logement campinas

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MINI-DOSSIER SUR LE BRÉSIL
Intégration locale des réfugiés
au Brésil
Julia Bertino Moreira et Rosana Baeninger
L’intégration locale est un processus économique,
politique, social et culturel complexe.
dans le programme d’assistance du gouvernement (Paquet
familial) et 11% recevaient un soutien financier de l’UNHCR.
En octobre 2009, il y avait 4 131 réfugiés de 72 nationalités
différentes vivant au Brésil. Parmi eux 3 833 étaient arrivés
‘spontanément’, dont presque la moitié à travers ses
propres réseaux, et 418 avaient été réinstallés par le biais
du programme brésilien, coordonné par le Comité national
pour les réfugiés (CONARE) avec le soutien de l’UNHCR. Le
groupe national le plus important vient d’Angola (1 688) et
le deuxième, par ordre d’importance, de Colombie (598).
Pour s’intégrer avec succès, les réfugiés ont besoin d’un emploi,
de compétences linguistiques et d’un accès aux services publics
ainsi que de droits et d’obligations civiques, ils doivent aussi
pouvoir participer à la politique et établir des relations avec la
communauté dans laquelle ils se trouvent. Les activités pour
faciliter l’intégration locale sont principalement mises en place
par des organisations de la société civile, même si l’UNHCR
et le gouvernement y prennent également part. A Sao Paulo et
Rio de Janeiro, Caritas Arquidiocesana aide les demandeurs
d’asile récemment arrivés dans le pays ainsi que les réfugiés
qui vivent au Brésil depuis déjà longtemps. Les demandeurs
d’asile peuvent recevoir un soutien financier de l’UNHCR
pendant six mois au maximum. Les institutions religieuses leur
fournissent une assistance légale et pratique. Elles travaillent
avec des partenaires (y compris provenant du secteur privé)
pour apporter un soutien légal pendant la période du processus
de détermination du statut de réfugié, donner des cours de
portugais, une formation professionnelle, de la nourriture et
des soins dentaires. Le Brésil compte sur le soutien du plus
gros réseau d’aide aux réfugiés en Amérique Latine, avec
presque une centaine d’organisations locales impliquées.
Réinstallation
De part ses programmes actifs de réinstallation de réfugiés,
le Brésil est considéré comme un pays de réinstallation
‘émergeant’. Le premier programme était le Programme de
solidarité pour la réinstallation, établi en 1999 en accord
avec l’UNHCR pour installer des réfugiés qui étaient encore
persécutés ou risquaient la persécution, ou encore qui ne
réussissaient pas à s’adapter à leur premier pays d’asile.
Le deuxième programme est le Programme régional de
réinstallation, proposé par le gouvernement brésilien en
2004, dans le but de protéger des réfugiés qui fuient la
persécution et les conflits en Amérique Latine et aussi
pour aider des pays qui reçoivent des Colombiens en
nombres importants comme le Costa Rica et l’Equateur.
Le pays ne fixe pas de quotas annuels pour la réinstallation
des réfugiés, pas même par nationalité, CONARE a désigné
deux groupes vulnérables comme prioritaires : les réfugiés
sans protection légale ou physique, et les femmes en danger.
En 2005, le programme brésilien de réinstallation a mis en
place une procédure d’urgence novatrice pour les réfugiés
en danger immédiat, selon laquelle ces réfugiés peuvent voir
leur demande examinée dans les 72 heures, et si l’asile leur
est accordé ils peuvent être réinstallés dans les sept jours.
CONARE est également responsable de l’analyse des demandes
d’asile et de la formulation des politiques publiques pour
les réfugiés qui vivent dans le pays. Le comité organise des
réunions des agences gouvernementales, des organisations de
la société civile avec l’UNHCR qui a le droit de participer aux
discussions mais n’a pas de droit de vote. CONARE estime
que 30% des demandeurs sont reconnus comme étant des
réfugiés, un taux comparable aux niveaux internationaux.
Parmi les décisions d’éligibilité se trouve incluse la persécution
due au sexe, et une attention toute particulière est portée
aux enfants et aux autres groupes vulnérables en danger.
Intégration locale
Un projet de recherche récent1 a interrogé les familles des
réfugiés qui sont arrivés ‘spontanément’ et qui vivaient à Rio
de Janeiro et Sao Paulo en 2007. La plupart des réfugiés avait
atteint le pays par l’intermédiaire de réseaux sociaux. En effet
25,1% d’entre eux avaient un parent et 23,3% un ami, vivant déjà
au Brésil. En termes d’intégration au marché du travail, 54,4%
des réfugiés travaillaient, même si plus de la moitié d’entre eux
n’avait qu’un emploi de type informel. Seuls 2,8% étaient inclus
En général, les réfugiés bénéficient des services sociaux –
comme l’éducation et les soins de santé – qui sont fournis
par le gouvernement brésilien au niveau fédéral, des états
et des municipalités. Néanmoins, il existe un petit nombre
de services spécifiques créés pour répondre aux besoins
particuliers des réfugiés : un programme spécial de soins
de santé mentale financé avec le soutien de CONARE,
des logements publics pour les réfugiés qui vivent à Sao
Paulo, et des bourses d’études offertes par les Universités
fédérales de Minas Gerais et celle de Juiz de Fora.
En 2007, le gouvernement fédéral a commencé à contribuer
au soutien financier attribué par l’UNHCR pour les réfugiés
qui vivent au Brésil, allouant pratiquement 350 000 $US à
CONARE, qui a transféré ces fonds à Caritas. Caritas et ses
partenaires ont non seulement fourni un soutien financier
aux réfugiés réinstallés mais les ont également aidés à trouver
des emplois et des logements. Malgré tout, même après dix
ans de programmes de réinstallation, des défis persistent,
particulièrement en ce qui concerne l’autosuffisance des réfugiés.
Les défis
Ce sont le manque d’emploi et de logement et la discrimination
qui constituent les obstacles les plus déterminants à l’intégration
sociale et économique des réfugiés au Brésil. Notre recherche a
montré que les réfugiés ne sont pas satisfaits de leurs conditions
de travail et de salaire. Ils trouvent l’accès aux services
publics de base difficile, particulièrement en ce qui concerne
la santé et le logement. Et finalement, ils considèrent qu’ils
font l’objet d’une discrimination de la part de la population
locale. La société brésilienne ne sait pas précisément ce qu’est
un réfugié et le perçoit fréquemment comme un ‘fugitif’ qui
cherche à échapper à la justice, ce qui rend son intégration
sociale et au marché du travail encore plus difficile.
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Pour faciliter l’intégration au niveau local, et afin de couvrir
les besoins particuliers des réfugiés, des ressources financières
supplémentaires sont nécessaires pour soutenir la mise en
œuvre de politiques spécifiques aux réfugiés. L’établissement
de nouvelles institutions telles que le Comité pour les réfugiés
de Sao Paulo, le Comité pour les réfugiés de Rio de Janeiro et
le Comité municipal pour les immigrants et les réfugiés de
Sao Paulo est source d’espoir. Toutes ces institutions comptent
sur une participation de la société civile et ont pour but de
formuler et mettre en œuvre des politiques publiques en faveur
des réfugiés et des autres immigrants qui vivent au Brésil.
Toutefois, la décision de mettre en pratique des politiques
spécifiques aux réfugiés est controversée à cause du potentiel
de disputes avec la communauté locale. L’inclusion des
réfugiés dans les programmes d’assistance gouvernementale
(comme les paquets familiaux) ainsi que la mise en
œuvre de politiques spécifiques en leur faveur, pourraient
susciter des réactions hostiles de la part de la population
locale. Il est essentiel que ces programmes bénéficient
à la fois aux réfugiés et à la communauté d’accueil.
Afin de surmonter les attitudes discriminatoires envers les
réfugiés, des programmes d’éducation et d’information sont
nécessaires pour renforcer la sensibilisation sur le statut des
réfugiés et leur situation au Brésil. La campagne de santé
développée par l’UNHCR en partenariat avec l’ONG locale Ação
Comunitária no Brasil dans le bidonville Complexo da Maré de
Rio de Janeiro est un bon exemple de ce type de programmes.
La sensibilisation était effectuée par le biais du théâtre en
présentant une pièce jouée par des réfugiés angolais et de jeunes
Brésiliens. Les efforts de ce type sont déterminants parce qu’ils
renforcent les relations sociales des réfugiés avec la population
locale, une composante vitale pour une intégration locale réussie.
Julia Bertino Moreira ([email protected]) est
étudiante en doctorat à l’Université de Campinas et assistante
de recherche du projet ‘Conditions de vie de la population
réfugiée au Brésil’, elle a également suivi des cours au
Centre d’études sur les réfugiés en 2010. Rosana Baeninger
([email protected]) enseigne dans le Département
de démographie de l’Université de Campinas et coordonne le
projet ‘Conditions de vie de la population réfugiée au Brésil’.
1. ‘Conditions de vie de la population réfugiée au Brésil’, Centre d’études sur la
population, Université de Campinas (NEPO/UNICAMP) en partenariat avec l’UNHCR
et Caritas São Paulo et Rio de Janeiro, avec le soutien financier du Secrétaire spécial aux
droits de l’homme du Gouvernement Fédéral du Brésil.
UNHCR/V Graziano
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MINI-DOSSIER SUR LE BRÉSIL
Luis Eduardo Garzón, un réfugié colombien réinstallé, présente ses créations artisanales à la
foire nationale annuelle des petits exploitants de Brasilia. Brésil, 2007.