestidae, un régime alimentaire nécrophage, elle est donc probablement capable de consommer des matières organiques protéiniques variées. Ainsi ce nouveau Coléoptère pour notre faune pourrait s'avérer néfaste aux collections muséographiques (animaux naturalisés, collections entomologiques, œuvres ethnographiques,…). CONCLUSION Si, à la lecture de cette publication, d'autres découvertes de S. bleusei sont faites en France nous souhaiterions en être informés. Il serait intéressant d'avoir plus d'informations sur la biologie de cette curieuse espèce et sur sa distribution géographique en France, ce qui permettra peut-être de connaître l'origine de son introduction. Avec Reesa vespulae (Martinez & Cocquempot, 1985), Thylodrias contractus (Gompel, 1998) et Anthrenocerus australis (Allemand, 1998) S. bleusei est le quatrième Dermestidae d'origine exotique trouvé en France depuis une vingtaine d'années. F. FOHRER et M. MARTINEZ Mésogée Volume 65l 2009 Allemand R., 1998. Deux coléoptères nouveaux pour la faune de France (Dermestidae, Byrrhidae). L'Entomologiste, 54 (5) : 237. Gompel N., 1998. Thylodrias contractus Motschulsky, 1839, une acquisition pour la faune de France (Coleoptera, Dermestidae). Bulletin de la Société Entomologique de France, 103 (4) : 349-353. Hava J., 2004. World keys to the genera and subgenera of Dermestidae (Coleoptera), with descriptions, nomenclature and distributional records. Sbornik Narodniho Muzea v Praze. Rada B, Prirodni Vedy, 60 (3/4) : 149-164. Kocher L., 1956. Catalogue commenté des Coléoptères du Maroc. Travaux de l'Institut Scientifique Chérifien, Série Zoologie, 11 : 1-136. Martinez M. & Cocquempot C., 1985. 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Sefrania bleusei Pic, 1899 mâle a : habitus b : photo antenne c : dessin antenne d : dessin patte médiane 70 a d Résumé Abstract Study of the system tick-lizard in the National Park of El Kala (North-East Algeria). Among the emerging diseases rickettsioses would hold a prominent place in Algeria. The news was a reminder that some diseases can easily cross the species barrier and affect humans especially those related to wildlife. The pathogenicity of ticks "Ixodes ricinus is located on several levels. Ixodes ricinus in Algeria remains among the most infected ticks in North Africa, however, which represent the highest rate of infection observed in southern Europe. Many species of ticks parasitize reptiles especially lizards. Those when they are parasitized by ticks (Ixodes) are regarded as competent reservoirs of Borrelia and in a few exceptions a reservoir incompetent. For most of Ixodes (immature) Ixodes ricinus, Ixodes scapularis, ticks feed on the blood of lizards. This has served to emphasize the importance of Ixodes in epidemiology as primary vector of Lyme disease and the important role that play the lizard in the maintenance and movement of Borreliae. In this context, we are interested to ectoparasites lizards and treir role in the epidemiological cycle of the rickettsioses. Our results are quite important because after PCR ticks we could detect the presence of Rickettsia sp. in 35% of all ticks collected. Given the number of rickettsioses transmitted by ticks (Rickettsia conori, "spotty mediterranean fever”, Coxiella burneti "Q fever ", R. africae "the african tick fever ") , our results could not be ignored for since this is the first time that rickettsiae were detected in ticks from lizards. Key-words : Rickettsioses, Algeria, ticks, Ixodes ricinus, lizards national d’El Kala (Nord-Est Algérie). Z. BOUSLAMA1, H. SOUALAH-ALILA1, A. BELABED1, K. OUALI2. 1 - ECOSTAQ Laboratoire des écosystèmes terrestres et aquatiques, Université Badji Mokhtar, Annaba 2 - Laboratoire d’Eco-biologie des milieux marins et littoraux, Annaba 23000 Algérie. E.mail : [email protected] L'écologie de la transmission parasitaire est une discipline en plein développement, notamment en raison de la prise en considération par les écologues du rôle potentiel des parasites dans les processus de régulation des hôtes, ainsi que de leur impact sur la physiologie de leurs hôtes (Price, 1980). On peut considérer qu'un parasite et son vecteur constituent par leur association un système biologique dont il s'agit d'étudier le fonctionnement et d'apprécier l'importance épidémiologique. Comme tous les systèmes biologiques les systèmes parasites-vecteurs évoluent dans le temps et dans l'espace et il convient donc de définir les modalités de leur formation et de leur fonctionnement (Cambes, 1995). On entend par vecteur tout organisme qui intervient dans la transmission d’un agent pathogène, pouvant être inter-humaine ou de l’animal à l’Homme (zoonose). Il peut s’agir soit d’insectes, soit d’acariens. Le niveau de spécialisation des parasites vis-à-vis de leurs hôtes représente en elle-même une thématique appliquée et fondamentale de recherches plus que pertinente. Cette pertinence se voit particulièrement amplifiée lorsque les parasites sont eux-même hôtes vecteurs de microparasites de leurs hôtes. En règle générale l’association vecteur-germe pathogène est très spécifique et présente un intérêt particulier en raison de l'universalité du phénomène parasitaire lato-sensu (toutes les espèces 71 vivantes sont concernées), de son importance dans les domaines agronomique (production et qualité végétales) et de santé (parasitoses, vection, etc.). Quel que soit le groupe biologique auquel le vecteur appartient, la distribution de la ou des maladies qu’il transmet dépend directement de l’écologie de ce vecteur. C’est dans la niche écologique de l’espèce vectorielle que la transmission est la plus intense, devenant plus instable vers les limites de l’aire de distribution du vecteur (Price, 1980). Les systèmes parasitaires de l'herpétofaune ont été mis en évidence dans des domaines comme l'écologie, la biologie évolutive et le comportement animal (Goater & Ward, 1992). Actuellement la maladie de Lyme a été signalée en Europe, en Asie, en Amérique du Nord, notamment au Canada (Martineau, 2003) et récemment en Afrique du Nord (Dsouli et al., 2006, Younsi et al., 2001). Un grand nombre d'espèces de tiques parasitent les reptiles et plus spécialement les lézards (Bernard & Durden, 2000). Ces derniers, lorsqu’ils sont parasités par des tiques (Ixodes), sont considérés comme réservoirs compétents de Borrelia (Matuschka et al., 1999, Keirans et al., 1996, Hayashi & Hasegawa, 1984, Lane & Loye, 1989, Kahl et al., 2002, Manweiler et al., 1991, Eisen & Eisen, 2001) et dans quelques exceptions comme réservoir incompétents (Dsouli et al. Mésogée Volume 65l 2009 Mots-clés : Rickettsioses, Algérie, tiques, Ixodes ricinus, lézards. Etude du système tiques-lézards dans le Parc Introduction Parmi les maladies émergentes la rickettsiose tiendrait une bonne place en Algérie. L'actualité nous a rappelé que certaines maladies pouvaient aisément franchir la barrière des espèces et toucher l'Homme surtout celles liées à la faune sauvage. En Algérie Ixodes ricinus reste parmi les tiques les plus infectées d'Afrique du Nord, et présentent également le plus haut taux d'infection observé dans le sud de l'Europe. Un grand nombre d'espèces de tiques parasitent les reptiles, spécialement les lézards. Ces derniers, lorsqu’ils sont parasités par des tiques (Ixodes) sont considérés comme réservoir compétent de Borrelia et dans quelques exceptions un réservoir incompétent. Dans ce contexte, nous nous sommes intéressés aux ectoparasites des lézards et au rôle de ce dernier dans le cycle épidémiologique de la rickettsiose. Nos résultats sont assez importants puisque après une PCR des tiques nous avons pu détecter la présence de Rickettsia sp. chez 35% de la totalité des tiques collectées. Etant donné le nombre des rickettsioses transmises par les tiques (Rickettsia conorii "la fièvre boutonneuse méditerranéenne", Coxiella burneti "fièvre Q", R. africae "La fièvre à tique africaine",…), nos résultats ne peuvent être ignorés d’autant plus que c'est la première fois que des rickettsies ont été détectées chez les tiques de lézards. 2006, Majláthová et al., 2006, Sean et al., 2006). Le bassin méditerranéen est catalogué comme une zone de haute biodiversité (Myers et al., 2000) en raison de ses niveaux élevés de plantes, oiseaux, reptiles, amphibiens et poissons. On dénombre 355 espèces de reptiles (238 sont des lézards) dont 170 sont endémiques (40% de Gekkonidae, 60% de Lacertidae). L'état de notre zone d'étude offre un milieu très favorable au maintien des tiques. Ceci a été observé chez les oiseaux (Bouslama, 2001). La plupart des études sur les reptiles sont consacrées à la systématique, l'écologie et/ou à la dynamique de certaines populations. Plusieurs mammifères et oiseaux sont réservoirs efficaces et sont capable d'infecter des tiques avec la Borrelia. Les oiseaux transportent les tiques sur des centaines de kilomètres le long de leurs voies migratoires, ce qui permet à notre zone d'étude d'être une zone à risque étant donné le passage important de nombreuses espèces d’oiseaux, surtout les oiseaux d'eau, considérés comme une source possible de maladie. Pour la plupart des Ixodes immatures, Ixodes ricinus, Ixodes scapularis (Lance et al., 2001), les tiques se nourrissent du sang des lézards. Ceci a permis de mettre en valeur l'importance des Ixodes dans l'épidémiologie en tant que vecteur primaire de la maladie de Lyme et le rôle important que jouerait le lézard dans le maintien et la circulation des Borreliae. Dans ce contexte, nous nous sommes intéressés au peuplement des lézards et de leurs ectoparasites dans notre région et nous nous sommes fixés les objectifs suivants : 1 - caractérisation du rythme d'activité hôte/parasite ; 2 - identification des différents types d’ectoparasites ; 3 - typologie d'infestation des parasites ; 4 - identification des germes pathogènes (Rickettsies- Borrelies) inoculés par ces parasites. DESCRIPTION DE LA ZONE D’ÉTUDE L’étude a été réalisée au niveau du Parc national d’El-Kala (PNEK) qui abrite le complexe de zones humides le plus important du pays. C’est l'un des plus grands parcs naturels d'Algérie, caractérisé par de nombreux écosystèmes et une importante richesse biologique et paysagère. Cette région a fait l’objet de nombreux travaux qui ont été synthétisés par Benyacoub (1993), dans le cadre d'un plan de gestion du PNEK. Nous nous baserons sur ces travaux pour décrire sommairement la région. Le PNEK est localisée à l’extrême Nord-Est algérien, il est limité par la mer Méditerranée au nord, les monts de Medjerda au sud, la frontière Algéro-Tunisienne à l’est et les plaines d’Annaba à l’ouest (Figure 1). Figure 1 Localisation et limites du Parc national d'El Kala (Benyacoub et al.1993). Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) MATÉRIELS ET MÉTHODES 72 PRÉSENTATION DE LA RÉGION D’ÉTUDE : SITES ÉCHANTILLONÉS Pour les besoins de l’étude, nous avons retenu quatre sites (Figure 2). Figure 2 L’échantillonnage et les captures ont été faits essentiellement à l’aide d’un filet fauchoir dans les endroits ouverts, nous avons également utilisé des pièges à colle dans les sites très denses. Les ectoparasites sont récupérés après leur détachement de l'individu et stockés dans de l'éthanol à 70%. L'identification des tiques et des acariens a été réalisée au travers d’un examen individuel sous binoculaire selon les clés de détermination trouvées dans les ouvrages suivants : (1) Tick identification key (Frank L. Ruedisueli & Brigitte Manship, developed in 1956 by Hoogstraal). (2) Précis d'entomologie médicale et vétérinaire (Rodhain & Perez, 1985). (3) Manter Laboratory of Parasitology, University of Nebraska Lincoln (on line). (4) Mites of public health importance and their control (Azad 1989). Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI MATÉRIEL BIOLOGIQUE Notre modèle biologique fait partie de la classe des Reptiles, de l'ordre des Squamates et est communément appelé "lézards". Le choix des espèces est fonction de leur distribution dans les différents habitats, de leur abondance (Rouag, 1999) et selon les indices de présence. Six espèces ont été retenues : Acanthodactylus erythrurus belli, Psammodromus algirus, Lacerta pater, Podarcis hispanica vaucheri, Tarentola mauritanica mauritanica et Hemidactylus turcicus turcicus. Mésogée Volume 65l 2009 Mellah (36°53’N et 08°20’E) : le milieu est caractérisé par un stade de dégradation de la subéraie donnant une formation ligneuse poussant sur un sol pauvre, conditionné par une forte humidité due à la présence du Lac El Mellah. Brabtia(36°841'N et 8°326'E). Ce site se touve à l’intérieur d’une zone de forêt. La strate arborée monospécifique à Quercus suber est d’une hauteur et d’un recouvrement relativement importants. La strate buissonnante est dense et assez haute. Quant à la strate herbacée, elle est marquée par une grande diversité. Lac Tonga (36°51’N et 08°30’E). C’est un étang et un marais d’eau douce d’une superficie de 2700 ha communiquant avec la mer par le chenal artificiel de la Messida. Cette zone humide est un site important d’hivernage pour les oiseaux. Djebel El Ghorra (36°635'N et 8°425'E). Situé à proximité de la frontière algéro-tunisienne, l’environnement se caractérise par un pendage important. Il est disséqué par un chevelu hydrographique dense, alimenté par une pluviométrie abondante en période hivernale. Il est propice à l’installation de la vaste forêt de Chêne zène (Q. faginea) du djebel Ghorra, caractérisée par son aspect primitif accentué par la présence de nombreux arbres morts à terre ou sur pied et recouverts de mousses et de lichens. Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) Localisation des sites d’étude (source Google Earth). 73 RECHERCHE DES AGENTS PATHOGÈNES CHEZ LA TIQUE La technique utilisée est la Polymérase Chain Reaction (PCR) afin de détecter de faibles quantités d’ADN. Cette technique permet d’obtenir rapidement une quantité importante et exploitable d’un segment précis d’ADN. Cette recherche a été effectuée à l'Institut Pasteur de Tunis, selon les étapes suivantes : 1- extraction des acides nucléiques (ADN) à l’aide d’un Kit spécial QIA amp (kit QIAGEN®, Hilden, Germany); 2- réplication de la séquence à amplifier à l’aide d’oligonucléotides amorces spécifiques : Rp CS.409p et Rp CS.1258n utilisées respectivement pour les genre Rickettsia (226 à 266pb) et Borrelia ; 3 - réaction de polymérisation du brin complémentaire. A la fin de chaque cycle, les produits sont sous forme d'ADN double brin. Ces réactions ont été effectuées à l’aide d’un thermocycleur (Perkin-Elmer 2400). Une électrophorèse permet la séparation des fragments d’ADN en fonction de leur taille. ANALYSE DES DONNÉES Les peuplements de tiques peuvent être caractérisés par l’analyse des paramètres structuraux suivants : - richesse spécifique S (nombre d’espèces contactées au moins une fois au terme de N relevés), - abondance N ( nombre d’individus collectés ou observés pour chaque espèce durant la saison d’échantillonnage dans chaque milieu), - prévalence P, rapport en pourcentage du nombre d'hôtes infestés (N) sur le nombre d'hôtes examinés H. P = N/ H x 100) - intensité I, rapport du nombre total d'individus d'une espèce parasite (n) sur le nombre des spécimens infestés (Np). I = n/ Np). RÉSULTATS Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) ANALYSES STATISTIQUES La présentation graphique des données s’est appuyée sur l’élaboration d’histogrammes sur le logiciel Excel. Des corrélations entre les tailles des lézards et le nombre de parasites ont fait l’objet de traitements statistiques en utilisant le logiciel Statistica 7.0. 74 CARACTÉRISATION DES PEUPLEMENTS Durant notre étude échelonnée entre août 2007 et juillet 2008 nous avons pu capturer 943 lézards (600 lézards à l’aide du filet fauchoir et 343 à l’aide des pièges à colle). Ces derniers appartiennent à 2 familles, Lacertidae et Gekkonidae, et 6 espèces : 177 Acanthodactylus erythrurus belli, 323 Psammodromus algirus, 155 Lacerta pater, 49 Podarcis hispanica vaucheri, 131 Tarentola mauritanica mauritanica et 108 Hemidactylus turcicus turcicus VARIATIONS MENSUELLES DE L’ABONDANCE DANS LA RÉGION ÉTUDIÉE. D’après la figure 3, nous remarquons une variation des effectifs de lézards au cours de l’année. En effet, elle est nulle durant les mois de décembre, janvier et février et atteint son maximum au cours du mois de mai . Elle est également importante durant les mois d'avril, juin et juillet. Figure 3 Variation mensuelle de l'abondance du peuplement des lézards de la région d'étude. Tableau 1 Acariens de Tiques poussière Nombre examiné Nombre infesté N P(%) I N P(%) I Psammodromus algirus 323 115 458 35.6 3.98 35 5.57 1.94 Podarcis hispanica vaucheri 49 20 48 41.66 2.4 / / / Lacerta pater 191 19 26 12.25 1.36 / / / Tarentola mauritanica mauritanica 131 48 / / / 44 40.33 0.91 Hemidactylus turcicus turcicus 108 33 / / / 45 30.55 1.36 Acanthodactylus erythrurus belli 177 / / / / / / Prévalence et intensité des espèces parasites / Système parasite/ hôte (spécificité parasitaire) On note qu’Acanthodactylus erythrurus belli se retrouve seulement dans le maquis dunaire (Boumalek) (figure 4) suivi par une absence totale de parasites dans ce milieu. Figure 4 Variation d’infestation parasitaire spécifique (a) et totale (b) des Acanthodactylus erythrurus belli en fonction des sites d’étude Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Espèces de lézards Mésogée Volume 65l 2009 PRÉVALENCE ET INTENSITÉ DES ESPÈCES PARASITES Des données de la prévalence et de l'infestation parasitaires par les acariens de poussière et les tiques sont récapitulées dans le tableau 1. L’examen de ce tableau montre que sur les six espèces étudiées seule Psammodromus algirus enregistre une double infestation parasitaire, acariens de poussière et tiques à la fois, avec une prévalence de 35,6 % pour les tiques et 5,57% pour les acariens de poussière. La plus grande intensités a été enregistré chez Psammodromus algirus avec une valeur de 3,98 pour les tiques et 1,94 pour les acariens de poussière. Podarcis hispanica vaucheri et Lacerta pater ne sont parasités que par les tiques, avec des prévalences respectives de 41,66 et 12,25 %. Tarentola mauritanica mauritanica et Hemidactylus turcicus turcicus ne sont infestés que par des acariens de poussière, avec une prévalence de 40,33% chez T. mauritanica mauritanica et 30,55% pour H. turcicus turcicus. Les parasites sont absents chez Acanthodactylus erythrurus belli Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) IDENTIFICATION DES PARASITES La collectes des parasites des lézards capturés nous a permis d'identifier les ectoparasites présents. Ce sont des Acariens appartenant à deux grands groupes de parasites hématophages : des tiques dures et des acariens de poussières. Les tiques dures (Ixodidae) sont représentées par Ixodes ricinus. I. ricinus joue un rôle de premier plan dans les maladies transmises par les tiques : c’est une espèce ubiquiste présentant le plus d'hétérogénéité. Elle est vectrice d'Anaplasma phagocytophilum, de génotypes pathogènes de Borrelia, de Rickettsia, de Babesia, des virus TBEV-CEE, Eyach. D’autre part nous avons identifié deux espèces d’acariens de poussières, Pyemotes ventricosus (Pyroglyphidae) et Ophionyssus sp (Macronyssidae). Pyemotes ventricosus se retrouve habituellement dans les végétations sèches et dans la poussière des maisons. Il provoque une dermite prurigineuse chez l'homme. Ophionyssus sp. sont des parasites des rongeurs, oiseaux et reptiles et l’Homme ne serait qu’un hôte accidentel. Ils peuvent transmettre l'agent du thyphus murin (Rickettisia typhi). 75 Psammodromus algirus est une espèce répartie sur 4 sites différents avec une très faible présence dans le Lac Tonga (1 individu). L'infestation parasitaire par les tiques et les acariens de poussière n’est observée que dans le milieu forestier de Djebel El Ghorra (80% d’individus infestés) avec une plus grande prévalence pour les tiques (85,15% de la totalité des tiques). La subéraie de Brabtia enregistre une très faible infestation (4% d’individus infestés) par les tiques (1,1% de la totalité des tiques) et 28,22% de celle des acariens de poussière (Figures 5a et 5b). Figure 5 Variation d’infestation parasitaire spécifique (a) et totale (b) de Psammodromus algirus en fonction des sites d’étude Podarcis hispanica vaucheri est une espèce localisée principalement dans le Djebel El Ghorra. L'infestation parasitaire est importante (40% d’individus infestés) et est exclusivement représentée par des tiques (9,02% de la totalité des tiques) (Figures 6a et 6b). Figure 6 Les figures 7a et 7b montrent que Lacerta pater se répartit sur les quatres sites mais la plus grande abondance a été enregistrée dans le Lac Tonga avec une absence totale de parasites. Par contre dans la subéraie de Brabtia, l'abondance est aussi importante (81 individus) avec une infestation parasitaire par les tiques (24% d’individus infestés avec 4,9% de la totalité des tiques). Figure 7 Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) Variation d’infestation parasitaire spécifique (a) et totale (b) de Podarcis hispanica vaucheri en fonction des sites d’étude 76 Variation d’infestation parasitaire spécifique (a) et totale (b) de Lacerta pater en fonction des sites d’étude Pour Tarentola mauritanica mauritanica l'abondance la plus importante est enregistrée dans le maquis de Boumalek (62 individus). Il est important de noter l’absence totale de tiques dans ce site. Par contre les individus trouvés à l'intérieur des habitats de la zone de Boumalek sont parasités par des acariens de poussière (75% d’individus infestés) avec Figure 8 Variation d’infestation parasitaire spécifique (a) et totale (b) de Tarentola mauritanica mauritanica en fonction des sites d’étude une très forte prévalence (35,2% de la totalité des acariens) (Figures 8a et 8b). La plus grande abondance de Hemidactylus turcicus turcicus est notée dans la subéraie de Brabtia (64 individus). Seuls les individus prélevés dans les habitats de Boumalek sont infestés par des acarien de poussière (78% d’ individus infestés) (36% de la totalité des tiques) (Figures 9a et 9b). Figure 9 Variation d’infestation parasitaire spécifique (a) et totale (b) de Hemidactylus m. mauritanica en fonction des sites d’étude Période d’infestation La variation mensuelle des effectifs des parasites (tiques "larves et nymphes" et acariens de poussière) révèle que ces derniers ont une distribution régulière au cours de la saison. Le pic d'abondance des lézards, entre les mois de mars et juin correspond à la plus grande infestation parasitaire chez les lézards (Figure 10). Figure 10 Les maladies émergentes sont des phénomènes qui s'accélèrent en ce début du siècle. La majorité sont causées par les animaux sauvages réservoirs d'agents pathogènes (Poiani, 1992). Il peut s'agir d'oiseaux (Matuschka et al., 1991) de mammifères (Matuschka et al., 1991, Eisen et al., 2004) ou de reptiles (Keirans et al., 1996, Olsen et al., 1993, Kahl et al., 2002). Ces agents pathogènes sont inoculés par des ectoparasites hématophages et peuvent être soit des insectes soit des acariens. Les reptiles sont porteurs de nombreux agents pathogènes susceptibles d’infecter ou d’infester l’être humain et sont les vecteurs potentiels de diverses zoonoses (TälleklintEisen & Eisen, 1999). Cependant, ce risque doit être relativisé car la contraction d'une zoonose est conditionnée par différents facteurs : la spécificité des parasites, le milieu préférentiel et l'agent pathogène. A la lumière de ces événement nous devons orienter nos réflexions dans plusieurs directions, celle du vecteur et celle de l'hôte principalement le lézard qui joue un rôle important dans le maintien et la circulation de la maladie de Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI DISCUSSION Mésogée Volume 65l 2009 Agents pathogènes L’analyse par PCR spécifique du portage de bactéries pathogènes chez 35% des tiques a mis en évidence la présence de Rickettsia sp. mais, par faute de séquençeurs, l’espèce n’a pas été identifiée. Les tiques infectées sont des parasites de Psammodromus algirus de la zone d'El-Ghorra récoltées entre les mois d'avril et mai. Par ailleurs, la détection des borrelies n’a pas pu être réalisée et est actuellement en cours. Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) Variation mensuelle des effectifs des espèces de lézards et les différents groupes des parasites. 77 Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) 78 Lyme (Martineau, 2003). Au niveau régional, les lézards ont montré un pic d'abondance au cours des mois de mai et avril et une faible abondance dans les mois de novembre et septembre avec une période d'hibernation de 3 mois (décembre, janvier, février). On note ces mêmes variations saisonnières aussi bien au niveau régional qu’en Tunisie (Dsouli et al., 2006). La totalité des ectoparasites de nos modèles hôtes sont des Acariens appartenant à deux grands groupes de parasites hématophages : tiques dures, Ixodes ricinus de la famille des Ixodidae, et des acariens de poussière de la famille des Pyroglyphidae (Pyemotes ventricosus) et la famille des Macronyssidae (Ophionyssus sp.) Toutes les tiques collectées (532) appartiennent à l’espèce Ixodes ricinus, représentées par les stades immatures, larves et nymphes. Ceci confirmerait le fait que les lézards soient parasités exclusivement par les tiques sub-adultes. Les stades immatures de I. scapularis sont des ectoparasites des lézards en Amériques du Nord (Olsen et al.,1993, Keirans et al.,1996, Lane & Loye,1989, Kahl et al., 2002, Eisen et al., 2004) et les Ixodes ricinus en Europe, Asie et en Afrique (Matuschka et al.,1999, Younsi et al., 2001, Hayashi & Hasegawa, 1984, Dsouli et al., 2006). On pourrait imaginer qu'un parasite soit capable d'exploiter n'importe quelle espèce hôte si les conditions favorables pour son cycle de développement sont présentes. Le parasite peut aller loin dans la spécificité des organismes au sein d'une même population qui abrite les différents milieux. Acanthodactylus erythrurus belli montre une absence totale des parasites. Ceci pourrait être liée à la morphologie des écailles de ce lézard ainsi qu’à la nature du milieu dunaire sans sous-bois. De même, Psammodromus algirus et Lacerta pater, capturés au niveau de ce milieu, ne présentent aucune infestation parasitaire. Les Gekkonidae ne sont infectés que par les acariens de poussière (Pyemotes ventricosus, Ophionyssus sp.). Ceci nous inciterait à penser que les populations de cette famille de lézards des différent habitats soient parasités par ce type de parasite (Myers, 2000, McCoy, 2006). La morphologie des écailles chez les Gekkonidae, "écaille souple", pourrait favoriser la fixation des acariens de poussière, contrairement aux Lacertidae qui ne présentent pas ce critère principal pour les acariens de poussière (Cunha-Barros et al., 2003). Tous les Lacertidae sont parasités exclusivement par les tiques Ixodes ricinus excepté Psammodromus algirus chez lequel on a localisé des acariens de poussière en plus des Ixodes. Psammodromus algirus a enregistré une prévalence d'infestation parasitaire de 35,60% (115/323), Lacerta pater 12,25% (19/155) et Podarcis hispanica vaucheri 40,81% (20/49). Cette différence du taux d'infestation entre les espèces pourrait être due à la structure des écailles. En effet, Psammodromus algirus a des écailles larges, imbriquées et pointues permettant facilement l'attachement des tiques alors que Podarcis hispanica vaucheri a des écailles lisses (Dsouli et al., 2006). Cette même différence d'infestation a été enregistrée en Tunisie (Dsouli et al., 2006), Psammodromus algirus 80% (117/147) et 55,35% (26/47) pour Podarcis hispanica vaucheri. Lacerta pater de Djebel El Ghorra en montré une absence totale des parasites alors qu’en Tunisie il est parasité à 100% (Dsouli et al., 2006). De même l’espèce européenne Lacerta agilis, qui présente la même morphologie que Lacerta pater, est touchée par l'infestation parasitaire des tiques (Hesse, 1985, Majláthová et al., 2006). L’habitat et les conditions doivent être favorables pour le maintien du cycle biologique des parasites avec une concentration et une variété suffisante d’hôtes pour pouvoir les nourrir à leurs différents stades. Les plus grandes valeurs d'infestation ont été notées entre les mois de mars et juillet où il y a un taux important de tiques libres (Eisen et al., 2004, Dsouli et al., 2006). Ceci implique la longue durée du cycle d'activité d’Ixodes ricinus. Ces mêmes variations saisonnières ont été notées par Bouattour (2001) et Younsi et al. (2003) en Tunisie où l'activité des larves et des nymphes se situe entre mars et mai. Le tiques ont été observée chez les lézards par Dsouli et al. (2006) entre le mois Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Etude du système tiques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) mars et mai. En règle générale, Ixodes ricinus est une tique des régions tempérés fraîches avec comme facteur limitant la température (<35°), l'altitude (<1000m) et une humidité importante (Hesse, 1985). En Afrique du Nord Ixodes ricinus a été récolté dans les régions montagneuses. En effet Dsouli et al. (2006) ont trouvé Ixodes ricinus dans les hautes altitudes en Tunisie. En Algérie, elle a été rapportée dans les régions de Saïda et Tlemcen ; à 1300 m dans un village à Sidi Aich, à Milia (1200 m) et à Bougous à 850 m d'altitude. Nos résultats montrent que la plus grande infestation parasitaire des lézards par les tiques (Ixodes ricinus) a été signalée à Djebel El Ghorra (1200 m d'altitude) avec une valeur de 501 tiques c'est-à-dire 94,17% de la totalité des tiques collectés parallèlement alors que le plus faible a été enregistré à basse altitude dans la zone de Brabtia : 31 tiques (5,80%). Ceci impliquerait que les tiques ne soient pas limitées par l'altitude mais peuvent avoir un autre facteur biotique, les oiseaux, comme le rouge-gorge , qui peuvent transporter les tiques le long de leur parcours (Martineau, 2003). Parmi les quatres sites étudies Djebel El Ghorra est celui dans lequel on a enregistré la plus grands prévalence d'infestation par les tiques contrairement aux autres sites qui présentent une faible abondance des tiques (zone de Brabtia) ou une absence totale dans les zones de Boumalek et Lac Tonga. La composition floristique entre ces milieux est très différente soit par la richesse soit par le recouvrement végétal. Le site de Djebel El Ghorra est caractérisé par la présence de conditions favorables pour la pullulation des tiques. Les lézards capturés dans les zones à litière sont beaucoup plus parasités par les tiques que ceux des zones sans litière (Eisen et al., 2000, 2004). De même les lézards logeant sous les pierres, les arbres et/ou les sous-bois se retrouvent ainsi dans des zones humides et sont beaucoup plus infestés que les lézards des zones non-humides (Tälleklint-Eisen & Eisen, 1999). L'actualité nous a rappelé que certaines maladies pouvaient aisément franchir la barrière des espèces et toucher l'Homme, surtout celles liées à la faune sauvage. De nombreux agents infectieux, responsables d'importantes maladies, sont transmis par l'intermédiaire d'un arthropode vecteur. En effet, les tiques sont vectrices de très nombreux agents pathogènes qu’elles transmettent aux animaux. L’Homme n’est qu’un hôte accidentel mais elles occasionnent cependant une importante morbi-mortalité humaine et animale partout dans le monde. En Algérie Ixodes ricinus reste parmi les tiques les plus infectés d'Afrique du Nord et représentent le plus haut taux d'infection observé dans le Sud de l'Europe (Bitam et al., 1993). Nos résultats sont assez importants puisque, après une PCR des tiques, nous avons pu détecter la présence de Rickettsia sp. chez 35% de la totalité des tiques collectées, la détection d’autres agents pathogènes n’a pu se faire et ce par faute de "primers". D’autre part l’analyse en cours de biopsie de peau de lézards nous permettra de confirmer le rôle de notre modèle biologique. En fait, les rickettsies transmises par les tiques sont responsables de zoonoses. En Algérie les rickettsies n’ont été détéctées qu’au niveau des tiques des bovins et des chiens (Bitam et al., 2008), mais jamais dans les tiques de lézards. Majláthová (2006) a détécté chez les lézards la présence de Borrelia burgdorferi, l’agent responsable de la maladie de Lyme ou borréliose. Etant donné le nombre des rickettsies transmises par les tiques et leurs effets pathogènes, nos résultats ne peuvent donc être ignorés puisque c’est la première fois que des rickettsies sont détectées chez les tiques de lézards. Ceci nous amène à supposer que notre modèle biologique permettrait la circulation d’agents pathogènes transmis à la faune sauvage, touchant ainsi à la biodiversité, à la faune domestique (santé animale) et à l’Homme (santé publique). 79 CONCLUSION Notre étude confirme que les lézards sont les hôtes de divers parasites. C’est ainsi que nous avons pu identifier des tiques et des acariens de poussière vecteurs d’agents pathogènes tels que : Borrelia, Rickettsia, Babesia, Sarcoptes.... Un grand nombre de maladies transmises par des animaux sauvages ou domestiques (zoonoses) et/ou par des vecteurs, généralement des arthropodes (maladies vectorielles), pourraient être à l'origine de pathologies émergentes et/ou re-émergentes telles que la borréliose, le West-Nile, la rickettsiose, la leishmaniose, la peste…. Ces maladies sont liées à l'état des peuplements cible, qu’ils soient hôtes ou vecteurs. Il ressort de ce travail que le peuplement de lézards peut jouer un rôle important dans le maintien et la circulation des rickettsioses étant donné le nombre important de lézards infestés par des tiques infectées. Il faudrait approfondir nos études pour inclure d'autres habitats, en particulier la zéenaie d'altitude qui abrite une richesse ainsi qu’une abondance importante de lézards infestés par un grand nombre de tiques Ixodes ricinus. Il serait également intéressant d’étudier le parasite lui-même car, d'une manière générale, pour être efficace le vecteur doit non seulement être compétent mais avoir en outre, dans l'environnement considéré, une bio-écologie favorable à la transmission. Bien entendu, en parallèle à l'étude du vecteur, il convient également de bien connaître la bio-écologie des vertébrés impliqués dans les cycles de transmission, qu'il s'agisse des vertébrés réservoirs naturels, des vertébrés amplificateurs, des disséminateurs, des détecteurs, des populations animales réceptives. Mésogée Volume 65l 2009 Z. BOUSLAMA, H. SOUALAH-ALILA, A. BELABED et K. OUALI Etude du système Ttques-lézards dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie) RÉFÉRENCES 80 Benyacoub S., 1993. Ecologie de l’Avifaune forestière nicheuse de la région d’El-Kala (Nord-est algérien). Thèse doctorat. Univ. Bourgogne. 271p. Bernard S. M. & Durden L. A., 2000. A veterinary guide to the parasites of reptiles. Vol.2. Arthropods (excluding mites). Krieger publishing Co.,Malabar, Florida. Bitam I., Parola P., Matsumoto K., Rolain J. M., Baziz B., Boubidi S. C., Harrat Z., Belkaid M., Raoult D., 1993. 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Key words : Genet, diet, coprologic method, prey-item, seasonal variation (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nord-est algérien). M. BOUKHEROUFA*, F. SAKRAOUI*, S. BENYACOUB**, P. GIRAUDOUX***, F. RAOUL*** * Département de biologie, Centre universitaire d’El Tarf, Algérie. ** Laboratoire des écosystèmes terrestres et aquatiques (ECOSTAQ), Université Badji Mokhtar, Annaba, Algérie. *** Laboratoire d’écologie évolutive et fonctionnelle, Université de Franche-Comté, Besançon, France. L’étude des relations prédateurs-proies reste peu développée pour la plupart des modèles biologiques en raison de difficultés d’ordre technique, pratique, voire conceptuel. Les modèles Carnivores en particulier sont largement inexplorés alors que des connaissances sur les comportements de prédation sont nécessaires pour faire évoluer les méthodes de gestion qui les concernent (Winemiller & Polis, 1996). Plusieurs méthodes de quantification du régime alimentaire ont été proposées afin d’étudier la prédation chez les carnivores. Ces méthodes ont été regroupées par Fedriani & Travaini (2000) en quatre types. Il s’agit de méthodes basées sur le calcul de la fréquence d’occurrence des items proies (Rose & Polis, 1998), consistant à comptabiliser le nombre de proies (Jaksic et al., 1996 ), et/ou basées sur le calcul du volume ou de l’évaluation du poids sec des proies contenues dans l'échantillon (Martin et al., 1995), consistant à évaluer la biomasse fraîche ingérée (Marti et al., 1993). Ces méthodes de quantification du régime alimentaire des carnivores s’appuient principalement sur l’utilisation de la technique coprométrique (Real, 1996 ; Damange, 1999). La technique de collecte et d’analyse des fèces a pour avantage de ne pas modifier la structure du peuplement de Carnivores, contrairement à celle de la collecte des tubes digestifs par exemple, qui impose des prélèvements dommageables pour la faune. Parmi ces prédateurs, la genette commune (Genetta 83 genetta) est l’une des espèces dont le régime alimentaire est le plus étudié, car les fèces sont facilement reconnaissables et ne peuvent être confondues avec celles des autres carnivores sauvages (Roeder, 1980). La genette commune est une espèce que l’on retrouve sur tout le pourtour méditerranéen (Algérie, Tunisie, Maroc, Espagne, France, Italie). En Europe, il est probable que cette espèce fut introduite en provenance du Maghreb (Gaubert et al., 2009). Les données bibliographiques concernant le régime alimentaire de la genette méditerranéenne ont connu un essor important ces dernières années, car elles permettent des comparaisons intéressantes entre milieux tempérés et méditerranéens (Virgos et al., 1999 ; Rosalino & SantosReis, 2002; Diaz et al., 2005 ; Amroun et al., 2006; Barrientos, 2006). En Algérie, la genette commune reste très peu étudiée et les rares travaux existants ont été essentiellement effectués au niveau du Parc national du Djurdjura en Kabylie (Desmet & Mésogée Volume 65l 2009 Mots-clés : Genette, régime alimentaire, méthode coprologique, items proies, variation saisonnière. Ecologie alimentaire de la genette commune Introduction L’étude du régime alimentaire de la genette commune (Genetta genetta L. 1758) a été réalisée au niveau d’un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (NordEst algérien). L’utilisation de la méthode coprologique nous a permis d’identifier au moins 723 proies appartenant à 5 catégories alimentaires (mammifères, oiseaux, arthropodes, reptiles /amphibiens et végétaux). L’analyse statistique des résultats nous a permis de mettre en évidence une prépondérance à parts égales des arthropodes et des mammifères, suivie par les végétaux, les oiseaux, et la catégorie des reptiles/amphibiens. L’analyse saisonnière des différents paramètres de structure du peuplement d’items - proies confèrent à la genette commune le statut de « généraliste » à large spectre alimentaire. Hamdine, 1988 ; Hamdine, 1991 ; Hamdine et al., 1993 ; Mostefai et al., 2003 ; Amroun et al., 2006) et une seule étude a été réalisée au niveau du Parc national d’El Kala (Delibes et al., 1989). Pourtant, ce dernier figure parmi les zones protégées les plus prestigieuses de Méditerranée occidentale. Il est servi par un ensemble de conditions naturelles éminemment favorables à une richesse biologique peu commune (Benyacoub et al., 1998 ; Benyacoub & Chabi, 2000). C’est dans ce cadre géographique que nous avons procédé à l’étude d’un aspect de l’écologie de la genette, à travers l’analyse de l’utilisation des ressources trophiques et ses variations saisonnières. MATÉRIEL ET MÉTHODES L’étude a été effectuée dans le Parc national d’El Kala (36°50 latitude nord et 8°27 longitude est) au sein de la Réserve biologique de Brabtia ainsi que du massif forestier du même nom (figure 1). Figure 1 Mésogée Volume 65l 2009 M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) Localisation de la zone d’étude au niveau du Parc National d’El Kala 84 Ce site constitue un habitat mixte qui se présente sous forme d’une vallée caractérisée par la présence d’un milieu forestier dominé par le chêne liège (Quercus suber). L’étude du régime alimentaire de la genette a été effectuée par l’analyse de 120 fèces prélevées sur le terrain entre juillet 2003 et juin 2004. Les fèces sont le plus souvent déposées par le prédateur sur des sites de défécation privilégiés, en hauteur, sur des escarpements rocheux (Virgos et al., 1996). Les fèces collectées sont ensuite séchées (80°C à l’étuve pendant 24 heures), pesées puis dilacérées en milieu aqueux. 5 ml du milieu de macération sont récupérés après agitation pour détecter la présence éventuelle de Lombricidés (Bradbury, 1977 in Lodé et al., 1991). Les crottes dilacérées sont ensuite lavées à l’eau chaude et au détergent au dessus d’un tamis à maille de 0,25 mm de diamètre, puis séchées pendant 24 à 36 heures à une température de 50°C. Les restes alimentaires sont répartis en 5 catégories d’items proies choisies (arthropodes, mammifères, végétaux, oiseaux, reptiles/amphibiens). L’identification des mammifères repose sur l’examen des sections transversales des poils récupérés (Debrot et al., 1982) et de la biométrie crânienne (Saint Girons & Petters, 1965). Les reptiles et les amphibiens sont identifiés sur la base des fragments osseux et des écailles. Nous avons étudié exclusivement la composition du régime alimentaire de la genette en fonction de la fréquence d’occurrence des différentes apparitions d’une catégorie alimentaire, calculée par rapport au nombre total d’apparitions. L’évaluation de la variation saisonnière du régime alimentaire - a été faite sur la base du calcul de l’indice de Shannon et Weavers : H’ = - Pi log2 Pi, où Pi repré sente la fréquence d’occurrence de chaque item alimentaire ou catégorie alimentaire), de l’indice d’équitabilité E = H’/Hmax x 100, où Hmax représente la diversité maximale (Hmax = log2 S où S représente le nombre total des items alimentaires ingérés) et du coefficient de Pearson (χ2). RÉSULTATS 1. CARACTÉRISATION ET STRUCTURE DU RÉGIME ALIMENTAIRE DE LA GENETTE L’analyse des 120 fèces prélevées sur le terrain nous a permis d’identifier au moins 723 items proies. Ces dernières ont été regroupées en 5 catégories alimentaires, il s’agit des arthropodes, des mammifères, des oiseaux, des végétaux, et des reptiles/amphibiens. L’analyse du milieu de macération des féces a révélé l’absence des Lombricidés dans le régime alimentaire de la genette. La catégorie des arthropodes est la plus fréquente dans les restes alimentaires retrouvés dans les crottes. Nous avons pu identifier les ordres suivants : Coléoptères, Dictyoptères, Orthoptères, Phasmes, Araignées et Scorpions (Tableau 1). Noms vernaculaires Scarabaeus sacer Scarabée sacré, bousier Oryctes nasicornis Rhinocéros Copris hispanus Copris hispanique Trichius rosaceus Trichie commune Phyllognathus excavatus X Cerambycidae X X Tenebrionidae X X COLÉOPTÈRES Curculionidae X Scarabée DICTYIPTÈRES Mantidae X Scarabée ORTHOPTÈRES X X X PHASMES X X X ARAIGNÉES X X X SCORPIONS X X X Parmi les Coléoptères, nous avons pu identifier 5 espèce de la famille des Scarabaeidae. Sinon nous nous sommes limités à la famille ou à l’ordre pour les autres taxons d’arthropodes identifiés.. Pour les mammifères, l’observation des différentes coupes transversales de poils (Figure 2), combinée à l’identification à partir des ossements (Figure 3), a révélé la présence de cinq genres. Il s’agit de: - Rattus, dont les coupes de poils sont facilement reconnaissables par une structure transversale monoconcave ; - Mus, avec une structure transversale monoconcave mais à bords pointus ; - Apodemus, dont la structure transversale est triconcave ; - Crocidura, dont la structure transversale est carrée ; - genre non identifié, caractérisé par une structure transversale du poil ronde et légèrement monoconcave. L’identification et le dénombrement des ossement a été effectué à partir des clés d’identification présenté in Hamdine (1991) La présence de plumes et de becs au niveau des fèces nous a permis de conclure à la présence des oiseaux dans le régime alimentaire de la genette. Cependant, l’absence de clés d’identification ne permet pas d’affiner leur caractérisation taxonomique. Dès la collecte des échantillons nous avons clairement constaté la présence de végétaux au niveau des crottes de genettes. Le tri nous a permis d’isoler des graines et des débris de feuilles. L’observation de pattes de lézards, de débris de mâchoires et d’écailles nous a permis de conclure à la présence de ce type de proie. Cependant, ces éléments ne portent pas de caractères taxonomiques précis permettant de les identifier. Tableau1 Caractérisation taxonomique des Arthropodes (X : indéterminés). M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. Scarabaeidae Espèces Mésogée Volume 65l 2009 Familles Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) Ordres 85 Figure 2 Coupes transversales des poils retrouvés dans les fèces. (x 480) Figure 3 Mésogée Volume 65l 2009 M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) Différents types d’ossements trouvés dans les fèces de la Genette 86 Globalement, l’identification taxonomique du régime alimentaire de la genette est résumée dans le tableau 2 Tableau 2 Caractérisation du régime alimentaire de la genette Catégories alimentaires Arthropodes (Ordres) Mammifères (Genres) Oiseaux (oi) Végétaux (vég) Reptiles et Amphibiens (r/a) Coléoptères (co) Apodemus (ap) Non Non Non identifiés identifiés identifiés Orthoptères (or) Crocidura (cr) Dictyoptères (di) Rattus (ra) Phasmes (ph) Non identifiés (ni) Araignées (ar) Mus (mu) Scorpions (sc) Le calcul des fréquences d’occurrences des six catégories alimentaires nous a permis de constater que le régime alimentaire de la genette est dominé par les arthropodes et les mammifères (29 et 27%), suivi par les végétaux (21%), les oiseaux, et la catégorie des reptiles/amphibiens qui représente un pourcentage relativement faible (Tableau 3). Catégories alimentaires Arthropodes Mammifères Oiseaux Végétaux Reptiles et Amphibiens Fréquence d’occurrence (%) 29 27 13 21 10 Tableau 3 Composition du régime alimentaire de la genette en fonction de la fréquence d’occcurrence des catégories alimentaires. Les résultats obtenus révèlent également qu’il n’existe aucune différence significative entre les fréquences d’occurrence des arthropodes et des mammifères (t obs = 0.82 ; p = 0,41 ; NS ). 2. VARIATION SAISONNIÈRE DU RÉGIME ALIMENTAIRE DE LA GENETTE L’analyse de la variation saisonnière du régime alimentaire en fonction de la fréquence d’occurrence des items proies révèle que durant l’été ce sont les coléoptères qui sont les plus consommés suivis par Apodemus et par les végétaux. En période automnale, le genre Apodemus est la proie la plus fréquemment consommée, suivi par les coléoptères, les végétaux et les oiseaux. En hiver, les proies que l’on retrouve dans le régime alimentaire de la genette sont respectivement les coléoptères, les mammifères du genre Apodemus et Rattus ainsi que les végétaux. Quant au printemps, on retrouve abondamment les coléoptères (Fi = 83%), suivis par les végétaux (Fi = 77%), les oiseaux et Apodemus. Ces deux dernières catégories de proie sont respectivement consommées avec une fréquence d’occurrence de 60%. (Tableau 4). di ph ar sc ap cr ra ni mu oi vég r/a Eté 93 43 7 3 20 17 83 33 40 13 10 37 73 23 Automne 77 20 0 7 17 0 80 20 50 13 3 53 67 23 Hiver 90 27 0 13 20 20 57 40 53 0 3 23 50 40 Printemps 83 53 27 0 13 40 60 3 33 23 0 60 77 47 Le calcul des valeurs de l’indice de Shannon obtenues pour chaque saison a montré que le régime alimentaire de la genette reste très diversifié au cours des saisons avec des valeurs relativement élevées de H’ qui varient entre 2,86 et 3,35. Deux pics de diversité alimentaire apparaissent, l’un au printemps et l’autre en été avec respectivement 3,35 et 3,30. Le calcul de l’équirépartition (E) montre également l’existence de ces deux pics aux mêmes saisons (0,88 pour le printemps et 0,87 pour l’été) ce qui indique un régime alimentaire riche et équilibré, caractérisé par la présence de la majorité des items. Les résultats obtenus révèlent également que la diversité est plus faible en automne et en hiver. Durant la période hivernale, le régime alimentaire semble hétérogène avec une faible diversité qui s’illustre particulièrement au mois de février (H’ = 1,03 ; E = 0,27) Celle-ci est essentiellement due à un déséquilibre dans les fréquences d’occurence des items proies. En automne, le régime alimentaire offre une diversité et une équitabilité très variables de septembre à novembre (H’ varie de 1,22 à 1,59 ; E varie entre 0,32 et 0,42). On constate également que le régime alimentaire durant cette période est déséquilibré, ce qui est principalement dû à la présence de proies dominantes telles que les coléoptères et les mammifères du genre Apodemus et l’absence de certains items tels que les diptères et les scorpions (Tableau. 5). Saisons Indice de Shannon Equitabilité Eté 3,30 0,87 Automne 2,86 0,75 Hiver 2,99 0,79 Printemps 3,35 0,88 La valeur globale de l’indice de Pearson, calculée sur la base des fréquence d’occurrence des items alimentaires, présente des différences intersaisonnières significatives (χ2 = 3,6214, p = 0,02262, ddl=27). L’examen des valeurs partielles de χ2, calculée pour chaque item alimentaire, révèle que ce sont essentiellement les fluctuations des fréquences d’occurrence des Crocidures qui alimentent la variation saisonnière du régime alimentaire de la genette (Figure 4). Tableau 5 Variations saisonnières des indices de diversité de Shannon (H’) et de l’équitabilité (E) M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. or Mésogée Volume 65l 2009 co Variations saisonnières des fréquences d’occurrence. co : Coléoptères or : Orthoptères di : Dictyoptères ph : phasmes, ar : araignées, sc : scorpions ap : Apodemus cr : Crocidura ra : Rattus ni : non identifiés mu : Mus oi :m Oiseaux vég : Végétaux r/a : Reptiles et Amphibiens Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) Tableau 4 Fréquences % 87 Figure 4 DISCUSSION Mésogée Volume 65l 2009 M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) Les valeurs partielles de χ2 des items proies calculées sur la base de leurs fréquences d’occurrences. co : coléoptères or : orthoptères inv : invertébrés (regroupent les arthropodes consommés rarement par la genette ; dictyoptères (di), phasmes (ph), araignées (ar), et scorpions (sc), ap : Apodemus cr : Crocidura ra : Rattus ver : vertébrés (regroupent les vertébrés consommés rarement par la genette : non identifiés (ni) et Mus (mu)) oi : oiseaux vég : végétaux r/a : reptiles et amphibiens. 88 L’examen du spectre alimentaire de la genette montre une grande diversité dans le choix et la consommation des proies disponibles dans le milieu. En effet, nos résultats révèlent que les arthropodes et les mammifères restent, à proportions égales, les proies les plus privilégiées, suivies par les végétaux. Les oiseaux sont présents dans des proportions relativement moindres ; quant aux reptiles et amphibiens, ils sont peu consommés. La comparaison des fréquences d’occurrence entre Arthropodes et mammifères révèle une légère préférence pour les arthropodes, même si elle n’est pas statistiquement significative. Des travaux réalisés dans les milieux méditerranéens confirment que le régime alimentaire des genettes méditerranéennes est particulièrement diversifié et qu’il fait une large part aux arthropodes (Clevenger, 1995 ; Virgos et al., 1996 ; Rosalino & Santos-Reis, 2002 ). D’autres études réalisées dans les régions tempérées démontrent que ce sont les mammifères et particulièrement les rongeurs, qui constituent la majorité des proies consommées (Cugnasse & Riols, 1984 ; Lodé, 1989 ; Lodé et al., 1991). Lodé et al., (1991) ont montré que le mulot sylvestre (Apodemus sylvaticus) est la proie la plus fréquemment consommée, cette espèce étant particulièrement abondante sur le site d’étude (Massif Central). La prépondérance d’Apodemus sylvaticus dans le régime alimentaire de la genette a déjà été révélée par de nombreuses études (Maizeret et al., 1990 ; Diaz et al., 2005). Ainsi, la genette est le prédateur qui consomme le plus de mulot au sein de la communauté des carnivores d’Europe occidentale. Il faut cependant signaler que ces mêmes constatations ont également été faites en Kabylie, et plus particulièrement au niveau du massif montagneux de Yakouren, où l’on a observé la forte prépondérance du mulot sylvestre dans son régime alimentaire (Hamdine, 1991 ; Hamdine et al., 1993 ; Amroun et al., 2006). Le Jacques et Lodé (1994) ont d’ailleurs affirmé que la prédation soutenue sur le mulot est directement corrélée avec les disponibilités de cette proie. Il serait donc intéressant dans notre cas de réaliser une estimation des disponibilités du mulot sylvestre à partir d’un dispositif de piégeage. Plusieurs auteurs soulignent les Mésogée Volume 65l 2009 M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) capacités des genettes méditerranéennes à changer de proies ou d’aliment principal et classent l’espèce parmi les prédateurs opportunistes, à large spectre alimentaire (Virgos et al., 1999 ; Amroun et al., 2006). Pour ces auteurs, la plasticité du comportement de prédation de la genette, alliée à l’hétérogénéité et à la diversité spécifique de la plupart des environnements méditerranéens, expliquent les valeurs élevées des indices de diversité calculés pour ce prédateur. Dans ce contexte, le calcul de l’indice de Shannon (H’) est indispensable pour évaluer la diversité des catégories alimentaires au cours d’un cycle annuel. Cette diversité permet d’aborder de manière pertinente les problèmes de stratégies alimentaires développées par la genette. Plus les catégories alimentaires sont nombreuses, plus leurs fréquences d’occurrences sont similaires et plus la diversité du régime est élevée. Nos résultats révèlent l’existence d’une variation intersaisonnière importante et significative, dans les fréquences d’apparitions des différentes catégories alimentaires. Celles ci s’avèrent beaucoup plus hétérogènes au printemps, en été et en hiver. Ces variations traduisent une disproportionnalité dans la distribution des fréquences d’apparition, avec une dominance quasi constante des coléoptères et de certains mammifères. Les autres catégories, particulièrement les oiseaux, les végétaux et les reptiles/amphibiens sont considérés en tant que proies secondaires, qui servent comme un apport complémentaire aux coléoptères régulièrement consommés. Il semblerait que la genette tire secondairement profit des disponibilités locales ou saisonnières en dépit d’apparentes spécialisations ponctuelles. Quant aux valeurs des indices de diversité constamment élevées, elles révèlent les tendances fortes de la genette à diversifier ses sources alimentaires. Ces tendances sont en relation probable avec des contraintes importantes du milieu et/ou des limitations de ressources dans le site échantillonné. Nos résultats mettent en évidence un régime alimentaire constamment diversifié quelle que soit la saison. Ils confirment ainsi le statut de « généraliste » attribué à la genette au niveau de notre site d’étude. La plasticité spectaculaire de la genette, le caractère opportuniste de son comportement alimentaire et les variations importantes observées dans son régime sont explicables par une disponibilité différente de certains items d’une saison à l’autre. Storch et al. (1990) rappellent qu’en toute logique, une espèce opportuniste devrait choisir son alimentation parmi les catégories de proies abondantes, de qualité et faciles à exploiter. Par conséquent, et au moins ponctuellement, les prédateurs opportunistes devraient se spécialiser temporairement lorsque les proies qui dominent le plus régulièrement dans leur régime deviennent abondantes. Cependant, il paraît important de souligner que l’un des facteurs les plus importants qui conditionne l’abondance des ressources alimentaires et leur distribution dans l’espace est la pression compétitrice exercée au sein de la population de carnivores (Sunquist & Sunquist, 1989). En effet, la genette, carnivore inféodé aux habitats boisés et /ou rupestres (Virgos & Casanova, 1997), est continuellement exposée à une compétition alimentaire importante avec les espèces exploitant les mêmes gammes de proies mais utilisant activement l’ensemble des milieux disponibles. En Algérie, la disparition des grands prédateurs a particulièrement favorisé le développement des populations de quelques carnivores de taille moyenne, notamment celles des chacals (Amroun et al., 2006), mais également des mangoustes observées fréquemment au niveau du site d’étude (observations personnelles). Du reste, cette dernière espèce semble utiliser régulièrement l’ensemble des habitats disponibles, des plus boisés aux plus ouverts. Elle dispose ainsi d’un avantage appréciable vis à vis de la genette qui, elle, restreint sa distribution aux habitats strictement boisés. L’une des conclusions de Caro & Stoner (2003), étudiant les relations entre plusieurs espèces prédatrices, est qu’une spécialisation marquée est assortie d’une diminution de compétition. Il serait intéressant de vérifier si dans notre région la genette exerce une pression de prédation accrue sur les coléoptères pour contourner une pression compétitrice exercée par la mangouste et le chacal sur les petits mammifères tels que le mulot. De ce fait, il paraît nécessaire de s’appuyer sur des connaissances relatives à la fois à l’utilisation des habitats et à l’exploitation des ressources alimentaires pour évaluer le degré de compétition interspécifique (Carvalho & Gomes, 2004 ; Barrientos & Virgos, 2007). L’analyse des indices de chevauchements des régimes alimentaires peut être un bon outil pour révéler un risque de compétition entre espèces sympatriques (Angelici & Luiselli, 2005 ; Prigioni et al., 2008). 89 CONCLUSION Les résultats obtenus mettent en évidence l’opportunisme trophique de la genette. Les arthropodes, particulièrement les Coléoptères, et les mammifères du genre Apodemus sont les plus vulnérables à la prédation par ce carnivore. D’autre part, l’analyse des différents paramètres de structure du peuplement d’items proies nous a permis de connaître les principales ressources alimentaires exploitées par le prédateur ainsi que leur évolution temporelle. De ces résultats se dégagent les grandes lignes de l’écologie de l’espèce qui est éminemment généraliste et qui confirme les particularités des régimes alimentaires des mammifères en Afrique méditerranéenne dans lesquelles les arthropodes occupent une part importante. Mésogée Volume 65l 2009 M. BOUKHEROUFA, F. SAKRAOUI, S. BENYACOUB, P. GIRAUDOUX, F. RAOUL. Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nors-Est algérien) RÉFÉRENCES 90 Amroun M., Giraudoux P. & Delatre P., 2006. A comparative study of the diets of sympatric carnivores – the golden jackal (Canis aureus) and the common genet (Genetta genetta) – in Kabylia, Algeria. Mammalia. XX: 247-254. Angelici F. M. & Luiselli L., 2005. Habitat associations and dietary relationship between two genets, Genetta maculata and Genetta cristata. Rev. Ecol. (Terre et vie), 60 : 341 – 354. Barrientos R., 2006. Year round defecation pattern in wild genet (Genetta genetta. L) in a montain forest ( Toledo, Central Spain). Pol. J. Ecol., 2: 325-328. Barrientos R. & Virgos E., 2007. Reduction of potentiel food interference in two sympatric carnivores by sequential use of shared resources. Acta oecologica, 30 : 107-116. Benyacoub S. & Chabi Y., 2000. 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Chalcides striatus serait en fait une sous-espèce du taxon Chalcides chalcides. Celui-ci pouvant être subdivisé en C. chalcides chalcides (Italie, Sicile et Elbe), C. chalcides striatus (sud de la France et péninsule ibérique) et C. chalcides vittatus (en Sardaigne). Le seps affectionne les milieux herbacés assez denses et ne dépassant pas 30 à 40 cm de hauteur (Cheylan & Mateo, 1997). Il se rencontre dans les garrigues, les prairies, les friches, les talus herbeux et en lisière des bois de pins ou de chênes, à faible altitude, dans les endroits plutôt humides mais ensoleillés. Il est actif le jour. Il se nourrit d'insectes divers, d'arachnides et de myriapodes. Les jeunes affectionnent particulièrement les pucerons. Très agile, il se faufile à grande vitesse par reptation, encastrant ses courtes pattes dans les gouttières de ses flancs, dans les herbes denses ou les broussailles, lorsqu'il est menacé. Il hiverne très tôt de septembre-octobre jusqu’en avril, selon le climat de l'endroit où il se trouve. Selon les milieux, le territoire individuel varie de 12 à 32 m2 (Cheylan, 1972). Mésogée Volume 65l 2009 In this note, the authors relate the discovery in the departement of Alpes de HauteProvence (04) of the Scincidae Chalcides striatus. Chalcides striatus (Cuvier, 1829) Introduction Abstract Discovery of the Scincidae Chalcides striatus (Cuvier, 1829) in the departement of Alpes-de-hauteProvence. 93 La femelle atteint sa maturité sexuelle à la fin de sa 2ème année et le mâle entre 2 et 3 ans (Bruno, 1986). A la période de reproduction, il existe des combats de mâles parfois violents, les laissant souvent mutilés. Au cours des accouplements qui ont lieu en avril-mai, les mâles saisissent les femelles derrière la tête à l’aide de leurs nombreuses dents pointues. La femelle, ovovivipare, met bas en août de 3 à 15 petits de 9 à 11 cm de longueur totale. La parturition souvent délicate entraîne souvent la mort des femelles trop faibles (Fratey, 1975). Répandu dans toute la partie occidentale du bassin méditerranéen, Chalcides striatus est présent au Portugal, en Espagne, en France et en Italie. Chalcides striatus est répandu dans la majeure partie de la péninsule ibérique (Pollo, 1987). En Italie, il n’est présent que le long de la côte ligurienne (Cheylan & Mateo, 1997). L'espèce se rencontre également en Afrique du Nord, du Maroc à la Tunisie. En France, seule la forme striatus paraît exister. Cette espèce est bien connue le long de la côte méditerranéenne (Geniez & Cheylan, 1987; Geniez, 1989). Elle fut également mentionnée dans d’autres localités isolées de l’aire méditerranéenne, en Charente-maritime (Lataste, 1876 ; Cheylan & Mateo, 1997), dans le Gers et le Tarn (Chalande, 1888), l’Ariège (Bertrand & Cochet, 1992) et la Haute-Garonne (Vacher et al, 2003 ; Pottier, 2005). En Provence, l’espèce est relativement abondante dans le sud de la région et sur le littoral (Bouches-du-Rhône, Vaucluse, Var et Alpesmaritimes). Le développement touristique et l’urbanisation sur les prairies et espaces naturels du littoral sont à l’origine de la raréfaction de cette espèce dans ces stations. Dans les Alpes de HauteProvence, aucune publication ne fait mention de la présence de Chalcides striatus dans ce département. En 1975, Fratey considérait l’espèce absente des Basses-Alpes (04) (aujourd’hui appelées Alpes de Haute-Provence). En réalité quelques observations de cet animal ont été faites depuis mais non publiées comme celle réalisée à Saint-Etienne-les-Orgues (04) par Marc Cheylan (Orsini & Cheylan, 1981). La présente note relate la découverte récente de Chalcides striatus sur la commune de Moustiers Sainte Marie dans le département des Alpes de Haute-Provence. DESCRIPTION DE L’ANIMAL Cet individu a été trouvé mort en avril 2008, capturé et tué par un chat domestique (Felis catus), dans une oliveraie sur la commune de Moustiers-Sainte-Marie dans le sud du département des Alpes de Haute-Provence. Le lieu exact de l’observation, situé au lieu dit « Le Claux », a pour coordonnées : 43°50’ 45.47’’ N et 6°13’22.53’’ E et est situé à 695 mètres d’altitude. D’un point de vue climatique, le site est nettement marqué et caractérisé par un climat supraméditerranéen sec et ensoleillé montrant un déficit accusé des précipitations estivales. A une altitude d’environ 700 mètres, le site est inclus dans l’étage de végétation supra-méditerranéen, avec une nette influence méditerranéenne. La température de l’air au sol était de 19°C et le taux d’hygrométrie était de 67%. Mésogée Volume 65l 2009 P. SIAUD et C. CARRERA Observation d’un seps strié Chalcides striatus (Cuvier, 1829) (Squamata, Scincidae) dans le département des Alpes-de-haute-Provence. MATÉRIEL ET MÉTHODES 94 La longueur totale de l’animal est de 264 mm, la longueur du museau au cloaque de 129 mm, le poids de 16 g. Le poids et la taille de l’individu suggèrent que ce seps est adulte. Il s’agit d’une femelle car aucun renflement à la base de la queue n’est observable, fait confirmé par l’autopsie qui a révélé la présence d’un ovaire. L’animal a une petite tête à museau court et arrondi et un cou non distinct. Son œil est de faible diamètre. Le tympan de forme ovale, dont la plus grande longueur est dans le sens rostro-caudal, est à demi caché par un repli cutané. Ses membres sont très courts et les antérieurs ont une longueur égale à la distance œil-tympan. Les quatre membres se terminent par trois doigts. Le dessus du dos ainsi que la tête sont couleur bronze. Chaque écaille dorsale est marquée de noir sur les bords, formant ainsi 9 lignes sombres moins larges sur les flancs que sur le dos. Le ventre et la gorge sont d’un gris clair nacré uniforme. Le dessous de la queue est gris. Concernant les écailles de la partie rostrale, l’écaille frontale est très grande en forme de cloche. La narine s’ouvre le long de la suture postérieur de la rostrale avec la première supra-labiale. CONCLUSION La présence de Chalcides striatus n’est pas surprenante dans cette partie du département des Alpes de Haute-Provence compte tenu de l’influence méditerranéenne marquée sur ce territoire. Cependant, au vue des données actuellement disponible, nous pouvons affirmer que les observations de cette espèce sont relativement rares dans ce département et que la station décrite dans la présente note constitue actuellement la seule mention bibliographique sur le seps strié (Chalcides striatus) dans les Alpes de Haute-Provence. Il sera intéressant de visiter d’autres localités afin de mieux connaître la répartition et l’écologie de ce lézard dans ce département. Ceci permettrait notamment de définir si la répartition du seps strié est réellement morcelée du fait que le département des Alpes de Haute- Figure 1 A 1 cm Chalcides striatus A : vue générale du spécimen trouvé mort sur la commune de MoustiersSainte-Marie (Alpes-de-hauteProvence) B : Vue latérale de la partie antérieure de l’animal.O : oeil ;T : tympan; MA : membre antérieur La longueur du membre antérieur est égale à la ditance entre le typan et l’oeil C : Vue dorsale de la tête. EF: écaille frontale en forme de cloche. D : Vue du membre antérieur gauche (MA). G : gourrière. membre très court portant 3 doigts E : Vue du membre postérieur gauche (MP). Membre très court portant 3 doigts. 1 mm C 1 mm E 1 mm 1 mm Mésogée Volume 65l 2009 P. SIAUD et C. CARRERA D Observation d’un seps strié Chalcides striatus (Cuvier, 1829) (Squamata, Scincidae) dans le département des Alpes-de-haute-Provence. B 95 Provence est situé en limite du biome méditerranéen strict (zone de culture de l’olivier) ou si elle est liée au manque d’observation. Cette note signalant la présence du seps strié à environ 700 m d’altitude confirme l’extension altitudinale de la répartition de cette espèce comme cela a déjà été décrit : jusqu’à 1000 mètres en Provence (Orsini & Cheylan, 1981 ; source ECoMED : massif de la Sainte -Victoire) et dans les Pyrénées (Pottier, 2005). La plus grave menace pour le seps strié dans le département des Alpes de Haute-Provence est la déprise pastorale qui entraîne un repousse des broussailles et une reforestation spontanée des anciens parcours à bétail, à l’origine de la fermeture du milieu. Bien que cette espèce ne soit pas en danger d’extinction (liste IUCN), de nouvelles prospections s’imposent pour recenser les zones d’habitats favorables et découvrir d’autres populations afin d’en assurer la conservation. Remerciements Les auteurs remercient M. Jean-Nicolas MAGNAN, Assistant de Conservation au Muséum d’histoire naturelle de la Ville de Marseille, pour la réalisation des photographies et leur traitement numérique. Mésogée Volume 65l 2009 P. SIAUD et C. CARRERA Observation d’un seps strié Chalcides striatus (Cuvier, 1829) (Squamata, Scincidae) dans le département des Alpes-de-haute-Provence. RÉFÉRENCES 96 Barthe L. & Pottier G., 2005. Confirmation de l’existence comtemporaine de seps strié Chalcides striatus (Cuvier, 1829) (Reptilia, Scincidae) dans le département du Gers et synthèse de la connaissance chorologique de l’espèce sur le piémont des Pyrénées centrales Françaises. Bull. Soc. Herp. Fr., 115 : 37-47. Bertrand A. & Cochet P.A., 1992. Amphibiens et reptiles d’Ariège (Inventaires floristiques et faunistiques d’Ariège, 3). Association des Naturalistes d’Ariège, Clermont, 137 p. Caputo V. , 1993. Taxonomy and evolution of the Chalcides chalcides complex (Reptilia, Scincidae) with description of two new species. Boll. 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INSTRUCTIONS AUX AUTEURS Les manuscrits doivent être fournis dans un premier temps en trois exemplaires dactylographiés, format A4 recto uniquement ou par courrier électronique. Les textes retenus seront soumis à l'avis d'un relecteur. La version corrigée sera fournie sur support informatique. Chaque article comprendra : Titre français et anglais Prénom et nom du ou des auteurs et adresses respectives (dans le cas de co-auteurs préciser le nom du correspondant) Résumé de 1000 caractères maximum et six mots clés dans la langue courante de l'article Résumé de 1500 caractères maximum et six mots clés dans l'autre langue Introduction Matériels et méthodes Résultats et discussion Conclusion Remerciements Références. Les noms latins (genre et espèce) uniquement doivent être écrits en italique. Les noms d'auteurs seront écrits en minuscule. Les numéros des figures seront en chiffres arabes, ceux des tableaux en chiffres romains et les unités de mesure normalisées sur le mode du Système International d'Unités. Les références bibliographiques citées dans le texte doivent être regroupées par ordre alphabétique à la fin du manuscrit sur le modèle suivant : Ramade F., 1974. Eléments d'écologie appliquée. Paris, Ediscience Ed. : 522 p. Francke W. et Engel W., 1986. Synorogenic sedimentation in the Variscan belt of Europe. Bull. Soc. Géol. Fr., sér. 8, 2 (1) : 25-33. Janzen D. 1988. Tropical dry forests. The most endangered major tropical ecosystem : 130-137, in : Biodiversity, Wilson Ed., 521 p. Illustrations : Les tableaux seront saisis sous Word ou Excel uniquement. Les illustrations (images et figures) seront fournies en format TIFF ou JPEG, en 300 dpi, taille souhaitée d’impression. Les illustrations originales au trait se feront sur bristol blanc, à l'encre de Chine noire et seront dotées d'un numéro d'ordre. Dans tous les cas, tenir compte des réductions dans le choix des lettres et des signes. Les illustrations photographiques, uniquement en noir et blanc, seront fournies sur tirages papier ou diapositives de qualité. Les légendes des figures et tableaux seront regroupées sur une même page. Tirés-à-part: Il sera fourni à chaque auteur un fichier format PDF de son article. Des tirés-à-part sur papier pourront être fournis sur demande expresse. Toute commande supplémentaire devra être formulée lors du renvoi du manuscrit corrigé, accompagnée du nom et de l'adresse de la personne ou de l'organisme à qui sera envoyée la facture INSTRUCTIONS TO AUTHORS Papers must first be handed out in triplicate typed A4 format paper, front page only or by e-mail. The texts selected will be submitted to a reviewer. After correction , the final version will be sent on computer support. Each paper should content : Title in French and in English Name(s), surname(s) and address(es) of author(s) (in case of co-authors, indicate the correspondent one) 1000 characters maximum abstract and six key-words in the current language of the article 1500 characters maximum abstract and six key-words in the other language. Introduction Materials and methods Results and discussion Conclusion Acknowledgements References Latin names only (Genus and species) would be wrote in italic, author names in small letters. Figures numbers must be noted in Arabic numerals, tables one in Roman numbers and measure units standardized on the International Units System model. Bibliographic references mentioned in the text must be listed in alphabetic order, at the end of the paper, as following : Ramade F., 1974. Eléments d'écologie appliquée. Paris, Ediscience Ed. : 522 p. Francke W. et Engel W., 1986. Synorogenic sedimentation in the Variscan belt of Europe. Bull. Soc. Géol. Fr., sér. 8, 2 (1) : 25-33. Janzen D. 1988. Tropical dry forests. The most endangered major tropical ecosystem : 130-137, in : Biodiversity, Wilson Ed., 521 p. Illustrations Tables should be typed on Word or Excel software only. Computer pictures or figures should be in TIFF or JPEG format, in 300 dpi, in the impress format wished . Original drawings should be made on white paper with Chinese ink, with an order number. In any case, take into account reductions in the choice of letters and symbols. Photographic illustrations, only black and white, should be on opaque paper or transparent support (dias of high quality). Legends of figures and tables should be note on a same page. Off prints Each author or co-author will receive a PDF computer version of its manuscript. Thorough 25 off prints free of charge could be sent on express sollicitation. Additional off prints should be ordered with the sending of corrected version , with name and address of person or institute where invoice must be sent. Par/ By B. Lefebvre, F. Noailles, A. W. Hunter, E. Nardin, S. Regnault, B. Franzin, P. Van Roy et K. El Hariri Par/ By M. Dia, A. Wague et M. Ghorbel Par/ By B. Cornier Sommaire /contents Volume 64|2008 7 Les niveaux à échinodermes de Bou Nemrou, un gisement à préservation exceptionnelle de l’Ordovicien supérieur du Tafilalt occidental (Maroc). 27 Régime alimentaire du sar Diplodus sargus cadenati (Sparidae) de la côte de Nouadhibou (Mauritanie). 37 L'indigénat d'une espèce ligneuse du groupe de Sorbus hybrida L. en France : le sorbier de Legré à la montagne de Lure. Par/ By A. Damerdji 47 Volume 65|2009 Par/ By Z. Boudjadi, M. Tahri, N. Djebari , I. Hamza et M. Bensouilah 59 Etude de l’infestation des anguilles (Anguilla anguilla) par le nématode (Anguillicola crassus) dans l’estuaire du Mafrag (Algérie). 67 Par/ By F. Forher et M. Martinez Par/ By Z. Bouslama, H. Soualah-Alila, A. Belabed et K. Ouali Par/ By M. Boukheroufa, F. Sakraoui, S. Benyacoub, P. Giraudoux et F. Raoul Par/ By P. Siaud et C. Carrera Sur la présence en France d'un Dermestidae remarquable : Sefrania bleusei Pic, 1899 (Coleoptera). 71 Etude du système tiques-lézard dans le Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie). 83 Ecologie alimentaire de la genette commune (Genetta genetta) dans un écosystème forestier du Parc national d’El Kala (Nord-Est Algérie). 93 Observation d’un seps strié Chalcides striatus (Cuvier, 1829) (Squamata, Scincidae) dans le département des Alpes de Haute Provence. Mésogée Volumes 64|2008 65|2009 Prix du numéro : 13 euros Mésogée Volumes 64|2008 / 65|2009 Diversité et aperçu bioécologique de la faune malacologique associée au Calycotome spinosa (Genêt) dans les environs de Tlemcen (Algérie).