Friedrich Naumann et l`idée germanique de Mitteleuropa

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Friedrich Naumann et l`idée germanique de Mitteleuropa
EMMY & STÉPHANE JONAS
Laboratoire « Cultures et sociétés en Europe »
(UMR du CNRS n° 7043)
Université Marc Bloch, Strasbourg
<[email protected]>
Friedrich Naumann
et l'idée germanique
de Mitteleuropa
L
a liste impressionnante des précurseurs de l’idée de la nécessité
de réunifier l’Europe ne cesse de
s’allonger sous l’influence de la naissance concrète de l’Union Européenne et de son élargissement continu et
actif. L’historiographie actuelle, qui
ne souhaite pas allonger cette liste
en amont, avant le XIXe siècle, distingue – mais la typologie n’est pas
fermée – deux types fondamentaux
de précurseurs : soit des personnalités issues de la société civile (écrivains, artistes, hommes de sciences
et de technique) et des hommes de la
vie politique (ministres, hauts fonctionnaires, chefs de partis), soit des
représentants des dynasties et des
républiques des superpuissances coloniales européennes dominantes du
siècle : l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la France, l’Autriche-Hongrie, la
Russie et l’Empire Ottoman.
La situation d’avant la Première
Guerre Mondiale est complexe, parce
que le XIXe siècle européen est caractérisé aussi très fortement, du point
de vue historique et politique, par la
naissance des États Nations et par le
réveil des nationalités et leur aspi100
ration à l’indépendance. À l’époque,
ce puissant mouvement des peuples
soumis et des nations colonisées met
directement en cause l’avenir des
trois empires coloniaux multinationaux et multiethniques en présence :
la monarchie d’Autriche-Hongrie,
l’Empire Ottoman et la Russie. En
outre, ces superpuissances sont, pendant la Grande Guerre de 1914-1918,
dans deux camps opposés : les empires
de l’Axe, avec l’Allemagne, l’AutricheHongrie et l’Empire Ottoman, d’une
part ; et les Alliés ou l’Entente, en
l’occurrence la Grande-Bretagne, la
France et la Russie, d’autre part. Les
projets européens pour l’unification,
nés au cours de la période fondamentale de1840-1915, n’auront donc pas
le même poids selon que les initiatives
seront issues du camp des vainqueurs
ou de celui des vaincus, d’après les
principes polémologiques bien vérifiés dans l’histoire de notre Vieille
Europe.
En outre, les deux empires centraux germaniques, successeurs élus
(les Habsbourg) ou autoproclamés
(les rois de la Prusse) du Saint Empire
Romain Germanique, veulent unifier
Emmy & Stéphane Jonas
l’Europe sous leur direction. C’est là
en quelque sorte l’origine de l’idée
de Mitteleuropa, qu’on a parfois aussi
appelé l’Europe du Milieu ou l’Europe
du Centre. En réalisant autour des
deux empires centraux une « Petite
Europe », le monde germanique, riche
et dynamique grâce à sa réussite dans
le domaine de l’industrie et de l’urbanisme, cherche ainsi une place
plus importante dans le concert des
superpuissances européennes. Dans ce
domaine, le projet de Mitteleuropa le
plus important est sans doute celui de
Friedrich Naumann (1860-1919), un
pasteur luthérien, homme politique
libéral progressiste, fondateur du Parti
Démocrate Allemand (DDP). Naumann publie – courageusement – ses
thèses sur l’unification de l’Europe du
Milieu en pleine guerre, en 1915, dans
un ouvrage intitulé Mitteleuropa1, qui
devient le plus grand succès de librairie de l’année en Allemagne, malgré la
réserve, voire l’hostilité, des généraux
et des milieux proches de l’Empereur.
Le lecteur alsacien sensible à l’histoire de sa région peut être intéressé,
lui aussi, par cet ouvrage, d’autant
plus que Naumann, populaire dans
les milieux universitaires et les cercles
libéraux de l’Alsace-Lorraine, a été en
1903 à l’origine de la fondation du parti
libéral-démocrate alsacien, la Liberale
Landespartei, par le pasteur luthérien, journaliste et homme politique
alsacien, Georges Wolf (1871-1951),
ainsi que son frère, tous deux des naumanniens convaincus. Une des figures
naumanniennes les plus éminentes de
l’Alsace était alors Rodolphe Schwander (1868-1950), maire de Strasbourg,
un homme politique libéral de gauche,
d’origine alsacienne2. De plus, la préface importante de l’ouvrage traduit
en français en Suisse en 1916 – contournant ainsi la censure en vigueur en
France pendant la guerre – fut écrite
par une des personnalités les plus
marquantes du parti socialiste (SPD)
de l’Alsace , Salomon Grumbach
(1884-1952), journaliste, homme politique alsacien, alors correspondant de
L’Humanité à Genève. Une des caractéristiques politiques et culturelles des
thèses de Naumann sur l’unification
de la Petite Europe, sous la direction
des deux empires centraux, est qu’il
Friedrich Naumann et l'idée germanique de Mitteleuropa
reprend à son compte les thèses des
précurseurs allemands du XIXe siècle sur le préalable fondamental de
toute réunion, qui serait d’entamer
la démarche par l’union douanière et
économique du monde germanique et
de celui des futurs adhérents.
Projets des précurseurs
pour une union
économique
et douanière
■
Bien que pour lui le concept de
Mitteleuropa fût essentiellement un
concept politique, Naumann était
conscient de la primauté, dans la phase
de départ, de l’union économique et
douanière de l’Europe centrale. De ce
point de vue, il fut donc un visionnaire
de l’Europe économique du XXe siècle.
Dans cette voie, le premier précurseur
avait été Friedrich List (1789-1846),
un théoricien, économiste et publiciste allemand de la première moitié
du XIXe siècle. Son idée était, d’après
l’historien et politologue français Jacques Droz, de constituer dans l’Europe
du Milieu un grand espace économique3. Ce grand espace servirait à faire
barrière contre l’expansion de l’influence britannique sur le continent.
Dans son effort pour limiter l’influence prussienne à l’intérieur des empires
centraux et dans le cadre du Zollverein
constitué après la Révolution de 1848,
l’Autrichien Karl von Bruck, ministre
du commerce extérieur du Cabinet
Schwarzenberg, préconisa la constitution d’un espace douanier de plus
de 70 millions d’habitants, allant de
la Mer du Nord à l’Adriatique, sous
direction autrichienne. D’autres,
comme l’homme politique prussien
Constantin Frantz, envisageaient
l’avenir de la Mitteleuropa comme
une fédération des peuples allemands
et des nationalités qu’ils contrôlaient,
sous direction prussienne. Formé par
le romantisme allemand et travaillant
pour la Bundschaft germanique,
Frantz était convaincu de l’importance
des questions économiques et douanières pour une future fédération à
constituer4. Et il voyait un danger dans
la politique de Bismarck de consti-
tuer seulement un empire allemand,
« la Petite Allemagne », excluant ainsi
l’Autriche. Le poids de la question
économique était reconnu, à quelques nuances près, par tous les autres
précurseurs germaniques connus de
l’idée de Mitteleuropa5. Nous savons
maintenant que l’Union Européenne
a emprunté cette même voie. Friedrich
Naumann était tout à fait conscient de
l’importance de la question économique dans son projet d’une union, à tel
point que la moitié des chapitres concernant le sujet est consacrée aux problèmes économiques et douaniers6.
Friedrich Naumann :
un libéral de gauche
marqué par
le christianisme social
■
Les activités politiques et culturelles
et les convictions sociales chrétiennes
antérieures de ce pasteur protestant,
devenu un chef politique, un écrivain
et journaliste influent, expliquent bien
la naissance de son projet d’union.
Après des études de théologie à Leipzig, il est nommé en 1883 pasteur dans
la Mission intérieure, à Hambourg. Il
devient rapidement un leader chrétien
social de gauche, épris d’un socialisme
chrétien œuvrant pour une démocratie sociale7. En 1883, il crée la revue
Die Hilfe, et trois ans plus tard, il fonde
à Erfurt l’Association Sociale Nationale, le National-Sozial Verein, dont
le sociologue Max Weber deviendra
un membre actif. Le programme de
cette association d’influence sociale
est de tenter de concilier la pensée
chrétienne avec l’Empire allemand
démocratique et social8. Face au peu
d’impact de son association, il s’allie
avec l’Union des Libres Penseurs pour
fonder le Parti Populaire Progressiste,
la Fortschrittliche Volkspartei, dont il
devient député au Reichstag en 1907. Il
sera un théoricien libéral et démocrate
écouté, et il se battra pour une société
industrielle moderne, issue d’un système germanique où prédominerait la
démocratie.
Naumann a une activité culturelle
extraordinaire. Pour rapprocher les
industriels des artistes et des architec101
tes, il est le cofondateur du Werkbund,
et pour combattre la Wohnungsnot, la
crise du logement des travailleurs, il
soutient l’Association Allemande des
Cités-Jardins et il envoie un de ses
proches collaborateurs, Ernst Jäckh,
animer cette association9. Dans son
cercle évoluent des universitaires et
des savants célèbres, tels que les historiens Friedrich Meinecke (1862-1954)
et Hans Delbrück (1848-1929), le théologien Ernst Tröltsch (1865-1923),
le juriste Georg Friedrich Knapp
(1842-1926), l’économiste Lujo Brentano (1844-1931), les sociologues Max
Weber (1864-1920) et Werner Sombart (1863-1941).Cette activité débordante mine sa santé. Après la chute
de l’empire wilhelminien, à la fin de
la guerre de 1914-18 , et peu avant sa
mort, il fonde en 1919, pour réunir
les forces libérales progressistes de la
République de Weimar naissante, le
Parti Démocratique Allemand dont il
devient le Président. Orateur brillant,
sincère, volontariste, prophète de la
modernité, il devient pour une courte
période la bonne conscience du parlement de la République. Il meurt
d’épuisement à 59 ans, dans l’Allemagne secouée par les révolutions, qui
cherche sa nouvelle identité. Les ÉtatsUnis d’Europe, dont la Mitteleuropa
aurait constitué le noyau fondateur
germanique et continental, était au
centre de sa Weltanschauung, de la
vision du monde à laquelle il a consacré une vie exemplaire qui force le
respect.
La Mitteleuropa :
un concept politique
■
La Mitteleuropa en tant que projet
et concept est dès le départ, et surtout suite à la révolution de 1848, une
expérience de pensée utopique et un
concept politique, géopolitique et sociopolitique. Expression de la dynamique
germanique continentale des empires
centraux, elle doit cette formulation
et sa diffusion aux Allemands et aux
Austro-hongrois qui en constituent
le noyau. « L’Europe centrale, observe
Naumann, sera allemande au cœur :
elle emploiera d’elle-même l’allemand
comme langue d’affaires et langue uni-
verselle, mais dès le premier jour, elle
devrait faire preuve de tolérance et
de souplesse à l’égard de toutes les
langues voisines et participantes, afin
que puisse s’élever la grande harmonie nécessaire à un État combattu et
pressé de tous côtés »10. Il y a deux
aspects importants de sociologie politique dans cette citation. D’une part,
la situation de guerre dans laquelle
le livre a été rédigé, et d’autre part le
renoncement de Naumann à accorder la primauté politique à une seule
nation-leader. Il ne s’agit pas seulement d’utiliser tous les stratagèmes
pour ne pas heurter les généraux et
l’empereur. Naumann est patriote et
il soutient son pays, comme le font
les leaders de tous les partis importants, y compris les sociaux-démocrates et les principaux intellectuels du
pays. Il en est de même dans le camp
adverse, chez les Alliés. C’est la nature
politique de la guerre qui lui révèle
l’un des aspects fondamentaux de
l’affrontement entre superpuissances,
en 1914-18, à savoir qu’au XXe siècle
seules les grandes puissances coalisées
pourront survivre comme nations-leaders. « L’Europe centrale, écrit-il, est
le fruit de la guerre. Ensemble, nous
avons été enfermés dans la prison économique ; ensemble nous avons combattu : nous voulons vivre ensemble
dorénavant »11.
Naumann exprime ainsi le sentiment politique des libéraux démocrates et du parti du centre catholique
d’être isolés sur le plan international
par l’alliance entre l’Angleterre libreéchangiste, la France révolutionnaire
et la Russie absolutiste. De ce point de
vue, le projet de Mitteleuropa s’avère
une nécessité, une réaction de défense
de l’organisation des peuples de cet
espace contre le péril que représentaient ces grands empires coloniaux.
Rappelons aussi la position paradoxale
des libéraux, des démocrates et des
chrétiens qui, dès l’automne 1915,
quand l’ouvrage de Naumann paraît,
préparent déjà la Conférence de la Paix
qu’ils pensent inévitable – et qui est
alors encore une perspective de « paix
honorable » entre les belligérants, et
non une défaite humiliante pour les
pays de l’Axe – pour sauver ce qui
peut l’être…
102 Revue des Sciences Sociales, 2007, n° 37, « (Re)penser l’Europe »
Le projet naumannien de Mitteleuropa est aussi un concept culturel, dans
le sens sociologique du terme de Kultur, tel qu’il est entendu par le sociologue Raymond Aron, qui considère
l’Allemagne comme un Kulturvolk,
un peuple où la culture fait partie de
l’identité politique12. Comment définir, en pleine guerre mondiale, les conditions socioculturelles d’une existence
historique commune, d’une communauté de destin des deux empires centraux ? Sur cette question brûlante, la
position fondamentale consiste à bien
identifier les nationalités composantes
dans chaque empire. La composition
des Allemands de l’Empire était la
suivante : Allemands, Polonais, Français (essentiellement Alsaciens et Lorrains), Danois ; et celle des Autrichiens
de l’Empire : Allemands, Hongrois,
Tchèques, Slovaques, Polonais, Slaves
de l’Est (Ruthènes d’Ukraine) et Slaves
du Sud (Slavons, Croates et Serbes)13.
L’appel à la communauté de destin
de l’Europe centrale avait certes alors
une actualité économique et politique
à cause de la dynamique germanique
dans ce vaste espace continental, mais
il avait aussi une dimension historique, dans la mesure où cette partie
de l’Europe est l’héritière de l’Empire
romain sous la forme du Saint Empire
Romain Germanique : c’est à ce titre
que les Germains, surtout depuis le
romantisme, ont pris conscience qu’ils
remplissaient ainsi une mission civilisatrice. Les pères fondateurs de la
sociologie tels que Tönnies, Weber,
Simmel et Sombart ont manifesté à ce
sujet, sinon leur adhésion, du moins
leur conviction et leur sympathie14.
Une « Grande
Allemagne » ou
une « Petite Europe »
germanique ?
■
À la suite du succès considérable du
livre de Naumann auprès de l’opinion
publique avertie qui souhaite la paix
– plus de 100 000 exemplaires vendus
en six mois et un format de poche
populaire lancé la même année –, des
passions paradoxales naissent dans les
cercles dirigeants et dans des associa-
Emmy & Stéphane Jonas
tions d’influence sociale, sur l’actualité
d’un projet continental restreint par
rapport à la Weltpolitik. En effet, la
politique mondiale du pouvoir wilhelminien avait, avant la guerre, abreuvé
les Allemands d’une propagande sur la
nécessité d’élever l’Allemagne au rang
de superpuissance. Pour simplifier, on
peut dire que le puissant complexe
militaro-industriel qui profite de l’économie de guerre, associé aux partis de
la droite traditionaliste pro-wilhelminienne, rejette le projet de Naumann.
« Les industriels allemands, observe
François Fejtö, politologue français
d’origine hongroise, craignaient que le
protectionnisme impliqué par le projet
de Naumann ne fermât à l’Allemagne
des débouchés sur le marché mondial
autrement plus importants que ceux
que pouvait offrir l’Europe centrale et
balkanique »15.
Certes, en cas de victoire allemande,
la perspective du maintien du con-
Friedrich Naumann et l'idée germanique de Mitteleuropa
trôle étatique de l’économie pendant
la période de transition qui suivrait
la Conférence de Paix était un calcul plausible, mais Naumann, que les
milieux politiques du Reich wilhelminien appellent aussi « l’impérialiste
démocrate » à cause de ses efforts pour
mondialiser la puissance économique
de l’Allemagne, rejette déjà en partie
ces accusations dans son ouvrage. Il
revient sur cette question dans son
introduction à l’édition française de
1916, en ces termes : « Toutefois, je
désire profiter de cette occasion pour
insister quelque peu sur deux fausses
conceptions de mon but et de mes
intentions, à savoir : que la diffusion de
la mentalité mitteleuropéenne serait
nuisible aux intérêts maritimes et coloniaux et que, d’après mon livre, l’unité
économique des puissances centrales
serait une idée née de dispositions
agressives à l’égard de l’Europe. La
première de ces opinions est plutôt
spécialement allemande et la seconde
est plutôt étrangère »16.
Une minorité d’industriels allemands soutient cependant le projet
de Naumann. C’est le cas de certains
parmi les plus puissants, tels que Robert
Bosch, Walther Rathenau (1867-1922)
et Peter Bruckmann (1805-1937) qui,
comme Naumann, pensent qu’une
union douanière et économique des
pays de l’Axe préserverait mieux l’Allemagne après la guerre, contre une
éventuelle « guerre économique » des
puissances occidentales17. Dans les
milieux politiques allemands, les cercles dirigeants sont influencés par les
forces conservatrices qui, suivant la
tradition bismarckienne de la « Petite
Allemagne » à direction prussienne,
victorieuse contre la « Grande Allemagne » autrichienne à Sadowa en 1866,
veulent une « Grande Allemagne »
dominante sur le continent, plutôt
qu’une « Petite Europe Centrale », qui
Klaus Jung, Le Rhin, 1985. 3 sculptures-maquettes en carton laqué. 250 x 120 x 50 cm. Collection Frac Alsace, Sélestat. © Droits réservés.
103
reviendrait à perdre une part d’énergie
pour aider la monarchie austro-hongroise, affaiblie par les questions des
nationalités et par une économie de
guerre ruineuse pour son industrie
moins développée.
Salomon Grumbach, le leader
social-démocrate alsacien, souligne
lui aussi, dans sa préface à l’édition
française, que l’influence de Naumann
est plus grande dans la bourgeoisie
industrielle et commerciale, et les journaux libéraux de gauche tels que la
Frankfurter Zeitung et le Berliner Tagblatt appuient avec sympathie le projet
et commentent largement les débats
des colloques scientifiques organisés à ce sujet par les cercles sociaux
universitaires. La sociologie est aussi
impliquée, puisque l’Association pour
la Politique Sociale fondée par le Professeur Gustav Schmoller – et dont
Max Weber, Sombart et Herckner faisaient partie – organise un grand débat
contradictoire international le 6 avril
1916, sur la question du rapprochement économique des deux monarchies de l’Axe18.
Double monarchie
et double leadership ?
■
Dans un chapitre consacré aux
questions constitutionnelles, Naumann est très clair en ce qui concerne
la nature de l’Union projetée : « On
doit donc parler de l’Europe centrale
comme d’une union d’États, pressentie
nécessaire, voire même indispensable ;
comme une confédération des peuples
de l’Europe moyenne »19. Néanmoins,
plusieurs compétences étatiques
devraient être centralisées et de nombreux foyers d’activité communs
devraient être créés dans l’espace ainsi
agrandi. Il s’agirait donc d’une confédération d’États indépendants. Les
particularismes locaux et régionaux
devraient être maintenus, ainsi que
l’instruction publique. L’administration intérieure et les franchises communales ne bougeraient pas. Les lois
régissant les rapports anciens entre les
représentations parlementaires et la
couronne seraient maintenues.
En quoi consisterait alors l’Union ?
Naumann est très prudent, mais à cette
étape, le nœud du rapprochement est
pour lui la question de « la distinction
à faire entre les États nationaux et
l’État économique et militaire envisagé »20. En clair : une alliance militaire
et une union économique, pour commencer. Les circonstances ultérieures
de la naissance de l’Union Européenne ont prouvé la justesse des vues de
Naumann sur les premiers pas à faire
pour rapprocher les superpuissances
du XXe siècle. Pour commencer, il
faudrait, selon Naumann, que l’économie et la défense commencent à
déborder des limites des États nationaux (le terme est de lui). La direction
commune d’une politique étrangère ne
poserait ensuite pas de problèmes. Sur
le plan des pays légaux, c’est donc le
principe du double leadership germanique qui est préconisé. Mais la réalité
de la guerre donne à l’époque le leadership principal à l’Allemagne. Cette
réalité ne facilite pas la tâche de Naumann qui est néanmoins catégorique :
si les puissances centrales ne veulent
pas l’Union de la Mitteleuropa, elles
se rendront séparément à la prochaine
Conférence de la Paix. Naumann prédit qu’en cas d’absence d’un projet
d’union, l’Autriche-Hongrie sera la
grande perdante et risquera ainsi de
disparaître. L’histoire a confirmé le
pressentiment de Naumann. Laissons
aux historiens le soin de trancher sur la
question que voici : une Mitteleuropa
constituée à la hâte aurait-elle pu sauver la monarchie austro-hongroise ?
Une approche de sociologie du conflit
permet peut-être d’affirmer que toute
tentative de sauvetage de cette monarchie était vouée à l’échec parce qu’elle
avait, pendant le demi-siècle de son
existence, été incapable de résoudre la
question des nationalités de son empire multinational et multiethnique.
Les débats politiques les plus passionnés animèrent les deux capitales
de la monarchie danubienne, Vienne
et Budapest, autour du paradigme
Grand État (Autriche-Hongrie) / Petite Europe (les deux empires de l’Axe)
posé par le livre de Naumann. Le clivage fondamental entre les courants
favorables et les opposants au projet
de Mitteleuropa ne séparait pas simplement les partis bourgeois de droite
et la social-démocratie de gauche, mais
104 Revue des Sciences Sociales, 2007, n° 37, « (Re)penser l’Europe »
traversait chaque camp en son sein. En
outre, chacune des nations composantes de la monarchie avait sa position
politique propre, en fonction de ses
intérêts nationaux. Naumann navigue
à l’époque avec habileté entre les deux
camps, mais il doit surtout prendre
en considération l’existence de deux
monarchies.
Les débats austro-hongrois sur le
concept de Mitteleuropa se compliquent aussi du fait qu’il existe déjà,
depuis les années 1850, une réflexion
autrichienne propre sur la nécessité de
créer une union économique et douanière entre les deux empires, réflexion
inaugurée par l’homme d’État précurseur Karl von Bruck. Ses représentants à l’époque de Naumann sont
le professeur libéral d’économie de
l’université de Vienne, Eugen Freiherr
von Philippovich (1858-1917), auteur
d’un ouvrage retentissant intitulé Une
union économique et douanière entre
l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie21,
et le social-démocrate Karl Renner
(1870-1950), une personnalité éminente de la majorité de son parti, partisan de l’union entre les deux empires
de l’Axe dès avant la guerre22. Karl
Renner, qui sera Chancelier d’État de
l’Autriche après la guerre (1918-1920),
défend, avec Viktor Adler, leader socialiste autrichien, la nécessité de l’union,
à la Conférence extraordinaire de la
SPD de Berlin, tout en « … condamnant une politique de force militaire
ou une politique d’expansion nationaliste »23. L’aile gauche et marxiste
orthodoxe du parti social-démocrate
autrichien condamne violemment
toute idée d’une union entre les deux
empires centraux, sous la plume de
l’économiste et théoricien Rudolf
Hilferding, dans un article important
publié en 1915 dans la revue socialiste
Der Kampf 24. Pour Hilferding, tout
rapprochement est à condamner du
moment qu’il sert avant tout la politique militaire et protectionniste de
l’Allemagne.
Plusieurs historiens notent que le
projet de Naumann est favorablement
accueilli dans les milieux progressistes
– radicaux et socialistes – de Hongrie,
où son livre est traduit dès 191625.
L’appui le plus précieux au projet de
Naumann vient du sociologue, écri-
Emmy & Stéphane Jonas
Friedrich Naumann et l'idée germanique de Mitteleuropa
vain et homme politique Oszkàr Jàszi
(1875-1957)26. Président du parti radical, Jàszi est convaincu que l’union
économique et douanière des deux
empires de l’Axe pourrait favoriser
la fédération danubienne dont il est
un fervent partisan27. L’adversaire
social-démocrate hongrois le plus
virulent sera l’homme de gauche Jenö
Varga, économiste bien connu qui,
dans la revue berlinoise Neue Zeit du
21 mai 1915, conclut ainsi son article :
« Du point de vue de la classe ouvrière on ne peut pas condamner chaque
pays qui s’efforce de créer une industrie
nationale. Si nous jugeons la question
de l’Union douanière avec l’Allemagne
de ce point de vue, la réponse de la classe ouvrière doit être négative… »28. Le «
protectionnisme de gauche » de Varga
deviendra, après la révolution russe de
1917, une position stalinienne de soutien inconditionnel au protectionnisme soviétique, régime totalitaire dont
il sera l’économiste chevronné. Deux
considérations déterminent l’adhésion
ou l’opposition au projet Naumann en
Autriche-Hongrie : l’alliance militaire
avec l’Allemagne qui se retournera
contre la monarchie austro-hongroise
dans les négociations avec les Alliés
dans une Conférence de la Paix à venir,
et le développement économique et
industriel de l’Allemagne, plus important que celui de son allié danubien,
et qui sera défavorable à ce dernier,
quelle que soit l’issue de la guerre,
c’est-à-dire même si les puissances de
l’Axe venaient à l’emporter.
Le projet Naumann,
l’Alsace et la France
■
La partie paradigmatique la plus
discutable du livre de Naumann concerne sans doute l’avenir qu’il prévoit
pour la France dans la stratégie des
superpuissances assises autour de la
table de négociation pour la paix. Bon
polémologue pourtant, il ne voit pas
encore clairement la stratégie du tiers
que jouent dans ce conflit les États-Unis
et le Président Wilson (qui rejoindront
les Alliés en 1917), non plus que la
place de la France au sein des Alliés, et
la politique de ces derniers sur l’avenir
de l’Alsace. Lui-même et les Nauman-
niens du parti libéral alsacien29 sont
pour le maintien de l’Alsace-Lorraine
dans l’Allemagne après la guerre, mais
avec un statut d’autonomie élargie. Ils
s’intéressent au projet de Mitteleuropa parce qu’il favorise la lutte pour
une meilleure représentation politique
des Alsaciens au sein de l’Empire. En
attendant, Naumann ne soulève pas
la question de l’Alsace-Lorraine dans
son ouvrage. En ce qui concerne la
France, il ne la voit pas comme une
future superpuissance mondiale au
sein des Alliés. Certes, il ne la range
pas non plus parmi les empires en
déclin tels que l’empire Ottoman, et il
sait que dans les négociations à venir
la France posera ses conditions. En la
négligeant dans l’analyse politique de
l’avenir proche, il essaie sans doute de
minimiser son rôle aux yeux de l’opinion publique.
Il semble cependant que cette erreur
d’analyse tienne plus du calcul politique que du jugement de valeur à proprement parler. La meilleure preuve en
est l’accord de Naumann sur le choix
de ses éditeurs français et suisses, qui
se porte sur la personne du leader
social-démocrate alsacien Salomon
Grumbach, comme analyste politique de son essai pour le présenter au
public francophone. « Salomon Grumbach, observe l’historien alsacien JeanClaude Richez, a été l’une des grandes
figures du socialisme alsacien. Son itinéraire personnel est à bien des égards
exemplaire de l’histoire mouvementée
du mouvement ouvrier alsacien qui
se développe au point de contact des
deux grandes traditions socialistes allemande et française »30. Écrivain, journaliste, homme politique issu d’une
famille juive de la région de Mulhouse,
Grumbach a joué un rôle décisif dans
l’adoption par les socialistes alsaciens
de la revendication d’une République
alsacienne à construire, dont il devient
le porte-drapeau dès 1908, et il restera
fidèle à ses engagements républicains
par la suite, lorsqu’il deviendra partisan du rattachement de l’Alsace à la
France. Pendant la guerre il est le correspondant de L’Humanité en Suisse,
et en 1915 il termine une brochure
dédiée au leader socialiste Jean Jaurès,
dans laquelle il prend position pour le
principe d’un plébiscite pour l’AlsaceLorraine31.
La préface de Grumbach est approfondie, critique et objective. Elle ne
sera pas analysée ici en détail, mais
après une présentation assez élogieuse
de la biographie de l’auteur, Grumbach souligne à propos de son livre
que « … la véritable source de son succès, c’est le fait que dans ce livre se
trouvaient cristallisées des centaines
et des centaines de pensées qui remplissaient depuis le 4 août 1914 plus
que jamais l’atmosphère politique des
deux monarchies centrales » (p. VI).
Grumbach voit bien que Naumann a
pour objectif politique de souligner la
nécessité de l’union économique, militaire et politique des deux puissances
centrales qui tiennent à rester de grandes puissances. Il observe que « presque
toutes les discussions sur Mitteleuropa
sont consacrées en première ligne, souvent exclusivement, à cette question :
l’union douanière entre l’Allemagne
et l’Autriche-Hongrie est-elle possible ? C’est devenu le véritable, voire
même le seul sujet du débat » (p. VII).
En présentant l’ouvrage comme une
analyse politique axée sur les questions
économiques, Grumbach gomme en
quelque sorte son intérêt en tant que
projet d’union des États centraux sans
leadership unique (allemand), favorisant ainsi les critiques, surtout celles
des sociaux-démocrates doctrinaires,
qui accusent Naumannn de proposer
aux pouvoirs centraux des idées et des
stratégies protectionnistes.
L’aspect le plus étonnant – et même
quelque peu déroutant – de la Préface
de Grumbach, c’est d’une part l’absence de critiques françaises et alsaciennes de la version allemande du livre
publié un an auparavant, et d’autre
part l’absence totale de la question
de l’Alsace-Lorraine dans ce volume.
Cela est sans doute voulu, mais même
maintenant, on ne voit pas le pourquoi
de cette façon de présenter l’ouvrage à
l’opinion française et/ou alsacienne.
Grumbach était un homme politique
socialiste trop averti pour penser que
le lecteur tomberait dans le piège de sa
seule note ajoutée à la fin de cette préface : « Nous croyons inutile d’ajouter
qu’il convient de faire toutes les réserves nécessaires au sujet des opinions
105
personnelles de Naumann touchant la
politique générale de l’Entente et celle
notamment de la France. Il suffit de
se rappeler que l’auteur est un Allemand écrivant pour les Allemands »
(p. XXVI). Nous pouvons supposer
que pour les socialistes français il
aurait sans doute été utile de présenter les thèses élaborées sur le concept
de Mitteleuropa par un leader libéraldémocrate allemand, de même que
leur critique exprimée surtout dans les
rangs sociaux-démocrates et libéraux
allemands et autrichiens, démocrates
libéraux qui seraient peut-être des
alliés après les négociations de paix.
On peut aussi spéculer sur la question
de savoir si en 1916 Grumbach avait
déjà fait son choix de rejoindre finalement la France.
Pour conclure, il faut réaffirmer
l’intérêt historique et l’actualité du
projet de Mitteleuropa que Naumann
a élaboré et présenté en1915. Pour le
soutenir, Naumann a révélé le courage
de l’homme politique et de l’homme
d’église en réclamant des négociations
de paix auprès des belligérants. En
pleine guerre mondiale, il a présenté
le projet d’une « Petite Europe » dont
les objectifs profonds étaient de créer
en Europe centrale une fédération
supranationale d’États, sous direction germanique certes – allemande et
autrichienne –, mais comprenant des
nationalités voisines multiples. Sur le
plan politique, il s’agissait aussi d’un
projet visant à maintenir l’ensemble
germanique au rang de superpuissance, afin qu’elle puisse rivaliser par
son espace et par sa masse avec les
autres superpuissances, disposant de
colonies importantes, et de surcroît
coalisées en tant qu’Alliés, lesquelles
semblaient déjà en 1916 devoir être
les futurs vainqueurs de la Première
Guerre Mondiale. En volant au secours
de la monarchie d’Autriche-Hongrie,
Naumann visait aussi à résoudre les
questions des nationalités et à contribuer ainsi à la naissance et à la survie
ultérieure de nouveaux États-Nations
en Europe. C’est pour nous aussi une
question d’actualité, depuis la chute du
Mur de Berlin et la décomposition des
systèmes totalitaires modernes.
Peut-on reprocher à Naumann de
raisonner, pour construire une fédération d’États indépendants en Europe
centrale, en termes de superpuissances ? L’Histoire lui a donné raison. Les
traités de Versailles et du Trianon ont
été négociés par les superpuissances
coloniales anciennes et établies : l’Angleterre et la France, alliées à celle qui
montait, les États-Unis d’Amérique
du Nord. Dans cette bataille – provisoire – des superpuissances dominantes, deux ont mordu la poussière
et ont disparu : la monarchie austrohongroise et l’empire ottoman. Une
troisième, en l’occurrence la Russie,
s’est transformée en un puissant système totalitaire.
Trente ans plus tard, et après à une
seconde guerre mondiale, le projet de
créer une Union Européenne a non
seulement resurgi, mais il est devenu
opérationnel, par un de ces renversements d’alliances dans le jeu des superpuissances dont les peuples européens
ont le secret.
Le pivot de cette construction initiale de l’Europe n’a pas été une « Petite
Europe » sous direction germanique,
comme l’avait rêvée Naumann, mais
une Petite Europe sous direction franco-germanique, entourée de petits
et grands États-Nations intéressés et
parti-prenants, comme il l’avait imaginée dans un autre contexte. Cette
Petite Europe devient, sous nos yeux,
une grande Union Européenne qui
présuppose l’accord des superpuissances anciennes et nouvelles, comme
l’avait vu Naumann trente ans plus
tôt. Naumann était non seulement un
grand visionnaire, mais aussi un grand
précurseur d’un « Nouvel Ordre », dans
une Europe dont la véritable réunification reste cependant à construire.
106 Revue des Sciences Sociales, 2007, n° 37, « (Re)penser l’Europe »
Notes
1. F. NAUMANN, Mitteleuropa , Georg Reimer Verlag, Berlin, 1915.
2. F. IGERSHEIM, L’Alsace des notables,
1870-1914, BF Editions, Strasbourg, 1981 ;
S. JONAS (Dir.), A. GERARD, M.N.
DENIS, F. WEIDMANN, Strasbourg,
capitale du Reichsland Alsace-Lorraine et
sa nouvelle Université, 1871-1918, Editions
Oberlin, Strasbourg, 1995 ; E. HEUSSKNAPP, Souvenirs d’une Allemande de
Strasbourg, 1881-1934, Editions Oberlin,
Strasbourg, 1996.
3. J. DROZ, L’Europe Centrale; évolution
historique de l’idée de „Mitteleuropa“, Editions Payot, Paris, 1960.
4. C. FRANTZ, Die deutsche Föderation,
Leipzig, 1851.
5. H.C. MEYER, Mitteleuropa in German
Thought and Action, La Haye, 1955.
6. Les chapitres de l’ouvrage se suivent ainsi:
1. La guerre en commun et ses conséquences ; 2. L’Europe centrale au cours de l’histoire ; 3. Confessions et nationalités ; 4. Le
peuple économique de l’Europe centrale ;
5. Problèmes économiques communs de
la guerre ; 6. Dans l’économie mondiale ;
7. Questions douanières ; 8. Questions
constitutionnelles ; 9. Notes statistiques
et historiques ; 10. Bibliographie.
7. Th. HEUSS, Friedrich Naumann. Der
Mann, das Werk, die Zeit, Siebenstern
Taschenbuch Verlag, München und
Hamburg, 1968 (3e édition); voir aussi la
notice biographique par S. Jonas in Strasbourg, capitale…, op.cit., p. 240-241.
8. F. NAUMANN, Demokratie und Kaisertum, Leipzig, 1900.
9. S. JONAS (Dir.), Les cités-jardins du Mitteleuropa, Editions Images Hongroises,
Budapest, 2002, (en français).
10. F. NAUMANN, Mitteleuropa, (1916),
op.cit., p.100.
11. Cité par J. DROZ, Europe centrale...,
op.cit., p. 20.
12. « La nation allemande est un peuple de
culture (Kulturvolk).La puissance est certes le but, mais elle est aussi condition du
rayonnement de la culture. Vis-à-vis des
générations à venir, l’Allemagne, en tant
que grande puissance, est responsable de
ce que sera la culture de l’humanité. »
(R. ARON, Les étapes de la pensée sociologique, Gallimard, Paris, 1967, p.645).
13. Entre l’édition allemande d’octobre 1915
et l’édition française de 1916, la Bulgarie a rejoint l’Axe. C’est pourquoi, dans
l’édition française figure une annexe conséquente de 80 pages sur le thème de la
Bulgarie et l’Europe centrale.
14. Il faut rappeler que tous les fondateurs
allemands – et français – de la sociologie
ont pris une position nationale pour sou-
Emmy & Stéphane Jonas
Friedrich Naumann et l'idée germanique de Mitteleuropa
tenir la guerre, parfois partiellement et
en la critiquant . Dans la bibliographie de
leurs publications, on parle pudiquement
à leur sujet « d’ouvrages de circonstance ».
15. F. FEJTÖ, Requiem pour un empire défunt ;
histoire de la destruction de l’AutricheHongrie, Lieu Commun, Paris, 1988,
p. 192.
16. F. NAUMANN, L’Europe Centrale (Mitteleuropa), Editions Delachaux et Niestlé,
S.A. Neuchâtel et Librairie Payot, Paris,
1916, p. 7.
17. J. DROZ, Europe centrale…, op.cit., p. 209
et 210.
18. F. NAUMANN, L’Europe centrale…,
op.cit., Préface de S. GRUMBACH,
p. XIII.
19. Idem, p. 232.
20. Idem, p. 249.
21. E. PHILIPPOVITCH, Ein Wirtschaftsund Zollverband zwischen Deutschland
und Oesterreich-Ungarn, Leipzig, 1915.
22. K. RENNER, Oesterreichs Erneuerung,
Wien, 1916.
23. S. GRUMBACH, Préface, in op.cit.,
p. XXII.
24. Idem, p. XXIII-XXIV.
25. F. NAUMANN, Középeuropa, Budapest,
1916, (traduit en hongrois par Madame
Andor Kintz).
26. K. IRINYI, A Naumann –féle Mitteleuropa
tervezet és a magyar politikai közvélemény,
(Le projet de Mitteleuropa de Naumann et
l’opinion publique politique hongroise),
Akademiai Kiado, Budapest, 1963.
27. O. JASZI, Magyarorszàg jövöje és a Dunai
Egyesült Allamok, (L’avenir de la Hongrie
et les États-Unis Danubiens), Budapest
1918.
28. S. GRUMBACH, Préface, in op.cit.,
p. XXIII.
29. En 1907, le nouveau parti libéral démocrate compte 24 groupes en Alsace, avec
environ 9.000 adhérents. Mais il est constitué de deux tendances ; l’aile gauche naumannienne est dirigée par le Président
alsacien Georg Wolf (1871-1951), et affiliée au Parti Progressiste allemand fondé
par Naumann ; l’aile droite est dirigée par
le Vice-président vieil-allemand Fritz van
Calker, professeur d’université, et affiliée
au Parti National-libéral .
30. Voir la notice biographique de J. C. RICHEZ
sur S. Grumbach, in J. C. RICHEZ,
L. STRAUSS, F. IGERSHEIM, S. JONAS,
Jacques Peirotes et le socialisme en Alsace,
1869-1935, BF Editions, Strasbourg, 1989,
p. 97-101.
31. S.GRUMBACH, Le destin de l’AlsaceLorraine, discours d’un socialiste à deux
nations, Neuchâtel, 1915.
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