Millième épisode pour "Tatort", série policière culte du monde

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Millième épisode pour "Tatort", série policière culte du monde
Millième épisode pour "Tatort", série policière culte du monde germanophone
Jessica BERTHEREAU
10 November 2016
Agence France Presse
A moins d'avoir vécu en Allemagne, il y a peu de chance de connaître "Tatort". Cette
série policière sans excès d'hémoglobine est une véritable institution télévisuelle qui fête
dimanche son millième épisode, près d'un demi-siècle après ses débuts.
Chaque dimanche, immédiatement après le sacro-saint journal télévisé de 20h, des yeux
bleus apparaissent sur l'écran, première image d'un générique inimitable et inchangé
depuis le 29 novembre 1970 : Tatort commence !
L'année dernière, cette série culte du monde germanophone a réuni en moyenne 10
millions de téléspectateurs en Allemagne, soit un quart de part de marché, avec un pic à
13,69 millions le 8 novembre 2015, son record. Et cinquante millions d'Allemands
regardent au moins un épisode par an.
Quel est donc le secret d'un tel succès, qui fait de Tatort ("scène de crime", en français)
la doyenne des séries policières dans le monde ? "C'est un grand mystère que personne
n'arrive vraiment à élucider", avoue Peter Dörfler, co-auteur d'un documentaire sur
Tatort qui sera diffusé dimanche après le millième épisode.
Plusieurs hypothèses sont avancées, au premier rang desquelles le caractère régional de
cette série dont les épisodes de 88 minutes chacun font alterner 22 équipes de
commissaires basées dans différentes villes, principalement en Allemagne mais aussi en
Autriche (Vienne) et en Suisse (Lucerne).
"L'Allemagne n'est pas faite d'un seul bloc. Il y a la Bavière, le Nord, le
Mecklembourg-Poméranie (...) il y a Berlin... Toutes ces régions apportent quelque chose
à l'Allemagne. C'est pareil pour la culture et pour les chaînes de télévision. Ce
régionalisme tient le rôle principal dans Tatort", estime ainsi son inventeur Gunther
Witte.
Lorsque germe dans sa tête l'idée de monter une série policière avec l'ensemble des
télévisions régionales du réseau ARD, jamais il n'imagine à l'époque qu'elle se
prolongera si longtemps. Sa durée de vie était alors estimée à deux ans. Mais
quarante-six ans plus tard, Tatort est toujours là et plus que jamais populaire, toutes
générations confondues.
Dans cette série grand public, on ne trouvera ni violence ni nudité excessive.
"Pour moi, c'est une belle série, car ça parle de thèmes actuels et c'est aussi très
allemand. On ne parle pas que des bons côtés des villes où se déroule l'action, mais
aussi de la réalité", juge Monika Kwiatkowski, 38 ans, venue regarder un épisode de la
série dans le bar Roberta à Berlin.
C'est l'une des autres raisons avancées pour tenter d'expliquer le succès de Tatort: la
série ne reflète pas seulement le caractère fédéral de l'Allemagne mais aussi l'actualité
et les débats de société qui agitent le pays.
L'épisode diffusé le 6 novembre racontait ainsi l'histoire de la dérive criminelle d'une
jeune fille convertie à l'islam et basculant dans le jihadisme. Et dans la foulée du film, le
principal talk-show politique allemand, Anne Will, a consacré un débat à la radicalisation
de jeunes en Allemagne.
Les épisodes ne sont pas répétitifs, c'est à chaque fois différent, "c'est qui fait marcher la
série, de même que la diffusion le dimanche soir à 20h15", résume l'actrice Maria
Furtwängler, qui joue la commissaire Charlotte Lindholm dans le millième épisode.
La réalisation de cet opus, symboliquement intitulé comme le tout premier ("Taxi nach
Leipzig" ou "Taxi pour Leipzig"), a été confiée à Alexander Adolph. Il en a fait un
huis-clos angoissant dans un taxi roulant à toute allure jusqu'à cette ville de l'est de
l'Allemagne.
"En tant qu'auteur ou réalisateur, cette série représente pour moi une grande liberté
artistique", explique le réalisateur. "En tant que téléspectateur, Tatort représente pour
moi l'histoire de la télé, celle que je regarde depuis que je suis enfant. A l'époque, c'était
sacré".
Beaucoup comme Gerhard Elfers, venu lui aussi regarder Tatort au bar Roberta, sont
néanmoins nostalgiques de l'âge d'or des années 1980, quand officiait le commissaire
qui a le plus marqué la série, le mythique Horst Schimanski, un policier brut de
décoffrage interprété par l'acteur récemment décédé Götz George.
"J'étais fan il y a longtemps, quand Tatort était encore vraiment bien. C'est une telle
légende allemande que je regarde encore de temps en temps", confie M. Elfers. "Et de
temps en temps, il y a encore un épisode qui est vraiment bien..."
jb/alf/ak

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