deuxième section en fait

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deuxième section en fait
DEUXIÈME SECTION
Requête no 31364/11
Ökkeş Ersin MART
contre la Turquie
introduite le 7 mars 2011
EXPOSÉ DES FAITS
EN FAIT
Le requérant, M. Ökkeş Ersin Marat, est un ressortissant turc, né en 1985
et résidant à Osmaniye. Il a été représenté devant la Cour par Me G. Battal,
avocat à Adana.
A. Les circonstances de l’espèce
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par le requérant, peuvent
se résumer comme suit.
Le 8 mars 2008, le requérant, soupçonné de faire la propagande du
Parti-Front de libération du peuple révolutionnaire (DHKP-C), organisation
illégale armée, fut arrêté et placé en garde à vue.
Le 9 mars 2008, il fut d’abord entendu par le procureur de la République
de Düziçi, puis traduit devant le tribunal pénal d’instance de Düziçi lequel
ordonna sa mise en détention provisoire. Il fut libéré le 26 mai 2008.
Par un acte d’accusation du 23 mai 2008, le procureur de la République
d’Adana, (« le procureur ») requit la condamnation du requérant, ainsi que
de quinze autres personnes, en vertu de l’article 7 § 2 de la loi no 3713
relative à la lutte contre le terrorisme, réprimant la propagande en faveur
d’une organisation terroriste. Le procureur soutenait que, depuis 2004, le
requérant et les autres accusés organisaient des réunions, dont les dates
exactes ne sont pas précisées, pendant lesquelles ils faisaient la propagande
du DHKP-C, organisation illégale. Ils louaient des personnalités comme
Che, Ahmet Kaya et Deniz Gezmiş. Dans l’acte d’accusation, il était précisé
que le 1er janvier 2006, le requérant et un autre accusé avaient écrit sur les
murs du cimetière de la ville d’Ellek les mots « DHKP/C », « CEPHE » et
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« HÖC », et dessiné le symbole de la faucille et du marteau. Il ajoute que
deux autres accusés mineurs avaient effectué, en date du 6 mars 2008, à
l’instigation du requérant et avec le marqueur qu’il leur a donné, à différents
endroits de la ville, les mots « CHE » « HÖC », « DHKPC », « CEPHE »,
« ERNESTO » et « GRUP YORUM ».
Lors de l’audience du 9 octobre 2008 devant la cour d’assises d’Adana
(« la cour d’assises »), le requérant nia les accusations. Il déclara n’avoir
aucun lien avec le DHKP-C et contesta les déclarations des accusés qui ont
témoigné à son encontre pendant l’enquête préliminaire. Il nia avoir fait la
propagande d’une quelconque organisation et avoir demandé aux accusés
mineurs d’écrire sur les murs. Lors de cette audience, ces derniers avaient
d’ailleurs modifié les dépositions qu’ils avaient faites devant les gendarmes,
le procureur et le juge d’instruction, en affirmant que le requérant ne les
avait pas encouragés à effectuer les écritures en cause.
Lors de l’audience du 24 février 2009, le procureur rendit son avis sur le
fond dans lequel il requit la condamnation du requérant pour propagande en
faveur d’une organisation terroriste. En outre, la demande de la
représentante du requérant en vue de l’audition des accusés mineurs qui
avaient témoigné à l’encontre du requérant par un expert social afin
d’établir la crédibilité de leurs déclarations fut rejetée par la cour d’assises.
Par un jugement du 28 avril 2009, le requérant fut condamné à dix mois
d’emprisonnement pour propagande en faveur d’une organisation terroriste
en application de l’article 7 § 2 de la loi no 3713 relative à la lutte contre le
terrorisme.
Le requérant se pourvut en cassation. Dans sa demande en cassation, le
requérant défendit que les faits qui lui sont attribués, même prouvés, ne
pourraient pas être considérés comme une propagande interdite par la loi.
Par un arrêt du 7 octobre 2010, la Cour de cassation confirma le
jugement rendu en première instance.
B. Le droit interne pertinent
Loi no 3713 relative à la lutte contre le terrorisme
La première phrase de l’article 7 § 2 de la « nouvelle » loi no 3713 relative à
la lutte contre le terrorisme, entrée en vigueur le 18 juillet 2006, prévoit :
« Quiconque fait la propagande d’une organisation terroriste sera condamné à une
peine d’emprisonnement d’un à cinq ans. (...) »
GRIEFS
Invoquant l’article 10 de la Convention, le requérant se plaint de la
violation de sa liberté d’expression, dans la mesure où il a été condamné
pour des discours élogieux sur des personnages publics connus comme Che
et Deniz Gezmiş et pour avoir écrit des mots.
En outre, d’après le requérant, la seule inscription du mot DHKP-C à un
endroit ne constitue pas une propagande de l’organisation en cause et n’est
pas condamnable.
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Invoquant l’article 6 de la Convention, le requérant se plaint du manque
d’équité de la procédure pénale devant les juridictions internes dans la
mesure où ces dernières ne disposaient pas d’autres preuves que les
dépositions de certains accusés qui, selon le requérant, auraient été obtenues
sous pression de la police et qui ont été démenties par la suite par leurs
auteurs lors de la procédure devant la cour d’assises. Le requérant soutient
en outre que le fait qu’il soit le seul condamné alors qu’il y avait des
déclarations à l’encontre de tous les accusés et le rejet par la cour d’assise
de sa demande de l’examen par un expert social des accusés mineurs qui ont
témoigné à son encontre, portent atteinte à l’équité de la procédure.
Invoquant toujours l’article 6 de la Convention, le requérant se plaint de
la durée de la procédure pénale qui serait, selon lui, excessive.
Invoquant l’article 5 de la Convention, le requérant allègue que les
oppositions qu’il a formées contre son maintien en détention provisoire ont
été rejetées sans motivation valable et que son droit à la liberté et à la sûreté
a ainsi été violé.
QUESTIONS AUX PARTIES
1. Le droit à la liberté d’expression du requérant, garanti par l’article 10
de la Convention, a-t-il été respecté en l’espèce, eu égard à la condamnation
au pénal qui l’a frappé ?
2. Le requérant a-t-il bénéficié d’une procédure pénale équitable comme
le veut l’article 6 § 1 de la Convention ?

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