Coloriage codé sur les unités d`aire

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Coloriage codé sur les unités d`aire
Université Lumière Lyon 2
Institut des Sciences et Pratiques d’Education et de Formation
Licence Sciences de l’Education
Didactique des Mathématiques :
Analyse d’une situation de perfectionnement
au calcul en CM2:
Coloriage codé sur les unités d’aire
Enseignante : Karine ROBINAULT
n°2058487
Année 2005-2006
n°2021785
Estelle DEFAIX
Audrey DEHANT
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Introduction
Pour notre étude, nous avons souhaité nous baser sur une activité ludique de
mathématiques afin d’apprécier l’impact de ce type d’exercices. Pour cela, nous avons
rencontré une enseignante de CM2 qui accorde beaucoup d’importance au jeu et à
l’imaginaire dans ses choix didactiques. Ainsi, nous avons été particulièrement intéressées
par le principe des coloriages codés pour le perfectionnement au calcul que la classe réalise
afin d’effectuer le bilan sur la notion des unités d’aire.
(Activité extraite du fichier « Perfectionnement au calcul CM, Coloriages codés » de
Philippe Yvrard, édition MDI, 2004)
I.
Présentation de la situation analysée
a. Les objectifs d’enseignement mathématiques
L’objectif principal visé par l’enseignante est d’améliorer le savoir-faire des élèves
concernant la conversion des unités d’aire, compétence évaluée préalablement. D’autre
part, elle souhaite par ce biais récapituler différentes notions étudiées au cours de
l’année, permettant ainsi de dresser un bilan global de ces acquis.
Cette activité offre également une nouvelle approche par son caractère ludique en
jouant sur leur motivation, dans le cadre d’une pédagogie différenciée ; en effet, elle peut
choisir de donner ou de ne pas donner l’aide proposée par le fichier. De plus, chaque élève
travaille à son rythme.
b. Les pré-requis
L’activité nécessite l’acquisition d’un certain nombre de notions :
•• au niveau de la numération et du calcul, l’élève doit maîtriser :
♣ Les calculs numériques : addition, soustraction, multiplication et
priorités dans les calculs linéaires (multiplication avant addition ou
soustraction)
♣
Les opérations décimales (notamment ici la multiplication)
♣ Les fractions décimales
•• au niveau des mesures :
♣ Les mesures de longueurs avec des virgules
♣ Les aires et leur conversion : convertir dans une unité donnée, chercher
l’unité, décomposer et recomposer des unités
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•• au niveau de l’utilisation de tableaux : (voir annexe 1 p. 10)
♣ Manipulation d’un tableau de numération (avec déplacement de la
virgule)
♣
Manipulation d’un tableau de conversion d’unités de mesures : de
longueurs, puis d’aires
c. La place de la
l’enseignement
situation
dans
l’organisation
générale
de
♦ Le concept de « contrat de travail » :
Cette « activité-bilan » est incluse dans ce que l’enseignante nomme le « contrat des
élèves ». Ce dernier a été mis en place depuis le début de l’année pour développer
l’autonomie et la responsabilité des élèves afin de les préparer au passage en 6ème. Il
consiste à proposer des activités individuelles que chaque élève effectue lorsque le travail
obligatoire est achevé. Dans ce contrat figure également des activités de lecture et
d’écriture. Cela permet de gérer les différences de rythme dans la classe.
A chaque fin de chapitre, un de ces coloriages codés est réalisé comme bilan. Plus on
avance dans le programme, plus ces exercices se complexifient en reprenant des
connaissances acquises précédemment.
Celui que nous avons choisi intervient donc pour clore le travail fait sur les aires.
♦ Position de l’activité dans le chapitre sur les aires :
Le chapitre sur les aires a été abordé de la manière suivante :
•• Tout d’abord, la classe établit un récapitulatif de la notion d’aire déjà abordée en
CM1 : séquence intitulée « Qu’est-ce qu’une aire ? » qui invite les élèves à une
réflexion sur les conceptions qu’ils peuvent avoir sur ce sujet, pour les amener aux
représentations mathématiques. Exemple : deux figures de formes différentes
peuvent avoir la même aire, deux figures de même périmètre peuvent avoir des aires
différentes, …
•• Puis, l’enseignante leur a proposé une série de situations-problèmes afin d’introduire
le calcul d’aire.
•• Ensuite, la classe a institutionnalisé cette notion par l’apprentissage de formules
(aire du rectangle et du carré).
•• A la suite de cela, les élèves ont réalisé des problèmes de différents types pour
mettre en pratique les formules.
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•• La progression s’est poursuivie avec le travail sur les conversions :
♣ mise en évidence concrète, à partir de la construction en groupe d’un carré de
1dm2 de côté, que 1 dm2 = 100 cm2 ;
♣ apprentissage de l’utilisation d’un tableau de conversion d’aires ;
♣ exercices d’application pour faciliter la manipulation des conversions.
•• Evaluation sommative portant sur tout le chapitre : unités de mesures, calculs
d’aires, résolution de problèmes.
•• Révision sous forme de coloriages codés.
Ainsi cette activité placée en fin de chapitre constitue à la fois une remédiation
pour les élèves ayant rencontré des difficultés lors de l’évaluation et un entraînement pour
que les connaissances acquises restent disponibles.
(Tableau de progression du programme en annexe 2, page 11)
II. Analyse de la situation
a. Type de problème :
♦ Fonction didactique :
Nous ne sommes pas ici dans le cas d’une situation-problème, cette activité ayant
plutôt une fonction de réinvestissement des connaissances. En effet, il ne s’agit pas
d’aborder une notion nouvelle mais de permettre une utilisation directe des connaissances
acquises préalablement, tout en mobilisant plusieurs notions mathématiques travaillées au
cours de l’année.
Concernant le nouveau savoir-faire, la conversion des aires, il est renforcé par cet
exercice de perfectionnement. Selon les théories béhavioristes, il s’agit d’un entraînement
systématique pour automatiser ce « comportement » nouveau. Les béhavioristes parlent de
récompense pour renforcer un comportement : ici, la réalisation du coloriage peut tenir lieu
de récompense et de motivation, les élèves étant poussés par l’envie d’obtenir un dessin
pertinent et éprouvant de la satisfaction à contempler leur réalisation achevée.
♦ Forme générale :
L’hyper-structure de l’exercice se rapproche d’une page de coloriage. Une abondance
d’informations visuelles y figurent (légende, dessin représentatif, opérations), dont de
nombreuses données numériques. Cette forme peut être déroutante car les élèves sont
plutôt habitués à des problèmes plus classiques où les informations sont données
majoritairement sous forme de textes, comportant une série de questions posées dans un
ordre précis. Les élèves peuvent donc ne pas savoir par quel calcul commencer et ainsi
perdre du temps.
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Toutefois, la classe de Mme Caine est déjà familiarisée avec cette catégorie
d’ « exercices-bilans ». De plus, l’exercice évoque une activité familière aux élèves, le
coloriage étant un jeu pratiqué par les enfants, ce qui peut constituer un élément
rassurant. La question qui suit le coloriage peut être perçue comme une « mini-énigme » par
l’élève.
b. Phases de la situation didactique
Même si on se trouve dans une phase d’entraînement et de réinvestissement et non
dans une situation-problème, on peut repérer les différentes phases relatives à une
situation-problème car l’élève manipule seul les savoirs :
♦ Phase d’action :
Les éléments visuels permettent à l’élève d’avoir un contrôle sur la situation. En
effet, ils constituent dans certains cas des indications : le ciel doit être bleu, les buissons
verts foncés… Cela peut l’amener à modifier son action en refaisant ses calculs. Mais
quelques pièges se sont glissés dans le paysage !
Pendant cette phase, les élèves s’approprient le problème en investissant à la fois
leurs connaissances nouvelles (les unités d’aire) et anciennes (opérations numériques,
nombres décimaux, fractions décimales,…). Ils élaborent à partir de cela des procédures
de calcul dans le but de réussir la tâche.
La phase de déstabilisation intervenant à ce moment dans une situation-problème n’a
normalement pas lieu d’être, la forme de l’énoncé étant connue et les notions ayant été
étudiées.
♦ Phase de formulation :
L’exercice ne réclame aucune justification des procédures de la part des élèves.
D’autre part, ils travaillent de façon individuelle ce qui ne les amène pas à argumenter leurs
résultats entre eux.
♦ Phase de validation :
L’élève peut se convaincre de la validité de ses réponses dans cette activité. En
effet, il n’y a que 6 réponses possibles :
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Si le résultat d’un calcul ne correspond pas à l’une d’elles, l’élève pourra rechercher
son erreur. Cependant, il ne pourra pas contrôler ses résultats s’il se trompe entre deux
des solutions proposées.
♦ Phase d’institutionnalisation :
L’enseignante peut éventuellement revenir pour la classe entière sur certains points
des notions mises en jeu dans l’activité si des erreurs reviennent fréquemment afin de
consolider les connaissances. Elle pourra le cas échéant mettre en place un dispositif de
remédiation.
c. Les variables didactiques
Certains éléments ont une influence sur les procédures utilisables par les élèves et
sur les erreurs qu’ils peuvent faire.
Les variables par rapport à certains éléments de l’activité sont les suivantes :
Ö Choix des calculs proposés : ici, ils font intervenir différentes logiques de
résolution car l’élève passe d’une procédure à une autre. Exemple : conversion
puis addition, calcul avec des fractions décimales, …
Ö Les nombres en jeu : les solutions ne comportent qu’un chiffre non nul (4 ou
40). Ce choix obligera l’élève à tenir compte de l’unité d’aire en ne se fiant pas
uniquement aux nombres, mais l’empêchera certainement de rencontrer des
difficultés de calculs. Ainsi, l’accent est mis sur les conversions.
Ö Choix d’intégrer des pièges : les résultats des calculs obtenus vont parfois en
contradiction avec les indices visuels (ex : buissons à colorier en bleu) ce qui
oblige les élèves à ne pas se fier qu’au paysage.
Ö Tous les calculs ont une solution (on aurait pu choisir de laisser des cases
blanches).
Ö Il n’y a pas de rapport entre la surface à colorier et le résultat : les solutions
sont donc abstraites.
Ö Présentation de l’exercice sous forme de coloriage.
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Les variables par rapport à la situation d’enseignement sont :
Ö La mise à disposition de certains outils : le tableau de conversion créé en
classe par les élèves est conseillé par l’enseignante pour effectuer les calculs
(voir annexe 1). En effet, elle n’a pas choisi de donner le tableau « Aide » joint
à l’activité, le trouvant peu pertinent. La calculatrice n’est pas autorisée afin
d’entraîner les élèves aux calculs.
Ö Le temps accordé pour réaliser l’activité : pour cet exercice, Mme Caine laisse
chaque élève travailler à son rythme.
Ö Le travail est réalisé individuellement et favorise la recherche autonome.
Toutefois, l’enseignante guide parfois les élèves en les avertissant de certains
pièges.
d. Les aspects liés au contrat didactique
L’élève se donne parfois des exigences par rapport à la situation d’enseignement qui
peuvent l’induire en erreur :
♣ Le coloriage une fois terminé doit correspondre à quelque chose de figuratif
dans la réalité.
♣ La surface à colorier est proportionnelle au résultat trouvé comme l’exercice
porte sur les aires.
♣ Le coloriage doit être régulier. Exemple : bandes de couleur régulières dans le
champ.
♣ On devrait trouver le même nombre de cases de chaque couleur (certains
peuvent être tentés de rajouter une couleur dans des cases qui ne correspondent
pas, la trouvant minoritaire).
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III. Analyse de la situation par les élèves
(voir l’activité achevée en annexe 3, p.12)
a. Procédures pouvant être utilisées par les élèves
Les élèves peuvent engagés plusieurs types de procédures pour réaliser les calculs
proposés.
•• Procédures mathématiques :
♣ Calcul mental,
♣ Calcul linéaire,
♣ Calcul posé en colonne,
♣ Calcul à l’aide d’un tableau.
Quant à l’ordre des calculs, l’élève peut procéder par analogie (réaliser tous les
calculs comportant une multiplication, puis ceux comportant une fraction, ….) ou alors de
façon aléatoire (de proche en proche).
Dans un même calcul, l’élève doit par ailleurs penser aux priorités : on convertit
avant de calculer, on multiplie avant d’additionner, …
•• Procédures intuitives : les élèves peuvent trouver le bon résultat en
mobilisant d’autres procédures, c’est-à-dire en se référant aux indices visuels.
Certains ne vont ainsi pas faire tous les calculs.
b. Analyse des activités des élèves
Nous avons observé les activités en cours de réalisation afin de comprendre les
procédures de résolution des élèves.
Généralement, les procédures intuitives priment sur les procédures mathématiques.
La plupart des enfants s’aident des indices visuels pour débuter l’activité : en effet, ils
commencent presque tous par colorier les cases représentant le ciel en bleu et les nuages
en gris. Ces procédures fonctionnant dans la plupart des cas, certains calculs ne sont pas
traités par les élèves. Cependant, s’ils se référent trop à ces indices visuels, ils peuvent
tomber dans les pièges de l’exercice sans que ce soit dû à des erreurs mathématiques.
Nous avons par exemple demandé à certains élèves ayant colorié le buisson - censé être
bleu - en vert foncé de réaliser ce calcul hors contexte : nous nous sommes aperçues qu’ils
trouvaient le bon résultat. Seul un élève a osé colorier ce buisson en bleu, après avoir
beaucoup hésité.
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D’autre part, une grande majorité se laisse emporter par l’aspect esthétique du
coloriage en cherchant une régularité (certains ont cherché à obtenir des bandes
régulières de couleur, et un élève a même imaginé une rivière au milieu du champ !). Ainsi,
s’ils trouvent le même résultat pour 2 cases côte à côte, ils ont tendance à colorier toute la
ligne de la même couleur sans réaliser les calculs.
Par contre, le visuel n’est pas que source d’erreurs, car certains se corrigent même
grâce à ces repères visuels : ils constituent un moyen d’autocorrection. Par exemple, une
élève avait colorié une case du ciel en vert. Ne trouvant pas cette situation logique, elle a
refait son calcul, doutant de sa validité, et a donc pu se corriger seule.
Remarque : Même si l’enseignante n’a pas accès aux détails des calculs, elle peut parfois
comprendre le raisonnement des élèves, les étapes et erreurs par lesquelles ils sont
passés, car on devine sous la couleur finalement choisie les couleurs sélectionnées en
premier lieu puis gommées.
Exemple :
On aperçoit la couleur marron sous le bleu : on peut donc supposer que le premier
raisonnement de l'élève a été que : 2 × 20 mm2 = 40 mm2 = 4 cm2 en oubliant que 1 cm2 =
100 mm2, donc que pour passer d'une unité d'aire à l'autre il faut décaler la virgule de 2
rangs. Puis, s'aidant des indices visuels (ciel = bleu) et voyant qu'un des résultats proposés
était 40 mm2, il a dû rectifier son erreur en choisissant le bleu.
Difficultés mathématiques rencontrées :
♣ Dans la manipulation du tableau : les élèves n’ont pas toujours le réflexe de
placer les nombres correctement dans les colonnes (deux colonnes par unités
d’aire, chiffre des unités dans la colonne de droite de l'unité d’aire), ce qui induit
des erreurs entre deux solutions consécutives. De plus, certains effectuent les
multiplications directement dans le tableau alors qu’il n’est prévu que pour les
additions et les soustractions (l’aide proposée dans le fichier ne spécifie pas qu’il
ne fonctionne pas avec les multiplications et les divisions).
♣ Dans le déplacement de la virgule et les puissances de 10 lors des calculs.
Les erreurs de calcul sont majoritairement évitées car les solutions proposées
contiennent toujours le même chiffre « 4 ».
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IV. Limites de cet exercice et améliorations éventuelles
9 Un dessin plus abstrait permettrait d’éviter que les élèves se basent excessivement
sur l’aspect esthétique de l’activité et ne fassent trop appel aux représentations de
la réalité ;
9 Nous trouvons que le choix des solutions pourrait être complexifié pour une classe
de CM2 en proposant, par exemple, des résultats à 2 ou 3 chiffres non nuls et moins
similaires ;
9 La question finale n’apporte rien de plus à la réflexion mathématiques. Elle renvoie
simplement à une situation de jeu connue des enfants. En observant les fiches des
élèves, nous avons d’ailleurs constaté que certaines comportent plusieurs erreurs et
que pour autant la réponse est correcte. De plus, la question ne permet pas de savoir
où se trouve l’erreur de l’élève et celui-ci n’a pas de moyen de validation. Par ailleurs,
le rapprochement entre le « blé » et la couleur jaune conforte l’élève dans ses
représentations figées de la réalité ;
9 Il n’y a pas de mise en situation des opérations proposées. Si bien qu’il n’est pas
possible d’évaluer la capacité de l’élève à réinvestir la notion d’aire dans une situation
concrète. La question finale serait l’occasion de mettre en application cette
connaissance dans le cadre d’un problème. Celui-ci pourrait par exemple faire
intervenir dans son énoncé une question requérant une réflexion mathématique et se
rapportant au champ colorié, afin d’établir un lien avec l’activité ludique de
coloriage ;
9 On pourrait apporter quelques modifications à l’aide fournie par le fichier : elle
devrait préciser que ce tableau fonctionne uniquement pour les additions et les
soustractions. En outre, associer chaque colonne à une couleur peut être source
d’erreur : comment les élèves réagiraient-ils si les résultats comportaient plusieurs
chiffres non nuls ?
9 Enfin pour varier l’approche de ce type d’activités il serait intéressant que les élèves
confrontent leur point de vue sur les procédures les plus efficaces, en petits
groupes ou dans le cadre d’un « mini-débat » avec toute la classe.
Conclusion
Nous avons pu apprécier, à travers cette situation, les apports et limites de ce type
d’exercices.
L’activité stimule la motivation des élèves : ils activent ainsi leurs connaissances
mathématiques par le jeu, ce qui rend l’exercice moins contraignant.
D’un autre côté, ce coloriage codé se résumant à la résolution d’une série de calculs,
il est nécessaire d’effectuer en parallèle d’autres types de problèmes, afin de s’assurer de
la capacité des élèves à réinvestir leurs connaissances dans des situations plus concrètes.
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Annexe 1
Tableau de numération
centaines
dizaines
unités
dixièmes
centièmes
millièmes
milliers
Exemple : placer 350,005 dans le tableau.
3
5
0
0
0
5
Tableau de conversion d’unités d’aire
Exemple : convertir 16000 dm2 en dam2.
km2
hm2
dam2
m2
1
6
dm2
0
0
cm2
mm2
0
1,6 dam2
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Annexe 2
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