Document 17139

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Management international / International Management / Gestión Internacional
Fondateur / Founder / Fundador
Rédacteurs en chef / Editors / Editores
Taïeb Hafsi
Patrick Cohendet Bachir Mazouz
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Université Montesquieu Bordeaux,
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Réviseurs et traducteurs / Copy editors and translators / Revisores y traductores
Cecilia Fasola, Nancy Dunham
Publié par / Published by / Publicado por
HEC Montréal et Université Paris Dauphine
ISSN 1206-1697
Table des matières / Table of Contents / Índice
2013
Vol.17 – Numéro spécial
Management et Diversité : lignes de tension et perspectives
Jean-François Chanlat, Stéphanie Dameron, Jean-Pierre Dupuis, Maria Ester de Freitas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
The paradox of diversity in leadership and leadership for diversity
Diane Bebbington, Mustafa Özbilgin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
Which foot first: diversity management and affirmative action in Brazilian business
Eliane Barbosa da Conceição, Peter K. Spink . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Quel processus d’apprentissage de la gestion du fait religieux dans les entreprises françaises ?
Géraldine Galindo, Joëlle Surply . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
Exemple de pratique de gestion de la diversité à la française : réalité, opportunité et aliénation
Eléonore Marbot, Brigitte Nivet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
Appartenance syndicale et âgisme : approche comparée en Europe
Yvan Barel, Sandrine Fremeaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
Maria Giuseppina Bruna, Mathieu Chauvet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
Enjeux techniques, symboliques et politiques de la mesure de la diversité dans les entreprises
et les organisations ?
Hedia Zannad, Annie Cornet, Pete Stone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements
d’un centre d’appel spécialisé
Christine Naschberger, Sana Guerfel-Henda . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98
Notes biographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
iv
Mot de remerciements
e numéro spécial sur « Management et Diversité :
lignes de tension et perspectives », est particulièrement
important pour la revue Management International à plus
d’un titre. Tout d’abord, il porte sur un sujet tout à fait central
aujourd’hui pour les sciences de gestion comme le montre
l’excellent article introductif de cette publication. Ensuite,
ce numéro résulte d’une collaboration exemplaire de nos
collègues Jean-François Chanlat, Stéphanie Dameron, JeanPierre Dupuis, Maria Ester de Freitas et Mustafa Ozbilgin
qui sont les rédacteurs en chef invités de ce numéro. Leur
collaboration réunit ainsi trois professeurs appartenant à
la chaire ‘Management et diversité’ de l’Université ParisDauphine (Jean-François Chanlat, Mustafa Ozbilgin et
Stéphanie Dameron), un professeur d’HEC Montréal (JeanPierre Dupuis) et une professeure de l’université brésilienne
FGV-EAESP, Maria Ester de Freitas, qui est membre du
comité scientifique de Management International. À tous
les cinq, et à tous les auteurs de ce numéro, la revue souhaite exprimer ses plus chaleureux remerciements pour la
réalisation de ce numéro dont nous sommes très fiers. De
nombreux colloques et séminaires dans les prochains mois,
traiteront de ce thème de la diversité et du management.
En particulier, ce sera le cas du Colloque Atlas/AFMI qui
organise sa conférence annuelle 2013 « Ancrages culturels
et dynamiques du Management International » qui sera
accueillie par HEC Montréal les 8 et 9 juillet 2013. Il est
certain que ce numéro sera un apport très riche aux discussions qui animeront ces événements.
Bonne lecture !
T
his special issue “Management et Diversité: lignes de
tension et perspectives” (Management and Diversity:
tensions and perspectives), is particularly important for our
journal for several reasons. First, it focuses on a theme which
is quite central today for management sciences, as shown
by the excellent introductory article of this publication.
Then, this special issue is the result of an exemplary cooperation of our colleagues Jean-François Chanlat, Stephanie
Dameron, Jean-Pierre Dupuis, Maria Ester de Freitas and
Mustafa Ozbilgin who are the guest editors of this issue.
This collaboration brings together three teachers from the
Chair ‘Management and Diversity’ at the University ParisDauphine (Jean-François Chanlat Mustafa Ozbilgin and
Stephanie Dameron), a professor at HEC Montreal (JeanPierre Dupuis) and a professor at the Brazilian university
FGV-EAESP, Maria Ester de Freitas, who is a member of
the Scientific Committee of International Management.
To our five colleagues, and to all authors of this issue,
International Management wishes to express its gratitude
for the realization of this special issue. We are particularly proud of the result of this collaboration. Numerous
conferences and seminars, in the coming months, will
address the theme of diversity and management. In particular, it will be the Symposium Atlas / AFMI which holds
its annual conference in 2013 «cultural anchors and dynamic International Management» which will be hosted by
HEC Montreal on July, 8th and 9th 2013. It is certain that
this issue will be a rich and unique contribution to the academic discussions during these events.
Enjoy the reading!
E
ste número especial sobre « Gestión y diversidad: las
líneas de energía y puntos de vista, » es particularmente
importante para la Gestión Internacional por diferentes
motivos. En primer lugar, se centra en un tema fundamental
que ocupa hoy a las ciencias de la gestión, como lo muestra
el excelente artículo introductorio de esta publicación. A
continuación, este número es el resultado de una cooperación ejemplar de nuestros colegas Jean-François Chanlat,
Stephanie Dameron, Jean-Pierre Dupuis, Maria Ester de
Freitas y Mustafa Özbilgin que son los editores invitados
de este número. La colaboración academica reúne a tres
profesores de ‘Gestión y Diversidad’ de la catedra de esta
materia de la Universidad Paris-Dauphine (Jean-François
Chanlat Mustafa Özbilgin y Stephanie Dameron), de
HEC Montreal (Jean-Pierre Dupuis) y la Profesora de la
universidad brasileña FGV-EAESP, Maria Ester de Freitas,
quien es miembro del Comité Científico de la International
Management. A todos y cada uno de los colaboradores en
este número, la revista desea expresar su sincero agradecimiento en la realización de esta edición, de la cual estamos
muy orgullosos. Numerosas conferencias y seminarios en
los próximos meses, abordarán el tema de la diversidad y la
gestión. En particular, el Simposio Atlas / AFMI que lleva a
cabo su conferencia anual en 2013 sobre « La dinámica de
la gestión internacional y sus anclajes culturales », que será
organizado por HEC Montreal el 8 y 9 de julio de 2013.
Que estamos seguros este tema será un aporte muy rico para
los interesantes debates que producirá este evento.
Disfrute la lectura!
© MI 2013
C
Introduction au dossier spécial
Management et Diversité :
lignes de tension et perspectives
Jean-François ChanlatStéphanie Dameron
Université Paris-Dauphine
Université Paris-Dauphine
Jean-Pierre Dupuis
Université Paris-Dauphine
Maria Ester de Freitas
Université FGV-EAESP (Brésil)
Mustafa Ozbilgin
Université Paris-Dauphine
« C’est par la diversification des « rencontres »,
par l’épreuve des mises en relation fréquemment
renouvelées, que se saisit et se vérifie ce qui est la nature
même du social : son mouvement de création,
de production continue » (Georges Balandier, 2003, p33)
D
ans la plupart des pays industrialisés, la diversité est
un mot en ce moment fort à la mode. La presse s’en
fait largement écho, l’élection du sénateur Barack Obama
comme Président des Etats-Unis en 2008 en étant devenu
un symbole international. Or, l’engouement pour un mot
est toujours en lien avec des questions qu’une société se
pose à un moment donné de son histoire. Si la nôtre ne fait
pas exception à la règle, il nous faut rappeler d’entrée que
la question de la diversité n’est pas en soi nouvelle et que
l’intérêt de l’univers gestionnaire à son égard, non plus.
En effet, d’un point de vue anthropologique, la diversité
renvoie à deux problèmes fondamentaux que tout groupe
humain rencontre : 1) la question du rapport à l’autre (l’altérité) (Balandier, 2003) et 2) la question du vivre ensemble
(la socialité) (Durkheim, 1930).
Depuis que le management existe en tant que corps de
principes, cette question de la coopération entre les différentes composantes sociales d’une organisation a été posée.
Et la question du comment faire en sorte que des gens différents par l’âge, le sexe, l’origine sociale, l’origine ethnique,
la culture, la formation et le métier travaillent ensemble en
vue de l’objectif commun a été dévolu aux gestionnaires.
Tel est bien le problème qui se pose à toute action organisée
et que les gestionnaires ont depuis toujours eu pour objectif
de résoudre au quotidien (Chanlat, 1998, 2002, 2005). La
question de la socialité est donc, elle aussi, au coeur de la
dynamique managériale (Dameron, 2004).
C’est au cours des deux dernières décennies où l’esprit
gestionnaire anglo-saxon s’est particulièrement diffusé
dans le monde que le vocable « diversité » s’est imposé,
peu à peu, dans le domaine de la gestion (Kirkon et
Greene, 2004).
Dans les sociétés développées, son usage est le fruit de
la rencontre de quatre grands mouvements de fond observés
depuis l’après-Guerre :
• u ne présence désormais massive et permanente des femmes sur le marché du travail (Méda, 2008);
• u n brassage démographique entraîné par les divers mouvements migratoires (Héran, 2007);
• une mondialisation des échanges;
• u ne culture plus tolérante et libérale à l’égard des
différences;
• E
t d’un certain nombre de constats observés à des
degrés divers dans de nombreux pays (Robertson, 2006;
Ozbilgin et Tatli, 2008; Healey et Oikelome, 2011;
Vassilopoulou, 2011; de Freitas et Dantas, 2012; Bell,
2012; Klarsfeld, 2012), et notamment en France (Barth
et Falcoz, 2007; Chanlat, 2010; Falcoz et Barth, 2010;
Bender, Klarsfeld et Laufer, 2012).
Ces constats touchent
• d es discriminations sociales multiples d’accès à
l’emploi;
• u ne division très sexuée du travail et une faible représentation féminine dans les sphères dirigeantes (Laufer,
2007);
• d es conflits interculturels plus médiatisés (Davel,
Dupuis et Chanlat, 2008);
• la difficulté de nombreux jeunes à s’insérer dans le marché du travail;
• l’éviction des salariés de plus des 50 ans de la vie active;
• les difficultés d’insertion rencontrées par les personnes
handicapées.
En France, l’intérêt des cercles gestionnaire pour cette
question est encore plus récent que dans les univers anglosaxons (Barth et Falcoy, 2007; Chanlat, 2010; Bender,
Klarsfeld et Laufer, 2012). Mais il reste que, au cours des
dernières années, nous avons assisté à une multiplicité d’actions dans ce sens, par exemple : à la création de la Halde
(Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour
l’Egalité.), à la fondation du Club du XXI siècle et d’une
association des managers de la diversité (l’AFMD) qui
visent à accroître la représentativité de différents groupes
peu ou mal représentés dans la vie sociale, à la création
6
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
toute récente d’un Haut Commissariat à la diversité et de
plusieurs chaires universitaires de recherche dédiées à ce
thème, dont une à Dauphine1, à de nombreux colloques et
débats concernant cette question, à un programme de labellisation des organisations (Le label diversité) et à la signature de chartes de la diversité par de nombreuses grandes
entreprises (Point, 2006).
Au Québec, influencé par les pratiques nord-américaines, cet intérêt est plus ancien mais il a parfois dépassé le
modèle anglo-saxon, par exemple avec la loi sur l’Équité
salariale adoptée en 1996. Cette loi, unique en Amérique
du Nord, oblige les employeurs à offrir aux femmes de leur
entreprise des salaires équivalents à ceux des hommes pour
des emplois équivalents mais différents. Ainsi, les emplois
féminins doivent être comparés à des emplois majoritairement masculins équivalents comme ceux de policier
(infirmière), de menuisier (secrétaire) ou de concierge (gardienne d’enfants) et être rémunérés comme le sont les hommes occupant ces emplois.
La gestion étant un monde où l’on voit apparaître régulièrement des modes, d’aucuns peuvent considérer cet
engouement actuel pour la diversité comme une autre illustration de ce phénomène. Tout comme la qualité était, par
exemple, un des slogans populaires dans les entreprises des
années 80, la diversité semble être devenue avec le développement durable, celui du monde managérial de ce XXI
siècle naissant.
Si le débat sociétal sur la diversité trouve un écho particulier en entreprise c’est que celle-ci connaît des évolutions fondamentales. Quatre d’entre elles nécessitent une
réflexion renouvelée sur le management de la diversité.
L’entreprise du XXIème siècle est en effet multipolaire, les
centres de décisions sont répartis dans différents territoire;
elle est multiculturelle, ses employés, ses fournisseurs et
ses clients sont de différentes origines; elle est multigénérationnelle – les stages et les formations en apprentissages
se généralisent et commencent plus tôt tandis que l’âge de
départ à la retraite recule; elle est enfin distribuée et virtuelle, ses équipes et son encadrement travaillent à distance
utilisant abondamment les technologies de l’information
et de la communication à leur disposition. De ce fait, les
processus actuels, notamment de recrutement, de gestion
des parcours professionnels et de diffusion et partage des
connaissances, sont appelés à évoluer radicalement.
Après avoir présenté le caractère polysémique de la
notion de diversité suivant une perspective comparée,
l’objectif de cette introduction à ce numéro spécial est de
repérer les tensions exercées sur les organisations par le
management de la diversité et de dégager les perspectives de
recherche sur cette thématique, tout en insérant dans notre
1. La chaire ‘Management et diversité’ de l’Université Paris-Dauphine
est sous la responsabilité des Professeurs Jean-François Chanlat et
Mustafa Ozbilgin lequel a succédé à Stéphanie Dameron il y a de cela
un an et demi. Elle a été fondée en partenariat avec le Club du XXI
propos les différentes contributions faites et sélectionnées
pour ce numéro.
La diversité :
un élément de la gestion d’entreprise
Dans le contexte actuel, la diversité est devenue un élément
de la stratégie de nombreuses grandes entreprises, notamment si l’on en juge le discours qu’elles tiennent à ce sujet.
Elle est aussi perçue par certains gouvernements comme un
instrument d’une politique sociétale plus large, en matière
d’égalité des chances et d’équité de traitement, à poursuivre
dans les différentes sphères de l’économie, des medias, de
la culture, de l’administration et de la politique.
Le dénominateur commun de ce management de la
diversité part d’un postulat, partagé par tous les acteurs de
la mise en place de telles politiques, que les différences,
quelles quelle soient, peuvent représenter à la fois des ressources et un atout indispensable à la bonne marche des
organisations. On peut définir ainsi le management de la
diversité comme le dernier développement d’un ensemble
de stratégies managériales dont le but est non seulement
d’améliorer la présence et le sort, dans certains contextes
professionnels, de personnes appartenant à des minorités
discriminées ou exclues mais aussi de rendre l’organisation
plus efficace en exploitant au mieux ces différences (Sabeg
et Charlotin,2006).
Cette stratégie se distingue quelque peu des programmes d’égalité en emploi. Car, contrairement à ces derniers
qui cherchent à promouvoir d’abord et avant tout une égalité
des chances face à l’emploi, la gestion de la diversité vise
d’abord et avant tout à améliorer la compétitivité et l’efficacité des entreprises en mettant l’accent sur la reconnaissance et l’apport des différences sociales et en mettant en
place des pratiques dans ce sens. La gestion de la diversité
cherche à faire du lieu de travail un endroit intégrateur pour
tout le monde, et à promouvoir une culture qui accepte les
différences afin de rendre l’organisation plus performante,
plus efficace et plus créative dans le contexte qui est le sien;
autrement dit, les différences doivent faire la différence.
En anglais, la notion de « diversity » recouvre par
ailleurs plusieurs acceptions. Elle peut signifier à la fois
l’hétérogénéité du personnel et la gestion de la diversité
de ce personnel. Elle peut également renvoyer à n’importe
quelle politique concernant les immigrants ou les minorités, aux programmes d’accès à l’égalité, ou encore faire
référence à toute pratique mise en place pour faire face à
l’hétérogénéité sociale.
Comme le montre, par exemple, une étude récente qui
a comparé 241 sites internet d’entreprises européennes
siècle et quatre entreprises : EADS, GDF-SUEZ, LE GROUPE LA
POSTE et LA MACIF qui lui apportent leur soutien financier et lancée
en janvier 2009 .
7
Management et Diversité : lignes de tension et perspectives
sur cette question, les entreprises britanniques sont, celles qui ont le discours le plus large et le plus proactif dans
ce domaine alors que les autres se contentent de valoriser
essentiellement l’accès à l’emploi et d’améliorer les chances de promotion des personnes appartenant à des catégories exclues ou discriminées (femmes, minorités ethniques,
seniors, handicapés, homosexuels..) (Point, 2006).
Le contexte sociohistorique jouant donc un grand
rôle dans la construction différencié des discours (Tatli,
Vassilopoulou, Al Ariss et Ozbilgin, 2012), voyons par
exemple, comment cette question est vue dans le contexte
français auquel font référence plusieurs articles présentés
dans ce numéro.
Comme nous l’avons déjà rappelé plus haut, la question
de la diversité et de sa gestion, prise dans son acception
anglo-saxonne, est en effet une question tout à fait récente
dans le contexte français. Même si nous avons eu tout un
débat il y a quelques années sur la parité dans le domaine
politique, notamment entre hommes et femmes et des lois
cherchant à lutter contre le racisme et les discriminations
sociales, le recours au mot diversité dans notre contexte
hexagonal est un fait social nouveau. Outre l’influence
qu’exerce l’expérience anglo-saxonne à ce sujet et que
nous venons d’évoquer brièvement, son usage en France
a émergé à l’occasion de deux grandes questions sociales :
• les problèmes liés aux discriminations vécues par les
jeunes des banlieues dites sensibles;
• la faible représentation dans les positions de pouvoir
(notamment économique et politique) de personnes
issues des minorités ou ayant des profils atypiques.
Pourquoi cette question, largement discutée par exemple en Amérique du Nord depuis des années, ne s’est-elle
donc pas posée de la même manière en France qu’OutreAtlantique ? Pour une raison bien simple, c’est que la
France ne définit pas tout à fait la citoyenneté de la même
manière (Weil, 2005; Schnapper, 2007).
Depuis la Révolution française, les responsables politiques français ont toujours défendu en effet une conception
universelle de la citoyenneté et n’ont jamais fait référence
aux origines ou au genre. Il fallait constituer l’unité de la
Nation et cette unité ne pouvait pas se fonder sur des différences communautaires de quelque nature que ce soit.
Toute l’expérience politique a été de renforcer cette notion
d’unité de la Nation et donc l’assimilation pleine et entière
des immigrés ou des provinciaux à la culture commune
(affirmation du français comme seule langue nationale,
francisation de toutes les régions du pays via l’école publique obligatoire, loi sur la laïcité, défense des idéaux de la
République, loi sur le voile, etc..). Comme le rappelle fort
justement Pascal Combemale (2009, p77), le préambule de
notre Constitution hérité de celui de 1946 en fait foi :
« Au lendemain de la victoire remportée par les peuples
libres sur les régimes qui ont tenté d’asservir et de dégrader
la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau
que tout être humain, sans distinction de race, de religion,
ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. »
Si l’expérience française en la matière est singulière
par bien des aspects, notamment par la manière dont s’est
fabriqué la République, il reste que de nombreux pays sont
traversés par trois grandes et mêmes lignes de tension.
Les principales lignes de tension
de la gestion de la diversité
Le management de la diversité renvoie fondamentalement
à la socialisation au sein d’un groupe. Pour reprendre le
sociologue E. Durkheim, la socialisation résulte à la fois
de processus d’intégration et de processus de régulation.
L’intégration sociale nécessite que les membres d’une
même entité, et même si c’est avec une intensité inégale,
partagent une identité commune, entendue comme un
ensemble de valeurs, croyances et normes de comportement. L’intégration implique également que ses membres
soient en interaction les uns avec les autres. Elle nécessite
enfin qu’ils soient voués à des buts communs. Par ailleurs,
la régulation sociale, seconde dimension de la socialisation,
renvoie au pouvoir qui règle les activités des individus.
Socialisation ne veut donc pas dire acceptation aveugle
des différences, relativisme absolu et laissez-faire. Bien
au contraire, elle exige de définir un ensemble de référents
partagés stables à partir desquels la variation des comportements est acceptable.
Dans ce cadre, trois grandes lignes de tension parcourent à des degrés divers, selon les pays, la gestion de la
diversité. La première touche la tension égalité/diversité,
la seconde, la tension universalité/diversité et la troisième,
performance/diversité. Tous les articles présentés ici s’inscrivent parfaitement sous l’une ou l’autre de ces tensions.
La tension égalité/diversité
Nos sociétés démocratiques étant fondées sur l’égalité
des droits, la gestion de la diversité, par certaines de ses
pratiques, revisite la question de l’égalité. Ce qui suscite
des débats fort nombreux, notamment en France. Depuis
Tocqueville, nous savons que nous vivons dans des sociétés
qui aspirent à l’égalité sociale. Mais nous savons aussi par
Marx que les droits formels ne sont pas toujours réels. Le
principe d’égalité est donc toujours un idéal à poursuivre et
toute inégalité fortement ressentie peut alimenter le mouvement social. C’est donc en son nom que l’on a mis en place,
comme nous l’avons vu précédemment, des politiques
d’ « affirmative action » aux Etats-Unis, lesquelles devaient permettre aux minorités discriminées (Noirs et femmes
notamment) d’améliorer leurs chances. Mais c’est aussi au
nom de l’égalité que certaines de ces pratiques associées à
8
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
ce mouvement : mises en place de quotas, discrimination
positive ont été particulièrement critiquées (Calvès, 2004)..
En France, la loi sur la parité hommes/femmes en politique a subi le même type de critique, de la part de féministe, comme, par exemple, Elisabeth Badinter qui, dans le
cas français, s’appuyait sur l’esprit républicain pour rejeter
le projet de loi proposé. L’idée d’établir des ‘statistiques
ethniques’ suscite actuellement des débats vigoureux et des
critiques similaires. Car la mise en place éventuelle de tels
indicateurs dans notre contexte ne va pas de soi. Elle rentre non seulement en contradiction avec la conception de la
citoyenneté à la française que nous venons d’évoquer, mais
aussi pose des problèmes particulièrement ardus sur le plan
méthodologique et peut enfin avoir des effets redoutables
sur la définition de soi. Il ne faut jamais oublier en effet que,
selon la recherche dans le domaine des relations ethniques,
ce sont les interactions que les groupes ont entre eux et les
limites qu’ils établissent dans un contexte donné qui constituent le niveau d’analyse pertinent.
A une analyse à partir de catégorisations de type ethnoracial tendant à enfermer les personnes dans des cadres
naturels et essentialistes, il faut donc préférer une analyse
en termes d’ethnicisation des rapports sociaux. Les représentations d’une génération d’enfants français de parents
immigrés ne sont pas en effet analogues à celles de leurs
parents en raison de conditions socio-historiques différentes (taux de chômage, degré de ségrégation spatiale, maîtrise de langue, niveau d’instruction, etc..). Les rapports
sociaux sont par définition dynamiques et historiquement
datés (INSEE et Ined, 2011). On ne peut donc les enfermer
dans des catégories figées (Combemale, 2009).
Si une telle conception républicaine de l’indifférenciation raciale est particulière à la France, il nous semble
important de nous attarder à ce qui est fondamental : analyser les logiques ui concourent, comme nous y invite Robert
Castel (2007), aux discriminations négatives et à l’exclusion sociale dans chacun des contextes étudiés.
Outre la posture philosophique, propre à la conception
française du vivre ensemble, que nous venons de rappeler,
l’attachement des Français envers une vision égalitaire et
universelle du citoyen bénéficie également par ailleurs de
solides fondements historiques et anthropologiques. La
notion d’égalité entre les frères et les soeurs qui est au coeur
de la structure familiale dominante française, est peut-être
une des explications de cette passion bien française pour
l’égalité. Ce qui n’est pas le cas de la structure familiale
dominante en Angleterre, laquelle accepte volontiers depuis
plusieurs siècles l’inégalité entre les frères et les sœurs avec
la règle de la primogéniture en matière d’héritage (Todd,
1984).
D’autres critiques, plus radicales encore, en appellent
à l’égalité contre la diversité. Ils voient dans la popularité
croissante de l’idée de diversité un écran de fumée qui masquerait la montée des inégalités sociales que nos sociétés
ont connues au cours des trente dernières années. La présence de représentants des minorités à des postes de responsabilité ne serait pas alors synonyme d’une amélioration de
l’égalité sociale mais bien le signe d’une accession de certains d’entre eux ou d’entre elles aux groupes dominants
(Michaels, 2009). Cette politique, si elle ne change pas la
mécanique fondamentale des inégalités, permet d’améliorer
en revanche sa légitimation auprès des groupes socialement
défavorisés. Les cercles du pouvoir et le système social ne
seraient pas globalement plus ouverts mais en sortiraient
renforcer.
Face à de telles critiques, les défenseurs des législations et des pratiques mises en places au nom de la diversité
défendent l’idée que si nous laissons les choses en l’état,
il n’y aurait que des améliorations fort lentes et que les
personnes concernées seraient toujours exclues de nombreux emplois et postes hiérarchiques. En d’autres termes,
la parité, les quotas et la discrimination positive seraient
des réponses pragmatiques à l’inégalité sociale ambiante.
Les résultats obtenus par les pays scandinaves en ce qui
concerne la parité hommes/femmes (Méda, 2008), et ceux
obtenus aux EU dans les universités semblent leur donner
en partie raison.
Dans ce numéro, l’article de Mustafa Ozbilgin et de
Diane Bebbington met justement en lumière ces questionnements dans le cadre de la Grande Bretagne, notamment
au niveau de la représentation dans les instances dirigeantes
des institutions d’enseignement supérieur et celui de Peter
Spink et Barbosa, dans le cadre des entreprises bancaires
brésiliennes; tous deux défendent ici l’idée d’un renforcement de la législation pour assurer une meilleure représentativité des groupes sous-représentés. Si cette mise en
perspective historique et sociologique plaide pour de telles
interventions, il n’en demeure pas moins qu’elles continuent de poser des problèmes au principe d’égalité, qu’elles peuvent entrainer des effets pervers pour ceux et celles
qui en sont les bénéficiaires et qu’elles rentrent parfois en
contradiction avec certains principes de base de la vie commune. Ce qui nous amène au deuxième type de tension.
La tension universalité/diversité
Une deuxième tension a en effet surgi dans de nombreux
pays en relation avec la gestion de la diversité. C’est la
tension entre diversité et universalité. Elle a été provoquée à la fois par l’apparition de pratiques et de comportements religieux observés en milieux de travail et dans
certaines institutions publiques et par les revendications
de la reconnaissance de certains droits et pratiques dans
les univers professionnels qui remettent en cause l’universalité des droits, telle qu’elle est vue par la tradition occidentale. Si, en matière religieuse, la question du foulard à
l’école ou de la burqua en a cristallisé dans les dernières
années en Europe, notamment en France et en Belgique,
voire au Canada, l’essence, d’autres cas moins médiatisés
9
Management et Diversité : lignes de tension et perspectives
mobilisent régulièrement les gestionnaires et les responsables administratifs : mise en place de lieux de prière sur
le lieu de travail, respect des interdits alimentaires, prise
en compte des périodes de jeûne, port de signes religieux,
exigence de séparation des sexes, contestation du contenu
des enseignements... Ces situations que l’on retrouve également dans de nombreux pays industrialisés, sont vécues
de manière particulière en France car elle pose le rapport à
la laïcité.
Comme chacun le sait, la France est un pays qui reconnaît la liberté de croyance mais qui a séparé dans la plus
grande partie de l’Hexagone, les départements concordataires d’Alsace-Moselle faisant exception à cette règle,
les confessions religieuses et l’Etat. Ce qui veut dire, que
les institutions publiques sont, par définition, laïques, la
laïcité garantissant l’exercice de la liberté de conscience,
notamment en matière religieuse. C’est donc influencé par
cet esprit républicain que la commission Stasi a été l’inspiratrice d’une loi passée en 2004 qui a interdit dans les
écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou
tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement
une appartenance religieuse.
Trois articles de ce numéro, celui de Géraldine Galindo
et Joëlle Surply, celui de Eléonore Marbot et de Brigitte
Nivet et celui de Yvan Barel et Sandrine Frémeaux s’inscrivent parfaitement, chacun à leur manière, dans les débats
qui ont cours actuellement dans le contexte français où la
conception républicaine du vivre ensemble et le définition
du citoyen sont interpellées par différentes demandes d’ordre religieux ou sociales (Barth, 2012, Banon et Chanlat,
2012). Mais de tels débats se retrouvent aussi en Amérique
du Nord (Hicks, 2003), notamment au Québec (Bouchard
et Taylor, 2008) et dans d’autres pays européens (Ozbilgin
et Tatli, 2008), voire ailleurs dans le monde, notamment en
Israël ou en Tunisie.
La situation se vit toutefois autrement en Amérique du
Nord où la notion d’accommodement raisonnable est venue
baliser le rapport entre le religieux et le profane dans des
États aussi laïcs. Par exemple, des accommodements (port
du foulard, lieu de prière, congé, etc.) peuvent être autorisés
dans la mesure où ils n’imposent pas de coûts irraisonnables à l’entreprise ou à l’organisation et s’ils n’entraînent
pas de conséquences négatives pour les autres employés
ou d’autres bénéficiaires de services. La loi québécoise,
par exemple, encadre ces pratiques par l’intermédiaire du
Tribunal des droits de la personne. S’il se dégage une jurisprudence de ces décisions, celle-ci fait force de loi seulement si la décision d’accommoder ne cause aucun préjudice
à l’entreprise (à l’organisation) ou à d’autres personnes.
Chaque cas est traité séparément, et il s’agit chaque fois
d’un cas individuel (une personne) et non pas d’un droit
accordé à une collectivité.
La tension performance/ diversité
La question de la gestion de la diversité, comme nous
l’avons vu, est dans une large mesure poussée par des
objectifs d’efficacité et de performance. Si, selon la nature
de l’organisation (privée, publique, coopérative ou associative), les finalités peuvent bien sûr variées, il reste que
le bon fonctionnement demeure une exigence permanente
pour le management. Plusieurs éléments de la diversité peuvent alors jouer pour ou contre ces impératifs.
En effet, la diversité culturelle n’est pas toujours un
atout. Elle peut susciter de nombreux problèmes. C’est la
raison pour laquelle une sous-discipline du management,
le management interculturel (Barmeyer et Chanlat, 2004;
Davel, Dupuis et Chanlat, 2008) s’est constituée, au cours
des vingt dernières années, pour y faire face. La recherche
met bien en évidence combien les relations interculturelles
ne sont pas toujours sources d’enrichissement mais peuvent être problématiques et affectées la performance des
organisations concernées (Chevrier, 2000; 2012; Dameron
et Joffre, 2007). La mondialisation des échanges, le nombre de fusions et acquisitions, la cosmopolitisation de nos
sociétés, les nombreuses négociations internationales et la
formation d’unions régionales, notamment la construction
européenne, servent de cadre à de telles réflexions.
La volonté des uns rencontre en effet toujours celle
des autres. Or, chacune de ces volontés reposent la plupart
du temps sur des représentations fort différenciées de la
manière de vivre ensemble.
Dans le cas de la gestion de la diversité, le postulat de
base est bien sûr que celle-ci est tout à fait positive pour
toute organisation. Et qu’il faut donc mettre en place les
conditions adéquates pour exploiter ces différences sources
d’enrichissement, d’innovation et de performance. Car il
est un fait également noté par la recherche que l’innovation
passe par les déviants (Alter, 2002; 2012), que la diversité
est essentielle dans un environnement varié, que des regards
multiples sont sources de développement et qu’une organisation qui est ouverte aux différences est mieux perçu
par le corps social. Pourtant, la diversité n’est pas nécessairement source de performance dans les organisations;
la diversité pose question. Si celui qui est différent peut
être source de richesse et d’innovation par le fait de penser
autrement, ou encore d’être connecté à d’autres formes de
réseaux sociaux, il a également un déficit initial de socialisation et porte en lui le risque du communautarisme et de
l’enfermement.
En ce sens, les recherches sur la performance de groupes diverses présentent des résultats ambivalents. Certains
travaux mettent en exergue leur capacité d’innovation et de
créativité. Les travaux de Crozier et Friedberg (1977) par
exemple mettent en évidence le rôle du marginal sécant,
capable de connecter deux réseaux dans une organisation.
De même, les recherches de Watson et alii (93) ou Distefano
(2000) révèlent la richesse du processus de décision au sein
10
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
de groupes diverses, et la capacité de trouver des solutions
plus innovantes quand des points de vues différents peuvent
être connectés.
Cependant, d’autres travaux soulèvent les difficultés
de la gestion d’équipes diverses. Les théories de l’identification sociale montrent combien l’existence de différents sous groupes, différentes communautés au sein d’une
même équipe, peut exacerber le clivage communautaire
et renforcer le sentiment d’appartenance au sous groupe.
(Hogg et Abrams, 1999; Hewstone, Rubin and Willis,
2002). L’équipe étant perçue comme une menace à l’appartenance identitaire au sous groupe, l’inclusion des différentes communautés peut générer des réactions défensives
et affaiblir la capacité d’intégration au sein d’un groupe
plus large (Milliken and Martins, 1996; Hornsey and Hogg,
2000; Shapiro et al., 2002; Jayne and Dipboye, 2004).
Une explication à cette ambivalence de la littérature
en sciences de gestion dans la relation entre diversité et
performance peut se trouver dans les travaux fondateurs
de Durkheim sur la division du travail social et la mise en
évidence de deux formes de cohésion sociale : la solidarité organique, fondée sur la différenciation, et la solidarité
mécanique, basée sur la ressemblance (Durkheim, 1930).
Cette dualité du social permet d’éclairer la nature des relations coopératives suivant un double mécanisme : la coopération complémentaire et la coopération communautaire
(Dameron 2002; Dameron, 2004) La coopération complémentaire repose sur la différenciation des individus et
la recherche de ressources complémentaires. Elle se développe suivant des modalités stratégiques, c’est-à-dire de
calcul individuel dans la relation à autrui. Si la coopération
complémentaire repose sur la différence, c’est la quête de
ressemblance qui génère la coopération communautaire. En
effet, cette coopération est fondée sur l’appartenance à un
groupe auquel l’individu s’identifie. Elle se développe dans
la construction, la protection et la défense de cette identité
perçue comme commune. Les travaux sur l’identité sociale
(Ashforth & Mael, 1989; Hogg & Abrams, 1999; Tyler,
1999) analysent les mécanismes cognitifs sous-jacents à
la coopération communautaire. Suivant la forme de coopération étudiée, souvent peu explicitée dans les travaux
de recherche, les avantages ou les difficultés seront mis
en avant. La coopération complémentaire reposant sur la
diversité des ressources, elle est favorisée par la diversité
des membres. La coopération communautaire étant fondée
sur le besoin d’appartenance, la diversité des membres, à
travers les différentes valeurs qu’ils portent, sera perçue
comme une menace à l’appartenance identitaire des différents sous groupes. Il s’agit alors de différencier l’analyse
en fonction de la nature des relations coopératives étudiées.
L’article présenté dans ce numéro par Margie Bruna et
Mathieu Chauvet fait à cet égard un tour exhaustif de cette
question, celui de Annie Cornet, Pete Stone et Hédia Zannad
montre combien la construction d’indicateurs pour mesurer les évolutions en la matière sont à la fois nécessaires
mais aussi des construits sociohistoriques situées et celui
de Christine Naschberger et Sana Guerfel-Henda met l’accent sur un réalité moins étudiée, celle de la PME française,
en montrant par ailleurs que l’intégration de la diversité
peut amener celles-ci d’une approche traditionnelle en ressources humaines (RH) vers une approche renouvelée dite
stratégique.
Quelles perspectives de recherches dans le domaine
du management de la diversité ?
Les travaux qui existent aux Etats-Unis pour mesurer
l’efficacité des programmes et politiques en matière de
diversité débouchent toutefois sur des résultats mitigés. En
effet, une grande étude longitudinale américaine portant sur
la période 1971-2002, menée auprès de 708 grandes entreprises privées, a montré que des trois type de pratiques étudiées, les pratiques les plus efficaces en matière de diversité
étaient celles qui assignaient des responsabilités organisationnelles très précises (autorité et expertise) à travers la
mise en place de programmes, d’équipes, de comité et de
managers dédiés spécialement à la diversité. Ces stratégies
de type organisationnel étaient efficaces pour accroître la
proportion d’employés et de managers noirs (hommes et
femmes) et de femmes. En revanche, les séances de formation pour combattre les préjugés et les stéréotypes, tout
comme les séances individuelles de feedback, ont montré peu d’efficacité à cet égard. Dans certains cas, elles
entraînaient même une réaction négative en retour. Enfin,
les résultats concernant le dernier type de pratiques, mis
en place pour rompre l’isolement social des femmes et des
minorités discriminées via le mentorat et la mise en réseau,
se sont également avérés décevants.
En Europe, la réflexion met aussi l’accent sur une
stratégie organisationnelle intégrée, certains insistant sur
la création d’espaces de parole adéquats d’une part, pour
échanger sur les pratiques et d’autre part, pour exprimer
ces propres difficultés dans la gestion au quotidien de cette
diversité. La dynamique sociale au travail se fondant sur
une authentique reconnaissance des apports de chacun, il
est en effet essentiel de s’assurer de créer des médiations
expressives dans les univers professionnels. C’est la seule
façon de dire aux autres qu’ils ou elles existent et leur éviter
de rester invisibles aux yeux de tous.(Cornet, Warland et
Pinson, 2008; Mutabazi et Pierre, 2008))
Dameron et Joffre (2007) montrent que les représentations des différences culturelles sont souvent mobilisées
dans un sens négatif, avec effets miroirs. En mettant en évidence les facteurs modérateurs de la perception négative
de la diversité et son impact dans le développement de la
coopération au sein d’un groupe (Dameron et Joffre, 2007),
il est possible de repérer quatre voies de recherche qui peuvent s’avérer potentiellement riches d’enseignements pour
la gestion de la diversité.
Premièrement, la connaissance intuitu personae s’avère
être un modérateur puissant de l’usage de stéréotypes
11
Management et Diversité : lignes de tension et perspectives
négatifs. Pour favoriser cette connaissance interpersonnelle, une meilleure compréhension de la construction des
réseaux sociaux, notamment en dynamique pour pouvoir les favoriser et les orienter, est nécessaire (Ingram et
Morris, 2007). En parallèle, les recherches sur les relations
affectives dans les organisations, comme l’amitié par exemple, restent trop rares en sciences de gestion et sont pourtant
également nécessaires pour comprendre l’envie de coopérer
(Alter, 2009). .
Les effets structurels et de management du groupe
peuvent être de puissant vecteur pour éviter le sentiment
d’injustice et développer le sentiment d’appartenance : les
travaux sur l’identité sociale constituent ainsi une troisième
voie de recherche pour repérer comment favoriser l’identification à ce groupe secondaire qu’est l’entreprise, pour
reprendre la classification des groupes d’Anzieu et Martin.
Enfin, dans un univers moins hiérarchisé, plus en réseau,
le leadership et le rôle du leader sont des dimensions clefs
pour favoriser et animer l’esprit d’équipe. Il s’agit de réinventer, dans cet univers organisationnel plus flou du point
de vue de sa structure, où les lignes de rattachement sont
multiples, des modalités de leadership qui dépassent très
largement une légitimité de statut.
******************
Comme nous venons de le rappeler, la question de la
diversité et du management n’est pas une question récente
pour les sciences du social, voire pour le management luimême. Faire du collectif avec un ensemble varié de personnes est par définition l’objet même de la gestion. Car
tout groupe humain est toujours plus ou moins diversifié
en termes de sexe, de classe d’âge, de formation, de métier,
d’origine sociale, et d’origine ethnique.
Si l’impératif gestionnaire vise justement, depuis
l’émergence du management en tant que corps de principes
institués, l’efficacité d’un collectif organisé, nous avons vu
que les transformations sociales des trente dernières années
ont amené des interrogations et des débats dans de nombreux pays industrialisés et notamment en France, autour
de l’idée de gérer ces nouvelles différences. Ce numéro
spécial de Management international à travers les différentes et riches contributions qui sont présentées en est une
autre illustration.
Or, penser la diversité, c’est, nous venons de le voir
dans cette introduction, plusieurs choses à la fois. C’est tout
d’abord comprendre les différences en rendant intelligible
les cadres symboliques dans lesquels les personnes pensent
(D’Iribarne, 2008).. Tel est l’objet du management interculturel (Davel, Dupuis et Chanlat, 2008. Penser la diversité,
c’est ensuite rendre compte des inégalités et des problèmes vécus par des personnes qui dans un contexte social
donné se retrouvent discriminés, victimes de racisme, d’homophobie, voire exclus (Barth et Falcoz, 2008; Cornet,
Warland et Pinson, 2008; Ozbilgin et Tatli, 2008)). Tel est
l’objet des sciences du social s’intéressant à la diversité et
en particulier à son management. Penser la diversité, c’est
enfin tenter d’équilibrer au mieux les différences de chacun (groupes et ou individus) avec les principes du vivre
ensemble dans une société démocratique (Weil, 2005;
Schnapper, 2007). Tel est l’objet de la gouvernance politique. En d’autres termes, penser la diversité aujourd’hui,
c’est, comme le montrent chacun à leur manière les articles
regroupés dans ce numéro, participer à la construction d’un
vivre ensemble qui tiennent compte dans chaque contexte
concerné à la fois des nouvelles réalités du monde, des aspirations individuelles de chacun et des idéaux démocratiques
qui nous guident.
Les organisations et les entreprises, en raison du rôle
qu’elles jouent dans la dynamique socioéconomique
contemporaine et les gestionnaires qui en ont la responsabilité ne peuvent pas l’ignorer. Car les pratiques managériales, en tant que pratiques sociales situées, exigent pour
les comprendre une double anthropologie, une anthropologie générale qui s’intéresse à l’être humain générique et
une anthropologie singulière qui s’intéresse aux personnes
concrètes et en situation. Ces pratiques étant au cœur des
questions débattues de nos jours autour de la notion de
diversité, la réflexion managériale ne peut pas éviter de faire
ce détour anthropologique. Car, au-delà de cette question,
nous avons vu qu’un autre impératif d’ordre éthique et politique se dessine : construire des mondes sociaux qui respectent à la fois les valeurs qui nous guident et les individus et
groupes concernés qui en font partie. Tel est le défi que les
acteurs sociaux du monde des organisations du XXI siècle
devront également surmonter. Par la même, nous remettons
au premier plan, comme le réclamait déjà Marcel Mauss en
1920, l’étude et la discussion de ce qui fonde l’harmonie
sociale dans ces nouveaux mondes organisés que nous sommes en train de construire où la définition culturelle de soi
a pris une importance croissante.
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13
The paradox of diversity in leadership
and leadership for diversity*
Diane Bebbington
Leadership Foundation for Higher Education
Peer House
Résumé
Le paradoxe de la diversité est tel que les
interventions réussies en matière de diversité nécessitent le soutien du leadership
alors même que la diversité dans le leadership fait défaut. Afin d’explorer ce paradoxe au Royaume-Uni, nous examinons
les progrès dans la diversité des rôles de
leadership dans l’enseignement supérieur,
secteur dans lequel il existe beaucoup de
soutien à la diversité.Grâce à un examen
critique et exhaustif de la littérature, nous
illustrons la persistance des inégalités qui
entravent la diversité et l’inclusion dans
le leadership. Nous étudions les formes
saillantes de l’inégalité en matière de leadership dans l’enseignement supérieur, y
compris la recherche sur le genre, l’origine ethnique, la classe sociale, l’orientation sexuelle ainsi que le handicap. Nous
démontrons que la diversité dans le leadership demeure un défi important dans
l’enseignement supérieur. A travers cet
exemple, nous démontrons que le leadership occupe un espace contradictoire
en termes de diversité démographique, à la
fois en tant qu’objet de critiques en raison
de son profil homogène mais également en
tant que force essentielle pour progresser
vers une plus grande égalité. Nous étudions le paradoxe de la relative homogénéité du leadership dans l’enseignement
supérieur contre ses rôles de champion et
de promoteur de l’égalité. Il s’agit d’identifier les moyens par lesquels la diversité
démographique ainsi que le potentiel du
leadership dans l’enseignement supérieur
peuvent être encouragés.
Mustafa Özbilgin
Université Brunel de Londres, Université Paris-Dauphine,
Université Koç à Istanbul
Abstract
The paradox of diversity is that successful diversity interventions require leadership support when diversity in leadership
positions is so evidently lacking. In order
to explore this paradox in the UK, we
examine progress towards demographic
diversity in leadership roles in the higher
education sector, a sector in which there
is much espoused support for diversity.
Through a critical and comprehensive
review of the literature, we illustrate the
persistent nature of inequalities that hinder diversity and inclusion in leadership.
We examine studies on salient forms of
inequality in higher education leadership
including research on gender, ethnicity,
class, sexual orientation and disability. We
show that leadership diversity remains a
significant challenge for the higher education sector. Drawing on the example of
this sector, we demonstrate that leadership
occupies a contradictory space in terms of
demographic diversity, both as the focus
of criticism due to its homogeneous profile and counter-intuitively as an essential
force for progress towards greater equality.
We investigate the paradox of the relative
homogeneity of higher education leadership set against its role for championing
and promoting equality and identify ways
in which demographic diversity as well as
the progressive potential of higher education leadership may be fostered.
Keywords: diversity, equality, leadership,
higher education, gender, ethnicity, disability
Mots clés : Diversité, égalité, leadership,
enseignement supérieur, genre, origine ethnique et handicap
T
Resumen
La paradoja de la diversidad trata de que
las intervenciones exitosas de la diversidad
requieren apoyo de la direccion cuando la
diversidad en las posiciones de liderato està
obviamente faltando. Para explorar esta
paradoja en Gran Bretana, examinamos el
progreso hacia la diversidad demografica
en los papeles del liderato en el sector de
la educacion/ensenanza superior, sector en
el cual se encuentra mucho apoyo para la
diversidad. A través de una resena critica y
comprensiva de la literatura, ilustramos la
naturaleza persistente de las inegualdades
que dificultan la diversidad y la inclusion
en el liderato. Examinamos los estudios
sobre las formas salientes de inegualdad
en la direccion de la educacion/ensenanza
superior incluso la investigacion en campos
de genero, etnicidad, clase, orientacion
sexual and discapacitad. Ensenamos que
la diversidad del liderato sigue siendo un
desafio significativo para el sector de la
ensenanza superior. tomando ejemplo en
este sector, demostraremos que el liderato
ocupa un espacio contradictorio en términos de diversidad demografica, ambos
como el enfoco de una critica debida por
su perfil homogeneo y, de forma contraintuitiva, como fuerza essencial para el
progreso hacia una igualdad mas grande.
Investigamos la paradoja de la homogeneidad relativa de la direccion de la educacion/
ensenanza superior en oposicion con su
papel de lucha y promocion de la igualdad
y identificamos maneras de una posible instigacion tanto de la diversidad demografica
como el potencial progresivo de la direccion de la educacion/ensenanza superior.
Palabras claves: Diversidad, Igualdad,
Liderato, Direccion, Educacion/Ensenanza
Superior, Género, Etnicidad, Discapacitad
he diversity management literature suggests that leadership support is a prerequisite for the effective design
and intervention of diversity interventions (Nishii and
Özbilgin 2007). However, the literature fails to consider
that the leaders from whom we expect support for diversity
interventions are not themselves from a diverse group. We
* We would like to thank Jamila Alaktif and Dimitri Esteves Gonçalves
for translating the abstract to French and Spanish respectively
* We thank the Leadership Foundation for Higher Education (LFHE)
who commissioned the report on which this paper is based (LFHE
2009).
15
The paradox of diversity in leadership and leadership for diversity
demonstrate in this paper that where leadership is homogeneous, leadership support may remain a naïve expectation.
We have chosen the higher education sector as a case example, given that it is a sector characterised by its readiness to
embrace the liberal values of equality and diversity, despite
scant evidence of change in the demographic diversity of
its leadership.
In particular, we seek to address the question of why, in
spite of various initiatives, the leadership of higher education is starkly lacking in diversity (Race for Opportunity
2010) and at the same time why ‘inequality regimes’ (Acker
2006), processes through which gender, class and ethnicity-based inequalities are entrenched, persist within the
sector. Disabled people, women and ethnic minorities are,
for example, still markedly underrepresented in positions
of authority, including as Vice-Chancellors in UK higher
education institutions. While demographic data are not yet
available on those in senior management positions in the
UK, it is well-known that only one minority ethnic ViceChancellor has ever been appointed as head of a British
institution (Bahra 2011). Key objectives of the research
on which this paper is based, were to synthesise the literature on leadership and diversity primarily with reference to
disability, race, gender, religion or belief, sexual orientation, age and socio-economic group in order to explore the
paradox of diversity and leadership in the higher education
sector.
The lack of demographic diversity in the upper echelons of higher education as highlighted in recent reports
(Leadership Foundation for Higher Education 2009, Race
for Opportunity 2010) contradicts the strengthening legal
and policy contexts of anti-discrimination that render many
forms of inequality illegitimate and unlawful in the UK.
The Equality Act 2010 aims to harmonise existing discrimination laws, strengthen them and enhance progress
towards equality. The Equality Bill was introduced following the amalgamation in 2007 of the Commission for Racial
Equality, the Equality Opportunities Commission and the
Disability Rights Commission into the Equality and Human
Rights Commission (EHRC). The EHRC has also taken on
responsibility for other aspects of equality including sexual
orientation, age, religion and belief and human rights. Set
in this context, the paucity of progress towards diversity in
leadership positions in higher education deserves careful
scrutiny.
Aside from the persistent underrepresentation of certain
groups, it is crucial to consider the role of leadership itself
in tackling inequalities, a point that has been made in two
key studies on the experiences of disabled and black staff in
further and higher education (Commission for Black Staff
in Further Education 2002, NIACE 2008). Both reports
highlight the vital role of leadership in tackling inequalities.
Throughout the NIACE report’s recommendations, emphasis is placed on the key importance of good leadership stating for instance, that:
The key message flowing from our findings and other
evidence is that there is widespread institutional discrimination in the lifelong learning sector. Indeed, some
organisations are not compliant with their Disability
Equality Duty. This is in large part the result of the systematic failure in public policy to address the needs of
disabled staff. Effective leadership and management
will be needed to counter this and achieve disability
equality. (p.11, NIACE 2008)
Lumby (2007) not only concurs with this view, but in
addition states that the role of leadership with regard to
equality is coming under increasing scrutiny. Though leaders may not hold all the power and access to resources,
they have the potential to disrupt power relations through
their formal role of authority and access to other sources of
power. They can validate the experiences of disempowered
groups and provide support in times of backlash to equality
initiatives. The management of diversity in higher education seems increasingly justified, given that higher education institutions are becoming more diverse in terms of the
student body with women for example, now constituting
more than half of all UK undergraduates (Higher Education
Statistics Agency 2012). Furthermore, the higher education
workforce is becoming more diverse as a result of the globalisation of knowledge and the crossnational transference
of professionals engaged in academic research (Smetheram
et al 2010). Brown (2004) contends that given the inevitability of more diverse staff and student bodies, higher
education institutions ‘…do not only have a responsibility
but must assume leadership position on this crucial issue of
preparing citizens for the world they now face’ (p.21).
We first explain the methods of our review and go on to
explore the paradox of leadership and diversity through a
number of themes that emerged in our review of the extant
literature.
Methodology
This study draws on a review of the literature which was
funded by the Leadership Foundation for Higher Education,
a body set up in 2004 to provide support and advice on
leadership, governance and management for UK universities and higher education colleges.
The research comprised of two elements – convening
an expert group of academics experienced in areas relating to the topic being studied and carrying out an in-depth
literature review. An expert panel was convened in order
to include experts across salient strands of diversity such
as gender, ethnicity, religion, sexual orientation, disability and age. Members of the panel were invited to suggest
leads for the literature review across significant themes, to
comment on drafts of the report and highlight areas for further development. This is common practice in the UK for
national reports and serves to solicit critical peer review for
the research. The panel was made up of five experts chosen
16
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
on the basis of their significant contributions to the field
of equality and diversity. They had extensive knowledge of
their fields, having published widely in disability studies,
women’s employment, diversity and leadership, the sociology of race and ethnicity and diversity management. The
panel attended two face-to-face meetings with the first held
at the start of the project and the second, four months later.
Members were asked to give an overview of their own perspectives on the issues and project. This was followed by a
discussion of key themes emerging from the literature. A
note of the meeting was then circulated together with a list
of articles and books mentioned at the meeting.
The group kept in touch via email. This method of communication proved to be a valuable forum for debate and
discussion as well as providing a space to post other relevant publications. Contact amongst the group members was
maintained almost to the point at which the final draft of
the report began to be drafted. The group met a second time
to discuss a draft interim report that the researcher had prepared (the first author of this paper). Members were asked
to give feedback on the final report, which then informed
the development of the final document.
The guidance of the expert group was critical to the success of the project. Key issues emerged in the course of
the discussions, including the variety of meanings associated with concepts such as ‘diversity’, ‘identity’ and ‘diversity management’, the sorts of problems that marginalised
groups face when studying or working in higher education
and the types of experience they encounter when promoted
to leadership positions.
An extensive literature search was carried out using
journals on the sociology and psychology of education,
educational administration and public sector management,
management in general, higher education studies, disability studies, race studies, women’s studies and comparative education. These were identified using the collections
of the Newsam Library and Archives of the Institute of
Education, University of London that holds extensive collections of current and historical materials on education and
related areas of social science. Further journals were identified through citation in our initial database of publications.
All back numbers in the years 2002-09 were searched using
the journal publishers’ websites. From this search around
200 key papers were identified. Key reports were identified, particularly those published by commissions set up to
investigate the experiences of minority groups in higher and
further education. Books and book chapters relevant to the
topic were also identified. The literature was then grouped
into thematic areas and used as a basis on which to structure
the final research report.
Key themes that emerged from the literature review
included the nature of organisational inequalities on the
basis of disability, gender, sexual orientation, race, class
and other factors, leadership theory and the suppression
of ‘difference’, challenges to traditional leadership theory
emanating, for example, from the disability movement,
contextual issues such as new managerialism and neoliberalism and their impact on higher education, equity-related
themes in higher education research including scholarship and equity and issues around career advancement and
diversity. The final theme was around leading for diversity
in educational contexts. While these themes emerged in
the main report, we focus in this paper on the paradox of
leadership.
Our analysis begins by examining the leadership of
higher education through the lens of diversity. We look at
chief executive level (Vice-Chancellor), governance and
management. We then consider what the evidence has to
say about organisational practices that appear to perpetuate
inequalities. Next, the paper seeks to explain why inequalities persist and even appear to be worsening. Finally, we
consider initiatives and research to which the sector can
look in order to assist it in better championing equality and
fostering demographic diversity.
Diversity in higher education leadership
Gender, ethnic and class penalties are reflected in the
demographic characteristics of UK vice-chancellors (VCs).
Breakwell and Tytherleigh (2008) analysed the characteristics of this group using data from the period 1997 to 2006
inclusive and found that almost all VCs appointed since
1997 were white, twenty-three per cent had been undergraduates of either Oxford or Cambridge and 28 per cent
had been postgraduates at these universities. Furthermore,
VCs in the pre-92 universities, those institutions reputed
to be more research focused, were twice as likely to have
been to Cambridge or Oxford as VCs in post-92 universities, many of which were polytechnics before acquiring
university status. Additionally, the post-92 institutions have
played a key role in widening access to higher education.
In terms of gender, 85 per cent of VCs were male. Fewer
women VCs were married or living with a partner (68 per
cent) compared with 96 per cent of the male VCs. A further
difference in personal circumstances was that half of female
VCs had children compared with 81 per cent of male VCs.
Disciplinary backgrounds also varied by gender; though the
majority of VCs appointed in this period came from social
science backgrounds, all 17 women VCs who took up
post were social scientists. The male VCs additionally had
backgrounds in science, business administration, arts and
humanities, medicine, law and accountancy and technology
and engineering. As mentioned earlier, only one non-white
VC is leading a UK higher education institution and given
that ethnic minorities are better represented as students in
higher education as a proportion of their total population,
albeit concentrated in the less prestigious institutions (Race
for Opportunity 2010), it must be asked why this is not mirrored in the leadership of higher education institutions.
The paradox of diversity in leadership and leadership for diversity
A critical locus of influence in higher education institutions is the governing body (or Court as it is termed in
Scotland), defined by the Committee of University Chairs
(CUC) (2009) as having collective responsibility for overseeing the activities of institutions, determining its future
path and nurturing an environment that will achieve the
institution’s mission and maximise the potential of students. In addition, governing bodies should ensure compliance with the statutes, ordinances and provisions regulating
institution and their frameworks. The CUC guidance states
that the governing body should ‘ensure non-discriminatory
systems are in place to provide equality and diversity of
opportunity for staff and students (p.10).
In terms of the diversity of the governing bodies themselves, data on their demographic profile is not collected on
a regular basis, thus necessitating reliance on survey data
and anecdotal evidence. A report by Equality Challenge
Unit (2008) acknowledged the limitations of the data in
this area. A snapshot produced for research by Cranfield
University on how governing bodies engage with equality
and diversity issues (Anderson et al 2009) showed that not
all the governing bodies who participated in their research
monitored for gender composition (73 per cent), and even
fewer monitored for race (46 per cent), age (40 per cent),
disability (33 per cent) and religion (eight per cent). As
regards the actual composition of the governing bodies,
women were just over 30 per cent of governors and 17 per
cent of chairs. The demographic profiles of governors by
ethnicity and disability were not available due to incomplete data.
Similarly, few data are available at management level,
although a study of Scottish further and higher education
(McTavish and Miller 2007) produced a wealth of quantitative data on the gender balance of management in these sectors indicating that women in Scotland are 25 per cent more
likely than men to enter higher education as students but
they make up only 40 per cent of academic staff. Women
in higher education in Scotland are underrepresented in the
highest positions and are overrepresented in non-permanent, part-time jobs. Women make up 14 per cent of professors in Scotland. Seventy per cent of Court members are
men. There is a gender pay gap of 18 per cent. There are
only three women principals of Scottish universities, which
is 15 per cent of the total. The Scottish statistics thus also
display a dismal picture of gender disparities across the sector including in roles at leadership level.
Gaining a professorship is clearly an important
stepping-stone to a senior position in higher education,
Breakwell and Tytherleigh (2008) for instance, found that
82% of the VCs in their study were professors. Recent data
indicate that white men continue to dominate the professoriate; an analysis of the 2009-10 HESA dataset showed that
76 per cent of UK national staff and 67 per cent of non-UK
national staff in professorial roles were white males (ECU
2011). This contrasts starkly when ethnicity is taken into
17
account; black and minority ethnic (BME) UK national
men made up three per cent of the professoriate, BME UK
national women made up one per cent, non-UK BME men
made up five per cent and non-UK BME women were one
per cent. While there is progress in terms of gender representation, though slow, when gender and ethnicity are considered together, representation remains severely lacking
for minority ethnic women in the sector.
While quantitative data are useful in providing an
overview, qualitative data exploring the experiences of
women and minority groups in higher education reveal
ways in which inequalities are enacted and reproduced at
the micropolitical level of organisations. Feminists and
Black researchers emphasize the importance of experiential
knowledge in uncovering and confronting many forms of
discrimination in the workplace. Maylor (2009) notes that
experience is valued both in Black Feminism and Critical
Race Theory and argues that the task of applying these
concepts to the experiences of Black women is crucial to
develop knowledge, understandings of Black women’s
research experiences, meanings that they give to these and
the forms of discrimination that they face.
Maylor (2009) discusses the experiences and challenges that Black female researchers encounter when they
carry out research, particularly when the research focuses
on such issues as equality, diversity and race. She describes
one incident in which her identity as a black academic
researcher is not recognised. A white, European visiting
academic assumes Maylor is a helper, leading Maylor to
speculate that her skin colour has caused this women to
assign her to a slower status position. This is in spite of
the fact that the visiting academic is a specialist in citizenship, a field which upholds (or pertains to uphold) such
values such as tolerance, respect and understanding of different cultures and religions. Maylor contends that as a
Black researcher working in higher education where the
majority of researchers are white, and the expectations of
funders and institutions are that the researcher is white, she
is placed with additional burdens:
Developing researcher/interviewee relationships can
take much longer when one is placed in an environment, which only serves to undermine your well-being
and positive sense of being Black. The experiences I
have encountered as a Black researcher have not only
made me more self-consciously aware of my identity
as a Black person, they have also set me apart as being
‘different’ and as being perceived as such by ‘outsider’
groups with whom I engage/undertake research with.
(p.60).
Maylor concludes that naming one’s experiences is a
positive way of dealing with experiences of racism while
undertaking academic research.
The approach of examining people’s experiences at
micro level is employed by Morley in her study of women
18
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
academics in Greece, Sweden and the UK (Morley 1999).
She contends that the conceptual framework of micropolitics reveals the subtle ways in which dominance is achieved
in academic organisations. She points out that it is in the
everyday practices of negative behaviours such as bullying,
manipulation and sabotage that competition and domination
are perpetuated, even though these behaviours may seem
inconsequential. Morley examines for example, the role of
feminism in pedagogical and teaching methods areas which
feminists consider sites for potential change. Morley’s
analysis reveals tensions and contradictions in pedagogy
that aims to be empowering but at the same time may be
based on simplistic notions of change (Morley 1999). In the
next section we explore a number of overarching themes
and perspectives that may account for multiple, persistent
forms of inequality in higher education and organisations
generally.
from Acker (2006) who argued that organisations are sites
of much economic and social inequality in the U.S. and
other industrial countries. Acker proposed the concept of
‘inequality regimes’ as a feature of all organisations that
could be characterised as ‘…loosely interrelated practices,
processes, actions and meanings that result in and maintain class, gender and racial inequalities within particular
organisations” (p.443). Inequalities are manifested in the
way leaders, managers and heads of department have more
power and pay than secretaries, production workers, students and so on. Acker points out that organisations vary in
the extent to which these differences exist and that inequality regimes are influenced by historical, political, social and
cultural factors.
A wide array of political, social and economic patterns
affects the way diversity and equality are regulated at work
(Özbilgin and Tatli 2011). In order to reframe the paradox
of relying on leadership to deliver diversity when leaders
tend to come from homogeneous backgrounds, we need to
explore historically significant patterns which have explanatory power in their specific context (Syed and Özbilgin
2009)
Acker places less emphasis on disability as a disadvantage in the labour market, even though it is well-documented that people with disabilities face substantial barriers
in the workplace (Danieli and Wheeler 2006). Absent from
Ackers’ analysis is any consideration of religion, sexual
orientation and other aspects of difference. Neither is there
a thoroughgoing analysis of intersectionality. The dangers
of overlooking intersecting forms of inequality are highlighted by Crenshaw (1991) who noted the feminist practice
of politicizing the experiences of women and the antiracist
practice of politicizing the experiences of people of colour
as if they were mutually exclusive. Marginalisation can
occur not only through material practices but also through
exclusion from discourses of equality and diversity.
In the particular context of Britain, patriarchy as an
on-going historical social system, Black Feminism as collective resistance against the tyranny of multiple forms of
inequality and neoliberalism as a political system deserve
our attention. In this section we explore how these social,
political and ideological patterns shape our understanding of
diversity and leadership. In order to explore how these three
historical patterns complicate our current understanding of
leadership and diversity in the UK, we have selected four
contemporary assumptions that collude to retain homogeneity in leadership positions in the UK. These assumptions
are the value- neutrality of leadership, elitism in leadership,
marketization and the neo-liberal turn in higher education.
Arguing that these assumptions are fundamentally flawed,
we illustrate their negative consequences on leadership
diversity in the UK.
Notwithstanding the above critique, Acker’s analysis
provides a useful reference point for examining inequalities in higher education. Data from the higher education
sector, both routinely-collected information and empirical
studies, indicate that the sector is riven with inequalities on
the basis of the factors mentioned above. Consonant with
Crenshaw’s research, people in higher education with intersectional identities are required to negotiate multiple barriers in order to achieve successful careers (Carter et al 1999,
ECU 2011). Morley (1999) usefully points out that organisations interact with the wider society in which power relations operate on the basis of patriarchy, heterosexism and
racism. Mills argues, for instance, that ‘organisational life
exists in a dialectical relationship to the broader societal
value system, each is reshaped by the other’ (Mills 1988,
quoted in Morley 1999).
The paradox of diversity and leadership reframed
Assumption one: value-neutrality of leadership
Patterns of inequality in higher education, to a great extent,
echo those found in organisations in general. Classical
organisational theory in the Weberian tradition depicted
bureaucracy in its idealised, rational form, as impersonal,
rule-governed and value-neutral (Pringle 1989). A major
challenge to this view, in particular the claim of valueneutrality and the lack of acknowledgement of racialised,
classed and gendered practices within organisations, came
Leadership theory, in common with organisational theory, has tended to suppress ‘difference’. Parker (2005), for
instance, points out that race and gender are suppressed and
neutralised in both traditional and feminist analyses of leadership. The value-neutrality of leadership is clearly questionable when considering who occupies the most powerful
positions in organisations and how behaviours within these
spaces reflect the cultural norms of the dominant group. It
has been pointed out in relation to disability, that the dominant construction of leadership connotes a leader who is not
disabled, with disabled leaders seen as a contradiction in
19
The paradox of diversity in leadership and leadership for diversity
terms (Foster-Fishman et al. 2007). This view is manifested
in data collected by the Disability Rights Commission
(DRC) (Disability Rights Commission 2006) that found
disabled people were less likely to be working as managers
and senior officials in the general workforce than their nondisabled counterparts. One of the most shocking findings
of the DRC briefing was that people with disabilities were
a small minority in senior positions in disability-related
charities with the RNID for instance, having only 13.6 per
cent of its managers with a hearing loss.
Further empirical evidence bringing into question the
value-neutrality of leadership comes from research in the
arena of British politics. The House of Commons provides
a stark example of how the norms of the dominant group are
woven into everyday organisational practices. In research
carried out by Whitehead (1999) the culture of the House
tends towards a ‘macho’ rather than consensual approach,
with one MP in Whitehead’s study commenting that
The macho, schoolboy’s way of doing things leaves a
lot to be desired. At times parliament just sounds a real
rabble – you can’t believe the heckling (p.23).
Several female MPs with whom Whitehead spoke had
experienced physical, emotional and verbal abuse by male
politicians in the parties. This included being groped and
called ‘whores’ and ‘slags’. A further manifestation of the
dominant masculinist culture was the atypical lifestyle
required of female MPs involving constant travelling, high
pressure, and for women with families, an apparent role
reversal in the traditional sexual division of labour, with
partners carrying out the majority of domestic work and
childcare. This research led Whitehead to conclude that the
House of Commons ‘remains a culture in which the masculine subject is privileged……….and where competition,
aggression and adversarial practices are constitutive of ‘the
way we do things around here’ (p.24).
Several studies undertaken in the 1990s highlighted
the presence of sexual harassment experienced by women
academics in UK universities (Bagilhole and Woodward
1995, Morley 1999). Bagilhole and Woodward identified
a range of experiences in response to direct and indirect
questioning including verbal comments, physical conduct
and verbal requests. They suggested that sexual harassment
was likely to be underreported and underestimated and that
experiences of harassment could have a detrimental effect
on women’s confidence and commitment to the academy.
The strong presence of gender as a construct in academic
work and the dominance of masculinity was highlighted by
one of the research participants in this study:
A certain way that academics behave is defined by
men because they were there first. You have to divorce
oneself from one’s femininity in order to be taken seriously as an academic. You have to be harder, more
professional because of all the preconceptions about
your ability which you have to overcome before people
actually see you (p.49).
To sum up, value-neutrality remains a widespread
assumption in the ways leadership is practiced when the
evidence suggests that leadership practices suffer from a
wide array of biases. While contemporary studies reveal
power imbalances on the basis of class, gender, race and so
on in the practices of leadership, the next section highlights
how the founding assumptions of elitism in leadership continues to haunt its enactment in the present day.
Assumption Two: Elitism
Leadership is a concept founded upon elitist assumptions.
Elitism is also a historically significant pattern in the higher
education sector. Leadership in higher education, therefore, is predicated on doubly strong assumptions of elitism. The bourgeois university has its roots in the Ancient
Greek gymnasia, libraries and academies. Reserved for the
elite, the Greek universities were, according to Faulkner
(2011), developed in part as ‘..a wider elite reaction against
democracy’ (p.29). Faulkner points out that in spite of challenges from popular movements at various points in history, the possibility for revolutionary change was hampered
by knowledge compartmentalisation and limiting access
to the social elite, an elite that was predominantly male
(Rich 1979). This elitism was not seriously challenged until
after the Second World War when the mass expansion of
higher education gave rise to the entry of students from
relatively ordinary backgrounds. This placed pressure on
the rigid frameworks that constrained knowledge production and was one of the factors that led to the international
student revolt in 1968 which Faulkner argues was mounted
‘….against academic structures and curricula that marginalised radical and generalising social theory’ (p.33).
Faulkner’s analysis is corroborated by Rich (1979) who
similarly describes the university up until the 1960s as a
privileged enclave, though somewhat more defensible than
other sites of privilege. According to Rich, the university
was not sufficiently in touch with power abuses and uses
and was ‘….romanticized as a place where knowledge is
loved for its own sake, every opinion has an open-minded
hearing’ (p.132). Rich also notes the radical critique of
higher education that emanated from the student movement
of the sixties, exposing the racism of higher education and
its curriculum, its support for political, economic and military activity, its use as a base for weapons research and its
role as a site for the reproduction of the power of white,
middle-class men.
Elitist assumptions in higher education and its leadership appear to be here to stay as the current government in
the UK is concentrating funding towards a small number of
elite, ‘world-class’ research universities. Research funding
in England will be further concentrated in large researchintensive universities because of a redistribution of funds
20
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
allocated by the Higher Education Funding Council for
England (Times Higher Education 2012). Unpacking elitist assumptions across multiple levels of social, economic
and political life and in higher education leadership is
one of the first steps towards questioning the interlocking
mechanisms that foster the otherwise invisible causalities
between inequalities and elitist assumptions made around
leadership.
Assumption three: marketization can improve
regulation
The last three decades have witnessed the exposure of economic sectors in the UK that were previously sheltered
from market and financial logics to marketization and financialisation. These include health care, higher education, the
railways and, more recently, the probation service. Morley
(1999) charts the broadening of the higher education market in the post-war period, asking whether ‘more means
less?’ (p.32). In the period before the Second World War
only three per cent of the UK population, mainly young
men from the ruling classes, attended university. Driven by
the view that improving access to higher education would
invigorate the economy, the 1950s and 1960s saw the beginning of the mass expansion of the university sector, so that
by 1962/3, seven per cent of the population were attending higher education (Ainley 1994). Morley argues that the
1963 Robbins Report (Robbins 1963), that recommended
that all young people qualified by ability and attainment
should go to university, reinforced the notion of age-related
meritocracy. Furthermore, Robbins failed to problematize
power relations arising from gender, class and race.
The expansion of the sector has continued apace in
recent decades as a result of widening access to women,
mature students, people of working class backgrounds and
those from minority ethnic groups. By 1994 women made
up half all students. Morley is, however, guarded in viewing this as a triumph for equality and feminism, saying that:
‘It is debatable whether this came about as a commitment
to equity or as a market strategy to widen the consumer
base’ (p.32, Morley 1999). While increased participation
has been achieved for many groups, it has been well-documented that ‘non-traditional’ students are clustered in the
lower status institutions, in particular the post-1992, former
polytechnics. In addition, there may be poorer outcomes for
some students, such as lower degree attainment for black
and minority ethnic students even when school attainment
is taken into account (Broecke and Nicholls 2007).
Notwithstanding the critique of higher education policy in the second half of the 20th century, higher education
institutions have purported to service the public good and
been able to justify public funding. Lynch (2006) states that
universities
…are seen and claim to be seen as the watchdogs for the
free interchange of ideas in a democratic society; they
claim to work to protect freedom of thought, including the freedom to dissent from prevailing orthodoxies
(p.1).
Lynch notes, however, that in recent decades universities have transformed into consumer-focused corporate
networks. Although marketization as we described above
appears to be innocuous at first sight in terms of its implications for leadership, the reality appears to be different.
The marketization of higher education and the increasing
emphasis on managerialism has implications for gender.
Deem (2003), in a study of gender, organizational cultures
and the practices of manager-academics in the UK, finds
that while greater emphasis on management has provided
some benefits for women through promotion, their perceptions of their practices and expectations that other people
have of them are still marked by gender. Lumby (2007)
has argued that power differentials have been intensified
in organisations as a result of managerialist practices, with
leaders using more coercive power through controlling
resources and making greater use of surveillance techniques
such as audit and quality assurance. Lumby asserts that the
current emphasis on performativity and accountability have
affected education on a global scale and that leadership
contextualised in this way represents a profound embodiment of masculinity. Given this scenario, it is not difficult
to account for the lack of women in leadership positions.
Assumption four: The neoliberal turn can foster
better leadership
Neoliberalism, which is having far-reaching effects on universities both in the UK and abroad, has been characterised
as ‘….a set of ideas and practices centred on an increased
role for the free market, flexibility in labour markets and
a reconfiguration of state welfare activities’ (p.1, Willis et
al 2008). The rise of neoliberalism according to Willis et
al, has important implications for social justice, with the
privatisation of virtually all services creating a climate of
winners and losers as well as various movements for social
justice to contest and deal with neoliberal change.
Lynch points out that in a marketized higher education
system, access will depend on the capacity of the market
and the ability to pay. In democratic, publicly-organised
systems, people’s rights to education are protected, even if
partially. Globally, education is being redefined as a commodity that can be traded on the worldwide market. This
is driven by the potential profitability of education which
in the year 2000 was estimated to be worth $2 trillion. In
Lynch’s opinion, there are global efforts to change the role
of the university from a centre of learning to a business
organisation characterised by an operational rather than
academic focus.
Giroux (2011) views neoliberal reform as constituting a
devastating and dangerous attack on the democratic values
and freedoms of the university which has:
21
The paradox of diversity in leadership and leadership for diversity
….weakened if not nearly destroyed those institutions that enable the production of a formative culture
in which individuals learn to think critically, imagine
other ways of being and doing, and connect their personal troubles with public concerns. Matters of justice,
ethics and equality have once again been exiled to the
margins of politics. (p.145-146).
While Giroux is aware that the history of higher education is not untarnished through, for example, its relations
with the military and corporate business, he states that
the political nature of education has been viewed by the
American public and intellectuals as central to a democratic
society as well as to the civic mission of the university.
The rapidity and far-reaching impacts of neoliberal
reform are remarkable when juxtaposed against very slow
change in gender equality in the academy (Morley 2011).
Women may be seen as winners and losers; visible as students and mostly invisible as leaders or as producers of
knowledge. The invisibility/visibility, student/staff parallel has also been used to describe the experience of black
women academics (Mirza 2006).
The impact of neoliberal reform on equality in higher
education has been explored with regard to gender and
leadership in Irish higher education (Grummell et al 2009).
The introduction of marketization into all levels of education and public policy in Ireland has led to a shift from
democratic accountability to a market model of education
with profound implications for gender. Based on interviews with seven women and men appointed to top-level
positions, Grummell et al. find that there is a care ‘ceiling’
resulting from women’s caring work in the home. This is
associated with a strong, imperative for the women but not
for the men. The care ceiling is carried into the workplace
and acts to disadvantage women where the demands of the
performance culture require senior leaders to be ‘care-free’
and thus able to give the level of commitment demanded.
We have considered organisational, historical and contemporary influences on higher education and its power
to perpetuate inequalities on the one hand via hierarchical
organisational practices, and to challenge them on the other
through democratic processes and critical pedagogy, the latter described by Giroux (2010) as an ‘..educational movement, guided by passion and principle, to help students
develop consciousness of freedom, recognize authoritarian
tendencies, and connect power to knowledge and the ability
to take constructive action’. The four fundamentally flawed
assumptions in the organisation of leadership in the higher
education sector have far-reaching, negative consequences
in terms of the lack of diversity both as a leadership demographic and a leadership practice. The assumption of valueneutrality, elitism, marketization and the neo-liberal turn
appear to have dismantled some of the progress accrued
since the 1960s and while opportunities have opened up for
many, there is still resistance to allowing non-traditional
groups to access power in the form of leadership and senior
positions in academia. We now examine the possibilities for
change.
Leading for diversity
Leading for diversity is not a well-theorised field, particularly in the context of higher education. Cross (2004)
examines the challenge of institutionalised campus diversity in the South African context whose post-apartheid
Constitution aimed broadly to create a society which was
non-racial, non-sexist and non-discriminatory. People were
required to recognise their differences while living in peace
and harmony. The Constitution also recognised the right to
equality regardless of difference or distinction and disallowed any form of discrimination. The abolition of rights
defined by race and the new Constitution meant that South
African universities were required to participate in the
change process, including by protecting national cultures
that were disintegrating, by restoring traditions and reinventing identities based on cultural heritage. Cross states
that this is becoming more difficult as globalisation impacts
on the South African economy and has meant gearing the
curriculum more towards the labour market and adopting a
more business-like approach.
Cross highlights the need to sustain research and intellectual activity in the diversity field in spite of the pressures
of globalisation and marketization. He emphasises the need
for an integrated approach that is driven from the highest
levels of institutions:
………the paper reaffirms the need for a leadershipdriven integrated approach within an institutional
planning framework which sets parameters, targets, priorities and clear lines of accountability and responsibility for the diversity project. (p.407)
Cross distinguishes three approaches to diversity –
the ‘add-on’ approach that involves adding diversity or
diverse groups into the existing curriculum, the affirmative
approach which questions the Eurocentricity of the curriculum and brings in the experience, voices, etc. of marginalised groups and the transformative approach that not only
challenges existing curricula but provides ‘……….a paradigm shift and enables students to view concepts, issues,
themes and problems from different perspectives’ (p.404).
Struggles for the legitimacy of knowledge domains
that challenge the status quo have been noted elsewhere.
Coate (2006), using archival data and interviews, describes
how boundaries are maintained around curricular innovations, arguing that the history of women’s studies provides
a revealing perspective on how knowledge is socially constructed. This is played out, for example, in the difficulties
women’s studies has had in establishing adequate resources.
Professorships in this area were personal chairs not established posts and this, Coate argues, was an indication of
the lack of universities’ commitment to the continuation of
22
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
this area. She suggests, however, that women’s studies may
have had an enduring impact through better acceptance of
feminist scholarship, pedagogy and theory. A further challenge to be overcome in relation to the politics of knowledge production is in academic publishing. Özbilgin (2009)
argues that journal ranking is yet one more form of discrimination in the higher education system structured by gender,
class and race inequalities. Perhaps one of Özbilgin’s conclusions – that the emancipatory potential of research that
improves our understanding of the world poses a threat to
institutionalised forms of white, patriarchal domination –
in part explains Coate’s analysis of the apparent ‘failure’
of women’s studies to survive as a mainstream academic
discipline.
Cross, as was pointed above, highlights the importance
of planned, strategic interventions to bring about change
with actions at the highest levels of educational institutions.
There is evidence to suggest, however, that in the UK at
least, leaders in the sector vary in the extent to which they
acknowledge equality as a problem. A study by Deem and
Morley (2006), which included interviews with senior managers in higher education institutions, identified three main
groups of respondents: those who felt the main changes
with regard to equality and diversity had already happened,
those who felt some change was still required and those who
had more imaginative but not very radical ideas. Ironically
it was found that in those institutions whose equality policies were least comprehensive, the senior managers held
strong views about equity.
Lumby (2006) points out that homogeneity and shared
vision are desirable goals in leadership, with leaders often
seeking appointees who are like themselves, as one respondent in her study of leaders in the learning and skills sector
remarked:
Somebody from a different ethnic background or disability might see things quite differently to you. Making
the team more representative of society would make it
much more difficult to manage. (p.162, Lumby 2006).
The notion of privilege may offer an explanation as to
why leaders express such views. It is doubtful whether the
research participant above was conscious of the privilege
bestowed on her/him on account of her/his whiteness and
able-bodiedness. Leonardo (2004) points out that being
white accrues unearned advantage but at the same time he
argues that whites engender an ‘..utter sense of oblivion to
their privilege’ (p.138). The privileged group, according
to Choules (2006) has the power to violate humanity and
equality of people outside the groups. She provides examples of privilege as having the power to name the world, the
ability to ignore less powerful people with no comeback,
and the power to organise things using one’s own frame of
reference.
This paper has set out formidable challenges for equality and diversity which face higher education and its leaders
in the 21st century. In the UK context, there is a need to
change the demography of the leadership towards a group
of people that is more diverse and inclusive. This recommendation is not easy to achieve as it requires political will.
Although the political will does not exist in the UK at present, the European Commission plans to impose a 40 per
cent female quota on listed company boards, a move supported by France but not by Britain (Financial Times 2012).
Another recommendation that we have is for introducing voluntary measures. Britain has a strong culture of
adopting voluntary measures which are built around a repertoire of rationales, including social, economic, business,
legal, and moral cases for diversity. There is a strong case
for recognising that the talent pool for leadership is becoming more diverse. Therefore, there are multiple cases for
releasing the untapped potential of diversity for leadership.
This will require programmes to train leaders for succession planning and the recruitment, retention and development of talent from diverse backgrounds. Starting with
awareness-raising, there is a need for stronger interventions
at the institutional level to challenge homogeneity amongst
leaders in the sector.
It would be naïve to expect a homogeneous group of
leaders to effectively champion diversity. Therefore, in
order to tackle the paradox of leadership and diversity,
work has to focus on both changing the composition of
leaders based on the principles of meritocracy and to raise
awareness and develop the skills of leaders for the effective
championing of diversity interventions in the sector. This
dual agenda, although complicated by power relations, is
essential if we are to expect long-lasting changes towards
equality and diversity in higher education. Current strategies for training leaders for championing diversity should
be supplemented with efforts to change the composition of
the leadership elite in the sector.
We are going through testing times. It remains to be
seen, for example, whether the leadership of the sector can
reverse the negative impacts on equity caused by government policy, including the introduction of tuition fees. The
most radical challenge to the new funding regime has not
come from higher education leadership but from the student
movement whose actions culminated in the 2010 student
revolt (Rees 2011). Leadership represents huge potential
for change, but it is an open question as to whether this
potential will be realised in the coming decades.
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Which foot first: diversity management
and affirmative action in Brazilian business
Eliane Barbosa da Conceição
Escola de Administração de Empresas de São Paulo
Fundação Getulio Vargas
Résumé
Cet article traite de l’importance relative
des programmes de gestion de la diversité
et des initiatives gouvernementales pour
réduire les inégalités d’accès à l’emploi. Il
met en contraste le processus de gestion
de la discrimination positive-diversité aux
États-Unis avec celui du Brésil, où l’inégalité raciale persiste encore beaucoup. En
utilisant le cadre relationnel (Syed; Özbilgin, 2009), il examine comment les banques brésiliennes traitent la diversité et
la discrimination positive à la suite des
initiatives du Bureau du Procureur Public
Fédéral du Travail. Les résultats suggèrent
que, à titre individuel, ni la gestion de la
diversité ni les initiatives juridiques sont
suffisantes pour assurer l’efficacité de la
justice sociale, mais, en termes d’inégalité
durable, des initiatives juridiques fermes
sont une première étape nécessaire.
Mots clés : Brésil, gestion de la diversité;
inégalité; accès à l’emploi; perspective relationnelle
Peter K. Spink
Escola de Administração de Empresas de São Paulo
Fundação Getulio Vargas
Abstract
This paper discusses the relative importance of diversity management programs
and government initiatives in reducing job
access inequalities. It contrasts the affirmative action-0diversity management process in the USA with that of Brazil, where
racial inequality has remained extremely
persistent. Using the relational framework
(Syed; Özbilgin, 2009) it examines how
Brazilian banks are dealing with diversity
and affirmative action following initiatives from the Federal Public Prosecutor’s
Office for Labor. The results suggest that,
individually, neither diversity management
nor legal initiatives are sufficient to ensure
effective social justice but, in settings of
durable inequality, firm legal initiatives are
a necessary first step.
Keywords: Brazil; diversity management;
inequality; job access; relational perspective
T
he organizational research agenda in the USA and EU
countries has been dedicating increasing attention to
issues of managing a diverse workforce. For some of the
proponents, the arguments for diversity are restricted to
questions of social demography and the need to accept that
today’s workforce is no longer the homogenous workforce
of the management training literature. For others, concern
with diversity is also derived from concern with equality
in the workplace and the need to move on from previously
proposed remedies – usually around affirmative action for dealing with issues of inequality and discrimination.
Important here has been the longitudinal work by Dobbin
and his colleagues (see Dobbin, 2009) in the USA which
has shown how government action itself towards federal
contractors and a new generation of personnel professionals
combined to socially construct new patterns of practices,
manuals and procedures, which in their turn became guidelines for court decisions.
How to seek a balance between diversity, inequality and
discrimination tends to divide contemporary management
and organizational scholars. The mainstream is occupied by
those for whom diversity management theory and practice
Resumen
En este trabajo se analiza la importancia
relativa de los programas de gestión y las
iniciativas del gobierno para la reducción
de las desigualdades en el acceso al empleo.
Contrasta este proceso de acción positiva
de gestión de la diversidad en los EE. UU.
con la de Brasil, donde la desigualdad racial
sigue siendo extremadamente persistente.
Usando el marco relacional (Syed; Özbilgin, 2009) se examina cómo los bancos
brasileños tratan la diversidad y las acciones positivas siguiendo las iniciativas de la
Oficina Federal del Ministerio Público para
el Trabajo. Los resultados sugieren que, de
forma individual, ni la gestión de la diversidad ni las iniciativas legales son suficientes
para garantizar una justicia social efectiva
pero, en contextos de desigualdades durables, resulta un primer paso necesario.
Palabras claves: Brasil; gestión de la diversidad; desigualdad; acceso al trabajo; perspectiva relacional
represent a positive development of the previous literature on inequality in the workplace; correcting mistakes
whilst remaining in tune with affirmative action (Zanoni
et al.; 2010; Tatli, 2011; Özbilgin; Tatli, 2011). A more
critical approach can be found amongst those who argue
that mainstream diversity management discourses and suggested practices actually represent a threat to the conquest
of a workplace free of discrimination and inequalities, since
their principle pillars are those of individual differences and
the business environment performance, essentially putting
aside issues of structural inequalities that by certain degree
inform organizational practices (see for example, Noon,
2010).
These questions are key to the contemporary Brazilian
organizational scene and we place ourselves in this debate
for very practical reasons. Brazil has still a long way to go
in terms of racial equality both for black people in general
and black women in particular, as a recent special article in
the Economist confirmed (28th, Jan 2012). A recent study by
Wood, Carvalho and Horta (2010) has shown clearly how,
despite general improvement in life expectancy at birth
for the population as a whole over the last fifty years, the
26
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
difference within this as expressed by child mortality statistics has remained constant for white and black children.
Unfortunately, Brazil’s booming management and organizational science scholars are still way behind their USA and
European colleagues in the discussion of such persistent
and durable inequalities (Tilly, 1999) and to the study of
inequality regimes in work settings (Acker, 2006; Healy;
Bradley; Forson, 2011). Our interest in the comparison with
the USA experience has a number of reasons. Brazil has
currently the largest African origin population of any nation
other than Nigeria. Like the USA, its afro-descendants were
not voluntary migrants but slaves (more than 3 million in
the seventeenth and eighteenth century and still amounting for over 50% of the current population). This was some
ten times the number that were shipped to North America
where the current black population is approximately 12%,
yet the actions taken by government, academics and by
business professionals in the USA to overcome inequalities
based on race has been more vigorous. Like the US, Brazil
has a federal structure and a number of its institutions are
modeled directly or indirectly on this approach to governance. Brazil is home to a number of USA companies and
its management practices are very much inspired on USA
management manuals. Yet, in Brazil, the process of adopting diversity or affirmative action practices has unfolded
in very different ways from that of the US. In Brazil, and
still with generalized reluctance, it is the diversity discourse that, if anything, first attracted the attention of the
more progressive business community and it is the failure
to achieve results that has led institutional actors, in this
case the Federal agency of the Public Prosecutor’s Office
for Labor, to pressure for an affirmative action approach to
policy implementation.
As we say in the title of our paper: which foot first?
Can diversity management programs make it possible to
overcome structural inequalities or is it necessary to have
government imposing measures and sanctions – within an
affirmative action framework – in order for organizational
policies and practices to change? What is more, how does
this play out in other societies where some groups are
historically treated in an unfair way both in terms of recognition and redistribution (Fraser, 1997)? Bringing the
Brazilian case to the table provides, we feel, an important
setting in which to test these questions for, as we later comment, the social and political dynamics of racial inequality are certainly enduring and demonstrating considerable
resistance to different discourses and strategies of change.
From this point on this paper is divided into more five
parts. The first section briefly reviews diversity management literature, given special attention to the change in the
tendency from affirmative action towards diversity management. The following section discusses our methodology. In the third section some aspect of Brazilian history
and culture, especially those that are credited with having
determined relations between blacks and whites in the labor
market, are briefly presented. In the fourth section, we will
set out the factors at the three levels of analysis that contribute to the way Brazil-based companies approach diversity management and race relations. The fifth section will
discuss the data presented in the previous sections, and the
conclusions.
Diversity Management in debate
The concept of diversity management was first employed in
the USA during the late 1980s, signaling a shift away from
affirmative action as a lever for change in the human resources
and management arena (Tomlinson; Schwabenland, 2010;
Özbilgin, 2005; Wrench, 2005; Humphries; Grice, 1995).
Affirmative action, linked to the forceful and more immediate action frame of rights had emerged in the post second
world war period as a consequence of the civil rights movements fight for social justice, and was based on such moral
values as equality and fairness (Tomlinson; Schwabenland,
2010, Wrench, 2005). Even if the Wagner Act of 1935 had
already signalized a new direction for relationship of the
public sector and private organizations, since it established
some mechanisms to protect trade union workers from
being dismissed, affirmative action as it is discussed today
was a result of title VII of the 1964 Civil Rights Act. This
prompted employers to experiment with a number of antidiscrimination approaches, including numerical employment quotas for disadvantaged groups and making it illegal
for employers with 100 or more employees to discriminate
on the basis of race, color, national origin, sex, and religion (Dobbin et al., 1993; Dobbin, 2009). Nevertheless,
despite such forceful arguments, affirmative action began
to loose popularity amongst the criticism that it had led to a
lowering of educational standards – for example in college
access –, and that, by threatening the principle of equality it
was meant to produce, had exacerbated rather than relieved
racial tension (Dworkin, 2002, p. 387; Chanlat; Dameron ,
2009).
There is no doubt that the drift away from a more hardline rights perspective was influenced by the shift from
liberal to more conservative policies in the USA (seen in
various court rulings), but it is also the case that diversity
management came along at a time when the business in USA
as well as in EU countries was facing a very different labor
climate characterized by a growth in the number of ethnic
minorities in society as well as the increasing presence of
white women in senior positions (Chanlat; Dameron, 2009;
Humphries; Grice, 1995; Cox; Blake, 1991). Additionally,
international trade was at the front of the management discussion with new trading blocks, new forms of business
partnerships and joint ventures that crossed cultural boundaries, reinforcing the demand for greater flexibility in organizational performance and a more micro level approach
to differences that was possibly also influenced by the difficulty business had with the more direct and explicit affirmative action approach (Gilbert; Stead; Ivancevich, 1999;
Özbilgin, 2005; Wrench, 2007).
Which foot first: diversity management and affirmative action in Brazilian business
The relatively rapid acceptance of the “diversity management” approach should not however be seen as a rejection of the principles and values of “affirmative action”,
since amongst practitioners there are those who see the
former enabling the latter to be accomplished in practice
(Kirton; Greene; Dean, 2007). Indeed, as Tatli (2011) has
suggested, most of the time there is a decoupling between
the diversity management discourse and practice, with the
latter remaining strongly based on affirmative action values present often in a very material way in manuals and
procedures (Dobbin, 2009). Nevertheless, at a visible and
explicit level the diversity management discussion is about
the challenge of leading heterogeneous workgroups and the
effective use of a variety of resources to accomplish this
task rather than the ethical challenge of protecting rights
of minority groups. However the order is clear, within the
USA the diversity discourse is – at least for the moment –
in the spotlight and affirmative action has been pushed into
the shadows.
In European Union countries, the history is partly similar in the sense that a number of countries had also experienced affirmative action policies before the arrival of the
diversity management discussion on problems of discrimination at the labor market. The difference is that here, much
of the early legislation was concerned with gender issues.
At the broader level of the growing European Community
as a whole, there was concern since 1961 with pay parity
between women and men, and in 1975, through Directive
117, the first legal steps toward harmonizing legislation on
the prevention of gender inequality in the labor market were
taken. Affirmative action came in 1984, with the publication of Recommendation 635 on the promotion of positive
action for women in the labor market (Cappellin, 2000).
It was in the 1990s that EU countries, as a community,
began to face up to discrimination based on ethnic and racial
origin (individual countries had already been working on
these questions for some time). During this period non-governmental and immigrant organizations published studies
showing that immigrants lack of language fluency and work
abilities were not the reasons behind the growing inequalities in the EU labor market. A new directive came into force
in 2000 that, amongst others, prohibited discrimination on
the basis of racial and ethnic origin in the labor market
and urged each national state to integrate the directive into
their national legal systems by 2003 (Wrench, 2002). The
directive and the subsequent campaigns for organizations to
embrace anti-discrimination policies coincided in Europe
with a growing awareness of USA discourse and practice
of diversity management and, as in the USA, the diversity
management discourse prevailed over that of affirmative
action (Wrench, 2002). However in both regions, there
remained significant groups of academics and practitioners
who continue to defend the affirmative action perspective.
As we commented in the introduction, contemporary
research literature on both sides of the Atlantic north can be
27
classified into two major blocks (Zanoni et al., 2010; Tatli,
2011; Özbilgin; Tatli, 2011). On one side are those studies
that fall into what has been called the mainstream approach,
making the business case for diversity management and the
benefits an organization can yield from a diversified workforce. Here the concern is often with performance, and thus
justifying diversity practices by their potential of improving
both business operations and outputs as well as financial
results (for example: Chanlat; Dameron 2009; Cox; Blake;
1991; Frimousse; Paretti, 2007; Gilbert; Stead; Ivancevich,
1999; Leroux et al, 2008; Tatli; Özbilgin, 2009).
A second block argues that the mainstream studies tend
to draw from the neoliberal well of ideas, assuming social
action to be totally explicable through theories of maximizing self-interest. Despite their multiple perspectives,
researchers here take a more critical approach, showing
concern about the moral case for equality and the dangers
that the loss of emphasis on moral values can have for social
justice. Here, affirmative action is seen as the most effective
route for organizations to achieve a diversified workforce
(for example: Greene; Kirton; Wrench, 2005; Humphries;
Grice, 1995; Mor Barak; Findler; Wind, 2003; Noon, 2007;
Perriton, 2009; Sinclair, 2000; Wrench, 2005; 2007).
Critical diversity management research emerged in the
mid-1990s in response to the quickly rise in studies using
the mainstream approach to diversity. Critical scholars
put a spotlight on the issues of structural inequalities, discrimination in the workplace, and the way one is related to
the other. They contest that it is not concern about performance, respect to individual differences, and positive organizational outcomes that must be addressed in discussing
diversity management. On the contrary, they argue, it is the
perpetuation and reproduction of inequalities in marketplace that should come in first place.
These scholars show considerable discontentment with
mainstream approach. Amongst reasons given are that it:
obscures unequal power relations in organizations and
hampers the possibility of action (Zanoni, et al., 2011); is
based on an instrumental and individual view of differences
(Noon, 2010; Özbilgin, Tatli, 2011; Zanoni, et al., 2011); is
a tool to undermine identity-based collectivism in organizations and to obscure group-based systematic inequalities in
access to power and resources (Özbilgin, Tatli, 2011; Tatli,
2011; Zanoni, et al., 2011); rejects the need for structural
intervention, adopting a (neo)liberal approach of self regulation through assuming that market forces would provide
the best way to achieve equality (Noon, 2010); and is used
to prioritize soft rather than hard practices to enhance diversity or equal opportunity practices (Wrench, 2005).
Some critical empirical studies on diversity management
sought to bridge the gap by suggesting that harder diversity
practices – here understood as those that promote changes
in the organizational structures – generate a more diversified workforce than softer ones. Kalev and Dobbin (2006),
for example, showed that policy interventions that stimulate
28
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
change in organizational routines – such as those derived
from the compliance review established by chapter VII of
the USA Civil Rights Act of 1964 – appear to have more
significant and lasting effects on workforce diversity than
those that just create disincentives to discriminate, such as
lawsuits. Following this same direction, Kalev, Dobbin and
Kelly (2006) showed that, for private organizations, diversity programs that aim at altering organizational structures
by establishing responsibilities, such as affirmative action
plans, diversity committees, and diversity staff positions,
are followed by significant increases in managerial diversity. That is, through effectively allowing the beneficiaries
– in the USA case, white and black women and black men
– to reach managerial positions. Softer programs, such as
diversity training and diversity evaluation, are not followed
by increases in diversity in the workforce, whilst, programs
that address social isolation amongst women and minorities – such as networking and mentoring programs – are
followed by modest changes.
To be fair, as Tomlinson and Schuwabenland (2010)
highlight, there are also those in both the mainstream and
critical groupings that will accept some coexistence and
argue that business pragmatics can extend themselves to
social justice and that diversity management programs can
promote social equality. Equally, some scholars on the mainstream side will contend that diversity management policies
and practices should be seen as a step towards affirmative
action, given that in a number of cases they themselves
are a result of the fight against discrimination (Frimousse;
Peretti, 2007; Leroux; Frimousse; Peretti, 2008); certainly
the reaction to HIV/aids discrimination at work would back
this up. However there are others, especially those from the
critical side, who take the opposite path and contend that
equal rights legislation and affirmative action are prerequisites for the development of diversity management since
they create the social, legal and organizational environment and incentives which administrative initiatives require
(Greene; Kirton; Wrench, 2005; Wrench, 2007).
Theoretical framework and Method
Given our concern to look more carefully at some aspects
of the Brazilian case and to do so in a setting in which both
affirmative action and diversity management discourses
and practices are present, we chose to structure our investigation by using “relational framework” approach of Syed
and Özbilgin (2009) (See similar comments by Jonsen;
Maznesviki; Scheneider, 2011 and Tatli, 2011). This opens
useful directions for analysis by proposing to bridge the
gap between macro(national), meso (organizational) and
micro (individual) level policies and actions. As they argue,
the single level mainstream conceptualization of diversity
management, which considers either the legal or the organizational domain of the policy, fails to grasp the relational
interplay of structural and agentic-level concerns of equality (Syed & Özbilgin 2009, p. 2435). The authors’ theory is
based on the ideas of such social theorists as Bourdieu and
Layder who assume reality as a multi layered phenomenon,
governed by hidden and underlying structures not easily
grasped by more surface level observations (Reed, 1997;
Syed; Özbilgin, 2009; Tatli, 2011).
The agency/structure debate brings important questions
about the nature of social reality, the way in which people
conceive it and the theoretical means available to explaining the relationship between its constituent parts, raising
questions about the nature and the link between human
activity and its social context. As Reed has argued, (1997),
the way in which we conceive the nature of and relationship between social action and structural constraint will
shape our visions of organizations. Simplifying, what has
been called the critical realist perspective, argues that society, and its institutions and organizations, is a socially constructed phenomenon, being something outside the mind
and relationship of individuals. They also agree that it is
not impartially built. On the contrary, for these scholars,
society is made up of a variety of social groupings, which
are constantly fighting to shape its institutions and rules
according to their interests. The “social reality” of society
is by no means a static affair and change is very much part
of its complexity.
For the purpose of this paper, that is to analyze a process of social change in face of durable inequalities, taking the Syed & Özbilgin model within a hard diversity
perspective (see Özbilgin; Tatli, 2011) provides a powerful
theoretical framework from which to attempt to unpack the
Brazilian case. Developed for the discussion of the international transfer of diversity practices, the model encourages
comparisons between the approaches adopted in different
countries in managing a culturally diverse workforce (see
for example Syed; Kramar, 2010 on Australia). Brought
more forcefully within a critical perspective, it may help us
to understand what the possibilities for action may be in a
setting where these are very much needed.
In our case study, we examine the factors that concurrently shape the way Brazil-based companies deal
with diversity management and, more specifically, racial
inequality at the three levels of analysis proposed. At the
macro-national level, we will examine Brazil’s laws and
public actions on equality of treatment, especially those
aiming at promoting equality in the workplace. At the
meso-organizational level, we will discuss the configuration of the workforce in the labor market and the way
Brazilian-based business organizations approach the problems of equality and diversity; and at the micro-individual
level, the focus of the investigation will be the Brazilian
black people, their historical role in the labor market and
the factors that contribute to their subordinate participation.
Our focus on Brazilian Banks is both opportune and representative. Firstly, the Banks through the national Federation
of Brazilian Banks (FEBRABAN) were the objects of
direct pressure from the Federal Public Prosecutor’s Office
Which foot first: diversity management and affirmative action in Brazilian business
for Labor. Secondly, the Banks are also large and very visible employers and in many respects highly modernized.
Over recent years – following similar trends elsewhere –
the financial services sector has seen a number of significant mergers and acquisitions and a small number of public
and private high street banks control a large amount of the
market. They may not be at the leading edge of personnel
practices but they are certainly within the top quartile.
We adopt a multidisciplinary approach (Kamenou,
2007) informed not only by the diversity management literature but also by the discussion on inequality and Brazilian
racial relations. The paper draws on a multiple source of
secondary data, published until 2011, from both Brazilian
official research centers (Brazilian Institute of Geography
and Statistics – IBGE and Institute for Applied Economic
Research – IPEA), and specialist research centers for black
studies (Laboratory for Economic, Historical, Social and
Statistical Analysis of Race Relations, Federal University
of Rio de Janeiro – LAESER-UFRJ), as well as on publically available surveys and qualitative studies carried out
by non-profit organizations (Ethos Institute) and employee
organizations, including social responsibility data from
the FEBRABAN. We have also included evidence from
nineteen in-depth interviews that were carried out between
2010 and 2011. Five of these were with representatives
of Brazilian black social organizations that were involved
in the Bank case. Two other interviews were carried out
with the then general prosecutor from the Federal Public
Prosecutor’s Office for Labor at different points in time,
one in 2010 and the other more recently (August, 2011)
and an earlier interview with the prosecutor’s key advisor in
2010. Finally, we have also been helped by interviews with
two personnel managers from leading São Paulo companies and eight students involved in a program to place black
students as trainee interns, developed by a São Paulo based
black students college. A further interview was carried with
the College President.
Black people in Brazilian society
and its labor market
Brazil is internationally known as a culturally diverse country and this is also the image that can be found on official
posters and photographs. However what is less known is
that this diversity consists basically of two sets of peoples:
the whites, by and large European and Asian descendants
whose arrival in the country was broadly voluntarily, and
the Afro-descendants whose forefathers were brought
to Brazil in slavery. Figures from the last official statistical survey accomplished in 2010 by the IBGE, show that
approximately 50.74% of the Brazilian population selfcategorize themselves as black or mulatto (semi-black) and
that the whites accounts for 47.73%. The remainder was
made up of people classifying themselves as indigenous
or Asiatic in some way (Japanese, Chinese and Korean,
29
Instituto Ethos, 2010). In general, Asian descendents tend
to be seen as white.
Even if Brazil has until recently had a fame of being a
“racial democracy”, the relationship between the two major
groups (whites and blacks or “negros” as they are described)
has never been egalitarian. Again simplifying, whites have
always been at the top level of society, dominating the governmental, political, economical, professional and social
arenas. Figures from de last census (2010), for example,
show that black people earn 45% less than whites. Whilst
a few afro-descendant have recently reached more visible
social positions, they are until now disproportionally underrepresented in all the important arenas, including the labor
market. Given that they form, in number, the majority, the
question that inevitably arises is why and how?
Some answers can be found in the history of ideas,
especially in the late XIX century and the period surrounding the abolition of slavery in 1888. Accordingly to
Schwarcz (1993), it was in the XIX century that the polygenic perspective of humanity began to take over from previous monogenic ideas. The polygenic followers believed
that humankind’s intellectual capability as well as its moral
character was determined by its genetic inheritance. They
also believed that humanity could be divided into races,
with the Negro being the less endowed. Following this line,
some Brazilian intellectuals argued that the miscegenation
between black and white would lead to total degeneration.
Others argued the opposite: that miscegenation was the
only solution, since, in terms of social identity, it would
lead to all differences (including blacks and indigenous
people) “disappearing” (Schwarcz, 1993; Skidmore, 1976).
The force of the arguments, for and against, strengthened
the polygenic perspective and their echo could be found
amongst the country’s political leaders and its citizens
and present in reports of racial discrimination following
abolition.
The years between 1930 and 1950 witnessed the emergence of a new school of thought, arguing that Brazilian
racial diversity instead of being a disaster, as it was commonly thought, was in fact an advantage. Gilberto Freyre,
one of the most prominent thinkers of this period, and his
contemporaries proposed that Brazil’s weakness was not its
black people and their mixed descendants, but instead its
culture. Brazilians were used to attaching too much importance to foreign cultures rather than to their own (Dávila,
2006, p. 30). The cultural proposal did not change convictions about black inferiority, and even Freyre would argue
that black people would gradually “disappear” and all
Brazilian people would become white (Jaccoud, 2008). The
cultural argument did however change the racial discourse,
bringing in the idea of “racial democracy” (Guimarães
2008, p. 180). That is, that, all Brazilian, no matter their
race, are first and above all Brazilian and therefore all
Brazil’s inhabitants were able to live together without distinction (Jaccoud, 2008, p. 52).
30
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
The fame of “racial democracy” was such that after
the Second World War, a Unesco study team was sent to
investigate how the country had managed to build such a
harmonious and well-integrated society. Expecting to find
a model that could be imported to other racially diverse
Western countries, what they found was disappointment.
The research results revealed that the Brazilian social fabric
was completely undermined by inequalities and that even
after over fifty years of abolition, black people remained
in almost like slave conditions. They were discriminated
against by whites and had no chance for upward mobility and advancement (Andrew, 1992; Munanga, 2001. The
result was the emergence of a third and more critical school
of thought about race relations in Brazil, whose representatives claimed that its interracial relations were still based
on the values of slavery (Munanga, 2001). By the 1980s,
with the advent of racial relations research programs, it
became clearer that white prejudice against blacks was
based not only on the former slave relations but also on
social inequalities that are reproduced continuously every
day by the people themselves and the country social and
political institutions, the two come together in a complex
manner, creating a dialectical systems of discrimination,
which relies upon both social class and ethnic-racial relations (Dávila, 2006; Henriques, 2001; Munanga, 2001).
Focusing the labor market, Theodoro (2008) argues
that abolition resulted in former slaves being excluded
from the most dynamic regions of the country and from its
more prominent economic sectors. Many of them ended up
working in unpaid jobs as a mean to guarantee minimum
needs. Government agents, following the polygenic perspective and concerned to purify Brazilian society, set up
a program through which white immigrants from Europe
were encouraged, and many times monetarily subsided, to
enter the country. Arriving here, even without the necessary
technical training and experience, they were promptly hired
by the recent opened industrial plants.
Today, more than 120 years since the 1888 abolition of
slavery, the condition of Brazil’s black population has hardly
changed since that of the first half of the XX century. Afrodescendants are extremely underrepresented in the more
desired professional and social positions and extremely
overrepresented in poverty settings, low-paid jobs, jails
and criminal gangs. With relation to the labor market, black
people with the same or superior educational level as white
people (men or women) occupy positions of lower status,
lower pay and less influence. They are rarely promoted, are
more often dismissed and remain unemployed for a longer
time (Castro; Guimarães, 1993; Henriques, 2001; Myers,
2003; Sá Barreto 1988). Discrimination against black
women in the labor market is even greater and they are by
far the worst off (Andrews, 1992; Castro; Sá Barreto, 1988;
Instituto Ethos, 2010; Paixão; Carvano, 2008).
Whilst the Brazilian black social movement had always
raised its voice in favor of the complete integration of the
afro-descendants in society, it was from the1980s onwards
that the country witnessed an inflexion in their agenda from
a claim for the integration of the afro-descendants in society toward demands for social justice and policies aimed
to promote equal opportunities (Guimarães, 1999: 110).
According to some of the interviews, black social movements in the country began to discuss affirmative action in
the first half of the 1990s, seeing it as a mean to guarantee
blacks the opportunity to enter university and maybe the
labor market. In terms of university entrance, a number of
public universities have moved towards quotas – but not
without considerable controversy (Penha-Lopes, 2008).
In terms of the labor market, in November 2003 a
group of black social organizations presented petitions
to each of the 26 states and the federal district agencies of the Federal agency of the Public Prosecutor’s
Office for Labor (MTP - Ministerio Público do Trabalho)
against Inequality in the Labor Market. The goal was to
denounce the differences in treatment practiced in the labor
market and need for action to correct such imbalances under
penalty of “threat to the core principles of the legal democratic state” (Lopes, 2006). This was to prove an important
trigger for future events when in 2005 the MPT began to
develop its own program for promoting equal opportunity
for blacks and white women in the labor market that would
lead to the events that are discussed in the next section.
Diversity management in Brazil:
the Syed and Özbilgin model in practice
We begin the analysis by concentrating on the macrolevel organizational context, the institutional framework
and the institutions themselves involved with the equality
and diversity legislation. In the second subsection we will
examine how business organizations in the banking sector
have responded to diversity management concept and practices. Finally, in the micro-individual level subsection we
will discuss data on the educational backgrounds of black
people in Brazil and their readiness for the labor market.
Macro-national level factors
Given that until recently the ideology of racial democracy
has been quite successful in maintaining the denial of social
inequalities based on race – including amongst blacks
themselves – Brazilian society has never had to engage with
the creation of mechanisms to overcome racial inequality.
At the federal level, the first law on racial discrimination
was passed in the year of 1951. It prescribed racial discrimination against foreign blacks as a misdemeanor, and
was motivated by complaints from some influential foreign
black visitors who faced racial discrimination whilst travelling around the country. However it said nothing about
Brazilian’s own black people (Jaccoud et al, 2009).
Which foot first: diversity management and affirmative action in Brazilian business
At a constitutional level, although former Brazilian
constitutions have also formally considered the principle of
equality, it is only in the current 1988 charter that equality
of opportunity and treatment is required to be substantive
for all its citizens and the state is required to be proactive
in order to attain this objective. The constitution establishes
racism as a crime subject to prison and for which bail is
not allowed (Brasil, 2007). It also requires equal remuneration and a quota for disabled workers in the public service
(Brasil, 2007; Sarmento, 2008; Silva, 2008).
The underlying assumption in the 1988 Constitution
that Brazilian is an unfair society opened the door to a number of anti-racial discrimination laws and other measures
(Jaccoud, 2009; Sarmento, 2008). Largely as a result of the
black social movement, the last twenty years have witnessed
not only the passage of laws on racial issues at both the federal and states levels but also the implementation of official
programs. Unfortunately, many of them were discontinued
in part for lack of experience and those that continued have
been poorly implemented and controlled (Conceição, 2010;
Jaccoud, 2009).
Although Brazil ratified two ILO conventions on
discrimination in the labor market and the workplace
(Convention 100 and 111), its governments have never
encouraged public and private organizations to adopt any
form of affirmative action for black people, even after
approval of the 1988 Constitution. More recently from the
late 1990s onwards, a number of public and trade union
research organizations published statistical studies with
clear evidence of inequality, confirming that racial discrimination is a characteristic of the labor market. Despite this,
neither the executive nor the legislative branch of the state
has created any explicit policy to guarantee equal opportunity in the labor market for black people (Conceição, 2010;
Jaccoud 2009). In contrast, the Brazilian parliament passed
a bill in 1999 to require companies with more than a hundred employees to adopt affirmative action in favor of the
disabled (Bahia, 2006).
In response to the State’s lack of action to benefit other
discriminated groups as well as to respond to the black
movement’s demands for fair treatment in the labor market,
the Federal Public Prosecutor’s Office for Labor (Ministério
Público do Trabalho- MPT) decided in 2005 to develop a
program for promoting equal opportunity for blacks and
white women in the labor market. The program was to
be implanted in all major areas of the Brazilian economy
beginning with the financial services sector and the banks
(Conceição, 2010; Varella, 2009) (Brazil’s macro-level
institutional structure included the classical three powers,
legislative, executive and judiciary, as well as the independent public prosecutor’s office, which is seen in the constitution as the guardian of the democratic state. A specific
branch of the agency deals with labor matters.)
The plan was for a Program for the Promotion of Equal
Opportunity for All (Programa de Promoção da Igualdade
31
de Oportunidade para Todos -PPIOT) to be implemented in
two stages. First the MPT would contact the most prominent
companies of a given economic sector and required them
to make available information on workforce composition
and earnings with respect to race and gender. In the second
stage the MPT would assess the information provided by
the companies and, if this showed an overall underrepresentation of black women and men amongst the work force as a
whole and underrepresentation of black men, and black and
white women in middle to senior management, the companies would be offered the option of signing a collective
consent agreement (Termo de Ajustamento de Conduta,
hereafter referred to as TAC) rather than face prosecution.
In the TAC, the companies would commit themselves to
adopt measures to increase the number of black people
amongst their work force as a whole and also to increase
the number of black men and white and black women in
middle and senior management positions. If the companies
did not meet the terms of the agreement, the MPT would
move to prosecution (Conceição, 2010). The next subsection will present data on the program outcomes so far at the
meso-organizational level of analysis.
Meso-organizational level factors
Brazil-based business organizations, as with many others
around the world, are always prepared to argue that their
actions are based on the principles of rationality, equality
and merit: the dominant managerial discourse. But this is
far from the case. A number of studies have shown that
racial inequality is commonplace in Brazilian companies
and that they have done and continue to do almost nothing to change the situation (FEBRABAN, 2011; Castro;
Guimarães, 1993; Fleury, 2000; Henriques, 2001; Instituto
Ethos, 2007; 2010; Jaime, 2010; Myers, 2003; Sá Barreto
1988; Varella, 2010). On the subject of diversity management, a more recent focus for research, evidence tends to
show there is more acceptance of the requirement to employ
the disabled. There have also been some moves to promote
equal opportunity for women (Fleury, 2000). Unfortunately
no data is available on the gender and racial distribution of
disabled employees.
Recent data from the Ethos Institute (a leading NGO for
business ethics) shows that amongst the higher level managers of the 500 best companies in Brazil only 5.3% are
Afro-descendants (with varying skin colors) and just 0.2%
is completely black. This same study showed that only 3%
to 6% of these companies have policies to promote racial
diversity amongst their workforce (Instituto Ethos, 2010).
The Brazilian commercial bank association (FEBRABAN)
publishes annually a consolidated social balance sheet for
its affiliates, the biggest commercial banks. The 2009 report
shows that African descendants make up to 15% of the total
workforce. These figures are hardly different from those of
2005 (14%), the year in which PPIOT was implemented
(Febraban, 2006; 2010).
32
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
In reaction to the PPIOT, each of the five leading commercial banks to which the program was first applied
refused to sign the TAC proposed by the MPT. They argued
that as law abiding Brazilian companies they did not discriminate against blacks. In the resulting prosecutions, the
MPT – facing a largely conservative judiciary – lost the
battle in the lower courts. However, under pressure by the
Prosecutor’s Office, FEBRABAN agreed to undertake a
full census of the workforce. Afterwards, the higher courts
followed the lower courts and also ruled against the MPT
(Varella, 2009), but by this time the census had been taken
showing the almost complete absence of afro-descendents,
especially in the highest level positions.
The result of the survey was released in July 2009.
Its conclusions confirmed what was already suspected:
(i) white women earned 78% of white men’s wages and
reported more obstacles to career opportunities in the banks
hierarchy, (ii) only 20.6% of employees in the financial system were black (black or brown), (​​iii) this group earned on
average 84.1% of the salary of whites, (vi) the discrimination was still higher to black women, since they amounted
to a total of only 8% of the population employed in the
banking sector, and (v) whilst only 60% of all bank employees had been working in the banks for at the most ten years,
for the blacks workers, 66% had been there for less than
three years (Contraf-Cut, 2009; FEBRABAN, 2011). The
results also showed that whilst the proportion of white man
and women with postgradaute education was the same
(approximately 50%), only 19% of those in higher positions
surveyed were women (nearly always white). In the same
way, although blacks are a little behind whites in respect to
professional training, they accounted for only 4,8% of the
executives in higher positions.
As the aide of the chief prosecuting attorney reported
when interviewed, as a result of these figures, FEBRABAN
(on behalf of the bank´s involved) agreed to: (i) increase the
number of blacks, especially black women, on the bottom
line; (ii) expand the mechanisms of career advancement for
white women; (iii) create a diversity committee for sensitize former employees, especially those on the top, on the
diversity values (iv) encourage suppliers to take part in the
process by creating mechanisms to achieve the same goals
in their own business; and (v) create mechanisms to oversee whether the goals were attained, not only by the banks
themselves but also by the companies in their supply chain.
By this time, advocacy organizations in the disability
arena had also managed to include the rights of the disabled
on a separate and parallel MPT agenda. In this case, however, the MPT was able to convince FEBRABAN to ratify
a collective consent agreement (TAC) with relation to the
inclusion of disabled (October, 2008). These were later to
be included in the broader agreement on human resource
policy.
On its side, the MPT temporarily suspended the lawsuit
as recognition of the changes in place. Additionally, from
the interviews carried out for this study, the then chief prosecuting attorney and creator of the PPIOT program, saw
the chances of the MPT winning the legal battle as remote,
arguing that Brazilian judges were still over inclined to deny
racism, even when evidence proves the contrary. The situation today continues very much the same. A close examination of the FEBRABAN site and published documents
reveals very little, if any, action on the inclusion of black
employees. Data on the census and the accompanying concerns is present but there is no evidence of plans. In contrast
there are at least two special programs devoted to social
inclusion through education and professional qualification
for people with disabilities. The 2010 consolidated social
balance sheet from FEBRABAN (published in August,
2011) did not show any data about black employees – discontinuing a practice that had been in place since 2002. The
report was restricted to figures about gender, age and educational level of the new entrants, as well as the resulting
composition of the workforce. The only mention of black
men and women is a reference to a statement that one of
FEBRABAN’s priorities is to encourage a greater participation within the banking systems of women, blacks, young
trainees, and person who are disabled, and that FEBRABAN
has signed a partnership with some governmental secretariats to strengthen and create policies directed to women and
the black population, as well as to other vulnerable groups,
with the purpose of increasing their number in the labor
market (FEBRABAN, 2011).
Micro-individual level factors
Historically there is an educational gap between black people in Brazil when compared with their white fellow citizens (IPEA 2007), making it more difficult to find well-paid
and higher-status jobs. A longitudinal study by Paixão and
Carvano (2008) compared blacks and whites in the educational system in Brazilian from 1995 to 2006. The result
shows that even if black people are gradually overcoming
the educational deficit at elementary and high school levels
as well as at university, there are still great differences especially in the higher levels and in grade performance.
In relation to undergraduate degree programs, Paixão
and Carvano reported a significant growth rate (415%) in
black students. However the greater part are enrolled in the
lower rated fee paying schools and universities and those
that are in the top rated public and private universities are
majoring in easier access courses such as humanities and
social service and are extremely underrepresented in medicine, engineering and other higher status courses (PenhaLopes, 2008).
At the level of a simple non-causal observation, the
data describes part of the lack of success of black people
in the labor market, since academic performance is highly
correlated with both opportunity and payment level in
the labor market (IPEA 2007: 282-290). This is also the
Which foot first: diversity management and affirmative action in Brazilian business
argument – lack of academic qualification – that employers use regularly to justify the nearly complete absence of
blacks in higher-paid positions and the absence of diversity
programs (Fleury, 2000; Myers, 2003). As a causal implication, the argument is flawed as it disregards the institutional
and structural racism of the country and the literature and
data on durable inequalities (Tilly, 1999). It is worth recalling that the IPEA annual report on Brazil’s social policy
performance has always demonstrated that discrimination
against blacks is an important variable in the explaining of
inequalities in the labor market. Its 2007 edition brought
together a range of statistical data on educational level and
labor market wage for blacks and whites in the period from
1994 to 2005. This compared blacks and whites of similar
educational levels and showed that blacks with the same
educational level as that of whites always earn less. This is
the case throughout the educational spectrum: from those
who don’t finish elementary school, through those who
did high school on to those who went to university and
beyond to postgraduate training. Black people as a whole
enter the labor market in disadvantage to whites (Paixão
and Carvano, 2008) and in situations when this disadvantage is removed and they are educationally equal, they earn
less. Thus, as the IPEA study concluded, the unequal treatment given to black people in the labor market cannot be
explained on the behavioral grounds of a lack of education
but needs to be seen in terms of racial discrimination both
in the market and in relation to access to education (IPEA,
2007, p. 282-290).
Discussion and Conclusions
The purpose of this article was to examine, in the Brazilian
case and by extension to other countries where groups
have been historically treated unfairly, whether diversity
management programs can make it possible to overcome
structural inequalities or if it is necessary to have government imposing measures and sanctions – based on affirmative action values – in order for organizational policies and
practices to change. To address this question we presented
evidence about the way diversity management concepts
and practice developed in the USA and EU countries and
an empirical study of recent events in Brazil surrounding a
very visible part of its economy (its high street banks). Our
analysis used the Syed and Özbilgin (2009) model within a
critical perspective.
In section two, we looked at the current debate on diversity management and noted the critical theorists arguments
that organizational diversity programs based on mainstream
diversity management approach could both obscure unequal
power relations in organizations by treating differences on
an individual base rather than something related to social
groups (for example, Noon, 2010; Wrench, 2005). The
analysis of the Brazilian case suggests that at least in circumstances such as ours, these concerns are valid. That is,
that work organizations in Brazil will not adopt a diversity
33
program aimed at including blacks (even though a number
may be USA or EU subsidiaries) unless, similar to the early
USA experience, they are forced to do so. There, chapter
VII of the Civil Rights Act of 1964 created an environment
for organizational compliance and the resulting policy
intervention stimulated change in organizational routines
that have had significant and lasting effects on workforce
diversity (Kalev, Dobbin and Kelly, 2006). In other words,
the case seems to be for harder diversity management practices rather than softer ones. Our findings contribute to
diversity management literature in the sense that they offer
evidence that the way Brazil has chosen to deal with the
problem of managing a diverse workforce seems not work
to solve racial inequalities in its workplace. Besides, by
bringing the Brazilian case to the table, the paper allows the
diversity management literature to be enriched by a country
specific study.
The Brazilian case demonstrates the usefulness of the
multilevel framework for managing diversity in bringing
together for comparative purposes overlapping levels of
explanation. Rather like the parts of the proverbial onion
– where neither is the beginning or the end but each is part
of the whole - all are relevant and, in this case, interract
unfavorably for the country’s afro-descendants. As we have
seen, there is great resistance to affirmative action in the
country not just as a post WWII liberal proposition – as
in the case of the USA – but set within a long term refusal
to face a matrix of ideas that at times are close to racially
inscribed social apartheid.
When the country moved out of millitary rule, the transition to democracy was not an easy process. In Brazil, as
elsewhere in Latin America, democracy was at first a superficial rather than substantive institutional and action frame.
As a number of scholars have commented (O’Donnel,
2001; Carvalho, 2001), the constant ruptures in latin america’s institutional frameworks have produced a setting in
which, whilst some social rights had been secured largely
as a result of populist governments in the 1940s and 1950s,
political rights were frequently under threat and basic civil
rights, including the right to have rights, often lagged considerably. Thus the evocative notion of rights can often be
found being expressed emotionally in relation to health
and housing but without any reaction in relation to judicial access or prison conditions. Perhaps, for these and
similar reasons, including the continued pervasiveness of
the ideology of “racial democracy”, where movement by
personnel officers happens, it tends to follow the soft diversity approach and takes the easier route of discussing other
vulnerable groups such as the disabled. But even here, it has
been the legislation and the Public Prosecutor’s Office collective consent agreement that has tipped the balance.There
is little sign of an effective fight against racial discrimination in the workplace. The creation of the first black college
in São Paulo may make it easier to force the issue of internships for black students and those involved are hopeful on
this score. But without the hard policies on occupational
34
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
and workforce composition and opportunities it is not likely
to succeed on its own.
The question now becomes – which way forward. Whilst
the diversity frame offers space for different versions of
managerial good conduct (and being a “good place to work”
now gains points in business magazines), the rights based
approach is more harsh and direct. As has been commented
(Ignatieff, 2001) human rights are difficult to carry forward
at the best of times, based as they are on a social agreement
about the freedom from degradation and deal with dimensions that may be difficult for courts to assume. Outside the
courts, human rights methodology is still very much based
on the concept of “naming and shaming”. That is, by making explicit use of the moral high ground to make the position of those who deny rights publically uncomfortable; in
our case, by turning the organizations and those who work
in them object of public scorn. This might seem excessive
and aggressive in the current business context, but it has
been used to effect in discussing the working conditions of
labor employed by the suppliers of worldwide household
name brands and, when employed in the European boycott
of South Africa by the many groups in the anti-apartheid
movement, it certainly had an effect on both the organizations themselves and who worked in them. It could be the
missing step.
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Quel processus d’apprentissage de la gestion
du fait religieux dans les entreprises françaises ?
Géraldine Galindo
Université Paris-Sud 11
Laboratoire PESOR – Faculté Jean Monnet
Résumé
Les débats sur la question religieuse s’inscrivent en France dans la sphère publique
comme en entreprise. Ainsi, dans le monde
professionnel, certains salariés présententils des revendications de nature religieuse.
L’objectif de cette recherche exploratoire
vise à analyser le processus d’intégration
du fait religieux dans les pratiques de
management des grandes entreprises françaises, selon la perspective développée
par les théories de l’apprentissage. Nous
identifions différents niveaux, différentes
phases, le recours à une instrumentation
permettant d’appréhender la gestion du
fait religieux selon divers processus d’apprentissage influencés, tant au plan organisationnel que professionnel, par la place
conférée à l’intime par les managers, salariés, dirigeants.
Joëlle Surply
Université Paris-Sud 11
Laboratoire PESOR – Faculté Jean Monnet
Abstract
Debates on religious issues are in the public sphere in France as well as in business.
Thus, in the professional world, some
employees have religious claims. The
purpose of this exploratory research is to
analyze the process of integration of religion in the management practices of big
French companies, according to the perspective developed by learning theories.
We identify different levels and phases,
the implementation of tools to understand
the management of religion according to
various learning processes, influenced both
organizationally and professionally, by the
individual private space of the managers,
employees, directors.
Keywords: Religion – diversity – professional world – management of religion –
learning process
Mots clés : Religion – diversité – monde
professionnel – gestion du fait religieux processus d’apprentissage
U
ne véritable révolution culturelle est initiée depuis le
début du XXIème siècle grâce à la mondialisation des
économies (Banon et Chanlat, 2011). Cette globalisation de
la circulation des personnes est associée à une mondialisation des religions, que l’on retrouve dans le contexte français « en un siècle s’est affirmée une diversité religieuse sans
précédent. Les quatre cultes historiquement les plus représentés en 1905 (catholicisme, protestantismes réformé et
luthérien, judaïsme) côtoient aujourd’hui des religions géographiquement ou historiquement nouvelles (…) La France
est ainsi le pays européen qui compte le plus grand nombre de musulmans, de juifs et de bouddhistes » (Machelon,
2006). La question religieuse se positionne ainsi au cœur
des débats dans des pays qui pensaient définitivement avoir
réglé cette question, à tous les niveaux de la société, que ce
soit dans la sphère publique (école, services publics) ou au
niveau des entreprises (Banon et Chanlat, Ibid.). En effet, si
le sentiment religieux irrigue la vie des salariés, alors « les
employeurs ne peuvent-ils s’attendre à ce qu’il reste à la
porte » de l’entreprise (Kutcher et al, 2010).
1. La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité (HALDE) a été supprimée par une loi adoptée le 15 mars 2011. Elle
est désormais intégrée dans les attributions du Défenseur des droits.
Resumen
Los debates sobre las cuestiones religiosas en Francia pertenecen tanto a la esfera
pública como a la de los negocios. Así, en
el mundo profesional, algunos empleados
desean afirmar su religion. El objetivo de
este estudio exploratorio es analizar los
métodos de gestión de la integración de la
religión en las empresas francesas, desde el
punto de vista desarrollado por las teorías
de aprendizaje. Se identifican diferentes
niveles y fases, el uso de herramientas para
comprender la gestión de la religión según
los diferentes procesos de aprendizaje, los
cuales se encuentran influenciados tanto a
nivel organizativo como profesional, por
la vida intima de los gerents, empleados y
directores.
Palabras claves: Religión – diversidad –
mundo profesional – Gestión de la religión
– aprendizaje
En France, l’expression religieuse n’est certes pas
nouvelle dans le monde du travail. Nombre d’usages, de
règles qui définissent par exemple le repos hebdomadaire
ou fixent certains jours fériés, prennent racine dans une
culture marquée par le catholicisme tout en étant appréhendés comme des évidences inscrites dans des valeurs partagées. La nouveauté réside dans les revendications qui visent
à prolonger dans la vie professionnelle un engagement religieux affirmé dans la vie personnelle et jusqu’ici ignoré au
travail. La Halde1 rapportait ainsi un essor des réclamations
en matière de convictions religieuses, passées de 1 % à 3 %
entre 2006 et 2009. Les revendications religieuses présentées aujourd’hui ne semblent ainsi pas toujours se fondre
aisément dans le corpus de règles existantes et des logiques
sous-jacentes. Les entreprises et leurs managers se sentent
alors démunis face à ces attentes inédites et surtout diverses (Galindo et Surply, 2010). D’autant qu’entre le respect
de la laïcité qui ne s’applique pas aux entreprises privées,
et celui plus large de liberté religieuse institués par la loi,
« en matière religieuse, le vide juridique est sidéral »2. Les
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Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
différents acteurs doivent alors construire ou aménager à
la fois le cadre de pensée et l’instrumentation pour gérer
les revendications religieuses de plus en plus complexes et
multiples (Machelon, Ibid.).
Les entreprises doivent donc tenter de résoudre les questionnements introduits par le phénomène nouveau et récent,
de montée et de diversité des revendications religieuses dans
le contexte du travail. Ces entreprises semblent ainsi s’engager dans un processus d’apprentissage organisationnel
(Nonaka, 1999). Nous étudierons justement cette démarche
à travers une question : quel est le processus d’apprentissage construit par les acteurs managers de proximité et les
dirigeants en France, pour identifier et reconnaître d’abord,
expérimenter ensuite, institutionnaliser peut-être enfin des
modalités de gestion du fait religieux ? Nous souhaitons
ainsi éclairer un sujet considéré comme embryonnaire d’un
point de vue académique en France (Galindo et Surply,
Ibid.), alors même qu’il est traité de façon croissante dans
les magazines grand public et qu’une division « Religion
and Spirituality » a été récemment créée au sein de l’Academy of Management aux Etats-Unis.
Nous montrons comment se déroulent et s’articulent,
dans le temps, différentes phases de déstabilisation, de
tâtonnements, de recherche de repères, d’interprétation,
d’émergence et de consolidation de solutions nouvelles
pour répondre à un problème nouveau. Nous rapprocherons dans un premier temps la littérature sur l’apprentissage (Argyris, 2000; Crossan et al., 1999) de notre thème
d’étude. Nous présenterons et discuterons, dans un second
temps, les résultats issus d’une recherche exploratoire
conduite depuis novembre 2009 dans les grandes entreprises françaises. Nous mettrons ainsi en évidence que le processus d’apprentissage remet en question les « manières de
voir » le fait religieux, et partant les manières d’agir pour
gérer ce fait religieux.
Cet article permet de rapprocher la gestion du fait religieux de tout autre processus d’apprentissage, en identifiant
les phases, les niveaux et les outils, mais aussi en mettant
en évidence les freins individuels et organisationnels à l’acceptation de l’intime dans le monde du travail.
Revue de la littérature
Le rôle de l’apprentissage organisationnel face à un
fait nouveau L’apprentissage est posé comme un processus dans lequel
les individus, les collectifs ou les organisations cherchent à
résoudre un problème nouveau ou à faire face à un dysfonctionnement alors que les routines existantes ne fournissent
2. « Le fait religieux s’invite dans l’entreprise, comment concilier pratique religieuse et organisation du travail », Nouveleconomiste.fr, cahier
n° 2, 4 mars 2010.
pas de solution « toute faite ». L’apprentissage organisationnel peut être considéré « comme un phénomène collectif
d’acquisition et d’élaboration de savoirs qui modifie la gestion des situations et les situations elles-mêmes » (Koenig,
1997, p. 174). Il représente la dernière étape d’un processus
initié par l’individu car « le nouveau savoir commence toujours par l’individu (Nonaka, 1999, p. 41). Il se transforme
en apprentissage organisationnel quand il est reconnu, formalisé, diffusé dans l’entreprise et sert de cadre de référence
pour un type d’action. Si les règles de gestion sont une simple adaptation de pratiques à un cadre de pensée existant,
l’apprentissage est qualifié de « simple boucle ». Il aboutit
à gérer un problème nouveau par ajustement des routines
existantes, sans en changer le fondement, « les valeurs
directrices ». (Argyris et Schön, 1974). L’apprentissage
serait qualifié de « double boucle » s’il permettait la mise
en place de solutions appuyées sur de nouveaux schémas
mentaux de référence.
Cet apprentissage organisationnel se construit dans le
temps par la mise en relation de sous-processus. Crossan et
al., (1999) en identifient quatre :
– l’intuition se réfère à la reconnaissance de possibilités
inscrites dans l’expérience ;
– l’interprétation consiste à traduire les intuitions par des
mots ou des actes, pour soi-même ou pour les autres ;
– l’intégration est le processus qui vise à développer,
d’une part, une compréhension partagée entre individus, et, d’autre part, une coordination par ajustement
mutuel ;
– l’institutionnalisation, concerne la dernière phase et
celle qui confère le caractère organisationnel à l’apprentissage. Il s’agit des règles, des routines, pertinentes
pour permettre la diffusion et la répétition, dans l’organisation, des actions construites par apprentissage individuel et/ou collectif.
Plusieurs éléments caractérisent donc le processus
d’apprentissage :
– les niveaux : individuels, collectifs et organisationnels
– la dynamique : avec le passage d’une intuition vers la
possibilité d’une institutionnalisation des pratiques.
Il est cependant nécessaire de souligner le caractère non
linéaire des étapes d’apprentissage identifiées par Crossan
et al., (Ibid.). Gauthier (2000) pointe la difficulté dans l’apprentissage individuel et collectif, de changer son regard,
sa manière de penser et donc son comportement en profondeur. Les individus (salariés, managers, dirigeants) peuvent ainsi manifester de la résistance essentiellement pour
l’apprentissage « double boucle », qui requiert de penser
autrement, de transformer les schémas mentaux (Berry,
Quel processus d’apprentissage de la gestion du fait religieux dans les entreprises françaises ?
1983), les visions du monde. Un apprentissage conduit inévitablement à une modification dans les règles et induit un
changement de perspective quant à l’image que nous avons
de nous même, de notre statut, de notre place dans le collectif. Ces modifications peuvent entraîner des résistances et
des refus mais aussi, parfois, des solutions innovantes pour
résoudre des problèmes nouveaux.
Un processus d’apprentissage est initié par des situations inédites face auxquelles les individus et l’organisation
n’ont pas de réponses pré-établies. La question religieuse
représente justement un enjeu d’apprentissage dans les
entreprises privées françaises, afin d’apporter des réponses
claires, homogènes et justifiées aux revendications religieuses diverses.
La gestion de la diversité religieuse vue comme un
fait « nouveau » dans les entreprises françaises
En France, la gestion de la diversité fait une percée récente
sous différentes impulsions (Barth et Mahieu, 2011). Des
contraintes réglementaires obligent, d’une part, les entreprises à se saisir de ces questions souvent sur des facettes
de la diversité considérées comme visibles (genres, âge,
handicap par exemple). D’autre part, gérer la diversité
peut-être vu comme une opportunité d’affaires selon l’approche anglo-saxonne du « business case » (Cox et Blake,
1991). Les entreprises françaises se sont engagées dans un
processus pour repenser leurs politiques et leurs pratiques
en se centrant sur les diversités portées par le législateur
ou tout simplement considérées comme « utiles » pour une
approche managériale (Sanders et Belghiti-Mahut, 2011).
Cependant, le champ des diversités est à la fois glissant et
foisonnant, et évolue au fur et à mesure des transformations de la société (et des différences qui s’y affirment et/
ou s’estompent) et de son environnement juridique. La religion, définie par le Larousse (2010) comme « un ensemble
déterminé de croyances et de dogmes définissant le rapport de l’homme avec le sacré » c’est-à-dire un « ensemble de pratiques et de rites spécifiques propres à chacune
de ces croyances », s’impose comme une nouvelle facette
de la diversité à considérer. En effet, si 65 % des français
se déclarent catholiques, un nombre croissant d’entre eux
s’estiment être agnostiques (25 %), musulmans (6 %), protestants (2 %) ou juifs (600 000), dans le rapport Machelon
(Ibid.). La France, marquée par une longue (et parfois complexe) histoire en matière d’immigration de sa main d’œuvre (Al Ariss et Özbilgin, 2010), connaît par conséquent
une diversification des croyances de ses salariés. Depuis
la fin des années 90, les entreprises françaises sont ainsi
confrontées à des nouvelles demandes liées à la diversité
religieuse, qui relèvent non seulement des RH mais plus
largement du management comme le recense l’encadré 1 :
3. Expressions recueillies auprès d’un intervenant juriste lors d’une
réunion consacrée à ce sujet.
39
Encadré 1 :
Demandes partagées par les salariés de différentes
confessions religieuses (Galindo et Surply, 2010)
Sans entrer dans le détail des différentes pratiques
religieuses, il est possible de distinguer les règles de
pratiques religieuses, qui permettent d’identifier une
communauté de pratiquants :
– Les habitudes alimentaires : certains aliments sont
proscrits de l’alimentation selon les croyances (le porc
par exemple dans la religion juive ou musulmane), la
pratique du Ramadan pour les musulmans.
– Les jours de fêtes : Pessa’h ou Yom Kippour dans la
religion juive, l’Aïd pour les musulmans.
– L’organisation de la prière
– Les signes visibles d’appartenance religieuse : la croix
pour les catholiques, la kippa pour les juifs
– Les autres pratiques liées à la religion : autres rites ou
coutumes de vie (relations entre individus par exemple).
Si la religion renvoie à l’intime et à la face cachée de
l’individu, elle peut être ainsi dévoilée aux yeux de tous,
notamment dans le contexte du travail, par le biais de manifestations ou de la religiosité de chacun (King et al., 2009)
comme le précise le tableau précédent. Plus que de simples
demandes, il s’agit souvent de revendications. Les salariés
qui revendiquent, considèrent réclamer une ou des choses
dues au nom de la liberté de conscience et de culte posée
par la loi de 1905, qui institue le principe que la France est
un pays dans lequel il ne s’agit pas simplement de tolérer
mais de permettre l’expression d’un choix religieux. En ce
sens, ces revendications renvoient à la fois au droit à l’indifférence, à « être traité comme les autres », et à « un certain droit à la différence »3�. Ces revendications se diffusent
en outre dans toutes les sphères des entreprises : « Le fait
nouveau, réside dans la diversité religieuse dans le secteur d’ingénierie » (un responsable des ressources humaines d’une grande entreprise automobile). Des directeurs
des ressources humaines constataient plus largement une
hausse des revendications religieuses dans 37 % des entreprises basées en Ile-de-France, et de 26 % sur l’ensemble
du territoire4.
L’enjeu pour les entreprises est de savoir apporter des
réponses à ce type de dévoilement de l’intime, qui sont loin
d’être évidentes pour nombres d’entre elles, comme le rappelle un récent avis de la Halde « les entreprises soulignent
la difficulté de déterminer le champ des restrictions de l’expression religieuse sur le lieu de travail »5. 4. 393 DRH interrogés en avril 2008, Sondage Ifop- Les Echos.
5. La Halde, « Clarification sur le port du signe religieux », 29/03/2011.
40
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
Les limites des pratiques existantes face à la diversité
religieuse
L’apprentissage naît à partir du moment où les pratiques
et routines existantes ne fournissent pas de solution « toute
faite » à la gestion des situations. Dans le cas de la religion,
les routines reposent notamment sur des règlementations
historiquement mises en place.
En France, les croyances et pratiques religieuses sont
en effet profondément marquées par une valeur fondatrice
et un principe essentiel de la République, le principe de laïcité, qui consacre en 1905 la séparation des Eglises et de
l’Etat. Cette laïcité s’incarne depuis dans de nombreuses
obligations juridiques. Le Préambule de la Constitution
française du 27/10/1946 précise ainsi que « nul ne peut
être lésé dans son travail et dans son emploi, en raison de
ses origines, de ses opinions ou de ses croyances », tandis
que l’article 2 de la Constitution de 1958 affirme que « La
France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les
citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion.
Elle respecte toutes les croyances ».
La liberté de croire, mais aussi de ne pas croire, en
des religions diverses est ainsi inscrite dans les gènes de
la société française. Respecter cette liberté de croyance
religieuse était d’autant plus aisée dans un contexte où la
France était dominée par « l’infrastructure culturelle du
christianisme » (Willaime, 2007) 6. Le calendrier chrétien
des jours fériés et le rituel du poisson le vendredi dans les
restaurants d’entreprises en sont les exemples les plus visibles. Un modèle dominant s’est ainsi imposé en France,
associant liberté de croire et domination de la religion
catholique, et ce, à tous les niveaux de la société, y compris
les entreprises. Et face aux « nouvelles » revendications religieuses exposées précédemment, seul le principe de liberté
de croyances prime dans les entreprises privées. La Halde a
rappelé en 2009, que le principe de laïcité s’impose à l’Etat
et aux intervenants publics, et non aux personnes privées.
Les salariés du secteur privé sont ainsi régis par le principe de liberté de conscience inscrit dans la Constitution.
Une entreprise, une association ou un particulier, ne peut
alors invoquer le principe de laïcité pour limiter la liberté
religieuse d’autrui. Toute la question est de savoir quelles
sont les limites de cette liberté dans les entreprises. Dans
un récent rapport, le Haut Conseil à l’Intégration entretient
l’ambiguïté, en notant qu’il s’agit « d’affirmer que, dans
l’entreprise privée […], on a le droit de vouloir travailler
dans un cadre religieusement neutre, les individus pouvant
y être préservés de toute pression communautaire » (2011,
p.6)7.
6. Rappelons que la loi de décembre 1905 « concernant la séparation des églises et de l’état » s’applique aux quatre confessions alors
représentées en France métropolitaine : le catholicisme, la confession
d’Augsbourg (les protestants luthériens), les réformés (les protestants
calvinistes) et les pratiquants du judaïsme.
Dès lors, ce qui était auparavant réglé de manière
informelle, doit aujourd’hui comme nous l’avons souligné précédemment, s’appuyer sur des droits concrets. Et
les entreprises n’ont pour l’instant que peu de références
juridiques sur ce sujet. La loi du 4/08/1982 précise seulement que le règlement intérieur ne peut comporter des éléments entravant la liberté des salariés. L’article L. 1121 du
Code du Travail, rappelle que « nul ne peut apporter (…)
des restrictions qui ne seraient justifiées par la nature des
tâches à accomplir, ni proportionnées au but recherché ».
Par exemple, un arrêt du Conseil d’Etat (25/01/89) a censuré un règlement intérieur interdisant les « discussions
politiques ou religieuses ». En 2004, une décision individuelle du Ministère du Travail a également précisé que l’interdiction de tout signe religieux ou politique ostentatoire
dans le règlement intérieur, ne répond pas aux exigences de
l’article 1121-1 du Code du Travail. Six limites à la liberté
d’exercice de la religion dans le cadre du travail sont cependant acceptées.
– T
rois concernent directement l’entreprise : la revendication de la religion ne doit pas entraver des aptitudes
pour le travail, l’organisation de la mission, l’intérêt
commercial de l’entreprise.
– T
rois concernent l’individu dans l’entreprise : le respect
des règles de sécurité et d’hygiène doit pouvoir être
assuré, et le prosélytisme est également interdit sur son
lieu de travail.
La question, à l’intérieur des entreprises, est alors non
pas de revenir sur les principes de laïcité et d’égalité érigés par les lois successives, mais plutôt de trouver une voie
pour ne pas faire de la laïcité une quasi-religion, sans tout
accepter d’un autre côté (Galindo et Surply, Ibid.).
Question de recherche
L’irruption de manifestations de la diversité des croyances religieuses en entreprise correspond finalement à des
revendications pour faire évoluer et/ou changer les règles
existantes, qui peuvent affecter la répartition du travail (ex.
attribution de congés pour de fêtes religieuses, refus d’appartenir à une équipe « mixte » hommes/femmes) ou encore
les comportements au travail (ex. manière de se saluer,
rapport à l’autorité). Ces revendications peuvent être considérées comme un élément « déclencheur » d’un processus
d’apprentissage, et, notamment, d’apprentissage organisationnel susceptible d’aboutir à l’institutionnalisation de
certaines pratiques. L’objectif de cet article est de s’intéresser au processus d’apprentissage de la gestion du fait
religieux dans les entreprises françaises. Nous l’étudierons
en nous appuyant sur une question : quel est le processus
7. « Expression religieuse et laïcité dans l’entreprise », Haut Conseil à
l’Intégration, Avis, 1/09/2011.
41
Quel processus d’apprentissage de la gestion du fait religieux dans les entreprises françaises ?
d’apprentissage construit par les acteurs managers de
proximité et les dirigeants, en France, pour identifier et
reconnaître d’abord, expérimenter ensuite, institutionnaliser peut-être enfin des modalités de gestion du fait religieux ? Nous proposons ainsi une lecture de la gestion de la
diversité religieuse par le biais des théories de l’apprentissage, afin d’envisager les niveaux individuels, collectifs et
organisationnels de ce processus.
Choix méthodologiques et présentation du terrain
« Quand on aborde le sujet [du fait religieux] avec des
dirigeants de haut niveau tout le monde est silencieux. Les
gens ne parlent pas. Les gens ont peur de s’exprimer » (une
consultante diversité). Cette citation résume le caractère à
la fois récent et tabou de la question du fait religieux en
entreprise, et les difficultés que l’on peut rencontrer en
France, lorsqu’une recherche est conduite sur ce sujet. Pour
ce faire, nous avons privilégié une recherche qualitative et
exploratoire, fondée sur des données primaires et secondaires recueillies entre septembre 2009 et mars 2011. 11 entretiens semi-directifs ont été menés, d’une durée moyenne
d’1 h 30, auprès de différents acteurs dans des grandes
entreprises mondialisées appartenant aux secteurs automobile, bancaire, agro-alimentaire, de l’intérim, informatique,
logistique, de la restauration collective et des télécommunications. Nous avons interrogé des dirigeants, managers
de proximité et responsables des ressources humaines, que
nous avons rencontrés par effet « boule de neige » (Al Ariss
et Özbilgin, Ibid.) ou par démarchage direct.
Pour appréhender le processus d’apprentissage, nous
avons recueilli auprès de ces répondants les antécédents,
les modalités mais aussi les effets de la montée des revendications religieuses, à travers des questions du type « quels
sont les événements qui vous ont conduit à considérer la
question religieuse dans votre organisation ? », « pouvezvous nous décrire les phases d’évolution de la prise en
compte de ce phénomène dans votre entreprise ? ». Nous
avons conduit une forme d’approche longitudinale, dans
la mesure où les personnes interrogées au cours de l’année 2009, ont pour certaines participé ensuite à des travaux
collectifs (par exemple au sein d’organismes tels l’Association Française des Managers de la Diversité, AFMD)
et auxquels nous avons eu accès. Des documents internes
à ces entreprises ont également pu être recueillis afin de
comprendre les orientations instaurées et diffusées dans ces
organisations. Nous avons ainsi suivi l’évolution de leurs
politiques et pratiques en matière de diversité religieuse.
Cinq observateurs privilégiés de ce phénomène, journaliste,
syndicaliste, conseiller culturel, consultants, ont également
été interviewés, afin de recueillir leur vision englobante et
moins impliquée, du fait religieux dans l’entreprise.
Nous avons triangulé nos données en nous appuyant sur
des données secondaires (rapports d’étude, actes de conférences) émanant d’organisations diverses (Halde, ANDRH,
cabinets conseil, colloques AFMD) et sur des articles de
presse (spécialisée ou généraliste) qui nous ont permis de
suivre l’évolution de certaines politiques.
Pour traiter ces données primaires et secondaires, nous
avons procédé à une analyse thématique en isolant les thèmes dans un texte afin de permettre sa comparaison avec
d’autres textes traités de la même façon (Ghiglione et
Matalon, 1991). Certains thèmes renvoient à des dimensions
clefs de la gestion du fait religieux en entreprise (organisation du travail, conditions de travail par exemple) tandis que
d’autres émergent de notre analyse (pratiques collectives/
individuelles, rôle des RH/ des managers de proximité, stéréotypes, étapes et modalités du processus). L’analyse de
la diversité de ces informations nous a permis de trianguler
nos données, en recueillant plusieurs exemples des résultats
trouvés, auprès de différentes sources (Miles et Huberman,
2003). Cette triangulation a combiné le recours aux récits
collectés lors des entretiens, car « raconter, c’est déjà expliquer » (Ricoeur, 1985), et, l’utilisation de sources secondaires. Elle permet de relever les ambiguïtés et entretient
la vigilance.
Résultats
Si pour Argyris (2000), nous apprenons quand nous détectons une erreur et que nous la corrigeons, ici l’erreur est
d’abord perçue au niveau du « terrain » comme une difficulté à répondre aux revendications religieuses par absence
de règles, de pratiques appropriées à la situation. Les managers de proximité sont les premiers à capter les signaux et
à être soumis à des situations réelles alors que la question
religieuse n’a pas encore été observée et analysée par les
responsables RH ou par les pilotes diversité. Le plus souvent également, le fait religieux provoque au niveau « central » « affolement et philosophie sur ce sujet, et c’est même
parfois tour à tour » (responsable diversité d’une entreprise
de services). A l’issue de notre recherche exploratoire,
émerge un processus, que nous pouvons maintenant caractériser en reprenant la typologie de Crossan et al. (Ibid.)
exposée précédemment.
L’intuition ou les déclencheurs de l’apprentissage
Dans un premier temps, les managers de proximité se trouvent confrontés à des revendications locales sous la forme
de demandes d’aménagements d’horaires de travail, de
tenue vestimentaire ou de relations professionnelles : « On
demande aux managers des aménagements d’horaires pour
le Ramadan. En région parisienne, certains salariés refusent de parler à une supérieure hiérarchique qui serait une
femme. Des femmes ont des problèmes lors des visites médicales quand ce sont des hommes, on nous a aussi demandé
des salles de prière. J’ai aussi eu il y a quelques années un
autre cas. Un juif qui ne voulait pas travailler le samedi
alors que son travail le demandait » (Responsable diversité
42
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
entreprise de logistique). Il s’agit alors bien de la phase
« d’intuition » puisqu’il s’agit pour eux de progressivement
reconnaître la nécessité de traiter cette question et d’envisager la diversité religieuse comme une dimension à gérer au
même titre que les autres types de diversités. Ces managers
rencontrent alors cependant des difficultés à se référer à des
principes et à des pratiques existants dans leur entreprise.
L’interprétation ou les prémisses d’un apprentissage
La récurrence de demandes liées à la diversité religieuse
fait progressivement entrer les managers locaux et les
directions dans la phase d’interprétation : « La question
religieuse est toujours l’objet d’interprétations » (consultant sur ce thème). Ce qui pouvait jusque-là être considéré
comme marginal et ponctuel, devient un sujet à traiter tant
au niveau local qu’organisationnel. Les managers locaux
pratiquent souvent ce que l’on peut qualifier de « bricolages clandestins » : faute de solutions proposées au niveau
supérieur, ils construisent eux-mêmes leurs propres principes pour répondre et parfois endiguer les revendications
religieuses, avec une intrusion alors de l’opinion personnelle dans le professionnel : « quand on s’y intéresse [à la
diversité], il y a souvent une dimension personnelle. Le raisonnement purement rationnel ne suffit pas. Il faut aussi de
l’émotionnel » (consultante en diversité).
S’ils entrent ainsi dans un processus d’apprentissage
individuel face à la question religieuse, ils résolvent souvent
cette question au cas par cas. La pression du « business »
(répondant) impose alors de rapides prises de décision. Ce
sont des éléments qui contribuent à la variété des solutions
adoptées localement, et donc aussi, souvent, à leur manque
de visibilité voire de lisibilité. Le manager de proximité
aménage ainsi des horaires, des postes de travail : « Le bons
sens quotidien fait que les managers locaux ont l’habitude
de laisser leurs collaborateurs musulmans s’organiser sur
le sujet, s’organiser pour trouver un lieu » (Responsable
diversité dans la restauration collective). Pour autant, il
tente de s’inscrire dans les « schémas d’exécution » existants, sans bouleverser l’ordre de l’entreprise. Un répondant
(secteur industriel) affirme ainsi « On agit à l’amiable, on
a une discussion, ça se passe plutôt bien. On se rapporte
aux règles », celles de l’entreprise (par exemple, celle qui
concerne le nombre de jours de congé) ou celles qui sont
imposées par la loi (par exemple celles se rapportant à la
non discrimination), que l’on aménage de manière contextuelle… voire subjective : « En même temps, c’est évident qu’on va s’adapter au niveau de la production. En
période de ramadan, les ouvriers sont moins vaillants en
milieu d’après-midi et on en tient compte » (Responsable
RSE entreprise industrielle). L’apprentissage du manager
de proximité peut se cantonner au niveau individuel. En
effet, les savoirs construits pourront rester sans effet sur le
reste de l’organisation pour diverses raisons. Par exemple,
le manager de proximité n’est pas visible dans l’organisation ou bien la pertinence des savoirs pour répondre aux
problèmes est elle-même en cause. Plus encore, les savoirs
peuvent ne pas correspondre au positionnement de l’entreprise sur l’opportunité et la manière de prendre en compte
le fait religieux.
Toutefois, lors de cette phase, les directions diversités
et/ou RH des entreprises commencent à être confrontées
aux remontées de managers en quête de repères : « C’est
par exemple, le cas où un manager vient me voir et dit,
mon équipe a accueilli une jeune femme voilée, quelles
vont être les réactions de mon équipe. Le manager avait
fait sa connaissance quand elle ne portait pas le voile, et
devait l’accueillir en stage. Est-ce que je dois lui demander
d’enlever le foulard… » (Responsable diversité, industrie).
L’apprentissage se construit alors au niveau des directions
représentées par le pilote diversité et/ou le DRH des grandes
entreprises, lorsque des revendications religieuses se font
plus nombreuses, plus pressantes aussi et que des pratiques
pour faire face aux problèmes se mettent en place au niveau
des opérationnels : « la difficulté, c’est le outing : quand
une personne en poste change son apparence physique.
C’est la même chose que le piercing, si une personne arrive
du jour au lendemain toute piercée, il faudra voir si c’est
compatible avec l’entreprise. Il faut avoir la bonne réserve
par rapport à un signe » (responsable diversité, entreprise
intérim). Au niveau du top management (niveau « central »
ou niveau « corporate »), l’apprentissage peut s’appuyer sur
des solutions déjà en cours d’expérimentation. Mais il se
construit aussi sur de nouveaux savoirs en bénéficiant de
ressources, comme l’appui de la direction générale, l’accès
à l’information dans l’entreprise et celle de réseaux « d’experts » (ex. AFMD, IMS entreprendre pour la cité, les avis
du Haut Conseil à l’Intégration). Cet apprentissage pourrait
bien être qualifié « d’hybride ». En effet, il est partiellement
individuel, parce que le responsable diversité et/ou le DRH,
lui-même démuni de référentiel préalable pour gérer le fait
religieux, doit être capable de se construire individuellement une représentation du phénomène afin d’en dessiner
des principes et des pratiques nouveaux mais cohérents
avec les valeurs idiosyncrasiques de son organisation.
Cette phase d’interprétation initie finalement plusieurs
processus d’apprentissage : au niveau local, de la part des
managers, et à un niveau plus global voire inter-entreprises,
entre les managers de la diversité. La plupart des grandes
entreprises terrains de cette recherche, se positionnent dans
cette phase où deux niveaux d’apprentissage co-existent
sans nécessairement se rencontrer et s’accorder. Certaines
d’entre elles font alors un choix délibéré de rester à ce stade
du processus : « Il faut donc dédramatiser. Ne pas en parler.
Je préfère que ça reste tabou, peu répandu et que cela ne
soit pas grave si ça reste marginal, plutôt que cela ne soit
pas tabou, répandu et pas réglé. C’est pire » (Responsable
RSE, banque).
Quel processus d’apprentissage de la gestion du fait religieux dans les entreprises françaises ?
L’intégration ou l’apprentissage croisé entre
les différents niveaux d’apprentissage
43
s’inscrivent pas forcément ni dans les mêmes temporalités,
ni dans les mêmes objectifs.
La phase précédente avait dessiné les contours de l’intégration en favorisant les échanges entre les managers et
responsables diversité de l’organisation. La phase « d’intégration » est synonyme d’interactions croissantes entre
les différents niveaux, notamment à l’occasion de réunions
locales sur des thèmes plus généraux de RH et/ou de diversité, en vue d’aller vers l’homogénéisation des réponses :
« On a aussi des difficultés par rapport à la taille de notre
entreprise. Il faut que tout le monde ait les mêmes réponses (et non pas des arrangements, même si certains se sont
accommodés de ça) » (Responsable diversité, distribution).
Les réponses portent alors sur l’affirmation des principes de
liberté religieuse tout en respectant l’organisation de l’entreprise : « Dès qu’un manager nous pose une question sur
ce sujet, ça fait immédiatement l’objet de mails avec les
RH. Les questions se posent et on y répond avec le règlement intérieur et ce qui y est prévu » (Responsable diversité
entreprise industrielle).
L’apprentissage devient collectif pour deux raisons
principales. D’une part, il s’intègre et se combine, même
de manière très incomplète, à l’expérimentation conduite
par les managers de proximité. D’autre part, l’apprentissage des directeurs diversité ou RH se construit aussi dans
les échanges avec les homologues d’autres entreprises au
sein de réseaux. Le tableau 1 synthétise la manière dont les
situations sont appréhendées aux différents niveaux opérationnel et central et leur incidence sur les principes et les
pratiques.
Ce tableau souligne la confrontation des deux niveaux
concernés par la gestion de la diversité religieuse, qui ne
Une institutionnalisation partielle
Aucune entreprise rencontrée dans cette recherche n’est
dans la phase « d’institutionnalisation » décrite par Crossan
et al. (Ibid.), avec la mise en place de routines et de principes partagés dans l’entreprise. En revanche, nous pouvons
avancer que quelques entreprises se sont engagées dans une
« institutionnalisation modérée ou partielle », au sens où les
directions (diversité ou RSE), commencent à construire des
règles pouvant s’appliquer à la gestion du fait religieux. Il
s’agit alors plutôt d’une réaffirmation de règles existantes
face à ce thème émergent de la diversité. A l’occasion de
réunions, certains principes ou règles sont alors rappelés.
L’élaboration d’outils en interne tels que des guides, permet de proposer des réponses appropriées aux managers
face aux revendications religieuses. « L’idée de ce guide est
de donner quelques repères légaux, des délibérations de
la Halde, des situations concrètes, et de dire quelle est la
position à tenir » (Responsable diversité, distribution). Ces
guides récapitulent par exemple les fêtes et coutumes des
différentes religions, et proposent des situations concrètes
dans lesquelles peuvent se retrouver les managers et les attitudes à adopter. Il s’agit alors de diffuser dans l’organisation des règles homogènes et claires pour que les managers
puissent faire face aux différentes situations de gestion « On
est dans une politique sur voilà ce qu’il faut faire et ne pas
faire » (Responsable diversité entreprise agro-alimentaire).
A notre sens, cette institutionnalisation reste cependant
modérée puisque les entreprises considérées concentrent
souvent ce genre d’actions à quelques niveaux ou services
Tableau 1
Les deux niveaux de gestion du fait religieux
Caractéristiques
de la situation
Niveau opérationnel :
managers de proximité
Niveau central :
Directeurs de la diversité ou DRH
Mission
Produire des biens ou services
Produire des règles transverses à l’organisation
Objectif
Opérationnel
Stratégique
Temporalité
Court terme
Moyen et long termes
Appréhension de la situation
de gestion du fait religieux
Située, locale
Globale, transverse à l’organisation
Elaboration des principes
(dans la gestion du fait religieux)
Pragmatisme
Recherche d’homogénéisation (par rapport aux
principes existants ou dans la construction de
nouveaux principes)
Construction de pratiques
(dans la gestion du fait religieux)
Variabilité (cas par cas)
Recherche de standardisation
44
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
de l’entreprise : « Il y a un bon guide édité par IMS sur ce
sujet, que je voulais diffuser aux managers. Les RH n’ont
pas été d’accord, pour ne pas créer un problème (…) Mais
c’est quand même un débat avec les RH » (Responsable
diversité industrielle).
Comme le résume le schéma 1, cette recherche exploratoire permet d’identifier les deux niveaux impliqués, ainsi
que le processus d’apprentissage initié dans les entreprises
françaises étudiées.
Ce schéma représente un idéal-type au sens de Weber,
du processus d’apprentissage organisationnel. Il caractérise les traits essentiels et cohérents des phases et niveaux
d’apprentissage de la gestion du fait religieux issus de notre
étude terrain. Une réflexion peut être maintenant menée,
partant de cet idéal-type, pour caractériser ce processus
d’apprentissage mais aussi affiner son analyse.
étude, et dans ce cadre, les règles sont modifiées à la marge,
en conformité avec la loi (respect de la liberté religieuse) et
les avis de la Halde.
L’apprentissage serait qualifié de « double boucle » s’il
permettait la mise en place de solutions appuyées sur de
nouveaux schémas mentaux de référence. Sans atteindre
ce modèle d’apprentissage, des interrogations, pointées par
certains de nos répondants, pourraient bousculer l’ordre
existant et être à l’origine d’un nouveau cadre de pensée.
Ainsi, un « pilote diversité » nous déclare « on est avant
tout dans une société laïque, même si c’est difficile et une
entreprise n’est pas exempte de convictions » ou encore « on
ne décrète pas de jours de congés religieux, même, si le
calendrier est fortement inspiré de la religion catholique ».
La question de la légitimité des règles existantes est posée
même si leur socle est encore protégé.
Un apprentissage « émergent »
Discussion
Nous considérons ainsi que le processus étudié (l’apprentissage de la manière de répondre à des revendications
religieuses) correspond à un « apprentissage émergent »
pour plusieurs raisons.
Quel type d’apprentissage ?
Un changement de pratiques ou une construction de
nouveaux principes d’action
Si les règles de gestion du fait religieux sont une simple
adaptation de pratiques à un cadre de pensée existant,
l’apprentissage est qualifié de « simple boucle ». Il aboutit à gérer un problème nouveau par ajustement des routines existantes, sans en changer le fondement, « les valeurs
directrices ». (Argyris et Schön, 1974, 1978). Dans notre
D’abord, l’apprentissage ne résulte pas de situations
voulues par la direction mais imposées par un contexte
importé de la société civile : « On a des salariés qui sont
pratiquants, ont besoin d’aller vers nous, pour pouvoir
respecter les devoirs de leur religion la religion fait irruption dans l’entreprise de manière très forte » (Responsable
diversité entreprise agro-alimentaire). C’est pourquoi, « les
DRH ont été surpris »8.
Schéma 1
La gestion du fait religieux vue comme un processus d’apprentissage
Phases repérées
du processus d’apprentissage
Phase 4 :
Institutionnalisation
Echanges
et construction de repères
Phase 3 :
Intégration
Phase 2 :
Interprétation
Phase 1 :
Institution
Formalisation des règles produites par les managers,
combinées
à des règles
produites par la direction
Compétences
personnelles
Accommodements managériaux
& réflexions inter-directions
Revendications
localisées
Apprentissage
individuel
Niveaux d’apprentissage
Apprentissage
organisitionnel
Quel processus d’apprentissage de la gestion du fait religieux dans les entreprises françaises ?
Ensuite, la Direction RH s’est trouvé « démunie » (selon
plusieurs répondants), sans cadre de pensée de référence
pour affronter la situation : « Les RH sont paumés par
rapport à ces sujets, par rapport aux autres. C’est un peu
comme une armée en route, sur les quatre autres thèmes,
ils y vont comme un seul homme parce-qu’il le faut. Mais
par rapport à la religion ou à l’orientation sexuelle, ils sont
paumés » (Responsable RSE, banque).
Enfin et surtout, les managers de proximité, confrontés
à des situations inédites, ont bricolé et contribué à inventer
des solutions aux problèmes nouveaux. Un focus sur eux est
donc indispensable pour comprendre l’évolution du processus, comme d’autres recherches sur la gestion de la diversité
ont pu le montrer (Roberson et Kulik, 2007). Développer le
processus d’apprentissage jusqu’à l’apprentissage organisationnel aboutit à stabiliser certaines des règles construites
par les managers de proximité et par les directeurs diversité
et RH pour les étendre à l’organisation. Le processus d’apprentissage des situations pour agir est donc aussi processus
pour construire, aménager, voire transformer les règles.
Deux variables clefs dans l’apprentissage
organisationnel L’apprentissage quant aux faits religieux en entreprise peut
s’appuyer, comme nous l’avons précédemment souligné,
sur un processus déjà avancé de la gestion d’autres types
de diversités (handicap, sexuelle, âge…). Il peut être aussi
facilité ou au contraire freiné par deux phénomènes identifiés lors de notre étude terrain. En effet, la question de
la religion renvoie les entreprises aux frontières instituées
entre les sphères privées et professionnelles. Elle interroge
aussi les managers sur leur propre identité face au dévoilement de l’identité personnelle de leurs subordonnés.
Au niveau organisationnel : la porosité vie privée – vie
professionnelle Kreiner et al. (2006) identifient trois manières pour les
salariés d’articuler identité au travail (ce qu’ils font) et
identité personnelle (ce qu’ils sont). Ils peuvent choisir de
les séparer, et ils n’auront alors pas de volonté d’exprimer
leurs convictions religieuses de quelque manière que ce
soit. Ils peuvent aussi tenter d’équilibrer ces deux facettes
de leur identité ou même de les fusionner. D’autres sont, à
cette occasion, renvoyés à leur système personnel dans le
contexte du travail. Dans ces cas, les entreprises sont interrogées sur leurs propres frontières entre ce qui relève du
privé ou de l’intime, et ce qui est professionnel. De la même
manière qu’au niveau individuel, trois postures sont observées dans la littérature (Kirchmeyer, 1995), et peuvent dans
le cas de notre recherche, entraver ou au contraire faciliter
le processus d’apprentissage décrit dans le schéma 1 :
8. Titre d’un article du Nouveleconomiste.fr, paru en 2010 et cité précédemment.
45
– la « séparation » : l’organisation se tient alors à l’écart
de la vie privée de ses salariés pour des motifs économiques, idéologiques, par carence de modèles ou par peur
d’une réaction négative des salariés. L’apprentissage
ne dépassera alors pas la phase d’intuition, et on entendra alors « La religion, c’est l’affaire privée des salariés, pas de l’entreprise » (un manager). Cette posture
constitue alors une sorte de barrière à l’entrée empêchant tout processus de considération collective de la
question religieuse dans la sphère professionnelle. Le
processus se cantonnera alors à la phase d’intuition et
d’interprétation au niveau uniquement des managers,
qui doivent alors gérer (seuls) le refus de toute revendication religieuse.
– l’« intégration » : à l’autre extrême, l’entreprise cherche
alors à réduire la frontière entre vie professionnelle et
vie personnelle sur le modèle de l’employeur paternaliste. Le processus d’apprentissage sera alors facilité
par la mise en place antérieure de pratiques permettant
aux salariés d’affirmer leur identité personnelle sur leur
lieu de travail. Cette posture risque de ne pas conduire à
l’institutionnalisation de pratiques. La fusion entre professionnel et personnel apparaît alors si naturelle qu’elle
ne requiert pas la mise en place de pratiques formelles
et surtout homogènes au niveau de l’organisation.
– le « respect » : l’entreprise est alors dans une posture
intermédiaire. Ce cas est a priori le plus propice à la
mise en place d’un processus d’apprentissage organisationnel. La question du fait religieux fait alors l’objet
de réflexions spécifiques tant aux niveaux individuels
que collectifs : « On a eu des négos l’année dernière.
Moi je pilotais celle sur la négociation vie privée-vie
professionnelle. Est sortie les autorisations spéciales
d’absences pour fêtes religieuses » (responsable diversité entreprise de télécommunications). Rien ne garantit
cependant que le processus aboutisse à l’institutionnalisation de pratiques. Cette posture a pour objectif de
maintenir une frontière entre vie au travail et vie privée tout en reconnaissant le fait religieux et en tenant
compte des contraintes personnelles des salariés dans
la gestion des ressources humaines (par exemple, l’organisation des congés ou l’aménagement d’espaces de
prière). On rencontre alors des discours du type : « Nous
essayons systématiquement de trouver des solutions
permettant aux salariés désireux de pratiquer leur religion, de le faire sur le lieu de travail » (un dirigeant).
Les avancées dans le processus d’apprentissage organisationnel sont ainsi conditionnées par le positionnement
préalable du curseur de séparation vie privée-professionnelle. Notre étude terrain nous permet de constater que
plutôt que de remettre en cause cette frontière, les revendications religieuses vont au contraire renforcer les postures
existantes. La diversité religieuse n’est ainsi jamais dans
46
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
notre recherche-terrain, le prétexte (de la part des managers, et contrairement à ce que certains salariés revendiquent) pour déplacer les frontières instituées préalablement
entre privée et professionnel.
cas, les stéréotypes sont occultés des échanges. Dans
d’autres cas, ils sont caractérisés différemment ou viennent heurter le déni de certains managers, aboutissant à
une incompréhension réciproque.
La porosité organisationnelle entre professionnel-personnel n’est cependant pas le seul facteur facilitateur ou
frein au processus d’apprentissage. Les stéréotypes sont en
effet prégnants lorsqu’est évoquée la question religieuse en
entreprise.
Les stéréotypes représentent un enjeu majeur pour le
management de la diversité. Il s’agit de changer les attitudes et les comportements managériaux, afin de réduire
les attitudes négatives, stéréotypes et les préjudices contre
les membres de différents groupes. « On ne stigmatise pas
une communauté par rapport à une autre. On travaille sur
les stéréotypes pour que les gens soient droits dans leurs
bottes. On va faire prendre conscience que les gens sont
discriminatoires, parce que c’est comme ça » (un responsable diversité dans les télécommunications). Mais changer les attitudes et réduire les stéréotypes est une entreprise
de long-terme, dans la mesure où ils sont ancrés dans la
culture et sont renforcés par la vie hors travail (Roberson
et Kulik, Ibid.), comme le souligne un théologien dans
un groupe de réflexion conduit sur ce sujet : « Beaucoup
des questions qui apparaissent dans l’entreprise sont des
sujets de société et ne peuvent être entièrement résolues
par celle-ci. Il y a interaction perpétuelle entre société et
entreprise ». L’entreprise ne peut ainsi seule faire évoluer
les mentalités des individus. Qui plus est, le travail et/ou les
formations centrés sur ces stéréotypes sont parfois difficiles
face au caractère tabou de ce sujet, comme le souligne une
consultante spécialisée dans le management de la diversité :
« Dans l’organisation d’une table ronde sur le fait religieux
avec des animateurs internes, les « gens se regardaient en
chien de faïence ». A la pause, ils ont commencé à raconter
« off » leurs histoires ». Enfin, ce processus de déconstruction des stéréotypes se heurte de plein fouet aux tendances
à l’uniformisation et l’assimilation des individus (Sanders
et Belghiti-Mahut, Ibid) et à la standardisation de la GRH
(Barth et Mahieu, Ibid.).
Au niveau individuel : le poids des stéréotypes Comme nous avons pu le souligner précédemment, les
managers de proximité sont les acteurs clefs au début du
processus. Ils sont les premiers à capter et à recevoir les
revendications religieuses (phase 1 d’intuition) auxquelles
ils doivent répondre dans la phase d’interprétation. C’est
aussi par eux par que passe nécessairement la phase d’institutionnalisation des pratiques et/ou leur mise en œuvre.
Cependant, ces managers sont porteurs de différents stéréotypes, définis comme « une croyance concernant les groupes sociaux » (Rudman et al., 2008 dans Landy, 2008). Ils
peuvent alors associer des attributs à un groupe par exemple en matière de religion (Roberson et Kulik, Ibid.). Les
musulmans sont ainsi parfois l’objet de stéréotypes négatifs (Ghumman et Jackson, 2010), notamment lorsque leur
appartenance religieuse est rendue visible par le port d’un
signe religieux, tel le voile islamique (Al Ariss et Özbilgin,
Ibid.). Plus largement, tout croyant s’expose à des stéréotypes dès lors qu’il revendique sa religiosité, comme le
soulignent les cas de demandes d’obtention d’un jour de
congé pour le vendredi saint. Le salarié passera ainsi d’un
statut de potentiellement discréditable au sens de Goffman
(1963), dans la mesure où sa différence n’est pas immédiatement perceptible dans la vie courante, à celui de discrédité (en affichant son « stigmate »). Les organisations ont
alors certes la possibilité de mettre en place des politiques
pour prévenir l’influence ces stéréotypes. Mais force est de
constater qu’ils existeront toujours dans la société et qu’il
paraît difficile tant pour les managers que pour leurs collaborateurs de laisser leurs croyances sur le pas de la porte
de leur entreprise (Landy, 2008), comme le confirme un
responsable diversité d’une entreprise d’intérim : « Ca fait
référence d’une part à l’intime, et d’autre part au subjectif.
Ca renvoie aussi au débat public ».
Ces stéréotypes jouent alors un rôle à deux niveaux du
processus :
– L
ors de la phase d’intuition, les managers de proximité peuvent écarter d’emblée ou au contraire accepter
directement les revendications de leurs salariés selon
les stéréotypes positifs ou négatifs qu’ils peuvent avoir,
consciemment ou pas, vis-à-vis des pratiquants de certaines religions.
– L
ors de la phase d’intégration, une rupture dans le processus d’apprentissage peut survenir. Dans certains
Ces deux phénomènes remettent en cause, chacun à leur
niveau le processus d’apprentissage. La porosité de l’organisation à la vie privée de ses salariés est du ressort des politiques de l’entreprise, elle peut être initiée sous l’impulsion
de pratiques et d’exemples, et ainsi favoriser l’intégration
du fait religieux dans l’organisation. La volonté de l’organisation peut en ce sens jouer en faveur de l’apprentissage
décrit dans le schéma 1. Les stéréotypes sont plus ancrés
dans l’intime et l’inconscient parfois de chaque salarié. Si
l’entreprise peut engager le dialogue et la reconnaissance
de ses stéréotypes, il s’agit aussi d’un processus individuel
et parfois long de prise de conscience.
Quelle évaluation de l’apprentissage ? Observations
et perspectives de recherche
Dans cette dernière partie de la discussion, nous nous intéressons à l’évaluation de l’Apprentissage Organisationnel
(AO) pour questionner la pertinence des réponses apportées
aux revendications religieuses et la faisabilité de leur mise
47
Quel processus d’apprentissage de la gestion du fait religieux dans les entreprises françaises ?
en œuvre. Cette dimension de l’AO offre l’opportunité de
perspectives de recherche, de travaux empiriques afin de
développer et d’enrichir cette analyse.
Le passage entre apprentissage individuel et apprentissage organisationnel s’effectue –ou non- quand l’organisation s’engage dans un processus social d’interactions
(Ingham, 1994). L’entreprise construit alors de nouvelles
connaissances et de nouveaux savoir faire qui lui sont utiles
pour « élargir son répertoire de comportements » (Dodgson,
1993) afin d’agir dans la situation nouvelle créée par la
nécessité de gestion du fait religieux. Pour autant, l’apprentissage organisationnel ne se produira que si les membres
de l’organisation (et pas seulement des individus isolés) ont
appris, c’est-à-dire ont fait évoluer leur comportement relatif à la gestion du fait religieux (cf. paragraphe précédent
sur les stéréotypes). Cette observation ne présume pas de la
nature des logiques ou de la typologie des comportements
induits par l’AO. A titre d’exemples, en se fondant sur des
logiques de laïcité ou de sécurité professionnelle ou encore
d’acceptation, voire de valorisation de la différence, il peut
s’agir d’accepter vs refuser des tenues religieuses, d’accorder vs d’interdire la prière sur le lieu de travail.
Pour notre recherche, l’évaluation d’une démarche
d’AO peut s’apprécier, dans une première approche, à la
mesure des effets sur la gestion du fait religieux, telle que
l’entreprise a souhaité la concevoir puis la mettre en œuvre.
En effet, nous pointons que l’application du droit français
en matière d’expression religieuse laisse aux organisations
la latitude managériale de définir et d’opérationnaliser les
modalités de gestion, comme celle d’y consacrer des ressources, humaines et financières, telles des équipes dédiées,
des correspondants sur différents sites s’appliquant à rédiger une charte ou à équiper les salariés d’un « kit des bonnes pratiques » dans un cadre de référence idiosyncrasique.
L’efficacité de l’AO pourrait ainsi se mesurer à l’adéquation des comportements induits par les nouvelles routines
instaurées dans l’organisation ou encore à la réduction des
conflits… pour autant que des indicateurs en autorisent le
repérage. Dans un grand groupe français, considéré comme
exemplaire en matière de diversité en France y compris
celle religieuse, Barth et Mahieu (Ibid.) remarquent que « le
déficit de capitalisation et de mutualisation des expériences concrètes de traitement de la diversité » conduites dans
les différents établissements du groupe entraîne « des effets
organisationnels […] limités et, en quelque sorte, en patchwork ». L’apprentissage organisationnel ne se serait donc
pas produit.
Ce constat incite à une seconde approche de l’évaluation de l’AO interrogeant le processus lui-même considéré processus de changement. Pour notre recherche, nous
appréhendons le changement comme un cheminement
dynamique visant à l’évolution des routines, fondées sur les
savoirs et les connaissances relatifs au fait religieux et à
sa gestion. Deux catégories d’obstacles peuvent gêner l’apprentissage. Le premier, relevé par Barth et Mahieu (Ibid.)
se rapporte à l’inadaptation des mécanismes favorisant
l’AO. En l’absence de vision systémique de l’AO, la responsabilité pourrait en incomber principalement à l’entreprise
elle-même. Il s’agit, le plus souvent, d’une mise à l’écart
d’acteurs qu’il conviendrait d’impliquer dans la démarche,
ou d’un cadre et d’une organisation du travail, insuffisamment propices aux interactions sociales et cognitives. Alors,
en l’absence d’échanges et de confrontations de points de
vue, il devient impossible de construire une compréhension
commune des enjeux, des représentations du phénomène
et des possibilités d’action. Le second obstacle, corrélé au
premier, pointe les résistances au changement, les « routines défensives » (Agryris et Schön, Ibid.) qui permettent
de conserver le statu quo, c’est-à-dire, de continuer à agir
selon ses croyances, en garantissant les avantages perçus
dans cette situation. La responsabilité est alors partagée
entre l’ensemble des acteurs. Selon Fray (2008), la mise
en œuvre de la diversité suppose une responsabilisation
individuelle et collective. S’il appartient à l’entreprise de
« poser le cadre, donner les moyens » aux différents acteurs
(ex. managers de proximité mais aussi salariés), il convient
que ces acteurs s’impliquent à la fois dans « la prise de
conscience [et dans] la mise en œuvre » des routines qui
font évoluer la gestion du fait religieux. Cependant, cette
démarche, qui conduit à repenser et à changer ses propres
visions du monde, est bien la plus difficile, donc aussi la
plus incertaine car elle déstabilise le socle des valeurs qui
guident notre action. Dans cette approche, l’acteur perçoit
davantage ce qu’il peut perdre (ex. nouvelle organisation
du travail, changement d’équipe… à la suite de refonte du
système de congés considérés comme facteurs de stress)
que ce qu’il pourrait gagner à la mise en œuvre de nouvelles routines, fondant de nouvelles relations et de nouveaux
comportements.
Notons encore que la démarche d’AO peut aussi
conduire à un apprentissage « superstitieux » (Moingeon,
1998), à des solutions inadaptées quand le problème est
mal identifié, donc mal résolu. Or, les revendications religieuses, comme nombre de questions touchant à la diversité, affectent les domaines touchant à la vie en société, à
la représentation de l’autre, soit à une dimension de subjectivité susceptible d’induire de l’incohérence, voire un
manque de pertinence par rapport aux dispositifs et à la
culture de l’organisation. Chez les salariés, qu’ils soient
pratiquants ou non, les nouvelles routines peuvent alors être
perçues comme des règles injustes, trop individualisantes
(ex. : en accordant des congés supplémentaires pour fêtes
religieuses sans compensation pour les non pratiquants versus en refusant d’accéder à ce type de revendications pour
les pratiquants).
Conclusion
La mise en place de règles de gestion du fait religieux peut
être considérée comme un processus d’apprentissage qui
est le plus souvent initié par les questions auxquelles est
48
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
confronté le manager de proximité à propos de ce qui est
acceptable ou pas (tenues, horaires, relations professionnelles notamment) et qui touche à l’organisation du travail
et à la cohésion des salariés. L’apprentissage se poursuit
et l’organisation peut s’en emparer, notamment par du formalisme, dès lors que le phénomène prend sens au niveau
organisationnel.
Les deux trajectoires d’apprentissage (celles des managers de proximité et des responsables diversité et/ou RH)
peuvent conduire à de l’apprentissage organisationnel sous
certaines conditions. D’abord, le savoir nouveau doit être
identifié, visible et accepté au niveau « corporate » dans le
cadre de la recherche que nous avons conduite. Ensuite, le
nouveau savoir doit se révéler « potentiellement utile » à
l’organisation, en lui offrant les possibilités pertinentes de
décision et d’action (Huber, 1991). Alors, l’apprentissage
organisationnel peut être rendu possible par la formalisation des nouveaux savoirs, leur encodage dans des routines, leur diffusion, leur appropriation par les autres acteurs
de l’entreprise. C’est ainsi qu’il contribue à cheminer vers
une nouvelle régulation dans l’entreprise. Toutefois, notre
recherche souligne le défi que représente la gestion collective des faits religieux notamment pour les managers de la
diversité. Il ne s’agit en effet pas de se cantonner à certains
effets d’annonce (désignation d’un référent diversité, ajout
d’une dimension dans le référentiel managérial, comme le
soulignent Barth et Mahieu, Ibid.), mais de pousser à une
réflexion collective sur la manière de traiter ces questions et
d’y apporter des réponses homogènes.
Si, notre recherche exploratoire permet de mettre en
lumière un processus d’apprentissage émergent dans les
grandes entreprises françaises face à une diversité religieuse de plus en plus affirmée, plusieurs limites peuvent
être soulignées, notamment liées à la contextualisation de
notre recherche.
D’une part, les entreprises interrogées sont des grandes
entreprises qui ont déjà mis en place des politiques consacrées aux autres types de diversités (sexe, âge, handicap…)
et qui ont des moyens humains et financiers susceptibles
de pouvoir se saisir de cette « nouvelle » thématique de la
diversité. Le processus d’apprentissage identifié ici est certainement beaucoup moins avancé dans nombre de PME,
pourtant tout autant confrontées à des revendications religieuses croissantes. Le caractère mondialisé des entreprises
étudiées fournit également des repères aux responsables
diversité ou RSE à travers les politiques mises en place dans
d’autres pays (Etats Unis et Grande Bretagne essentiellement), afin de souligner le caractère de « non problème » de
cette question de la diversité religieuse (tout en reconnaissant la spécificité française).
D’autre part, nous avons essentiellement conduits dans
cette recherche exploratoire des entretiens auprès de responsables diversité, RSE, RH. Ce choix nous a permis
de cerner les étapes du processus d’apprentissage et ses
niveaux. Les résultats restent cependant dans l’analyse du
discours de ces responsables. Le prolongement naturel de
cette première phase de cette recherche réside maintenant
dans le recueil de données auprès de salariés des entreprises afin de cerner dans quelle mesure le phénomène d’apprentissage par rapport à la diversité religieuse est initié, et
pourrait être qualifié d’apprentissage organisationnel.
L’objectif est ainsi d’aller au-delà du discours pour
interroger les faits.
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49
Exemple de pratique de gestion de la diversité
à la française : réalité, opportunité et aliénation
Eléonore Marbot
CRCGM
FBS, Campus Clermont
Brigitte Nivet
CRCGM
FBS, Campus Clermont
Résumé
Depuis une décennie, les entreprises mettent en œuvre des pratiques de diversité. La
célébration de la diversité envahit toutes
les sphères sociétales en faisant évoluer
la notion et les pratiques de gestion de la
diversité « à la française » : L’égalité républicaine reconnaît la diversité mais par abstraction de toutes les différences (Renaut,
2009) et se transforme en une injonction
paradoxale, valoriser les différences et ne
pas les prendre en compte. Cette contribution est une réflexion sur l’émergence de
cette notion de diversité comme principe
de gestion dans les organisations à travers
un inventaire des pratiques de gestion et
leur analyse et au regard de la conception
républicaine de l’égalité.
Abstract
For a decade businesses have been implementing diversity policies. The celebration
of diversity has invaded every corporate
sphere - developing the notion of diversity and the practices for dealing with
it “French style” : Republican equality
recognises diversity but while disregarding
every difference (Renaut, 2009) and transforms it into a paradoxical stipulation – to
value differences by not taking them into
account. This contribution is a reflection on
the emergence of this notion of diversity as
a managerial principle in organisations.
Keywords: diversity “French style”, diversity management practices, discrimination,
equality, alienation, social justice
Mots clés : diversité « à la française », pratiques de gestion de la diversité, discrimination, égalité, aliénation, justice sociale
L
e concept de diversité a pénétré la sphère organisationnelle depuis quelques années, faisant écho au concept
de compétence, de capital humain et de talent. Depuis le
traité d’Amsterdam et les Directives Européennes de 1999,
un certain nombre de textes encadre la diversité en France.
Du label diversité aux initiatives spontanées, les entreprises
mettent en œuvre des pratiques de diversité. L’entreprise
prendrait enfin, en compte le développement humain dans
toute sa richesse. La célébration de la diversité envahit toutes
les sphères sociétales en faisant évoluer la notion et les pratiques de gestion de la diversité « à la française » : L’égalité
républicaine reconnaît la diversité mais par abstraction de
toutes les différences (Renaut 2009) et se transforme en une
injonction paradoxale, valoriser les différences et ne pas les
prendre en compte.
Comment les entreprises se saisissent-elles de cette
injonction ? S’agit-il d’un simple effet de mode managériale, comme ont pu l’être les cercles qualité, les pratiques
d’« incentive », les stages « hors limites », ou d’un changement profond qui va bouleverser les pratiques managériales, organisations et stratégies des entreprises ?
Cette contribution est une réflexion sur l’émergence de
cette notion de diversité comme principe de gestion dans
les organisations. À cette fin, les principes stratégiques et
Resumen
Hace ya una década que las empresas
aplican prácticas de diversidad. La celebración de la diversidad invade todas las
esferas empresariales haciendo evolucionar el concepto y las prácticas de gestión
de la diversidad « al modo francés » : La
igualdad republicana reconoce la diversidad pero haciendo abstracción de todas las
diferencias (Renaut, 2009) y se transforma
en una conminación paradójica, revalorizar
las diferencias y no tenerlas en cuenta. Esta
contribución es una reflexión sobre la aparición de este concepto de diversidad como
principio de gestión en las organizaciones.
Palabras claves: diversidad « al modo francés », prácticas de gestión de la diversidad,
discriminación, igualdad, alienación, justicia social
juridiques de la diversité seront rappelés. Puis, les « bonnes
pratiques » de gestion de la diversité en entreprise seront
illustrées afin d’analyser les opportunités que ce nouveau
paradigme offre aux entreprises. Enfin il s’agira de s’interroger sur le caractère aliénant de cette nouvelle idéologie.
Les principes stratégiques
et juridiques de la diversité
La diversité s’est immiscée dans l’organisation, sous
l’apanage d’un enjeu stratégique et juridique.
Stratégie de la diversité
La diversité est d’abord un enjeu économique : il existe déjà
une pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs (BTP,
services à la personne). Les entreprises doivent apprendre
à élargir leur panel de recrutement et s’adresser à tous les
viviers de compétences. La notion de diversité est donc
salutaire pour leur survie. La liste de l’argumentaire des
entreprises en faveur de la diversité est longue, comme le
montre l’étude suivante.
Exemple de pratique de gestion de la diversité à la française : réalité, opportunité et aliénation
Selon la Communauté Européenne, la diversité est un
enjeu économique dans la compétitivité mondiale. Des études ont démontré « que la création et la gestion de la diversité au sein de l’entreprise étaient génératrices d’avantages
réels ». La mise en place de stratégies de gestion de cette
diversité permet d’établir un lien entre les aspects internes
et externes de l’activité d’une organisation. Les avantages
retirés sont les suivants :
– « La sélection, le recrutement et la fidélisation d’individus provenant d’un vivier plus large de « talents »;
– L
a réduction des coûts de rotation du personnel et
d’absentéisme;
– Une plus grande souplesse et réactivité du personnel;
– Un meilleur engagement et moral du personnel;
– U
ne meilleure gestion de l’impact de la mondialisation
et des bouleversements technologiques;
– Une meilleure capacité de créativité et d’innovation;
– Une meilleure connaissance des différentes cultures;
– U
ne meilleure compréhension des besoins des clients
actuels;
– U
ne meilleure compréhension des besoins des nouveaux clients;
– U
ne assistance dans la mise au point de nouveaux produits, services et stratégies marketing;
– L
e renforcement de la réputation et de l’image de marque de l’entreprise auprès des acteurs externes;
– L
a création d’opportunités pour les groupes défavorisés, et donc la contribution à une meilleure cohésion
sociale.1 »
Le discours dominant des institutions européennes et de
leur centre de recherche est que l’absence de diversité est
pénalisante : sans effort massif pour encourager la diversité,
l’uniformisation aura raison de la compétitivité de l’image
et de l’attractivité des entreprises.
D’ailleurs, les chercheurs sur la diversité rappellent
que la communication sur la diversité permet de tirer des
avantages commerciaux et sert la réputation de l’employeur
(Hon et Brunner, 2000). Point (2010) analyse « la promotion d’une marque diversité » à travers les discours de l’entreprise sur son implication dans cette problématique, grâce
à « l’amélioration des relations avec la communauté locale
ou encore la création d’un véritable contrat social entre les
salariés et les clients ».
Consciente et sensible aux évolutions de son environnement, l’entreprise s’engage sur les trois piliers que
sont l’économique, l’environnement et le social. Sa raison
1. http : //ec.europa.eu/employment_social/fdad/cms/stopdiscrimination/diversity_in_the_eu/diversity_business/benefitsofdiversity.
html ?langid=fr
51
d’être est bien de croître et de créer de la richesse mais en
cherchant à satisfaire ses actionnaires, ses dirigeants, ses
employés et ses clients tout en respectant son environnement. En outre, elle s’engage à proposer à ses employés
des conditions de travail stimulantes prenant en compte
leurs aspirations individuelles et collectives, préservant leur
identité et leurs différences dans le souhait de créer une
communauté de travail harmonieuse.
Le droit de la diversité
Parallèlement à la montée de ce discours économico-stratégique, le législateur a développé un véritable arsenal juridique pour promouvoir et encadrer la diversité. La diversité
est au croisement de deux préoccupations collectives : la
reconnaissance dans l’espace public des identités culturelles religieuses ou nationales et de l’existence de discriminations qui atteint les membres de groupes et en particulier
ceux qui relèvent des « minorités visibles » (Wieviorka,
2008). « La mise en œuvre, le déploiement des politiques de
lutte contre les discriminations en France ont été marqués,
ces dix dernières années, par des processus de redéfinition
multiple, agissant notamment par extension, déplacement
et euphémisation de leur action ». (Dotytcheva et al, 2007).
En dix ans, selon Sénac (2010) il y a eu un déplacement
de la problématique des discriminations, vers l’égalité des
chances puis vers la diversité. « On assiste progressivement
à la construction d’une politique publique de contribution à
la construction d’une norme managériale, entre le secteur
privé, les partenaires sociaux et les pouvoirs publics. (…).
La légitimation et le travail de diffusion par les pouvoirs
publics du modèle de la gestion de la diversité, ont modelé
la gestion même de la diversité et l’ont clairement adossée,
comme au niveau européen, aux politiques de lutte contre
les discriminations et d’égalité des chances qu’elle est censée compléter » (Van de Walle et al, 2008). En 1997, l’article 14 du traité d’Amsterdam oblige les pays de l’Union
Européenne à se doter d’outils pour combattre les discriminations. Sous l’angle juridique, la diversité est abordée
par le prisme des discriminations. Discriminer c’est distinguer, établir une différence entre des individus ou des
choses. Une discrimination est une inégalité de traitement
fondée sur un critère prohibé par la Loi, comme l’origine,
le sexe, le handicap etc., dans un domaine visé par la Loi,
comme l’emploi, le logement, l’éducation, etc. La Loi française liste une série de 18 critères ne devant pas influencer
le recrutement, ni les décisions relatives à l’évolution, la
sanction, le départ d’un collaborateur : l’origine, le sexe, les
mœurs, l’orientation sexuelle, l’âge, la situation de famille,
les caractéristiques génétiques, l’appartenance à une ethnie, l’appartenance à une nation, l’appartenance à une race,
les opinions politiques, les activités syndicales ou mutua-
52
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
listes, les convictions religieuses, l’apparence physique, le
patronyme, l’état de santé, le handicap, l’état de grossesse.
Rappelons que la Constitution de 1945 avait engendré
des politiques de lutte contre les discriminations et le respect de l’égalité des droits dans toutes les sphères de la vie
publique en prohibant la reconnaissance et la valorisation
des différences individuelles ou communautaires. Depuis
1999, la Directive Européenne sur la diversité, mise en
œuvre progressivement dans les différents états européens,
a impulsé en France l’élaboration de nombreuses lois ou
accords nationaux interprofessionnels. La législation a
créé des catégories de diversité pour combattre les discriminations qui les touchent. Le droit français commence à
reconnaître les différences communautaires ou d’identité
individuelle qui n’avaient pas le droit de cité dans l’espace
public afin d’assurer l’égalité, la fraternité et la liberté, bien
qu’il soit difficile pour le législateur de distinguer les qualités qui sont discriminées parmi toutes les qualités d’un
individu (Dubet, 2010). Ce principe est fondateur de l’universalisme « français »2. Seul l’individu s’intégrait et c’est
à lui que la République était censée assurer l’égalité de
droit (Marbot, 2010). Ainsi, le législateur, sous l’impulsion
européenne, donne des armes différentes à l’entreprise pour
qu’elle combatte des comportements (racistes, exclusifs,
aliénants) que la République n’a pas su annihiler. Nous ne
recensons que celles qui ont vu le jour au XXIe siècle :
– 2 001 : transposition en droit français des Directives
Européennes de 2000 et du Traité d’Amsterdam sur la
diversité (L 122-45). Elle renforce le dispositif de lutte
contre les discriminations au profit des salariés et aménage la charge de la preuve dans la procédure civile. La
loi Génisson instaure l’obligation pour les entreprises
sous peine de délit d’entrave de diffuser des indicateurs
précis sur la situation des hommes et des femmes, de
négocier l’égalité professionnelle et d’inclure ce thème
dans les négociations sociales (L 2001-397).
– 2 002 : la Loi de Modernisation Sociale condamne le
harcèlement moral et comporte des dispositions prohibant la discrimination dans l’accès au logement (L
2002-73).
– 2 004 : la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les
Discriminations et pour l’Égalité) est créée. Ses missions sont d’accompagner les victimes de discrimination dans leurs parcours de justice, de favoriser le
progrès des procédures et de sensibiliser la société
française dans son ensemble. La charte de l’égalité des
hommes et des femmes traite, notamment de la notion
d’égalité professionnelle.
de promouvoir leur maintien et leur retour à l’emploi
est signé. Enfin, la Loi de programmation pour la cohésion sociale (Loi n°2005-32) comporte trois volets :
mobilisation pour l’emploi, dispositions en faveur du
logement, promotion de l’égalité des chances.
– 2 006 : la Loi pour l’égalité des chances offre de nouveaux outils pour lutter contre les discriminations et
promouvoir la diversité. La Loi légalise la pratique du
« test de discriminations » comme moyen de preuve
d’éventuelles discriminations. Cette dernière prévoit la
mise en place du CV anonyme dans les entreprises de
plus de 50 salariés selon des modalités d’application qui
restent à fixer par le Conseil d’État. Elle demande au
CSA de veiller à ce que la programmation des radios
et télévisions reflète la diversité de la société française
(Loi n°2006-396). La Loi relative à l’égalité salariale
entre les femmes et les hommes prône la suppression
des écarts de rémunération, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale
et l’accès des femmes à des instances délibératives et
juridictionnelles.
– 2 008 : une loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte
contre les discriminations est votée (Loi n° 2008-496).
Un décret porte sur les conditions dans lesquelles des
associations de lutte contre les discriminations peuvent
mener des actions en justice en faveur d’une victime
d’une discrimination (Décret n° 2008-799). Enfin un
décret crée le label en matière de promotion de la diversité et de prévention des discriminations dans le cadre
de la gestion des ressources humaines et la mise en
place d’une commission de labellisation. Ce décret crée
un « label diversité « qui sera décerné aux entreprises,
services publics, collectivités territoriales et associations promouvant la diversité (Décret n° 2008-1344).
– E
nfin, la LFSS 2008 pour 2009 (Loi de Financement de
la Sécurité Sociale) contraint également les branches à
négocier un accord senior avant le 1er janvier 2010. Si
aucun accord de branche n’est négocié ou si aucun plan
d’action senior n’est prévu avant cette date, les entreprises de plus de 50 salariés subiront une pénalité financière : 1 % de la masse salariale.
– 2 005 : la Loi sur le handicap pour l’égalité des droits et
des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est promulguée. L’accord national
interprofessionnel relatif à l’emploi des seniors en vue
La diversité est donc devenue une obligation juridique
mais aussi pour toutes entreprises, « stratégiquement bien
pensantes », une obligation économique. Comment se traduit-elle concrètement ?
2. Déclaration des Droits de lHomme et du Citoyen du 26 août 1789,
Art 6 : « Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admis-
sibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et
sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »
Exemple de pratique de gestion de la diversité à la française : réalité, opportunité et aliénation
Identifications des « bonnes pratiques »
de gestion de la diversité
De ces grands principes stratégiques et juridiques découlent des principes de gestion de la diversité : « ils visent les
changements d’attitudes et de comportements : promouvoir
le respect et la tolérance et de sensibiliser aux différences
possibles au regard du travail » (Bender, 2004).
C’est à la gestion des ressources humaines et donc au
management que revient la charge de mettre en œuvre ces
principes. La diversité devient un levier de management
pour prévenir, accroître la cohésion interne, attirer et fidéliser de nouveaux talents, développer la fierté d’appartenance et entretenir la motivation des salariés et donc leur
performance.
Selon Igalens et Sahraoui (2010) « le management de
la diversité a pour but que chaque employé maximise son
potentiel et sa contribution à l’entreprise » en valorisant les
différences individuelles. Pour Bender (2004) les politiques
de gestion de la diversité se fondent sur l’intégration de tous
dans le but de servir la culture d’entreprise la satisfaction du
personnel et la réalisation d’objectifs.
La DRH insiste sur les principes de tolérance, d’égalité de traitement car ils apportent une meilleure cohésion sociale et favorisent la concertation interne (Joras et
Souillard, 2010). Toujours, selon Bender (2004) toutes les
politiques de gestion de la diversité sont guidées par deux
grands principes : la satisfaction des différentes attentes de
catégories de salariés et le principe d’inclusion (l’environnement de travail doit être adapté à tous les travailleurs).
En 2008, le label diversité a permis de formaliser le
consensus existant sur la diversité et de formaliser un référentiel des bonnes pratiques. Ces pratiques ont été recensées
par types de fonction Ressources Humaines3 en les illustrant
par des exemples d’entreprises qui ont toutes obtenues le
label diversité. Les pratiques présentées sont celles relayées
par les médias (ou autres leaders d’opinions). Ces données secondaires sont considérées comme emblématiques
des bonnes pratiques de gestion de la diversité (Deloitte,
2010). Dans le cas d’une épistémologie interprétativiste,
« Silverman (2000) souligne plusieurs fois que l’analyse
de données est de manière décisive plus importante que la
collecte de données elle-même, de telle sorte que, pour raccourcir ou faciliter cette phase, il encourage à travailler sur
des données recueillies et traitées par d’autres chercheurs
(analyse secondaire) ou trouvées dans la sphère publique
(documents). » (Chabaud et Germain, 2006). Nous considérons de ce point de vue que les pratiques mises en valeur
par le label diversité et la presse sont des données valides. Il
ne s’agit pas de faire un inventaire à la Prévert des pratiques
3. Ignorant toutes celles concernent les parties prenantes et ne correspondant pas complètement au coeur de métier de la fonction RH.
4. Désormais Pôle Emploi.
5. www.accord.com
53
de GRH, d’autant plus qu’elles doivent être contingentes,
mais de lister les « Best Practices » (meilleures pratiques),
qui servent aujourd’hui de référence en matière de gestion
dans l’objectif d’interroger les fondements qui sous-tendent
ces choix de gestion des RH :
Le recrutement
Le changement le plus visible s’est opéré dans le processus de recrutement. Grâce à l’introduction de la gestion
des compétences, les recruteurs développent leur vivier :
aucune restriction n’est portée sur des critères de diversité.
La fonction recrutement se focalise sur l’adéquation poste/
compétence et non poste/personne.
Le service ressources humaines crée des descriptions
de poste qui prennent à la fois en compte les compétences
et l’expérience requises, écartant ainsi tous critères pouvant
être discriminants. Mais plus largement grâce aux principes
de diversité tout le processus de recrutement a été revisité
en se basant sur les compétences de la personne. Par exemple la méthode développée par l’ANPE4, le recrutement par
simulation (1995) permet de mettre la bonne personne à
la bonne place et d’ouvrir sur des profils qui jusqu’alors
étaient écartés d’office. Dans ces méthodes, les critères
d’évaluation éliminent les dimensions personnelles et donnent ainsi une deuxième chance à un public jusqu’à présent
exclu de l’entreprise.
Enfin, les méthodes de recrutement de la diversité ont
permis de faire prendre conscience aux entreprises que
l’intégration était une étape à part entière du processus
de recrutement, qu’elle pouvait être source de discrimination et même d’échec du recrutement. Les managers sont
également impliqués dès la définition du poste jusqu’à la
dernière étape du processus de recrutement, pour faciliter
l’intégration de la nouvelle recrue.
Ainsi, certains groupes, comme Accor5 ont adopté le
CV anonyme. BNP Paribas6 met en place des procédures de
recrutement permettant d’apprécier « les personnalités plus
que les cursus ». En association avec un cabinet spécialisé
dans la promotion de la diversité, les jeunes de banlieue
sont formés pendant trois jours à passer des entretiens de
recrutement. Lors de cette session de formation (ante recrutement), la banque, le métier de conseiller en patrimoine et
le rapport annuel de la banque sont également présentés.
Le résultat sur 2009-2010 n’est que de deux embauches de
femmes sur 200 CV, ce qui équivaut chez BNP Paribas aux
2 % de « diversité », recrutés chaque année par le processus
de recrutement classique7.
6. www.pourunmondequichange.com
7. Observatoire des métiers et des qualifications et de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans la banque
54
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
La GPEC
La loi de cohésion sociale (2005) a institutionnalisé les pratiques de gestion des compétences à l’intérieur de l’entreprise. Les décisions de mobilité et de gestion des carrières
sont abordées dans la mesure du possible sous l’angle des
compétences et non plus sur des critères subjectifs.
Cette vision compétence a permis à une réflexion sur
les métiers d’émerger. Ainsi, le concept de compétence
ouvre l’accès pour certaines populations à des métiers dont
elles étaient écartées. Elle encourage également à dépasser le débat désuet de l’orientation prédéterminée. Cette
démarche compétence oblige les entreprises à effectuer
une étude systématique des postes de travail pour adapter si besoin est, le poste à la personne. Pour ce faire, une
réflexion ergonomique s’est introduite dans les pratiques de
gestion de ressources humaines. L’organisation du travail,
les aménagements des postes et les adaptations des horaires deviennent des leviers de la GRH afin de concilier vie
professionnelle et vie privée dans le respect de la diversité.
Auchan8 constitue ainsi un vivier de directrices.
L’enseigne a constaté qu’elle manquait de candidates à
des postes de directeurs de magasins (5 femmes directrices
de magasins sur 116) alors qu’ils intéressent 4 % des femmes. Ces salariées n’osent pas exprimer leur souhait en sus
d’éprouver de la difficulté à concilier vie familiale et vie
privée. Une première promotion a été constituée pour les
aider à définir un projet professionnel et les faire réfléchir à
ce que l’entreprise doit mettre en œuvre afin de développer
le nombre de femmes à la direction de l’entreprise. Dans
cette même logique de gestion de la diversité, Thales9 a
instauré des entretiens individuels dans les deux mois qui
suivent le retour de ses salariées de congé de maternité afin
d’évaluer les besoins éventuels de formation de celles-ci et
de pouvoir répondre à l’ activité avec de bonnes perspectives professionnelles et un réajustement salarial est proposé
si le congé a eu un impact défavorable sur la rémunération.
La Gestion des carrières et l’Évaluation
Les outils de la gestion des carrières deviennent transparents pour retenir les talents. La fonction RH effectue un
travail considérable en amont sur les critères d’avancement
et les indicateurs de promotion, désormais décorélés de toutes références à des critères personnels. Les fiches de poste
sont ainsi diffusées à tous dans un souci d‘égalité et d’accès
équitable aux postes vacants. La fonction RH transmet également ces principes à l’ensemble du management afin que
l’évaluation s’inscrive dans une logique d’appréciation de
la performance transparente et efficiente.
Les Gentils Employés (GE), portant un prénom discriminant sont surreprésentés à la plonge. Cette discrimination
cesse au bout de 20 ans d’ancienneté. Les GE ne portant pas
de prénom discriminant évoluent avec l’ancienneté dans les
services techniques. Mais le sexe et le prénom jouent un
rôle également. Les hommes GE portant un prénom discriminant accèdent en moindre proportion à un contrat permanent, même avec de l’ancienneté. Face à ce constat, les
professionnels RH du Club Méditerranée vont donc être
sensibilisés pour qu’ils suscitent des mobilisations de la part
des managers et des personnes « discriminées » et les salariés seront formés en interne aux risques de discrimination.
La Formation
Que tous, sans discrimination, accèdent à la formation
devient une des préoccupations principales de la fonction. Des indicateurs sont créés pour vérifier que toutes les
« catégories de personnes » sont représentées dans la formation. Des actions correctives sont envisagées pour les
publics discriminés. Pour certaines catégories de personnel,
des formations spécifiques peuvent être créées (femmes
manager, tutorat..). Parallèlement les cadres sont formés au
management de la diversité. Les salariés sont responsabilisés dans le choix de leur formation pour assumer pleinement cette diversité (Joras et Souillard, 2010).
La formation à la non-discrimination permet également de renforcer une vision partagée. Ainsi, Senge (1991)
identifie 5 strates qui permettent de passer d’une vision
interindividuelle à une vision partagée dans l’entreprise
apprenante : la construction d’une vision partagée, la
recherche de la maîtrise personnelle, la remise en cause de
schémas mentaux existants, l’utilisation de la pensée systémique et l’apprentissage en équipe. Selon Drummond
Abdala et Chanlat (2010) la formation permet, au-delà de la
construction de l’identité organisationnelle de renforcer la
construction identitaire, de « discuter des différences entre
les cultures et de mettre ainsi en place plus facilement des
pratiques de transversalité des équipes ».
SFR11 a mis en place un programme massif de formation à la non-discrimination et au management de la diversité en direction de ses 9 950 salariés.
La Rémunération
Par exemple, le Club Méditerranée10 a analysé les trajectoires de ses 26 000 salariés au regard de la discrimination.
Dans cette même logique, afin d’éviter le turnover et pour
maintenir la motivation des salariés et leur engagement
dans l’entreprise, la mise en place de politiques de rémunération transparentes, liées avant tout à des critères objectifs,
est essentielle.
8. www.groupe-auchan.com/ http : //newsletter.charte-diversite.com
10. www.clubmed-corporate.com.2009
9. http : //thalesis.cfecgc.free.fr/Siege/hezacc.pdf
11. www.sfr.com
Exemple de pratique de gestion de la diversité à la française : réalité, opportunité et aliénation
La fonction RH s’efforce alors de neutraliser les effets
de la diversité (maternité, heures de délégation..) sur les
augmentations salariales et met à disposition des managers
des outils d’analyse et d’aide à la décision efficients et personnalisables, pour les aider à prendre les bonnes décisions,
améliorer ainsi leur politique salariale et le pilotage de leur
masse salariale.
20 % des bonus des dirigeants de Starwood dépendent
d’objectifs concernant la diversité (Point et Singh, 2005)
Le dialogue social
Les partenaires sociaux sont sensibilisés à la gestion de la
diversité et voient dans cet enjeu la possibilité de raviver les
autres politiques sociales en intégrant la diversité dans leurs
thèmes de négociation. Ce qui se traduit dans des entreprises
par la signature de nombreux accords notamment sur l’égalité entre les hommes et les femmes, sur l’insertion sociale
et professionnelle des personnes handicapées, la charte
de prévention des harcèlements. C’est ce que confirme le
Directeur Diversité et Égalité des chances d’AREVA lors
d’un colloque sur la Diversité12 : à la question qui lui est
posée : « Comment négocier des politiques égalité/discrimination/diversité avec les partenaires sociaux ? », il répond
« C’est un sujet sur lequel on ne peut être que d’accord ! ».
Ce qu’approuvent les partenaires sociaux (CGT et CFECGC) présents à cet échange.
Maintenance de la diversité
Les entreprises se dotent d’outils car il leur revient de prouver qu’elles n’ont pas discriminé, la loi de 2001 inversant la
charge de la preuve. Ainsi, la création d’une cellule de gestion de la diversité permet de regrouper divers instruments :
– C
réation de réseaux officiels de la diversité (femmes
chez Michelin13). Ces réseaux permettent de nouer de
fortes relations, de diffuser des valeurs, et de faire évoluer l’équilibre social (Thévenet, 1987). Un référent
d’un réseau (formel ou informel) est souvent chargé
d’impliquer toutes les parties prenantes.
55
– É
valuation des actions conduites par des indicateurs
ou par les intéressés au travers d’un baromètre social,
qui s’en trouve « recrédibilisé ». Le bilan diversité de
l’Oréal a été diffusé aux 67 000 salariés du Groupe. Il
permet de constater que la diversification des sources a
progressé, que 418 jeunes de moins de 26 ans issus de
zones difficiles ont été accueillis en stages, en apprentissage en CDD ou CDI, que 38 % des femmes sont dans
le comité de direction, que les écarts de salaires se sont
réduits depuis 2004. Ce bilan est aussi à destination du
grand public et des interlocuteurs de l’Oréal (Igalens et
Sahraoui, 2010).
– A
ctions citoyennes. Par exemple, certaines entreprises vont dans les lycées montrer que certains métiers
ne sont pas uniquement réservés aux femmes ! Ainsi le
groupe Colas14 a réalisé plusieurs films sur le handicap,
l’insertion et la présence des femmes dans des métiers
très masculinisés.
Avec la gestion de la diversité, l’entreprise se donne le
plus de chance possible pour retenir les compétences et attirer les personnes, au-delà de toute catégorisation. C’est une
véritable stratégie, fondée sur une rationalité économique
éthique, qui permettra peut-être enfin de mettre en œuvre
une véritable gestion des ressources humaines. Mais pour
que ces pratiques, soient mises en place, il faut qu’il y ait
un triptyque gagnant : salariés, clients, dirigeants. La coopération et la performance, entre et pour ces trois acteurs
doivent donc être interrogées. Les modèles fondamentaux
de gestion, le lien de subordination, le dialogue social, la
performance économique humaine, sont-ils à revisiter à la
lumière de la diversité ? La partie suivante tentera d’identifier les opportunités de la diversité.
Les opportunités d’une diversité « à la française »
Par le principe de diversité, l’entreprise prend donc en
compte l’évolution sociétale et s’inscrit dans le courant
de l’histoire. Elle essaye de devenir exemplaire et remplit sa fonction d’institution. Mais l’entreprise a-t-elle les
moyens et la volonté de saisir les opportunités offertes par
la diversité ?
– S
ensibilisation des parties prenantes (dont les dirigeants). Elles sont formées sur les stéréotypes, mais
aussi sur la façon de fixer des objectifs non discriminants et de manager la diversité. Ainsi EDF a divulgué
à ses managers et à ses RH un document interne de 35
pages pour donner des repères et les aider dans le traitement des questions religieuses (Angelini et Pignatel,
2010).
La notion de diversité interroge, le vivre ensemble
puisqu’elle questionne le rapport à la différence. Aristote15
explique que « la plus grande des injustices est de traiter également des choses inégales et la nature propre de
12. L’IAE Lyon a accueilli le 2 février 2012 un colloque interdisciplinaire sur les questions de la diversité, de la parité et de la discrimination
dans les situations de travail, en partenariat avec l’AFMD et l’ANDRH.
14. Colas SA - « Communiquer en langue des signes ! » – Réalisé par
Sébastien Glass. Colas a signé la chartre diversité mais n’a pas encore
le label. http : //video.handicap.fr/index.php/show_video/358
13. Observations effectuées par les deux auteurs en 2010.
15. L’Ethique à Nicomaque est un ouvrage d’Aristote qui traite de
l’éthique. Il est, avec l’Éthique à Eudème et la Grande Morale, l’un des
trois principaux livres exposant la philosophie morale d’Aristote.
La liberté et la justice sociale, conditions de la
diversité ?
56
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
l’équité consiste à corriger la loi dans la mesure où celle-ci
se montre insuffisante en raison de son caractère général ».
Aristote réfléchissait à la « communauté16� » comme cadre
de vie naturel dans lequel chacun peut s’accomplir. Le
contrat assure la cohésion de cette communauté : il désigne l’effort collectif (con) pour mener à bien une action
(trahere). L’idée de contrat suppose celle de mutualité et
de solidarité pour mener à bien les actions structurant la
société.
Si l’on reprend ces raisonnements au niveau organisationnel, le salarié ne devrait pas se définir par ses caractéristiques d’appartenance sociale mais par le contrat qu’il passe
avec les autres individus et l’organisation. Le questionnement du vivre ensemble, et donc de la coopération devrait
pouvoir interroger le contrat de travail, la justice organisationnelle sous l’angle de l’égalité, et donc la liberté.
La diversité repose sur une vision de l’égalité de traitement et de l’égalité des chances : les différences ne doivent
pas devenir un facteur d’exclusion, mais un atout pour être
traité comme un égal.
Il semble donc impossible d’aborder la question de la
diversité sans approfondir les fondements de l’entreprise et
notamment le lien de subordination qui régit les rapports
sociaux en entreprises. La diversité organisationnelle doit
être envisagée en interrogeant le vivre ensemble et la justice dans l’entreprise. Les acteurs qui défendent la diversité
doivent déterminer en premier lieu, le contrat social le plus
adapté à la « restauration », de l’égalité entre les salariés.
D’autant plus que l’entreprise n’est pas une démocratie
et le contrat qui la transcende n’est pas social mais économique. Il se traduit par un lien de subordination. Et ce
contrat, par définition soumet la liberté de l’un au « bon
vouloir » de l’autre. Qui osera ouvrir cette boîte de pandore pour répondre à l’injonction d’égalité dans l’altérité,
essence de la diversité ?
De la Loi à la soft Low, une obligation de consensus
social
En matière de diversité, pour l’entreprise, il s’agit d’abord
de respecter et d’appliquer la Loi. Et ainsi, de se prémunir d’une perte de réputation. Face au flot législatif produit,
nous pouvons alors nous interroger sur l’efficacité de ces
textes.
La dynamique des relations entre l’État, les employeurs
et les salariés (également citoyens) exerce une influence
certaine sur le niveau de diversité en organisation. D’abord
parce qu’elle pèse sur la définition ou la révision des règles
et politiques institutionnelles. Ensuite parce qu’elle agit sur
la légitimité accordée à ces règles par les différents acteurs.
Or la performance d’une règle dépend de son acceptabilité
16. Dans le sens de société.
par les acteurs et de son interprétation. Lorsque le consensus est fort, les règles sont parfaitement appliquées.
Au travers de la logique d’acteur, ce ne sont pas la qualité des mesures et leur efficacité qui sont évaluées, mais
le degré de consensus qu’elles recèlent. Ainsi, l’entreprise
peut être le lieu ou les acteurs construisent ce consensus,
grâce à leur proximité.
La législation en faveur de la lutte contre les discriminations a mis en exergue la force juridique de la charte.
La « soft Low » a pour but d’amorcer le dialogue social au
niveau local et de créer un consensus organisationnel fort.
Ainsi, le label diversité incite à un partage de diagnostic et à
une concertation avec les partenaires sociaux. Parallèlement,
en 2010, 149 accords ont été signés sur l’égalité professionnelle entre homme et femme, ce qui place ce thème en quatrième position du dialogue social en France (Ministere du
Travail, 2011). Une opportunité s’ouvre : la protection du
bien commun ne serait plus seulement une responsabilité
de l’État mais de tous et donc également des organisations,
lieux dans lesquels, elle s’élabore et se concrétise.
Gérer les différences individuelles et assurer
l’équité collective
L’objectif d’un service RH d’une entreprise est de disposer
à tout moment des ressources nécessaires aussi bien sur le
plan quantitatif que qualitatif pour satisfaire ses objectifs de
développement. Intégrer la diversité, c’est gérer la richesse
d’une communauté humaine forte de l’inter générationnel
de l’inter genres, de tous les styles de pensée... C’est disposer sur le marché de l’emploi de ressources correspondant
aux besoins en compétences sans a priori subjectifs. C’est
construire des équipes plurielles dont la différence enrichit les points de vue et les idées innovantes au profit de
l’entreprise. Cet équilibre précieux est la garantie du pacte
social. En effet, la diversité questionne en premier lieu :
soi et l’autre. L’altérité doit donc être à la base du compromis social. « Dans l’existence, Platon l’a souligné, les
réalités sont des mélanges, des mix de Même et d’Autre.
C’est pourquoi elles peuvent être déterminées et appartenir, comme déterminations distinctes, complémentaires, à
un même système dans lequel l’unité englobe la différence
sans s’y perdre ». L’altérité est un témoignage de compréhension de la particularité de chacun, hors normalisation,
individuelle ou collective. Le paradigme de la diversité,
donnerait pour missions à la GRH, de réaliser l’alchimie
entre le droit des individus d’être soi et différents, mais égal
à l’autre.
En choisissant de gérer la diversité, l’organisation
répond concrètement aux questions philosophiques millénaires telles que : la place du travail dans le développement
de l’homme, le rapport entre l’individuel et le collectif,
l’unicité, l’altérité et l’universel, la coopération malgré
Exemple de pratique de gestion de la diversité à la française : réalité, opportunité et aliénation
57
les différences individuelles, etc. Ainsi aujourd’hui, l’entreprise est ouverte a tous (jeunes, femmes, vieux, handicapés, noirs, etc..) et ce, à tous les niveaux hiérarchiques.
Et pour n’importe quelle fonction. « Réussir avec tous17 »,
insérer socialement et professionnellement tous les individus fonde un nouvel ordre du travail. La gestion de la
diversité rend possible le dépassement du modèle constitutif de la République Française, de la recherche de l’égalité
par l’abstraction de toutes les différences, en s’autorisant à
valoriser les multiples facettes de nos identités.
pas avoir les attributs de la diversité que recherchent les
entreprises pour leur performance. Parallèlement certaines
qualités vont être affectées à des types de populations au
détriment d’autres catégories, dont les normes de performances organisationnelles seront moindres. Selon Laufer
(2001), « les femmes et les hommes n’occupent pas généralement les mêmes emplois, les emplois à ‘majorité féminine’ sont globalement moins qualifiés, moins valorisés,
moins rémunérés que les ‘emplois masculins’, plus souvent
à temps partiel et n’offrant pas les mêmes carrières ».
Et pourtant ce nouveau modèle de gestion attendu tarde
à venir. Les nouvelles pratiques ne constitueraient-elles
qu’un vernis et un alibi pour les Services de Communication
des Grands Groupes du CAC 40 ? La gestion de la diversité ne servirait-elle pas fondamentalement les transformations sociales promises ? Ne serait-elle qu’un nouvel opium
sociétal ?
La diversité renforce la logique organisationnelle dominante et ne soutient que ceux qui contribuent à la performance
économique de l’entreprise. La diversité est le nouveau
paradigme de la performance maximale. L’entreprise valorise et reconnaît les performances individuelles d’individus
divers à performance normée. D’ailleurs des différences de
traitement sont acceptées par la Loi. L’ART 1133-1 du code
du travail « ne fait pas obstacle aux différences de traitement lorsqu’elles répondent à une exigence professionnelle
essentielle et déterminante et pour autant que l’objectif soit
légitime et l’exigence proportionnée ». Même les chartes,
au nom de l’éthique de la diversité, mettent à distance les
valeurs républicaines en faisant, de la performance, l’indicateur « objectif et universel » de ce qui est juste. Or pour
que la diversité individuelle ou organisationnelle, émerge
il serait souhaitable de ne pas juger, hiérarchiser et exclure
selon l’unique norme de la performance.
La diversité : l’opium des parties prenantes ?
Selon Vateville (2010) : « l’engagement en faveur de la
diversité présente un fort contenu idéologique et coïncide
avec le moment libéral vécu par notre pays entre 1983
et 2008. »
Michaels l’explique par le fait que : « La diversité, c’est
ce qui remplace l’égalité dans les sociétés néolibérales. Et
plus les inégalités se creusent, plus ces sociétés ont intérêt à
promouvoir la diversité ».
La dimension idéologique de la diversité peut être
décortiquée selon l’analyse marxiste :
• La diversité est hallucinogène : elle propose l’entreprise comme un paradis artificiel. « Contrairement à l’approche par l’égalité, qui raisonnait en termes de régulations
entre groupes, la diversité relève de la philosophie libérale,
individualiste et méritocratique » (Bender, 2004). Derrière
ce paradis artificiel, des changements de système apparaissent : l’individu est privilégié au détriment du groupe et
la performance individuelle devient la pierre angulaire de
l’organisation qui intègre la diversité.
La Charte de la Diversité en entreprise, lancée fin 2004
par Claude Bébéar et Yazid Sabeg18, est un texte d’engagement proposé à la signature de toute entreprise, qui définit
la gestion de la diversité comme « Une approche centrée sur
l’individu, de reconnaissance et de valorisation des différences individuelles, comme atouts pour la performance de
l’entreprise ». La diversité est source de performance (Cox,
1993; Dass et Parker, 1999; Rosenzweig, 1998). Considérer
que la performance est le moteur et l’objectif de la diversité,
implique d’exclure ceux qui ne rentrent pas dans la norme
de cette performance. Certaines personnes ne vont peut-être
17. Guide réalisé par la préfecture de la Seine Saint Denis (Deloitte,
2010)
En outre, le postulat de performance et de créativité des
équipes diverses est un postulat qui n’a jamais été démontré
(Barth, 2007). Les leviers de l’instauration de la diversité en
entreprise relèvent davantage d’une croyance. N’est-ce pas
pour cette raison que la diversité est bien mieux intégrée
dans le discours que dans les faits ? À partir d’un diagnostic
des discours théoriques sur la performance des politiques
de diversité, Robert-Demontrond et Joyeau (2010) apportent la réserve suivante : « Il parait actuellement compte
tenu du trop faible nombre de recherches effectuées, peu
raisonnables de vouloir identifier la part contributive de la
diversité dans la performance économique des entreprises,
quand on sait la complexité des facteurs qui concourent à
cette performance. »
La diversité n’est acceptée en entreprise qu’à travers
le prisme de la performance. Ce prisme de la performance
comporte un biais : « seule l’inégalité d’accès au marché est
perçue comme une injustice, tandis que les inégalités produites par les marchés eux-mêmes, sont-elles considérées
comme tout à fait acceptables, voire méritées » (Michaels,
2009). C’est la nouvelle approche, nommée « business
Case » (Barth, 2007).
• La diversité est dormitive : elle endort les consciences
en les installant dans un système de valeurs décrétées.
18. Respectivement l’un est Président du Conseil de Surveillance
du groupe AXA et Président de l’Institut Montaigne et l’autre est
Commissaire à la diversité et à l’égalité des chances auprès du Premier
Ministre.
58
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
En dehors de la diversité point de salut. Ce dogme
entrave toutes autres lectures de l’altérité. « Les politiques de management de la diversité impliquent également
la création d’un respect mutuel et d’inclusion » (Point,
Charles-Fontaine et Berthélémé, 2010). La diversité semble
donc être à la fois les moyens et la finalité de toutes politiques ressources humaines des entreprises, ce qui permet de
ne plus se questionner sur la légitimité de l’organisation et
de ses modes de management.
L’injonction de diversité en RH serait « révélatrice d’une
conviction forte : celle selon laquelle la reconnaissance des
valeurs de la diversité, non seulement serait devenue politiquement correcte, mais ferait désormais partie intégrante
de ce que l’opinion publique estimerait non négociable au
point d’y voir une condition nécessaire de légitimité et de
réussite pour les organismes privés ou publics appelés à
gérer des ressources humaines » (Renaut, 2009).
Par exemple, un comité de réflexion a été créé pour
savoir si le principe de diversité ne devait pas être introduit
dans le préambule de la Constitution pour lui donner une
valeur constitutionnelle. Ce groupe de réflexion a conclu
que le cadre constitutionnel qui prohibe la reconnaissance
et la valorisation des différences individuelles ou communautaires pour assurer l’égalité de droit permet de combattre les inégalités actuelles. Ce groupe de sages rappelle que
la gestion de la diversité est un des paradigmes de réduction
des inégalités, mais qu’il en existe d’autres.
• La diversité est anémiante : elle produit des consensus,
la lutte contre les discriminations a remplacé la lutte contre
les inégalités. « Les discriminations sont toujours une
pathologie de la distance sociale et de l’absence de mixité
sociale » (Mutabizi et Pierre, 2010). La discrimination est
devenue l’explication principale de toutes les inégalités et
difficultés rencontrées par les individus.
La diversité est un cache-misère des inégalités sociales.
D’un point de vue historique, la notion de diversité a émergé
avec la notion de minorité identifiée après la seconde guerre
mondiale aux États-Unis. En France, le nouveau paradigme
des différences est apparu dans les années quatre-vingt dans
toutes les sphères sociales en remplaçant le paradigme des
inégalités sociales et économiques. La notion de diversité a
pu naître à travers l’aggravation des inégalités, l’augmentation des exclusions et l’émergence des nouvelles revendications identitaires et culturelles (femmes, gays et lesbiennes,
black, beurs….) pour contrer ces inégalités.
La diversité a l’avantage pour les entreprises de ne pas
aborder la question de l’inégalité sociale. Le sujet permet
donc d’éluder les rapports de pouvoir et les questions de
régulation collective. Selon Vateville (2010) la diversité est
un moyen de gérer l’inégalité. Ainsi dans la société, les décideurs déplacent le problème des classes sociales et le nient,
pour le remplacer par celui de critères identitaires. Sur le
19. Interview de Walter Benn Michaels dans Marianne, n°728, 2 au 8
avril 2011
plan économique, l’identité telle que définit par la diversité,
conduit à repenser « les différences : matérielles qui existent entre les gens (« j’ai plus que toi, tu as moins que moi,
tant pis pour toi ») comme des différences de culture (« J’ai
la mienne, tu as la tienne et tout le monde est content »).
Alors que le problème posé est l’inégalité, la solution proposée est l’identité…. Pendant ce temps l’idée d’une redistribution des richesses devient quasi impensable19 »
Si les déterminants des inégalités ne sont plus traités, en
sus un phénomène de victimisation individuelle s’amorce.
L’entreprise est déresponsabilisée des inégalités économiques produites alors que l’individu est sur-responsabilisé :
la diversité performante est l’affaire de tous et particulièrement de soi-même. En s’inspirant de Dubet (2010), plus le
cadre de la diversité est prégnant moins les salariés peuvent
se consoler en attribuant leurs échecs à d’autres facteurs
qu’à eux-mêmes : « pour que les vainqueurs ne doivent
leurs succès qu’à eux-mêmes, il faut bien que les vaincus
ne s’en prennent qu’a eux-mêmes ».
• La diversité est hallucinante : elle confisque l’identité des comportements au travail et les soumet à l’arbitraire des dirigeants. Les tableaux de bords constituent la
seule méthode permettant de rendre compte de l’efficacité
des pratiques mises en place. Ceux-ci présentent un risque
de réduire l’être humain à 18 critères et de nier la complexité de la diversité humaine. Même si Point et Singh
(2005), recensent une trentaine de dimensions inhérentes
à la notion même de diversité, définir l’individu selon un
critère, et le faire rentrer dans une case figée, c’est contester
le concept d’évolution de l’individu et celui de résilience.
Au regard des autres, les critères de diversité enferment
dans des rôles. C’est nier l’humanité, qui réside en chaque
individu (Mutabazi et Pierre, 2010). Ces critères renforcent
également les penchants taxinomistes mais réducteurs et
aveuglants de la pensée humaine.
La diversité devient la seule différence acceptée. Si les
18 critères sont devenus des facteurs identitaires de discussion sans tabou, ils renforcent les stéréotypes et ne permettent pas d’évoquer les faces obscures de la différence ou
d’assumer les appartenances multiples des identités. Or,
« partout se fait sentir la nécessité d’une réflexion sereine
et globale sur la meilleure manière d’apprivoiser la bête
identitaire » (Maalouf, 1998). Les pratiques de diversité
organisationnelle éradiquent la complexité de la question
identitaire. Elle renoue avec le concept « d’universalisme à
la française » : les 18 critères de la diversité deviennent des
critères identitaires.
Enfin si la vocation première de la Charte était d’amorcer le dialogue social, elle a en fait renforcé le pouvoir
discrétionnaire des dirigeants (Castel, 2007), avec le
consentement des partenaires sociaux. Le législateur met
en exergue les « soft Low », règles autoproduites dans les
59
Exemple de pratique de gestion de la diversité à la française : réalité, opportunité et aliénation
entreprises qui s’intègrent dans des lois qui n’ont pas de
caractère obligatoire et contraignant (Bodet et Lamarche,
2007). Ces pratiques volontaires ne relèvent plus de l’intérêt
commun, ni donc d’une logique protectrice et égalitaire. La
charte ne contraint en rien les signataires à respecter leurs
engagements. La lutte contre les discriminations dépend de
la bonne volonté des dirigeants.
Au-delà de la pertinence des mots marxistes, cette critique a l’intérêt de proposer un cadre d’analyse qui convient à
la fois à l’échelle de l’individu, de l’entreprise, de la nation
et du monde. La globalisation de l’économie, a structuré
tant notre système de pensée que nos comportements, via
les entreprises. Le concept de diversité a permis l’abandon
de la lutte collective pour l’égalité et la justice sociale à
travers le contrat social au profit de l’ « épanouissement »
humain, via un contrat individuel.
Pour conclure, le républicanisme à la française, dans
sa constitution voulait faire abstraction des différences
pour intégrer toute la variété des profils humains, individuels ou collectifs. Ce principe n’a pas évité les exclusions
de celles ou ceux, qui ne correspondent pas à la « norme
standard dominante ». Pour lutter contre la domination de
l’homo-economicus (homme blanc, 25/40 ans, occidental…) prototype crée par l’entreprise taylorienne, des mesures correctives ont été mises en place, en se fondant sur le
principe de diversité. Mais la diversité est une construction
économique et sociale. « Le rapport à la différence est une
construction qui s’applique dans un contexte particulier.
Et les différences se ressentent par rapport à une référence
sociale historique, culturelle, géographique économique »
(Haas et Shiomada, 2010). La référence Française de
la construction de la diversité s’appuie sur les concepts
économiques néolibéraux. Aujourd’hui, les pratiques de
gestion de la diversité « à la française » valorisent les différences individuelles tout en assurant à chacun une égalité de traitement sans prise en compte de leurs différences.
Les pratiques de GRH, décrites dans la partie 2, valorisent
la diversité de chacun tout en assurant l’égalité de tous et
en neutralisant les effets de la diversité (congés maternité,
parentaux, heures de délégation, etc..). Ce principe est aussi
flou que paradoxal.
Pour dépasser ce paradoxe, l’organisation a associé
diversité et performance. Or, la performance est intrinsèquement liée aux normes, à la compétition et donc à l’exclusion. C’est parce que l’entreprise a exclu, que la diversité
est devenue une nécessité. Mais cette nécessité d’ouverture à l’autre, via la diversité, s’enferme sous le joug de la
norme de performance économique libérale. Sous couvert
de diversité, l’entreprise n’exclut plus les mêmes.
Les questions d’égalité de traitement, de sécurité de
la vie au travail, de conditions d’adaptation du travail à
l’homme, s’effacent au profit des préoccupations majeures
de la diversité : l’implémentation de l’individualisme, la
valorisation quantitative de caractéristiques qualitatives et
la mise en concurrence des individus dans un collectif.
Certes, l’entreprise affiche aujourd’hui, une certaine
diversité. Mais le processus amorcé n’est-il pas voué à
l’échec, tant que les acteurs ne se confronteront pas à la
question préalable de l’égalité et de la justice sociale et
que la diversité devra être comptabilisée, normée et évaluée à travers le prisme de la doctrine gestionnaire ? Il reste
aujourd’hui à repenser les notions d’entreprise, de contrat
social, de performance et de productivité avec diversité.
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Appartenance syndicale et âgisme :
approche comparée en Europe
Yvan BARELSandrine FREMEAUX
LEMNA
Audencia.Nantes
Université de Nantes (France)
Ecole de management (France)
Résumé
Si le poids des syndicats constitue une
variable contextuelle importante en
matière de management de la diversité,
l’incidence de l’appartenance syndicale en
elle-même est moins connue. S’appuyant
sur l’enquête ESS 2008-2009 sollicitée
par la Commission Européenne et menée
auprès de 48 141 individus répartis dans 25
pays européens, cette étude vise à apprécier l’impact négatif de l’appartenance
syndicale sur l’âgisme envers les personnes âgées. Bien que l’appartenance syndicale dans les pays d’Europe du Nord est
souvent expliquée par les avantages matériels auxquels elle ouvre droit, elle réduit
davantage l’âgisme dans ces pays que dans
les autres pays d’Europe.
Abstract
If the weight of trade unions is an important contextual variable in terms of diversity management, the impact of union
membership itself is less known. Based on
the 2008-2009 ESS survey requested by
the European Commission and conducted
among 48,141 people in 25 European
countries, this study aims to assess the negative impact of union membership on ageism towards the elderly. Although union
membership in the countries of Northern
Europe is often explained by the material benefits which it opens up, it further
reduces ageism in these countries compared to other European countries.
Resumen
El peso de los sindicatos es una variable contextual importante en términos de
gestión de la diversidad. Con base en la
encuesta ESS 2008-2009 llevada a cabo
entre 48.141 individuos repartidos en 25
países europeos, este estudio tiene como
objetivo evaluar el impacto negativo de la
afiliación sindical en la discriminación por
edad hacia las personas mayores. Aunque
la afiliación sindical en los países del norte
de Europa se explica a menudo por los
beneficios materiales a los que ella da derecho, también reduce aún más la discriminación por edad en estos países, comparado
con otros países europeos
Keywords: ageism, diversity, unionization,
aging
Palabras claves: discriminación por edad,
diversidad, sindicalización, envejecimiento
Mots clés : âgisme, diversité, syndicalisation, vieillissement
L
’Europe constitue un terrain d’observation pertinent
pour une analyse comparée des cultures de la diversité (Barmeyer et Chanlat, 2004; Davel et al., 2008). Bien
qu’il soit possible de parler d’un modèle social européen
caractérisé par des droits minimaux, une protection sociale
universelle, un dialogue social et des services publics
(Vaughan-Whitehead, 2005), il existe des contextes nationaux très différents : certains États ayant retenu l’option
libérale accordent moins d’importance aux politiques
sociales et au dialogue social; d’autres pays se caractérisent
soit par l’importance de la régulation étatique soit par la
force de l’action syndicale.
Esping-Andersen (1999) a mis en place une typologie
des États européens en fonction des modes de régulation,
de développement du bien-être et de la protection sociale.
Il distingue le régime libéral des pays de langue anglaise
comme le Royaume-Uni fondé sur la centralité du marché, le modèle nordique fondé sur la recherche du bien
commun des contemporains et des générations futures, le
modèle bismarckien typique de la France et de l’Allemagne fondé sur les assurances publiques ou sociales obligatoires et le modèle familialiste fondé sur les solidarités
familiales qui caractérise les autres pays d’Europe méditerranéenne. D’autres études utilisent une typologie similaire
en s’appuyant sur les modes de coordination du marché,
distinguant les systèmes marchands fondés sur le libre-jeu
du marché, les systèmes corporatistes typiques des pays
du Nord et fondés sur une bonne coordination des acteurs
économiques et les systèmes de relations industrielles à
fort degré d’implication de l’État (Ebbinghaus et Manow,
2001).
Dans la continuité de ces études, Edlund et Grönlund
(2008) ont mis en évidence une variable contextuelle, le
rôle des syndicats, afin de distinguer les différents environnements européens. Les auteurs observent que les taux
de syndicalisation sont élevés dans les pays d’économie
libérale et nordiques et faibles dans les pays continentaux,
méditerranéens et transitionnels. S’inscrivant dans la continuité de l’étude menée par Edlund et Grönlund (2008) sur
la variété des modèles syndicaux en Europe, notre étude
se place au niveau individuel de l’appartenance syndicale
et vise à mieux comprendre l’incidence de la syndicalisation sur les émotions et représentations négatives envers les
séniors.
En Europe, la question de l’emploi des séniors est le
fruit de deux dynamiques qui sont souvent l’objet d’une
confusion. D’un côté, l’objectif est celui d’une augmentation du taux d’emploi des séniors qui, selon le sommet de
Stockholm de 2001, devait atteindre 50 % pour les 55-64
ans en 2010. Cette orientation a une visée essentiellement
62
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
économique liée à la question du financement des retraites et au coût que représentent les retraites anticipées ou
le chômage des quinquagénaires et sexagénaires. Elle est
l’objet d’une régulation étatique dans les différents pays.
D’un autre côté, l’objectif est une lutte anti-discriminatoire
qui trouve sa source dans l’article 13 du traité d’Amsterdam et la directive emploi (2000/78) du Conseil de l’Union
Européenne. Cette seconde orientation s’appuie davantage
sur l’action des syndicats; elle ouvre la voie vers une lutte
contre l’âgisme menée aux niveaux européen, national et
local et intéresse pour cette raison notre étude. Résultant
des travaux de Butler (1978), de Traxler (1980) et de
Palmore (1999), l’âgisme peut être défini comme un processus à la fois cognitif et affectif contre ou en faveur d’un
groupe d’âge.
En nous appuyant sur des données recueillies lors de
l’enquête ESS 2008-2009 sollicitée par la Commission
européenne et l’European Science Foundation et menée
auprès de 48 141 individus répartis dans 25 pays européens,
nous dégageons des résultats inédits sur le lien entre appartenance syndicale et âgisme. Après une revue de littérature
sur les notions d’âgisme et de vieillissement et une présentation de la problématique du lien entre appartenance syndicale et âgisme, nous abordons les aspects méthodologiques
et les résultats de l’enquête ESS et proposons un modèle
d’analyse explicatif. Les résultats font apparaître un lien
négatif entre l’appartenance syndicale et l’âgisme, lien qui
est renforcé dans les pays dans lesquels les taux de syndicalisation sont élevés.
La notion d’âgisme
Le terme d’âgisme est généralement attribué à Butler (1978)
qui le définit comme un désordre psychosocial caractérisé par des préjugés, des stéréotypes et un évitement des
personnes plus âgées. Traxler (1980) considère l’âgisme
comme une assignation des rôles sociaux sur la seule base
de l’âge et montre que l’âgisme n’est pas toujours négatif
mais peut être positif. Palmore (1999) introduit la dimension affective en intégrant une analyse des sentiments en
faveur et en défaveur d’un groupe d’âge.
Ainsi, l’étude de l’âgisme permet d’aller au-delà des
comportements discriminatoires visibles et quantifiables
pour envisager les idées, émotions, sentiments relatifs aux
différents âges de la vie (Fraboni et al., 1990; Nussbaum
et al., 2005; Rupp et al., 2005). Selon Johnson et Neumark
(1997), si l’âgisme était réduit à une analyse des pratiques
discriminatoires, il serait plus difficile de l’évaluer, tant les
discriminations peuvent être liées à d’autres causes que
l’âgisme. Les études managériales ont cependant montré que les pratiques discriminatoires sont en lien avec les
stéréotypes liés à l’âge (Rosen et Jerdee, 1976; Cleveland
et Shore, 1992; Chiu et al., 2001). Parce que les salariés
âgés sont jugés plus rigides à l’égard du changement organisationnel, les employeurs leur offrent moins de chances
d’améliorer leur performance et leur promotion (Rosen et
Jerdee, 1988). Dans une étude internationale, Chiu et al.
(2001) affirment que les salariés âgés sont moins concernés
par les politiques de formation, promotion et rétention.
Les travaux académiques ont tenté de dégager différents
critères de mesure de l’âgisme. Tuckman et Lorge (1953)
ont bâti une échelle de mesure portant sur les préjugés à
l’encontre des séniors. Les préjugés sont évalués à partir
d’expressions antipathiques, révélant des fausses conceptions, des informations erronées ou des mythes. Fraboni et
al. (1990) se sont intéressés aux préjugés suivants : manque
d’ouverture vis-à-vis de personnes plus jeunes, enfermement dans le passé et tendance à se plaindre. Ils ont également mis en valeur une autre dimension, la discrimination.
Enfin, Rupp et al. (2005) ont mis en exergue le rôle de la
dimension affective dans l’analyse de l’âgisme. C’est à
la lumière de ces trois composantes de l’âgisme, les préjugés (Tuckman et Lorge, 1953), les sentiments (Rupp et
al., 2005) et la discrimination (Fraboni et al., 1990) que les
données de l’enquête ESS seront analysées.
La distinction entre vieillissement et âgisme
Se distinguant du processus biologique, psychologique et social du vieillissement (Kanfer et Ackerman,
2004), l’âgisme est dénoncé dans de nombreux travaux.
L’altération des fonctions cognitives (Greller et Simpson,
1999; Segrave, 2001) comme le déclin de la motivation
(Kanfer et Ackerman, 2004; Gordon et Arvey, 2004; Rabl,
2010) reposeraient sur des préjugés erronés. Il est vrai que
les capacités de traitement de l’information, en particulier
la vitesse de traitement (Salthouse, 1996), peuvent diminuer
avec l’âge (Ilmarinen, 2006). Mais l’expérience permet de
développer des capacités mentales complexes (Baltes et
Smith, 1990; Greller et Simpson, 1999; Ilmarinen, 2006)
qui peuvent être exploitées notamment dans les activités
prospectives et les décisions de changement de l’organisation. La théorie du déclin de la motivation est également
contestée (Kanfer et Ackerman, 2004). Des études anglosaxonnes ont montré que le désir d’acquérir de nouvelles
compétences n’est pas moins fort avec l’âge (De Lange et
al., 2010). Des études européennes ont également décrit la
démotivation des salariés âgés comme une image injustifiée
(Rabl, 2010).
De façon générale, les travaux académiques s’accordent
sur l’idée que les difficultés d’adaptation des séniors résultent le plus souvent de dysfonctionnements organisationnels. Les situations de surcharge de travail, le manque de
reconnaissance des savoirs et expertises ainsi que l’insuffisance de formation continue sont à l’origine d’une fragilisation des liens tissés entre des salariés d’âges différents
(Levy et Banaji, 2002; Snape et Redman, 2003; Bytheway,
2005; Rabl, 2010).
63
Appartenance syndicale et âgisme : approche comparée en Europe
La syndicalisation à l’échelle de l’Europe
L’intégration professionnelle des séniors est plus ou moins
forte selon les pays européens pour des raisons en partie
liées au rôle joué par les syndicats. Les meilleures performances obtenues en Europe du Nord en matière d’emploi
des séniors s’expliquent par les stratégies optées durant
ces dernières décennies. Alors que l’Europe continentale a
choisi d’indemniser la sortie anticipée des salariés âgés, la
Suède, la Norvège et le Danemark ont privilégié le développement de politiques actives de l’emploi en vue de réhabiliter les salariés âgés particulièrement vulnérables. Le succès
des pays nordiques met en évidence l’absence totale de
contradiction entre la quantité et la qualité de l’emploi : le
maintien en emploi des séniors a été favorisé par l’amélioration de la qualité de l’emploi rendue possible par l’extension de la formation, par l’amélioration des conditions de
travail des séniors et par la promotion de la mobilité horizontale en fin de carrière. La Suède est souvent montrée en
exemple, dans la mesure où elle a accompagné sa réforme
des retraites d’un ensemble de mesures, non coercitives,
visant à rendre le travail plus attractif pour les séniors et
à proposer des formules de cumul emploi - retraite dans
le cadre de la promotion du temps choisi. La Finlande est
parvenue à s’extraire de la culture de la sortie précoce grâce
à une politique volontariste visant la formation des séniors,
l’amélioration des conditions de travail et une communication positive à l’égard des séniors auprès des chefs d’entreprise, des responsables de ressources humaines et de
l’encadrement. Le plan national finlandais se reflétait dans
le mode d’ordre adopté : « L’expérience est une richesse
nationale ». Ces différentes stratégies nordiques d’insertion
professionnelle des séniors ont reposé sur un axe commun,
celui de l’inclusion des partenaires sociaux et de l’importance de la négociation collective.
Le rôle ainsi joué par les syndicats invite à une considération des taux de syndicalisation par pays. Edlund et
Grönlud (2008) distinguent les pays dans lesquels la protection de l’emploi relève de la responsabilité de l’État qui agit
unilatéralement à travers la législation et les pays dans lesquels la régulation émane principalement de la négociation
collective. Selon ce critère, les auteurs précités distinguent
cinq groupes de pays : le régime libéral, le régime nordique,
le régime continental, le régime méditerranéen et les pays
du groupe transitionnel. Les taux de syndicalisation sont
élevés dans les régimes libéraux et très élevés dans les pays
nordiques, avoisinant 70 % de la force de travail. Les syndicats jouent un rôle important au niveau national mais aussi
au niveau des entreprises, dans lesquelles ils participent au
processus de décision stratégique. Dans le régime continental que les auteurs opposent au régime nordique, les accords
collectifs jouent un moindre rôle. L’accent est davantage
mis sur les droits individuels qui sont protégés par la loi.
Les conventions collectives ne laissent pas toujours la possibilité d’une renégociation au sein de l’entreprise en fonction des besoins spécifiques de celle-ci (Wallerstein et al.,
1997). Surtout, dans ces pays, le taux de syndicalisation est
très faible, en décalage avec le champ d’application étendu
des conventions collectives. Edlund et Grönlud (2008) rapprochent le groupe méditerranéen du groupe continental, les
pays méditerranéens accordant un rôle important à l’État et
faible aux syndicats (Molina Romo, 2006). Le groupe transitionnel est également opposé aux pays d’Europe du Nord,
dans la mesure où le taux de syndicalisation y est faible.
Ces États ont connu une chute des taux de syndicalisation
dans les années quatre-vingts mais aussi quatre-vingt-dix
en raison de la diminution des salaires et des prestations
sociales et de la montée du chômage (Vaughan-Whitehead,
2005). Si le classement des pays par taux de syndicalisation
est relativement stable, l’écart entre le pays le plus syndiqué
et le pays le moins syndiqué se creuse (Waddington, 2005).
Problématique de l’étude
Que l’appartenance syndicale puisse jouer un rôle important en matière de diversité peut sembler douteux dans le
contexte européen. D’une part, la syndicalisation recule
dans bon nombre de pays. La hausse du chômage, la réticence des employeurs au syndicalisme mais aussi les
insuffisances internes des syndicats, dont les pratiques
sont parfois trop formelles et déconnectées de la réalité de
l’entreprise, sont les principales explications de la baisse
des taux de syndicalisation. S’ajoutent d’autres raisons qui
sont l’importance des rapports conflictuels entretenus par
les syndicats et l’importance qu’ils accordent parfois euxmêmes à la loi plutôt qu’à la négociation collective. D’autre
part, si dans les pays du groupe nordique, le taux de syndicalisation est supérieur à la moyenne européenne, ce serait
simplement parce que, dans ces pays, les syndicats jouissent de règles qui incitent les salariés à se syndiquer : adhésion automatique dans les entreprises couvertes par une
convention collective, pouvoir des syndicats d’administrer
les prestations de chômage et autres prestations sociales…
Inversement, si dans les autres pays, les taux de syndicalisation sont faibles, ce serait parce que les taux de couverture
des conventions collectives sont élevés (Wolff, 2008). Se
sentant protégés et n’ayant pas d’intérêt économique à se
syndiquer, les salariés auraient moins besoin de s’impliquer
personnellement dans l’action syndicale.
En d’autres termes, dans certains pays, la syndicalisation ne serait forte que parce qu’elle ouvre la voie à des
avantages matériels (mutuelle, indemnisation du chômage…), alors que l’affiliation à un syndicat reposerait sur
les convictions dans les autres pays. De ce point de vue,
l’appartenance syndicale ne serait pas un critère pertinent
d’évaluation du rôle des syndicats en matière de diversité.
Seul le pouvoir des syndicats de conclure des conventions
collectives constituerait un critère pertinent.
Il ne fait aucun doute que les négociations collectives conclues par les syndicats aient effectivement une
incidence positive sur le pouvoir des salariés (Edlund et
Grönlud, 2008), sur la flexibilité du travail et sur l’évolution
64
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
des compétences (Dobbin et Boychuk, 1999). Selon Edlund
et Grönlud (2008), le poids des syndicats a une influence
sur les choix en matière de protection de l’emploi et d’organisation du travail. Ils peuvent agir à l’occasion des
négociations en faveur de l’amélioration des conditions de
travail, de la sécurité de l’emploi à long terme et de la formation des séniors. Si les syndicats ont incontestablement
un pouvoir de négociation en matière d’intégration des
séniors, nous n’écartons cependant pas que l’appartenance
syndicale en elle-même puisse réduire l’âgisme envers les
individus âgés.
En effet, certaines études portant sur le niveau individuel (Wilson et al., 1982) ont montré qu’il n’était pas
toujours aisé de mesurer l’action des syndicats sur les processus décisionnels au sein des entreprises, leur rôle ne
pouvant pas être réduit au pouvoir de négociation dont ils
disposent. L’appartenance syndicale serait également efficace comme figure de sensibilisation, dans la mesure où
elle engage personnellement les individus. Ce ne serait
donc pas seulement l’action collective des syndicats mais
aussi le partage de valeurs et les sensibilités communes des
adhérents qui auraient une incidence sur les perceptions et
les comportements en matière de diversité.
La question qui se pose est de savoir dans quelle mesure
le fait d’être adhérent à un syndicat influence l’âgisme
contre les personnes âgées. Cette étude envisage donc sous
l’angle des perceptions individuelles le lien entre l’appartenance syndicale et les trois composantes précitées de
l’âgisme – préjugés, sentiments et discrimination – ainsi
que l’incidence des variables sociodémographiques et
contextuelles – genre, âge et groupe de pays – sur ce lien.
Échantillon et mesures
Les informations requises pour évaluer l’âgisme proviennent de la base de données constituée à l’occasion de la
quatrième vague de l’European Social Survey (ESS)1.
Réalisée tous les deux ans depuis 2002 auprès d’environ
40 000 individus, l’ESS est un programme de production
d’une enquête comparative européenne destinée à mesurer les comportements, les attitudes et les croyances des
citoyens des pays membres de l’Union européenne (mais
aussi de quelques pays non membres) sur un ensemble de
thèmes socio-politiques. Ce programme a été développé à
l’initiative de l’European Science Foundation (ESF) qui l’a
inscrit parmi ses actions prioritaires depuis 2001.
Certains thèmes socio-politiques sont permanents, intégrés au questionnaire à chaque vague d’enquête. Il en va
ainsi de la « confiance dans le gouvernement, les hommes
politiques et autres institutions », des « valeurs morales,
politiques et sociales », ou encore du « bien-être, santé et
1. Belgique, Bulgarie, Suisse, Chypre, République tchèque,
Allemagne, Danemark, Estonie, Espagne, Finlande, France, RoyaumeUni, Grèce, Croatie, Hongrie, Israël, Lettonie, Pays-Bas, Norvège,
sécurité ». D’autres thèmes sont rotatifs. C’est précisément
le cas de la « perception des groupes d’âge » qui figure
exclusivement dans la quatrième vague réalisée en 2008
et qui contient des questions sur les composantes cognitives et affectives de l’âgisme.Les questions envisagées
pour les besoins de notre étude concernent les stéréotypes,
les sentiments ainsi que les volontés de discrimination à
l’encontre des personnes âgées. La population retenue se
limite aux cinq groupes de pays élaborés par Edlund et
Grönlund (2008), à savoir le groupe d’économie libérale
(Royaume-Uni), le groupe nordique (Suède, Danemark,
Finlande et Norvège), le groupe continental (Allemagne,
Suisse, Belgique et Pays-Bas), le groupe méditerranéen
(France, Espagne, Portugal et Grèce) et le groupe transitionnel (Hongrie, République Tchèque, Slovaquie, Pologne,
Slovénie et Estonie). Par ailleurs, cette étude portant sur le
rôle de l’appartenance syndicale, nous limitons l’analyse à
la population active relevant de la tranche d’âge 18-65 ans
ayant répondu à la question de l’appartenance syndicale et
du genre. Aussi, l’échantillon représente au final 28 080
TABLEAU 1
Caractéristiques de l’échantillon
nombre
fréquence
Groupe continental
5 332
23,40 %
Groupe transitionnel
5 269
23,12 %
Groupe nordique
4 616
20,26 %
Groupe méditerranéen
6 217
27,29 %
Groupe d’économie libérale
1 351
5,93 %
Hommes
10 774
47,29 %
Femmes
12 011
52,71 %
De 18 à 29 ans (inclus)
5 739
25,19 %
De 30 à 45 ans (inclus)
8 629
37,87 %
De 46 à 65 ans (inclus)
8 417
36,94 %
22 785
100 %
Groupes de pays
Genre
Âge
Effectif
Source : ESS 2008 (calculé par les auteurs)
Pologne, Portugal, Roumanie, Fédération de Russie, Suède, Slovénie,
Slovaquie, Turquie, Ukraine.
65
Appartenance syndicale et âgisme : approche comparée en Europe
individus dont les caractéristiques par groupe de pays,
genre et classe d’âge sont présentées dans le tableau 1.
On retrouve dans l’enquête ESS les trois composantes précitées de l’âgisme : préjugés, attitudes affectives et
volonté discriminante. Pour obtenir des réponses tranchées
et non ambigües, l’enquête se réfère aux idées et émotions
contre une population d’âge extrême, les plus de 70 ans, et
non contre les séniors souvent envisagés dans la littérature
comme les plus de 50 ans (Perry et al., 2003). La mesure
des préjugés à l’encontre des personnes âgées est évaluée
en fonction des seuils d’âge à partir desquels ces derniers
sont perçus comme âgés (V1), en fonction de l’opinion sur
la contribution aux modes de vie (V2) et à l’économie (V3)
des personnes de plus de 70 ans. La mesure des attitudes
affectives résulte d’une analyse du caractère positif ou
négatif des sentiments inspirés par les personnes de plus de
70 ans (V4). Enfin, la mesure de la discrimination s’appuie
sur une analyse de la volonté d’avoir un comportement non
discriminant (V5) et/ou d’être vu comme ayant un comportement non discriminant (V6).
Nous nous sommes appuyés sur le test de Fisher (F)
qui établit le rapport entre la variance « inter-groupes » qui
mesure les différences entre les catégories de la variable
explicative étudiée (par exemple, Homme/Femme pour le
genre), et la variance « intra-groupes » qui mesure les différences à l’intérieur de chaque catégorie (par exemple, degré
d’homogénéité des opinions des hommes). Si la valeur F
est supérieure au seuil de la table de Fisher, l’estimation est
considérée comme très significative (à 1 %), significative (à
5 %) ou peu significative (à 10 %).
Résultats
Le lien négatif entre appartenance syndicale et âgisme est
vérifié (voir tableau 2). Nous observons que les préjugés
des membres d’un syndicat à l’encontre des individus âgés
sont moindres. La population syndiquée fixe l’âge à partir
duquel les individus deviennent âgés à un seuil plus élevé
(59,15 ans au lieu de 55,37 ans). Elle partage une vision
plus positive de la contribution aux modes de vie et de la
contribution économique des personnes de plus de 70 ans.
Concernant les attitudes affectives, le sentiment à l’égard
des personnes âgées est en moyenne sensiblement plus
positif chez la population syndiquée. Enfin, concernant la
discrimination, les individus syndiqués sont plus attachés à
ne pas avoir de comportements discriminants à l’égard des
personnes des autres groupes d’âge et à être perçus comme
tels.
TABLEAU 2
Lien entre l’appartenance à un syndicat et l’âgisme
V1
V2
V3
V4
L’âge auquel
les gens
commencent
à être
considérés
comme âgés
L’influence
des plus de
70 ans sur les
habitudes et
modes de vie
La
contribution
des plus de
70 ans à
l’économie
Le sentiment
à l’égard des
personnes
âgées de plus
de 70 ans
V5
V6
La volonté d’avoir La volonté d’être
un comportement perçu comme ayant
non discriminant
un comportement
à l’égard des
non discriminant
personnes des
à l’égard des
autres groupes
personnes d’autres
d’âge
groupes d’âge
Echelle de 1
Echelle de 1
Echelle de 1
(très négative)
(très négative) Echelle de 1 (pas
(très faible) à
à 11 (très
à 11 (très
du tout) à 10 (très)
11 (très forte)
positive)
positive)
Modalités de
réponse
Ouverte
numérique
Moyenne
56,41
8,01
5,27
8,50
8,76
8,41
Répondants
syndiqués
59,15
8,21
5,48
8,76
9,16
8,75
Répondants
non syndiqués
55,37
7,93
5,20
8,40
8,61
8,28
Ecart des
moyennes*
+3,78
+0,28
+0,28
+0,36
+0,55
+0,47
Test de Fisher
p=0.01***
p=0.01***
p=0.01***
p=0.01***
p=0.01***
p=0.01***
* L’écart des moyennes se calcule en faisant la différence entre l’opinion moyenne des syndiqués et celle des non syndiqués.
Un écart positif signifie que l’âgisme des syndiqués est moins élevé que l’âgisme des non syndiqués.)
Echelle de 1 (pas
du tout) à 10 (très)
66
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
TABLEAU 3
L’incidence des trois variables sur le lien entre l’appartenance syndicale et l’âgisme
Homme
Genre
Femme
18-29 ans
Âge
30-45 ans
46-65 ans
continental
transitionnel
Groupe
de pays
nordique
méditerranéen
d’économie
libérale
V1
V2
V3
V4
V5
V6
L’âge auquel
les gens
commencent
à être
considérés
comme âgés
L’influence
des plus de
70 ans sur les
habitudes et
modes de vie
La
contribution
des plus de
70 ans à
l’économie
Le sentiment
à l’égard des
personnes
âgées de plus
de 70 ans
La volonté d’avoir
un comportement
non discriminant
à l’égard des
personnes des
autres groupes
d’âge
La volonté d’être
perçu comme ayant
un comportement
non discriminant
à l’égard des
personnes d’autres
groupes d’âge
Modalités
de réponse
Ouverte
numérique
Echelle de 1
(très négative)
à 11 (très
positive)
Echelle de 1
(très faible)
à 11 (très
forte)
Echelle de 1
(très négative)
à 11 (très
positive)
Echelle de 1 (pas
du tout) à 10 (très)
Echelle de 1 (pas
du tout) à 10 (très)
Moyenne
56,41
8,01
5,27
8,50
8,76
8,41
Ecart des
moy.
+3,71
+0,24
+0,29
+0,33
+0,48
+0,40
Test de
Fisher
F=77,96
p=0.01***
F=38,73
p=0.01***
F=38,55
p=0.01***
F=80,87
p=0.01***
F=81,87
p=0.01***
F=48,86
p=0.01***
Ecart des
moy.
+4,05
+0,32
+0,28
+0,40
+0,66
+0,58
Test de
Fisher
F=83,28
p=0.01***
F=74,00
p=0.01***
F=38,89
p=0.01***
F=133,87
p=0.01***
F=185,27
p=0.01***
F=127,96
p=0.01***
Ecart des
moy.
+3,11
+0,33
+0,11
+0,3
+0,32
+0,28
Test de
Fisher
F=17,78
p=0.01***
F=21,99
p=0.01***
F=1,80
p=17.57
F=19,07
p=0.01***
F=12,03
p=0.07***
F=8,55
p=0.36***
Ecart des
moy.
+4,09
+0,21
+0,2
+0,26
+0,57
+0,55
Test de
Fisher
F=69,96
p=0.01***
F=25,77
p=0.01***
F=14,60
p=0.02***
F=42,24
p=0.01***
F=99,58
p=0.01***
F=78,56
p=0.01***
Ecart des
moy.
+2,76
+0,25
+0,14
+0,38
+0,61
+0,49
Test de
Fisher
F=30,69
p=0.01***
F=36,44
p=0.01***
F=7,50
p=0.62***
F=102,05
p=0.01***
F=117,54
p=0.01***
F=69,04
p=0.01***
Ecart des
moy.
+0,61
-0,17
+0,10
-0,09
-0,16
-0,16
Test de
Fisher
F=1,33
p=24.71
F=11,26
p=0.10***
F=2,35
p=12.09
F=3,68
p=5.21*
F=4,50
p=3.20**
F=3,66
p=5.25*
Ecart des
moy.
+0,19
+0,09
-0,06
+0,16
+0,19
+0,18
Test de
Fisher
F=0,04
p=81.83
F=1,32
p=24.97
F=0,49
p=49.15
F=4,14
p=3.95**
F=2,68
p=9.74*
F=2,47
p=11.14
Ecart des
moy.
+2,51
+0,17
+0,31
+0,23
+0,32
+0,30
Test de
Fisher
F=28,52
p=0.01***
F=10,18
p=0.16***
F=20,16
p=0.01***
F=23,38
p=0.01***
F=26,65
p=0.01***
F=16,20
p=0.01***
Ecart des
moy.
+1,27
+0,25
-0,04
+0,26
+0,45
+0,20
Test de
Fisher
F=1,33
p=24.77
F=9,06
p=0.28***
F=0,12
p=72.26
F=11,00
p=0.11***
F=16,94
p=0.01***
F=3,50
p=5.82*
Ecart des
moy.
+3,09
+0,25
+0,13
+0,31
+0,71
+0,90
Test de
Fisher
F=11,47
p=0.09***
F=4,62
p=3.01**
F=1,11
p=29.27
F=9,10
p=0.28***
F=24,07
p=0.01***
F=25,69
p=0.01***
(L’écart des moyennes se calcule en faisant la différence entre l’opinion moyenne des syndiqués et celle des non syndiqués.
Un écart positif signifie que l’âgisme des syndiqués est moins élevé que l’âgisme des non syndiqués)
Appartenance syndicale et âgisme : approche comparée en Europe
Concernant l’incidence du genre sur le lien négatif entre
appartenance syndicale et âgisme, l’enquête révèle que le
fait d’être une femme accroît ce lien. Si l’écart entre l’opinion des syndiqués et celle des non syndiqués reste très
significatif (p=0.01) dans les strates masculine ou féminine (voir tableau 3), il est plus important au sein de cette
dernière (valeur F supérieure pour toutes les variables).
Concernant l’incidence de l’âge, le phénomène de réduction de l’âgisme lié à la syndicalisation est plus important
pour les séniors (46-65 ans), mais aussi pour les tranches
d’âge intermédiaire (30-45 ans) que pour la population
jeune en activité (18-30 ans). Enfin, l’analyse comparée par
groupe de pays révèle que le lien négatif entre appartenance
syndicale et âgisme est plus important dans les pays d’Europe du Nord que dans les autres groupes de pays.
Discussion
Cette étude montre que l’appartenance syndicale en ellemême joue un rôle dans la lutte contre l’âgisme, en particulier pour les femmes, les moins jeunes et dans les pays
du groupe nordique. L’incidence du genre sur le rôle de
l’appartenance syndicale en matière d’âgisme était prévisible. Selon Fabroni et al. (1990), Gordon et Arvey (2004)
et Kite et al. (2005), les femmes ont des taux d’âgisme
moindre que les hommes. De plus, si la syndicalisation
des femmes est en constante augmentation, elle demeure
moins élevée que chez les hommes (Silvera, 2009). Moins
souvent syndiquées et généralement plus positives à l’égard
des séniors, les femmes seraient particulièrement sensibles
aux effets d’ouverture générés par une appartenance syndicale. L’incidence de l’âge sur le rôle de l’appartenance
syndicale en matière d’âgisme va dans le sens des travaux
de Gordon et Arvey (2004), Kite et al. (2005) et Rupp et
al. (2005) qui avaient déjà constaté que plus les individus
sont jeunes, plus les scores d’âgisme sont élevés à l’encontre des séniors. Notre étude met en évidence que la démarche consistant à appartenir à un syndicat diminue l’âgisme
envers une catégorie d’âge éloignée de la sienne.
Il est surprenant en revanche que dans les pays du
groupe nordique, le lien négatif entre appartenance syndicale et âgisme soit renforcé. Certes, à l’échelle nationale, ces pays bénéficient de meilleures performances en
termes d’emploi (Eurostat, 2010) et de mesures visant à
rendre le travail plus attractif pour les séniors (Delteil et
Redor, 2005). Mais à partir du moment où l’appartenance
syndicale dans ces pays repose plus souvent sur une visée
matérielle (mutuelle, indemnisation du chômage…), on
aurait pu penser qu’à l’échelle individuelle son impact
sur l’âgisme serait moindre que dans les pays où la syndicalisation moins massive prend sa force dans les seules
convictions des individus adhérents. Cela montre que dans
les pays nordiques, l’appartenance syndicale ne repose pas
seulement sur des visées matérielles (bien que celles-ci
soient réelles et aisément objectivables), mais aussi et sur-
67
tout sur des convictions et des sensibilités, notamment dans
les domaines de la diversité.
Comment expliquer que l’incidence de l’appartenance
syndicale sur la lutte contre l’âgisme est renforcée par le
phénomène de syndicalisation massive ? Dans les contextes à fort taux de syndicalisation, même si l’appartenance
syndicale ne résulte pas toujours d’un choix libre, les personnes syndiquées ont la possibilité de jouer un rôle plus
opérationnel, pouvant plus aisément renégocier les accords
au sein de l’entreprise en fonction des besoins spécifiques
de celle-ci (Wallerstein et al., 1997), avoir une influence
sur les processus stratégiques et décisionnels (Wilson et al.,
1982) et se libérer de la stricte application des conventions
collectives négociées en amont de l’entreprise (Edlund et
Grönlund, 2008). Ainsi, notre étude révèle que lorsque le
rôle opérationnel des personnes syndiquées est plus important, leur engagement personnel est également plus fort.
Dans les pays d’Europe du Nord, la problématique de
la diversité est davantage basée sur la lutte contre les discriminations (Davel et al., 2008), alors que dans les pays
méditerranéens, l’application équitable des règles légales et
des conventions collectives en matière de diversité est première : si la protection issue des conventions collectives a le
mérite de concerner une très large tranche de la population,
il se peut que le niveau d’exigences et d’engagement dans
la dénonciation au quotidien des discriminations soit plus
élevé dans les pays nordiques, facilitant le développement
d’un management de la diversité. Notre étude suggère donc
que les taux de syndicalisation élevés participent à une
dynamique de lutte contre les discriminations qui, sans pour
autant conduire à des politiques d’ « affirmative action » souvent critiquées (Calvès, 2004; Weil, 2005; Kellough, 2006;
Schnapper, 2007), ne se suffit pas du principe de l’égalité
des chances. En d’autres termes, le contexte de forte syndicalisation favorise l’engagement de chacun au service de
l’intégration des séniors. La transformation des mentalités
et des comportements qui en résulte est certes moins visible
que les règles légales ou les conventions collectives, mais il
se peut qu’elle soit plus efficace pour faciliter l’adhésion de
l’ensemble du personnel à des pratiques de diversité ayant
pour objet la formation et la promotion des séniors. Il ne
s’agit ni d’une égalité sans diversité qui risque de se contenter d’une interprétation minimaliste des droits, ni d’une
diversité sans égalité qui risque d’exploiter l’hétérogénéité
des salariés (Özbilgin, 2009). Il s’agit alors d’une diversité
dans l’égalité qui propose d’appuyer le management de la
diversité sur l’engagement de tous dans un contexte de forte
syndicalisation. Elle peut ainsi plus facilement transformer
les pratiques de gestion des ressources humaines, en particulier, des pratiques de transmission de la mémoire d’entreprise, de l’expérience et du savoir-faire des séniors.
Notre étude offre également à réfléchir sur la perception des syndicats et de la syndicalisation (Bryson, 2001;
Laroche et Schmidt, 2004; D’Amadieu, 2006). Notre étude
révèle la syndicalisation comme un élément positif du
68
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
management de la diversité, à la condition que l’entreprise
ne se prive pas de cette dynamique collective fondée sur des
convergences de sensibilités liées à la syndicalisation de ses
acteurs. Dans la continuité des travaux d’Amadieu (2006),
notre étude fait de la syndicalisation un allié précieux pour la
mise en place de pratiques visant une meilleure intégration
professionnelle des séniors ainsi que l’évolution des mentalités des responsables et de leurs collaborateurs (Kirkon et
Greene, 2005; Mor Barak, 2005; Cornet et Warland, 2008).
Limites et prolongements de la recherche
La principale limite méthodologique de cette étude tient
aux choix des items. Fondés sur une enquête préexistante,
certains critères de mesure utilisés diffèrent des questions
de Fraboni et al. (1990) ou Rupp et al. (2005), ne permettant pas de parler de score d’âgisme. Cette enquête porte
toutefois sur les composantes de l’âgisme dégagées par
la littérature. Si cette limite méthodologique nuirait à une
étude centrée sur les scores d’âgisme, elle ne fausse pas
une analyse comparée du lien appartenance syndicale et
âgisme.
Une seconde limite vient de ce que le résultat de notre
étude ne peut pas être aisément transposé à tous les domaines de la diversité. Si l’appartenance syndicale réduit fortement l’âgisme envers les personnes âgées, c’est aussi pour
des raisons liées au profil des salariés syndiqués qui sont en
moyenne assez âgés. Ainsi, lorsque les thématiques de la
diversité répondent aux attentes des profils-type des salariés
syndiqués, l’appartenance syndicale peut être un moteur
d’évolution des idées en faveur de l’intégration professionnelle et même un catalyseur de bonnes pratiques managériales en matière de diversité. Pour cette raison, la volonté
des syndicats d’être tout aussi actifs en matière d’intégration professionnelle des jeunes peut également profiter aux
directions d’entreprises. De futurs travaux de recherche
pourront donc explorer l’impact de l’appartenance syndicale sur les préjugés, sentiments et discriminations ainsi
que sur les pratiques managériales dans d’autres domaines
de la diversité, et évaluer l’incidence des phénomènes de
syndicalisation massive sur l’âgisme en Amérique du Nord.
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La diversité, un levier de performance :
plaidoyer pour un management innovateur et créatif
Maria Giuseppina Bruna
Université Paris-Dauphine
Mathieu Chauvet
EDC Paris
Résumé
L’historicité, la contextualité et la polysémie des notions de diversité et de performance expliquent l’hétérogénéité des
conclusions auxquelles aboutissent les
études empiriques qui en testent la relation.
Les dimensions culturelles et temporelles,
le type de management adopté, les modes
d’intégration professionnelle, la conjoncture et le contexte intra-organisationnel
influent sur la performance des équipes
diversifiées. Afin de transmuer la diversité
en levier de performance, les organisations
sont invitées à concevoir des politiques
diversité soucieuses d’inscrire le changement dans la durée (perspective sociétale),
de promouvoir un management intégrateur attentif aux dimensions culturelles et
identitaires (niveau organisationnel), de
développer la pratique du mentoring et du
leadership (échelon individuel).
Abstract
The wide heterogeneity of conclusions of
the studies addressing diversity and performance is well explained by the multimeaning nature of these notions and their
tight connection to the historical and environmental context. The time and culture,
the management practices, the professional
integration modes, the conjuncture and the
inter-organisational context, as well, affect
the performance of diversified teams. To
make diversity a real performance vector,
organisations are committed to conceive
and adopt policies which inscribe the
change in long-duration (societal perspective), promote integrating-management
practices, sensitive to the culture and the
identity of individuals (organisational
level) and adopt mentoring and leadership
practices (individual level).
Mots clés : Diversité, performance, management, intégration, contexte, conjoncture,
temps, culture, leadership, mentoring
A
Keywords: Diversity, performance, management, integration, context, conjuncture,
time, culture, leadership, mentoring
lors que l’articulation entre les leviers économiques et
sociaux de la performance des organisations constitue
un objet central d’investigation scientifique, la question de
la diversité s’est progressivement érigée en problématique
sociétale et paradigme d’action. Introduite en France à la
faveur d’un saisissement par les hautes sphères patronales
(Bébéar, 2004; Sabeg & Mehaignerie, 2004), elle a été rapidement relayée par les sphères professionnelle, associative
(Charte de la Diversité, IMS Entreprendre pour la Cité,
A.N.D.R.H., A.F.M.D…) et académique (Peretti, 2007;
Barth & Falcoz 2007; Barth & Falcoz, 2010). Répondant à
un impératif de développement éthique, le lancement de ces
programmes d’action positive s’est inscrit dans la filiation
des réflexions rawlsiennes sur l’équité et la justice sociale
ainsi que dans un mouvement de fond destiné à lutter contre
les discriminations et à promouvoir l’égalité des chances
dans le champ professionnel (Laufer, 2009). Au final, les
organisations sont donc appelées à conjuguer une fonction
productive, de nature économique, avec une mission intégratrice, d’estampille sociale, en (re)devenant des espaces privilégiés où se joue une partie du rituel républicain
d’intégration (Sabeg & Mehaignerie, 2004; Bruna, 2011a).
Erigée en norme, la diversité a fait l’objet d’une institution-
Resumen
Las dimensiones culturales y temporales,
el tipo de gestión adoptado las formas de
inserción profesional, la coyuntura económica y el contexto interno a la organización
influyen en los rendimientos de equipos
diversos. Para transmutar la diversidad en
palanca para los rendimientos, las organizaciones son invitadas a concebir políticas de diversidad con vistas a inscribir el
cambio en el largo plazo (perspectiva en
términos sociales, “societales”), promover
una gestión integradora que tome en cuenta
las dimensiones culturales y de identidad
(nivel organizativo), desarrollar la práctica
de la tutoría (mentoring) y del liderazgo
(nivel individual).
Palabras claves: Diversidad, rendimiento,
gestión, integración, contexto, coyuntura,
tiempo, cultura, liderazgo, tutoría (mentoring)
nalisation matérialisée par l’introduction de dispositifs de
labellisation reconnus par les autorités publiques.
Si la notion de diversité interpelle, c’est qu’elle mène
à un triple questionnement à la fois notionnel (contenu et
frontières du concept de diversité), procédural (formes des
dispositifs pro-diversité) et vocationnel (finalité des politiques de diversité). Elle demeure, néanmoins, un sujet difficile à aborder puisqu’elle se situe à l’orée du juridique (lutte
contre les discriminations et les inégalités de traitement),
du politique (mise en place de conditions propices à la réalisation de l’égalité des chances entre tous les citoyens) et
du sociétal (impératif de cohésion sociale).
Malgré tout, les implications économiques potentielles
d’une diversification du profil des collaborateurs, et notamment des cadres, font l’objet d’une attention croissante tant
dans le champ académique que professionnel. Aussi est-il
désormais courant d’associer, parfois un peu hâtivement,
les concepts de diversité et de performance, tant dans les
discours publics que dans la rhétorique managériale. C’est
pourquoi interroger scientifiquement le lien entre valorisation de la diversité et performance implique, de prime abord,
de dépasser une perspective purement éthico-sociale pour
se focaliser sur une analyse intégrant la diversité - soit-elle
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
d’âge, de genre, d’origine ou de condition - parmi les ressources mêmes de l’organisation. En d’autres termes, cela
appelle à reconnaître que des facteurs extra-économiques
peuvent exercer un impact significatif sur la performance :
la diversité des collaborateurs, de leurs modes de socialisation, des structures de coopération interne (Dameron, 2004)
et des modes de management mobilisés seront autant de
facteurs identifiables. Pourtant, malgré la pluralité d’études
consacrées à la question, nul consensus n’a pu se dégager
quant à l’articulation entre la diversité sociologique des
personnels et la performance des équipes et des entreprises auxquelles ils appartiennent. L’objectif premier de cet
article est donc d’interroger les notions de diversité et performance en tant que construits socio-historiques se caractérisant par une polysémie et une polyvalence certaines.
S’appuyant sur une revue de la littérature explorant
l’impact de la diversité sur la performance des organisations sur la période 1990-2010, ce document cherche également à éclairer l’hétérogénéité des conclusions des études
empiriques à la lumière de paradigmes théoriques multiples, notamment la Resource-Based-View, la Théorie de la
dépendance aux ressources, la Théorie de l’identité sociale
et les Critical Management Studies. Bien que les résultats
d’études empiriques testant l’impact d’une ou plusieurs
dimensions de la diversité sur la performance des organisations brillent par leur hétérogénéité comme le dévoilent les
méta-analyses de Jackson et al. (2003) et McMahon (2010),
un début de convergence se fait jour entre chercheurs en
stratégie et GRH quant à l’importance de la diversité en tant
que facteur potentiel et conditionnel d’accroissement de la
performance des entreprises.
Au croisement des apports de la littérature et de recherches empiriques en cours, s’appuyant aussi sur la fréquentation régulière des entreprises partenaires de la Chaire
« Management et Diversité » de la Fondation Dauphine et
de l’Association Française des Managers de la Diversité,
cet article met en relief l’effet modérateur des dimensions
temporelles, culturelles et managériales et relationnelles
dans la transmutation de la diversité des équipes en levier
de performance économique.
Rappels des notions de diversité
et de performance
En tant que construits sociaux soumis à des requalifications
continues, les concepts de diversité et de performance ne
sauraient se plier à une unité de définition ni une unité de
mesure. Afin de mieux cerner ces concepts polysémiques
et polyvalents, il s’avère indispensable de revenir sur leur
usage au sein de la littérature académique.
Définition de la diversité
Notion de plus en plus mobilisée tant dans la sphère professionnelle, politique, scientifique ou associative, la diversité
71
s’avère pourtant dépourvue d’une définition universelle.
Cette absence de convergence conceptuelle de la diversité
est illustrée par la pluralité des définitions qui lui sont, tour
à tour, affublées : les caractéristiques susceptibles de la
qualifier (ethnie, nationalité, genre, handicap, âge…) ainsi
que les politiques mises en œuvre en vue de la promouvoir
dépendent fortement du secteur d’activité de l’organisation, de son environnement, de sa taille, de sa stratégie, de
sa culture… Alors comment penser le management de la
diversité en entreprise ?
Si l’on suit le sens commun, manager la diversité
consiste dans le déploiement de dispositifs appelés à intégrer et faire coopérer de manière efficace des individus
présentant des caractéristiques sociologiques différentes.
Concept apparu aux Etats-Unis aux débuts des années 1990
pour contrer les critiques adressées aux politiques d’égalité
des chances et d’affirmative action (Kelly & Dobbin, 1998;
Bender & Pigeyre, 2004), la notion de diversité renvoie en
fait à trois phénomènes macro-sociaux majeurs (Cornet &
Warland, 2008) :
1. la différentiation croissante de la clientèle et des usagers impliquant pour les entreprises un effort accru en
matière d’identification, compréhension et traitement
de leurs exigences;
2. la diversification croissante de la main-d’œuvre sur le
marché de l’emploi allant de pair avec un environnement institutionnel, social et économique de plus en
plus complexe;
3. la diversification (en termes de genre, d’âge, d’origines,
de culture, de conditions) du profil des travailleurs à
l’intérieur des organisations.
Derrière ce foisonnement d’éléments constitutifs de la
diversité se cache une difficulté réelle à appréhender les
frontières de ce concept à la fois problématique et en perpétuelle renégociation (Haas & Shimada, 2010). Globalement,
la diversité renvoie à la différence telle qu’elle est perçue et
traitée au sein d’un collectif. Tantôt analysée sous le prisme
de la séparation ou de la disparité, la diversité est le plus
souvent perçue comme synonyme de variété (Harrison &
Klein, 2007).
A cet égard, cette notion devrait être envisagée au travers de la notion d’altérité, renvoyant au saisissement et à la
reconnaissance d’autrui dans son intarissable et irréductible
singularité.
Définition de la performance
La performance s’affirme comme l’un des concepts-clés
du management des organisations. A ce titre, elle affiche
une pluralité de définitions selon que l’on s’intéresse à sa
dimension individuelle ou collective, économique ou sociétale, politique ou systémique. Finalement, le concept de
performance figure parmi les notions les plus abstraites et
72
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
floues de la littérature académique organisationnelle, à tel
point que certains auteurs s’interrogent même sur la possibilité de la définir (Bourguignon, 1995; Gauzente, 2000).
Or, l’étape définitionnelle s’avère indispensable pour penser, mesurer, mais aussi évaluer les impacts de la diversité
sur l’efficacité et l’efficience des équipes. Historiquement
et contextuellement situé, ce concept est, de plus, sans cesse
ré-envisagé et renégocié.
Lorsque l’on croise les principaux travaux scientifiques
consacrés à l’articulation entre diversité et performance des
équipes, c’est la perspective économique de la performance
qui est abordée de façon majoritaire (Caby et al., 1996).
Or, appréhender les effets de la diversité sur les organisations appelle à dépasser une perspective purement financière de la performance. Toute une littérature adopte ainsi
une approche sociale de la performance : elle s’intéresse
principalement aux dimensions humaines de l’organisation. La morale et la cohésion y sont considérées comme
primordiales et essentielles, et donc privilégiées au sein de
l’entité considérée. Dans cette perspective, l’atteinte des
objectifs sociaux s’avère le préalable et la condition principale de réalisation des objectifs économiques et financiers
(Gauzente, 2000).
L’approche systémique de la performance, quant à elle,
met au centre du débat l’harmonisation ainsi que la pérennité des sous-systèmes d’une entreprise. Dans cet environnement, les capacités de l’organisation sont mises en valeur
et la performance est alors définie comme « le degré auquel
une organisation, en tant que système social disposant de
ressources et moyens, remplit ses objectifs sans obérer ses
moyens et ressources et sans mettre une pression indue sur
ses membres. » (Georgopoulos & Tannenbaum, 1957).
Enfin, la perspective politique de la performance
(Morin et al., 1994) met en avant une optique beaucoup
plus relativiste où aucune référence absolue n’est identifiable et où tout individu peut avoir ses propres critères pour
juger la performance d’une organisation. L’appréciation de
la performance (donc son évaluation tant qualitative que
quantitative) se fait alors à la fois discrétionnaire et nonuniversellement généralisable.
De ce foisonnement définitionnel ayant trait aux
notions de diversité et de performance découle la nécessité
de développer un prisme analytique dual à même de faciliter l’appréhension des résultats multiples et contradictoires
auxquels aboutissent les recherches empiriques consacrées
à cette problématique. En effet, un jeu dialectique de binômes constitue l’un des principaux outils de considération
de la performance qui est utilisé dans les études académiques interrogeant le lien entre diversité et performance :
économique/sociétale; financière/commerciale; efficacité/
efficience; court-terme/long-terme. Identifier ces différents
binômes s’avère être un préalable méthodologique important afin de saisir et expliquer les résultats contrastés de ces
différentes études.
Théories mobilisables pour appréhender le lien
performance-diversité
Malgré l’absence d’une unité définitionnelle des notions
de diversité et de performance, de nombreux auteurs ont
tenté de les associer en se penchant sur la relation diversité-performance. Pour ce faire, ils ont mobilisé des modèles théoriques différents tels que la Resource-Based View,
la théorie de la dépendance aux ressources, la théorie de
l’identité sociale ou des perspectives inspirées des Critical
Management Studies.
La « Ressource-Based View »
Extension de la théorie classique des avantages comparatifs, la Ressource-Based-View (Penrose, 1959) confie au
management la tâche d’identifier et d’exploiter au mieux
les ressources et les compétences, les forces et les faiblesses
de chaque organisation afin d’en optimiser la performance
(Tywoniak, 1998). Dans cette approche, les différences
de performance sont principalement expliquées au regard
de la capacité de l’organisation à identifier, mobiliser et
développer un portefeuille de ressources-clés (Hansen &
Wernerfelt, 1989). Dans un cadre hautement concurrentiel,
promouvoir une politique de diversité reviendrait pour l’entreprise à élargir son sourcing à des collaborateurs au profil
atypique (femmes, étrangers, personnes issues des minorités ethniques et/ou culturelles, handicapés…) et, de facto,
à augmenter sa probabilité d’attirer à elle les ressources
humaines et les compétences les plus pertinentes.
La Resource-Based-View souligne ainsi la dimension
créatrice de valeur propre à la diversification (ethnique,
culturelle, sociale, de genre, d’âge…) des équipes. Et cela,
aux dépends d’une analyse des risques (condamnation
pour discrimination, déperdition d’image alors même que
la diversité a été érigée en norme collectivement appropriée) qui pourtant constitue l’un des mouvants essentiels
de la politique diversité des organisations. De surcroit, la
Resource-Based-View, dans ses modèles les plus étroits, ne
permet pas de cerner un des motifs essentiels de promotion
d’une politique diversité : la légitimation de l’entreprise. Or,
comme le souligne la théorie de la construction de la légitimité, « le management de la diversité peut être un levier
dans une stratégie de légitimation de l’entreprise auprès
de ses parties prenantes » (Barth et Falcoz, 2007, p.275) au
travers d’un processus de triple légitimation morale, pragmatique et cognitive (Suchman, 1995; Barth, 2007). C’est
ainsi que la diversification des équipes peut constituer un
message adressé aux parties prenantes de nature à accroître
la légitimité de l’entreprise, à améliorer sa réputation et sa
confiance et, par ricochet, accroître son attractivité et donc
sa performance.
Théorie de la Dépendance aux Ressources
S’inscrivant dans le prolongement des théories de la contingence, la Théorie de la Dépendance aux Ressources considère les organisations comme des « systèmes ouverts »
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
(Scott, 2003) dont il est impossible de comprendre les
comportements ou la structure sans prendre en considération le contexte dans lequel elles évoluent. Ces dernières
cherchent donc à s’adapter à leurs environnements pour
d’abord assurer leur survie, puis améliorer leur situation
(Pfeffer & Salancik 1978). La performance d’une organisation est perçue comme dépendant du niveau de ressources
fournies par l’environnement extérieur; elle est appréciée
principalement à la lumière du critère d’efficacité, et non
pas d’efficience. De manière similaire aux doctrines institutionnelles, cette théorie suggère l’adoption d’une politique
d’aménagement professionnel pour retenir les employés et
attirer les candidats les plus prometteurs (Milliken et al.,
1998). La diversification du profil des collaborateurs est
alors perçue comme pouvant contribuer à en accroître la
productivité, ce qui aurait une incidence positive sur la performance (Arthur & Cook, 2003).
Néanmoins, la Théorie de la Dépendance aux
Ressources met surtout en relief la dépendance de l’entreprise à l’égard de ressources fournies par l’environnement
extérieur. Or, la diversité n’est pas seulement une donnée
exogène à l’entreprise propre à l’environnement social et
sociétal dans lequel elle évolue. Elle constitue aussi une
réalité endogène à l’organisation puisqu’elle renvoie au rassemblement d’individus aux profils sociologiques, appartenances et fonctions différents.
Théorie de l’identité sociale
La Théorie de l’identité sociale (Tajfel & Turner, 1986)
propose des instruments de pensée, in primis la catégorisation sociale et la comparaison entre groupes, destinés
principalement à élucider les processus d’identification
sociale et d’affiliation des individus. Selon cette théorie,
l’appartenance des individus à un groupe découlerait d’un
double processus d’auto-positionnement d’un individu au
sein d’un groupe social institué, et de la reconnaissance
extérieure de son appartenance à cette instance d’affiliation.
Cependant, la Théorie de l’identité sociale repose sur
des présupposés sociologiques (homophilie des acteurs,
rassemblement groupal basé sur une recherche d’endogamie…) qui enferment finalement les stratégies relationnelles des acteurs dans une logique quelque peu binaire.
Ainsi, cette théorie ne conçoit l’identité d’un individu qu’en
rapport à ses appartenances. A l’inverse de la sociologie
néo-structurale où l’acteur-stratège est assimilé à un marginal-sécant ou à un poly-statutaire (Lazega, 2008, 2011),
l’individu n’est présenté dans la Théorie de l’Identité
Sociale que comme étant le prisonnier de choix relationnels
contraints, souvent binaires.
Critical Management Studies
Les théories critiques cherchent à remettre en cause l’idéologie contemporaine du capitalisme, ses processus de domination à travers la déformation de la connaissance. Elles
poursuivent l’émergence d’une connaissance émancipatrice
73
permettant aux individus de conscientiser et de décortiquer
les situations de domination et de répression, pour mieux
les contrer. Dans ce cadre, des caractéristiques structurelles de la société contemporaine telles que la recherche
impérative du profit, la patriarchie, les inégalités sociales,
les discriminations raciales et l’irresponsabilité écologique induiraient les organisations à se comporter comme
des instruments de domination et d’exploitation. Le but
des Critical Management Studies est donc de permettre le
développement d’interprétations critiques et de proposer
des alternatives radicales (CMIG, 2012).
Dans l’optique de la diversité au travail, les théories
critiques identifient l’existence de centres et de périphéries
dans l’expression du pouvoir organisationnel. A savoir, la
reconnaissance d’identités considérées comme étant centrales ou marginales (Meyerson & Scully, 1995). A cet égard,
la diversité peut être « résistée » et le pouvoir récupéré ou
retiré par les personnes le détenant au travers de stratégies
telles que la cooptation, la marginalisation ou la « poudre aux yeux » (Jones & Stablein, 2006). Ce mouvement
constant de résistance entre individus centraux détenteurs
du pouvoir et individus marginalisés amène à inscrire l’appréhension des différences au sein des organisations dans
une dimension politique (par le biais de pratiques de management proches des théories radicales du post-colonialisme
ou des problématiques anti-racistes ou féministes). Dans
cette optique, Humphries et Grice (1995) appréhendent la
diversité comme une problématique certes séduisante mais
fondée sur l’exploitation, notamment commerciale comme
le révèle l’étude de cas de Subeliani & Tsogas (2005) portant sur la Rabobank, des individus dits « marginalisés ».
Cette conception de la diversité reste rigoureusement
centrée sur la structure de pouvoir au sein des organisations. Or, les théories critiques sollicitées s’appliquent surtout aux relations de genre ou inter-ethniques au travail,
plus qu’aux autres formes de diversité. De plus, au sein de
la structure organisationnelle, il convient de distinguer le
pouvoir fort (pouvoir de contrôler l’allocation de ressources
dans les organisations) du pouvoir souple, de fait plus en
rapport avec le management de la diversité. On qualifie de
pouvoir souple un pouvoir symbolique tiré de la possession
d’un patrimoine de savoirs légitimes, jamais remis en cause
et tenus pour acquis, ayant trait à un comportement décrit
comme naturel car, plus ou moins consciemment, approprié et/ou autorisé par les autres individus de l’organisation
(Kossek et al., 2006).
Au final, on constate que, en tant que construits sociaux
soumis à des requalifications continues, les concepts de
diversité et de performance ne sauraient afficher ni une
unité de définition ni une unité de mesure. C’est pourquoi
le lien entre ces deux notions ne saurait être ni univoque
ni mono-orienté. Les théories présentées ci-dessus ne pouvant rendre compte de l’éventail de facteurs historiques,
contextuels et situationnels à même d’influencer cette relation, on comprend mieux l’hétérogénéité des conclusions
74
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
auxquelles aboutissent les nombreuses études empiriques
testant l’impact de la diversité sur la performance.
Diversité-performance, une articulation à penser,
des tests non-convergents
L’existence, la significativité et le sens de la relation entre
diversité des équipes et performance sont loin d’être évidents, systématiques ou univoques. Aussi, comme le rappellent Ely et Thomas (Ely & Thomas, 2001), nombre
d’études académiques abordant l’impact d’une forme particulière de diversité (l’ethnicité, l’origine culturelle, le
genre) sur la performance aboutissent à des conclusions
non-convergentes.
La dimension contextuelle des implications
de la diversité sur la performance
Bien qu’une certaine littérature managériale s’appuyant sur
la Théorie des Ressources et des Compétences (Thomas,
1991; Morrison, 1992; Cox, 1993) plaide en faveur de la
reconnaissance de l’impact significatif et positif de la diversité, notamment culturelle, sur l’efficacité des groupes de
travail, les recherches empiriques s’avèrent moins optimistes et concluantes. Et ce car, en tant que construits sociaux,
les notions de diversité et de performance sont fortement
dépendantes des contextes historiques dans lesquels elles
émergent, évoluent et se diffusent. Ces concepts sont sans
cesse remodelés au gré des rapports de force et des acteurs
engagés dans leur définition et mobilisation. Aussi font-ils
l’objet d’une requalification continue qui en traduit l’historicité et la contextualité intrinsèques.
L’appréciation de l’articulation entre diversité et performance implique dans un premier temps d’appréhender un
ensemble de conditions pouvant modérer l’impact de la première sur la seconde - dimensions conjoncturelles, contextuelles, temporelles et organisationnelles - (Ely & Thomas,
2001; Bender & Pigeyre, 2004; Belghiti & Rhodain, 2001;
Cornet & Delhaye, 2006; Landrieux-Kartochian, 2007;
Peretti, 2007; Hermont & Joras, 2007). De par cette multidimensionnalité des notions de diversité et de performance,
nombreuses sont les études qui mettent en relief l’existence d’effets balancés, tantôt positifs tantôt négatifs, d’une
diversification des équipes sur leur performance. Face à
ces conclusions, un constat s’impose : le contexte s’avère
crucial pour déterminer la nature de l’impact de la diversité sur la performance. Car si la diversité est de nature à
exercer une influence sur la performance des organisations,
cet impact doit être apprécié au regard du contexte institutionnel, économico-social et organisationnel de l'entité
étudiée. Au final, si la diversification des équipes constitue une ressource stratégique pour les organisations, elle
ne constitue un avantage concurrentiel que si elle s’intègre
dans une politique de responsabilisation sociétale (Igalens
& Joras, 2002).
Dans ce cadre, faire du développement d’une politique
globale de diversité (Özbilgin & Tatli, 2008) un processus
créateur et non une invention dogmatique (Alter, 2005)
invite à l’insérer dans une dynamique sociale de signification et d’appropriation collectives. Cela appelle ainsi à
intérioriser la politique diversité dans le patrimoine réglementaire et processuel de l’organisation, ce qui passe par son
institutionnalisation, une remise en question des croyances
initiales et une inversion normative. Inscrire une politique
diversité dans une dynamique créative invite à édicter de
nouvelles normes au regard de la nouveauté organisationnelle que représente la promotion de la diversité ainsi qu’à
adopter une perspective d’amélioration continue. Ainsi,
seul le développement d’une politique de diversité globale
et transversale (Özbilgin & Tatli, 2008) à la fois intégrée
(pilotage centralisé) et collectivement portée (décentralisation opérationnelle) peut stimuler la performance.
Nombre d’organisations renoncent néanmoins à porter
des politiques diversité globales (Pitts, 2005, Jackson et
al., 2003, Cox & Blake, 1991) car jugées trop engageantes. Comme l’atteste une étude empirique menée dans le
secteur bancaire hollandais par Subeliani & Tsogas (2005),
ces organisations se contentent alors de politiques diversité
sectorielles, promulguées uniquement dans le but d’accroître l’attractivité de l’entreprise auprès d’un secteur
particulier (dans le cadre de cette étude de cas, les clients
d’origine étrangère) plutôt que pour améliorer la qualité de
la vie professionnelle et les perspectives de carrière de leurs
employés issus des mêmes minorités ethniques. L’impact
bénéfique de la politique diversité s’avère ici sectoriel
(rentabilité financière et diversification « locale » des bas
échelons hiérarchiques), ne contribuant finalement qu’à
développer une stratégie d’affichage de la « responsabilité
sociale » de l’entreprise sans améliorations en son sein de la
position des employés issus de minorités ethniques. C’est
donc bien l’objectif spécifique de la politique diversité
qui détermine son impact effectif sur l’épanouissent professionnel des collaborateurs (Subeliani & Tsogas, 2005).
Si la démarche diversité n’est orientée que marketing, elle
sera de nature à accroître la performance économique de
l’entreprise tout en renforçant le phénomène de plafond de
verre en son sein.
Diversité, cohésion et performance des équipes.
Bâtir l’unité organique d’une entreprise à la fois respectueuse des singularités et soucieuse de sa cohésion nécessite un changement de paradigme destiné à appréhender la
diversification comme le fruit de processus sociaux, politiques et économiques. Transmuer la diversité des équipes en
levier de performance économique implique alors de prendre le temps d’accompagner ce changement perspectif et
processuel, de ressouder l’organisation autour d’une culture
inclusive, d’un partage normatif, d’un mode de management responsable et d’un leadership transformatif.
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
S’appuyant sur 24 études empiriques, la méta-analyse de Webber & Donahue (2001) interroge l’impact de
différentes dimensions de la diversité sur la cohésion et
la performance d’équipes de travail. Allant à l’encontre
des résultats des dernières études sur le sujet (Milliken &
Martins, 1996), les auteurs observent que la diversification
des équipes n’influe pas réellement sur leur cohésion et leur
performance. La spécificité de leur recherche consiste en la
distinction de la diversité professionnelle en attributs mesurant le degré d’expériences, de compétences et de perspectives pertinentes en rapport aux activités cognitives recquises
par la fonction excercée.
Ce degré de job-relatedness (relationnalité au travail)
distingue les différentes formes de diversité au regard de
critères fonctionnels, d’éducation ou de parcours professionnel plutôt que de critères démographiques ou de nationalité : ces attributs s’avèreraient, selon les auteurs, bien
plus pertinents en vue d’éclairer l’activité d’un groupe de
travail et la performance de ses membres. Or, malgré la
mobilisation d’une taxonomie originale fondée sur le degré
de job-relatedness, les auteurs n’identifient aucun impact
de la diversité sur la cohésion ou la performance du groupe.
Ils avancent un certain nombre d’arguments pouvant expliquer ces résultats.
L’influence modératrice du temps est notamment évoquée. Plus spécifiquement, la longévité du groupe de travail
pourrait modérer la relation entre des groupes ayant une
faible diversité en termes de job-relatedness et la cohésion
de ces mêmes groupes. Il a déjà été démontré (Harrison et
al., 1998; Watson et al., 1993) qu’avec le temps, les aspects
négatifs généralement associés à la diversité décroissent
considérablement car les individus apprennent à se connaitre et acquièrent une meilleure compréhension de leurs différences au sein du groupe.
Dans une perspective similaire basée à la fois sur la
relation entre la diversité démographique et cognitive des
équipes et sur les effets réciproques de la diversité sur la
performance des organisations, Kilduff et al. (2000) montrent que les membres des équipes hautement performantes
tendent à présenter une multiplicité d’orientations interprétatives en début du cycle de vie de l’équipe. Puis, au fur et
à mesure du murissement de l’équipe, autrement dit qu’elle
se rapproche de la fin de son cycle de vie, ils ont tendance
à s’approcher d’une plus grande clarté de perspective. Ces
équipes affichent ainsi une initiale ambigüité interprétative
reconductible justement à la distance « cognitive » entre les
acteurs qui cède la place progressivement à un éclaircissement perspectif, au fur et à mesure du consolidement de
l’équipe de top-management.
Le temps joue donc une fonction modératrice de la relation entre diversité cognitive des acteurs et performance
de leurs équipes. La gestion du temps constitue l’une des
prérogatives essentielles du manager qui se doit de posséder un fort degré de leadership temporel (team temporal leadership) afin de permettre une claire planification
75
des deadlines, la synchronisation des comportements des
membres de l’équipe et une allocation satisfaisante des ressources temporelles (Mohammed et Nadkarni, 2011). En
agissant de la sorte, le manager s’avère, non seulement à
même de modérer la relation entre diversité temporelle et
performance de l’équipe, mais également d’influer positivement sur l’efficacité de son collectif de travail.
La diversité culturelle, levier de créativité
sous contrainte de management
Depuis des décennies, l’accroissement de la diversité culturelle au sein de l’entreprise constitue l’un des défis majeurs
du management moderne de par ses implications tant sur les
processus de gestion des ressources humaines (recrutement,
sélection, mobilisation du capital humain et fidélisation des
collaborateurs) que sur les dynamiques organisationnelles
(Richard, 2000). A cet égard, l’affirmation de l’impact positif de la diversification ethnique et/ou culturelle des équipes
sur leur performance constitue une croyance managériale
aux accents performatifs. Ainsi, de par la pluralité de leurs
enracinements (nationaux, ethniques, culturels, linguistiques…) et de leurs trajectoires, les collaborateurs issus de
la diversité seraient porteurs d’une sorte d’altérité cognitive (Bruna, 2011b). Favorisant un brassage de perspectives
et d’opinions, la diversité culturelle profiterait à la performance de l’organisation dont elle stimulant la créativité,
la capacité prospective, la réactivité et l’adaptabilité. Là
où « la diversité des personnes [constitue… selon Bellard
(2005)] une source intarissable de créativité, particulièrement utile dans le cadre de travail en projet ou en équipe »,
cette croyance n’en reste pas empiriquement prouvée.
Certes, l’étude pionnière de Cox et Blake (1991) a
démontré l’existence d’un effet robuste et positif de la
diversité culturelle sur la compétitivité. La généralisation
des conclusions n’en demeure pas moins problématique de
par la pluralité de facteurs pesant sur la relation diversité/
performance (contexte géographique et historique, culture
nationale et organisationnelle, mode de management des
équipes, échelle temporelle choisie, critères d’appréciation
et indicateurs mobilisés…). La littérature en management
interculturel a, certes, mis en relief l’impact positif de la
diversité sur la créativité des équipes-projets, elle n’en a
pour autant pas caché les risques potentiels et les effets
pervers. Si certains travaux ont dévoilé l’existence à court
terme d’effets négatifs de la diversification culturelle sur
la performance des équipes, traduisant ainsi des phénomènes d’incommunicabilité, d’incompréhension réciproque
et de crispation identitaire, les recherches de Watson et al.
(1993) et Jackson et al. (2003) ont souligné qu’à long terme
les équipes diverses affichent une performance supérieure
aux équipes homogènes de par un supplément de créativité. Malgré la pluralité de recherches concluant à l’impact
positif de la diversification (cognitive plus que démographique) des équipes sur leur créativité et la qualité de leur
processus décisionnel (Milliken et Martins, 1996 ; Milliken
76
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
Tableau 1
Diversité-performance, des résultats empiriques contrastés
Ely & Thomas (2001)
Richard (2000)
Roberson & Park (2007)
3 perspectives :
⇒ perspective intégrative
et d’apprentissage
⇒ perspective
d’accessibilité et de
légitimité
⇒ perspective d’équité et
de discrimination
2 hypothèses :
⇒ diversité culturelle source
de performance car
promoteur de ressources et
de compétences
⇒ lien diversité/performance
modéré par la stratégie
économique adoptée
2 études :
⇒ c orrélation réputation
en termes de diversité /
performance
⇒ c orrélation diversité
ethnique des managers /
performance
3 arguments :
⇒volonté d’attirer les
meilleurs profils
⇒ meilleure adaptation à
une clientèle diverse
⇒ stimulation de la
créativité des équipes
• conclusion : impact
positif pour la seule
perspective intégrative et
d’apprentissage
• conclusion : pas de
corrélation directe, positive
et systématique, mais forte
sensibilité de la relation
diversité/ performance
à l’égard de la stratégie
économique adoptée
• conclusion : pas d’impact
significatif de la réputation
sur le revenu net ou le
chiffres d’affaires, mais
relation avérée entre
diversité des managers et
performance (courbe en U)
• conclusion : fossé avec
la réalité; les employés
apprécieront moins de
travailler avec un individu
au profil sociologique très
différent qu’avec un collègue
sociologiquement plus
similaire
et al, 1998; Kilduff et al., 2000; Jayne & Dipboye, 2004;
Landrieux-Kartochian, 2005, 2007), toute un autre pan de
la littérature (Richard, 2000; Ely and Thomas, 2001; Pitts,
2005 ; Kochan et al., 2003) conteste l’existence d’une relation causale directe et significative entre la diversification
des équipes et l’accroissement de leur performance.
Il en ressort donc que si dans certaines configurations la
diversité peut constituer une ressource clé pour l’organisation, elle peut, dans d’autres contextes, constituer un facteur
d’accroissement des tensions, des rivalités et des conflictualités internes (Klarsfeld, 2010).
Le tableau récapitulatif ci-dessus retraçant les résultats
contrastés des principales études menées sur le sujet du lien
diversité/performance nous conforte dans cette observation
(Tableau 1). Cela nous amène à souligner le caractère nongénéralisable des conclusions (non-reproductibilité des
études empiriques, dimension contextuelle des résultats
obtenus) et leur sensibilité à l’égard de la conjoncture politique et économique, de l’échelle temporelle adoptée (analyse de court, moyen ou long terme), de la présence ou non
d’une masse critique de la diversité1 et du contexte et de la
culture organisationnels.
1. Si l’on suit Roberson & Park (2007) et Roberson (2012), le point
d’inflexion à partir duquel la diversification ethnique des équipes produirait une amélioration de la performance serait situé entre 25 et 30 %
des collaborateurs).
Jayne & Dipboye (2004)
Origines de l’hétérogénéité des résultats
dans la littérature
La forte sensibilité des résultats à la conjoncture politique
et économique, à l’échelle temporelle d’analyse mobilisée
(court, moyen ou long terme) ou au contexte organisationnel empêchent la généralisation des conclusions de ces
travaux empiriques. C’est pourquoi Kossek et al. (2006)
et initialement Cox (1993) recommandaient d’apprécier le
« climat de la diversité » d’une organisation à la lumière de
trois dimensions principales : individuelle (structure d’identité des acteurs, type de personnalité, préjugés dominants),
groupale (différenciation culturelle, dynamiques psychosociologiques de groupe, ethnocentrisme/altéro-phobie…),
organisationnelle (culture d’entreprise, dynamiques intégratives structurelles vs informelles, processus d’acculturation professionnelle, « partialité institutionnelle »).
De plus, le lien diversité/performance est modérée par
la « performance égocentrée » des acteurs (carrière professionnelle) et le niveau d’efficacité de l’organisation.
Il convient donc de dévoiler l’influence exercée par une
pluralité de facteurs (Jackson et al., 2003) sur la relation
diversité/performance : le contexte sociétal, le contexte
organisationnel (secteur, taille, histoire, stratégie, culture
de l’entreprise…), les dynamiques groupales se déployant
au sein de l’entreprise (modes d’intégration et de régulation - hiérarchique, endogène, conjointe-; formes de
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
77
leadership…), la structure des relations et des interactions
dyadiques entre collègues et enfin les comportements individuels. Par conséquent, il sera préjudiciable d’enfermer
la diversité dans les seules dimensions méso-organisationnelles (entreprises/équipes) en ne considérant ni le niveau
sociétal (macro) ni l’échelle individuelle (micro) (Jackson
et al., 2003).
la diversité de manière intrinsèque qui est source de performance, mais bien son management.
Inscrit dans de multiples conditionnalités, l’impact
de la diversité sur la performance s’avère d’autant plus
contextuel que ces deux notions manquent d’une unité définitionnelle et conceptuelle. Ce constat peut concrètement
être relevé dans la littérature récente consacrée au sujet. En
effet, par le biais de sa revue de littérature effectuée sur la
période 2000 – 2009, McMahon (2010) constate un délaissement des seules dimensions démographiques (la « race »,
l’ethnicité ou le sexe notamment) au profit d’une perspective pluridimensionnelle. La différenciation liée aux fonctions exercées dans l’entreprise (parcours, ancienneté et
expérience), les caractéristiques psychosociologiques des
acteurs (amabilité, ouverture à l’expérience, contacts, sentiments et comportements) ainsi que les capacités d’interaction avec l’équipe (attitude envers les autres, acceptation
des différences…) constituent en effet autant de facteurs
de diversification à même d’influencer la performance plus
significativement que les dimensions démographiques.
A l’aune des analyses présentées ci-dessus, manager la
diversité s’avère une activité complexe, engluée dans un
cadre multifactoriel nécessitant la prise en compte d’éléments contextuels multiples. Développer une approche
diversité au sein d’une organisation requiert donc une prise
en considération globale, à tous les niveaux de l’entreprise
(Kossek et al., 2006; Cox, 1993). En effet, appréhender le
lien performance-diversité incite à mettre en place des propositions managériales envisagées à un niveau de généralité du plus ample (niveau sociétal) au plus restreint (niveau
individuel). Pour cela, il convient d’adopter un mode de
management transversal de la diversité et de l’encastrer
dans une refonte globale des procédures RH, destinée à la
fois à définir une nouvelle gouvernance des entreprises et
un nouveau modèle de leadership soucieux de la pluralité
des profils et des parcours individuels.
Simultanément, les recherches récentes révèlent un
élargissement de la notion de performance au-delà du seul
champ financier. Bien que l’estimation des résultats d’une
entreprise continue de reposer sur des indicateurs chiffrés
de performance financière (retour sur actif, rendement des
ventes, parts de marché…), les chercheurs intègrent comme
critères d’appréciation du lien diversité/performance des
descripteurs extra-financiers tels que la qualité des résultats,
le niveau d’intégration sociale et de créativité des équipes,
la qualité de la prise de décision et des modes de résolution de problèmes, en sus d’indicateurs plus traditionnels
tels que les compétences, les capacités, les expériences,
les conflits relationnels ou liés au périmètre d’action des
acteurs. Ainsi observe-t-on une redéfinition des termes de
diversité au travail et de la performance d’entreprise.
On retient donc au final que la diversité à elle seule ne
peut rendre compte du différentiel de performance existant
entre les entreprises, puisque certains facteurs tels que les
ressources, les capacités et les compétences sont beaucoup
plus à même d’expliquer ces variations. Seul un management des ressources humaines, soucieux de l’intégration
et de la valorisation des collaborateurs « a-typiques » (au
sens d’Alter, 2012), saurait convertir la diversité en avantage concurrentiel pour l’organisation via notamment ses
implications sur la propension à innover. Ainsi, ce n’est pas
2. Le propos de cet article de recherche est avant tout théorique
puisqu’il s’inscrit dans une revue de littérature. Même si nous présentons ici un certain nombre de recommandations pour le management
de la diversité et que celles-ci sont corroborées par des recherches
empiriques adjacentes à la réalisation de ce document, ces propositions
managériales sont avant tout tirées d’une revue de littérature relative
Manager la diversité pour qu’elle soit source
de performance : niveau sociétal, niveau
organisationnel, niveau individuel
En s’appuyant sur une analyse conséquente de la littérature scientifique, des études de cas issues de recherches
en cours (Bruna, 2012; Bruna, Dang, Vo, 2012; Chauvet &
Fernandez, 2010; Chauvet, 2012) ainsi que sur la fréquentation d’entreprises partenaires de la Chaire « Management
et Diversité » de la Fondation Dauphine et/ou membres de
l’Association Française des Managers de la Diversité et de
l’Observatoire Social International2, les recommandations
suivantes s’adressent prioritairement à de grandes entreprises confrontées à une diversification croissante de leurs
équipes. Elles se nourrissent tant de la participation à des
réunions professionnelles que de séances d’observation
participante et d’entretiens individuels avec des directeurs
et responsables diversité et des managers opérationnels de
grands groupes, de culture organisationnelle tant française
qu’anglo-saxonne.
Au niveau sociétal, prendre le temps d’accompagner
le changement
Fortement reliée à des enjeux sociétaux multiples et de
grande envergure, la gestion de la diversité amène à réinvestir trois champs majeurs de réflexion et d’action :
1. le Juridique, à savoir comment s’assurer que les pratiques des entreprises ne contreviennent pas au principe
d’égalité de traitement et de non-discrimination;
à l’articulation de la diversité et de la performance. Le lecteur pourra
cependant obtenir plus d’éléments d’information concernant les méthodologies employées ou autres modalités de collection des données dans
le cadre de nos respectives recherches de terrains en se référant aux
études citées ci-dessus.
78
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
2. l’Economique en percevant la diversité comme une
ressource organisationnelle susceptible de créer, sous
condition de management, un avantage compétitif pour
l’entreprise3. Une telle perspective amène à réinsérer la
gestion de la diversité dans la problématique générale
du management des ressources humaines.
3. le Management, au travers de la mise en place d’une
politique RH soucieuse de la diversité. Il s’agit là
d’interroger l’impact des politiques de recrutement,
rétention et mobilisation de collaborateurs aux profils
sociologiques de plus en plus différenciés au regard
des évolutions démographiques affectant les sociétés civiles. Ainsi, le management de la diversité peut
contribuer à répondre aux défis du vieillissement de
la population active, de l’exclusion tendancielle des
jeunes (en particulier ceux issus de l’immigration) du
marché du travail, de la pénurie de main-d’œuvre sur
certains sous-marchés de l’emploi (avec pour conséquence une nécessaire diversification des sources de
recrutement…) mais aussi aux enjeux de prévention
des discriminations subies par certaines catégories de
collaborateurs.
Or, les politiques diversité ne sauraient avoir un impact
sociétal significatif si elles ne prenaient pas suffisamment
en compte un facteur primordial : le temps. La variable temporelle s’avère essentielle en vue d’interroger l’impact de la
diversité sur la performance (Watson et al., 1993; Roberson
& Park, 2007) : il s’agit là de saisir, au travers de la dichotomie classique court terme / long terme, l’importance de la
permanence au sein des organisations. De plus, cela amène
à ré-envisager l’impact sur la performance de la diversité
des collaborateurs à l’aune d’un principe central en sciences des organisations : lorsque l’on entame un processus de
changement (ici l’introduction et la promotion de la diversité), l’impact de court terme diffère souvent de celui de
long terme.
Comme le soulignent Robert-Demontrond & Joyeau
(2006), la diversification des équipes est susceptible d’accroître à long terme la performance des entreprises après
une période transitoire d’apprentissage organisationnel.
Ainsi, les organisations sont appelées à développer un
management intégré des ressources humaines soucieux
d’internaliser la dimension temporelle dans l’appréciation
des effets de la diversité sur la performance (Chanlat &
Bruna, 2011).
Ré-envisager l’introduction et la valorisation de la
diversité sous le prisme du changement (Alter, 2005)
plaide en faveur d’un renforcement de l’attention portée
envers les dimensions temporelles. Et ce, car le temps est
3. Selon Robertson (2012), le management de la diversité contribuerait
ainsi notamment à : 1) améliorer le processus de recrutement (acquisition des profils les plus pertinents); 2) réduire les coûts organisationnels
afférents au turn-over et à accroître l’investissement, la motivation et la
satisfaction professionnelle des salariés; 3) stimuler la créativité collective; 4) faciliter la résolution des problèmes stratégiques et 5) accroître
une ressource stratégique au sein des organisations : sa
maîtrise partielle et toujours oligopolistique confère à ses
détenteurs du pouvoir et de l’autorité relationnelle (Crozier
& Friedberg, 1977; Osty et al., 2007; Lazega, 2008). Les
acteurs s’emploient donc, dans un contexte concurrentiel,
à en acquérir un contrôle partiel. Zone d’incertitude par
excellence, le temps (de la latence comme de l’action, de
l’entre-deux comme de la date-boutoir) est un enjeu sans
cesse renouvelé de négociation au sein des entreprises.
En tant que nouveauté organisationnelle, la promotion de
la diversité est appelée, pour être collectivement signifiée
et appropriée, à s’inscrire dans une dynamique sociale de
longue durée. Cependant, cette prise en compte temporelle
n’est pas aisée dans les entreprises.
En effet, comment satisfaire à un impératif de permanence (Dameron, 2002) alors que la société tout entière
idolâtre l’instantanéité qu’elle prétend atteindre moyennant
l’utilisation des nouvelles technologies interconnectées ?
Comment négocier et accompagner le changement que
représente l’introduction et la nouvelle valorisation des
diversités dans les dispositifs managériaux tout en satisfaisant à l’injonction court-termiste que la publication trimestrielle des comptes pour les entreprises cotées en bourse
incarne de manière impérative ?
De manière pourtant évidente, apprécier l’impact de
la diversité sur la performance sonne comme une injonction à inscrire les programmes d’égalité des chances dans
la longue durée, à ne pas remettre en cause des politiques
déjà engagées au gré de résultats de court-moyen terme
jugés pas assez satisfaisants. Par ailleurs, l’introduction
d’une politique de diversité se doit d’être préalablement
concertée avec les représentants des personnels ainsi
que co-construite et co-portée avec les collaborateurs de
l’organisation. C’est seulement à ce prix que la diversité
peut se révéler un réel atout pour l’entreprise. La mise
en exergue du rôle du temps dans le management de la
diversité invite à adopter, à l’échelle organisationnelle,
dans une perspective transversale.
Au niveau organisationnel, culture d’organisation
et management global des R.H.
On l’a vu, « promouvoir la diversité dans l’entreprise
devrait conduire « naturellement », à augmenter le nombre
de rapports sociaux entre des salariés possédant des profils plus diversifiés » (Falcoz (2007, p.258). Si la similitude
entre acteurs constitue un facteur puissant de socialisation,
la recherche de complémentarités (de compétences, croyances, profils…) pousse à la socialisation hétérogame, ne fusse
que pour satisfaire aux besoins et pallier aux insuffisances
la flexibilité du système organisationnel au travers d’une « pluralisation » des équipes de conception et de top-management; 6) développer
de nouvelles stratégies marketing attentives à la diversité et, in fine,
7) améliorer la relation-client en diversifiant les profils des vendeurs
(enjeux de l’homophilie).
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
de chaque acteur. Cette dynamique relationnelle basée sur
la complémentarité n’en est pas moins freinée par la stéréotypie et le conformisme (Falcoz, 2007).
Malgré tout, la socialisation professionnelle induit un
tissage identitaire marqué par l’interaction avec les différences de chacun. Ces différences sont généralement reconductibles à deux catégories : « attributs de surface » comme
le phénotype, l’âge, le sexe, et « attributs plus profonds » à
l’instar du système de valeurs, des croyances et de la culture
(Harrison et al, 1998; Falcoz, 2007). Ainsi, les crispations
identitaires et les germes de la conflictualité inter-groupale
se structureront, dans un premier temps, autour des « attributs de surface » pour se focaliser, au fur et à mesure du
murissement de la relation, sur les « attributs culturels » des
acteurs. Là où la « diversité d’attributs » induit des impacts
fortement différenciés (en intensité, significativité et signe)
d’un facteur à l’autre, la différence de métiers s’avère bien
plus fréquemment source de conflits au sein des équipes
(Pelled et al., 1999). Ce qui plaide finalement en faveur
de l’adoption d’un management intégrateur, fondé sur une
culture d’organisation forte et cohésive, sans être annihilatrice des singularités.
Le déploiement d’un management transformatif est
d’autant plus essentiel qu’en l’absence d’une intégration
professionnelle suffisante, le potentiel de créativité propre
aux « acteurs-minoritaires » ne saurait alimenter la propension collective à l’innovation. Comme le prévoit la théorie
de l’identité sociale, il faut veiller à ce que le renforcement du sentiment d’appartenance groupale des individus
ne sombre ni dans l’ethnicisation des relations sociales ni
dans la communautarisation des équipes. Et ce car de telles
dérives identitaires seraient susceptibles d’engendrer à la
fois une intensification des luttes de positionnement entre
groupes de statuts différents, une moindre efficacité de la
collaboration entre collègues, une hausse de la conflictualité interne, voire même une désagrégation du collectif de
travail (Jehn et al., 1999). Pour cela, seule une culture organisationnelle inclusive, à la fois suffisamment structurée et
nécessairement poreuse, serait à même de contrer la tendance naturelle à la socialisation par proximité (culturelle,
statutaire…).
A cet égard, une attention particulière doit être portée
à la culture organisationnelle définie comme un ensemble
cohérent de postulats sédimentés dans le temps et érigés
en paradigme normatif par les membres de l’organisation
(Schein, 1992). Celle-ci exerce en effet une influence déterminante quant à l’impact de la diversité sur la performance
des équipes-projets (Dameron & Joffre, 2007). Cette assertion mérite d’être mise en parallèle avec l’importance de la
culture nationale (et singulièrement de la langue) dans les
processus d’identification des membres à leur organisation,
ainsi que dans la mise en œuvre de stratégies de coopération entre collègues. Jouant un rôle déterminant dans la
construction identitaire et sociale des individus, la langue
interagit avec la culture organisationnelle de l'entreprise
79
(Vaara, et al. 2005). La prise en compte des dimensions linguistiques et culturelles amène à interroger la pertinence
d’un management global des R.H. dans le cadre d’entreprises multinationales (Özbilgin & Nishii, 2007).
Il s’en suit que la réussite d'une politique globale de
diversité nécessite de la prise en compte de « l'identité », de
la culture et des pratiques de l'organisation étudiée (Chanlat
et al., 2008) ainsi que de tout un ensemble de drivers aux
niveaux national, sectoriel, organisationnel, discursif et
individuel (Özbilgin & Tatli, 2008). Ainsi, aux côtés du
déploiement d’une politique diversité cohérente et durable, à la fois top-down et bottom-up (Bruna, 2012), l’adoption d’un management transformatif, l’investissement des
compétences collectives (au sens de Retour et Krohmer,
2006) et des coopérations transversales, la capitalisation
des savoirs constituent autant de conditions pour tirer partie
d’une diversité qui, sinon, pourrait freiner la performance.
L’approche business case de la diversité illustre bien ce
type de développement, notamment à travers la perspective
de management des ressources humaines appliquée à la
diversité des équipes de travail qu’elle préconise (GarnerMoyer, 2006). Selon l’approche business case, les organisations diversifiées en termes de genre, d’âge ou d’origines
ethniques seraient plus à même d’augmenter leur performance globale (Cornet & Warland, 2008). Les enjeux en
termes de management des ressources humaines se constitueraient d’abord en enjeux stratégiques pour l’entreprise
avant de stimuler, à moyen-long terme, la performance de
ces mêmes organisations. Erigeant la conduite de politiques diversités en défi stratégique de l’entreprise, l’approche business case permet notamment d’expliquer le lien
entre, d’une part, le déroulement des processus de recrutement, de sélection et d’animation des ressources humaines
ou, encore, la diversification des équipes de travail et, de
l’autre, l’atteinte d’objectifs économiques ou la réalisation
d’éventuels avantages comparatifs.
Kossek et al. (2006) proposent ainsi une vue globale
des stratégies de management de la diversité impliquant la
mise en place d’objectifs précis au niveau organisationnel
-mais aussi individuel et de groupe-, leur transformation en
programmes et initiatives RH concrètes au sein de l’organisation et l’identification d’instruments de mesure ou indicateurs permettant de savoir si les objectifs ont finalement
été atteints. Si, par exemple, l’objectif stratégique RH d’une
organisation est de développer des programmes et des politiques s’adaptant à la diversité de profils démographiques
de ses employés, cela appelle à prendre en compte l’évaluation de l’efficacité et de l’efficience de ces programmes
par ces mêmes employés, ou l’établissement d’intéressements valorisant la diversification des équipes (en termes
d’attentes personnelles, de besoins familiaux…). Le niveau
de turnover, la rentabilité, l’augmentation des parts de marché ou l’appui accordé par les top-managers à la politique
diversité vont constituer autant d’indicateurs permettant de
mesurer l’impact des initiatives RH mises en place dans
80
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
la perspective de promouvoir la diversité à l’échelle intraorganisationnelle. L’approche business case de la diversité
permet finalement de concilier prospective de long-terme et
quotidienneté de l’exigence managériale, inscrivant ainsi la
thématique même de la diversité dans les grilles traditionnelles de la stratégie et de la GRH.
Au niveau individuel : concevoir un leadership
transformatif et développer le mentoring
A l’orée des paragraphes précédents, il apparaît clairement
que la gestion de la diversité doit être considérée comme
une compétence managériale à développer au sein des organisations. Le rôle du leadership au sein des démarches de
promotion de la diversité s’avère là absolument central car
le leader est appelé à reconnaître et à valoriser la diversité
des membres de ses équipes. Outre un positionnement hiérarchique élevé lui permettant d’exercer un impact réel sur
le management en entreprise, le leader se doit d’afficher une
propension personnelle à la reconnaissance de la diversité,
ainsi qu’une crédibilité à promouvoir une appropriation
collective de la diversité -processus créateur (Alter, 2005).
Son rôle est enfin également de justifier l’importance de
mener une politique pro-active de la diversité, à la fois au
nom de la mission intégratrice et sociétale de l’entreprise,
mais aussi et surtout de l’intérêt stratégique de l’organisation (Mutabazi et al., 2008).
L’amélioration du management de la diversité doit passer par une attention particulière accordée aux capacités
de leadership des individus, et notamment l’adoption d’un
style de leadership transformatif. A cet égard, l’accent sera
mis sur quatre mécanismes fondamentaux développés à
l’aide d’activités de mentoring ou de formation (Bennis &
Nanus, 1985) :
– le ralliement par la vision, en proposant aux individus
une projection claire du futur;
– la transmission d’une vision partagée de manière à susciter l’adhésion de tous;
– la capacité à gagner la confiance en promouvant la stabilité, la sincérité et la fiabilité;
– l’auto-déploiement, consistant pour le leader à promouvoir son « auto-image » positive, représentant l’adéquation entre ses points forts et les besoins de l’entreprise.
Parmi les pratiques concrètes de leadership appropriées
à la gestion de la diversité, le mentoring et la formation
s’avèrent cruciaux car permettant à l’organisation de tirer
un profit supérieur des compétences et des potentialités des
collaborateurs issus de la diversité. S’appuyant sur la capacité des leaders à faciliter les relations entre individus aux
profils diversifiés, le mentoring facilite leur acculturation et
leur intégration organisationnelle. Cela passe par un processus de médiation relationnelle et symbolique par lequel
le mentor, à la fois supérieur hiérarchique et figure tutélaire,
confère au mentoré une légitimité de transfert et accroît son
patrimoine relationnel (Kram, 1988).
Ces initiatives de mentoring s’inscrivent directement
dans la perspective de Burt (1998), décrivant deux stratégies possibles du point de vue relationnel pour faire carrière
en entreprise :
– l’auto-construction d’un capital social basé sur un
réseau large, dense et riche en trous structuraux : cette
stratégie qualifiée d’entrepreneuriale serait privilégiée
par les cadres-hommes,
– la mobilisation d’un capital social d’emprunt induisant
une hiérarchisation du réseau égocentré du mentoré.
En supportant l’accès aux ressources-clés de son protégé, le mentor contribue finalement à positionner cet individu dans une relation d’égalité des chances – aux niveaux
symbolique (légitimation) et pragmatique (accès à des ressources stratégiques) – par rapport à ses collègues. Mais
cette pratique s’avère également être une stratégie de réduction des risques, la fréquentation des candidats permettant
de mieux apprécier leurs capacités et aptitudes (Athey et
al., 2000; Persson, 2009).
Malgré tout, comment peut-on s’assurer du succès et
de la mise en place concrète de telles pratiques de mentoring au sein de l’organisation ? Répondre à cette question
amène à interroger indirectement l’articulation entre la
performance égocentrée des acteurs (carrière, promotion
symbolique, augmentation de salaire…), leur performance
collectivement-orientée (productivité, créativité du salarié)
et la performance globale de l’organisation (Kram, 1988).
Du point de vue d’un management de la diversité, un leadership favorisant le mentoring permettrait à l’entreprise de
mobiliser au mieux des collaborateurs à fort potentiel issus
de la diversité qui pourraient être tentés par le retrait par la
peur de se voir refuser des postes à responsabilités (Athey
et al., 2000). La collaboration entre équipes diverses reposant sur la sédimentation d’un sentiment d’appartenance et
sur une once de pression sociale, le mentoring favorise à
la fois l’intégration et l’acculturation organisationnelle des
acteurs issus de la diversité et l’épanouissement des dynamiques de groupe.
Conclusion
Notions polysémiques et plurivalentes sans cesse requalifiées, la diversité et la performance font l’objet d’une réinvestigation constante au sein du champ académique. A la
lumière d’une telle observation, il est d’autant plus aisé de
comprendre l’hétérogénéité relative des conclusions auxquelles aboutissent les études empiriques testant l’impact
de la diversité sur la performance.
Soulignant le rôle central joué par la culture organisationnelle, ces recherches insistent sur l’impact exercé par
des facteurs contextuels, temporels, organisationnels et
La diversité, un levier de performance : plaidoyer pour un management innovateur et créatif
relationnels sur la performance d’équipes diversifiées. La
diversité se révèle ainsi une ressource-clé pour l’entreprise,
une gestion avertie de celle-ci étant susceptible de constituer un avantage compétitif.
A l’encontre de la rhétorique du volontarisme désintéressé des organisations et de l’illusion de leur pure soumission aux contraintes légales, il s’agit là d’envisager la
promotion de la diversité comme un double vecteur de légitimation de l’entreprise (Barth, 2007) et de stimulation de
sa performance économique. S’inscrivant à la confluence
de l’éthique, du normatif et de l’économique, la diversité se
constitue ainsi en problématique centrale pour les entreprises dont elle conduit à réinterroger la stratégie tout autant
que le management.
Par delà l’hétérogénéité des résultats auxquels aboutit la littérature académique, cet article conclut que la
diversité n’est pas de manière automatique et intrinsèque
source de performance pour les organisations. Au-delà de
la nécessaire prise en compte de dimensions contextuelles,
c’est bien la manière de manager la diversité qui peut être
source, ou non, de performance pour les entreprises. Ainsi
les organisations ont-elles tout intérêt à concevoir des politiques diversité en prêtant attention aux dimensions temporelles à l’échelle sociétale, aux dimensions managériales
au niveau organisationnel et aux dimensions intégratives et
relationnelles à l’échelle individuelle. Et ce afin d’ériger la
diversité en levier potentiel et conditionnel de performance
économique.
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Enjeux techniques, symboliques et politiques
de la mesure de la diversité dans les entreprises
et les organisations ?
Hedia ZANNAD
ESC Rouen
Annie CORNET
Hec-Ulg – UER Management
Résumé
Cet article vise à identifier les enjeux techniques, symboliques et politiques liés aux
choix des indicateurs mobilisés dans une
politique de gestion de la diversité. Ils
doivent permettre de poser un diagnostic,
d’assurer le suivi et de mesurer la performance de ces politiques. Notre objectif est
de montrer la complexité de la démarche,
liée à la difficulté de trouver les bons indicateurs mais aussi de leur donner du sens,
considérant les préoccupations des dirigeants et managers, les contextes internes
(culture organisationnelle, modes d’organisation du travail et politiques de GRH,
secteur…) et externes (contexte socio-culturel, légal, économique) et des objectifs
recherchés.
Abstract
This article aims to identify the technical,
symbolic and political issues related to the
choice of indicators used in a diversity
management policy. They should allow an
organization to make a diagnosis, to monitor and measure the performance of these
policies. Our goal is to show the complexity of the process, due to the difficulty of
finding good indicators but also of giving
them meaning considering the concerns
of leaders and managers, internal contexts
(organizational culture, modes of work
organization and HRM policies, industry),
external contexts (socio-cultural, legal,
economic) and the objectives set.
Keywords: Diversity, Management, Diagnosis, Indicator
Mots clés : Diversité, management, diagnostic, indicateur
Pete STONE
Just Different
Resumen
Este artículo tiene como objetivo identificar las cuestiones técnicas, simbólicas y
políticas que surgen a la hora de elegir los
indicadores movilizados en una política de
gestión de la diversidad. Los indicadores
deben permitir elaborar un diagnóstico,
asegurar el seguimiento y la medición de
los resultados de las políticas de gestión
de la diversidad. Nuestro objetivo no sólo
es mostrar la complejidad del enfoque que
resulta de la dificultad en encontrar los
buenos indicadores sino también darles
sentido al tener en cuenta las preocupaciones de los dirigentes y managers. Insistimos
en la relevancia de darles sentido, a la luz
de los contextos internos (cultura organizacional del trabajo y políticas de GRH,
campo de actividad) y externos (contexto
sociocultural, legal, económico) y los objetivos que hay que lograr.
Palabras claves: Management de la diversidad, diagnóstico, indicadores
L
a mesure de la diversité constitue une étape à la fois
importante et ardue dans l’élaboration d’une politique
de gestion de la diversité. Si de nombreux articles débattent
de l’un ou l’autre aspect de ce diagnostic, il n’existe pas à
notre connaissance d’articles académiques qui en présentent les enjeux techniques, symboliques et politiques. Notre
article vise à combler cette lacune en montrant notamment
que la construction d’indicateurs de la diversité renvoie au
moins autant à des enjeux techniques et rationnels que rhétoriques et symboliques. Les indicateurs devraient permettre de poser un diagnostic, d’assurer le suivi et de mesurer
la performance des politiques de gestion de la diversité. Ils
s’accompagnent de tableaux de bord, qui ont souvent pour
vocation de persuader la direction et les managers opérationnels d’adopter une politique de gestion de la diversité
active et, donc, de s’engager dans des innovations organisationnelles et de débloquer des moyens pour lutter contre
les coûts directs et indirects induits par la discrimination.
Notre objectif est de montrer la complexité de la démarche,
1. Nous employons l’expression « mesure de la diversité » pour parler
des indicateurs et tableaux de bord visant à faire un diagnostic quant au
processus de discrimination et/ou au degré de diversité de la population
salariée au sein des entreprises concernées.
liée à la difficulté de trouver les bons indicateurs mais aussi
de leur donner du sens, en regard des préoccupations des
dirigeants et managers.
Notre analyse est le fruit, d’une part, d’une revue de littérature dans le champ de la gestion (diversité, indicateurs
de gestion, gestion des ressources humaines, management,
gestion du changement) et de la sociologie (pouvoir, symbolisme, institutionnalisme) et, d’autre part, d’une étude de
terrain effectuée sur une durée totale de deux ans (20092011) dans le cadre d’une commission de l’AFMD que
nous avons animée sur la question de la mesure de la diversité1. Cette enquête est de nature mixte - données primaires
et secondaires, qualitatives et quantitatives- et repose sur
deux sources de données2 :
• C
inq tables rondes ont été animées sur le sujet de la
mesure de la diversité avec les responsables Diversité
d’une quinzaine d’entreprises : L’Oréal, Adecco, Accor,
BNP-Paribas, La Poste, Véolia Environnement, CNP,
2. Bien entendu, toutes les données secondaires qui nous ont été offertes durant ces entretiens (chartes, rapports de développement durable,
brochures internes...) ont également été exploitées.
86
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
SFR, Groupe Keyrus, Schneider Electric, Mornay.
L’ensemble des échanges effectués durant ces tables
rondes et présentations a été retranscrit sous forme de
compte-rendu détaillé.
• D
es entretiens semi-directifs ont été menés avec l’ensemble de ces acteurs, mais aussi auprès d’entreprises
n’ayant pas participé à la commission de l’AFMD sur
les indicateurs (Sanofi-Aventis, Orange, Bristol-Myers
Squibb, Agir Arcco, Areva, Auchan, France Télévision,
Groupama, ProBTP, Groupe PSA et TF1) afin d’accroître la représentativité de notre échantillon. Après avoir
été intégralement retranscrits, ils ont fait l’objet d’une
analyse de contenu.
L’ensemble de ces données vise à établir un bilan en
matière d’enjeux, d’objectifs, de difficultés et de questionnements quant aux indicateurs qui peuvent être mobilisés
pour le diagnostic, mais aussi le suivi et l’évaluation des
politiques de gestion de la diversité.
Nous allons montrer que le choix des indicateurs s’avère
une opération complexe et difficile, à la fois en regard des
informations réellement disponibles dans les bases de données de l’entreprise mais aussi des contraintes légales qui
limitent le type de données qui peuvent être collectées. Les
indicateurs proposés sont parfois inconsistants. On a des
données objectives (ex : le sexe ou l’âge) mais aussi des
constructions sociales des réalités organisationnelles et
sociétales (comme le genre, l’origine, le handicap) reflétant
les représentations et priorités des parties prenantes impliquées. Les entreprises se trouvent souvent dans le dilemme
suivant : opter pour des indicateurs internationaux (le plus
petit dénominateur commun) dont l’universalité n’est pas
validée et l’intérêt limité ou choisir des indicateurs différents en fonction des pays, ce qui rend difficile toute comparaison internationale. Il s’agit également de clarifier ce
qu’on veut mesurer : la représentativité de certains publicscibles ou la discrimination ? En fonction du choix posé, la
démarche et les outils à mobiliser seront bien différents.
L’étude montre aussi que le risque est que les entreprises
se focalisent davantage sur la mesure de la diversité que sur
les dispositifs de management qui devraient l’accompagner.
La tâche est enfin d’autant plus complexe qu’on vise à établir et à démontrer un lien entre diversité et performance.
Rares sont, en effet, les entreprises rencontrées qui ont clairement fixé des objectifs de départ précis pour leur politique de gestion de la diversité. Evalue-t-on la performance
en regard du nombre et du type d’actions réalisées ou des
résultats des mesures mises en œuvre ?
La mesure de la diversité :
illusions, complexité et défis
La mesure de la diversité est une question complexe.
Plusieurs défis sont à surmonter comme le choix des indicateurs liés à l’identification des groupes-cibles, le choix des
méthodes ou encore le sens des données ainsi collectées en
regard des contextes -organisationnels et nationaux- et des
objectifs des politiques mises en œuvre. Les choix posés
reflètent les pratiques en vigueur dans un contexte national
bien précis et les représentations et priorités des parties prenantes impliquées.
Le choix des indicateurs de la diversité suit rarement
les règles de l’art en matière de tableaux de bord de
gestion
Lorsqu’on consulte un ouvrage de contrôle de gestion faisant référence (Taïeb, 1996), on y lit que la première consigne en matière de choix d’indicateurs est que l’indicateur
doit contribuer à la réalisation de l’objectif de départ. « Le
choix des indicateurs se fait en fonction de leur contribution
à la réalisation de l’objectif et des actions possibles qu’ils
permettent en cas de dérive » (Taïeb, 1996, p. 42). En effet,
les trois rôles d’un indicateur sont d’informer, de poser un
diagnostic (c’est-à-dire faire ressortir les écarts par rapport
à la norme) et de faire des prévisions (les dysfonctionnements à venir et les moyens nécessaires pour les corriger).
Il s’agit donc de déterminer une norme pour chaque indicateur afin que tout écart puisse « déclencher l’allumage du
clignotant » (Taïeb, 1996, p. 39). Rares sont les entreprises
rencontrées qui ont clairement fixé des objectifs de départ
précis pour leur politique de gestion de la diversité. On
retrouve plutôt des formulations floues telles que « la réduction de la discrimination à l’embauche » ou « l’accroissement du nombre de femmes à des postes de direction ».
Ainsi, lorsqu’on demande aux entreprises concernées ce
qu’elles visent à travers la mesure de la diversité, elles
offrent des réponses qui font ressortir des objectifs souvent
peu opérationnels comme : « nous voulons rendre visibles
les améliorations faites en matière de diversité et évaluer
les progrès réalisés » ou « la discrimination fait partie des
risques opérationnels majeurs du groupe donc il s’agit de
faire remonter toutes les actions permettant de prévenir
cela, des Etats-Unis, du Canada, de partout ». D’ailleurs,
comment pourraient-elles fixer des objectifs opérationnels
et déclencher les fameux clignotants d’écarts par rapport
à la norme quand rien ne permet de la définir (en dehors,
de certains quotas pour l’emploi de personnes handicapées,
variables entre pays) ? Que pourrait être cette norme en
matière de genre, d’âge ou d’origine ethnique ? Le cas le
plus problématique est, sans doute, l’origine ethnique puisque les entreprises ne peuvent s’appuyer, en France et en
Belgique, sur des indicateurs statistiques « ethno-raciaux »
publics qui pourraient leur servir comme base de comparaison (indicateurs nationaux, ou par bassin d’emploi).
En second lieu, Taïeb (1996) souligne que les indicateurs
sont d’autant plus utiles qu’ils permettent un grand nombre
de comparaisons internes et externes, c’est-à-dire par rapport au passé d’une même entreprise mais aussi par rapport à la moyenne de la branche et du secteur d’activité, ou
encore la moyenne nationale, européenne et internationale.
« Plus les comparaisons au passé sont nombreuses, plus
Enjeux techniques, symboliques et politiques de la mesure de la diversité dans les entreprises et les organisations ?
on valide les tendances exprimées par l’indicateur et plus
on crédibilise les projections faites pour le futur » (Taïeb,
1996, p. 39). Pour la mesure de la diversité, il n’existe, pour
l’heure, aucun référentiel national ou international auquel
se comparer (même si des tentatives sont en cours, notamment par l’AFNOR), d’autant que certains indicateurs sont
autorisés dans certains pays mais pas dans d’autres. Une
des entreprises de notre panel explique, par exemple, en
quoi il est complexe d’obtenir des chiffres à l’international
sur le handicap : « En ce qui concerne le sujet du handicap
(…) on a beaucoup travaillé avec nos RH dans les différents
pays : il n’y a aucune loi pareille… C’est sûr que les chiffres
peuvent aider, mais la base de compter n’est pas la même
d’un pays à l’autre et la définition du handicap n’est pas
la même – une personne handicapée, ce n’est pas la même
chose pour un Anglais, un Espagnol… ». Les entreprises
se trouvent souvent dans le dilemme suivant : opter pour
des indicateurs internationaux (le plus petit dénominateur
commun) dont l’universalité n’est pas validée et l’intérêt
limité ou choisir des indicateurs différents en fonction des
pays, ce qui rend difficile toute comparaison internationale.
Une entreprise déclare : « Au niveau groupe, je ne peux rien
dire (…). Si je dois mener une politique « monde », je dois
m’aligner sur le plus petit commun dénominateur pour ne
pas être dans l’illégalité par rapport à d’autres pays. Donc,
au niveau reporting et chiffres « monde », très vite on se
heurte à la difficulté de produire des indicateurs qui ont
du sens ». De plus, les comparaisons entre entreprises sont
d’autant moins aisées que peu d’entreprises publient leurs
indicateurs à l’externe : « Oui, c’est vraiment interne. On
ne va pas communiquer notre tableau de bord Diversité à
l’extérieur comme cela. »
Enfin, les tableaux de bord doivent théoriquement être
le fruit de la rencontre de deux familles d’indicateurs :
les indicateurs de résultats (obtenus) et les indicateurs de
moyens (intensité des efforts déployés)3. Or, il y a souvent
des confusions entre les deux types d’indicateurs : pour présenter les résultats d’une politique, les entreprises dressent
souvent une liste des actions réalisées, sans fournir beaucoup d’informations sur l’impact de ces actions et sur le
nombre de bénéficiaires. Ces indicateurs sont des indicateurs de moyens, généralement qualitatifs ou dichotomiques (oui/non) selon que telle ou telle pratique est mise
en oeuvre. En France, les indicateurs mentionnés dans le
cahier des charges du Label Diversité sont surtout centrés sur les moyens (la formalisation de politiques). A cela
s’ajoute des indicateurs qui s’inspirent des échelles d’attitude et qui visent à connaître l’adhésion du personnel à
une politique de gestion de la diversité et des échelles qui
visent à savoir si le personnel a été témoin ou victime de
discrimination : « Un autre volet qui est moins perceptible,
dans les indicateurs, c’est celui de la perception (…) On
essaye, doucement, d’intégrer dans nos baromètres internes
3. On parle aussi d’indicateurs de « structure » (qui sont statiques) et
d’indicateurs de « performance » (qui sont dynamiques).
87
l’appréciation que les collaborateurs ont de la politique de
l’entreprise. Donc, on va progressivement voir comment
ils ressentent la politique Diversité et s’ils sont, selon eux,
témoins ou victimes de discrimination ou non. Même si ça
ne suffit pas, ça permet d’éclairer un peu sur l’efficacité des
politiques que l’on met en place sur les différents sujets. »
Les indicateurs, plutôt que d’être le reflet
de la réalité sociale, en sont une modélisation
Les tableaux de bord sont généralement construits dans
le cadre d’une tactique communicationnelle. Selon
Feisthammel et Massot (2005), « tous les supports d’expression peuvent a priori servir de support de présentation
pour restituer l’information significative d’un indicateur »
(Feisthammel & Massot, 2005) (p.167). Citons, de façon
non exhaustive, du plus « brut » au plus « figuratif » : les
statistiques, les ratios, les pourcentages bruts, les pourcentages par tranches, les calculs de moyenne, d’écart-type, de
médiane, les couleurs, les représentations graphiques, les
dessins (par exemple : J ou L), la réponse à une question
(sous forme de mots ou sous forme binaire : oui / non), les
commentaires, l’interpellation de la part du DRH du type
« On prône la diversité, mais il n’y a pas une seule femme
ici présente ! » (exemple cité par une entreprise de notre
panel). Le choix de ces indicateurs s’inscrit dans un exercice de communication : il s’agit de donner une certaine
image de l’entreprise et de son investissement dans les politiques de gestion de la diversité.
Les supports d’expression pouvant être utilisés dans le
cadre de la diversité sont donc nombreux, allant du quantitatif au qualitatif, du nominal au verbal. Ils peuvent faire
appel à la rationalité (chiffres, mots) ou être plus figuratif
(dessin, couleur). Dans une4 des entreprises étudiées, les
indicateurs de performance de la Diversité exposés dans le
rapport de développement durable couvrent trois dimensions (périmètre Monde) :
• les nationalités : un camembert représente en pourcentage les 10 nationalités non-françaises les plus représentées du groupe (assorti d’un commentaire : « 97 725
salariés du groupe, soit plus de 48 % appartiennent à
une autre nationalité que la nationalité française. »)
• les âges : un histogramme représente la pyramide des
âges distribuée selon l’effectif brut total ainsi que l’effectif ayant une ancienneté inférieur ou égale à 7 ans,
assorti de la seule légende suivante : « Un équilibre
existe entre les différents groupes d’âge des salariés. »
• le handicap : un tableau présente les effectifs du personnel handicapé sur différentes activités du groupe et selon
trois zones géographiques : France, Europe hors France
et hors Europe. Ces chiffres sont ensuite déclinés par
4. Nous avons opté pour une présentation anonyme des entreprises
dans l’objectif de ne pas pointer spécifiquement une des entreprises qui
a participé à l’enquête.
88
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
catégories de personnel : « 82 % des salariés handicapés sont des ouvriers, 15 % du personnel hiérarchique
de 1er niveau et 3 % des cadres ». Le niveau d’emploi
de personnes handicapées, complété par les contrats de
sous-traitance avec le secteur dit protégé, représente un
taux d’emploi de 8 %, pour un taux incitatif national de
6 % (norme de référence nationale pour la France ».
La nationalité, indicateur de diversité culturelle, n’est
qu’un indicateur partiel de cette diversité. On peut se
demander pourquoi avoir choisi ce seuil de 7 années pour
analyser la diversité des âges. Pour les personnes handicapées, on peut s’interroger sur le découpage utilisé pour
réaliser les comparaisons internationales et les raisons qui
amènent l’entreprise à positionner ce critère en regard des
catégories professionnelles.
Chaque format comporte ses avantages et inconvénients, notamment sur la dualité interprétation/signification : à titre d’exemple, un indicateur présenté sous forme
de valeur absolue réduit les erreurs d’interprétation mais
également la signification de l’information véhiculée.
L’approche quantitative d’un phénomène social en facilite
le suivi et permet une diffusion plus rationnelle de l’information mais peut être moins éloquente qu’une approche
subjective d’engagement. Commenter les chiffres, surtout
s’ils sont avantageux, facilite la compréhension d’une réalité souvent impalpable, et peut autant susciter l’adhésion
des lecteurs. L’extrait suivant du rapport de Développement
durable d’une autre entreprise en est un exemple : « Avec 96
959 collaborateurs représentant plus de 133 nationalités,
la diversité est une réalité chez X. Elle fait aujourd’hui partie intégrante de la culture du Groupe, grâce au plan global
lancé en 2003 et encadré par le Conseil de la Diversité ».
Il ne s’agit pas seulement de mettre en forme une information existante mais aussi de lui donner un sens en regard
des enjeux et des stratégies des acteurs en présence : nous
sommes bien dans le champ de la représentation. Ainsi, le
manager de la diversité peut afficher à l’extérieur un équilibre entre le nombre de femmes et d’hommes présents dans
l’entreprise afin d’attirer un vivier de femmes à haut potentiel et montrer que l’entreprise n’est pas discriminatoire. Il
peut aussi décider d’alerter sur l’insuffisance de femmes à
des postes de direction, car il souhaite obtenir le soutien sur
un plan d’action pour les femmes à haut potentiel. Il peut
décider de ne présenter qu’une partie des indicateurs ou
d’associer certains indicateurs pour susciter des analogies
comme la sous-représentation des femmes et des seniors
dans les politiques de mobilité internationale. Dans certains
cas, il aura des données quantitatives mais dans d’autres, il
devra se contenter d’indicateurs qualitatifs comme la perception des acteurs clé de l’entreprise. Bref, la portée d’un
indicateur de la diversité ne réside pas dans son objectivité
mais dans la signification qui lui sera conférée.
Les entreprises se concentrent sur la mesure
de la diversité, avec peu de mesure de la discrimination
Une fois les indicateurs identifiés, l’enjeu est de clarifier
ce qu’on veut mesurer au travers d’un diagnostic diversité et là, les confusions sont nombreuses. Pour Cédiey
(Cédiey, 2008), « ces dernières années les discours qui
confondent la mesure de la diversité et la mesure des discriminations sont nombreux » (p.11). Mesurer la diversité
est complexe (Harisson & Hock-Peng, 2006) car, contrairement à la discrimination, aucun texte juridique ne définit
la diversité. Comme le signalent Simon et Clément : « Le
caractère vague de ce que recouvre la diversité lui confère
une puissance d’évocation sociale qui pose des problèmes
lorsqu’elle doit se convertir en politiques et surtout en statistiques. » (Simon & Clement, 2006). Ce diagnostic de la
diversité est, de fait, essentiellement quantitatif, avec l’évaluation de la représentativité des groupes-cibles dans l’organisation (Blivet, 2004; Sabeg & Charlotin, 2006; Simon,
2005). L’un des premiers objectifs de cette mesure est de
pointer la sous-représentation de certains publics cibles
dans l’entreprise, l’organisation, les fonctions et les métiers,
les niveaux hiérarchiques. Il s’appuie généralement sur une
compilation et un traitement des données statistiques internes disponibles dans les bases de données du personnel. La
qualité des indicateurs disponibles et utilisables est dépendante du type de données collectées dans l’organisation ou
l’entreprise, de la fiabilité de ces données et leur exhaustivité, de l’existence ou non de bases de données centralisées
et/ou interconnectées, de la possibilité légale de collecter
ou non ces données.
La mesure de la discrimination ne pose pas des questions de représentativité mais de mesure des discriminations directes et indirectes et de mise en conformité avec la
loi (logique juridique) (Amadieu, 2007; Augry, Hennequin,
& Karakas, 2006; Cediey & Foroni, 2007; Guitton, 2006).
Le respect des contraintes légales est généralement évalué
au travers d’audits de conformité (Peretti & Saut, 2007).
L’objectif est pointer les carences éventuelles en matière de
respect des lois sur les discriminations et des engagements
conventionnels tels que les conventions collectives de travail, les normes européennes et internationales ou encore
les critères pris en compte dans certains labels (normes
ISO 26000 en matière de responsabilité sociale ou normes
du BIT, par exemple) (Combemale & Igalens, 2006). La
mesure de la discrimination peut aussi se réaliser grâce à
un testing, l’une des premières études européennes étant
celle du BIT, en 1998, ciblée sur les processus de recrutement (Arrijn, Feld, & Nayer, 1998). Cette méthode permet
d’identifier les comportements et procédures discriminatoires en regard de certaines caractéristiques comme le sexe,
l’âge, l’origine, l’apparence physique, etc. (Amadieu, 2004,
2007; Peretti & Saut, 2007; Petit, 2004). Une autre méthode
consiste à analyser l’intégralité d’un processus (par exemple, celui des promotions) au sein d’une même entreprise.
On part des étapes de ce processus et on essaie de montrer
les effets discriminatoires liés à chaque étape (Amadieu,
Enjeux techniques, symboliques et politiques de la mesure de la diversité dans les entreprises et les organisations ?
2007; Chen & DItomaso, 1996; Gavand, 2006). Ces études
ont montré que les mécanismes en jeu sont complexes car
ils combinent des stéréotypes et des préjugés, souvent inscrits dans des normes et procédures perçus comme objectives et neutres.
Si les méthodes pour débusquer les discriminations sont
nombreuses, force est de constater que les entreprises ne
sont pas très demandeuses de faire émerger ses pratiques,
de les nommer et de les identifier. Les craintes de l’impact
négatif sur l’image de l’entreprise sont très fortes. C’est
pourtant l’une des conditions pour la réussite d’un plan de
gestion de la diversité.
Les indicateurs sélectionnés en entreprise
sont insuffisamment « consistants »
Les dimensions de la diversité les plus mobilisées en entreprise sont le sexe, l’âge, le handicap et la nationalité. Ces
indicateurs, perçus comme objectifs, sont pourtant loin
d’être univoques.
Une des caractéristiques de la diversité qui est le plus au
centre des politiques de gestion de la diversité est le sexe. A
priori, mesurer cette dimension est simple : le sexe, caractéristique généralement présente dans les bases de données
sur le personnel, est proposé comme variable indépendante.
En France, plusieurs données sexuées se trouvent dans le
bilan social (35 indicateurs obligatoires) (Dantziger, 1983)
et dans le rapport de situation comparée avec des données
sexuées sur les rémunérations, les évolutions de carrière,
le degré de mixité des emplois, les dispositifs d’articulation vie privée / vie professionnelle, les conditions de travail (Blavier & Joyeux, 2008). Si les données sont sexuées
(hommes et femmes), pour justifier les politiques de gestion
de la diversité, on utilise souvent uniquement les données
sur les femmes. On se centre, par exemple, sur l’utilisation que font les femmes des différentes formes de congé
et d’aménagement d’horaire, sans s’interroger sur la façon
dont les hommes utilisent ces dispositifs (Tremblay, 2005).
Même si on utilise le terme « genre », on travaille bien plus
sur des données sexuées que sur des constructions sociales
du féminin et du masculin (stéréotypes sexués et impact des
rôles sociaux attribués à l’un et l’autre sexe).
L’âge apparait aussi, à priori, comme une variable assez
simple, puisque disponible dans la plupart des bases de
données internes. Les politiques sont souvent formulées
à partir de deux catégories d’âge distinctes : les moins de
35 ans (les jeunes) et les plus de 50 ans (les seniors). Ce
découpage est largement arbitraire et variable. La catégorie
« jeunes », pour certains, englobe uniquement les moins de
25 ans, d’autres parlent de 30 ou 35 ans (Montelh, 2000).
Marbot montre aussi, à partir d’une analyse des accords pris
dans les entreprises françaises, l’inconsistance de la catégorie des seniors, avec des limites d’âge très variables, y
compris sur les différents accords d’une même entreprise
(Marbot, 2011). Certains préfèrent parler de générations,
89
qui se superposent plus ou moins aux différents groupes
d’âge. Cela correspondrait à trois groupes : la génération
“Y” (nés après 1978), la génération “X” (nés entre 1962 et
1978), les “Baby-Boomers” (nés entre 1945-1947 et 1962).
Les générations sont censées regrouper les individus qui
sont nés dans une même période et qui partagent des événements sociaux et historiques (Méda & Vendramin, 2010).
Les valeurs des trois générations considérées seraient différentes en regard de l’importance donnée au travail, à la
vie privée, aux loisirs, à la vie familiale, à la vie sociale,
à l’implication politique, à l’égalité hommes-femmes, etc.
(Godard, 1992; Guerin & Fournier, 2004; Twenge, 2010;
Twenge, Campbell, Hoffman, & Lance, 2010). Les années à
prendre en compte pour positionner une personne dans une
génération sont loin de faire l’unanimité. Selon les auteurs,
les catégories varient de plus ou moins 5 ans (Twenge et
al., 2010). Par ailleurs, plusieurs auteurs remettent en cause
l’idée de valeurs communes à certaines générations qui
les différencieraient des autres générations (Pichault &
Pleyers, 2010).
Pour les personnes handicapées, la question des indicateurs à utiliser constitue aussi un défi. A priori, tout le
monde s’accorde sur le fait qu’est considéré comme un
handicap toute déficience durable ou récurrente de la capacité physique, mentale ou sensorielle d’un individu. Les
indicateurs retenus dépendent des contextes nationaux et
des législations, voire d’un secteur à l’autre (ex : certains
assimilations possibles dans le secteur public mais pas dans
l’entreprise privée) (Bodin, 2003). De plus, dans les bases
de données du personnel, on peut identifier les personnes
qui ont une reconnaissance publique comme « personne
handicapée » et qui l’ont signalé à l’entreprise, mais cela
ne recouvre souvent qu’une petite partie des salariés ayant
un handicap (Biname & Mercier, 2004a; Bodin, 2003). En
effet, certaines personnes avec un handicap ne souhaitent
pas que leur handicap soit connu de l’entreprise, par peur
d’être stigmatisées ou de perdre leur emploi. Certains ont
des handicaps sans que cela soit nécessairement perçu et
identifié comme tel, autant par les personnes elles-mêmes
que par leur entourage (Goffman, 1963). Certaines entreprises vont encourager l’auto-identification des personnes
comme personnes handicapées, qu’elles soient ou non
reconnues comme telles par l’Etat, le plus souvent dans un
souci de comptage (Le Clainche & Demuijnck, 2006).
Le dernier critère le plus mobilisé dans les politiques de
gestion de la diversité est l’origine. Les bases de données
permettent de fournir des informations sur les différentes
nationalités représentées dans l’organisation, et cette donnée est fréquemment utilisée dans les rapports des entreprises pour montrer la diversité culturelle. La nationalité
n’est pourtant qu’un indicateur assez limité pour poser la
question de la diversité des origines. En effet, les politiques
de gestion de la diversité ciblent les personnes d’autres
nationalités mais aussi celles et ceux qui ont la nationalité
du pays, mais qui ont des origines qui les placent dans un
groupe potentiellement discriminé en raison de leur origine,
90
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
de leur culture, de leur patronyme, de leur couleur de peau,
de leur apparence physique (Chrobo-Mason, Konrad, &
Linneham, 2006; Vertommen, Martens, & Ouali, 2006).
La difficulté vient de la complexité et de l’hétérogénéité
de cette catégorie, des nombreuses façons de la nommer,
mais aussi, du contexte légal et social qui permet ou non
la mesure de l’origine (Haut conseil de l’intégration,
2007; Klarsfeld, 2010; Raoult, 2009; Sabeg & Charlotin,
2006; Schnapper, 2006; Simon & Clement, 2006; Zannad
& Stone, 2009). Certains pays utilisent l’auto-déclaration
dans laquelle les personnes s’associent, de manière volontaire, y compris dans les bases de données sur le personnel,
à un groupe de référence (pour les USA : Indiens -Native
American-, Asiatiques - Pacifique, Noir -Black and African
American-, Blancs, Hispaniques -Hispanic and Latino). Ce
découpage fait l’objet de nombreux débats avec notamment
l’opportunité d’introduire de nouvelles catégories, mais
aussi le positionnement des personnes qui ont plusieurs
appartenances (métis – « interracial group ») (Chloé, 2010).
Cette auto-déclaration n’existe ni en Belgique ni en France
(Centre pour l’égalité des chances et de lutte contre le
racisme, 2005; Eggerickx, Perron, & Thomsin, 2007; Haut
conseil de l’intégration, 2007; Simon, 2005). La CNIL
estime notamment que tout classement dans des catégories « ethno-raciales » est non pertinent. Elle recommande5
donc aux employeurs de ne pas recueillir de données sur
l’origine. Une autre option, réalisée dans certaines entreprises, est un comptage sur les patronymes. Cette méthode est
loin de rencontrer une forte adhésion. Le Haut Conseil de
l’intégration qualifie cette méthode d’aléatoire, lacunaire,
illégitime, discriminatoire ou inadaptée (Haut conseil de
l’intégration, 2007). Derrière cette question du choix des
indicateurs se pose aussi la question de la pertinence des
catégories choisies en regard des questions d’appartenance
et d’identité (Nkomo, 1995; Simon & Clement, 2006).
Nous ne pouvons donc que constater que trop souvent
les indicateurs choisis pour construire et évaluer les politiques sont inaptes à capturer la finesse des informations
utiles.
Les responsables diversité optent pour des catégories
de la diversité préétablies dans une logique « pick and
choose »
La construction de politiques de gestion de la diversité
autour de certains groupes-cibles est loin d’être neutre. Tatli
et Özbilgin (Tatli & Özbilgin, 2012) dénoncent l’approche
dite « etic » qui investit des catégories de la diversité préétablies (sexe, âge, origine, handicap, orientation sexuelle). Ces
travaux qui s’inspirent des « critical management studies »
soulignent les risques d’enfermement des groupes-cibles
de la diversité dans des catégories rigides qui sont avant
tout le reflet de constructions sociales (Zanoni & Janssens,
5. CNIL, recommandation du 5/5/2005
2004) et font l’impasse sur les questions d’appartenance et
d’identité (Nkomo, 1995; Simon & Clement, 2006).
On voit que les diagnostics et les actions en matière de
diversité se placent dans des « chemins » préexistants (genre,
handicap, âge, etc.), avec une hiérarchie des priorités qui a
souvent pour effets de traiter en premier ce qui paraît le plus
palpable et mesurable (les inégalités hommes-femmes, le
handicap, l’âge). La question des origines ethno-raciales est
ainsi laissée de côté (Bereni, 2011), faute de pouvoir être
appréhendée de manière satisfaisante. D’autres dimensions
de la diversité, générant des discriminations bien réelles sur
les lieux de travail, sont passées sous silence, alors qu’elles apparaissent dans le cadre légal (Schnapper, 2006). Les
entreprises favoriseraient les catégories de la diversité qui
servent leurs intérêts, opérant ce que Doytcheva nomme
une « stratégie du coin » (Doytcheva, 2009).
Les entreprises se focalisent davantage
sur la diversité en soi que sur les dispositifs
de management qui devraient l’accompagner
Les indicateurs retenus pour mesurer les progrès effectués
en matière de diversité se focalisent souvent sur la collecte
d’indicateurs des bénéficiaires de certains processus de
ressources humaines, indicateurs souvent collectés pour le
bilan social. Ainsi, Blavier et Joyeux constatent que 93 %
des entreprises interrogées utilisent des indicateurs pour le
recrutement, 78 % pour la rémunération, 63 % pour la formation et 59 % pour l’évolution professionnelle (Blavier
& Joyeux, 2008). Seules 22 % d’entre elles utilisent des
indicateurs de climat social, ce que confirme notre propre
étude de terrain : peu d’entreprises mesure les perceptions
des salariés. Pourtant les études empiriques montrent que la
diversité des salariés soulève des difficultés en matière de
confiance, d’ambiance et de communication : « Plus que de
favoriser à tout prix la diversité en entreprise, il s’agit surtout de trouver les solutions managériales adaptées pour
la piloter » (p. 141) (Robert-Demontrond & Joyeau, 2009).
Le pilotage managérial a ici toute son importance, pourtant
peu d’évaluations internes lui sont consacrées.
La performance générée par la diversité relève
davantage du mythe que de la science
Le lien entre performance et politiques de gestion de
la diversité relève autant du mythe que de la réalité. Ici,
science et foi divergent assez fortement. En effet, si les articles et supports managériaux mettent en avant les avantages
humains, sociaux, commerciaux et financiers des politiques
de gestion de la diversité, plusieurs articles académiques
fondés sur des études empiriques montrent que les bénéfices attendus ne sont pas toujours là (Zannad & Stone,
Enjeux techniques, symboliques et politiques de la mesure de la diversité dans les entreprises et les organisations ?
2009). Nous ne reprendrons ici que quelques éléments des
résultats :
• L
a diversité croissante des équipes de travail peut
entraîner des conséquences négatives sur le plan affectif : turnover plus élevé, insatisfaction, faible implication, absentéisme accru (notamment dans les niveaux à
faible niveau de qualification de l’organisation), réduction de l’implication, sentiment d’injustice en regard de
certaines politiques d’actions et/ou de discriminations
positives.
• L
a diversité de compétences et de formation (en particulier dans les équipes projet et le top management)
produirait, quant à elle, des conséquences positives sur
le plan cognitif : prise de décisions pertinentes, résolution de problèmes améliorée, meilleure adaptation
stratégique de l’organisation. Les groupes hétérogènes
faciliteraient l’adaptation lorsque l’environnement est
instable mais les équipes homogènes seraient plus efficaces lorsque la compétition est intense.
• L
a diversité dans les équipes projet aurait des effets
ambigus sur l’innovation : négatifs car elle entraîne un
ralentissement dans la prise de décision mais aussi positifs, car elle génère une créativité accrue.
• L
a diversité a des impacts sur la cohésion et la performance de groupe : on constate, parfois, la création
de sous-groupes qui inhibe l’apprentissage qui aurait
être pu être tiré de la diversité d’expériences, d’idées
et d’opinions et qui inhibe la capacité à travailler ou à
tisser des réseaux en dehors de l’équipe.
• L
es pratiques d’égalité de traitement et de diversité
seraient bénéfiques dans des contextes de pénurie de
main d’oeuvre car cela élargit le bassin de recrutement, en encourageant notamment les acteurs à engager du personnel qui ne répond pas au profil-type de la
fonction.
• I l existerait une relation négative entre la diversité et
la productivité de l’entreprise, à court terme, du fait de
la compétition, mais une relation plus positive à long
terme due à l’accroissement de l’adaptabilité.
Si les résultats apparaissent comme mitigés, les managers de la diversité perçoivent, à l’inverse, beaucoup de
bénéfices à la diversité dans l’entreprise. Ils citent généralement les gains suivants : performance économique
(meilleure captation des clients, innovation, performance
boursière, rétention des talents, réponse aux demandes des
parties prenantes, amélioration des prises de décision) et
performance sociale (mobilisation des salariés, réduction
de l’absentéisme, amélioration de la santé émotionnelle).
En témoignent les verbatim suivants, issus d’entreprises de
secteurs variés :
•« La diversité, c’est la conséquence positive de la nondiscrimination ; c’est source de performance, ce qui
est étayé par des études faites aux USA. Il s’agit d’une
91
conviction qui vient des tripes chez les jeunes mais
plus raisonnable chez les cinquantenaires. On pense,
au départ, que c’est contre-productif mais on se rend
compte par la suite de ce que cela apporte. »
•« Plus on ressemble à nos clients, plus on est diversifié et plus on sera performant. A mon avis, on fera
les offres justes au bon moment. Je pourrai prendre
l’exemple de la télécommande, qui a été inventée pour
des personnes au niveau handicap moteur (…). Plus on
va chercher les talents partout et plus on a de chances
d’être pertinent dans notre marché. Et donc, business et
développement durable là, font un super bon ménage,
en tous les cas dans notre secteur d’activité. »
•« La diversité constitue un sujet essentiel pour nous
depuis 2000. D’abord, les personnes discriminées ont
des ambitions plus fortes, liées à une volonté de revanche; ensuite, les équipes diverses sont plus créatives :
nos grandes histoires d’inventions viennent d’équipes
diverses ; le gène-code de la créativité est fait par des
gens non clonés, pas par des bien-pensants (…). La
beauté et la diversité vont de pair ; les Pharaons s’ornaient et se maquillaient déjà. Nous sommes le leader
mondial de la beauté, il doit investir dans la diversité. »
Les managers de la diversité sont demandeurs d’indicateurs qui peuvent valider leur impression du lien entre
performance et diversité mais cela relève aussi beaucoup
de l’acte de foi, avec des convictions profondes qui donnent sens à leur mandat. Ceci rejoint bien l’affirmation de
Lebas selon laquelle la performance n’existe pas de façon
intrinsèque mais est « définie par les utilisateurs de l’information par rapport au contexte décisionnel caractérisé
par un domaine et un horizon de temps » (Lebas, 1995 )
(p. 68). L’évaluation est aussi une opération politique qui
« privilégie toujours le point de vue de certains acteurs ».
(Le Maître, 1998 ) (p. 820).
L’efficience de la mesure de la discrimination
et/ou de la diversité
Toutes les difficultés, limites et critiques qui viennent
d’être développées (respect des règles de l’art en matière
de tableaux de bord, modélisation sélective de la réalité
de la diversité et inconsistance de certains indicateurs) ne
doivent pas nous empêcher de mener une réflexion d’ordre
conceptuelle et, surtout, méthodologique visant à défendre
une logique transversale de la mesure de la discrimination/
diversité et à accroître la pertinence des indicateurs les plus
fréquemment utilisés. Nous n’allons pas pouvoir identifier
toutes les dimensions du débat dans cet article mais nous
allons tenter d’en pointer les éléments qui nous paraissent
essentiels à introduire dans le cadre des politiques de gestion de la diversité.
92
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
Repenser les indicateurs des différentes dimensions
de la diversité
Nous avons vu que les indicateurs les plus fréquemment
utilisés sont le sexe, l’âge, le handicap déclaré et connu
par l’entreprise et, enfin, la nationalité. Ces indicateurs ont
leurs limites telles que décrites dans la première partie.
Nous proposons donc ici d’élargir la manière d’appréhender ces indicateurs souvent trop réducteurs.
Penchons nous d’abord sur les indicateurs sexués. Il
apparaît intéressant de sortir de données comparatives hommes / femmes ou de données uniquement sur les femmes,
pour s’intéresser aux constructions sociales du genre. Ces
constructions sociales sont un élément explicatif important
des situations d’inégalités entre les hommes et les femmes
(Campoy, Maclouf, Mazouli, & Neveu, 2008; Gavray, 2008;
Kergoat, 2005; Laufer, 2007, 2008). Il s’agit de dépasser la
différence biologique entre les hommes et les femmes, pour
inclure, dans le diagnostic et l’évaluation, l’impact des stéréotypes sexués et des rôles sociaux et professionnels associés à l’un et l’autre sexe. Ceci peut, par exemple, être très
éclairant pour comprendre les mécanismes qui amènent à
la sous-représentation des femmes dans certains métiers et
fonctions (Gavray, 2008; Laufer & Pochic, 2004; Maruani,
2006) mais aussi dans l’usage que font faire les hommes et
les femmes des différentes formes de flexibilité, proposées
par l’entreprise et la société (Tremblay, 2005, 2008).
Sur la question de l’âge, plusieurs entreprises commencent à introduire une catégorie d’âge intermédiaire, appelée les « médiors », soit les 30/35-45/49 ans. L’idée est que
l’allongement des carrières repositionne l’attention portée à
cette génération intermédiaire. On y rencontre des hommes
et des femmes avec des projets de reconversion professionnelle, qui passent parfois par des changements de statuts
(de salarié à indépendant et inversement). Cette période
se traduit, pour plusieurs salariés, par des recompositions
familiales. C’est pourquoi certains défendent l’idée qu’une
politique de gestion de la diversité ne doit pas se penser
autour des âges, ni des générations mais autour des cycles
de vie (Tremblay, 2005), notamment ceux liés à la vie
familiale, ce qui en regard des recompositions familiales
et de l’évolution des formes familiales est certes intéressant, mais aussi très complexe à appréhender. Cela amène
à repenser, par exemple, les problématiques de transfert de
compétences intergénérationnelles et de tutorat (Masingue,
2009). Un croisement âge et genre peut aussi s’avérer très
intéressant en regard des trajectoires différenciées des hommes et des femmes dans les différentes générations.
Sur la dimension des origines, on doit s’interroger sur
les possibilités de construire une variable « origine » qui ait
du sens et qui, pour la Belgique et la France, dépasse par
conséquent, le critère de nationalité. L’INED a ainsi conduit
une enquête expérimentale « Mesure de la diversité » qui
teste différentes méthodes de déclaration des origines nationales ou ethniques (Simon & Clement, 2006). Le pays de
naissance et nationalité du répondant, de ses parents et
grands-parents sont perçus comme la mesure la plus objective, que Simon et Clément (2006, p. 66) opposent à une
mesure « subjective » qui serait notamment l’auto-classification dans des catégories ethniques, qui renvoie plus à la
notion d’identité (sentiment d’appartenance) et à la façon
dont un individu se définit (Silberman, 2006). Si des possibilités s’offrent aux entreprises à des fins de comptage
(enquête interne et anonyme), il n’en reste pas moins que
c’est une opération qui nécessite, dans de nombreux pays,
de prendre de nombreuses précautions et d’avoir les autorisations des organismes de protection de la vie privée. Les
contextes légaux nationaux sont très différents et ceci pose
de nombreux défis aux gestionnaires de la diversité invités
à produire des données statistiques sur l’origine qui permettraient des comparaisons transnationales.
La mesure du handicap devrait elle aussi être source de
débat au sein de l’entreprise, pour produire des données qui
ont du sens et qui permettent de construire des politiques
d’insertion et de réinsertion socio-professionnelle correspondant aux réalités des personnes handicapées dans le
contexte local et national.
De plus, les nombreuses études transnationales montrent que les groupes-cibles sont loin d’être universels.
D’autres dimensions sont prises en compte en regard des
contextes organisationnels et nationaux tels que l’appartenance linguistique, le lieu de vie, la religion, le niveau de
qualification, la catégorie socio-professionnelle (Klarsfeld,
2010). Ceci montre à quel point, la gestion de la diversité,
comme toute politique de GRH, ne peut être analysée et
comprise en dehors d’une mise en contexte qui va donner
sens aux pratiques et aux outils de gestion (Davel, Dupuis,
& Chanlat, 2008). Tatli et Özbilgin vont plus loin en proposant une approche qu’ils appellent « emic » qui structurerait
les politiques de gestion de la diversité autour de catégories
émergentes, spécifiques à chaque contexte géographique et
temporel (Tatli & Özbilgin, 2012). Ces facteurs de discrimination sont souvent contextuels, liés à l’histoire interne
de l’organisation ou de l’entreprise (comme parfois après
des processus de fusion) et à des facteurs externes d’intégration ou de stigmatisation de groupes dans une société.
Créer une réelle valeur ajoutée
autour de la diversité, en allant au-delà du discours
Les politiques de gestion de la diversité restent parfois au
niveau de la rhétorique. La performance peut être sémantique avec une politique Diversité non substantielle, qui
devient uniquement une opération de communication,
visant à travailler sur son image externe, dans un souci
d’isomorphisme contextuel (Dimaggio & Powell, 1983).
Bereni et Janait parlent de registre lexical du libéralisme,
avec des notions comme l’harmonie, la tolérance et la pluralité (Bereni & Jaunait, 2009). Le « business case » de
la diversité (Cornet & Warland, 2008) qui suscite l’intérêt des chefs d’entreprise et de la ligne hiérarchique reste
Enjeux techniques, symboliques et politiques de la mesure de la diversité dans les entreprises et les organisations ?
largement à construire. Le propos est de fait perçu comme
plus mobilisateur que la seule contrainte légale ou les discours de lutte contre les inégalités sociales (Bereni, 2009)
mais dans les faits, il y a encore peu d’articulation réelle
entre les politiques de gestion de la diversité et leurs effets
sur le business (meilleure satisfaction de la clientèle, plus
d’efficience découlant d’une meilleure utilisation des ressources, plus d’innovation et de créativité). Il y aurait un
réel travail de collecte de données sur le terrain à réaliser
pour valider et illustrer cette valeur ajoutée à partir de données empiriques solides.
Débusquer les discriminations directes et indirectes
Le « business case » de la diversité ne doit pas faire oublier
l’importance du contexte juridique et de la lutte contre les
discriminations. Les études sur les discriminations se centrent très souvent sur les processus de recrutement et de
sélection. Pourtant, il y a un intérêt à étudier l’ensemble des
politiques de gestion des ressources humaines. Ainsi, une
analyse des salaires et des rémunérations peut faire émerger
des inégalités salariales liées au sexe (Lemiere & Silvera,
2008) ou des écarts liés à l’origine (Meulders, Plasman, &
Rycx, 2004). Des études récentes pointent, enfin, les discriminations liées à la santé et la sécurité au travail (Brown,
1996; Chappert et al., 2009). Le label diversité français
montre l’intérêt d’aller au-delà de l’audit de conformité
avec les contraintes légales (ex : respect de la loi dans les
offres d’emploi) en faisant émerger l’identification de discriminations à partir d’entretiens individuels ou de groupes
avec des personnes ressources qui peuvent être des témoins
d’actes de discrimination. Plusieurs parties prenantes sont
identifiées comme les délégués syndicaux mais aussi les
personnes désignées comme personne-ressource pour le
harcèlement, les mentors et les coachs, les professionnels
des ressources humaines, les médecins du travail, les chefs
d’équipe (Chrobo-Mason et al., 2006; Falcoz, 2007; Rank,
2009). Ceci peut aussi permettre d’identifier différents stéréotypes et préjugés à l’égard des groupes-cibles (ChroboMason et al., 2006; Fiske & Tiane, 2008). Notons aussi
l’analyse de contenu de documents internes à l’entreprise
pour identifier les stéréotypes, porteur de discriminations,
véhiculés dans les supports (texte et images) et la visibilité
donnée aux membres du personnel diversifié. On peut aussi
s’intéresser au degré de satisfaction à l’égard des politiques
de GRH des personnes appartenant aux groupes-cibles au
travers des enquêtes de satisfaction au travail et de climat
social (Kossek, Lobel, & Brown, 2006). On retrouve dans
le même ordre d’idée les enquêtes élaborées pour mesurer
le sentiment de justice et d’équité en regard des pratiques
de gestion dans les entreprises et les organisations (ChroboMason et al., 2006; Cloutier, 2008).
93
Défendre une logique transversale des dimensions
de la diversité
Nombreux sont les chercheurs qui plaident pour une logique
intersectionnelle de la diversité, c’est-à-dire la nécessité de
prendre en compte la situation des personnes qui combinent
plusieurs caractéristiques (Browne & Misra, 2003; Cornet,
2010; Makonen, 2002; Tatli & Özbilgin, 2012; Verloo,
2006). L’enjeu est de montrer comment se combinent les
multiples systèmes de domination qui reproduisent les inégalités sociales. En sciences sociales, il existe de nombreux
écrits qui questionnent cette approche des publics discriminés en catégorie perçue comme indépendante et homogène (Rummens, 2003; Shiels, 2003; Wilkinson, 2003),
ce questionnement étant encore peu relayé dans les écrits
théoriques et managériaux sur la gestion de la diversité.
Le concept d’intersectionnalité veut dénoncer une approche analytique de chaque dimension de la diversité prise
isolément, qui débouche sur une approche additionnelle
des groupes-cibles, que l’on pourrait aussi appeler approche par « juxtaposition », avec, par exemple, des politiques
pour les femmes ou pour les personnes d’origine étrangère.
L’argument est que ces groupes ne sont pas homogènes
mais traversés par de multiples rapports sociaux. La combinaison de plusieurs dimensions et caractéristiques influencent la construction des identités individuelles (Holgate,
Hebson, & McBride, 2003; Wilkinson, 2003) mais aussi
les représentations qui façonnent les processus organisationnels et les interactions sur le marché de l’emploi. Il
s’agit donc de s’intéresser aux combinaisons des différentes
caractéristiques pour mieux comprendre les identités individuelles mais aussi les situations d’inégalités les processus
discriminatoires dans l’emploi et les effets des politiques et
pratiques de gestion de la diversité. Cette approche plaide
pour une approche multidimensionnelle pour mieux comprendre les phénomènes de domination, de hiérarchisation
et d’exclusion que l’on peut observer sur le marché de l’emploi et la manière dont se combinent les différentes caractéristiques pour renforcer ou, au contraire, atténuer des
situations d’inégalités. Il s’agit de comprendre comment
les différentes caractéristiques interagissent et s’influencent
mutuellement et d’identifier les processus organisationnels
à travers lesquels sont construits les privilèges et positions
des individus dans un groupe et/ou une entreprise (Tatli &
Özbilgin, 2012).
Mettre en place des dispositifs de management qui
permettent de potentialiser le lien diversité et
performance
S’interroger sur les facteurs permettant de favoriser une
corrélation positive entre diversité et performance, c’est
s’interroger sur les variables qui jouent un rôle médiateur
entre la diversité et la performance, c’est-à-dire qui potentialisent ou, au contraire, pénalisent cette dernière. Ces facteurs relèvent de caractéristiques individuelles mais aussi
de l’organisation, des styles de management et du contexte
94
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
externe. Connaître ces facteurs permet aux managers de la
diversité d’être conscients des variables sur lesquelles ils
n’ont pas de contrôle et, à l’inverse, d’identifier les facteurs
sur lesquels ils « ont la main ». Parmi les facteurs organisationnels, on trouve la nature des tâches à effectuer et la
division du travail, les politiques de gestion des ressources
humaines et la culture d’entreprise. Parmi les facteurs de
contexte externe, on recense notamment le degré de stabilité du marché, les composantes du marché du travail, les
spécificités liées au secteur d’activité, le poids des différentes parties prenantes. Il y a aussi des facteurs processuels
comme l’horizon temporel des projets, le style de management de management, les rapports de pouvoir entre les
différents acteurs internes et externes.
Conclusion
Le diagnostic et la construction d’indicateurs permettant
d’initier et d’évaluer des politiques de gestion de la diversité constituent des étapes difficiles mais cruciales. Etablir
un diagnostic précis est loin d’être simple en regard des
données statistiques disponibles, du choix des indicateurs,
des limites des analyses quantitatives et qualitatives et de
la multitude des méthodes qui peuvent être mobilisées. Les
questions et hypothèses qui structurent l’action sont souvent déterminantes. L’approche quantitative de la diversité
permet en quelque sorte d’objectiver la représentativité
de certains publics cibles dans l’organisation, pour autant
que la question posée soit bien celle de la représentativité !
Commenter les chiffres facilite la compréhension et l’appréhension d’une réalité mais ces données ne prennent sens
qu’en regard des contextes organisationnels, culturels et
nationaux et des préoccupations des parties prenantes en
présence. Si les indicateurs décrivent une certaine réalité,
ils la construisent tout autant, en donnant des contours précis à cette notion de diversité, en faisant émerger des catégories à la conscience des individus, en plaçant l’accent sur
tel ou tel groupe défini comme minoritaire, « à problème »
ou « à risque ». Dit autrement, ils correspondent non pas à
une photographie fidèle de la réalité, mais à des constructions sociales et à des choix en partie arbitraires.
Nous soulignons l’importance de combiner des approches qualitatives et quantitatives, de ne pas se limiter à des
données globales mais de leur donner du sens, en regard des
contextes internes (culture organisationnelle, modes d’organisation du travail et politiques de GRH, secteur d’activité)
et externes (contexte socio-culturel, légal, économique)
mais aussi des objectifs recherchés. L’enjeu du diagnostic est de susciter l’adhésion des acteurs sur la nécessité et
les raisons d’agir. Il s’agit de reconnaître qu’il peut exister
des problèmes, des discriminations directes et indirectes
et qu’il y a lieu de s’y attaquer mais aussi que la diversité
peut constituer une source de richesse et de profit pour l’organisation (ouverture à de nouvelles compétences, plus de
créativité et d’innovation, etc.). Les difficultés rencontrées
en matière de mesure de la diversité sont d’ordre différent
selon la maturité qu’a l’entreprise sur le sujet, selon le secteur ou le degré d’engagement de la sphère dirigeante.
Reste à réfléchir sur l’usage qui va être fait de ces indicateurs de diagnostic : ces données sont-elles réservées au
responsable diversité et gestion des ressources humaines,
mobilisées dans des plans stratégiques, diffusées à l’intérieur de l’organisation pour susciter la prise de conscience
et/ou l’adhésion à des politiques de gestion de la diversité.
Visent-elles à progresser en matière de discrimination/
diversité ou à donner une image positive de l’organisation à
ses parties prenantes internes et externes ?
Des pistes de recherche émergent. Il serait intéressant
d’avoir des études complémentaires sur la manière dont
les gestionnaires diversité construisent et s’approprient les
indicateurs. Des comparaisons internationales sont nécessaires pour identifier ceux qui sont transversaux et ceux
qui restent spécifiques en regard des contextes socio-culturels et légaux de chacun des pays. Des recherches sont à
développer autour de la manière d’appréhender les questions d’intersectionnalité. La construction d’indicateurs qui
permettent réellement de mesurer les progrès réalisés reste
aussi un enjeu central pour la recherche.
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97
La mise en œuvre d’une démarche diversité
en PME – Quelques enseignements
d’un centre d’appel spécialisé
Christine NaschbergerSana Guerfel-Henda
Audencia PRES LUNAM
France Business School campus Amiens
Résumé
Dans cette publication nous souhaitons
aborder la question de la diversité sous
l’angle d’une petite et moyenne entreprise (PME). Il est souvent évoqué que les
démarches diversité dans des PME sont
différentes de celles des grandes entreprises. L’objectif de cet article est tout
d’abord de montrer que les PME s’engagent également et que leurs approches
ne sont pas aussi éloignées de celles des
grands groupes. D’un point de vue théorique, nous souhaitons démontrer à travers
une étude empirique, que l’intégration de
la diversité peut emmener les entreprises
de petite et moyenne taille d’une approche traditionnelle en ressources humaines
(RH) vers une approche renouvelée dite
stratégique.
Abstract
In this publication the authors would like
to address the issue of diversity management in a small and medium-sized enterprise (SME). It is often stated the diversity
initiatives of SMEs are different from large
companies. The aim of this publication is
first to show that SME are also implementing diversity initiatives and second that
these approaches are not so different from
those of larger organizations. From a theoretical viewpoint, the authors want to demonstrate with the help of an empirical study
conducted in an SME with 284 employees
that the implementation of diversity management can bring new perspectives to
way human resources are managed : transforming a more traditional approach into a
more strategic approach.
Mots clés : gestion de la diversité, petite et
moyenne entreprise (PME), responsabilité
sociale de l’entreprise (RSE)
Keywords: Diversity Management, Small
and Medium-Sized Enterprises (SMEs);
Corporate Social Responsibility (CSR)
Introduction : de la gestion des RH en PME …
L
a gestion des ressources humaines (GRH) permet de
constituer et de développer un potentiel humain; c’està-dire un capital capable de produire, de s’enrichir et de
s’adapter aux changements auxquels l’entreprise est soumise (Mahé de Boislandelle, 1998). L’objectif est de mobiliser les talents pour « résoudre les problèmes, exploiter les
opportunités, parer les menaces externes pour parvenir à
une rentabilité adéquate » (Candau, 1983).
Dans ce sens, l’objectif de la GRH est d’attirer les
meilleurs candidats qualifiés afin d’adapter l’offre de travail au profit des salariés et de les fidéliser tout en tenant
compte de leurs attentes et de leurs besoins. Le fait de disposer d’une main-d’œuvre diversifiée comporte plusieurs
avantages pour les entreprises comme par exemple avoir
une image positive auprès des clients ce qui amène des
retombées positives pour leurs affaires (Shoobridge, 2006).
Certains auteurs évoquent la gestion de la diversité
et plus particulièrement « le business case » – comme un
concept qui permet d’accroître la performance économique
de l’entreprise (Bender, 2004, Garner-Moyer, 2006, Laufer,
2005). Selon Cornet et Warland (2008), le « business case »
Resumen
En esta publicación queremos abordar
el tema de la diversidad enfocado a las
pequeñas y medianas empresas (PYME). A
menudo se habla de que las iniciativas de
diversidad en las PYME son diferentes a las
de las grandes empresas. El objetivo de este
trabajo es en primer lugar, mostrar que las
pymes también están comprometidas y que
sus planteamientos no son tan diferentes de
los grupos más grandes. Desde un punto de
vista teórico, queremos demostrar a través
de un estudio empírico, que la integración
de la diversidad puede llevar a las empresas
pequeñas y medianas, de un enfoque tradicional de los recursos humanos (HR) a uno
renovado, estratégico.
Palabras claves: gestión de la diversidad,
las pequeñas y medianas empresas
(PYME), la responsabilidad social empresarial (RSE)
du management de la diversité repose sur l’idée qu’un personnel diversifié améliore la performance globale de l’entreprise et répond à un équilibre fragile entre des logiques
d’action sociales et économiques.
La plupart des petites et moyennes entreprises (PME),
souvent éloignées de ces préoccupations ressources
humaines (RH), sont souvent sceptiques quant aux performances attendues. Selon l’INSEE, 93,1 % des entreprises
françaises comptent moins de 10 salariés. Les petites et
moyennes entreprises (PME) représentent 2/3 des emplois
en France (OSEO, 2007). Les PME emploient environ 10
millions de personnes et 55 % des personnes actives du
secteur privé travaillent dans les PME (OSEO, 2007). Ces
statistiques montrent l’importance des PME dans le tissu
économique.
Selon Julien (2005), la PME n’est plus perçue comme
la « miniature » de la grande entreprise et présente des
caractéristiques qui lui sont propres. Dans ce sens la PME
ne sera plus considérée comme une « grande entreprise
miniature » mais comme une unité à part entière (Gueguen,
Peyroux et Torres, 2007). « La diversité permet dans ce cas
une assurance de compétitivité pour les PME en trouvant
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements d’un centre d’appel spécialisé
toute sa légitimité avec un besoin de proximité avec des
clients diversifiés » selon Peretti (2006). Certains chefs
d’entreprises de PME mettent l’accent sur l’effet de la taille
ce qui implique pour eux un manque de moyens par rapport
aux grands groupes.
D’après Parlier (2006a et b) une PME est une structure :
•
r egroupant au moins 10 personnes jusqu’à un maximum de 250, selon le Journal des communautés européennes ((3 avril 2006), ou de 500, selon l’INSEE;
•
indépendante juridiquement, ce qui permet de la différencier de la petite et moyenne organisation (PMO);
Nous avons retenu comme PME dans le cadre de la présente recherche, les entreprises employant moins de cinq
cents personnes, donc les PME de petite et moyenne taille.
Comme l’indique Bachelard (2003), la plupart des chercheurs (dont Ducheneaut, 1996) travaillant sur cet objet utilisent également ce critère quantitatif, notamment l’effectif.
Les RH jouent un rôle central dans le développement de
l’entreprise (Louart et Villette, 2010), même si elles n’occupent pas dans l’esprit des dirigeants une place prépondérante (Mahé de Boislandelle, 1998). Pris par la gestion
quotidienne, les patrons des PME n’accordent pas suffisamment d’attention à la gestion de leur personnel. Leurs
objectifs sont la performance de l’entreprise et sa pérennité.
D’après Amboise et Garand (1995), la fonction RH
dans les PME connaît plusieurs types de difficultés :
– f aible formalisation des politiques, procédures et pratiques de GRH,
– limites des ressources financières, matérielles et
humaines,
– m
anque global d’expertise dans les méthodes et techniques de GRH,
– f orte centralisation autour du propriétaire-dirigeant et
difficultés de délégation,
– a ttitudes négatives et résistances aux changements de la
part du personnel et du dirigeant,
– inadéquation des démarches socio-économiques et
politiques.
Mahé de Boislandelle (1998) souligne les déterminants
d’un système de gestion des ressources humaines qui se
basent sur les caractéristiques de l’environnement de l’entreprise, les caractéristiques personnelles du dirigeant et
les caractéristiques organisationnelles. Selon cet auteur, la
vision du dirigeant dans les PME est importante pour définir
le système qui va conduire à « la nature des pratiques et le
degré d’ouverture aux méthodologies novatrices en matière
de gestion des ressources humaines ». Généralement les
pratiques de gestion des ressources humaines en PME se
limitent souvent à l’administration du personnel (Julien et
Marchesnay, 1988, Mahé de Boislandelle, 1998, Bernon et
99
al. 2006). Selon Guérin et Wils (1992, 2003), il existe plusieurs modèles en RH. Si les politiques RH se concentrent
uniquement sur la gestion administrative, on parle d’un
modèle traditionnel. Ce modèle peut évoluer d’un modèle
opérationnel vers un modèle renouvelé. Ce dernier est surtout caractérisé par l’aspect stratégique des activités RH. En
PME, les politiques de gestion des ressources humaines, si
elles existent, sont peu développées et très peu formalisées.
Le manque de temps est souvent une des raisons mises en
avant par les dirigeants (Rymeko, 2007).
L’objectif de ce papier est tout d’abord de montrer que
même les PME peuvent s’engager dans des démarches
diversité et leurs approches ne sont pas aussi éloignées de
celles des grands groupes. Nous mettons en effet l’accent
sur les actions mises en place dans le cadre d’une PME.
Ensuite, nous essayons de mieux comprendre les freins à la
gestion de la diversité dans les petites structures.
Afin de mieux comprendre le fonctionnement d’une
PME on ne peut s’affranchir de s’interroger sur son patron :
son parcours, ses motivations, ses orientations, son système de pensée, ses comportements, sa relation avec les
autres, etc. (Parlier, 2006b, Bachelard, 2003). Plusieurs travaux portent sur son influence en matière de politiques RH
(Naschberger, 2002). Nous souhaitons également savoir de
quelle manière une politique diversité peut faire évoluer les
politiques RH en passant d’un modèle traditionnel vers un
modèle intégrant une dimension stratégique.
La première partie de ce papier présente la revue de littérature et le cadre théorique sur la gestion de la diversité en
PME, la deuxième partie met l’accent sur la méthodologie
de notre étude empirique et la troisième partie sur l’analyse
du cas et des résultats.
….. à la gestion de la diversité en PME
La gestion de la diversité est généralement consacrée aux
grandes entreprises (Peretti, 2006, Sabeg et Charlotin 2006,
Barth et Falcoz, 2007) négligeant la majorité des acteurs
économiques, à savoir les PME. C’est en prenant en compte
l’ensemble de ces éléments que nous allons nous intéresser
à la gestion de la diversité et son rôle dans les PME. On peut
penser que les PME sont moins sensibles aux questions de
la diversité.
Les autorités politiques et administratives sensibilisent
et incitent les PME à être acteur de la diversité en entreprise.
L’Europe a par exemple publié un guide de la promotion de
la diversité dans les PME (Strazzeri, 2007). En France, le
Défenseur des droits qui a succédé à la HALDE (La Haute
Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité), une autorité administrative indépendante créée par la
loi du 30 décembre 2004, a principalement deux missions :
le traitement des cas de discrimination (directe ou indirecte)
et la promotion des actions de l’égalité des chances. Elle est
à l’origine de nombreux guides de bonnes pratiques tels que
100
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
« le guide de la prévention des discriminations dans l’emploi/PME » (2007) qui définit 5 étapes principales dans la
mise en place d’une politique de diversité en entreprise :
– S’engager en tant que dirigeant,
– R
esponsabiliser le management et les responsables des
ressources humaines,
– R
éaliser un état des lieux (un audit quantitatif de la
typologie des salariés, un audit qualitatif des processus
dont ceux de la gestion du personnel et un auto-testing)
(voir aussi Peretti et Saüt, 2006),
– Sensibiliser et former le personnel,
– F
aire connaître son engagement au sein de l’entreprise
et des partenaires (par la communication ou dans le
cadre d’une action commune avec d’autres entreprises).
Nous pouvons constater que ces 5 étapes sont aussi spécifiques pour les PME que pour les grands groupes.
Il existe très peu d’études sur le lien entre le phénomène
de la discrimination et la taille de l’entreprise. Les résultats
du Baromètre Adia (2006) présentent notamment la relation
entre discrimination et taille de l’entreprise. Notamment
dans les très petites entreprises (< 20 salariés), les discriminations ne sont pas dans l’ensemble les plus fortes. C’est
dans les PME de 20 à 200 salariés que le niveau de discrimination moyen est le plus élevé. La discrimination en
raison de l’origine maghrébine est très forte. Dans les plus
grandes entreprises (> 200 salariés), les discriminations en
fonction de l’âge sont très importantes (Guerfel-Henda,
Peretti, 2009). Dans l’ensemble, hormis pour l’âge, les discriminations sont nettement moindres dans les entreprises
de plus de 200 salariés.
l’entreprise. La diversité doit faire partie des valeurs du
dirigeant. Ensuite, la diversité peut être partagée en entreprise et s’insérer dans ses valeurs et sa culture. Le dirigeant
d’une PME peut se renseigner sur les outils de la gestion
de la diversité. Nous citons comme exemple la charte de la
diversité pour les PME, les labels « Diversité » et « Egalité »,
le CV anonyme, la méthode des habilités, la signature des
conventions ou des accords, etc. Il est important de choisir
un outil qui correspond au contexte et aux spécificités de
l’entreprise, c’est-à-dire de contextualiser l’outil et l’approche diversité dans une PME.
Des process RH sont touchés, notamment la formation
ou la mobilité des salariés et il ne faut pas oublier que la
diversité n’est pas seulement une affaire de recrutement.
Nous pouvons également constater que les réseaux professionnels comme le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD)
jouent un rôle important dans la sensibilisation et la formation des dirigeants des PME. À travers ce réseau, les
dirigeants peuvent mieux connaître les outils et les bonnes
pratiques développées par leurs homologues qui se sont
déjà engagées dans des actions en faveur de la diversité.
D’après le CJD, la gestion de la diversité en PME nécessiterait une démarche structurée car c’est un changement
important que les différents acteurs de l’entreprise doivent
intégrer. Pour implémenter une politique sur la diversité,
nos réflexions nous amènent sur quelques étapes clés à
respecter :
• I ntégration de la démarche dans un projet d’entreprise
avec des objectifs précis et chiffrés (la démarche générale comprend une réflexion en amont, un diagnostic de
la situation, l’élaboration et le lancement du projet, le
déploiement et l’évaluation du projet)
• Soutien du projet par une volonté forte du dirigeant
Les moteurs à la diversité dans les PME
Il existe très peu d’études sur les facteurs qui favorisent
l’intégration d’une démarche diversité en PME. De nombreuses PME ont déjà mis en place des actions pour encourager la diversité en entreprise. Les exemples suivants
montrent que ce n’est ni la taille réduite de l’entreprise,
ni les faibles moyens mis à disposition qui empêchent de
mettre en place une démarche diversité. Les PME pratiquent la diversité bien souvent sans le savoir car elles sont
proches de leur bassin d’emploi (Cocuelle, 2007). Les relations de proximité leur donnent une meilleure connaissance
de la réalité du terrain. Elles travaillent souvent étroitement
avec divers acteurs de leur territoire comme les missions
locales, les agences Pôle Emploi, les sociétés d’emploi et
de recrutement, les cabinets conseils RH, etc.
L’enjeu de la gestion de la diversité pour les PME est
double : une prise de conscience des apports de la diversité et une professionnalisation des pratiques de la diversité. La gestion de la diversité est une approche managériale
qui a ses origines dans les convictions du dirigeant de
• P
réparation de l’entreprise et ses salariés à cette
démarche
• C
ombat des idées reçues et des fausses images (actions
de sensibilisation et de formation)
• C
entrage de la sélection des candidats sur la compétence sans faire de compromis sur ce point
• Faire de la diversité un thème du dialogue social
Pour savoir si cette approche est adaptée aux spécificités des PME, nous devons le vérifier sur le terrain.
Les freins à la diversité dans les PME
Souvent dans les petites structures, le rôle du DRH est
généralement substitué par celui du PDG qui n’a pas forcément des compétences nécessaires dans ce domaine.
Selon Berger-Douce (2009) les PME sont confrontées à
des difficultés sur le plan RH en matière de compétences,
de recrutement (Deshpande et Damodar, 1994), de gestion
des absences, de turnover (Carmelle et Rousseau, 1990),
101
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements d’un centre d’appel spécialisé
de recours à la formation (Paradas, 1998), de ressources
financières dédiées, de manque d’expertise (Vilette, 2008),
d’inadéquation des démarches (D’Amboise et Garand,
1995) et d’information sur le plan juridique. En effet, le
degré de formalisation des politiques RH dans les PME est
moins élevé que dans les grands groupes.
2008). Dans le même registre, on peut citer les résistances
culturelles. D’autres obstacles sont le manque d’impulsions
et d’engagements des directions d’entreprises aggravé par
un contexte économique défavorable (Naschberger, 2008).
Nous pouvons parfois constater que dans une période de
crise, les priorités des patrons changent.
Concernant la gestion de la diversité, les PME sont également confrontées à plusieurs obstacles. Contrairement
aux grandes entreprises, les PME sont moins rapides à
communiquer sur les actions de diversité qui valorisent
l’image et la notoriété des entreprises (Cocuelle, 2007).
Elles déclarent souvent qu’elles ont des moyens insuffisants
pour mettre en place des indicateurs de gestion nécessaires
à la compréhension des effets positifs de la diversité sur le
fonctionnement de l’entreprise. La gestion de la diversité
est parfois considérée comme une pratique réservée aux
grandes entreprises qui ont le temps et les moyens de s’en
occuper.
Dans ce sens le rôle du manager RH et du manager
de proximité est primordial puisque la diversité ne peut
être bénéfique que si elle est bien gérée, et que l’attitude
et le comportement du manager va influencer la réussie ou
l’échec d’une telle démarche (Guerfel-Henda, Naschberger
2010). Selon Hellriegel et al. (2004) c’est au manager de
comprendre le comportement de ses employés. Il doit aussi
leur communiquer des informations importantes en lien
avec la stratégie de l’entreprise. Mais dans certains cas, la
gestion de la diversité est prise par la direction mais elle
n’informe ses salariés très peu ou seulement que vers la fin
de la mise en place de la démarche.
La plupart des travaux de recherche montrent que la
réflexion et les pratiques en gestion de la diversité sont plus
développées dans les grandes entreprises que dans les PME.
Ainsi les PME disposent de peu de pratiques structurées de
gestion de la diversité. On note plutôt une gestion réactive et
non pro-active, c’est-à-dire des réactions au cas par cas, sans
anticipation. En effet la démarche diversité peut être freinée
par la méconnaissance des lois et des aspects juridiques
ainsi que les enjeux de la diversité (Naschberger, 2008). La
démarche étant considérée risquée puisque les patrons ont
du mal à estimer les coûts et les bénéfices de celle-ci. Les
réticences internes au sein des PME sont un autre frein dans
la mise en œuvre d’une démarche diversité (Naschberger,
La méthodologie de notre recherche empirique
Une étude de la démarche diversité a été réalisée à l’initiative d’un groupe de travail réunissant trois acteurs
régionaux notamment des membres du CJD (Centre des
Jeunes Dirigeants) et la CFDT (Confédération Française
Démocratique du Travail), et des enseignants-chercheurs
d’une école de management. L’objectif de ce groupe est de
travailler sur l’évaluation et l’amélioration des pratiques de
management de la diversité au sein des entreprises dont le
dirigeant est un membre du CJD (Krohmer, Naschberger,
Sobczak, 2010). En 2009, au total, six entreprises se sont
FIGURE 1
Le CJD et la taille de l’entreprise
17%
11%
12%
31%
30%
35%
23%
39%
Créateurs
Repreneurs
Cadres dirigeants
39%
10%
< 10 salariés
10 à 50 salariés
51 à 100 salariés
100 à 300 salariés
> 300 salariés
30%
23%
< industrie
Commerce
Services
Autres
102
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
portées volontaires soit pour intégrer une démarche diversité soit pour faire une enquête de la diversité. L’une d’entre
elles est IMA Technologies. Notre choix porte sur cette
entreprise car elle s’est déjà engagée dans une démarche
diversité et nous souhaitions mieux comprendre les raisons
de son engagement et la manière dont la diversité est perçue
par les différents acteurs. Nous aimerions également savoir
comment la diversité pourra avoir une influence sur le développement des pratiques RH plus stratégique. Nous pensons
également que le fait que le dirigeant de cette PME fasse
partie du réseau du CJD pourrait avoir un effet positif en ce
qui concerne l’engagement de l’entreprise pour la diversité.
En 2011, 3.000 jeunes dirigeants d’entreprise sont membre
du CJD et ils sont répartis dans un réseau d’une centaine
associations locales.
Comme le montre la figure 1, 50 % des adhérents du
Encadré 1 :
L’historique et les convictions du CJD
Depuis 1938, le CJD défend l’idée qu’il faut « réhabiliter
la fonction patronale » et mettre « l’économie au service
de l’homme ». L’ambition du CJD est de promouvoir des
idées nouvelles et d’accompagner dans sa mission tout
jeune dirigeant soucieux d’améliorer sa performance
et celle de son entreprise. Dans ce cas, le CJD n’a pas
pour objectif que de défendre les intérêts d’une catégorie. Devenir membre du CJD, c’est avant tout rompre son
isolement et partager avec d’autres jeunes dirigeants des
préoccupations semblables. C’est aussi pouvoir échanger
en toute confidentialité, s’enrichir du regard des autres et
profiter de toute la richesse d’un réseau convivial. Etre au
CJD, c’est donc engager une dynamique pour améliorer sa
performance et celle de son entreprise.
Encadré 2 :
Argumentaire pour la gestion de la diversité « Osons
expérimenter la diversité dans nos entreprises »
La diversité : c’est quoi ?
Définition pour l’entreprise du management de la diversité
(IMS – Entreprendre pour la Cité) : « Gérer la Diversité
c’est réfléchir à la manière d’optimiser les potentiels multiples au sein de l’entreprise. C’est le regroupement de toutes les différences et l’acceptation de la diversité qui nous
entoure et qu’il faut apprendre à manager. Cela ne signifie
pas uniquement gérer la cohabitation des différences ».
La diversité, pourquoi ?
- Prévenir la pénurie de main d’œuvre : départs massifs en
retraite d’ici 5 ans, et difficulté de trouver de nouveaux
travailleurs,
- Attirer de nouveaux talents, garder, faire évoluer les salariés en privilégiant la compétence,
- Respecter la législation anti-discrimination, contribuer
au maintien du système social (maladie, retraites, etc.),
- Accroître la performance de l’entreprise : qualité de services, baisse de l’absentéisme, opportunités commerciales, appréhension de la mondialisation, etc.
- Diversifier la culture d’entreprise, les motivations, la
dynamique, l’ambiance, les attentes, la créativité, etc. et
ainsi favoriser l’innovation.
constituée d’entretiens avec des salariés volontaires. Ainsi,
103 questionnaires ont pu être récoltés – soit un taux de
réponse de 36 % – et 14 entretiens ont été réalisés avec des
CJD dirigent une PME de moins de 50 salariés.
Pour convaincre les entreprises de s’engager dans une
démarche diversité, le réseau professionnel propose l’argumentaire suivant (septembre 2005) :
D’après le CJD, il s’agit de convertir un fait social et
une obligation juridique dans un langage d’efficacité et
d’opportunité économique et de valoriser le principal actif
incorporel de l’entreprise : « le Capital Humain ».
La phase de l’étude s’est déroulée entre janvier et juin
2009. La première étape a eu comme objectif de cerner
les attentes du dirigeant. Pour atteindre cet objectif, la
recherche a comporté deux phases : une phase d’analyse
quantitative qui consistait à faire remplir un questionnaire
« Diagnostic Diversité » par la direction de l’entreprise et
une phase plus qualitative de rencontres et interviews de la
direction générale et la direction des ressources humaines.
La deuxième étape était elle-même composée de deux
phases, sur le même modèle : la première, quantitative, a
été l’envoi d’un questionnaire à tous les salariés (c’est-àdire aux 284 collaborateurs) et la phase qualitative a été
salariés. Tableau 1 résume la méthodologie de la recherche.
Avant de lancer la phase des entretiens, la responsable
RH de IMA Technologies a consulté le comité d’entreprise
(CE). Parallèlement, un groupe projet de sept salariés a été
constitué pour accompagner les réflexions menées sur la
diversité.
Tableau 1
La méthodologie
Phase
Personnes interrogées
Diagnostic Diversité
(Questionnaire et entretien)
Dirigeant, Fonction RH
Enquête quantitative
103 salariés (sur 284)
Enquête qualitative
14 salariés
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements d’un centre d’appel spécialisé
L’analyse du cas de la PME
et la présentation des résultats
La troisième partie de ce papier présente la société, ses pratiques de la diversité et l’analyse des résultats.
IMA Technologies est une filiale du groupe IMA
(groupe d’assurances) créée en 1999 et spécialisée dans
l’externalisation des processus métiers. IMA Technologies
appartient au Groupe Inter Mutuelles Assistance qui est le
leader européen de l’assistance aux personnes et aux biens.
Le Groupe Inter Mutuelles Assistance a traité en 2007, 14
millions d’appels et a réalisé avec 2300 collaborateurs un
chiffre d’affaires de 424 millions d’appels. Le domaine
d’expertise d’IMA est d’accompagner un client dans un
projet d’externalisation vers le développement d’un centre
téléphonique. Le centre d’expertise d’IMA est la mise en
œuvre de l’externalisation des processus métiers (Business
Process Outsourcing). C’est un centre d’appel spécialisé
dans différents domaines : centre d’assistance technique
automobile; assistance informatique et technique; information juridique et vie pratique; gestion de la relation
client, solutions télé-relationnelles pour le e-commerce.
IMA Technologies s’impose sur le marché avec un chiffre
d’affaires de 16,5 millions (en 2011), 284 collaborateurs et
quatre implantations en France. IMA Technologies est une
entreprise jeune et en pleine croissance (en 2012, l’entreprise compte 370 collaborateurs). La moyenne d’âge des
salariés est de 31 ans et le turnover s’élève à 15 %.
Concernant les métiers des plateformes d’appel, la
diversité des profils de compétences que recrute IMA
Technologies est très forte : des compétences juridiques
aux compétences purement techniques. L’activité d’IMA
Technologies induit un éventail très large de qualifications
au sein de la même structure. Ce fait induit des qualifications hétérogènes des collaborateurs : la plupart des salariés possèdent un niveau bac ou bac +2 (BTS maintenance
/ vente automobile) ou encore une petite partie bac +5 (plateforme juridique).
Selon la RRH, « IMA a mis en place une politique
RH ambitieuse et moderne » et les actions mises en place
dans le cadre de la diversité s’inscrivent dans cette logique
globale. Ces observations nous permettent de constater
qu’entre autres la diversité a contribué à faire évoluer le
modèle administratif vers le modèle renouvelé. Notamment
dans le cadre de la performance globale plusieurs actions
ont été mises en place par l’entreprise. Ces actions englobent l’environnement, le développement des compétences
et des potentiels, la convivialité et lien social, le management, la gouvernance, les conditions matérielles et des
services répondant aux enjeux sociétaux. Voici quelques
exemples : expositions de peintures, distributeurs d’eau,
atelier sophrologie, salle de pause avec téléphone/journaux/
1. « Job Academy » est un programme financé par Manpower, en
faveur des candidats qualifiés résidants en ZUS (plus d’info sur http://
www.fondationmanpower.fr/action/job-academy)
103
accès à l’internet, baby-foot ou une salle de sport avec une
proposition des conseils sportifs par un coach professionnel. Dans le cadre du développement durable un système de
co-voiturage était mis en place. Dans le cadre de la responsabilité sociale IMA s’est engagé dans une démarche diversité. Depuis plusieurs années, IMA Technologies travaille
sur l’insertion des personnes en situation de handicap et elle
a pu décrocher le prix « Trophées de l’insertion » en 2006.
IMA a mis en place plusieurs partenariats avec les acteurs
clés du réseau de l’insertion des personnes handicapées,
comme par exemple un partenariat avec un institut pour
les adultes connaissant une déficience visuelle grave. Un
autre exemple de l’engagement d’IMA représente la collaboration avec l’association Handisup pour faciliter l’insertion professionnelle des jeunes lycéens ou des étudiants.
D’autres actions concernent la promotion de « l’égalité des
chances » en participant à l’initiative « Job Academy »1 et en
travaillant avec la « Maison de l’insertion »�. IMA a parrainé
la 11e promotion de la Job Academy avec le réseau FACE
et Manpower pour l’insertion des jeunes dans le monde du
travail. D’autres partenariats concernent les filières de formation initiale aux métiers d’IMA comme des lycées professionnels ou des facultés de droit. L’égalité professionnelle
entre hommes et femmes est également une préoccupation
de la direction des ressources humaines (DRH) qui fait
attention à la promotion des femmes cadres et dans ce sens
l’entreprise veille à garantir une équité des rémunérations
entre les hommes et les femmes. Quelques mesures pour
un meilleur équilibre vie professionnelle – personnelle ont
été prises, par exemple la mise en place d’une conciergerie
pour les salariés. Selon la DRH, tous les postes vacants sont
ouverts à tous les profils et les personnes impliquées dans
le processus de recrutement étaient formées pour garantir
« l’égalité de traitement » et le principe de la non-discrimination. Ce dernier point confirme comme décrit dans
la première partie que la sensibilisation et la formation de
la fonction RH et du management de proximité sont des
étapes importantes dans la gestion de la diversité.
La diversité : perception du dirigeant et des salariés
Selon le dirigeant de notre entreprise étudiée, « la diversité
apporte au sein des équipes beaucoup de richesse et donc
de performance puisqu’elle permet de diversifier les profils
donc les approches, les idées et les compétences. » D’après
le dirigeant, la diversité a un intérêt pour toutes les parties
prenantes comme les salariés, les clients ou les fournisseurs
– ainsi pour la performance et l’image de l’entreprise. Il
nous fait part de sa vision « d’une image de l’entreprise
ouverte et non discriminante ». Nous pouvons observer que
l’entreprise intègre la notion de la diversité au plus haut
niveau de sa gestion stratégique. Ces éléments peuvent
conduire le passage d’un modèle RH traditionnel vers le
2. http://maisondelinsertion.com/
104
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
modèle renouvelé. En tant que membre du CJD, le PDG
s’inscrit dans une démarche de Responsabilité Sociétale des
Entreprises (RSE) qui comprend la promotion de la diversité et cet engagement se traduit dans son entreprise par des
recommandations à l’encadrement et par l’implication des
partenaires sociaux. Selon plusieurs études, l’implication
de la direction de l’entreprise en matière de diversité est
importante pour la réussite du projet. Le PDG confirme
également que l’adhésion au CJD lui a permis « toujours
d’expérimenter. Grâce au CJD, j’expérimente et je passe
de la théorie à la pratique. Ces réflexes sont indispensables
pour le métier du dirigeant. Surtout dans mon contexte
d’une entreprise en pleine croissance. Il faut inventer et être
créatif quotidiennement. ».
Les facteurs ‘âge’ et formation pourraient avoir une
influence sur l’engagement d’un PDG dans la promotion
de la diversité. D’après Berger-Douce (2010), l’âge du dirigeant a une influence concernant la mise en œuvre de la
diversité en entreprise : « les hommes jeunes seraient plus
enclins à intégrer de la diversité » (voir aussi Gudmunson
et Hartenian, 2000). Dans notre cas, il s’agit d’un « jeune »
PDG de 49 ans avec une formation initiale en gestion d’entreprise et ce PDG remet régulièrement ses connaissances
à jour en participant aux séances de formation continue.
L’âge du dirigeant, sa formation et le fait que ce PDG fasse
partie d’un réseau comme le CJD peuvent être considérés
comme moteurs à la gestion de la diversité dans les PME.
Nous avons également interrogé les salariés sur ce
que représente la diversité pour eux. Les résultats de l’enquête quantitative ressortent les idées suivantes : la diversité représente « une responsabilité de l’entreprise », « une
opportunité à saisir par l’entreprise » et » une source d’enrichissement personnelle ». Cette enquête a également
montré que les salariés mettent derrière le terme « diversité
en entreprise », par ordre décroissant : 1) origine ethnique;
2) personnes en situation de handicap; 3) seniors; 4) égalité hommes-femmes; 5) niveau d’étude et 6) orientation
sexuelle.
Selon les salariés d’IMA Technologies qui ont participé
à l’enquête qualitative, la diversité, « c’est la représentativité de la société, le divers à tous les niveaux, l’équité de
traitement, la valorisation des compétences » :
– L
a diversité des « âges, des origines, des idées, des couleurs, le genre, le handicap, la culture, la façon d’être »,
– « Faire en sorte que toutes les couches de la population
soient représentées dans l’entreprise »,
– « Valoriser les compétences des gens » (au lieu de les
limiter à des catégories de personnes et horizons),
– « Un engagement à ne pas faire de ségrégation, une
politique salariale équitable, mettre en avant les possibilités d’évolution quels que soient le niveau d’étude,
l’emploi exercé et le poste d’origine »,
– E
lle relève de « la conscience morale de l’entreprise »,
elle est « très importante pour moi ».
Certains vont même jusqu’à dire que « la diversité est
justement de ne pas classer des gens dans des catégories. »
L’idée que « tout doit paraître naturel » est évoquée, « on ne
doit plus se poser la question de la différence ». En ce qui
concerne le côté « naturel » de la diversité, on pourra s’interroger si les salariés ne confondent pas ici le climat social
et la gestion de la diversité en entreprise.
Quelques salariés se disent étonnés de la présence
de certaines catégories dans notre guide d’entretien.
L’orientation sexuelle est la plus souvent citée, selon certains salariés elle n’a pas sa place car elle relève de la vie
intime des personnes. La présence des seniors et du niveau
d’étude en a étonné quelques-uns.
Les effets positifs de la diversité
Selon les entretiens qualitatifs, la gestion de la diversité au
sein de la société, consiste à participer à la politique d’intégration du pays : l’entreprise fait partie des institutions
représentatives et en tant que leader d’opinion, elle doit
montrer l’exemple. Au sein de l’entreprise, la gestion de
la diversité permet :
– Un enrichissement des salariés :
• C’est un brassage et un « enrichissement mutuel » : du
salarié à l’entreprise, de l’entreprise au salarié.
• Un formateur interrogé a remarqué que la présence de
personnes d’horizons divers « enrichissait les discussions lors des formations ».
• Elle permet d’avoir une meilleure ambiance de travail,
elle « humanise » l’entreprise.
• Elle permet aux personnes différentes de se sentir
« décomplexées ».
– De la performance pour l’entreprise :
• C’est une « richesse en termes d’approches ».
• « Des idées neuves et des approches différentes du
client ».
• C’est « une source d’union et de force ».
– Des économies :
• « Evite à l’entreprise de payer des taxes supplémentaires (les personnes en situation de handicap) ».
• « Elle permet de se prémunir du risque de
discrimination. »
– Une meilleure image auprès des clients :
• Elle donne « bonne conscience à l’entreprise » ainsi
qu’une « bonne image à l’extérieur ».
105
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements d’un centre d’appel spécialisé
Les freins à la gestion de la diversité
Le PDG a été interrogé sur les freins et la promotion de
la diversité en entreprise. Les réponses sont basées sur la
perception du chef d’entreprise et classées de 1 à 5 : 1 = pas
important; 2 = peu important; 3 = moyennement important;
4 = important et 5 = très important.
D’après le PDG aucun frein n’est ‘très important’ car
il n’a pas attribué la note 5. Comme le montre la figure 2,
le PDG juge « le manque de diversité des candidatures »
comme le frein le plus ‘important’ dans la mise en œuvre
d’une démarche diversité au sein de son entreprise. Parmi
les trois freins qu’il juge ‘important’ ou ‘moyennement
important’, seulement un frein concerne les politiques RH
notamment « le manque de candidatures ». L’existence
d’autres priorités et les résistances en interne/externe
semble avoir peu d’importance selon la perception du PDG.
Les résistances en interne/externe peuvent également être
liées aux difficultés d’intégration. Par contre, les raisons
souvent évoquées dans la littérature, comme la conjoncture
économique, le désintérêt des instances représentatives du
personnel (IRP) ou la complexité de la question semblent
ne pas avoir d’importance’ au sein de cette PME.
Pour mieux comprendre quels facteurs constituent des
freins à la diversité dans une PME nous avons également
interrogé les salariés avec une question ouverte. En la
posant directement les salariés ont eu du mal à nommer des
freins. D’après les salariés, la diversité peut poser problème
dans certains cas, par exemple elle peut être « une source
de conflit par exemple l’incompréhension liée à différents
« backgrounds » et référentiels qui posent des problèmes de
communication » ou elle peut « ne pas être rassurante au
début. » Ces effets négatifs ne sont pas forcément des freins
à la diversité chez IMA Technologies.
Toutefois nous avons pu détecter quelques freins à
la diversité dans les réponses suivantes. Certains salariés
évoquent la fixation d’objectifs et la rédaction des actions
à mener : « il faut que les salariés se sentent concernés,
impliqués dans le processus ». Quelques salariés craignent
que la gestion de la diversité pourrait impliquer une fixation
de quotas, d’objectifs chiffrés ou encore une discrimination
positive. Ces craintes concernent la mise en place des quotas liés aux origines ethniques. Ces peurs exprimées par les
salariés peuvent constituer des freins à la diversité.
Les dimensions de la diversité
D’après l’enquête quantitative, les salariés sont à chaque
fois plus de 70 % à penser qu’il y a égalité de traitement
à tout point de vue. Néanmoins on constate que la catégorie des seniors et le niveau d’étude il y a le plus d’avis
négatifs (23,4 % et 17,1 %). En ce qui est de la gestion des
ressources humaines c’est dans le domaine de la gestion de
carrière et de la rémunération que l’égalité de traitement est
la plus contestée (20 % et 23,5 %).
Les résultats des interviews montrent qu’aucune inégalité de traitement n’a été constatée sauf pour compenser un
handicap, ou « donner une chance » quand les compétences
étaient présentes. Au contraire, une équipe RH est à la disposition des salariés pour gérer les carrières; une politique
RH qui favorise la mobilité (« parcours RH ») et la possibilité pour tous d’avoir des responsabilités (par exemple, pour
les seniors, pour les personnes d’origines diverses, …).
Figure 2
L’importance des freins à la diversité
1
La complexité de la question
2
3
X
L’existence d’autres priorités
X
Le manque de diversité des candidatures
X
Les réticences de la hiérarchie
X
Les réticences des salariés
X
Les réticences des clients
X
La conjoncture économique
X
Le désintérêt des représentants du personnel (IRP)
X
Les difficultés d’intégration
4
X
5
106
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
En ce qui concerne l’égalité hommes-femmes beaucoup d’interlocuteurs soulignent le nombre important de
femmes managers. Eût égard aux personnes en situation
de handicap : les salariés sont conscients des efforts faits
par IMA pour pouvoir accueillir des travailleurs handicapés
(TH). Les salariés ont parfois eux-mêmes intégré dans leurs
réflexions les contraintes que peut rencontrer une personne
handicapée au travail; par exemple, il est une fois arrivé
qu’en prenant leur café, ils avaient remarqué que le sol était
bombé et ont immédiatement pensé que cela poserait problème à la personne en fauteuil roulant.
La loi de 2005 impose aux entreprises de 20 salariés et
plus un quota de 6 % des personnes handicapées au sein de
leurs effectifs. Les entreprises qui ne répondent pas à cette
obligation d’emploi doivent payer une amende à l’AGEFIPH (Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion
Professionnelle des Personnes Handicapées). Pour deux
personnes interrogées, la principale motivation d’IMA
d’agir par rapport aux personnes en situation de handicap
serait « d’éviter ainsi de payer une amende supplémentaire ». D’après ces deux salariés, la contribution AGEFIPH
est un bon moyen de faire agir cette PME en faveur des
personnes en situation de handicap.
Les salariés voient la différence avec leurs précédentes
expériences professionnelles où la diversité des origines
ethniques était moins présente. Cela en rend même certains
curieux : ainsi un salarié ayant constaté que 3 des 4 personnes dernièrement recrutées étaient d’origine étrangère
s’est renseigné après d’eux sur la manière dont ils avaient
été sélectionnés. Ces derniers l’ont assuré qu’ils avaient
postulé de manière classique.
Les seniors que nous avons interviewés se sentaient
très bien intégrés et nullement victime d’une quelconque
discrimination. Beaucoup d’entre eux ne se sont pas posé
la question de leur faible présence. Certains ne rendent pas
IMA Technologies responsable car le type d’activité d’IMA
Technologies n’attire pas les seniors. D’autres lui accordent une part de responsabilité car certains ressentent « une
volonté d’embaucher des jeunes » et « il y a un fort turnover
des personnes profils plutôt seniors ». Le fait d’embaucher
plus de seniors est vu positivement. Ces profils sont appréciés « car ils apportent leur expérience et leur recul dans un
environnement constitué de jeunes. »
Le niveau d’étude ne pose aucun problème entre les
personnes d’un même plateau. Toutefois, quelques salariés évoquent une absence de mélange avec les personnes
du plateau juridique due à l’emplacement de ce plateau
qui se situe seul au dernier étage ce qui ne facilite pas les
rencontres. Les juristes, contrairement aux autres professions, ne sont pas amenés à travailler sur d’autres plateaux.
Certains salariés ont l’impression que les juristes ont tendance à « snober » les personnes des autres plateaux en raison de leur plus faible niveau d’étude. Les juristes interrogés
nient toute attitude hautaine et sentiment de supériorité visà-vis de leurs collègues des autres plateaux. Une personne
nous a confié avoir déjà entendu des propos injurieux de
la part des juristes, mais cela fait un certain temps et elle
estime que la situation s’est améliorée depuis. En revanche,
lors des réunions, ils réclament toujours des attentions et
des avantages particuliers en raison de leur plus haut niveau
d’étude.
En raison d’un surcroît d’activité sur un autre plateau,
il a été demandé à des juristes volontaires de prêter main
forte. Les juristes interrogés en gardent un bon souvenir
et pensent que cet échange interplateaux peut s’avérer être
une piste pour briser leur isolement.
Les domaines RH
Les domaines RH impliquent notamment le recrutement
et l’intégration, la rémunération, la gestion de carrière
et l’accès à la formation. En ce qui concerne le recrutement, les salariés sont unanimement convaincus qu’IMA
Technologies ne pratique aucune discrimination. Une personne interrogée porte le nom de famille de son mari qui a
une consonance étrangère. Lors de sa précédente recherche
d’emploi elle avait préféré mettre son nom de jeune fille
sur son CV de peur d’être discriminée. Aujourd’hui, si elle
devait postuler de nouveau chez IMA Technologies, elle
n’hésiterait pas à mettre le nom de son mari. Une autre
personne ayant un niveau CAP travaillant sur un plateau
a été recrutée pour un emploi de niveau BAC+2. IMA
Technologies a selon lui pris en compte son expérience et
ses compétences au lieu de se focaliser sur son diplôme.
Par rapport à la rémunération : contrairement à ce
que révèle le questionnaire quantitatif, aucun salarié interrogé ne s’est plaint de différences non justifiées de salaire.
Tous s’accordent à dire que les critères de rémunération
sont connus de tous et dûment appliqués. Apparemment,
on discute assez ouvertement rémunération entre collègues, notamment à propos de l’attribution des bonus. La
différence des résultats peut s’expliquer par le fait que le
questionnaire étant anonyme les salariés osent s’exprimer
davantage. D’après certaines d’études, parler ouvertement
des rémunérations demeure un tabou dans les entreprises
françaises.
La gestion de carrière : d’après les salariés « ce sont
les compétences et la motivation qui priment » - exemple
d’un salarié franco-algérien qui est passé du plateau
conseiller client à celui de juriste. Des parcours métiers
ouverts aux plateaux Bac+2 permettent la mobilité interplateaux. Néanmoins certains salariés ont du mal à y répondre
en raison du fort turnover et de leur manque d’ancienneté.
Concernant l’accès à la formation continue, les salariés sont très satisfaits des formations proposées. Ils évoquent l’existence de formations « plateaux » qui évitent
toute discrimination.
Reste à mentionner que les salariés ont une grande
confiance dans le service RH et semblent ne pas hésiter à
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements d’un centre d’appel spécialisé
s’adresser à lui s’ils se sentent victimes d’une injustice. Ils
évoquent aussi les nombreuses consultations préalables de
l’avis des salariés de la part du service RH dans la mise en
place d’un nouveau projet.
Selon l’enquête quantitative, 91 % des salariés confirment que l’entreprise est attentive à l’ergonomie et l’aménagement des postes de travail. 81 % disent qu’IMA
Technologies permet un aménagement des horaires de travail. 98 % déclarent que les réunions ont lieu pendant les
horaires habituels de travail et 80 % pensent que ces pratiques facilitent l’intégration des salariés ayant des charges
de famille.
Ces résultats sont confirmés par l’enquête qualitative.
De bonnes conditions de travail ont été soulignées par les
salariés interviewés malgré un travail contraignant. Les
salariés interrogés remarquent que l’entreprise se montre à
l’écoute et sensible à leur bien-être : elle met en place des
« moyens qui ne sont pas anodins » par exemple, une salle
de pause, une conciergerie, l’ergonomie, le temps partiel, la
flexibilité et l’aménagement des horaires grâce à un service
planification, etc. qui permettent l’intégration de tous les
salariés, une diminution du stress et l’articulation vie professionnelle/vie privée. Concernant l’aménagement des
horaires, il existe une bonne entente entre collègues qui permet de facilement s’arranger en cas de contraintes, le manager validant sans problème ces changements d’horaires.
Lorsque l’on interroge les personnes sur les services
de proximité, beaucoup pensent d’abord à la conciergerie,
mais il leur faut un temps plus long de réflexion pour citer
les restaurants par exemple. Le covoiturage semble être
important pour beaucoup de personnes et ils sont reconnaissants pour l’aménagement des horaires possible afin que les
salariés d’un même quartier commencent et finissent le travail en même temps.
Cependant certains salariés évoquent les améliorations
possibles en terme :
– D
’ergonomie : « il faudrait qu’il y ait des accoudoirs
aux fauteuil », « le confort des fauteuils pourrait être
amélioré ».
– D
e desserte des bus : les salariés sont conscients
qu’IMA n’a aucun pouvoir direct sur les horaires de
bus, mais selon eux « il faudrait faire pression auprès
de la mairie ». Apparemment un nombre important de
salariés utilise les transports en commun.
– D
e temps partiels : plusieurs personnes ont évoqué
l’existence de nombreux temps partiels non choisis.
Pour des raisons de confidentialité nous ne souhaitons
détailler ces informations.
107
La communication interne et externe sur la gestion de
la diversité
IMA Technologies accorde beaucoup d’importance à la
communication. « Nous sommes une entreprise en pleine
croissance donc il faut communiquer beaucoup et tenir au
courant nos parties prenantes » observe le PDG d’IMA.
D’après les salariés la communication interne et externe
sur la diversité, « cela devrait être naturel » et « être automatique ». Dans ce cas là, les salariés rejettent une communication formelle et intentionnelle sur la diversité. En ce
qui concerne la communication en interne : les témoignages
des salariés interrogés montrent quelques réticences, par
exemple « on pourrait croire qu’il y a un problème et certaines catégories se sentiraient pointées du doigt. Cela
peut être bien d’en parler mais pas de manière excessive,
pas trop de pub ». Les salariés craignent qu’en communiquant dessus, on perd ce côté « naturel » de la gestion de la
diversité existant chez IMA. Il y a aussi une peur que cela
« aboutisse à fixer des quotas » : « il faut que les personnes
soient recrutées uniquement pour leur compétence. » Ils
ne ressentent pas le besoin d’être plus informés, « l’essentiel est qu’IMA agisse ». D’après les salariés interrogés, la
diversité est visible au quotidien et ça leur suffit. Par contre
en ce qui concerne la communication en externe, les salariés sont plutôt favorables à une communication formelle
sur la diversité, pour montrer l’exemple, attirer des candidats potentiels, ou séduire de nouveaux clients.
D’après le PDG, il n’existe pas aujourd’hui de supports
de communications externes valorisant l’engagement en
faveur de la diversité mais l’entreprise travaillera sur ce
point dans les mois à venir.
La grande majorité des salariés interviewés affirme ne
jamais avoir reçu de communication de la part d’IMA les
informant sur les actions mises en place pour favoriser la
diversité mise à part concernant l’intégration de personnes
en situation de handicap. Cela ne les empêche pas d’avoir
remarqué la diversité peu commune présente chez IMA.
Une personne explique que cette absence de communication est courante, notamment en ce qui concerne quelques
actions dans la démarche de performance globale : « en
général; IMA met beaucoup de choses en place mais ne
communique pas suffisamment dessus. Par exemple, lors de
la mise en place du covoiturage, aucun mail n’a été envoyé,
seule une carte a été affichée à l’accueil ».
Les salariés notent une transparence de l’entreprise
via les mails et le journal interne. La communication via
« l’Echo des Plateaux » donne « un côté humain à l’entreprise », permet aux salariés de sortir des discussions classiques et crée un effet de cohésion par rapport au groupe
IMA. Les « portraits du journal » reflètent la diversité de
l’entreprise et encouragent le contact entre salariés.
Les articles sur les activités pratiquées par les salariés
en dehors du travail ne sont pas naturellement associés
dans leur esprit à la promotion de la diversité. Les salariés
108
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
interviewés estiment avoir une bonne connaissance des
actions sur le handicap : la plupart sont au fait du trophée
obtenu par l’entreprise et des aménagements réalisés, ou du
partenariat avec le centre de formation pour l’intégration
de stagiaires. En novembre 2006, IMA Technologies a reçu
une « Trophée de l’insertion », délivré par MEDEF de Loire
Atlantique qui récompense des entreprises ayant réalisé
des actions remarquables pour l’insertion professionnelle
ou le maintien dans l’emploi des personnes en situation de
handicap.
Toutefois la grande majorité n’a pas de connaissance
du partenariat « Job Academy » ou de « Maison de l’Insertion » sauf si concerné. Les salariés interviewés ont peu de
visibilité des affichettes à l’accueil (par exemple, affichette
conciergerie).
Nous avons interrogé les salariés sur la question de la
communication sur la diversité et de la place de celle-ci dans
les valeurs de l’entreprise : les salariés interviewés n’ont
pas de connaissance des valeurs, mais lorsqu’elles sont présentées par l’interviewer, elles sont largement approuvées.
Ils savent que la diversité est inscrite dans les valeurs de
l’entreprise. Les salariés ne jugent pas la diversité comme
étant indispensable mais ils n’y sont pas défavorables : ils
ont une préférence pour une diversité qui se « vit au quotidien » plutôt qu’inscrite dans le marbre. D’après l’enquête
qualitative, peu d’entre eux connaissent les valeurs de
l’entreprise. Ils considèrent la diversité comme une valeur
implicite de l’entreprise. Si oui, « son intérêt est de donner un coup de pouce pour l’emploi : elle permet de montrer l’engagement de l’entreprise. » D’après les personnes
interrogées « il faut relier cette valeur à l’activité de l’entreprise », par exemple : « privilégier la diversité pour bien
servir nos clients »; « c’est tellement naturel la diversité
chez IMA Technologies, c’est pour cela que nos services
sont de qualité ».
Nous les avons également interviewé sur la mise
en place d’une charte interne de la diversité. Selon les
réponses issues du questionnaire, nous avons recueilli des
avis positifs (90 %) et peu de réticence. D’après les salariés,
une charte peut avoir de nombreux effets positifs comme
« motiver les salariés, maintenir des engagements de l’entreprise, passer à l’action et réaliser un travail de fond sur
la diversité, etc. » Voici quelques témoignages des salariés :
Nous avons recueilli leurs avis sur le contenu d’une
telle charte. D’après eux, l’entreprise pourra communiquer
sur le fait « qu’un recrutement se fasse sur la base de la
compétence uniquement » ou sur « les seniors qui sont la
population la moins représentée en donnant des exemples
réussis car il existe la possibilité d’intégration si les moyens
sont mis en œuvre et le budget le permet ». L’entreprise doit
mettre les moyens pour attirer des profils plus seniors. Nous
avons demandé aux salariés quel pourra être son mode de
diffusion. Les salariés nomment l’intranet ou l’intégration de la charte dans le livret d’accueil. Les collaborateurs interviewés mettent en avant quelques difficultés, par
exemple l’utilisation des indicateurs pour le management
de la diversité. Ils souhaitent mener des réflexions sur la
manière d’établir des bilans chiffrés, par exemple concernant l’égalité femmes/hommes, les seniors, les travailleurs
handicapés (TH). D’après les salariés ces trois dimensions
de la diversité sont facilement quantifiables, contrairement
à la mesure des origines ethniques.
Le bilan de l’enquête sur la gestion de la diversité
D’après plusieurs auteurs les politiques de non discrimination représente une attitude défensive par rapport à la
gestion de la diversité (IMS Entreprendre pour la Cité;
Naschberger et Bellion, 2010). La gestion de la diversité est
considérée comme une politique pro-active et volontariste.
Les politiques d’égalité des chances se situent à mi-chemin
entre les actions pour la lutte contre les discriminations et
les démarches diversité. Nous avons étudié dans ce sens le
cas d’IMA. Entre le principe de la non discrimination, la
promotion de l’égalité des chances et le management de la
diversité : où en est IMA aujourd’hui et quels efforts restent
à faire ?
Nous avons demandé à chaque salarié de placer IMA sur
l’échelle ci-dessous (il ne s’agit pas d’une échelle graduée
mais le positionnement nous indique le chemin parcouru
en matière de diversité par l’entreprise et si l’entreprise
traite la question de la diversité plutôt comme un risque ou
comme une opportunité) :
Non discrimination
Egalité
Diversité
IMA
– « Elle permettrait de se comparer à d’autres entreprises »
La plupart des salariés ont estimé qu’IMA se situait
à mi chemin entre égalité et diversité et quelques-uns
l’ont située à égalité. Globalement tous s’accordent à dire
qu’IMA Technologies progresse en matière de gestion de
la diversité. Néanmoins certains points restent à améliorer,
par exemple, l’embauche des seniors et des personnes en
situation de handicap et la mixité interplateaux. Les salariés
interviewés proposent quelques pistes d’amélioration pour
« mieux communiquer » :
–« Cela ne sera qu’à son honneur de participer à cette
politique nationale »
–« Davantage communiquer, mettre en avant la diversité
dans l’écho des plateaux »
– « Graver sur le marbre des engagements »
–« La charte peut créer un sentiment de valorisation et
de confiance des entreprises vis-à-vis de ses salariés »
–« Elle mettrait noir sur blanc des responsabilités de
l’entreprise »
La mise en œuvre d’une démarche diversité en PME – Quelques enseignements d’un centre d’appel spécialisé
109
–« Favoriser les échange entre le plateau juridique et
les autres plateaux : activités communes, réunions
communes »
d’une démarche diversité et donne une définition de la
diversité.
Le bilan de l’enquête de la diversité montre les forces
suivantes :
Encadré 3 :
La démarche diversité chez IMA Technologies
– Une diversité visible, « naturelle » et bien acceptée
– Des processus RH qui garantissent la non discrimination voire la diversité
– Des partenariats qui favorisent la diversité
A l’image de ses activités et de ses clients, IMA
Technologies cultive en son sein la diversité, convaincue
que celle-ci est porteuse de richesse, créativité et performance.
Par rapport aux faiblesses, nous avons retenu les points
suivants :
Depuis sa création, IMA Technologies s’engage à respecter et promouvoir l’application du principe de non discrimination* – et de diversité – et affirme cette volonté par la
formalisation de cette charte.
– Un manque de communication sur certaines actions
– Mixité sociale difficile (plateau juridique et autres
plateaux)
– Sous-représentation de la catégorie « seniors » (> 45 ans)
IMA Technologies peut capitaliser sur les outils existants. En matière de communication, nous préconisons
d’utiliser des portraits sur la mixité sociale dans le journal interne « l’Echo des Plateaux ». IMA Technologies
pourra établir des partenariats pour travailler sur la gestion
des âges notamment des seniors. Une autre préconisation
concerne l’intégration d’un module de formation pour les
managers impliqués dans le recrutement (par exemple, la
prise de conscience des stéréotypes). Dans le passé, cette
formation était particulièrement appréciée par les participants et comme l’entreprise s’est déjà engagée dans cette
voie - nous trouvons important de continuer à former les
futurs managers aux enjeux de la non-discrimination en
entreprise. Il est vrai que l’entreprise ne semble pas avoir
des problèmes spécifiques par rapport à cette problématique mais certains salariés ont évoqué - après avoir terminé
officiellement les interviews - des propos contre les personnes d’origines ethniques. D’après les résultats de nos
enquêtes, il semble nécessaire d’expliquer davantage l’intérêt de communiquer sur la diversité en interne et externe,
par exemple à travers une plaquette de communication
(suite à la rédaction d’une charte diversité) – « et attention
aux contrecoups d’une « surcommunication » ». Certains
salariés ont évoqué le fait que « trop de communication tue
la communication ».
Un autre axe de progression est de donner l’occasion
aux salariés du plateau « juristes » de rencontrer les autres
plateaux (par exemple, par la création des événements intraentreprise; chaque plateau peut organiser un événement qui
implique toute l’entreprise).
Après l’enquête sur la gestion de la diversité
Les résultats de notre enquête ont débouché sur la rédaction
d’une charte interne de la diversité. 90 % des salariés étaient
favorable à cette initiative. IMA Technologies a constitué
un groupe de travail qui a pu définir une « Charte Diversité
IMA Technologies ». L’encadré 3 explique la raison d’être
* dont celles liées au sexe, à l'âge, à l'apparence physique, au handicap, à
la maladie, à la situation de famille, à l'orientation sexuelle, aux opinions
politiques, syndicales, religieuses, philosophiques, à l'appartenance
réelle ou supposée à un groupe ou à une ethnie déterminée
L’encadré 4 résume les actions et les engagements de
l’entreprise en matière de diversité.
Encadré 4 :
Les engagements de IMA Technologies
S’ouvrir à des profils et des parcours différents
– Sensibiliser et former les acteurs du recrutement
– Développer et pérenniser les partenariats en faveur de
recrutements diversifiés (Handicap, population éloignée
de l’emploi, seniors…)
– Favoriser l’intégration au quotidien par l’aménagement
des conditions de travail
Respecter l’équité en matière d’évolution et de vie professionnelle
– Maintenir et développer les compétences de chacun des
collaborateurs
– Assurer une égalité d’accès et de traitement dans la gestion
des parcours professionnels en vigueur dans l’entreprise
– Veiller à favoriser l’équilibre entre vie professionnelle
et vie privée
Informer et partager autour de nos engagements
– Communiquer par un bilan régulier auprès des IRP et
de l’ensemble du personnel sur les actions menées en
faveur de la diversité et de la non discrimination
– Faire de la diversité un objet de dialogue dans l’entreprise
– Encourager les bonnes pratiques et favoriser l’innovation sociale
Les collaborateurs d’IMA Technologies contribuent ainsi
solidairement au respect de ces engagements au quotidien
et l’entreprise reste vigilante face aux atteintes portées à
ces derniers.
« La diversité de chacun fait la richesse de tous »
Julos Beaucarne
110
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
A travers cette charte l’entreprise témoigne sa préoccupation en matière de diversité et elle confirme notre hypothèse que les PME peuvent être également des acteurs en
matière de diversité.
En septembre 2011, IMA Technologies a également
signé la Charte de la diversité. IMA s’engage donc à côté
des grands groupes comme BNP Paribas, Crédit Agricole,
Alstom, Alcatel-Lucent, etc. La signature de cette charte
encourage les organisations à mettre en œuvre des actions
en faveur de la diversité et à lutter contre toute forme de
discrimination. En la signant, les organisations s’engagent
à garantir la promotion et le respect de la diversité de la
population française au sein de leurs effectifs (Naschberger,
2012).
L’entreprise est par ailleurs engagée dans un processus de labellisation sociale – la gestion de la diversité
constituant l’un de ses volets. IMA a obtenu le label de la
Responsabilité Sociale en 2010. IMA Technologies communique également sur les résultats des enquêtes empiriques. Un dossier « portrait sur la diversité » a fait l’objet
d’une publication dans le journal interne en juin 2009.
Conclusion
Les centres d’appel ne sont pas des entreprises qui font
rêver – au contraire ce secteur souffre d’un déficit d’image
important. Pour pouvoir attirer d’avantage de candidats,
ces entreprises essayent d’améliorer les conditions de travail. Quelques-unes parmi elles font un travail sur la RSE
notamment la promotion de la diversité. Davantage de
PME s’engagent en termes de responsabilité sociale. Notre
communication montre les résultats des enquêtes quantitatives et qualitatives sur la gestion de la diversité – mené
de janvier à juin 2009 au sein d’une PME. L’entreprise en
question, IMA Technologies s’est engagée depuis plusieurs
années dans une démarche diversité. Notre étude de cas
montre que l’entreprise est active pour manager la diversité
et nous concluons par le constat que les approches diversité des PME ne sont pas aussi différentes que celles des
grands groupes. Les PME ont leur manière de s’engager
et quelques actions comme la signature de la Charte de la
diversité les rapprochent des actions menées par des grands
groupes. Nous avons également montré l’importance de
l’engagement du dirigeant qui adopte une définition de la
diversité en prenant en compte les intérêts de ses parties
prenantes. Dans ce sens la diversité et les politiques RH
acquièrent une dimension stratégique et nous observons
une évolution vers le modèle renouvelé.
A travers une étude approfondie sur la gestion de la
diversité qui a été menée dans cette PME de 284 salariés,
nous montrons l’importance de l’engagement du dirigeant
-qui fait partie d’un réseau professionnel- et des salariés.
Nous pensons également que le profil du dirigeant (âge, formation initiale et continue) a une influence sur l’intégration
de l’approche diversité au sein de son entreprise.
Les résultats montrent que la diversité est considérée
comme « naturelle » au sein d’IMA Technologies. Il nous
paraît que ce côté « naturel » de la diversité, souvent évoqué par les salariés, reflète avant tout l’ambiance et le climat social au sein de l’entreprise. Mais cela n’empêche
pas l’existence des freins. La gestion de la diversité peut
être également une source de conflit. La revue de littérature
nous a permis de mettre en évidence des freins externes et
internes souvent culturels liés à la mise en place de la diversité. Contrairement à ce qui est évoqué dans la littérature en
tant que freins à la diversité dans des PME, l’analyse de nos
résultats montre qu’en réalité ces freins ne sont pas existants au sein de cette PME. En interrogeant le chef d’entreprise nous avons pu identifier que le manque de diversité
des candidatures constitue le frein majeur dans la mise
en place d’une démarche diversité. Le manque de diversité de candidatures se traduit par une faible présence des
seniors en entreprise : que ce soit dû que l’activité d’IMA
Technologies n’attire pas les seniors et aussi que l’entreprise préfère embaucher des jeunes. Pour pallier ce manque
nous pouvons suggérer un « sourcing » actif de la part du
service recrutement. Avant l’enquête, la DRH nous a fait
part de son constat de ne pas avoir le choix et après l’enquête, une volonté d’aller chercher des profils plus seniors
était affirmé – la DRH a entamé un travail sur le « sourcing
diversifié » pour pouvoir attirer des profils « seniors ». Nous
n’avons pas pu détecter des freins culturels dans notre PME.
En interrogeant directement les salariés sur les freins
existants, ils ne sont ni vraiment visibles et ni discuté ouvertement : selon les salariés la diversité chez IMA va de soi,
elle est « naturelle » - elle est perçue d’une manière positive. Mais en on écoutant les salariés « off » et en creusant
les résultats, ils mentionnent à plusieurs reprises une peur
concernant l’introduction des quotas et d’une discrimination positive en entreprise. Ces peurs exprimées concernent
la dimension de l’origine ethnique. Les salariés disent également avoir peur si l’entreprise communique trop sur la
diversité, IMA va perdre le côté naturel.
D’autres freins à la diversité peuvent exister si l’entreprise n’agit pas avec une transparence auprès des différentes
catégories représentatives pour mettre en avant les enjeux
d’une politique diversité et ne laisse pas le temps nécessaire
pour ses salariés pour s’imprégner de ce changement.
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113
Notes biographiques
Diane Bebbington est un chercheur en sciences sociales et
porte un intérêt aux thèmes de leadership et d’égalités, en particulier dans l'enseignement supérieur. Diane est à l’origine du
Knowledge Perspectives Ltd en 2006, société spécialisée dans
la recherche sociale et politique. Elle est actuellement
conseiller à la diversité à la Leadership Foundation de l'enseignement supérieur.
Leadership Foundation for Higher Education Peer House
8-14 Verulam Street
London WC1X 8LS
UK
Mustafa Özbilgin mène des recherches dans le domaine de
l'égalité, la diversité et l'inclusion dans des perspectives comparatives. Il dirige les chaires à l'université Brunel de Londres,
l'Université Paris-Dauphine et l'Université Koç à Istanbul. Il
est actuellement rédacteur en chef du British Journal of Management.
Chair in Organisational Behaviour
Brunel Business School
Brunel University
Uxbridge, UB8 3PH
London, UK
Eliane Barbosa da Conceição est professeur junior en comportement organisationnel à la Faculté Zumbi dos Palmares,
São Paulo et membre du Centre de recherche de l'administration publique et du gouvernement de la Fondation Getulio
Vargas.
FGV-CEAPG
www.fgv.br/ceapg
[email protected]
Peter Spink est professeur d'Administration Publique et de
Gouvernement à l'école de São Paulo en Administration des
Affaires (FGV-EAESP) et membre senior du Centre de l'Administration Publique et du Gouvernement de la Fondation
Getulio Vargas.
Escola de Administração de Empresas de São Paulo
Fundação Getulio Vargas
Av. 9 de Julho 2029
Bela Vista
São Paulo – SP
01313-901 Brazil
Géraldine Galindo est Maître de Conférences en Gestion des
Ressources Humaines à l’Université Paris Sud, IUT de Sceaux.
Membre du laboratoire de recherche PESOR, ses recherches
sont centrées sur la GRH dans les start-up de biotech en France
et également sur le management de la diversité religieuse. Elle
a écrit différents articles dans des Journaux académiques et a
participé à des ouvrages collectifs de recherche (récemment
Management et Religion paru en 2012).
Université Paris Sud, IUT de Sceaux
Laboratoire PESOR
8 avenue Cauchy
92 330 Sceaux
[email protected]
33 0(1) 40 91 24 79
Joëlle Surply est docteur en Sciences de Gestion, Maître de
Conférences à l’université Paris sud (2007-2011), agrégée en
économie gestion. Les thèmes de recherche de Joëlle Surply
sont principalement orientés vers la gouvernance des organisations et l’apprentissage. Dans cette perspective, le rôle des
confessions dans le management, et notamment dans les
modes de coopération intra et interentreprise, est une dimension structurante de ses travaux de thèse (2006).
Université Paris Sud
54 bd Desgranges
92331 Sceaux Cedex France
[email protected]
Eléonore Marbot est maître de Conférences en Gestion des
Ressources Humaines au Campus Clermont FBS. Membre de
la CRCGM (Centre de Recherche Clermontois en Gestion et
Management), ses travaux de recherche et publications portent
sur la gestion des âges, la coopération intergénérationnelle et la
diversité.
CRCGM
FBS, Campus Clermont
4 Bd de Trudaine
63037 Clermont-Ferrand cedex 1
[email protected]
Brigitte Nivet est enseignante chercheur à Clermont Campus
FBS. Membre du CRCGM (Centre de Recherche Clermontois
en Gestion et Management), ses travaux de recherche et publication portent sur l'innovation social, GRH, PME, et la diversité.
CRCGM
FBS, Campus Clermont
4 Bd de Trudaine
63037 Clermont-Ferrand cedex 1
[email protected]
Yvan Barel enseigne la gestion des ressources humaines à
Nantes. Membre du LEMNA (Laboratoire d’Economie et de
Management de Nantes-Atlantique), sa recherche concerne
notamment le management de la diversité. Il est l’auteur de
deux ouvrages (Les interactions entre la stratégie, le manager
et son équipe, L’Harmattan, 2000; La gestion des ressources
humaines, Dalloz, 2008).
5, rue du Port Garnier, 44 000 Nantes FRANCE
[email protected]
114
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
Sandrine Frémeaux est professeur à Audencia-Nantes.Ecole
de management. Ses travaux de recherche portent sur différents thèmes de Gestion des Ressources Humaines, notamment le don gratuit, la santé au travail, la conciliation vie
professionnelle – vie personnelle, l’intégration professionnelle
des personnes en situation de handicap, et le sens au travail.
Audencia, 8, route de la Jonelière, 44000 Nantes FRANCE
[email protected]
Bruna Maria Giuseppina Doctorante associée à la Chaire
« Management et Diversité » de la Fondation Dauphine,
Membre-doctorant du Laboratoire IRISSO (Dauphine-CNRS)
Chargée d’enseignement en Sociologie et Sciences de Gestion
à l’Université Paris-Dauphine (PSL* Research University)
Intervenante à l’Ecole Nationale d’Administration.
Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75015 Paris
[email protected]
Chauvet Mathieu Docteur en Sciences de Gestion. Enseignant-chercheur en Sciences de Gestion au sein d'EDC Paris
EDC, 70 Galerie des Damiers – Paris La Défense 1
92415 Courbevoie Cedex
T + 33 (0)1 46 93 00 62
[email protected]
Annie Cornet est Professeure Ordinaire (Full Professor) au
sein du Département Management à Hec- Ecole de gestion de
l'Université de Liège en Belgique. Titulaire d'un Doctorat en
Sciences de Gestion, elle a créé une unité de recherche en
2000 sur le Genre et la Diversité en Gestion (EGiD), avec
comme centre d'expertise la gestion de la diversité, l'égalité
professionnelle hommes-femmes, l'entrepreneuriat féminin, le
gender mainstreaming (approche intégrée de l'égalité entre les
sexes) et le gender budgeting (analyse sexuée des budgets publics). Elle est l'auteure de plusieurs articles et ouvrages autour
de ces thèmes. Elle enseigne la GRH, la gestion de la diversité,
le management et la méthodologie qualitative.
HEC- ULG
B31, Boite 48
Bvd du rectorat
Sart Tilman
Liège 4000, Belgium
[email protected] / +32 494 57 26 13.
Hédia Zannad est Professeur Associé au sein du Département
Management et Stratégie du Groupe Rouen Business School.
Titulaire d’un Doctorat HEC en Sciences de Gestion, d’un Master de Psychologie sociale et un autre de Sociologie des Organisations, elle contribue au développement de pôles d’expertise
sur la diversité, le management de projet, les compétences
managériales et les démarches de Validation des Acquis de
l’Expérience. Ses travaux portent aujourd’hui sur les pratiques
religieuses en entreprise et sur les différentes dimensions du
projet individuel.
Groupe Rouen Business School
Boulevard André Siegfried
76825 Mont Saint Aignan Cedex
France
[email protected] / +33 6 62 54 39 88
Pete Stone Biculturel franco-britannique, Pete Stone a passé
15 ans dans la formation, notamment comme Professeur
Associé à Rouen Business School où il dispensait des cours
d’Ethique et de Management Interculturel et gérait les programmes pour les étudiants internationaux. Il a continué sa
carrière dans le Conseil RH comme Directeur Marketing &
Opérations de Hudson. Il a mis en place la politique Diversité
de Hudson et a ainsi participé à la création de l’association À
Compétence Égale. Début 2009 il a créé Just Different, société
de conseil et de formation en diversité. Parallèlement, il est
intervenant et ingénieur de recherche pour Rouen Business
School. Pete est co-auteur de plusieurs chapitres sur la diversité et la discrimination. Il est membre bénévole d’À Compétence Égale et membre du Conseil d’Administration de l’AFIP.
42 avenue Kléber
75016 Paris
France
[email protected] / +33 670 31 91 80
Christine Naschberger, Docteur en Sciences de Gestion de
l’Université Technique de Munich (Allemagne), EnseignanteChercheuse à Audencia Nantes School of Management. Chercheuse au sein de l’Institut pour la Responsabilité Globale et
l’Entrepreneuriat (IRGE), ses principaux domaines de
recherches sont le management de la diversité - le handicap, la
gestion des carrières au féminin, équilibre vie professionnelle
– vie personnelle -, le management des compétences et le
développement des talents. Elle est l’auteure de nombreuses
communications scientifiques, des guides pratiques et elle a
publié divers chapitres d’ouvrages et articles. Elle intervient
également en qualité d’experte et formatrice auprès d’entreprises sur les thèmes du management de la diversité, de la
gestion des compétences et du développement RH.
Audencia PRES LUNAM
8, route de la Jonelière
44312 Nantes Cedex
[email protected]
Sana Guerfel-Henda, Docteur en Sciences de Gestion de
l'Ecole Polytechnique, Enseignant-chercheur à France
Business School Campus Amiens, Responsable du Pôle Leadership et Ressources Humaines (LRH). Ses axes de recherche
portent sur la fidélisation des salariés, la diversité, la RSE,
entrepreneuriat, la socialisation des jeunes, gestion des âges
(...). Auteur de nombreux articles, communications et contributions à des ouvrages collectifs.
France Business School campus Amiens
18, place Saint-Michel –
80038 Amiens Cedex
[email protected]
115
Biographical Notes
Dr Diane Bebbington is a social scientist with interests in
leadership and equalities, particularly in higher education.
Diane set up Knowledge Perspectives Ltd in 2006, a company
focusing on social research and policy. She is currently Diversity Advisor for the Leadership Foundation for Higher Education.
Joëlle Surply PhD in Management, Associate economy
management, Joëlle Surply directed her research mainly
towards organizational governance and learning. In this perspective, the role of confessions in management, and in particular modes of intra and inter-company, is a structuring aspect of
her thesis (2006).
Leadership Foundation for Higher Education Peer House
8-14 Verulam Street
London WC1X 8LS
UK
Université Paris Sud
54 bd Desgranges
92331 Sceaux Cedex France
[email protected]
Mustafa Özbilgin researches in the field of equality, diversity
and inclusion from comparative perspectives. He holds chairs at
Brunel University in London, Université Paris-Dauphine and
Koç University in Istanbul. He is currently the editor-in-chief of
the British Journal of Management.
Eléonore Marbot is Maitre de Conférences (Senior Lecturer)
in Gestion des Ressources Humaines (Human resources
Management) at FBS Clermont Campus. Member of the
CRCGM (Centre de Recherche Clermontois en Gestion et
Management – Clermont Administration and Management
Research Centre) her research studies and publications concern
managing ages, intergenerational co-operation, and diversity.
Chair in Organisational Behaviour
Brunel Business School
Brunel University
Uxbridge, UB8 3PH
London, UK
Eliane Barbosa da Conceição is a Junior professor in organizational behavior at Zumbi dos Palmares Faculty, São Paulo
and research member of the Center for Public Administration
and Government at the Getulio Vargas Foundation.
FGV-CEAPG
www.fgv.br/ceapg
[email protected]
Peter Spink is Professor of Public Administration and
Government at the São Paulo School of Business Administration (FGV-EAESP) and senior member of the Center for
Public Administration and Government at the Getulio Vargas
Foundation.
Escola de Administração de Empresas de São Paulo
Fundação Getulio Vargas
Av. 9 de Julho 2029
Bela Vista, São Paulo – SP
01313-901 Brazil
Géraldine Galindo is associate professor in Human Resources
Management at the University Paris Sud, IUT de Sceaux.
Member of the research laboratory PESOR. Her Ph.D. was on
the building of HRM in French biotechs. Her research focuses
on HRM in start-up biotech's and also on religion in diversity
management. She has written several articles in French Academic Journals and in research books (recently Management
and religion published in 2012).
Université Paris Sud, IUT de Sceaux
Laboratoire PESOR
8 avenue Cauchy, 92 330 Sceaux
[email protected]
33 0(1) 40 91 24 79
CRCGM
FBS, Campus Clermont
4 Bd de Trudaine
63037 Clermont-Ferrand cedex 1
[email protected]
Brigitte Nivet is a researcher teacher at FBS Clermont Campus. Member of the CRCGM (Centre de Recherche Clermontois en Gestion et Management – Clermont Administration
and Management Research Centre) her research studies and
publications concern social innovation, HRM, SMEs, and
diversity.
CRCGM
FBS, Campus Clermont
4 Bd de Trudaine
63037 Clermont-Ferrand cedex 1
[email protected]
Yvan Barel teaches Human Resource Management in Nantes.
Member of LEMNA (Laboratory of Economics and Management Nantes-Atlantique), his research concerns in particular
management of diversity. He is the author of two books (The
interactions between strategy, the manager and his team,
L’Harmattan, 2000; The Human Resource Management, Dalloz, 2008).
5, rue du Port Garnier, 44 000 Nantes FRANCE
[email protected]
Sandrine Frémeaux is a professor at Audencia-Nantes.
School of management. His research focuses on various topics
of Human Resource Management, including existential gift,
occupational health, work-life balance, professional integration of people with disabilities, and meaningful work.
Audencia, 8, route de la Jonelière, 44000 Nantes FRANCE
[email protected]
116
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
Bruna Maria Giuseppina Associate doctoral researcher at
the Dauphine’s Foundation « Management and Diversity »
Chair, PhD-member of the IRISSO Laboratory (Dauphine CNRS) Paris-Dauphine’s University Assistant Professor in
sociology and management. Lecturer at the French National
School for Public Administration (Ecole Nationale d’Administration)
Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75015 Paris
[email protected]
Chauvet Mathieu Doctor of Philosophy in Management. Professor of Management Sciences at EDC Paris
EDC, 70 Galerie des Damiers – Paris La Défense 1
92415 Courbevoie Cedex
T + 33 (0)1 46 93 00 62
[email protected]
Annie Cornet is Full Professor in the Department of Management at HEC School of Management at the University of Liège
in Belgium. She holds a PhD in Management Science and created a research unit in 2000 on Gender and Diversity in Management (EGID), with expertise in diversity management,
equality between men and women in the workplace, female
entrepreneurship, gender mainstreaming (integrated approach
to equality between sexes) and gender budgeting (gender
analysis of budgets). She is the author of several articles and
books on these topics. She teaches HRM, diversity management, management and qualitative methodology.
HEC- ULG
B31, Boite 48
Bvd du rectorat
Sart Tilman
Liège 4000, Belgium
[email protected] / +32 494 57 26 13.
Hédia Zannad is Associate Professor in the Department of
Management and Strategy at Rouen Business School. She holds
an HEC PhD in Management Science, a Master in Social Psychology and a second in the Organisational Sociology. She
contributes to the development of centres of expertise in diversity, project management, managerial competencies and
approaches to the Accreditation of Work Experience. Her current work focuses on religious practices in business and on the
various dimensions of the individual project.
Groupe Rouen Business School
Boulevard André Siegfried
76825 Mont Saint Aignan Cedex
France
[email protected] / +33 6 62 54 39 88
Pete Stone is of Franco-British culture. He has spent 15 years
in education, notably as Associate Professor at Rouen Business
School where he taught Ethics and Intercultural Management
and managed programs for international students. He continued his career in HR Consulting as Director of Marketing &
Operations at Hudson. He set up Hudson’s diversity policy and
co-founded the NGO “A Compétence Egale”. In 2009 he created Just Different, a consulting firm specialized in diversity.
Pete continues to work with Rouen Business School as a parttime professor. Pete is co-author of several chapters on diversity and discrimination. He is a volunteer with “A Compétence
Egale” and member of the Board of Directors of AFIP.
42 avenue Kléber
75016 Paris
France
[email protected] / +33 670 31 91 80
Christine Naschberger, Doctorate in Business Administration at the Munich University of Technology (Germany),
Researcher at Audencia Nantes School of Management
(France). Researcher at the Institute for Global Responsibility
and Entrepreneurship (IRGE) her main research areas are
Diversity Management – disability and equality in the workplace, work-life balance – competency-based management
and talent management. Christine is the author of numerous
scientific papers, tutorials and she has published several book
chapters and articles in peer-reviewed journals. She is also an
expert and trainer in intercultural management.
Audencia PRES LUNAM
8, route de la Jonelière
44312 Nantes Cedex
E-mail : [email protected]
Sana Guerfel-Henda, Doctorate in Business Administration
at Ecole Polytechnique (France), Researcher at France
Business School Campus Amiens, Head of Leadership and
Human Resource Management Pole. Her main research areas
are loyalty, Diversity Management, CSR, employee socialization. Sana is the author of numerous scientific papers, tutorials
and she has published several book chapters and articles in
peer-reviewed journals.
France Business School campus Amiens
18, place Saint-Michel –
80038 Amiens Cedex
[email protected]
117
Notas biográficas
Diane Bebbington es una cientifica social con intereses en el
liderato y las inegualdades, particularmente en la educacion/
ensenanza superior. Diane inicio Knowledge Perspectives Ltd
en el 2006, una compania que se enfoca en la investigacion y
norma sociales. Es actualmente la asesora de la Diversidad
para la Leadership Foundation for Higher Education.
Joëlle Surply Doctorado en Gestión, Gestión de la economía
Asociado, Joëlle Surply dirigió su investigación principalmente hacia la gobernanza y el aprendizaje organizacional. En
esta perspectiva, el papel de las confesiones en la gestión, y en
los modos particulares de intra e inter-empresa, es una dimensión estructurante de su tesis (2006).
Leadership Foundation for Higher Education Peer House
8-14 Verulam Street
London WC1X 8LS
UK
Université Paris Sud
54 bd Desgranges
92331 Sceaux Cedex France
[email protected]
Mustafa Özbilgin investiga el campo de la igualdad, la diversidad y la inclusion desde puntos de vista comparativos. Detiene
una catedra en la Brunel University de Londres, Université
Paris-Dauphine y Koç University en Istanbul. Es actualmente
jefe de redaccion del British Jounal of Management.
Eléonore Marbot es Maestro de Conferencias en Gestión de
Recursos Humanos en el FBS Campus de Clermont. Miembro
del CRCGM (Centro de Investigación de Clermont-Ferrand en
gestión y Management), sus investigaciones y publicaciones
tratan de la gestión de las edades, la cooperación entre generaciones y la diversidad.
Chair in Organisational Behaviour
Brunel Business School
Brunel University
Uxbridge, UB8 3PH
London, UK
Eliane Barbosa da Conceição es una joven profesora de comportamiento organizacional de la Facultad Zumbi dos Palmares, São Paulo y miembro investigador del Centro para la
Administración Pública y de Gobierno de la Fundación Getulio Vargas.
FGV-CEAPG
www.fgv.br/ceapg
[email protected]
Peter Spink es Profesor de Administración Pública y de
Gobierno de la Escuela Paulista de Administración de Empresas (FGV-EAESP) y miembro sénior del Centro para la Administración Pública y de Gobierno de la Fundación Getulio
Vargas.
Escola de Administração de Empresas de São Paulo
Fundação Getulio Vargas
Av. 9 de Julho 2029
Bela Vista, São Paulo – SP, 01313-901 Brazil
Géraldine Galindo es profesor de Gestión de Recursos
Humanos en la Universidad de Paris Sud, IUT de Sceaux.
Miembro de la PESOR la investigación de laboratorio, su
investigación se centra en la gestión de recursos humanos en
biotecnología start-ups en Francia y también la gestión de la
diversidad religiosa. Ha escrito varios artículos en periódicos
y académicos participaron en los trabajos de investigación
colectiva (recientemente publicado en Religión y Gestión
2012).
Université Paris Sud, IUT de Sceaux
Laboratoire PESOR
8 avenue Cauchy, 92 330 Sceaux
[email protected]
33 0(1) 40 91 24 79
CRCGM
FBS, Campus Clermont
4 Bd de Trudaine
63037 Clermont-Ferrand cedex 1
[email protected]
Brigitte Nivet es profesor investigador en el FBS Campus de
Clermont. Miembro del CRCGM (Centro de Investigación de
Clermont en gestión y Management), sus investigaciones y
publicaciones tratan de la innovación social, la GRH y la
PYME y la diversidad.
CRCGM
FBS, Campus Clermont
4 Bd de Trudaine
63037 Clermont-Ferrand cedex 1
[email protected]
Yvan Barel enseña gestión de recursos humanos en Nantes.
Miembro del LEMNA (Laboratorio de Economía y Gestión
de Nantes-Atlantique), su investigación se centra especialmente en la gestión de la diversidad. Él es el autor de dos libros
(Las interacciones entre la estrategia, el gerente y su equipo,
L’Harmattan, 2000; La gestión de los recursos humanos, Dalloz, 2008).
5, rue du Port Garnier, 44 000 Nantes FRANCE
[email protected]
Sandrine Frémeaux es profesor en Audencia-Nantes.School
de management. Su investigación se centra en diversos temas
de gestión de recursos humanos, incluyendo el don gratuito, la
salud ocupacional, conciliación del trabajo – vida, integración
profesional de personas con discapacidad, y un trabajo significativo.
Audencia, 8, route de la Jonelière, 44000 Nantes FRANCE
[email protected]
118
Management international / International Management / Gestión Internacional, Vol 17, numéro spécial
Bruna Maria Giuseppina Estudiante de doctorado: Cátedra
“Gestión y Diversidad” de la Fundación Dauphine, miembroestudiante en doctorado del Laboratorio IRISSO (DauphineCNRS). Profesora asociada de Sociología y Ciencias de la
Gestión en la Universidad Paris-Dauphine (PSL* Research
University). Ponente en la Escuela Nacional de Administración.
Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75015 Paris
[email protected]
Chauvet Mathieu Doctor en Gestion. Profesor de Gestion en
la EDC Paris.
EDC, 70 Galerie des Damiers – Paris La Défense 1
92415 Courbevoie Cedex
T + 33 (0)1 46 93 00 62
[email protected]
Annie Cornet es Profesora (Docente) Ordinaria (Full Professor) dentro del departamento Management en Hec-Escuela de
Gestión de la Universidad de Lieja en Bélgica. Titularia de un
Doctorado en Ciencias de Gestión, creó en 2000 una unidad
de investigación profesional sobre el Género y la Diversidad
(EGiD) poniendo como centro de pericia la gestión de la
diversidad, la igualdad profesional hombres-mujeres, el
emprendimiento femenino, el gender mainstreaming (enfoque
integrado en la igualdad entre los sexos) y el gender budgeting
(análisis por sexo de los presupuestos públicos). Es autora de
varios artículos y publicaciones sobre esos temas. Imparte
clases de GRH, la gestión de la diversidad, el management y la
metodología cualitativa.
HEC – ULG
B31, Boite 48
Bvd du rectorat
Sart Tilman
Liège 4000, Belgium
[email protected] / +32 494 57 26 13
Hédia Zannad es profesora asociada dentro del Departamento
Management y Estrategia del Grupo Rouen Business School.
Titularia de un Doctorado HEC en Ciencias de Gestión, un
Master de Psicología social y otro de Sociología de las Organizaciones, contribuye en el desarrollo de polos de pericia sobre la
diversidad, el management de proyectos, las competencias
manageriales y los métodos de validación de la consolidación
de la experiencia. Sus trabajos tratan actualmente de las prácticas religiosas dentro de las empresas y las diferentes dimensiones del proyecto individual tal como se pueden expresar en
las distintas formas de seguimiento individual.
Groupe Rouen Business School
Boulevard André Siegfried
76825 Mont Saint Aignan Cedex
France
[email protected] / +33 6 62 54 39 88
Pete Stone Bicultural franco-británico, Pete Stone dedicó 15
años en la formación, especialmente como profesor asociado
en la Rouen Business School donde impartía clases de Ética y
Management Intercultural y gestionaba los programas para los
estudiante internacionales. Continuó su carrera en el Consejo
RH como Director Marketing & Operaciones de Hudson.
Estableció la política Diversidad de Hudson y tomó así parte
en la creación de la Asociación À Compétence Égale (A Igual
Competencia). A principios del 2009 creó Just Different (sencillamente diferentes) empresa de consejo y formación en
diversidad. Paralelamente es profesor externo e ingeniero de
investigación para la Rouen Business School. Pete es coautor
de varios capítulos sobre la diversidad y la discriminación. Es
miembro benévolo de À Compétence Égale y miembro del
Consejo de Administración de la AFIP.
42 avenue Kléber
75016 Paris
France
[email protected] / +33 670 31 91 80
Christine Naschberger, Doctora en Ciencias Empresariales
de la Universidad Técnica de Munich (Alemania), Profesora
Investigadora en Audencia Nantes Escuela de Gestión. Investigadora en el seno del Instituto para la Responsabilidad Global y Emprendimiento (Irge), sus principales áreas de
investigación son la gestión de la diversidad – la discapacidad,
la gestión de la carrera como mujer –equilibrio entre vida profesional y vida personal- la administración de capacidades y
desarrollo de talento. Es autora de numerosos artículos científicos, guías prácticas y ha publicado diversos capítulos de
libros y artículos. También interviene en calidad de experta y
formadora con las empresas acerca de temas de gestión de la
diversidad, administración de capacidades y desarrollo de los
recursos humanos.
Audencia PRES LUNAM
8, route de la Jonelière
44312 Nantes Cedex
E-mail : [email protected]
Sana Guerfel-Henda,Doctorado en Ciencias Empresariales
de la Escuela Politécnica, Profesora-investigadora en France
Business School Campus Amiens, Responsable del Polo Liderazgo y Recursos humanos (LRH). Sus ejes de investigación se apoyan en la fidelización de los asalariados, la diversidad, el
RSE, el empresariado, la socialización de los jóvenes, la gestión de las edades (...). Autora de numerosos artículos, comunicaciones y contribuciones a obras colectivas
France Business School campus Amiens
18, place Saint-Michel –
80038 Amiens Cedex
[email protected]
Politique rédactionnelle
Résumé : Le résumé ne doit pas dépasser 100 mots.
Article dans un recueil :
Longueur : L’article est limité à 6 000 mots ou 30 pages de
format lettre (références comprises − tableaux, figures et
annexes non compris) saisis à double interligne, format lettre É.-U. (215,9 × 279,4 mm), police 12 pts.
Toulouse, Jean-Marie; Bourdeau, Gilles (1995). « Taux de
croissance et stratégies des nouvelles entreprises technologiques », dans A. Noël, P. Very et M. Wissler (sous
la direction de), Perspectives en management stratégique,
Economica, Tome III, p. 365-392.
La note de recherche est limitée à 4 000 mots ou 20 pages
(références comprises − tableaux, figures et annexes non
compris) saisis à double interligne, format lettre É.-U.
(215,9 × 279,4 mm), police 12 pts.
La note de lecture est limitée à 2 000 mots ou 10 pages
(références comprises) saisis à double interligne, format
lettre É.-U. (215,9 × 279,4 mm), police 12 pts.
Le compte rendu de lecture est limité à 1 000 mots ou
5 pages (références comprises) saisis à double interligne,
format lettre É.-U. (215,9 × 279,4 mm), police 12 pts.
Titres et sous-titres : Ils doivent être courts et ne pas faire
l’objet d’une numérotation (I, II A, B, etc.).
Tableaux, graphiques, organigrammes, cartes : Ils sont
numérotés et présentés sur des feuilles à part. L’emplacement de ces tableaux doit être clairement indiqué dans l’article.
Livres :
Deulceux, M. (1996). Les grandes politiques européennes,
Montréal, Les Publications du CETAI, HEC Montréal,
194 p.
Gauthier, Gilles; Huppé, François (1991). Cost-benefit
analysis: An extensive bibliography, Montréal, Gaëtan
Morin Éditeur, 324 p.
Note biographique :
Si votre article est accepté, vous devrez nous fournir une
note biographique d’environ 60 mots pour chaque auteur.
La note doit inclure l’adresse électronique et l’adresse professionnelle complète, le grade universitaire le plus élevé et
où il a été obtenu, l’affiliation et le titre d’emploi ainsi que
le domaine de recherche.
Les tableaux, graphiques, organigrammes et dessins doivent être noirs sur fond blanc.
Citations : Si elles dépassent cinq lignes dactylographiées,
elles font l’objet d’un paragraphe en retrait de cinq espaces
et non guillemeté.
Références :
Dans le texte : Auteur, date (Dupont, 1987) ou (Dupont,
1987; Smith, 1990; Faucher, 1988) ou (Dupont, 1987,
p. 10-13; Smith, 1990, chap. 2).  Sous forme de notes : Elles sont numérotées et présentées
en bas de page. Ici aussi, on ne mentionnera que le nom, la
date et, le cas échéant, les pages appropriées.
Bibliographie :
Article dans une revue :
Bogner, William C.; Thomas, Howard (1996). « Sustaining
international linkages: A dynamic competence view »,
Management international, vol. 1, no 1, p. 1-14.
Erutku, Can; Vallée, Luc (1996). « Analyse des perceptions et des préférences des travailleurs quant à leur
manager », Management international, vol. 1, no 1,
p. 23-33.
Les droits d’auteur et l’autorisation de reproduire
Pour reproduire un article au complet ou un texte de plus de
500 mots, on doit obtenir une autorisation écrite de Mana­
ge­ment international (MI) et de l’auteur. Normalement, MI
accorde sa permission si l’auteur donne la sienne et si une
note indiquant le copyright de MI figure en première page
du texte reproduit. L’autorisation de MI n’est pas nécessaire
pour ne reproduire qu’un seul tableau ou qu’une seule ­figure,
à condition qu’on obtienne au préalable la permission de
l’auteur et qu’on donne la référence complète (Management
international et auteur). Les auteurs qui veulent reproduire
leurs propres écrits pour usage personnel sont dispensés
de ces formalités. Par contre, les auteurs qui utilisent leurs
propres travaux à des fins commerciales doivent obtenir
l’autorisation de MI. Les professeurs d’établissements
­d’enseignement ne sont pas tenus de demander une autorisation pour distribuer des photocopies. Les bibliothèques
ne sont pas astreintes au copyright pour les photocopies.
Pour toute autorisation, veuillez contacter le rédacteur en
chef.
IM Style Guide
Abstract: The abstract must not exceed 100 words.
Article in a collection:
Length: Articles should not exceed 6000 words or 30 pages
(including references; excluding tables, figures, and appendices). Please use double-spacing, North American letter-size
format (215.9 × 279.4 mm; 8.5 × 11 in), and font size 12.
Toulouse, Jean-Marie; Bourdeau, Gilles (1995). “Taux de
croissance et stratégies des nouvelles entreprises technologiques,” in A. Noël, P. Very and M. Wissler (Eds),
Perspectives en management stratégique, Economica,
Tome III, p. 365-392.
Research notes should not exceed 4000 words or 20 pages
(including references; excluding tables, figures, and appendices). Please use double-spacing, North American letter-size
format (215.9 × 2794 mm; 8.5 × 11 in), and font size 12.
The commentary should not exceed 2000 words or ten
pages (including references). Please use double spacing,
North American letter-size paper (215.9 mm × 279.4 mm),
and font size 12.
The book review should not exceed 1000 words or five
pages (including references), double spaced, on North
American letter-size paper (215.9 mm × 279.4 mm), and
font size 12.
Titles and headings: Titles and headings must be short. They
must not be numbered (i.e., do not use I, II, A, B, etc.).
Tables, graphs, figures, and maps: These should be numbered and presented on separate pages. The location of the
tables must be indicated clearly in the body of the text.
Tables, graphs, figures, and drawings must be printed in
black on a white background.
Quotations: If quotations exceed five typed lines, they
should be indented five spaces and should not have quotation marks.
References:
In text: Author, date (Dupont, 1987), or (Dupont, 1987;
Smith, 1990; Faucher, 1988), or (Dupont, 1987, p. 10-13;
Smith, 1990, chap. 2).
In notes: They should be numbered and presented at the
bottom of the page. Again, give only the name, date and, if
necessary, appropriate pages.
Reference list:
Article in a journal:
Bogner, William C.; Thomas, Howard (1996). “Sustaining
international linkages: A dynamic competence view,”
International Management, Vol. 1, No 1, p. 1-14.
Erutku, Can; Vallée, Luc (1996). “Analyse des perceptions et des préférences des travailleurs quant à leur
manager,” International Management, Vol. 1, No 1,
p. 23-33.
Book:
Deulceux, M. (1996). Les grandes politiques européennes,
Montreal: Les Publications du CETAI, HEC Montréal,
194 p.
Gauthier, Gilles; Huppé, François (1991). Cost-benefit
analysis: An extensive bibliography, Montreal: Gaëtan
Morin Éditeur, 324 p.
Biographical Note:
If your article is accepted for publication, you will be asked
to submit a biographical note of about 60 words for each
author. The note should indicate your e-mail address and
complete professional address, where the highest degree
was earned, present affiliation and position, and current
research interest.
Copyright and reproduction
To reproduce an International Management (IM) paper in
its entirety or in an excerpt of over 500 words you must
obtain written permission from both IM and the author.
Under normal circumstances, IM will grant permission if
the author does the same, provided that IM’s copyright is
indicated on the first page of the texts reproduced. Permission from IM is not required if only one table or one figure
is reproduced, provided that the author’s permission has
been obtained and a complete reference to International
Management and the author identifies its origin. Permission is granted to authors who wish to reproduce their own
material for personal use. However, authors wishing to use
their work for commercial purposes must obtain permission from IM. Permission to make photocopies is granted to
professors of educational establishments. Libraries are not
required to pay copyright fees for photocopies.
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Política de edición
Resumen: El resumen del artículo no tendrá más de 100 palabras.
Longitud: El artículo tendrá hasta 6.000 palabras o 30 páginas (se incluyen las referencias; no se incluyen las tablas, las
figuras y los anexos) a doble espacio, formato carta 8,5 x 11
pulg., tamaño de letra de 12 pts.
La nota de investigación tendrá hasta 4.000 palabras o
20 páginas (se incluyen las referencias; no se incluyen las
tablas, las figuras y los anexos) a doble espacio, formato
carta 8,5 x 11 pulg. y tamaño de letra de 12 pts.
El apunte de lectura tendrá hasta 2.000 palabras o 10 páginas (se
incluyen las referencias; no se incluyen las tablas, las figuras
y los anexos) a doble espacio, formato carta 8,5 x 11 pulg. y
tamaño de letra de 12 pts.
El informe de lectura tendrá hasta 1.000 palabras o 5 páginas (se
incluyen las referencias; no se incluyen las tablas, las figuras
y los anexos) a doble espacio, formato carta 8,5 x 11 pulg. y
tamaño de letra de 12 pts.
Títulos y subtítulos: Serán cortos y nunca enumerados
(I, II, A, B, etc.).
Cuadros, gráficas, organigramas, mapas: Estarán numerados y presentados en hojas separadas. La ubicación de cada
uno de estos cuadros, etc., estará claramente indicada en el
texto del artículo. Los cuadros, gráficas, organigramas y
dibujos deben estar realizados en negro sobre fondo blanco.
Citas: si las citas superan las cinco (5) líneas dactilografiadas, formarán un párrafo aparte, dejando cinco (5) espacios a
la izquierda y sin entrecomillar.
Referencias:
En el texto: Autor, fecha (Dupont, 1987) o bien (Dupont,
1987; Smith, 1990; Faucher, 1988) o bien (Dupont, 1987,
p. 10-13; Smith, 1990, cap. 2).
En forma de notas: Deberán estar numeradas al pie de
página. Como en el texto, sólo se mencionará el nombre, la
fecha y, eventualmente, las páginas de referencia.
Bibliografía:
Artículo de una revista:
Bogner, William C.; Thomas, Howard (1996). “Sustaining
international linkages: A dynamic competence view”,
International Management, vol. 1, no 1, p. 1-14.
Erutku, Can; Vallée, Luc (1996). “Analyse des perceptions
et des préférences des travailleurs quant à leur manager”,
Management international, vol. 1, no 1, p. 23-33.
Artículo de una colección de textos:
Toulouse, Jean-Marie; Bourdeau, Gilles (1995). “Taux de
croissance et stratégies des nouvelles entreprises technologiques”, en A. Noël, P. Véry y M. Wissler (bajo la
dirección de), Perspectives en management stratégique,
Economica, Tome III, p. 365-392.
Libro:
Deulceux, M. (1996). Les grandes politiques européennes,
Monographies en gestion et économie internationales, n°
96-03, Montréal, Centre d’études en administration
internationale, HEC Montréal, 194 p.
Gauthier, Gilles; Huppé, François (1991). Cost-benefit
analysis: An extensive bibliography, Montréal, Gaëtan
Morin Éditeur, 324 p.
Nota biográfica:
Si se acepta la publicación de su artículo, envíenos una nota
biográfica de aproximadamente 60 palabras por cada autor.
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comerciales deben obtener el permiso de GI. El permiso no
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À l’attention du professeur Bachir Mazouz, rédacteur en chef
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Champs d’intérêt
Administration et politique publiques
Économie
Finance/comptabilité
Gestion des opérations et de la production
Gestion des ressources humaines
Management général
Marketing
Thèmes
Communication/négociation
Éthique
Gestion de projets
Gestion de la connaissance
Gestion de projets
Gestion de risques
Gestion du changement
Gestion interculturelle
Innovation et entrepreneurship
Internationalisation
Leadership
Mondialisation/PVD/NPI/PET
Performance des organisations
Privatisation
Rapprochement d’entreprises
Réformes administratives
Stratégie/concurrence
Technologie de l’information
Autres (prière de spécifier)
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Professeur Bachir Mazouz
Rédacteur en chef
HEC Montréal
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Instructions for submitting papers electronically
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Papers should be submitted in electronic format using
Microsoft Word.
Bachir Mazouz, Editor
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message. One of the copies should include a title page that
contains the author’s name and complete contact information and, if any, the acknowledgements. The other copy
should have a title page that does not include any information that might identify the author. These two files should
be named NOMINATIVE and NON-NOMINATIVE, respec­
tively. Your submission will be acknowledged electronically when reviewers have been assigned.
Once accepted for publication by the evaluation committee,
the paper should be presented in PDF format or hard copy,
and in electronic format (Microsoft Word).
There should be nothing in the NON-NOMINATIVE
file that might identify the author.
Likewise, there should be nothing in the electronic properties of the NON-NOMINATIVE file that might identify the author.
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Finance/Accounting
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Change management
Communication/ negociation
Ethics
Globalization/LDCs/ NICs/EITs
Information Technologies
Innovation and entrepreneurship
Intercultural management
Interfirm cooperation
Internationalization
Knowledge management
Leadership
Organizational performance
Privatization
Project management
Risk management
Strategy/competition
Other (please specify)
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agradecimientos, y la otra copia tendrá una página de presentación sin identificación. Estos dos archivos se denominarán NOMINAL y NO-NOMINAL.
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Profesor Bachir Mazouz
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– 2 años
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70,00 $ CA
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Institución (1)
– 1 año
– 2 años
– 3 años
117,00 $ CA
187,00 $ CA
263,00 $ CA
105,00 $ CA
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(1)
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