Moins cher, l`autocar fait son retour sur les routes

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Moins cher, l`autocar fait son retour sur les routes
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France
Ouest-France
Mardi 6 octobre 2015
Moins cher, l’autocar fait son retour sur les routes
Depuis cet été, les compagnies de cars ont le droit de concurrencer la SNCF en proposant des trajets
longue distance dans toute la France. Nous sommes montés à bord d’un Brest-Nantes, un lundi matin.
« C’est vrai,
je gêne un peu… »
Habitué d’un autre réseau, Isilines,
en direction de Bordeaux et Grenoble, Robin avoue juste une petite
déception. Il ne trouve pas, près de
son siège, les prises électriques promises par le transporteur. Elles sont
pourtant bien là. Au-dessus de sa
tête, dans la galerie porte-bagages.
À 8 h 09, avec cinq minutes
d’avance sur l’horaire, première halte,
zone commerciale de Gourvily, à
Quimper. L’arrivée est un peu chaotique… Pour se garer, l’autocar doit
monter sur un trottoir, en sortie de giratoire. Le conducteur du bus urbain
qui suit envoie un coup de klaxon,
pas forcément un salut confraternel…
« C’est vrai, je gêne un peu… avoue
Pierre, notre chauffeur, on recherche
des arrêts plus adaptés dans quelques villes. »
À la porte, voici Jean-Michel, un jovial restaurateur ardennais, retraité. Il
arrive de sa résidence secondaire de
Plogoff. Il a acheté son billet sur Inter-
Jean-Laurent BRAS.
Thomas Brégardis
Porte de Gouesnou, au nord-ouest
de Brest, terminus d’une ligne de
tramway, à deux pas de la zone industrielle et commerciale de Kergaradec et des rocades de contournement de l’agglomération. Un véritable carrefour urbain. Starshipper
l’a choisie comme gare de départ et
d’arrivée de ses cars long-courrier à
la pointe bretonne.
Il est 7 h. Pour ne pas faire mentir
Prévert, il pleut sur Brest. Pas dramatique. L’aire de covoiturage, un parking gratuit, est à quelques mètres
du car, garé devant un abri de bus.
Pierre, le chauffeur, accueille ses
premiers passagers. Emma, 15 ans,
voyage seule. Élève en seconde année d’école de coiffure à Lorient, elle
y passe la semaine. « L’an dernier,
le lundi matin, je devais prendre
le train de 5 h 30, c’est tôt ! Avec,
en plus, un changement à Quimper, souffle-t-elle, 7 h 15, c’est bien
mieux… »
Robin, futur informaticien, et son
amie Florence, future infirmière, sont
tous deux étudiants à Nantes. « En
train, avec la carte jeune, nous
payons 80 € l’aller-retour, ici, c’est
20 €. » Si l’argument prix a dicté leur
net, mais ne peut le présenter : « Je
n’ai pas d’imprimante… » Pas de
problème, son nom figure bien sur le
listing du chauffeur.
Jean-Michel, chargé de bagages
et d’une caisse à outils, part, via
Nantes, pour Bordeaux, où il va voir
sa fille. « De chez moi, je prends
souvent l’avion de Ryanair Charleroi-Bordeaux, à 19,90 €, puisque je
réserve bien à l’avance. Même pas
deux heures de vol. » Pour QuimperBordeaux par autocar, ce sera 20 €
et une dizaine d’heures. Jean-Michel
a tout son temps.
Malgré des embarras de circulation
à hauteur de Lorient et de Vannes, le
car, parti de Brest à 7 h 15, se présente devant la station de tram François-Mitterrand à Saint-Herblain, aux
portes de Nantes, à 11 h 15. Ponctuel.
La correspondance pour Bordeaux
est à 12 h 30. Plus d’une heure à
« tuer ». Trop court pour faire un saut
à Nantes, trop long pour attendre sur
un quai de gare routière… Le premier resto, un marocain, est à dix
minutes de marche. « Mais il fait un
bon couscous à 13,50 € », glisse le
chauffeur, qu’il suffit de suivre.
choix, ce n’est pas le seul : « Dans le
car, on a plus de place et on profite
de la WiFi. » Pas de service à bord,
mais la compagnie offre des bouteilles d’eau fraîche.
La compagnie Starshipper a ouvert, début septembre, des lignes entre Brest, Rennes, Nantes et Bordeaux.
Cinq compagnies tissent leur toile dans l’Hexagone
Ils s’appellent Isilines, Flixbus, Megabus, Ouibus ou encore Starshipper.
Depuis l’été et l’adoption de la loi Macron « pour la croissance, l’activité et
l’égalité des chances », ces autocaristes français, allemand et écossais
sillonnent les routes de France.
Le marché, jusque-là strictement
réglementé pour ne pas concurrencer la SNCF, permet désormais aux
compagnies d’autocars d’effectuer
des liaisons longue distance de plus
de 100 kilomètres, entre les grandes
villes.
Et cette nouvelle offre pourrait séduire, car elle s’avère plus économique que le train ou même le covoiturage.
Les opérateurs n’hésitent pas, pour
l’instant, à proposer des prix réduits.
Ainsi, un voyage entre Brest et Bordeaux, le 14 octobre, coûte 9 € en autocar, 41 € en covoiturage et à partir
de 53 € en train. En contrepartie, il
faut être patient, un trajet en car est
souvent plus long.
Réseau de lignes par autocar longue distance
ROYAUME-UNI
Lille
DANEMARK
POLOGNE
AUTRICHE
ALLEMAGNE
Paris
Caen
Strasbourg
Rennes
Départs
et arrivées
par jour
Nantes
Plus de 150
SUISSE
Lyon
Bordeaux
ITALIE
De 30 et 150
Moins de 30
Toulouse
Marseille
O.-F.
Au détriment du train ?
D’ici à la fin de l’année, une cinquantaine de lignes devraient voir le jour
et jusqu’à deux cents, fin 2016. Dans
un premier temps, 2 000 à 3 000 emplois directs seront créés, promet le
ministre de l’Économie. Il espère plus
de 5 millions de passagers en 2016.
BELGIQUE/PAYS-BAS
PORTUGAL
ESPAGNE
Mais la mesure est loin de ravir tout
le monde. Les Régions, qui financent
en partie les TER, voient d’un mauvais œil cette concurrence directe.
Sources : ministère de l’Économie
SNCF Ouibus
Elle risque en effet de faire baisser
la fréquentation des trains régionaux.
La SNCF a d’ailleurs lancé Ouibus,
sa compagnie d’autocars, qui ef-
Des autocaristes très courtisés
fectue des liaisons déjà existantes en
train.
« Pour lancer notre offre, nous
avons regardé les analyses de flux,
les données de la téléphonie mobile
et les données de covoiturage », indique Roland de Barbentane, directeur général de Ouibus. Résultat :
des liaisons entre 46 villes françaises
et européennes d’ici à janvier. Le
Havre est connecté à Paris depuis
hier, Caen le sera le 16 novembre.
D’autres suivront. Un espoir pour un
Ouibus Quimper-Nantes-Bordeaux,
pour l’instant absent de l’offre, alors
que la SNCF remet en cause son
train Intercités sur le même axe.
IDbus, qui a servi de laboratoire,
possédait ses autocars. Ouibus, son
successeur, a fait le choix de passer
par des transporteurs locaux (80 %
de son offre). « Nous nous sommes
rendu compte que nous serions
plus réactifs et plus abordables en
sous-traitant », explique Roland de
Barbentane. Ouibus, dont le réseau
est le plus étendu, a vendu près de
25 000 tickets à 5 €. À l’avenir, le
billet se vendra entre 9 € et 20-30 €
selon la date d’achat. Un niveau de
prix que les cinq compagnies semblent vouloir tenir.
Toinon DEBENNE
et Even VALLERIE.
de lignes. Ceux qui s’étaient préparés ont pu lancer leurs lignes.
Les autres doivent acheter des autocars. Trois cents véhicules ont
déjà été commandés pour les lignes Macron. Ça part très fort.
Entretien
Michel Seyt,
président
de la Fédération
nationale
des transports
de voyageurs.
DR
Reportage
Les PME du transport par
autocar sont très sollicitées…
Oui, une partie des opérateurs des
lignes nationales vont en effet solliciter les petites et moyennes entreprises pour qu’elles travaillent avec
eux. C’est plutôt une bonne chose,
cela va apporter du chiffre d’affaires.
Ouibus (SNCF) sous-traite
beaucoup de lignes. Que vont
faire les autres ?
Transdev ouvre des lignes avec ses
propres cars. Mais je pense que
beaucoup d’opérateurs vont soustraiter. Il y aura aussi des initiatives
des PME. Réunir, réseau de PME, a
déjà créé Starshipper pour proposer
des trajets dans toute la France…
Quelle est l’ampleur
du phénomène ?
Actuellement, il y a déjà une centaine
Combien de temps pour arriver
à maturité ?
Il faut également recruter des
conducteurs. La montée en puissance va donc prendre douze à dixhuit mois. Il a fallu 24 à 36 mois en
Allemagne et en Grande-Bretagne
pour avoir un réseau abouti.
Des billets à 5 €, 10 €… La guerre
des prix va continuer ?
Pour faire sa place, chacun va faire
des promotions, comme un supermarché qui ouvre. Il y a même un
opérateur qui affiche des billets à
1 €. Cela ne durera pas, mais les prix
n’iront pas plus haut que 30 €-40 €.
Le transport par autocar, c’est
plus polluant que par le train…
La pollution ? Ce n’est pas sérieux.
La loi a exigé des autocars à la nouvelle norme Euro6 d’ici à 2017. Et on
ne peut pas dire à la fois que Blablacar et le covoiturage, c’est génial, et
critiquer les autocars Macron.
Recueilli par E. V.
La France en bref
L’accident s’est produit hier, vers
13 h, à Trélivan, à quelques kilomètres de Dinan (Côtes-d’Armor). Sur
une route départementale en ligne
droite, une Citroën C3 et un poids
lourd se sont percutés de face. Les
deux occupants de la voiture sont dé-
cédés sur le coup. Les victimes sont
Marcelle Lebreton, âgée de 67 ans,
et son époux Bernard, 74 ans. Le
couple résidait au Hinglé. Le chauffeur du camion, indemne physiquement, est très choqué.
AFP
Deux surveillants agressés à la prison d’Alençon
Le ministre de l’Intérieur s’est déplacé, hier, sur les lieux du braquage.
Deux hommes ont attaqué un entrepôt de livraison de bijoux, hier vers
9 h, à Saint-Ouen, en banlieue parisienne. Puis, ils se sont enfuis à bord
d’une fourgonnette blanche. Ils ont
été pris en chasse par des policiers.
À l’Île-Saint-Denis, ils ont été coincés
dans les embouteillages. Le braqueur
qui conduisait s’est rendu. Mais son
passager a brandi une arme et a tiré
plusieurs fois. Les policiers ont riposté. Un policier de 36 ans, atteint
d’une balle dans la tête, est « hos-
pitalisé dans un état désespéré », a
indiqué le ministère de l’Intérieur. Le
malfaiteur, blessé à une jambe et au
dos, est décédé dans l’après-midi.
Cet homme de 24 ans était connu
pour des vols à main armée et des
violences volontaires. Il était en cavale depuis son évasion, en mai, de
la prison de Réau (Seine-et-Marne). Il
se serait « radicalisé en prison ». Il fait
l’objet de deux fiches de recherches
émises par la Direction générale de
la sécurité intérieure.
Depuis son ouverture, en 2013, la prison d’Alençon-Condé dans l’Orne
(105 détenus condamnés à de longues peines, pour 205 surveillants),
la plus sécurisée de France, a connu
de nombreux épisodes de violences.
Dernier en date, l’agression de deux
surveillants, samedi, par un détenu
placé à l’isolement. Coup de poing
au visage pour l’un, stylo écrasé sur
le crâne pour le second. Le syndicat
Force Ouvrière pénitentiaire réclame
une « expérimentation » en équipant
de pistolets à choc électrique les
agents qui travaillent dans les quartiers d’isolement et disciplinaire. Ainsi que le droit d’utiliser le port d’aérosol au poivre, « comme cela se pratique dans d’autres prisons ».
20 % des collégiens changent d’établissement
Au cours de sa scolarité, un élève sur
cinq change de collège. Ce transfert
est le plus souvent provoqué par un
déménagement de la famille, mais
aussi en raison de l’insatisfaction des
parents (manque de discipline et de
sécurité dans l’établissement, niveau
scolaire trop faible ou trop élevé).
Autre motif avancé : l’enseignement
d’options qui n’étaient pas proposées
dans le collège d’origine. C’est le cas
pour 16 % des enfants d’enseignants
contre 8 % dans les autres catégories
sociales. La proportion d’élèves qui
changent est plus élevée dans le privé (23 %) que dans le public (19 %).
La mobilité monte à 30 % pour les familles monoparentales. Ces chiffres
proviennent d’une étude réalisée par
le ministère de l’Éducation concernant la scolarité des jeunes entrés en
sixième en 2007.
Crédit photo : Philippe Grangeaud, Parti socialiste
Accident de la route : un couple décède près de Dinan
Bijoux : le braqueur tué se serait radicalisé en prison
Aujourd’hui, mardi 6 octobre à 8 h 30
Laurent Baumel
Député PS d’Indre-et-Loire
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