PLAIDOYER POUR LE CAT-CAM.

Transcription

PLAIDOYER POUR LE CAT-CAM.
UNIVERSITÉ DE FRANCHE-COMTE
FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BESANCON
ANNÉE 1994 - N094-99
AMPUTATION DE CUISSE CHEZ L'ALDULTE ACTIF :
PLAIDOYER POUR LE CAT-CAM.
A propos de huit observations.
THÈSE
présentée et soutenue publiquement
le 17 Novembre 1994
pour obtenir le Diplôme d'Etat de
DOCTEUR EN MÉDECINE
PAR
Marie-Noëlle CAILLEUX
Née le 30 Décembre 1964 à Besançon (25)
Examinateurs de la Thèse :
Président
:
M. ONIMUS
Professeur
Juges :
S.SCHRAUB
Professeur
G. MONNIER
Professeur
D. WENDLING
Professeur
B.PARRATTE
Praticien Hospitalier
P.MARGUET
Praticien Hospitalier
Invité d'honneur :
P.BOTTA
Prothésiste
UNIVERSITE DE FRANCHE-COMTE
FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DE
BESANÇON
Doyen
Assesseurs Médecine
Professeur Gabriel CAMELOT
Professeur Alain DEPIERRE
Professeur Jean-Yves CAHN
Professeur Jean-Pierre CARBILLET
Professeur Dominique FELLMANN
Docteur Gilles DUMOULIN
Assesseurs Pharmacie
Professeur Jean-François ROBERT
Professeur Christiane GUINCHARD
Chef des Services Administratifs
Mlle Gilberte GENEVOIS
Doyens Honoraires:
Professeurs Honoraires:
M. le Professeur P. LAUGIER
M. le Recteur P. MAGNIN
M. le Professeur L. COTTE
M. le Professeur J. BERTHELAY
M. le Professeur P. GRANDMOTTET
M. le Professeur P. GILLE
M. le Professeur H. GISSELBRECHT
M. le Professeur M. GUIDET
M. le Professeur A. OPPERMANN
M. le Professeur G. PAGEAUT
M. le Professeur J. ROYER
M. le Professeur R. STEIMLE
Directeur Honoraire:
M. le Professeur P. MILLERET
Directeurs Honoraires de l'U.E.R.B.E.M.:
M. le Professeur C. BUGNON
M. le Professeur J.P. MAURAT
MEDECINE
PROFESSEURS
M. Gérard ADESSI
M. Pierre AGACHE
M.Hubert ALLEMAND
M. Didier AUBERT
M. François BARALE
M. Jean-Pierre BASSAND
BIOCHIMIE - BIOLOGIE MOLECULAIRE
DERMATOLOGIE
EPIDEMIOLOGIE, ECONOMIE DE LA SANTE ET
PREVENTION
CHIRURGIE INFANTILE
ANESTHESIOLOGIE ET REANIMATION CHIRURGICALE
CARDIOLOGIE ET MALADIES VASCULAIRES
M. Pierre BECHTEL
Mlle Yvette BERNARD
Mme Suzanne BERTHELAY
M. Roland BIDET
M. Michel BITTARD
M. Paul BIZOUARD
M. Jean-François BONNEVILLE
M. Jean-François BOSSET
M. Jean-Luc BRESSON
REPRODUCTION
M. Jean-Yves CAHN
M. Gabriel CAMELOT
M. Pierre CARAYON
M. Jean-Pierre CARBILLET
PHARMACOLOGIE CLINIQUE
CARDIOLOGIE
PHYSIOLOGIE
BIOPHYSIQUE
UROLOGIE
PEDOPSYCHIATRIE
RADIOLOGIE
RADIOTHERAPIE
BIOLOGIE DU DEVELOPPEMENT ET DE LA
HEMATOLOGIE
CHIRURGIE VASCULAIRE
GASTROENTEROLOGIE
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
SEPTEMBRE 1994-1
M. Jean-Claude CARDOT
M. Jean-Claude CHOBAUT
M. Claude COLETTE
M. Joël COMBE
M. Louis COTTE
M. Alain CZORNY
M. Jean-Charles DALPHIN
M. Bernard DELBOSC
M. Alain DEPIERRE
M. Jean-Louis DUPOND
M. Henri DUVERNOY
M. Joseph ETIEVENT
M. Dominique FELLMANN
M. Jacques GUYOT
M. Jean-Charles HENRY
M. Patrick HERVE
M. Philippe HUMBERT
Mme Bernadette KANTELIP
M. Jean-Pierre KANTELIP
M. Bruno KASTLER
M. Michel LAB
M. René LAURENT
Mme Danièle LENYS
M. Robert MAILLET
M. Georges MANTION
M. Jacques MASSOL
M. Alain MENGET
M. Yvon MICHEL BRIAND
M. Jean-Philippe MIGUET
M. Guy MONNIER
M. Michel MONTARD
Mme Christiane MOUGIN
M. Georges NARBONI
M. Alain NEIDHARDT
M. André NOIR
M. Michel ONIMUS
M. Jacques REGNARD
M. Bernard RICBOURG
M. Lucien RUMBACH
M. Yves SAINT-HILLIER
M. Simon SCHRAUB
M. Daniel SECHTER
Mme Christiane TEYSSIER-COTTE
M. Yves TROPET
ESTHETIQUE,
M. Philippe VICHARD
M. Jean-François VIEL
Mme Dominique VUITTON
M. Daniel WENDLING
BIOPHYSIQUE
OTO-RHINO-LARYNGOLOGIE
GYNECOLOGIE ET OBSTETRIQUE
CHIRURGIE VASCULAIRE
MEDECINE LEGALE
NEURO-CHIRURGIE
PNEUMOLOGIE
OPHTALMOLOGIE
PNEUMOLOGIE
MEDECINE INTERNE
ANATOMIE
CHIRURGIE THORACIQUE ET CARDIOVASCULAIRE
HISTOLOGIE, EMBRYOLOGIE, CYTOGENETIQUE
ANATOMIE
BIOCHIMIE BIOLOGIE MOLECULAIRE
HEMATOLOGIE
DERMATOLOGIE
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
PHARMACOLOGIE FONDAMENTALE
RADIOLOGIE
BACTERIOLOGIE, VIROLOGIE
DERMATOLOGIE
HISTOLOGIE EMBRYOLOGIE, CYTOGENETIQUE
GYNECOLOGIE ET OBSTETRIQUE
CHIRURGIE GENERALE
THERAPEUTIQUE
PEDIATRIE
BACTERIOLOGIE, VIROLOGIE
HEPATOLOGIE
ANATOMIE
OPHTALMOLOGIE
BIOLOGIE CELLULAIRE
ENDOCRINOLOGIE ET MALADIES METABOLIQUES
ANESTHESIOLOGIE ET REANIMATION CHIRURGICALE
PEDIATRIE
CHIRURGIE INFANTILE
PHYSIOLOGIE
STOMATOLOGIE ET CHIRURGIE MAXILLO-FACIALE
NEUROLOGIE
NEPHROLOGIE
CANCEROLOGIE
PSYCHIATRIE DADULTES
MEDECINE DU TRAVAIL
CHIRURGIE PLASTIQUE, RECONSTRUCTIVE ET
CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE ET TRAUMATOLOGIQUE
BIOSTATISTIQUES ET INFORMATIQUE MÉDICALE
IMMUNOLOGIE
RHUMATOLOGIE
SEMPTEMBRE 1994- 2
PROFESSEURS ÉMÉRITES
M. Claude BUGNON
M. Pierre GRANDMOTTET
M. Jean-Claude LAFON
M. Robert LECONTE DES FLORIS
M. Jean-Pierre MAURAT
M. André PETERS
M. André RAFFI
M. Robert VOLMAT
M. Francis WEILL
HISTOLOGIE, EMBRYOLOGIE, CYTOGENETIQUE
THERAPEUTIQUE
OTO-RHINO-LARYNGOLOGIE (PHONIATRE)
HEMATOLOGIE
CARDIOLOGIE
HÉMATOLOGIE
PEDIATRIE
PSYCHIATRIE DADULTES
RADIOLOGIE
PROFESSEURS RATTACHÉS
Mme Claude BENABDELJIL (Rabat)
M. Michel GILLET (Lausanne)
M. André ROTH (Genève)
BIOCHIMIE
CHIRURGIE DIGESTIVE
OPHTALMOLOGIE
MAÎTRES DE CONFÉRENCES
M. Patrick ARVEUX
Mme Thérèse BARALE
Mme Yvette BECHTEL
Mme Martine BENEDINI
Mme Annie BIDET
Mlle Claude BILLEREY
Mme Annie BOILLOT
Mlle Marie-Claire CLAVEQUIN
M. Alain COAQUETTE
M. Benoit CYPRIANI
M. Gilles DUMOULIN
Mme Marie-Jeanne DUPONT
M. Roger GIBEY
Mme Andrée GOUGET
Mme Jacqueline GUICHARD
M. Jacky MAS
Mme Elisabeth MONNET
PREVENTION
M. Christian MOUSSARD
Mme Monique NEIDHARDT
M. Uhen NGUYEN NHU
M. Alfred PENFORNIS
M. Patrick PLESIAT
Mme Evelyne RACADOT
Mme Elisabeth RANFAING
M. Christophe ROUX
M. Daniel TALON
M. Pierre TIBERGHIIEN
M. Jean-Pierre WOLF
CANCEROLOGIE
PARASITOLOGIE
PHARMACOLOGIE CLINIQUE
BIOCHIMIE, BIOLOGIE MOLECULAIRE
BIOPHYSIQUE
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
ANESTHESIOLOGIE ET REANIMATION CHIRURGICALE
HISTOLOGIE, EMBRYOLOGIE, CYTOGENETIQUE
BACTERIOLOGIE - VIROLOGIE
BIOCHIMIE - BIOLOGIE MOLÉCULAIRE
PHYSIOLOGIE
BACTERIOLOGIE VIROLOGIE
BIOCHIMIE, BIOLOGIE MOLECULAIRE
HISTOLOGIE, EMBRYOLOGIE, CYTOGENETIQUE
AUDIOPHONOLOGIE
BIOPHYSIQUE
EPIDEMIOLOGIE, ECONOMIE DE LA SANTE,
BIOCHIMIE, BIOLOGIE MOLECULAIRE
ANESTHESIOLOGIE ET REANIMATION CHIRURGICALE
PHYSIOLOGIE
THERAPEUTIQUE
BACTERIOLOGIE, VIROLOGIE
HEMATOLOGIE
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
HISTOLOGIE, EMBRYOLOGIE, CYTOGENETIQUE
BACTERIOLOGIE, VIROLOGIE
IMMUNOLOGIE
PHYSIOLOGIE
SEPTEMBRE 1994- 3
MAÎTRE DE CONFÉRENCES ASSOCIÉ
M. Jean-Pierre GAUME
MEDECINE GENERALE
ASSISTANT DES DISCIPLINES MÉDICALES
Mme Maryse HADJIYIASSEMIS
HISTOLOGIE - EMBRYOLOGIE – CYTOGENETIQUE
PROFESSEUR AGRÉGÉ DU SECOND DEGRÉ
Mme Sandra
CHAVIN ANGLAIS
PROFESSEUR ASSOCIÉ À TEMPS PARTIEL
Mme Frédérique ROUSSEY
ANGLAIS
SEPTEMBRE 1994- 4
PHARMACIE
PROFESSEURS
M. Michel BAUD
M. Alain BERTHELOT
Mme Françoise BEVALOT
M. Jean-Pierre CHAUMONT
Mme Edwige DAUBROSSE
Mlle Christiane GUINCHARD
M. Alain JACQUESON
Mlle Mariette MERCIER
M. Dominique MEILLET
Mme Joëlle MILLET
Mme Lysiane RICHERT
M. Jean-François ROBERT
M. Jean-Charles ROULAND
Mme Estelle SEILLES
M. Pierre TRAN BA LOC
Mlle Jacqueline VAQUETTE
M. Alain XICLUNA
BIOPHYSIQUE ET INFORMATIQUE
PHYSIOLOGIE PHARMACEUTIQUE
PHARMACOGNOSIE
BOTANIQUE ET CRYPTOGAMIE
BIOCHIMIE PHARMACEUTIQUE
CHIMIE ANALYTIQUE ET BROMATOLOGIE
TOXICOLOGIE
BIOMATHEMATIQUES ET BIOSTATISTIQUES
PHARMACEUTIQUES
PARASITOLOGIE
PHARMACIE GALENIQUE
BIOLOGIE CELLULAIRE
CHIMIE ORGANIQUE, CHIMIE THERAPEUTIQUE
CHIMIE PHYSIQUE ET CHIMIE MINERALE
IMMUNOLOGIE (BACTERIOLOGIE VIROLOGIE)
BIOLOGIE CELLULAIRE, PARASITOLOGIE
PHARMACOGNOSIE
CHIMIE ORGANIQUE, CHIMIE THERAPEUTIQUE
PROFESSEUR ÉMÉRITE
M. Jacques PANOUSE
CHIMIE ORGANIQUE, CHIMIE THERAPEUTIQUE
MAÎTRES DE CONFÉRENCES
Mme Nicole CARDOT
M. Jean-Patrick DASPET
Mme Véronique DAVID
M. Pascal LAURANT
M. Safwat MAKKI
Mlle Claire MOLÉ
M. Jean-Louis MOZER
M. Frédéric MUYARD
Mme Laurence NICOD
M. Bernard REFOUVELET
Mlle Mariane SANDOZ
M. Joël SIMBRAY
M. Tong TRUONG THANH
Mme Christine ZHIRI
TOXICOLOGIE
BIOPHYSIQUE ET INFORMATIQUE
PHARMACODYNAMIE
PHYSIOLOGIE PHARMACEUTIQUE
PHARMACIE GALÉNIQUE
IMMUNOLOGIE (BACTERIOLOGIE VIROLOGIE)
BIOCHIMIE PHARMACEUTIQUE
PHARMACOGNOSIE
BIOLOGIE CELLULAIRE
CHIMIE THERAPEUTIQUE
PHARMACODYNAMIE
BOTANIQUE ET CRYPTOGAMIE
CHIMIE ANALYTIQUE ET BROMATOLOGIE
BIOMATHEMATIQUES ET BIOSTATISTIQUES
PHARMACEUTIQUES
ASSISTANT
M. Alain CARACOTCH
PHARMACIE GALENIQUE
SEPTEMBRE 1994- 5
A NOTRE MAITRE ET PRESIDENT DE THESE
Monsieur le Professeur Michel ONIMUS
Professeur de Chirurgie Infantile
Nous le remercions de l'honneur qu'il nous fait en acceptant de présider notre jury.
Nous connaissons ses grandes qualités professionnelles et humaines.
En témoignage de notre respectueuse reconnaissance.
A NOTRE MAITRE ET JUGE
Monsieur le Professeur Simon SCHRAUB
Professeur de Cancérologie
Il nous fait l'honneur d'être de nos juges.
Nous le remercions pour le réconfort qu'il a toujours su nous témoigner dans les
moments difficiles.
Qu'il soit assuré de notre profonde gratitude.
A NOTRE MAITRE ET JUGE
Monsieur le Professeur Guy MONNIER
Professeur d'Anatomie
Qui a accepté très spontanément de faire partie de notre jury.
Nous le remercions de son enseignement et lui sommes très reconnaissant de bien
vouloir porter intérêt à ce travail.
A NOTRE MAITRE ET JUGE
Monsieur le Professeur Daniel WENDLING
Professeur de Rhumatologie
Il nous a accueilli dans son service avec bienveillance.
Nous avons pu apprécier la qualité de son enseignement et sa très grande compétence.
Qu'il trouve ici l'expression de notre sincère reconnaissance.
A NOTRE JUGE
Monsieur le Docteur Bernard PARRATTE
Praticien Hospitalier (Explorations Fonctionnelles du Système NeuroMusculaire)
Il a su encourager et porter intérêt à ce travail.
Nous avons pu apprécier l'étendue de ses connaissances, sa disponibilité et ses grandes
qualités humaines.
Qu'il en soit vivement remercié.
A NOTRE JUGE
Monsieur le Docteur Philippe MARGUET
Praticien Hospitalier (Urgences - CHG de Pontarlier)
Nous sommes heureux de le compter parmi nos juges.
Nous l'assurons de notre fidèle amitié.
A NOTRE INVITE D'HONNEUR
Monsieur Pierre BOTTA
Prothésiste
Nous lui sommes très reconnaissant de l'aide qu'il nous a apporté à l'élaboration de ce
travail.
Nous admirons ses qualités humaines ainsi que sa très grande compétence.
Qu'il trouve ici l'expression de notre respectueuse amitié.
A tous ceux qui ont contribué un jour à notre éducation et formation de médecin,
Au service de Pédiatrie du Centre Hospitalier Général de Lons-le-Saunier,
Au service de Rhumatologie du Centre Hospitalier Régional de Besançon.
Je dédie cette thèse.
A la mémoire de mon père,
Je dédie cette thèse.
A Maman,
Avec tout mon amour.
Je dédie cette thèse.
A mon frère Jean-François,
Pour son aide précieuse.
A mes frères et soeurs,
A ma famille,
Je dédie cette thèse.
A Monsieur le Docteur LABOURET,
Avec ma reconnaissance.
A ma classe de Terminale DI,
Pour son soutien dans les moments difficiles.
A Sandrine et Philippe,
A Isabella,
A Jacqueline et Michel,
En témoignage de ma profonde amitié.
A Nathalie,
Qui a dactylographié cette thèse avec efficacité et dévouement.
Qu'elle en soit vivement remerciée.
A tous mes amis.
Je dédie cette thèse.
SERMENT D'HIPPOCRATE
EN PRESENCE DES MAITRES DE CETTE ECOLE, DE MES
CHERS CONDISCIPLES, JE PROMETS ET JE JURE AU NOM DE
L'ETRE SUPREME, D 'ETRE FIDELE AUX LOIS DE L’HONNEUR
ET DE LA PROBITE DANS L'EXERCICE DE LA MEDECINE.
JE DONNERAI MES SOINS GRATUITS A L’INDIGENT, ET
N'EXIGERAI JAMAIS UN SALAIRE A AU DESSUS DE MON
TRAVAIL. ADMIS DANS L'INTERIEUR DES MAISONS, MES
YEUX NE VERRONT PAS CE QUI S’Y PASSE, MA LANGUE
TAIRA LES SECRETS QUI ME SONT CONFIES, ET MON ETAT NE
SERVIRA PAS A CORROMPRE LES MOEURS, NI A FAVORISER
LE CRIME.
RESPECTUEUX ET RECONNAISSANT ENVERS MES
MAITRES, JE RENDRAI A LEURS ENFANTS L'INSTRUCTION
QUE JAI REÇUE DE LEURS PERES.
QUE LES HOMMES M'ACCORDENT LEUR ESTIME SI JE
SUIS FIDELE A MES PROMESSES !
QUE JE SOIS COUVERT D'OPPROBRE ET MEPRISÉ DE MES
CONFRERES SI J’Y MANQUE.
1
PLAN
INTRODUCTION
HISTORIQUE
L'AMPUTATION, UN CONSTAT D'ECHEC ?
UNE CHIRURGIE POUR UN MEILLEUR APPAREILLAGE
LA MARCHE HUMAINE, UNE ACQUISITION INESTIMABLE
AMPUTATION DE CUISSE CHEZ L'ADULTE JEUNE, QUELLE
EMBOITURE PROPOSER ?
L'INFLUENCE DE L'APPAREILLAGE SUR LA READAPTATION
FONCTIONNELLE
DONNEES PERSONNELLES
ANALYSE DE NOS OBSERVATIONS ET CONFRONTATION AUX
DONNEES DE LA LITTERATURE
CONCLUSION
ANNEXE1
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES
2
INTRODUCTION
3
I. INTRODUCTION :
L'appareillage prothétique des membres inférieurs connaît en cette fin
de XXe siècle une évolution décisive.
S'il est hélas impossible de redonner sa jambe à l'amputé, il convient
de souligner les efforts de recherche de certaines équipes de réadaptation,
pour améliorer la qualité de vie de leurs patients, laquelle dépend étroitement
des aspects biomécaniques et bioénergétiques de l'appareillage.
Chez l'adulte actif, amputé de cuisse, l'appareillage le plus prescrit en
France est l'emboîture "contact" quadrilatérale, qui fait appel à une technique
élaborée il y a plus de 30 ans (2).
Depuis une dizaine d'années, il existe une emboîture, mise au point
aux Etats-Unis par John SABOLICH et son équipe (38), appelée CAT-CAM
(Contoured Adducted Trochanteric-Controlled Alignment Method). Cette
technique, très peu connue en France, présenterait, selon ses partisans, des
qualités physiologiques et fonctionnelles tout à fait éminentes.
4
Le but de notre étude est de contribuer à la réflexion sur les qualités
de cette emboîture par rapport à la quadrilatérale, en posant la question de
savoir si l'impression subjective de confort, soulignée par les patients
équipés en CAT-CAM que nous avons interrogés, s'accompagne d'une
amélioration réelle de leurs performances de marche et peut faire l'objet
d'une justification scientifique.
5
HISTORIQUE
6
7
Il. HISTORIQUE:
"Avant de connaître les possibilités d'appareillage qui s'offrent à eux,
certains amputés de membre inférieur pensent qu'ils vont recevoir un
appareil extrêmement perfectionné, confortable et esthétique, issu de la
technologie de la fin du XXe siècle ; d'autres, par ailleurs, craignent d'être
irrémédiablement dépendants d'une chaise roulante" (25).
Si, aujourd'hui, il est donné à l'amputé la possibilité de se mouvoir plus
facilement, il n'en a pas toujours été ainsi.
11.1. DE L'APPAREILLAGE DE FORTUNE A L'APPAREILLAGE
EVOLUE:
Parce qu'il avait perdu le pouvoir de marcher, l'homme amputé d'un
membre inférieur eut sans doute recours autrefois à des bâtons ordinaires
sur lesquels il s'appuyait, modifiés par la suite en béquilles (terme introduit
vers 1611).
Il existait probablement, depuis fort longtemps, des prothèses de
fabrication artisanale : l'esprit ingénieux de l'être humain a toujours cherché à
pallier les manques.
8
Mais ce fut certainement Ambroise PARE, qui mit au point le premier
une prothèse de cuisse, reproductible à une plus grande échelle.
" La jambe des pauvres", construite en bois, était fort rudimentaire.
Par souci d'esthétique, Ambroise PARE conçut des prothèses plus
complexes, revêtues d'une armature métallique qui dissimulait un pilon
articulé, réservées aux riches. Mais le poids considérable la rendait
finalement moins fonctionnelle que "la jambe des pauvres".
De la jambe d'Ambroise PARE naquit le cuissard à pilon dont le
principe est resté en vigueur jusqu'au début du XXe siècle. Constitué d'un
cône creux en bois à sommet inférieur, le cuissard à pilon est équipé à sa
partie proximale d'un bourrelet permettant à la tubérosité ischiatique et au
trochanter de s'appuyer. Une ceinture est nécessaire au maintien de la
prothèse (Figures 1 à 3).
Figure 1 : Cuissard à pilon
Figure 2 : "Jambe des pauvres" d'Ambroise PARE (33)
Figure 3 : Jambe des riches
9
La notion d'appui ischiatique se développa durant la guerre de 14 -18,
tragédie où l'appareillage connut -par nécessité-un grand essor. L'appui
ischiatique devint même prépondérant et on négligea l'appui circonférentiel.
Quant à un appui terminal, considéré comme impossible à moins d'une
désarticulation de genou, il a été écarté totalement.
Parallèlement à l'évolution des formes d'emboîtures, les mécanismes
de genou et de pied furent perfectionnés, les maîtres en ce domaine étant
les Allemands : l'homme, amputé, retrouvait un certain schéma de la marche
humaine.
Les progrès ultérieurs se développèrent dans tous les domaines, les
plus remarquables étant une nouvelle conception d'emboîture et l'emploi de
matériaux plus légers. Ainsi, on a supprimé les moyens de suspension des
prothèses (baudrier ou ceinture), peu esthétiques, par la création
d'emboîtures à "contact total" et à ventouse, assurant l'herméticité. Les
matériaux tels que des résines de polyester ont également apporté un plus
en diminuant, de façon appréciable, le poids des appareils (33).
Le désir d'une reconstitution fonctionnelle la plus physiologique
possible conduit aujourd'hui à la fabrication d'articulations artificielles
complexes, qui, sans pouvoir rivaliser avec les caractéristiques anatomiques
d'un membre sain, permettent à l'amputé de compenser en partie la perte
des éléments indispensables à la marche normale.
10
Longtemps laissée pour compte, l'esthétique commence à être prise
en considération. Loin des enjeux de fonctionnalité ou de confort physique,
c'est l'étape finale de la fabrication d'une prothèse, parce que l'habillage de la
prothèse à l'image de la jambe saine permet sans aucun doute une meilleure
intégration psychologique du membre artificiel, l'esthétique a les mêmes
priorités que l'aspect fonctionnel au regard de l'utilisateur (Photos 1 à 4).
11.2. L'EMBOITURE, UN ELEMENT PRIMORDIAL :
11.2.1. Ses fonctions :
L'emboîture est cependant la partie essentielle de la prothèse. Elle est
destinée à recevoir le moignon, à permettre son appui sur la prothèse ainsi
que la fixation de cette dernière au moignon. C'est par son intermédiaire que
le moignon anime la prothèse, et ce d'autant mieux qu'elle est plus
confortable.
Solidaire du moignon sans entraver ses mouvements, l'emboîture est
aussi la structure sur laquelle se fixent les différents éléments de la prothèse
: genou, tubulaire de jambe, pied.
11.2.2. Description :
Collet corps et fond sont les trois parties constituant une emboîture :
- le collet est l'ouverture par laquelle s'engage le moignon pour se
placer à l'intérieur de l'emboîture (en Suisse et en Allemagne, le collet est
appelé "anneau d'assise" : Sitzring).
11
Photos 1 à 4
Prothèse de cuisse
Photo 1
Photo 2
12
13
Photo 3
Photo 4
14
15
- le corps est en contact -étroit ou non- avec le moignon,
- le fond est l'extrémité du fût ; il peut être ouvert ou recouvrir le
moignon.
11.2.3. Matériaux :
Les qualités requises pour la fabrication des emboîtures sont
essentiellement la résistance aux chocs et à l'usure, un échange thermique
favorable, la légèreté, la tolérance cutanée ; ces matériaux doivent
également pouvoir être travaillés sans trop de difficultés.
- le cuir moulé fut très longtemps utilisé par les Français. Les
emboîtures sont faites d'un manchon de cuir épais, renforcé d'attelles
latérales en acier ou en bois et maintenu par des courroies réglables. Elles
sont faciles àfabriquer, à chausser ou à enlever. Le poids est acceptable. La
tolérance cutanée du cuir est bonne, ce matériau permet une bonne
absorption de la sueur, mais il en résulte à la longue des émanations d'odeur
désagréables. Les appuis de ces emboîtures sont très imparfaits. De nos
jours, le cuir n'est plus guère utilisé.
- le métal léger: vers 1928, les Anglais utilisèrent le Duralumin (alliage
d'aluminium, de magnésium, de manganèse et de cuivre). Quelques
Français ont suivi leur exemple. Les qualités de l'alliage se résument à la
légèreté. Le Dura IR est de moins en moins employé car il se bossèle sous
les chocs, pour le moins bruyants, il s'oxyde sous l'effet de la sueur et reste
allergisant. Les emboîtures ont un aspect métallique ou peint, peu attrayant.
16
- le bois : employé depuis au moins le XVIe siècle dans la fabrication
de la "jambe des pauvres", il reste, pour ceux qui le connaissent, un matériau
de référence. C'est une matière noble et belle, mais délicate à travailler ; elle
demande un prothésiste spécialement formé à ce type d'ouvrage : un fût de
prothèse en bois est en quelque sorte une oeuvre d'art (Photos 5 à 8).
Les qualités du bois sont reconnues par tous ceux qui le travaillent ou
qui le portent.
Il s'agit pour l'essentiel de peuplier et parfois de saule ou de tilleul
(Photo 5).
Pierre BOTTA (6) décrit le creusement de la masse de bois de la
façon suivante :
- fraisage de la masse de bois, en veillant à ce que la forme reflète
toujours celle du moignon (Photo 6).
- à un centimètre des mesures désirées, peaufinage avec une brosse
fine, après avoir utilisé une brosse dure en grain pour éliminer les
irrégularités (Photos 7 et 8).
Des essayages, parfois nombreux, sont nécessaires. L'amputé est
alors très actif dans la fabrication de sa prothèse : il signale en effet au
prothésiste les zones de frictions ou les appuis douloureux. Le prothésiste
orientera ses retouches selon les remarques du patient et également en
observant la couleur du moignon. Lorsque l'emboîture paraît satisfaisante, le
prothésiste procède au frettage (mise en place d'une corde serrée dans une
rainure circulaire) et, selon le type de prothèse, au parcheminage (collage
d'une peau sur la surface extérieure du fût), ou au laminage (application
d'une résine sur le fût) qui renforcent la solidité de l'emboîture en bois. Il
applique enfin un vernis.
17
Photos 5 à 8 :
(6)
Création d'une prothèse en bois une sculpture au service de l'homme.
Photo 5
Photo 6
18
19
Photo 7
Photo 8
20
21
Les avantages du bois sont nombreux : il témoigne d'une excellente
tolérance cutanée. On note peu d'allergie avec le bois. Malgré le vernis qui le
recouvre, il possède un bon échange thermique, ce qui le rend confortable
en toute saison et plus particulièrement en été et en hiver.
Il permet des retouches en cas de fluctuations de volume du moignon
: on peut, en effet, enlever de la matière ou en rajouter (on "recharge" dans
ce cas avec du liège).
Il se nettoie facilement et une emboîture en bois reste légère.
On lui reproche cependant une certaine fragilité, mais surtout une
réalisation délicate et longue.
- les matières plastiques, notamment les résines de polyester, ont été
couramment employées à partir des années 50. Elles sont d'une utilisation
relativement aisée. Résistantes aux chocs et à l'usure, les emboîtures sont
faites àpartir d'un moulage plâtré du moignon et de son positif.
Ses inconvénients sont l'apparition parfois de réactions allergiques, un
mauvais échange thermique avec production excessive de sueur en été,
rendant l'emboîture très inconfortable et pouvant même la désadapter ; en
hiver, au contraire, il existe une grande sensation de froid. Une emboîture en
résine supporte difficilement les fluctuations de volume du moignon.
PAQUIN, ANDRE, MARTINET (29) et JENDRZEJCZYK (20) signalent
l'existence de matières semi-souples, qui suivent la forme du moignon dans
les phases de contraction ou décontraction. Le collet de l'emboîture est reçu
dans une structure rigide en fibres, prolongée par le support de l'articulation
du genou.
22
II.2.4. Les différents concepts d'emboîture
L'emboîture se définit par sa forme et les appuis qu'elle détermine sur
le moignon.
Sur le principe, on distingue :
les emboîtures classiques à contact partiel,
les emboîtures à contact important
les emboîtures à contact total.
a. Les emboîtures à contact partiel :
"Le moignon entre en contact de façon permanente au niveau des
points d'appui, et de façon intermittente et variable suivant les mouvements
au niveau du corps de l'emboîture. L'extrémité de l'emboîture est libre. La
prothèse est maintenue soit par une ceinture d'abduction (ou silésienne) ou
par un baudrier passant par l'épaule opposée, soit par deux bretelles. Le
moignon est protégé par un bonnet en coton tricoté" (29). La marche est
médiocre, mais ces emboîtures sont faciles à chausser. On en distingue
plusieurs variétés selon le matériau employé (cuir-acier ou cuir-bois, qui sont
les plus anciennes des prothèses classiques, DuraI® ou uniquement bois)
(Figure 4).
b. Les emboîtures à contact important :
Ce sont des emboîtures dont les appuis sont multiples. PAQUIN (30)
en décrit deux types :
23
Figure 4 :
Emboîture conventionnelle à contact partiel.
Les moyens de suspension sont obligatoires
(silésienne, baudrier ou bretelles).
Figure 5 :
Emboîtures modernes.
Figure 5a : A contact important par succion.
Figure 5b : A contact par adhérence.
Figure -5c : A contact total.
Les flèches marquent les forces de pression (30). Les flèches marquent les
forces de pression (30).
24
- "emboîtures à succion" : l'appui se fait sur un collet légèrement
rétréci ; l'extrémité du moignon est libre, séparée
l'emboîture par une chambre en dépression (valve) (Figure 5a).
- emboîtures à adhérence musculaire: mises au point par l'autrichien
STRIEDE, elles sont caractérisées par un collet, qui ressemble à celui d'une
prothèse à contact total. Le corps de l'emboîture est le négatif des masses
musculaires du moignon, avec aménagement de cavités antérieures et
postérieures qui permettent la globulisation des muscles. Ceux-ci, par leur
contraction, assurent le maintien de l'appareil pendant la phase oscillante du
pas. L'extrémité du moignon est également libre. La prothèse est utilisée
sans moyen de suspension. Une soupape est presque toujours fournie, bien
que parfois elle ne soit pas nécessaire (Figure 5b).
c. Les emboîtures à contact total :
Elles représentent en quelque sorte l'aboutissement des modèles
précédents. Le moignon est en permanence en contact étroit avec toute la
surface de l'emboîture, du collet à son extrémité. Le poids du corps est ainsi
théoriquement idéalement mieux réparti. La première de la génération des
emboîtures à contact total fut l'emboîture quadrilatérale, concept développé
par l'allemand KUHN à Münster, à partir des travaux de CANTY (USA) dans
les années 50 (Figure 5c).
Afin de pallier les insuffisances de l'emboîture quadrilatérale, les
médecins et les prothésistes cherchèrent àaméliorer voire à transformer
totalement le concept quadrilatéral : leurs réflexions aboutirent à la création
de l'emboîture à forme et
25
alignement naturels (NSNA), d'Yvan LONG, le système procontact où le
moignon est revêtu d'un manchon souple (ce système permet à un amputé
de mettre ou d'enlever sa prothèse en position assise) ou les emboîtures en
matériaux semi-souples, reçues dans une structure rigide comme les
emboîtures ISNY ou IPOS et, enfin, les emboîtures CAT-CAM et
SCAT-CAM, élaborées par SABOLICH et son équipe.
26
27
L'AMPUTATION, UN CONSTAT D'ECHEC ?
28
29
III. L'AMPUTATION, UN CONSTAT D'ECHEC ?
"Le malade fut assis sur le bord du lit, les jambes en bas. Je le tenais
entre mes bras. A l'endroit où la cuisse commençait à être saine, on forma
une ligature pour marquer le cercle que devait suivre l'instrument. Le
chirurgien tailla tout autour les muscles, mis à nu. Le sang coulait par torrent
des artères, mais elles furent bientôt liées par un fil de soie. En dernier lieu,
on scia l'os. Le malade serrait les dents, mais ne poussa pas un cri. Quand il
vit emporter la jambe coupée, il lui jeta un regard de regret et de pitié" (Une
amputation sans anesthésie. 1829) (8).
L'amputation est vécue comme un drame humain, quel que soit son
niveau. Elle touche douloureusement le malade dans son intégrité physique,
elle bouleverse sa manière de vivre : son activité quotidienne, ses études,
son métier ou ses loisirs. Elle n'épargne pas davantage le médecin et son
équipe, a fortiori si le sujet est jeune.
Pour B. PARRATTE, C. ARNOLD et P. CALMELS (32), l'amputation
crée elle-même un nouvel état pathologique pour lequel aucune guérison
n'est à espérer. Le traitement ne peut alors être que palliatif, ne satisfaisant
jamais complètement le patient, le laissant souvent dans un état douloureux,
face auquel le médecin peut être impuissant.
30
Sa fréquence semble être aujourd'hui en diminution, en raison du progrès
des traitements conservateurs.
Si l'amputation de cuisse est le plus souvent d'origine vasculaire, chez
l'adulte jeune, en revanche, les étiologies principales restent les
traumatismes, les tumeurs malignes, les infections, plus rarement les
reprises de moignons d'amputation congénitale.
PIERQUIN (34) souligne que l'amputation est réalisée dans le but
essentiel de sauver la vie du blessé ou du malade. Parfois, la raison est
différente : le segment de membre est enlevé parce qu'il occasionne une
gène importante : douleurs, fistules, inertie et même encombrement. Cela
reste exceptionnel.
III.1. LES TRAUMATISMES :
On individualise dans cette classification les traumatismes proprement
dits : accidents de la route, accidents du travail, mais aussi les
brûlures-électrocutions, les gelures.
L'amputation est réalisée dans un contexte d'urgence (après la
période du choc) lorsque les lésions sont irrémédiables et ne permettent pas
une conservation du membre. Elle peut être effectuée dans un second
temps, si l'on constate que les traitements conservateurs sont voués à
l'échec ou s'il survient des complications.
Dans le cas de traumatismes graves, les difficultés sont de taille : afin
de conserver le maximum de longueur, le chirurgien peut avoir recours à des
greffes de peau, entraînant des cicatrices
31
disgracieuses certes, mais plus encore, fragiles. Il peut avoir à traiter des
fractures sus-jacentes (ostéosynthèse, raideur articulaire). Parfois, les
moignons restent paralysés ou insensibles en raison des lésions nerveuses
associées, ou au contraire douloureux du fait d'une mauvaise section du
nerf, entraînant un névrogliome cicatriciel.
L'ostéite chronique avec fistule permanente est rencontrée dans les
amputations pour fractures ouvertes et pseudarthroses infectées. Résistante
au traitement, elle gêne considérablement l'appareillage.
La peau d'un moignon brûlé est de mauvaise qualité : elle présente
sur une plus ou moins grande surface un aspect violacé, irrégulier, épaissi
avec parfois la présence de cicatrices chéloïdes apparaissant en raison des
greffes ou même spontanément. Il existe souvent une adhérence aux plans
profonds provoquant l'apparition de fissures, d'ulcérations, de rétractions
musculaires. L'appareillage d'un tel moignon est extrêmement délicat.
Les gelures ont pour conséquence des troubles trophiques majeurs
touchant tous les tissus. La peau est froide et cyanosée, les oscillations
artérielles sont diminuées, les ulcérations torpides sont fréquentes, la
sclérose tissulaire profonde, les douleurs vives (31).
Le traumatisé, amputé d'un membre inférieur immédiatement après le
traumatisme ou plus tardivement, se trouve donc confronté à l'immense
difficulté de faire face au choc psychologique provoqué par l'accident
lui-même et aux conséquences qui en découlent : l'amputation, rarement
réalisée dans les meilleures conditions,
32
entraîne une incapacité qui n'est plus récupérable, mais seulement
compensable. Cette situation n'est souvent pas comprise immédiatement. Le
patient est incapable de subir la réalité de la perte : cette phase correspond
au déni, premier élément du travail de deuil, qui, selon J. DUFOUR (11), est
indispensable pour pouvoir construire une nouvelle identité, une nouvelle
image corporelle, une nouvelle vie.
J. DUFOUR cite les cinq phases du deuil, décrites par
KUBLER-ROSS : l'irritation (pour KOHLRIEZER : la protestation voire la
rage) fait suite au déni. Cette émotion correspond à la tentative de faire
revenir la situation corporelle antérieure. Elle est d'autant plus vive que
l'appareillage, souvent difficile en raison d'un moignon fragile, ne fait que
confronter l'amputé à la douloureuse réalité du manque. La révolte,
l'amertume, conduisent souvent au rejet de la prothèse.
La dépression succède souvent à l'irritation : la personne est
découragée, déstabilisée jusqu'à perdre le sens de la vie.
Puis survient le marchandage ; ce sont des tractations internes en vue
de changer le cours de la réalité : elles correspondent à la reprise de l'espoir.
L'acceptation est le début de la construction : l'amputé peut réaliser
l'importance que doit prendre la prothèse dans sa vie.
J. DUFOUR souligne que l'image de soi est reliée à l'image corporelle.
La modification de l'une modifie l'autre, le tout étant vécu par rapport à
soi-même et par rapport aux autres avec lesquels on est en relation
humaine, affective.
L'amputation d'un membre inférieur va modifier la marche et les
aptitudes physiques du sujet, ce qui peut l'obliger à changer de
33
métier, à reconsidérer ses relations affectives avec ce corps mutilé. Cela
pose le problème de la remise en question de l'identité à travers la
modification corporelle et l'acceptation d'une nouvelle identité habitant ce
corps et se remettant en relation, à partir de là, avec l'environnement affectif
et professionnel.
III.2. LES TUMEURS MALIGNES :
Elles sont généralement primitives. On distingue les sarcomes des
tissus mous et les ostéosarcomes.
III.2.1. Les sarcomes des tissus mous :
Pour YANG, ROSENBERG, GLATSTEIN et ANTMAN (42), les tissus
mous se réfèrent aux tissus conjonctifs "extrasquelettiques" du corps, qui
réunissent, supportent et entourent les autres structures anatomiques.
Les sarcomes des tissus mous sont des tumeurs malignes survenant
dans les différents tissus mous, groupées ensemble en raison d'une
similitude des apparences anatomopathologiques, de présentation clinique et
de comportement. La chirurgie seule ou associée avec la radiothérapie, la
chirurgie combinée avec la radiothérapie et la chimiothérapie ou la
radiothérapie seule sont les traitements habituellement utilisés pour les
sarcomes des tissus mous.
La chirurgie radicale consiste à l'ablation de la tumeur avec tous les
tissus du compartiment anatomique occupé par le processus néoplasique, y
compris les résections proximales et
34
distales des muscles, les os et les articulations qui dépendent de ce
compartiment anatomique.
Cette procédure thérapeutique peut conduire à une amputation d'un
membre, bien que la chirurgie conservatrice puisse remplir parfois les
critères de la résection tumorale radicale.
Le taux de récidive locale après une intervention de ce type est de
l'ordre de 14 % environ.
L'amputation de cuisse est fréquemment indiquée pour les tumeurs de
la jambe (42).
III.2.2. Les tumeurs malignes touchant le squelette
Elles sont rares. Aux Etats-Unis, MALAWER, LINK et DONALDSON
(26) estiment à 2 100 les nouveaux cas survenant chaque année.
Les ostéosarcomes et les sarcomes dEwing sont les deux tumeurs
osseuses les plus fréquentes ; elles surviennent principalement dans
l'enfance et l'adolescence. Les autres tumeurs mésenchymateuses
-fibrosarcome, chondrosarcome et histiocytome fibreux malin- qui
apparaissent de façon caractéristique après la maturation du squelette sont
moins fréquentes.
Les principes chirurgicaux, chimio- et radiothérapeutiques développés
dans le traitement des ostéosarcomes sont àla base de la stratégie de prise
en charge dans la plupart des néoplasmes
35
à cellules fusiformes. L'amputation a été autrefois le traitement de référence
des ostéosarcomes, mais ces dix dernières années ont vu le développement
d'une technique chirurgicale à visée conservatrice pour les tumeurs les plus
malignes. Cela a été rendu possible par les progrès de la médecine, en
particulier dans le domaine de l'imagerie, des techniques de radiothérapie et
de chimiothérapie.
Une tumeur maligne nécessite une large ou radicale ablation, qui peut
donc être une amputation ou une intervention consistant à enlever la tumeur
dans sa totalité, la zone réactive et une calotte de tissu sain (on y associe
fréquemment un traitement par chimiothérapie dans le cas des sarcomes
osseux de haut grade).
La chirurgie conservatrice est maintenant considérée comme le
traitement préférentiel pour un nombre significatif de patients atteints
d'ostéosarcome ou d'autres sarcomes osseux de haut grade. Aujourd'hui, on
pense que les risques de récidive locale ne seraient pas plus élevés avec
une chirurgie conservatrice qu'avec l'amputation. De plus amples données
ont été obtenues ces cinq dernières années, permettant de déterminer les
facteurs décisifs en faveur de l'une ou l'autre méthode de traitement.
De façon générale, l'amputation est envisagée principalement pour les
patients dont la tumeur primitive est considérée comme non réséquable.
Ainsi, les procédures de sauvegarde du membre inférieur sont rarement
réalisables pour les tumeurs proximales du tibia. Il est difficile, en effet,
d'obtenir une marge de résection suffisante et un résultat fonctionnel
satisfaisant dans ce genre de
tumeurs, qui ont plus tendance à se compliquer localement que les
tumeurs distales du fémur (26).
36
Pour la personne malade, le drame se joue à l'annonce du diagnostic,
du pronostic et de la décision thérapeutique. Et lorsque l'alternative (tentative
d'une chirurgie conservatrice/amputation) lui est proposée, elle est
profondément désemparée. Que faire quand sa vie est en jeu, mais
comment vivre sans sa jambe ? Le deuil commence bien avant l'acte
chirurgical et même si l'amputation est apparemment réalisée dans des
conditions "idéales", le problème n'en est pas plus simple.
III.3. LES AMPUTATIONS CONGENITALES:
III.3.1. Généralités:
Dans un membre, l'aplasie ou absence congénitale de tissu ou
d'organe réalise une lésion qui peut être l'équivalent d'une amputation, mais
aussi, plus souvent, produire un membre malformé, pourvu d'une extrémité
normale ou non.
La fréquence est difficile à établir, elle varie en fonction des critères de
sévérité des lésions. Pour BARDOT et HINDERMEYER (3), la fréquence des
grandes agénésies des membres semble se situer autour de 10 à 15 cas
pour 100 000 naissances.
Les causes sont très controversées et encore mal connues.
Interviennent dans le déterminisme de ces lésions, dans des proportions
indéfinissables, des facteurs génétiques d'une part, et d'autre part des
embryopathies. Les aplasies longitudinales unilatérales et les aplasies
transversales seraient plutôt des malformations
37
acquises résultant d'embryopathie. BARDOT et HINDERMEYER reprennent
les propos de BRILLARD et BOULEGUE et citent que les agénésies
longitudinales bilatérales isolées sont probablement des mutations
dominantes autosomiques à pénétrance incomplète.
Si les causes demeurent très mystérieuses, il semble établi que la
spécificité des lésions n'est pas liée à la cause, mais au moment de
l'embryogénèse auquel intervient le facteur déterminant (3).
Les bourgeons des membres apparaissent vers l'âge de 25 jours
lorsque l'embryon mesure cinq millimètres. A la huitième semaine, chacun
des organes anatomiques, os, muscles, ligaments, articulations, nerfs et
vaisseaux, est constitué et identifiable microscopiquement. C'est entre la
quatrième et la sixième semaine que se produisent la plupart des
phénomènes qui déterminent une agénésie des membres. La lésion, qui
frappe une lignée mésodermique, l'altère ou la détruit et va entraîner une
hypoplasie ou une aplasie des organes qu'elle doit élaborer. Il semble que
les organes atteints soient définis par l'os qui en constitue l'armature :
l'atteinte d'un os s'accompagne généralement d'une malformation ou de
l'absence des muscles qui prennent insertion sur lui. Il en va de même pour
les vaisseaux ; les nerfs paraissent moins souvent atteints, au moins dans
les aplasies partielles.
III.3.2. Classification :
BARDOT et HINDERMEYER (3) reprennent la classification de
FRANTZ et O'RAHILLY ainsi que celle de KAY.
38
- pour FRANTZ et O'RAHILLY, deux grandes catégories d'agénésie
sont à distinguer :
terminale, intéressant l'extrémité du membre, intercalaire avec
l'extrémité présente, normale ou subnormale.
Chacune de ces catégories se subdivise elle-même en lésions
transversales intéressant la totalité du squelette dans le segment aplasique,
et en lésions longitudinales ou en lésions paraaxiales, n'intéressant qu'un
rayon squelettique sur deux (Figure 6).
- KAY, dans sa nomenclature, a supprimé les lésions intercalaires
transversales, considérant que toute aplasie intercalaire est nécessairement
longitudinale ou paraaxiale, puisqu'il existe une continuité tissulaire entre le
tronc et l'extrémité présente du membre. Dans cette classification, l'agénésie
est désignée par le segment osseux absent ou hypoplasique.
De la terminologie classique, on conserve :
- Pamélie : absence totale d'un ou de plusieurs membres,
- la péromélie : amputation transversale terminale d'un membre dont
la racine existe,
- l'ectromélie : aplasie longitudinale intercalaire (tibiale, péronière,
radiale, cubitale) avec extrémité présente,
- la phocomélie : pied ou main, complet ou non, directement implanté
à l'épaule ou à la hanche, sans os long intermédiaire.
39
Figure 6
Classification des aplasies squelettiques des membres [d'après BROOKS,
BLAKESLEE (3)].
40
Ces lésions, en raison de leur importance, ont recours à la
réadaptation et à l'appareillage, parfois à la chirurgie. Il n'y a pas de solution
standard à appliquer à tel ou tel type de malformation. La chirurgie ne doit
être envisagée qu'avec circonspection et doit tenir compte du bilan des
activités de la vie quotidienne, des perspectives de la croissance et des
possibilités d'appareillage.
Les malformations à squelette continu sont de grandes hypoplasies où
le fémur et le tibia, plus ou moins courts et déformés, surmontent un pied
complet ou non. Le péroné est présent ou absent. La présence d'un genou
fonctionnel permet l'appareillage à l'aide d'une prothèse tibiale.
III.3.3. Aplasies à squelette discontinu :
Elles comportent une absence congénitale segmentaire plus ou moins
étendue du fémur ou du tibia. Les aplasies fémorales sont plus fréquentes
que les aplasies tibiales.
a. Les aplasies fémorales :
Elles sont classées en quatre types par AITKEN
(A, B, C, D).(Figure 7).
Figure 7
Les 4 types d'aplasies fémorales proximales
[selon AITKEN (3)].
41
Pour les types A et B, il est nécessaire de savoir s'il existe une cavité
articulaire, condition indispensable pour envisager une reconstitution
chirurgicale de la continuité fémorale. Le segment crural, en
flexion-abduction-rotation externe, prolonge la fesse sans démarcation ; le
genou fait une crosse antéro-externe à faible distance de la hanche, le pied
est à la hauteur d'un genou normal, un peu plus haut ou un peu plus bas.
Dans les aplasies fémorales unilatérales, l'égalisation chirurgicale est exclue,
la prothétisation est inévitable. Les aplasies fémorales àmembre court sont
appareillées à l'aide d'une prothèse de cuisse de type contact (3) (Figure 8).
Figure 8 :
Aplasie fémorale à membre court appareillage par une prothèse de type
"crurale-contact" (3).
42
b. Les aplasies tibiales
L'aspect anatomo-clinique est univoque: BARDOT et HINDERMEYER
(3) décrivent une position haute de la tête péronière, un varus important de la
jambe et du pied, une malrotation, un genu flessum. Selon les auteurs, il est
parfois nécessaire, devant la médiocre qualité du genou, de recourir à sa
désarticulation. Cela conduit à un appareillage avec une prothèse -contact et
genou prothétique (Figure 9).
Figure 9 :
Aplasie tibiale incomplète.
a de profil
b de face (3)
III.3.4..Phocomélie :
Il s'agit d'une aplasie intercalaire de la quasi totalité du fémur et du
squelette jambier et de la présence au niveau de la hanche d'un pied plus ou
moins complet. Son volume et la tonicité des muscles qui le contrôlent
permettent quelquefois de le considérer comme un moignon de cuisse et
d'adapter une prothèse de cuisse (Figure 10).
43
Figure 10 :
Aplasie des deux membres inférieurs d'un côté, désarticulation congénitale
de hanche appareillée par une prothèse canadienne ; de l'autre, phocomélie
pour laquelle une emboîture de type "crurale" est adaptée au pied
phocomèle (3).
III.3.5. Amputations congénitales :
L'aplasie terminale transverse du membre inférieur se présente
simplement comme une amputation congénitale. Elle peut siéger à n'importe
quel niveau et son appareillage est celui de toute amputation.
44
III.3.6. En résumé :
Dans certains cas d'amputation congénitale, le recours à la chirurgie
peut s'avérer indispensable.
Certaines écoles de prothésistes préconisent au contraire une
abstention chirurgicale, mais suggèrent d'utiliser toutes les possibilités
d'appareillage conventionnel. Pour ce faire, il leur paraît indispensable de
ramener très tôt le membre en position axiale par un plâtre. La croissance de
l'enfant leur permet d'envisager le traitement le mieux adapté et
éventuellement de discuter des possibilités chirurgicales et des perspectives
d'appareillage avec tous les membres de l'équipe de réadaptation.
III.4. LES AUTRES CAUSES :
- Les artérites : elles représentent la cause la plus fréquente
d'amputation, tous âges confondus. Elles sont le plus souvent séniles ou
préséniles, mais peuvent survenir plus précocement (diabète, maladie de
Buerger...).
PIERQUIN (34) décrit des causes plus rares d'amputation :
les infections telles que le purpura fulminans et de façon plus
exceptionnelle la lèpre ou l'actinomycose,
- les ischémies (affection cardiaque, dialyse rénale),
- les affections neurologiques (spina bifida, agénésies rachidiennes
inférieures).
45
UNE CHIRURGIE, POUR UN MEILLEUR
APPAREILLAGE
46
47
IV. UNE CHIRURGIE POUR UN MEILLEUR APPAREILLAGE :
IV.1. NIVEAUX D'AMPLITATION ET QUALITE DE VIE :
L'amputation de cuisse pose le problème de la perte du genou,
articulation fondamentale pour son rôle d'amortissement et de limitation des
fluctuations du centre de gravité coûteuses en énergie, par la stabilité qu'il
procure, permettant un verrouillage actif en station unipodale. Pour DULIEU
et coll. (12), les muscles polyarticulaires de la cuisse et tout particulièrement
le quadriceps ont un rôle freinateur et absorbeur des pressions au cours de
la marche.
Dans la mesure du possible, le genou devra être préservé.
L'appareillage d'un moignon de jambe, même court (quelques centimètres,
conservation du tendon rotulien), bien que parfois délicat, est réalisé par la
fabrication d'une emboîture supra-condylienne.
La facilité du chaussage, la démarche plus physiologique et moins
coûteuse en énergie, la possibilité de courir sont autant d'arguments qui
doivent inciter, si la clinique le permet, à une chirurgie conservatrice.
48
L'autre difficulté résulte du fait que le moignon de cuisse supporte
difficilement un appui distal, à l'inverse des amputations de GRITTI et des
désarticulations de genou, qui autorisent un appui terminal total.
L'amputation de cuisse décrite par Rocco GRITTI, en 1891, consiste
en une section du fémur juste au-dessus des condyles avec la synthèse de
la rotule sous la tranche osseuse. Le moignon est cylindrique, légèrement
renflé àson extrémité distale et surtout long, ce qui facilite son contrôle et
diminue l'effort nécessaire à son animation. Il y a conservation des équilibres
musculaires physiologiques, qui confèrent au moignon un caractère tonique
et musclé et lui assurent une faible involution.
La cicatrice postériorisée et le caractère arrondi de l'extrémité
osseuse, du fait de la position de la rotule, permettent en général l'appui
terminal. L'emboîture repose sur le principe de la suppression de l'appui
ischiatique, un appui terminal préférentiel et un accrochage sus-condylien. Il
existe, en plus, un appui partiel sur les faces du moignon grâce à un
manchon souple, qui recouvre la totalité de la surface du moignon jusqu'à sa
partie proximale. Le bord supérieur du manchon souple et de l'emboîture
rigide s'arrête à deux travers de doigt de l'ischion, lorsque le membre
inférieur est en charge. La suspension de l'emboîture est assurée par l'intime
contact entre le manchon souple et le moignon, d'une part, et par l'utilisation
au niveau du fût fémoral du renflement de l'extrémité inférieure du moignon,
d'autre part. Lors du moulage, il y a accentuation des reliefs sus-condyliens
du manchon. Les saillies latérales sus-condyliennes de l'emboîture dure
s'appliquent sur les dépressions du manchon
49
souple, qui se laisse comprimer au niveau des reliefs sus-condyliens
lors du chaussage (18).
Le périmètre de marche est en général bien conservé. La marche est
souvent confortable et esthétique. Cependant, il a été noté quelques cas
d'appui terminal douloureux (section du fémur, mauvaise synthèse de la
rotule sur la tranche osseuse, accrochage sus-condylien sensible ... ).
En conséquence, certains prothésistes préfèrent la désarticulation du
genou : un appui terminal est rarement douloureux lorsque les condyles sont
intacts.
La technique de l'emboîtage d'un tel moignon est sensiblement
similaire à celle d'une amputation de GRITTI : exploitation des reliefs osseux
pour assurer l'accrochage, utilisation d'un manchon souple et d'une
emboîture rigide sauf dans sa partie proximale (tiers supérieur), qui reste
souple et permet une position assise très confortable.
Ces deux types d'amputation ont pour principal défaut une longueur
telle du moignon que l'appareillage est difficilement esthétique. Mais la mise
au point de genoux de faible encombrement permet de situer l'axe articulaire
du genou prothétique à la même hauteur que celui du genou controlatéral, et
ce pour des raisons aussi bien fonctionnelles qu'esthétiques (Figure 11).
Pour les ostéosarcomes du fémur, se discuterait l'opportunité de
l'opération de VAN NES, initialement pratiquée pour les aplasies fémorales.
Le principe consiste à fixer le tibia sur l'extrémité supérieure du fémur, après
l'avoir fait tourner de 180 degrés : la cheville fonctionne comme un genou, le
pied fait office de moignon de jambe.
L'appareillage est possible au moyen d'une prothèse tibiale contact.
50
De toute évidence, il n'existe pas de niveau d'amputation idéal. Il est
reconnu cependant que, dans l'amputation de cuisse, plus le moignon est
long, plus le contrôle de la prothèse sera aisé. C. RIEDERER, en 1927,
parodiait une parole du baron LOUIS sur les finances publiques et écrivait
aux chirurgiens : "Faites-nous de bons moignons, nous vous ferons de
bonnes prothèses" (34). La réalité n'est sans doute pas aussi simple. La
bonne qualité du moignon (absence de trouble trophique ... ), un niveau
d'amputation satisfaisant, une technique chirurgicale adaptée sont autant de
conditions permettant un bon appareillage (Figure 11).
Figure 11 :
Les niveaux d'amputation du membre inférieur (37).
51
IV.2. LES TECHNIQUES CHIRURGICALES
Il convient de différencier
d'amputation de cuisse :
plusieurs
techniques
chirurgicales
IV.2.1. Le moignon classique :
Selon MIAULT, DESCHAMPS et PILLU (27), l'os est réséqué, le canal
médullaire doit être obturé par une pastille osseuse prélevée sur le segment
amputé pour éviter l'anastomose des lacis veineux, osseux et cutanés. Le
périoste est suturé. Les vaisseaux sont sectionnés le plus bas possible,
artères et veines ligaturées séparément. Les nerfs doivent être, à l'opposé,
sectionnés le plus haut possible pour éviter le névrome du moignon. Le
volume des masses molles est conservé selon la qualité des tissus
environnants et suivant qu'on souhaite obtenir un moignon plus ou moins
étoffé avec un engainement soigneux du fût osseux. Dans le cas de
l'amputation de cuisse, cet engainement se réalise avec une suture
peau-aponévrose pour les moignons maigres, avec un recouvrement
musculaire correspondant à l'épaisseur du quadriceps pour les moignons
étoffés. La cicatrice est postériorisée.
IV.2.2. Le moignon d'ostéomyoplastie
L'ostéomyoplastie, technique chirurgicale mise au point par WEISS en
1947, préconisée par DEDERICH, est réalisée dans la plupart des cas. Il
s'agit d'une véritable plastie du moignon, qui permet une meilleure trophicité
musculaire par une mise en contact sur la surface la plus grande possible
des muscles et de la peau.
52
Elle consiste au niveau fémoral
- en une incision de la peau, de façon à obtenir deux lambeaux
cutanés en forme de demi-cercles. Le lambeau antérieur est plus long que le
lambeau postérieur, cela pour permettre une postériorisation de la cicatrice.
- en une section osseuse, légèrement au-dessus des muscles. Le
canal médullaire est bouché. Sur 4 à 5 cm en amont de la tranche de section
osseuse, le périoste est repoussé vers le haut, puis ramené sur l'extrémité
osseuse et suturé sur celle-ci, afin de prévenir une éventuelle prolifération
osseuse, toujours susceptible de provoquer des phénomènes douloureux à
la marche.
Le nerf sciatique est repéré, isolé et sectionné très haut, à distance
des cicatrices (osseuses, musculaires et vasculaires). Il est enfoui dans la
masse des muscles. L'amputation est suivie d'une sensation de présence du
segment de membre amputé : elle est en général éphémère.
Pour assurer une bonne irrigation distale du moignon, les vaisseaux
sont ligaturés le plus bas possible.
- en une plastie musculaire : c'est le dernier temps opératoire :
par-dessus le moignon osseux, on suture bout à bout les quatre groupes
musculaires, interne et externe au plan profond, antérieur et postérieur au
plan superficiel. Le groupe interne est composé des muscles adducteurs,
vaste interne, droit interne et pectiné.
53
Le groupe externe est composé du vaste externe et du tenseur du
fascia lata.
Le groupe antérieur comprend le couturier, le droit antérieur et le
crural, le groupe postérieur est constitué du demimembraneux,
demi-tendineux, biceps crural.
RAUPP, GRUMLER et LARDRY (37) précisent que les sutures sont
effectuées sur un moignon en rectitude, afin que les tensions musculaires
soient bien équilibrées (Figures 12 et 13).
Tout muscle sectionné privé de son chef distal est voué à l'inertie et à
l'atrophie.
Dans le cas de l'ostéomyoplastie, les muscles ont un nouveau point
d'attache inférieur, commun et ils rétablissent d'une certaine façon le jeu
agoniste-antagoniste. Si ce jeu est entretenu par des exercices réguliers,
l'atrophie du moignon est moindre, la vitalité de tous les éléments bien
meilleure.
IV.2.3.,Le moignon ouvert de cuisse, :
Il s'agit d'un moignon où les causes d'amputation sont toujours
vasculaires. . Il est laissé ouvert, afin de suivre le processus de cicatrisation
pour des raisons d'ischémie, car toute suture risquerait d'entraîner des
tractions sur les tissus, responsables de nécrose et d'ouverture secondaire
(27).
54
Figure 12 :
Coupe transversale de la cuisse (d'après LATARJET). Coupe de la cuisse
droite à la partie moyenne (segment supérieur).
1,1’Aponévrose fémorale
2 Cloison intermusculaire externe
3 Cloison intermusculaire interne
4 Droit antérieur
5 : Crural
6 : Vaste interne
7 : Vaste externe
8 : Couturier
9 : Droit interne
10 : Moyen adducteur
Il : Grand adducteur
12 : Demi-membraneux
13 : Grand adducteur
14 : Longue et courte portions
15 : du biceps crural
16 : Artère fémorale
17 : Nerf saphène interne
18 : Artère fémorale profonde
19 : Nerf sciatique
20 : Artère ischiatique
21 : Veine saphène interne
55
Figure 13 :
Ostéomyoplastie.
a. Résection osseuse au-dessus de la section musculaire
b. Suture soigneuse du périoste
c. Myoplastie latéro-latérale
d. Fermeture : matelassage musculaire
56
IV.3. LES ETATS PATHOLOGIQUES DU MOIGNON
Le port de la prothèse est une nécessité vitale pour l'amputé et la
première qualité d'un moignon est de permettre au patient une marche sans
douleur.
Mais un moignon parfait est rare, pour ne pas dire inexistant. Il subit
sans cesse une évolution dans le temps. Les contraintes de l'appareillage,
les irritations occasionnées par une activité physique accrue (professionnelle
ou autre), peuvent rendre un moignon pathologique.
IV.3.1. Les moi-gnons défectueux :
Ils le sont en raison de l'étiologie ou des circonstances de
l'amputation, d'une mauvaise confection chirurgicale ou de soins
post-opératoires incorrects.
On retient essentiellement :
- les défauts de la cicatrice (mal positionnée, invaginée, adhérente aux
parties molles sous-jacentes ... ).
- les attitudes vicieuses (flessurn-abductum de
hanche).
- l'oedème du moignon le plus souvent postopératoire, mais parfois
aigu ou subaigu en raison d'une affection intercurrente locale (phlébite du
moignon, abcès ... ) ou générale (insuffisance cardiaque ... ). L'oedème
persiste après la période post-opératoire
57
du fait d'une insuffisance du retour veineux : c'est l'oedème déclive.
- les moignons défectueux, suite à un acte chirurgical incomplet ou
incorrect (fémur trop long ou trop court, nonrecouvrement de l'extrémité
osseuse par le périoste, favorisant l'apparition d'exostoses, insuffisance du
matelassage musculaire, moignon trop étoffé, "à oreilles").
IV.3.2. Les moignons douloureux:
- Existence de troubles trophiques (ulcérations par irritations
mécaniques, hypersudation, macération et prolifération bactérienne, eczéma,
allergies aux constituants de l'emboîture).
- Le neurogliome ou névrome d'amputation : enfoui dans l'épaisseur
du muscle, le nerf sectionné produit un neurogliome cicatriciel légèrement
douloureux au départ, puis indolore. Quand il se trouve en contact avec l'os,
les vaisseaux ou les aponévroses cicatricielles, il peut devenir extrêmement
sensible, même à la simple palpation. Le chaussage de l'emboîture et surtout
l'appui à la marche provoquent, en stimulant le neurogliome, une irradiation
douloureuse dans toute la région située en aval.
- La résonance algique du membre "fantôme" est pratiquement
constante chez tous les amputés. Elle peut être parfois très discrète et ne
pas gêner l'amputé ou, au contraire, omniprésente, insomniante et rebelle à
tout traitement : elle est alors très éprouvante, physiquement et
psychologiquement.
58
IV.3.3. Les solutions :
La plus importante, car peut-être la moins aléatoire, reste la
prévention. Lorsqu'elle n'a pas pu être réalisée et que la souffrance est telle
qu'elle empêche toute possibilité de marche, il est proposé des traitements,
afin de permettre àl'amputé de reprendre une activité.
- Il peut s'agir d'un traitement chirurgical à n'envisager qu'avec
précaution (résection des exostoses et recouvrement correct par le périoste,
résection du névrome, reprise chirurgicale des cicatrices ... ).
- Antalgiques, anti-inflammatoires ou tranquillisants (sédatifs,
anxiolytiques) sont employés pour traiter les membres fantômes douloureux.
Ultra-sons ou neurostimulation antalgique sont parfois nécessaires pour
compléter le traitement médical.
- L'oedème du moignon sera contrôlé par l'utilisation d'une contention
par bandes élastiques ou par le port de la prothèse.
- La prévention des attitudes vicieuses est primordiale : la lutte contre
le flessum de hanche s'effectue par des cures de procubitus, si l'amputé le
supporte. Il est nécessaire de pratiquer également un travail articulaire par
des mobilisations biquotidiennes du moignon : étirements manuels dans le
sens extension, adduction et abduction de hanche. Le travail actif des
articulations sus-jacentes à l'amputation sera pratiqué dès que possible (31,
37).
59
L'appareillage précoce est par ailleurs l'un des meilleurs moyens pour
prévenir l'apparition d'un grand nombre de ces troubles.
60
61
LA MARCHE HUMAINE, UNE ACQUISITION
INESTIMABLE
62
63
V. LA MARCHE HUMAINE, UNE ACQUISITION INESTIMABLE:
V1. LA MARCHE PHYSIOLOGIQUE :
La marche est une activité que l'homme valide imagine simple car il
l'exécute sans être obligé d'y penser.
Elle est, en fait, d'une grande complexité.
Marcher est un travail difficile, ancien : une expédition anthropologique
dans la vallée de l'Afar a découvert que l'homme marchait il y a trois millions
d'années (35).
Parmi les mammifères marcheurs bipèdes, l'homme est le seul à
adopter l'attitude érigée comme sa position naturelle. Les mains sont libérées
de toute fonction locomotrice. La bipédie verticale de l'homme le rend
disponible pour des activités nouvelles, réceptrices et effectrices (7).
Dans le concept de la marche humaine, PLAS, VIEL et BLANC (35)
signalent que la marche, activité apprise , est également intégrée au niveau
non volontaire.
64
V.1.1.Les conséquences anatomiques de la bipédie
Selon BRIAND et BONNEL (7), la bipédie a entraîné une adaptation
morphologique du squelette :
- apparition
promontoire,
d'une
cambrure
lombaire
avec
exagération
du
- élargissement du bassin, les modifications morphologiques du
membre pelvien sont exclusives à l'homme,
- élargissement et aplatissement du thorax avec soudure des
différents éléments du sternum,
- rejet de la scapula sur la face postérieure du thorax,
- adaptation exclusive du pied à la sustentation.
Tout comme le squelette, la musculature s'adapte à la verticalisation
et, chez l'homme, on remarque en particulier :
- développement de la masse dorso-lombaire,
- différenciation importante des muscles de la nuque dont les
faisceaux s'élèvent plus haut dans le cou,
- au niveau des membres inférieurs, les muscles fessiers se
développent : le grand fessier recouvre toute la face postérieure du bassin, le
fessier antérieur (scansorius) perd son indépendance et se soude au petit
fessier,
- les muscles interosseux du pied s'orientent par rapport au deuxième
métatarsien et non plus par rapport au troisième,
- le muscle droit de l'abdomen se raccourcit pour atteindre tout juste la
cinquième côte. Dans la région sus-pubienne, apparaît le muscle pyramidal,
en avant du muscle droit.
65
V.1.2. Description :
Pour D'ANGELI-CHEVASSUT et GAVIRIA (10), la marche bipède est
le mode habituel de locomotion de l'homme : elle est la combinaison dans le
temps et l'espace de mouvements complexes des segments du corps,
entraînant le déplacement de l'homme sur un plan horizontal. L'appui est
uniquement podal : à tout instant, il y a contact d'au moins un pied avec le
sol.
La marche est constituée d'une activité alternée des membres
inférieurs, caractérisée par une succession de doubles appuis et d'appuis
unilatéraux et un maintien de l'équilibre dynamique.
Les muscles et le système ostéoarticulaire sont les acteurs de la
marche, dirigée, par l'intermédiaire des nerfs périphériques, par une
commande centrale. Cette dernière est également conditionnée par de
multiples afférences (10).
V.1.2.1. Les paramètres de la marche :
Selon LITTRE (10), le pas est l'intervalle séparant deux appuis au sol
du même pied. En pratique, on le définit plutÔt par deux contacts talonniers
successifs du même pied.
Le demi-pas est l'intervalle séparant le contact talonnier d'un pied et
celui de l'autre pied.
La longueur du pas est la distance séparant les deux talons lors du
double appui. Il serait plus juste de parler de la longueur du demi-pas.
66
La largeur du pas est la distance séparant le talon de la ligne de
marche : sa valeur moyenne est de cinq à six centimètres.
L'angle du pas, formé par la ligne de marche et l'axe longitudinal du
pied, est de l'ordre de 15 degrés en
rotation externe (Figure 14).
Figure 14 :
Les paramètres du pas (10).
La cadence de marche est le nombre de pas effectués en une minute.
La vitesse de marche est la distance parcourue par unité de temps.
C'est aussi le produit de la longueur moyenne du pas par la cadence (10).
67
V.11.2.2.Le cycle de marche
Le cycle de marche est constitué de deux phases:
- une phase d'appui qui comporte une période de double appui
antérieur de réception, suivie d'un temps d'appui unilatéral, pied à plat .
- une phase oscillante, elle-même débutant par un double appui
postérieur d'élan suivi de la phase oscillante proprement dite.
a. La phase d’appuis :
Elle débute par l'attaque du talon, puis l'avant -pied se rabat et la
plante toute entière entre en contact avec le sol.
- le double appui antérieur de réception : le membre, qui passe d'avant
en arrière, en recevant le poids du corps, absorbe l'énergie cinétique ainsi
constituée : la hanche et le genou se fléchissent de quelques degrés lors du
contact talonnier, les releveurs du pied (surtout le jambier antérieur, mais
aussi l'extenseur commun des orteils et l'extenseur propre du gros orteil) se
contractent brièvement et freinent le rabattement de l'avant-pied. Le soléaire
freine le déplacement de la jambe en avant, et la contraction du quadriceps,
essentiellement celle du droit antérieur et du crural, verrouille le genou en
extension, laquelle demeure incomplète. La cheville se met en flexion
plantaire de 5 degrés environ après l'attaque du talon.
Le corps bascule du côté du membre
68
recevant le poids du corps. Le genou est stabilisé latéralement par les
muscles de la patte d'oie à l'intérieur et le tenseur du fascia lata à l'extérieur,
la cheville par le jambier postérieur qui a un rôle antivalgus et qui place le
pied en légère supination à l'attaque du sol. L'appui augmenté sur le
cinquième métatarsien évite un valgus excessif.
Le bassin passe de la position oblique à la position transverse. Il est
stabilisé latéralement par les muscles petit et moyen fessiers et le tenseur du
fascia lata.
La ceinture scapulaire suit un mouvement inverse.
A la fin de la période, les deux ceintures se superposent (Figure 15).
- l'appui unilatéral, pied à plat : le corps est en équilibre dans les trois
plans de l'espace.
Sagittalement, la hanche, qui était fléchie, se redresse et s'étend. Il y a
une mise au repos du quadriceps et des muscles de la loge postérieure de la
cuisse. Le genou fléchit, puis se redresse, stabilisé en extension activement
par le triceps sural, qui, avec l'aide des fléchisseurs des orteils, solidarise la
jambe au pied et prépare ainsi le décollement du talon.
La cheville, à zéro degré de flexion dorsale et plantaire quand la
jambe passe à la verticale du pied, se met en flexion dorsale d'environ 10
degrés pendant le premier appui unilatéral. Dans le plan frontal, le bassin
s'incline du côté oscillant, maintenu latéralement par les petit et moyen
fessiers et le tenseur du fascia lata. L'épaule s'incline, elle, du côté portant.
Le jambier postérieur, puis les péroniers latéraux, stabilisent latéralement la
cheville.
69
Dans le plan horizontal, l'astragale tourne au -dessus du calcanéum.
Le cotyle tourne au-dessus de la tête fémorale. La ceinture scapulaire tourne
en sens inverse (Figure 16).
b.La phase ossillante :
- Le double appui postérieur d'élan : le membre situé en arrière
propulse le corps en avant ; il s'incline vers l'avant dans le plan sagittal, par
une flexion du genou et de la hanche. La flexion du genou est freinée par
une petite contraction du crural et du droit antérieur.
Il se produit un déroulement progressif de la tibio-tarsienne. L'appui se
réduit, transféré à l'avant-pied (talon antérieur) et à la tête du premier
métatarsien. La cheville passe en flexion plantaire d'environ 15 degrés, juste
avant que le gros orteil ne décolle du sol (toe-off). Le soléaire et les
fléchisseurs des orteils poursuivent leur contraction, soulèvent le talon et
entraînent le passage de la masse corporelle au-dessus de l'avant-pied.
Dans le plan frontal, le pied passe en valgus au cours de l'impulsion.
La pronation en valgus fait passer la charge du corps de tout l'avant-pied à la
tête du premier métatarsien. La freination du déplacement latéral du bassin
et le début de sa rotation sont assurés par les adducteurs de hanche et le
droit interne.
Horizontalement, il existe une torsion externe de l'astragale au-dessus
du calcanéum du pied fixé au sol. Le bassin tend à être ramené dans le plan
transversal, la hanche s'étend et tourne dans le plan horizontal, le tronc
tourne en sens inverse (Figures 17 et 18a et b).
- La phase oscillante proprement dite : le membre postérieur se
détache du sol et oscille d'arrière en avant.
70
Dans le plan sagittal, le pied se relève sous l'action du jambier
antérieur. Pour faciliter le passage du pas, l'extenseur commun des orteils et
l'extenseur propre du gros orteil se contractent. Le genou fléchit sous l'action
des fléchisseurs du genou (court biceps et droit interne) et les muscles
bi-articulaires (surtout le couturier) fléchissent hanche et genou.
Au niveau de la cuisse, les adducteurs fléchissent une hanche en
hyperextension, qui va passer en rectitude puis en flexion (avant l'attaque du
talon, la flexion moyenne est de 40 degrés) par l'action du psoas et iliaque, le
droit antérieur et enfin le couturier.
Le membre inférieur croise celui posé au sol.
Il existe une oscillation de tout le bassin autour de la tête fémorale
opposée et portante.
Le temps oscillant est subdivisé en deux parties : l'une étant
constituée par le pas postérieur où le membre inférieur réalise une triple
flexion ; l'autre par le pas antérieur où le psoas et l'iliaque continue la flexion
de hanche, où les ischio-jambiers freinent l'extension du genou et où les
releveurs du pied poursuivent la flexion dorsale de la cheville, nécessaire à
l'attaque du pas.
La cheville revient à zéro degré de flexion plantaire et dorsale juste
avant l'attaque du talon suivant.
Dans le plan frontal, il existe une obliquité du bassin du fait de
l'abaissement du côté oscillant ; la ceinture scapulaire présente une obliquité
inverse. En fin de phase oscillante, il y a retour au parallélisme des deux
ceintures.
Horizontalement, le bassin passe d'une obliquité à l'autre, tandis que
la ceinture scapulaire subit une oscillation inverse (Figure 19).
71
Figure 15 : Vue horizontale et latérale du double appui de réception (10).
Figure 16 : Vue horizontale et latérale de l'appui unilatéral (10).
72
Figure 17 :
Vue horizontale et latérale du double appui d'élan (10).
Figure 18 :
Le double appui postérieur d'élan : mouvements de la cheville dans le plan
frontal et empreinte des appuis au sol (10).
73
Figure 19 :
Vue horizontale et latérale de la phase oscillante (10).
Figure 20 :
Le cycle de marche (10).
1.Attaque du talon ou heel-strike
2. Double appui antérieur de réception
3, 4, 5 : Appui unilatéral portant
6, 7 : Double appui postérieur d'élan
8 : Décollement des orteils ou toe-off
9, 10 : Temps oscillant
74
V.1.3. Les effets des mécanismes du cycle de marche sur le centre
de gravité :
Le centre de gravité du corps se situe, chez l'homme en position
verticale, à 55 % de la hauteur du sujet, mesurée àpartir du sol, en avant de
la seconde vertèbre sacrée (Figure 21).
Figure 21 :
Placement des centres de gravité des segments du corps humain (35).
Figure 22 :
Modèle mécanique d'étude (35).
75
Dans leur étude, PLAS, VIEL et BLANC (35) assimilent le corps
humain à une masse à déplacer ; ils utilisent le modèle théorique de la roue,
où le moyeu de la roue est en fait le centre de gravité humain, les rayons de
la roue, les membres inférieurs (Figure 22). Ils constatent que les membres
inférieurs -rectilignes- impriment au centre de gravité un déplacement vertical
et horizontal théorique de 75 millimètres. L'amplitude de la ligne de
progression suivie par le centre de gravité est alors très grande et nécessite
de ce fait une dépense d'énergie importante (Figures 23 et 24).
Figure 23
Déplacement vertical théorique du centre de gravité (35).
Figure 24 :
Déplacement horizontal théorique du centre de gravité (35).
76
En réalité, "l'ajustement de la longueur des membres et la disposition
particulière des pièces squelettiques vont diminuer considérablement le
débattement du centre de gravité de 75 mm à plus ou moins 45 mm" (35).
En effet, des facteurs biomécaniques squelettiques interviennent sur
la stabilité de l'unité locomotrice et permettent également un synchronisme
mobilité-stabilité. Au nombre de six, ce sont :
la rotation du bassin autour de l'axe vertical : au moment du passage
du pas, le bassin, en pivotant sur les têtes fémorales, passe d'une rotation
externe relative à une rotation interne relative durant la phase d'appui. La
rotation est de 4 degrés de chaque côté de l'axe vertical ; elle supprime 10
millimètres au déplacement théorique du centre de gravité, en permettant un
allongement du pas sans accroître la chute du centre de gravité au moment
où le talon frappe le sol (Figure 25a et b).
Figure 25a Rotation axiale du bassin (sur la tête fémorale porteuse) (35).
Figure 25b Influence de la rotation axiale du bassin sur le déplacement du
centre de gravité (35).
77
-la bascule du bassin du côté non porteur au passage du pas : elle a
une amplitude de 5 degrés à mi-appui. Du côté de l'oscillation, la hanche
s'abaisse, le genou fléchit et l'avant-pied se relève. Cela permet une
diminution de l'élévation du centre de gravité de 5 mm (Figure 26a et b).
Figure 26a :
Bascule du bassin avec abaissement du côté non porteur (35).
Figure 26b :
Influence de la bascule du bassin sur le déplacement du centre de gravité
(35).
78
-la flexion du genou pendant l'appui : à l'attaque du talon, le genou est
en extension incomplète. Il se fléchit de 15 degrés à 20 degrés lorsque le
pied est posé à plat au sol. Après le mi-appui, le genou s'étend légèrement et
se fléchit à nouveau lors de la poussée de l'avant-pied.
Cette flexion diminue de 11 mm l'élévation du centre de gravité
Lorsque celui-ci passe à la verticale du membre porteur (Figure 27).
Figure 27
Influence de la flexion du genou
sur le déplacement du centre de gravité (35).
-les mouvements du pied et de la cheville : à la frappe du talon, la
cheville avance en décrivant un arc-de-cercle audessus du talon (15 degrés
de flexion plantaire), dont la longueur du rayon est égale à la hauteur
astragale + calcanéum.
Au moment du passage à la verticale, le pied est posé à plat sur le sol.
Lorsque le talon se soulève, la cheville décrit un arc -de-cercle au-dessus de
la tête des métatarsiens (15 degrés de flexion dorsale). La longueur du rayon
de l'arc est égale au tarse antérieur + métatarse.
Le pivot sur lequel bascule le corps, est mobile et repose sur deux
points, le calcanéum et la tête des métatarsiens. L'oscillation sur ces deux
appuis contribue à amortir les mouvements de descente et de soulèvement
abrupts du centre de gravité (Figures 28 et 29).
79
Figure 28
Influence des mouvements de la cheville sur les déplacements du centre de
gravité (35).
Figure 29 :
La forme du pied : les deux arbalétriers sont les éléments osseux et l'entrait
est représenté par les formations ligamentaires et musculaires (10).
-la coordination des mouvements du genou et de la cheville :
immédiatement après la frappe du talon, le genou se plie, la cheville
s'abaisse simultanément. A la poussée en avant, le genou fléchit à nouveau
et la cheville s'élève. Les mouvements coordonnés des deux articulations
permettent d'éviter les arrêts et départs brutaux dans le transport du centre
de gravité en début et en fin d'appui (Figure 30).
Figure 30
Influence des mouvements du genou et de la cheville (35).
80
- le déplacement latéral du bassin : sur le modèle théorique, le
déplacement du centre de gravité décrit une sinusoïde de 75 millimètres
d'amplitude ; afin de conserver l'équilibre, l'axe de gravité est porté sur un
pied, puis sur l'autre. La distance parcourue est importante en raison de la
rectitude des membres.
Le déplacement du centre de gravité est, en fait, corrigé par l'angle
tibio-fémoral (valgum physiologique), qui porte le fémur en-dedans et
rapproche les deux segments jambiers, qui restent verticaux (Figure 31).
Figure 31 Influence des mouvements du genou et de la cheville (35).
Ainsi, les trois premiers facteurs permettent une réduction de
l'élévation du centre de gravité de 25 millimètres (30 millimètres pour certains
marcheurs), contribuant à la diminution de la dépense d'énergie nécessaire à
la marche du modèle théorique.
Le premier élément a élevé les extrémités de l'arc, les deux autres ont
abaissé le sommet de la courbe.
81
Les mouvements du pied et de la cheville ainsi que la coordination des
mouvements du genou et de la cheville permettent, quant à eux, un
déplacement du centre de gravité selon une courbe sinusoïdale douce. Ainsi,
le rendement de la marche est d'autant meilleur que la trajectoire du centre
de gravité est proche d'une droite.
Il existe, par ailleurs, une rotation axiale du fémur et une rotation du
tibia. La première découle des rotations imprimées au niveau de la hanche
par le bassin ; elle a une amplitude totale de 8 degrés. La rotation du tibia sur
le fémur résulte de la disposition particulière des surfaces articulaires, qui
génèrent des mouvements de rotation lors de la flexion-extension du genou.
L'amplitude est de 9 degrés au total.
Au cours de la marche et dès la frappe du talon au sol, le fémur décrit
une rotation interne par rapport au bassin. Le genou fléchissant, la rotation
du fémur sur le tibia est également en rotation interne.
Cette période participe à l'ajustement de la longueur du membre en
effectuant un vissage des segments sur eux-mêmes. Cette opération permet
un enfoncement du centre de gravité dans le sol (les autres facteurs vus plus
haut diminuent l'ascension du centre de gravité).
Pendant la phase d'oscillation, l'opération s'inverse et les segments de
membre passent en rotation externe (Figure 32).
Figure 32
Rotation axiale des segments du membre inférieur (35).
82
Il existe, en plus, une rotation opposée des ceintures, déterminée par
le balancement des membres supérieurs, avec au maximum 5 degrés de
rotation au niveau de Dl, 8 degrés de rotation opposée au niveau de L5. Le
point de transition où les rotations s'annulent est au niveau de D6-D8 (35)
(Figure 33).
Figure 33 :
Amplitude des rotations opposées des ceintures (35).
V.2. LA MARCHE DE L'AMPUTE DE CUISSE :
La marche est donc constituée de mécanismes complexes,
ostéo-articulaires et musculaires, qui fonctionnent avec une précision
horlogère.
Une perte de l'intégrité corporelle a inévitablement de grandes
conséquences sur la qualité même de la marche et sur la consommation
d'énergie dont le rendement est évidemment altéré.
83
L'amputé de cuisse perd trois éléments ostéo-articulaires essentiels :
le genou, la cheville et le pied. Tous trois jouent un rôle important dans les
déplacements du centre de gravité. Ils concourent, en effet, à ce que la ligne
de progression du centre de gravité soit la plus proche possible d'une droite.
Bien que très perfectionnées, les articulations prothétiques ne peuvent pas
remplacer totalement ce que la nature a admirablement bien fait (Figure 34).
Figure 34 :
Déplacements horizontaux et verticaux du centre de gravité à l'état
physiologique (d'après GROSSIORD et PIERA) (10).
1.Trajectoire du centre de gravité dans le plan sagittal.
2. Projection au sol de la verticale passant par le centre de gravité.
V.2. 1. Déroulement de l'examen d'un patient présentant une marche
pathologique, :
De façon plus générale, toute pathologie de la marche nécessite un
examen clinique attentif, de face et de profil, en laissant au patient la
possibilité d'atteindre une allure moyenne de marche.
84
L'examen débute par une observation générale du patient durant la
marche, ce qui permet de noter l'aisance ou non du déplacement, la symétrie
ou au contraire une asymétrie des mouvements, l'amplitude et l'allure globale
des déplacements verticaux et latéraux du corps, la longueur des enjambées
et la largeur de la base de sustentation.
Il est important de procéder à un examen spécifique des segments de
membre, dans chacune des phases du cycle de marche, de bas en haut,
puisque le point fixe est le pied au sol. L'examen conduit à l'étude des
variations des amplitudes des différents mouvements du pied, de la cheville,
du genou, de la hanche ainsi que les mouvements du rachis, de la tête, de la
ceinture scapulaire et des membres supérieurs.
Toujours d'un grand intérêt, l'interrogatoire permet de savoir si le
patient ressent des douleurs, qu'il pourra décrire, en précisant leur
localisation et leur moment d'apparition dans le cycle de marche. De même,
le patient signalera l'apparition d'une fatigue locale ou plus générale (35).
V.2.2. Le cycle de marche d'un amputé de cuisse appareillé (avec
une emboîture quadrilatérale) selon RAUPP, GRUMLER et LARDRY
(37):
V.2.2.1. L'attaque du talon au sol :
L'extension du genou prothétique n'est contrôlée que par le grand
fessier, qui place la hanche en extension
85
très tôt. A la fin de la phase d'attaque du talon au sol, la mise en adduction
de la hanche est difficile (d'autant plus si le moignon est court et si les
adducteurs ont été sectionnés très haut). La réception sur le talon se fait
sans absorption possible du choc par la cheville prothétique.
V.2.2.2. Le pied à plat sur le sol :
L'appui dans l'emboîture est alors maximal, cela requiert une bonne
stabilité du moignon, dépendante de ses capacités de contraction. Le point
d'application des forces n'est plus le centre mécanique habituel de
l'articulation de hanche dans l'emboîture quadrilatérale, mais correspond à la
zone d'appui de l'ischion sur la tablette ischiatique. Il existe une contracture
prédominante des abducteurs.
V.2.2.3. Décollement du talon, puis des orteils :
Les ischio-jambiers ne sont plus biarticulaires et ont une action
mineure dans l'extension de la hanche. Cette déficience est suppléée par le
grand fessier. La hanche doit se mettre en flexion juste avant le décollement
des orteils pour fléchir le genou prothétique. Cette action est assurée par le
psoas pour l'essentiel.
V.2.2.4..La phase oscillante :
Le sujet accentue le mouvement de flexion
86
de hanche pour compenser l'immobilité de la cheville et pour amener le
genou en extension. Le psoas y prend une part encore plus importante : c'est
le pas pelvien.
V.2.3. Les principaux défauts de marche chez l'amputé de cuisse
Si beaucoup d'entre eux sont présents du fait d'une mauvaise
adaptation de l'emboîture, d'autres existent en raison de l'amputation
elle-même. RAUPP et coll. (37) retiennent essentiellement :
- un moignon très court est souvent en flessum-abductum, rendant
l'appareillage délicat et une marche de qualité souvent médiocre,
- les muscles utilisés pour la marche sont ceux de la hanche.
L'amputation de cuisse a entraîné la disparition de l'insertion distale de la
plupart d'entre eux. L'ostéomyoplastie restaure toutefois un peu du jeu
agoniste-antagoniste.
Une contracture des adducteurs ou une insuffisance du moyen fessier
sont responsables d'une inclinaison latérale du tronc.
Un bourrelet des adducteurs au niveau du mur interne de l'emboîture
est responsable, lui, d'une marche en abduction, du fait de la douleur lors de
l'appui.
87
- la hanche enraidie en abduction : le pied prothétique est trop éloigné
de la projection au sol de la verticale du centre de gravité. Une dépense
d'énergie plus importante sera nécessaire pour déplacer latéralement le
centre de gravité. Il en résulte une boiterie et une inclinaison latérale du tronc
(Figure 35).
Figure 35
Pied prothétique trop éloigné de la projection au sol de la verticale du centre
de gravité (35).
- la hanche enraidie en flessum : le pas antérieur prothétique est trop
long ; il se produit un effacement de la lordose lombaire en phase de
passage et une hyperlordose en phase d'appui (Figures 36 et 37).
Figure 36
Figure 37
Figure 36 :Effacement total de la lordose Hyperlordose lombaire
lombaire au cours de la marche résultant d'une marche avec hanche enraidie
en flessum ( phase de passage) (35).
Figure 37 :Hyperlordose lombaire résultant d’une marche avec hanche
enraidie en flexion (phase d’appuis) (35).
88
ENJALBERT et coll. (13) constatent que l'amputé de cuisse exagère
la flexion et l'extension de la hanche, dernière articulation fonctionnelle et
n'utilise que très peu la flexion de genou prothétique. Ce phénomène est
d'autant plus marqué que le sujet marche sans canne.
Leur analyse dynamique des appuis plantaires met en évidence une
zone de pression réduite, médiane pour le pied prothétique, celle du côté
sain est élargie et déportée sur le bord externe (Figure 38). Les appuis
monopodaux sont prolongés du côté sain.
Figure 38 : Répartition des centres de poussée plantaire lors de l'appui chez
un amputé de jambe gauche (13).
89
AMPUTATION DE CUISSE CHEZ L'ADULTE
JEUNE: QUELLE EMBOITURE PROPOSER ?
90
91
VI. AMPUTATION DE CUISSE CHEZ L'ADULTE JEUNE : QUELLE
EMBOITURE PROPOSER ?
La prescription d'une emboîture de type "contact" représente pour
l'adulte jeune amputé de cuisse le choix le plus judicieux. Si l'emboîture
quadrilatérale fut longtemps la seule à être proposée, il existe aujourd'hui
d'autres concepts tels que le fût CAT-CAM (Contoured Adducted
Trochanteric-Controlled Alignment Method), dont les principes fondamentaux
ont été présentés en 1985 par J. SABOLICH (38). En français, CAT-CAM
pourrait être défini ainsi : "emboîture englobant l'ischion et imprimant une
adduction par moulage de la région sous-trochantérienne". Bien que les
termes "englobant l'ischion" ne soient pas présents dans la formulation
américaine, il est important de les préciser.
L'emboîture CAT-CAM est née des questions que se posaient les
médecins et les prothésistes, qui, depuis 1969, s'inquiétaient de la validité du
fût quadrilatéral et jugeaient nécessaire l'évolution de l'appareillage (23, 24,
38).
92
VI.1. L'EMBOITURE QUADRILATERALE: UNE LONGUE
EXPERIENCE :
L'emboîture quadrilatérale (ou quadrangulaire ou encore ovale
transversale) se caractérise par un collet de forme en général quadrilatérale
et par l'existence d'une tablette ischiatique (Photo 9).
VI.1.1. Description :
VI.1.1.1. La tablette ischiatique :
Elle est horizontale dans le plan antéropostérieur et dans le plan
médio-latéral. Parfois, il existe une légère inclinaison de l'assise ischiatique
vers la partie latérale ou antérieure (1, 25).
LEHNEIS a toujours été partisan de donner au siège ischiatique une
inclinaison vers le bas et l'avant, de façon à ce qu'il reste tangent à un rayon
allant de l'articulation de la hanche à l'ischion (23) (Figure 39).
Figure 39
Inclinaison de la tablette ischiatique selon LEHNEIS (23).
93
Photo 9 :
Emboîture quadrilatérale droite (6).
94
95
Le bord antérieur de l'assise ischiatique est légèrement arrondi et
lisse. Le bord postérieur de l'emboîture à ce niveau est parallèle au plan
frontal : la position assise ne doit pas entraîner une rotation de la prothèse.
La surface de la tablette est suffisamment grande pour que l'ischion et
une partie de la masse fessière puissent y reposer. La tablette se rétrécit à
sa partie externe et il est ménagé à cet endroit une échancrure destinée aux
muscles fessiers.
VI.1.1.2. Le bord antérieur :
Il réalise le contre-appui antérieur, chargé de maintenir l'ischion sur la
tablette ischiatique et l'empêcher de glisser vers l'avant. Il est formé d'une
pelote dont le rayon à grande courbure permet un appui non agressif : cette
pelote aide au maintien de la prothèse au cours de la phase pendulaire de la
marche.
Il épouse le contour abdominal, le long du
pli de l'aine, et il ne doit pas se heurter à l'épine iliaque antérosupérieure.
Dans sa partie externe, une loge est ménagée, afin que se place le
muscle droit antérieur (1, 25).
VI.1.1.3. Le bord interne :
Il relie la tablette ischiatique au bord antérieur. Il maintient les tissus
du périnée, sans devoir prendre appui sur la branche ischio-pubienne. Il
s'évase doucement pour épouser la
96
morphologie des tissus. A sa partie antérieure, presque à la jonction du mur
antérieur et du mur interne, il existe un chenal qui permet aux adducteurs de
se placer.
Souvent le plus petit mur de la collerette, il confère à l'emboîture une
forme plus trapézoïdale que quadrilatérale (Photo 9).
VI.1.1.4. Le bord externe :
Il doit maintenir les tissus refoulés par le contre-appui antérieur et la
tablette ischiatique. Concave en-dedans, le mur externe remonte jusqu'à la
partie supérieure du grand trochanter dont il épouse les reliefs (1).
Avec le bord interne, il tente de contrôler la stabilité dans le plan
médio-latéral alors que le mur antérieur avec son contre-appui et la tablette
ischiatique ont pour mission d'assurer la stabilité dans le plan
antéro-postérieur.
VI.1.1.5. Le corps du fût :
Il est intimement en contact avec le moignon. Ce contact permanent
aide au contrôle de la prothèse parle moignon, qui, en globulisant les masses
musculaires, génère une pression plus importante du fût sur la peau.
La paroi latérale du fût est assez plate sur toute sa hauteur : de ce fait,
il y a une uniformisation des pressions exercées sur le fémur lors de la
station unipodale.
97
Les autres parois sont de forme plutôt concave en-dedans pour loger
les groupes musculaires et permettre leur contraction lors de la phase
pendulaire de la marche.
L'orientation générale du fût est en flexion et en légère adduction : la
paroi latérale se dirige obliquement vers la partie médiale de haut en bas. Le
mur médial, lui, est quasiment vertical. Les murs antérieur et postérieur sont
obliques de la partie proximale à la partie distale d'arrière en avant.
La partie inférieure du fût, plus souvent vers l'extérieur que vers
l'intérieur, est le siège d'un orifice par lequel passe le jersey permettant le
chaussage : enroulé autour du moignon, le jersey est ensuite déroulé et
extirpé par le trou de soupape : les chairs du moignon "descendent" dans
l'emboîture et se placent dans le fût. Une fois le jersey complètement retiré,
une soupape vient combler le trou et assure l'herméticité.
VI.1.2. Techniques de moulage :
Deux techniques sont décrites dans l'ouvrage de RAUPP, GRUMLER
et LARDRY sur la rééducation et l'appareillage des amputés (37).
Dans les deux cas, le patient est debout, le bassin maintenu à
l'horizontale.
Le moignon est placé en rectitude et légère adduction. Le prothésiste
le recouvre d'un jersey tubulaire montant
98
haut sur la racine de la cuisse ; une bretelle le maintient en place. L'extrémité
inférieure du jersey est cousue.
- Première technique : le prothésiste déroule les bandes plâtrées de la
racine du membre jusqu'à l'extrémité, il recouvre largement le pli inguinal, le
pli fessier et le grand trochanter. Puis, avant que le plâtre ne durcisse, le
prothésiste modèle le collet de l'emboîture en marquant le bord postérieur du
grand trochanter, l'appui sous-ischiatique et le contre-appui antérieur au
niveau du triangle fémoral. Le mur interne est vertical, la face externe prend
une direction oblique en bas et en dedans.
Le prothésiste retire le moule durci et il procède à la fabrication du
positif ; les retouches sont indispensables : accentuation de l'horizontalité de
la tablette ischiatique, de la "corde" des adducteurs.
- La deuxième technique est réalisée à partir d'un collet préfabriqué
dont les dimensions sont proches de celles du moignon. L'application des
bandes plâtrées continue la forme quadrangulaire du collet. Les étapes
suivantes rejoignent celles citées ci-dessus (Figure 40).
Figure 40
Collet préfabriqué (37).
1. Tablette ischiatique
2. Mur interne
99
VI.1.3. Alignement de la prothèse dont l'emboîture est
quadrilatérale :
Chez le sujet valide, la pesanteur se répartit dans les deux jambes de
façon égale. Elle part du centre de la tête des deux fémurs en direction du
sol.
Chez l'amputé d'un membre inférieur, appareillé par une emboîture
quadrilatérale, la transmission des forces passe pour l'essentiel par la
tubérosité ischiatique. Le système de transmission des forces se trouve donc
déporté en-dedans et en arrière.
Il existe, par ailleurs, une tendance à l'abduction en raison de la
section des adducteurs et de la perte de leur insertion distale (seul le grand
adducteur a une insertion au tiers médio-distal du fémur ; une fois cette
insertion disparue, le fémur pivote en abduction, car il y a disparition du
système d'opposition aux abducteurs) (16).
VI.1.3.1. Alignement statique :
- Le pied, que l'on choisira pour un adulte actif de préférence à
restitution d'énergie, sera chaussé convenablement : la cambrure de la
chaussure devra correspondre à celle du pied prothétique. Un ajustement
sera souvent nécessaire, ne serait-ce que pour des raisons purement
esthétiques (le pied artificiel doit avoir le même volume que le pied sain).
-Le bas de jambe est vertical.
100
- Le genou prothétique est fixé. On vérifie que sa tranche supérieure
est bien horizontale aussi bien dans le plan frontal que sagittal.
- La fixation de l'emboîture sur son support devra respecter quelques
règles :
dans le plan frontal : la verticale abaissée de la tablette ischiatique,
située au tiers interne du bord postérieur, passe par le milieu de l'axe du
genou et par le centre du pied (Figure 41).
dans le plan sagittal, la verticale abaissée du milieu de la zone
périnéale (milieu du bord interne du collet de l'emboîture) passe à cinq
millimètres en avant de l'axe d'articulation supérieur des bielles, dans le cas
d'un genou à biellettes (Figure 42).
La ligne de charge tombe au niveau du quart postérieur du pied
prothétique. Dans le cas d'un genou monoaxial, généralement utilisé pour le
premier appareillage, la verticale passe à un centimètre en avant de l'axe
articulaire : cela assure la stabilité du genou artificiel (Figure 43).
L'emboîture est montée en légère flexion : il y a une mise en tension
du grand fessier, le pas postérieur en est facilité et le verrouillage du genou
en appui unipodal n'en est que plus sûr.
dans le plan horizontal, le pied prothétique est orienté selon une
rotation externe de 5 à 10 degrés, afin de se rapprocher de l'axe
physiologique.
101
Figure 41 :
Alignement de la prothèse fémorale dans le plan frontal (côté droit, vue
postérieure) (37).
Figure 42 : Prothèse fémorale avec genou monoaxial :alignement dans le
plan sagittal(côté gauche, vue interne) (37).
Figure 43 : Prothèse fémorale avec genou à biellette : alignement dans le
plan sagittal(côté gauche, vue interne) (37).
102
En position assise, l'emboîture à plat, le bas de la jambe est vertical.
Les axes prothétiques du genou et du pied sont horizontaux et
correspondent au côté sain (Figure 44).
Figure 44
Vérification de la verticalité du segment jambier en position assise.
l'emboîture doit reposer à plat, les axes du genou et de la cheville doivent
être horizontaux (37).
VI.1.3.2. Alignement dynamique :
Il sera satisfaisant si l'ensemble des chairs du moignon est bien
introduit dans le fût, si l'ischion repose correctement sur la tablette
ischiatique, sans bourrelet s'y interposant. La zone périnéale ne doit pas
subir de contraintes et la corde des adducteurs ne doit pas être écrasée.
Un dispositif de réglage de l'alignement situé entre l'emboîture et le
genou permet de régler indépendamment l'angulation et la translation
redonnant à la prothèse une image en miroir de l'autre jambe.
Les corrections se font à l'image en miroir de l'autre jambe, dans le
plan frontal en valgus ou varus ; dans le plan sagittal, elles portent sur le
flessum et dans le plan horizontal, sur les rotations (37).
103
VI.2. LA PROTHESE FEMORALE DE FORME ET D'ALIGNEMENT
NATURELS : NSNA (Normal Shape, Normal Alignment) d'Yvan
LONG (24) :
VI.2.1. De la réflexion...
En 1974, Yvan LONG s'est rendu compte que le fût quadrilatéral et
ses techniques d'alignement étaient discutables pour l'appareillage des
amputés de cuisse. Ayant observé une radiographie d'un amputé de cuisse,
équipé de sa prothèse, debout, le poids également réparti sur ses deux
jambes, les talons écartés de cinq centimètres et la pointe des pieds de sept
centimètres, il a constaté que le fémur amputé présentait une abduction très
prononcée. Par la suite, il compléta ses observations, qui confirmèrent cette
tendance à l'abduction du fémur amputé (24).
Ses recherches le conduisirent à fabriquer des prothèses fémorales
présentant la "ligne de LONG" (LONG's line).
VI.2.2. ...A la pratique :
Yvan LONG définit la ligne de LONG comme une ligne droite, qui part
de la tête du fémur pour descendre, en passant par l'extrémité distale du
fémur, vers le centre du talon (Figure 45).
Cette ligne n'est pas toujours verticale, mais évolue au contraire
constamment lorsque la personne amputée quitte la position immobile pour
entrer dans le cycle de marche.
104
Figure 45
LONG's line : la ligne de Mikulicz relie le point central de la hanche, du
genou et de l'articulation tibiotarsienne. L'adduction du moignon fémoral
selon LONG cherche à copier le modèle naturel (5).
Le maintien du fémur est rendu possible par une réduction de la
dimension médio-latérale de l'emboîture. La dimension antéro-postérieure
est augmentée et confère de ce fait plus de liberté aux muscles de la cuisse.
Les prises de mesure se font en longueur et en circonférence, le plus
haut possible et tous les cinq centimètres. Le moulage est réalisé à l'aide de
bandes plâtrées sur un patient debout. L'ischion est repéré, ses surfaces
interne et postérieure sont précisément situées, mais le prothésiste veillera à
ne pas dépasser l'ischion. Le patient serre les membres inférieurs l'un contre
l'autre et met la cuisse en extension durant toute la prise du moulage
jusqu'au durcissement du plâtre.
105
Sur la surface latérale du moule, le prothésiste trace une ligne
verticale.
L'emplacement de l'ischion et la profondeur du moule sont vérifiés au
retrait de celui-ci.
L'étape suivante consiste à fabriquer à partir du moulage, qui
représente le moignon en négatif, un positif en plâtre ; il est nécessaire de
procéder à un travail de réduction, le positif étant plus grand que ne l'est
réellement le moignon. La réduction se fait surtout sur la paroi latérale, qui
doit offrir un soutien sur une large surface et dont la limite supérieure monte
haut et passe au-dessus du trochanter.
L'ischion s'appuie sur la partie évasée du fût. Le siège ischiatique, qui
n'est pas forcément large, est perpendiculaire à la ligne de LONG. Il n'existe
aucune arête agressive (Figure 46).
Figure 46 Le siège ischiatique est perpendiculaire à la ligne de LONG (24).
La paroi interne est plus basse que le niveau du siège ischiatique (24).
106
Le fût étroit dans sa dimension médio-latérale, présentant une paroi
latérale caractéristique, permet le maintien de l'angle d'adduction du fémur et
améliore la démarche, en rapprochant le pied prothétique de la ligne de
marche.
Cette technique d'alignement convient pour des moignons longs, elle
avoue ses limites pour des moignons plus courts (tiers supérieur par
exemple) car elle n'est possible qu'au prix d'une hyperadduction du fémur
(Figure 47).
Figure 47 :
Méthode d'alignement LONG's line. Dans le cas de moignon court, cette
technique d'alignement n'est possible qu'au prix d'une hyperadduction du
fémur (2).
107
VI.3. LE FUT CAT-CAM :
VI.3.1. Les prémices d'une évolution:
De même qu'Yvan LONG, John SABOLICH critique le concept du fût
quadrilatéral. Le manque de stabilisation dans le plan frontal, une
compression exagérée du triangle fémoral par le contre-appui antérieur, la
trop importante charge sur la tubérosité ischiatique ainsi que la tendance à
l'abduction du fémur sont autant de griefs, qui poussèrent John SABOLICH à
apporter des modifications à la technique quadrilatérale, aidé en cela par les
déductions et applications d'Yvan LONG (24, 38).
Il commença par diminuer la dimension médio-latérale et par élargir la
dimension antéro-postérieure, de façon à conserver le périmètre d'origine, et
à réduire la pression sur le triangle fémoral. Il modifia également l'assise
ischiatique en lui imprimant un angle de 300 dans le plan frontal vers
l'externe (cette inclinaison permet d'augmenter la charge sur les fessiers et
de soulager la tubérosité ischiatique).
Le SABOLICH Center continua son étude sur les fûts non
quadrangulaires et, en 1985, John SABOLICH présenta les principes
fondamentaux de l'emboîture CAT-CAM (38).
VI.3.2. Description du fût CAT-CAM :
D'emblée, le fût CAT-CAM se différencie du fût quadrilatéral par une
dimension antéro-postérieure élargie et une dimension médio-latérale réduite
(39) (Photos 10 à 12).
108
Il n'existe plus de tablette ischiatique, mais une logette, qui enveloppe
la tubérosité ischiatique et une partie de la branche ischio-pubienne (Figure
48). RADCLIFFE définit le fût CATCAM ou ovale longitudinal comme un fût
enveloppant l'ischion (ischium containment socket) par opposition à
l'emboîture quadrilatérale : ischium supporting socket ou fût soutenant
l'ischion (21) (Figure 49).
Figure 48 :
Emboîture CAT-CAM : enveloppement de la tubérosité îschiatique et d'une
partie de la branche ischio-pubienne (2).
Figure 49 :
Coupe sagittale montrant la relation pelvis-emboîÎture (39).
109
Photo 10 :
Emboîture CAT-CAM gauche (6).
110
111
Photo 11
Englobement dorso-médial de la tubérosité ischiatique.
Photo 12
Vue postérieure (6)
112
113
La principale difficulté de l'enveloppement de l'ischion est de nature
anatomique. Au cours de leurs recherches, John SABOLICH et son équipe
ont recensé trois types principaux d'ischion, appelés Alpha, Bâta et Gamma
selon leur configuration (Figure 50) :
- le type Alpha présente un côté interne, qui remonte à angle vif, ce
qui facilite son "accrochage" dans l'emboîture.
- le type Bêta est plus ouvert, son enveloppement est délicat, la
douceur de l'arête le rendant difficile à apprécier par le prothésiste.
- le type Gamma est large et aplati : son maintien dans l'emboîture
peut être source de douleurs dans la zone périnéale. La dimension
médio-latérale est agrandie, l'adduction du fémur amputé moindre (38).
Figure 50 :
Les trois principaux types d'ischion selon SABOLICH (38).
De façon plus générale, le bassin de la femme est plus large et plus
plat que celui de l'homme : la différence de hauteur entre le pubis et la
tubérosité ischiatique est moins grande et la branche ischio-pubienne monte
de la tubérosité vers la symphyse pubienne, selon un angle plus plat. Il sera
donc plus complexe de réaliser un emboîtement "juste" de l'ischion chez les
patients de sexe féminin (21) (Figures 51 et 52a et b).
114
Figure 51 :
Bassin féminin et bassin masculin (21).
115
Figure 52a :
Vue distale d'un bassin féminin la branche de l'ischion présente un angle de
45" avec le plan médian (21).
Figure 52b :
L'angle correspondant chez l'homme est d'environ 30" (21).
116
Le fémur, qui présente un angle naturel d'adduction de huit à douze
degrés, est stabilisé dans cette position par un façonnage de la paroi
latérale, qui moule intimement le contour du grand trochanter et épaule le
fémur sur toute sa longueur (OKC Femoral Channel Oklahoma City Channel)
(Figure 53).
Figure 53 :
Coupe transverse du fÛt CAT-CAM (38).
AL : Tendon des adducteurs.
IT : Tubérosité ischiatique.
OKC Femoral Channel : Gouttière fémorale.
En pointillés, le contour de l'emboîture quadrilatérale.
Ces deux caractéristiques d'englobement de l'ischion et de façonnage
de la paroi latérale procurent une plus grande stabilité médio-latérale car
elles assurent un verrouillage osseux (bony-lock) (Figure 54). Le fût ovale
longitudinal ne comprime que légèrement les parties molles de la région
sous-trochantérienne dont les mesures sont prises latéralement sous le
trochanter et au niveau médial en-dessous de l'ischion (donc au niveau de la
zone des adducteurs) (Figure 55). La paroi médiale en englobant les parties
molles, ne permet pas qu'elles débordent en bourrelet au niveau médial (21).
117
Figure 54 :
La tubérosité ischiatique est incluse dans l'emboîture. Le façonnage de la
face externe du fémur crée le contre-appui indispensable à la stabilité du
système dans le plan frontal (38).
Figure 55 Mesures transversales du fût CAT-CAM. 1. Osseuses 2. Tissus
mous (2).
La disparition du contre-appui antérieur lève l'excès de pression sur
les éléments neurovasculaires du triangle fémoral, "la corde" des adducteurs,
modelée avec attention car très sensible à la pression, prend une place plus
externe (38).
118
VI.3.3. Techniques de moulage du fût CAT-CAM
Pour POHLIG (36), il n'est pas possible de prendre en compte tous les
critères d'emboîtement du CAT-CAM dans l'opération unique de moulage
circulaire de l'emboîture quadrilatérale.
La technique du moulage est donc séparée en plusieurs phases
- modelage des différentes régions en position fonctionnelle,
- assemblage des pièces, afin de reconstituer le moule.
VI.3.3.1. "Isolement" du moignon :
L'ensemble du moignon et la partie interne de l'autre cuisse sont
enduits d'une crème protectrice.
Un collant recouvre le moignon et également le membre sain : en
épousant étroitement la partie supérieure du moignon, le collant offre la
garantie d'une reproduction bien meilleure dés volumes.
VI.3.3.2. Les repères et les mesures :
Sur le collant, adhérant au moignon grâce à la crème, le prothésiste
marque les repères du squelette : l'épine iliaque antéro-supérieure, le grand
trochanter, le trajet du fémur jusqu'à son extrémité. Les plis fessiers sont
reportés sur le collant.
119
La première mesure horizontale concerne la distance séparant la
branche ischio-pubienne du bord inférieur du grand trochanter. L'appareil de
mesure -un pied à coulisse- croise la ligne axiale du moignon à un angle de
900. Cette rigueur permet pour la suite du travail la répétition précise des
mesures.
La mesure médiolatérale des parties molles est prise 5 centimètres
en-dessous de la mesure du squelette. Tous les 5 centimètres, à partir de
cette mesure, les périmètres du moignon sont relevés.
Ceux-ci sont d'abord mesurés, le patient allongé avec une légère
tension du mètre. Puis, le patient se met debout, les parties molles "migrent"
vers le bas du fait de la pesanteur : de nouvelles mesures sont alors prises.
La différence des mesures entre les positions couchée et debout
renseigne sur l'état de la musculature et du tissu de soutien.
ANDREWS (2) souligne également les mensurations transversales
osseuses et des parties molles, mais estime tout aussi importantes les
mesures de l'angle entre la branche ischio-pubienne et la ligne de
progression du centre de gravité, l'angle ilio-fémoral et l'inclinaison de
l'ischion (Figure 56).
Figure 56 :
a. Angle ilio-férmoral
b. Inclinaison de lischion
(2)
120
VI.3.3.3. Préparation des bandes plâtrées
La largeur requise pour les bandes plâtrées est de 20 centimètres. La
bande interne a une longueur correspondant àla distance allant du milieu du
genou sain à 2 centimètres de l'extrémité du moignon en passant par le
pubis.
La longueur de la bande antéro-postérieure est d'environ 50
centimètres. La languette ventrale s'étend de l'épine iliaque
antéro-supérieure jusqu'à l'extrémité du moignon.
VI.3.3.4. Les trois phases d'enlèvement du modèle CAT-CAM :
Les phases 1 et 2 requièrent toujours
selon POHLIG (36) la présence de deux techniciens orthopédistes.
La troisième phase en nécessite trois.
a. Première phase : formation de la paroi interne en décubitus dorsal :
Il est essentiel de prêter attention au positionnement du patient à tout
moment. Pour cette première étape de façonnage, la jambe saine est fléchie
à 90' au niveau du genou. Le moignon est en légère extension, le fémur est
en adduction modérée.
La main du premier technicien, placée médialement, "accroche" du
bout des doigts la tubérosité ischiatique et la branche ischio-pubienne et
remonte lentement et précautionneusement dans le bassin et le trou
obturateur.
121
L'autre main s'appuie sur la face latérale du moignon et adducte le
fémur.
La bande interne est étendue de la face interne de la cuisse saine
jusqu'à la partie interne du moignon en passant par le périnée.
Le premier technicien modèle en permanence les reliefs squelettiques
en exerçant une légère traction distale sur la languette interne. Le deuxième
technicien contrôle l'adduction du moignon et l'inclinaison de la jambe saine.
b. Deuxième phase : moulage de la partie latérale :
La liaison du moignon à la jambe saine par la bande interne sert de
préparation pour cette seconde phase et fournit le point de référence pour
trouver les positions.
Le patient est tourné à 90 degrés sur le côté sain ; les techniciens
veillent à ce que la position de la zone interne à peine formée ne se modifie
pas.
La jambe saine reste pliée au niveau du genou : le patient peut
stabiliser son corps. Le moignon est tendu, le fémur toujours en adduction.
Le façonnage de cette partie latérale du moignon est obtenu par une
pression sur le grand trochanter, le fémur et sa crête dorso-latérale.
De ce modelage puissant dépendent les futures fonctions d'adduction
du fémur dans le fût
La languette antéro-postérieure de 50 centimètres est disposée de la
face antérieure à la face postérieure du moignon et définit les territoires
proximaux : pubis et coccyx.
122
On superpose ensuite les bandes plâtrées à la manière des écailles
d'un poisson, de la face postérieure à la face latérale : elles se terminent à la
crête antéro-externe du fémur.
Le premier technicien modèle les formes de la région de la fesse et de
la tubérosité ischiatique.
Le deuxième moule avec ses deux mains la crête dorsale du fémur, le
massif trochantérien. Il façonne le relief fémoral en enserrant le grand
trochanter entre pouce et index.
Le moule, une fois durci, est enlevé. Il est partiellement terminé et les
techniciens orthopédistes déterminent les zones de coupe. La partie interne
est entièrement conservée ; à la face antérieure, le cercle est rompu à
l'insertion du grand adducteur. Latéralement, le moule conserve l'empreinte
proximale du grand trochanter. A 5 centimètres en-dessous de la branche
ischio-pubienne, afin de laisser libres les parties molles pour la suite des
opérations, on raccourcit le moule.
C. Troisième phase : la face antérieur et distale :
Le patient est debout, le moignon en extension et le fémur reste
toujours en adduction.
Le premier technicien est assis en arrière du patient, le second en
avant de lui. Ils replacent sur le corps la partie interne du moulage et sont
attentifs au bon positionnement de la région fessière et pubienne dans le
moule.
Tout aussi importante est l'adaptation du moule aux reliefs osseux : le
patient ne doit pas avoir le sentiment que la tubérosité ischiatique et la
branche ischio-pubienne sont sur le
123
bord du moule lors de la mise en charge du moignon, mais il doit avoir
l'impression qu'elles sont profondément installées dans le moule,
Les parties molles doivent correspondre au moule comme une clé à
une serrure : en raison de l'importance de cette étape, POHLIG estime
nécessaire la présence d'un troisième technicien.
La zone antérieure du moule ainsi que les parties distales sont
recouvertes de bandes plâtrées. Un enroulement avec une bande de 20
centimètres de large stabilise les différentes parties du moule.
Le premier technicien fixe l'arceau squelettique et veille à ce que le
moignon soit toujours en extension-adduction.
Le deuxième technicien modèle avec une pression forte la région
latérale, façonne le fémur sur toute sa longueur en insistant sur les reliefs.
Le troisième technicien modèle la face antérieure. Du fait de la
pression latérale, le négatif devient encore plus ovale dans le sens
antéro-postérieur.
Le négatif en plâtre obtient à la fin des opérations la forme typique
ovale longitudinale du futur fût CAT-CAM.
1
Pour A. TOURNEUX (40, 41), la technique du moulage doit tendre
vers l'obtention d'un modèle sans retouche, image fidèle du moignon dont
l'empreinte serait acquise dans des conditions idéales de contention et
d'alignement, extrapolant ce que devrait être l'emboîture définitive.
124
VI.3.4. Alignement de la prothèse CAT-CAM
John SABOLICH (38) constate que l'application de l'alignement selon
LONG (position du pied prothétique sous le centre articulaire de la hanche ou
sous l'extrémité distale du fémur) n'est pas toujours possible. Il a recours au
dispositif du bas de jambe réglable de BERKELEY afin d'obtenir un
alignement personnalisé bien meilleur (38).
La ligne d'aplomb du pied, bien que presque toujours placée à
l'extérieur de l'aplomb de l'ischion, dépend en fait de plusieurs paramètres :
- du patient lui-même,
- de la puissance des muscles fessiers,
- de la forme de l'ischion,
-de l'épaisseur des tissus sous-cutanés,
- de la longueur du fémur,
- du logement de la tubérosité ischiatique dans l'emboîture,
- des possibilités de serrage médio-latéral du fémur dans sa région
moyenne et distale.
Ainsi, il n'existe pas une règle d'alignement mais des règles
d'alignement propres à chaque amputé.
125
L'INFLUENCE DE L'APPAREILLAGE SUR LA
READAPTATION FONCTIONNELLE
126
127
VII. L'INFLUENCE DE L'APPAREILLAGE SUR LA READAPTATION
FONCTIONNELLE :
Aujourd'hui, les prothésistes disposent pour l'appareillage des
amputés de cuisse de deux concepts d'emboîture-contact :
- l'emboîture quadrilatérale : elle bénéficie d'une expérience de p lus de
30 ans. Sa technique de moulage est relativement simple (utilisation de collet
préfabriqué) (2, 30, 37).
- l'emboîture CAT-CAM : la dernière née des emboîtures-contact.
Suscitant l'intérêt, elle est l'objet de multiples études la confrontant avec
l'emboîture quadrilatérale (1, 2, 5, 14, 15, 21, 29).
Biomécanique et dépenses énergétiques durant la marche sont les
principaux critères de comparaison ; les dépenses d'énergie seront d'autant
plus faibles que les données biomécaniques seront plus proches du modèle
physiologique.
VII.1.BIOMECANIQUE :
VII.1.1. Généralités :
L'emboîtement du moignon dans le fût, tout en assurant une
répartition des surfaces de contact, assure la transmission
128
des forces et des mouvements.
KAPHINGST et FITZLAFF (21) distinguent des "forces internes" et
des "forces externes" :
- les forces internes : elles comprennent les forces liées au poids du
corps et les forces musculaires qui, par le biais d'un système d'articulations
et de leviers osseux, agissent comme des couples de rotation.
- les forces externes : ce sont les forces de réaction s’opposant aux
forces internes, et toutes les autres forces qui peuvent s'exercer sur le corps
depuis l'extérieur.
Chacune des parties du corps dispose de ses propres forces de
masse ; l'ensemble de ces forces produit une résultante qui part du centre de
gravité du corps vers le centre de la terre, lorsque le corps ne subit pas
l'action d'autres forces (Figure 57). En position debout, la résultante est le
fruit d'une composante verticale et d'une composante horizontale. Elle part
en oblique du centre de gravité vers le point de contact au sol. Il apparaît une
rotation autour du point de contact au sol.
Figure 57
129
Lorsque l'on se tient debout sur les deux jambes, le couple ainsi créé
au niveau d'une jambe est neutralisé en raison de l'existence des forces des
couples s'exerçant dans l'autre jambe de façon tout à fait symétrique.
L'articulation de la hanche joue le rôle de point d'appui, le bassin celui
de double levier (Figure 58).
Figure 58
La pesanteur agit sur le levier central, alors que les abducteurs jouent
sur le levier latéral; des couples de rotation opposée et de même valeur
assurent l'équilibre : les abducteurs agissent sur le levier le plus court et
doivent développer une force plus importante que celle correspondant à la
pesanteur et qui porte sur le levier le plus long.
130
Selon KAPHINGST et FITZLAFF (21), lorsque le système décrit
ci-dessus est en équilibre statique, la pesanteur se répartit de façon égale
sur les deux jambes et part verticalement du centre de la tête des deux
fémurs en direction du sol (Figure 59).
Figure 59
Figure 60
Si l'on applique ce schéma aux personnes amputées, on s'aperçoit
qu'il manque au vecteur de force un point de contact au sol (Figure 60). Le
schéma ne devient correct que si l'on fournit un appui au côté amputé.
131
VII.1.2. Application au fût quadrilatéral
KAPHINGST et FITZLAFF (21) décrivent que, dans le fût quadrilatéral,
une part importante de la transmission des forces passe par la tubérosité
ischiatique, point d'appui plus distal, médial et dorsal que le centre de la tête
fémorale (Figure 61).
Figure 61
ANDREWS (2) et LEHNEIS (23) rappellent cependant que l'appui
ischiatique n'est pas une réalité au cours de toutes les phases de la marche :
la distance de la tubérosité ischiatique à la table ischiatique est
proportionnelle àl'angle de flexion de la hanche : à l'attaque du talon ( Heel
Strike), le poids du corps est transmis sans support squelettique direct.
132
Il faut néanmoins considérer la tubérosité ischiatique comme un point
de rotation et d'appui dans le système de transmission des charges. Mais
elle n'est pas le seul puisque l'articulation de la hanche reste libre et
constitue un second point de rotation pour l'abduction du moignon.
Ces deux points d'appui et de rotation ne sont pas congruents, ce qui
engendre dans la cinétique de marche des déplacements du fût par rapport
au moignon.
Quand les abducteurs de hanche (pyramidal, muscles fessiers) se
contractent, l'ischion est repoussé en dedans. En effet, si les déplacements
en dehors de l'ischion peuvent être évités par le contact éventuel du
trochanter avec le mur externe de l'emboîture, rien n'empêche les
déplacements en dedans. Le glissement de l'ischion en dedans génère une
abduction du fémur dont l'extrémité distale s'écrase sur le mur externe, ainsi
qu'une compression des parties molles proximales contre le mur interne,
avec pour corollaire un baillement du bord supérieur externe de l'emboîture
(Figure 62a et là).
Selon KAPHINGST (21), il découle de l'abduction du fémur deux faits
importants :
- inefficacité des petit et moyen fessiers dans leurs fonctions de
stabilisation du bassin. HAAS (17) décrit l'apparition d'une atrophie
musculaire à long terme.
- transfert du centre de gravité du corps latéralement au-dessus de la
prothèse, de façon à le placer à la verticale du point de contact au sol ; cela
nécessite une importante flexion latérale du tronc (Figure 63).
133
Figure 62 :
Transmission des forces (2).
62a Lors de l'appui sur la table ischiatique.
62b Lors de la contraction des abducteurs de hanche :
glissement en-dedans de l'ischion, abduction du fémur dont l'extrémité
distale s'écrase sur le mur externe.
Compression des parties molles proximales internes.
Baillement du bord supérieur externe de l'emboîÎture.
Figure 63
134
De plus, lors de la marche, afin de soulager les contraintes exercées
sur l'extrémité distale du fémur et les parties molles proximales internes,
l'amputé incline le tronc du côté de la prothèse.
La démarche de l'amputé, en raison de l'existence de cette flexion
latérale du tronc, ou boiterie de Trendelenburg, s'éloigne du schéma de la
marche physiologique, tant du point de vue esthétique et cinématique
qu'énergétique.
Outre le déplacement en dedans de l'ischion, la forme du fût ovale
transversal entraîne d'autres effets délétères, en particulier dans sa région
antérieure. En effet, la tubérosité ischiatique est maintenue sur la zone
d'appui prévue àcet effet grâce à une pelote frontale qui rétrécit le diamètre
antéro-postérieur de l'emboîture (Figure 64a et b).
Figure 64 :
64a : La pelote frontale maintient la tubérosité ischiatique sur son appui.
64b : Elle est à l'origine d'un excès de pression en position assise prolongée
(14).
135
Bien que, pour ANDREWS (2), les emboîtures quadrilatérales
européennes semblent moins agressives dans cette zone que les fûts
américains, la pelote frontale exerce une pression sur les éléments
vasculo-nerveux du triangle fémoral et sur les éléments musculaires.
KAPHINGST (21) dénonce cet excès de pression provoqué par la paroi
antérieure convexe, bombée vers l'intérieur du fût.
ANDREWS (2) et HAAS (17) sont plus modérés; ce dernier estime
que la compression des éléments vasculo-nerveux du triangle fémoral est en
réalité plus faible qu'on ne l'imagine. En revanche, il signale une diminution
de la fonction de la pompe musculaire et une altération de la microcirculation
du moignon.
VII.1.3. L'emboîture CAT-CAM : ce qui change avec elle :
Dans le fût CAT-CAM, il n'existe pas d'appui prévu pour la tubérosité
ischiatique. La branche de l'ischion fait l'objet d'un enveloppement
dorso-médial.
La tubérosité ischiatique n'est donc plus sollicitée comme point de
transmission des charges. La théorie voudrait que la transmission des
charges passe à nouveau par le centre de l'articulation de la hanche. Il
n'existe, en effet, pas d'autre point de transmission au niveau du squelette.
Pour KAPHINGST (21), la pratique ne rejoint pas encore totalement la
théorie. Néanmoins, la transmission des charges dans le fût CAT-CAM se
rapproche de celle qui existe chez les
136
personnes non amputées. L'auteur en décrit les mécanismes l'emboîtage
dans le fût ovale longitudinal assure l'enveloppement dorso-médial de
l'ischion et l'appui latéral sous -trochantérien. Le centre de la tête fémorale se
trouve à peu près au centre de la coupe transversale de l'emboîture ; la
stabilisation est le résultat du maintien osseux de la branche ischio-pubienne
d'une part, et de l'ensemble trochantérien et sous-trochantérien d'autre part,
complétée par la compression très modérée des parties molles (la région du
triangle fémoral est préservée de toute pression excessive).
Deux forces horizontales s'opposent dans le plan frontal pratiquement
à la même hauteur (Figure 65).
Figure 65
Ces deux forces n'interviennent cependant pas dans la transmission
des charges dans le sens vertical. Cette transmission est, en effet, assurée
soit par une force dirigée verticalement, soit par deux forces dont la
résultante est verticale.
137
L'appui latéral sous-trochantérien et l'adduction du fémur créent une
force dirigée en oblique vers le centre de la tête fémorale (Figure 66).
Figure 66
L'appui médial et l'englobement de l'ischion et des parties molles
génèrent une force orientée également en oblique vers le centre de la
hanche (Figure 67).
Figure 67
138
La résultante de ces deux forces est verticale. En phase statique, le
schéma de transmission des charges se rapproche du schéma
physiologique.
La figure 68 illustre la combinaison de toutes les forces qui stabilisent
le bassin dans le plan frontal en phase statique.
Figure 68
La transmission des charges dans le plan sagittal est assurée par
l'hydrostatique du fût à contact total et par l'emboîtement supplémentaire de
certaines parties des muscles (respect de la musculature ischio-crurale par
un emboîtement précis). La saillie de la table ischiatique de la quadrilatérale,
qui provoque une sensation de brûlure inconfortable au niveau des
ischio-jambiers lors de la station assise prolongée, est supprimée.
139
Sur le plan dynamique, l'efficacité d'une emboîture englobant l'ischion
est définie par ANDREWS (2) par sa capacité à maintenir l'adduction
maximum du fémur durant la marche : le fût CAT-CAM le permet grâce à
l'englobement soigneux de l'ischion, à l'appui sous-trochantérien et à
l'aplatissement des parties molles dans le sens transversal, ce qui limite les
mouvements relatifs d'abduction du fémur.
Les trois mouvements déterminants du bassin lors de la marche
(rotation, anté- et rétroversion, déplacement latéral) peuvent être à nouveau
utilisés du fait de la suppression de l'appui ischiatique (2).
L'amélioration de la cinétique et cinématique de la marche peut ne pas
être immédiate chez les amputés de cuisse, qui ont longtemps été
appareillés par une emboîture quadrilatérale et qui souffrent d'une
insuffisance musculaire, en particulier du moyen fessier. Il leur faut le temps
de restaurer une certaine tonicité des muscles pour constater un meilleur
confort.
Il semble évident que la prescription d'un système de prothèse et plus
précisément d'un type d'emboîture est primordial en phase post-opératoire.
La Commission des coûts de la Fédération du Land de Bavière
(Circulaire 7/93, Article 3) estime que, pour un premier appareillage,
l'utilisation du CAT-CAM n'est pas indiquée, compte tenu des transformations
que le moignon subit fréquemment dans le court terme et compte tenu du
surcoût lié à la prescription d'un fût ovale
140
longitudinal enveloppant la tubérosité (17). HAAS (17) affirme, au
contraire, la légitimité de la prescription du fût CAT -CAM comme premier
appareillage et il le justifie en présentant les faits suivants : d'une part,
l'emboîture CAT-CAM empêche l'apparition de l'atrophie musculaire des
abducteurs et, d'autre part, elle assure une bonne microcirculation en raison
de la répartition harmonieuse des parties molles et des masses musculaires,
qui peuvent fonctionner plus librement (Figure 69).
Figure 69
141
VII.2. BIOENERGETIQUE DE LA MARCHE
VII.2.1. Généralités:
La dimension bioénergétique apparaît pour DULIEU et ses
collaborateurs (12) comme essentielle dans le résultat final de la marche
appareillée chez l'amputé de membre inférieur.
L'avancée en âge entraîne, chez le sujet amputé, tout comme chez le
sujet sain, une dégradation de l'efficience énergétique de la marche (12, 22).
La cause de l'amputation interfère avec le coût énergétique (les amputations
traumatiques sont sur ce plan moins onéreuses que les amputations
vasculaires) ; l'existence de pathologie ou handicap associés pèse lourd
dans la balance énergétique.
Par ailleurs, une amputation majeure du membre inférieur entraîne un
surcoût énergétique.
Pour DULIEU (12) et JEAGERS (19), les sujets valides adoptent une
vitesse de marche confortable, identique àcelle correspondant à la meilleure
efficience énergétique, alors que les sujets amputés de cuisse ont une
vitesse libre de marche plus lente.
Dans leur étude consacrée au coût énergétique de la marche de six
sujets valides et de onze amputés de cuisse, JEAGERS et ses
collaborateurs (19) notent que le rythme cardiaque des amputés de cuisse
est plus élevé que celui des sujets sains, au repos et à toutes les vitesses de
marche étudiées (au nombre de six).
142
Pour une même vitesse de marche, ils présentent une consommation
d'oxygène plus élevée que les sujets valides. Cette consommation d'oxygène
augmente parallèlement aux vitesses de marche. Il n'y a pas de différence
significative entre les deux groupes dans les positions assise ou allongée,
mais la consommation d'02 est plus basse en position debout chez les
amputés de cuisse.
A la vitesse de marche correspondant à la meilleure efficience
énergétique, propre à chacun des deux groupes, JEAGERS et collaborateurs
constatent une augmentation de 25 à 35 % de la dépense d'énergie par
mètre parcouru chez les sujets amputés par rapport aux sujets valides. La
dépense d'énergie par seconde est, en revanche, peu modifiée.
Au-dessous de leur vitesse de marche librement choisie, il n'existe
pas de différence significative de la dépense d'énergie par mètre et par
seconde entre les deux groupes. Mais les sujets valides dépensent moins
d'énergie que le groupe des amputés de cuisse s'ils adoptent leur vitesse
libre de marche.
Cependant, les auteurs dénoncent les limites de leur étude en raison
du petit nombre d'amputés et de la grande diversité des composants des
prothèses dont étaient équipés les sujets retenus pour l'étude et ils
conseillent de comparer chez un même sujet les effets des différents types
de matériaux prothétiques.
143
VII.2.2. Dépenses énergétiques durant la marche
quadrilatérale-CAT-CAM : un face à face décisif
Les partisans de l'emboîture CAT-CAM revendiquent, par rapport à
l'emboîture quadrilatérale, une meilleure stabilité du bassin dans le plan
frontal, la restauration d'une certaine mobilité du pelvis, le maintien de
l'adduction du fémur tant en statique qu'en dynamique et une amélioration de
la fonction musculaire. Les concepteurs de l'emboîture CAT-CAM émettent
l'hypothèse qu'elle permet, en raison d'une biomécanique se rapprochant du
schéma physiologique, une réduction de la dépense d'énergie.
FLANDRY et ses collaborateurs, en 1989 (14), puis GAI LEY et ses
collaborateurs (15), en 1993, entreprennent d'analyser les performances
obtenues avec le fût CAT-CAM en les comparant à celles notées avec le fût
quadrilatéral.
Pour leur étude, FLANDRY et coll. (14) recrutent cinq patients
successivement appareillés avec un fût quadrilatéral et un fût CAT-CAM. Les
modifications apportées sont strictement limitées aux emboîtures.
Le passage au fût CAT-CAM est apprécié par quatre de leurs patients,
qui rejettent l'offre de retourner à l'emboîture quadrilatérale.
Pour trois d'entre eux, l'abduction du fémur qui existait avec
l'emboîture quadrangulaire est transformée en adduction. Le quatrième
présentait une adduction initiale de 10 degrés ; elle passe à 15 degrés avec
le fût CAT-CAM.
144
Un patient est mécontent de son emboîture CAT-CAM et demande un
retour à l'emboîture quadrilatérale. L'alignement obtenu avec le fût CAT-CAM
est médiocre (inversion de ces 2 degrés d'adduction en 5 degrés d'abduction
lors de son passage au fût CAT-CAM).
Pour tous les patients, les troubles de la marche sont résolus pour une
grande part. L'inclinaison latérale du tronc persiste, mais à un degré moindre.
Pour quatre amputés, y compris celui dont les alignements étaient peu
satisfaisants, la longueur moyenne d'une enjambée est passée de 0,99
mètre avec l'emboîture quadrilatérale à 1,02 mètre avec le fût CAT-CAM.
De même, la moyenne de la vitesse de marche est améliorée de 4,12
mètres par minute.
Le passage au fût CAT-CAM permet une réduction de la
consommation d'oxygène: l'amélioration moyenne constatée est de 0,078 ml
par mètre parcouru (0,364 ml/m avec la quadrilatérale contre 0,286 ml/m
pour le fût CAT-CAM).
Deux patients, appareillés par le fût CAT-CAM, ont été capables
d'accroître leur autonomie de marche.
Deux autres, bien que n'ayant pas augmenté leur niveau fonctionnel,
ont senti devoir faire moins d'efforts pour atteindre ce niveau.
Pour FLANDRY et coll. (14), le maintien de la dépense d'énergie à
son niveau physiologique apparaît cohérent avec l'élimination des
mécaniques excessives du corps.
145
GAILEY (15) estime cependant que le nombre de sujets examinés est
trop faible et que, par conséquent, cela compromet la fiabilité des résultats.
Néanmoins, sans pouvoir l'affirmer, l'étude de FLANDRY suggère
l'avantage énergétique et biomécanique du fût CAT-CAM au cours de la
marche.
En 1993, intéressés par ces préliminaires, GAILEY et son équipe (15),
cherchent à déterminer si, effectivement, il existe des différences en matière
de consommation d'énergie durant la marche entre les amputés appareillés
par une emboîture quadrilatérale et ceux qui utilisent un fût CAT-CAM.
Trente personnes sont recrutées : dix sont appareillées par le fût CAT-CAM,
dix autres par le fût quadrilatéral, les dix dernières, non amputées,
constituent le groupe de contrôle.
Quel que soit le groupe, GAILEY (15) ne retrouve pas de différence
significative dans la consommation d'oxygène ou le rythme cardiaque avant
la marche.
A l'allure la plus lente (33,5 mètres par minute), les personnes
amputées, qu'elles soient appareillées par le fût quadrilatéral ou le fût
CAT-CAM, présentent une consommation d'oxygène plus importante et un
rythme cardiaque plus élevé que les sujets témoins. Le type de fût ne semble
pas intervenir dans la consommation d'oxygène ou le rythme cardiaque.
A la vitesse de marche plus rapide (67 mètres par minute), la
consommation d'oxygène des sujets utilisant le fût CAT-CAM
146
est sensiblement moins importante que celle des sujets appareillés en
quadrilatérale. Le rythme cardiaque n'est toujours pas influencé par la
configuration de l'emboîture.
Au terme de l'étude, la comparaison directe entre amputés de la
consommation d'énergie durant la marche à une vitesse normale de 4
km/heure montre que les personnes appareillées par le fût CAT-CAM
consomment 20 % moins d'énergie que celles qui sont appareillées par une
emboîture quadrilatérale.
De plus, toujours à une vitesse de marche normale, la consommation
d'énergie avec la quadrilatérale est en moyenne supérieure de 42 % à celle
des personnes non amputées, alors que les sujets utilisant le fût CAT-CAM
ne consomment en moyenne que 27 % d'énergie en plus.
VII.3. EN RESUME :
Les facteurs biomécaniques squelettiques interviennent sur la stabilité
de l'unité locomotrice. Ils assurent toutefois une mobilité suffisante pour que
la ligne de progression du centre de gravité soit la plus proche possible d'une
droite : ce phénomène est garant d'une dépense énergétique minimum.
Plusieurs mécanismes interviennent au cours du cycle de marche, afin
de réduire les déplacements du centre de gravité.
Les principaux sont :
- la rotation du bassin autour de l'axe vertical, - le déplacement latéral
du bassin,
147
- la bascule du bassin du côté non porteur au passage du
pas,
- la flexion du genou pendant 1 'appui, - les mouvements du pied et de
la cheville, - la coordination des mouvements du genou et de la cheville.
Chez l'amputé de cuisse, la hanche est la dernière articulation
fonctionnelle. Il est donc plus délicat d'agir efficacement sur les trois derniers
mécanismes : les articulations prothétiques, même les plus perfectionnées,
avouent leurs limites. L'emboîture, seul élément à être en contact avec le
tissu vivant, a des conséquences non négligeables sur les trois premiers
éléments, selon qu'elle est de forme quadrilatérale ou CAT-CAM (Tableau 1).
Tableau 1
148
VII.4. APPAREILLAGE ET QUALITE DE VIE :
La biomécanique et la bioénergétique du fût CAT-CAM semblent donc
se rapprocher du modèle physiologique.
Pour CODINE, MAITRE et BRUN (9), ni l'âge, ni le niveau
d'amputation ne paraissent avoir de répercussion sur la qualité de vie. Mais
ils la jugent d'autant meilleure que l'autonomie est plus grande.
En fait, ces trois éléments s'avèrent indissociables les uns des autres :
l'avancée en âge retentit sur l'efficience de la marche, que la personne soit
valide ou amputée ; une amputation de jambe permet à l'amputé de garder
une autre articulation fonctionnelle, en plus de l'articulation de la hanche :
pour un même effort, l'amputé de jambe consommera moins d'énergie que
l'amputé de cuisse et de ce fait augmentera ainsi son autonomie.
Cependant, le concept de la qualité de vie est d'appréciation souvent
délicate : il dépend de paramètres physiques, psychiques, mentaux, sociaux
et culturels. Il s'agit plutôt d'une auto-évaluation de la qualité de vie par les
patients amputés eux-mêmes.
Il est concevable d'affirmer que l'emboîture CAT-CAM apporte un plus
dans la vie de l'amputé : confort, stabilité, respect de l'anatomie sont les
grandes qualités revendiquées par ses concepteurs. Les études réalisées
sur la dépense d'énergie semblent les corroborer.
149
MAERTENS et FRANCHIMONT (25) ont réalisé une étude consacrée
au CAT-CAM, afin d'évaluer si cette nouvelle emboîture est un moyen
favorable d'appareillage pour les amputés de cuisse et s'il peut être envisagé
sur un plan pratique dans le contexte des possibilités techniques et du mode
de remboursement en application en Belgique.
Pour cela, en collaboration avec des prothésistes, ils ont appareillé les
sept premiers patients belges avec le fût CAT-CAM.
Pour tous les amputés, qui présentaient quelques difficultés à
chausser leur prothèse quadrilatérale, l'emboîture CAT-CAM apporte un réel
confort : MAERTENS et FRANCHIMONT l'attribuent au fait que la forme de
l'emboîture CAT-CAM est telle qu'il n'existe qu'une seule façon de la mettre.
Les patients précisent qu'ils ressentent beaucoup moins l'impression d'avoir
une prothèse qu'avec l'emboîture quadrilatérale. La durée du port quotidien
est supérieure à 12 heures pour cinq patients et comprise entre 6 et 12 pour
deux autres amputés. Ils ont cependant remarqué que le nombre de séances
d'essayage est supérieur à celui qui est habituellement nécessaire pour
adapter une emboîture quadrilatérale conventionnelle (le temps d'adaptation
est en moyenne de 16 semaines).
Les amputés sont unanimes pour reconnaître avoir plus de difficultés
à masquer l'emboîture CAT-CAM sous leur pantalon. MAERTENS (25)
souligne que ceci est en opposition avec les conclusions des prothésistes
américains.
150
Les sept sujets recrutés pour l'étude constatent l'amélioration du
confort dans la région ischiatique ; deux patients présentaient des plaies
récidivantes dans la région ischiatique : ils observent qu'avec le CAT -CAM ils
peuvent mener une vie plus active, sans présenter de nouvelles plaies dans
cette région.
Quatre patients signalent une gêne dans la région périnéale, à
l'endroit où la prothèse épouse le contour du tendon des adducteurs.
L'autonomie de marche est augmentée pour quatre patients. Un
patient a conservé le rayon d'action qu'il possédait avec l'emboîture
quadrilatérale, mais deux amputés ont régressé par rapport à leur ancien
appareillage.
MAERTENS et FRANCHIMONT (25) pensent que la première
indication de prescription du CAT-CAM est l'amputé actif et que sa principale
contre-indication est peut-être celle d'un moignon dont le volume fluctue.
Néanmoins, ils s'accordent à dire que le fût CAT-CAM peut apporter une
amélioration de l'appareillage pour la majorité des patients. Il leur paraît
indispensable de disposer, pour pouvoir l'adopter, d'un budget supérieur à
celui qui est actuellement réservé à l'appareillage des amputés de cuisse
dans la plupart des pays européens (25).
Dans notre pays, l'emboîture CAT-CAM n'est toujours pas inscrite au
tarif interministériel des prestations sanitaires. A moins de supporter la
totalité des dépenses occasionnées par le fût CAT-CAM, l'amputé ne
bénéficie, en France, que de l'emboîture quadrilatérale.
151
Cela peut paraître d'autant plus regrettable que l'emboîture CAT-CAM
présente beaucoup d'agréments, notamment pour les personnes âgées ; P.
BOTTA (4, 5) appareille ses patients âgés avec ce système depuis fin 1989 :
il remarque que les patients âgés amputés retrouvent une autonomie de
marche et éprouvent une plus grande sécurité lors de leurs déplacements.
De plus, si l'emboîture CAT-CAM est mieux connue en France, surtout
depuis 1988, il y a encore très peu de centres d'appareillage qui peuvent en
assurer la fabrication. En 1991, PAQUIN et MARTINET (28) citent quelques
centres où des démonstrations ont été réalisées tels que Coubert, Lamelou,
ou Metz.
152
153
DONNEES PERSONNELLES
154
155
VIII. DONNEES PERSONNELLES:
L'étude porte sur huit patients, adultes actifs, âgés de 25 à 55 ans,
amputés d'un membre inférieur à la hauteur de la cuisse pour des raisons
diverses, à l'exception de toute cause vasculaire.
Le recrutement a été réalisé parmi les patients de P. BOTTA (Bienne SUISSE).
Les informations ont été recueillies à l'aide d'un questionnaire (Annexe
1) et ont été rassemblées sous forme de tableaux (Tableaux 2 à 13).
Dans les tableaux 2 à 13 : "/" : Patients n'ayant pas répondu à la question.
Dans le tableau 12 : VS QUAD : Versus quadrilatérale
156
VIII.1 :PROFIL-SOCIOPROFESSIONEL :
157
158
VIII.2 : DONNEES CLINIQUES :
159
160
VIII.3 : EXPERIENCE EN QUADRILATERALE :
161
162
163
VIII.4 PASSAGE EN CAT-
CAM :
164
165
166
167
VIII.5 LE CAT-CAM AU QUOTIDIEN :
168
169
ANALYSE DE NOS OBSERVATIONS ET
CONFRONTATION AUX DONNEES DE LA
LITTERATURE
170
171
IX. ANALYSE DE NOS OBSERVATIONS ET CONFRONTATION AUX
DONNEES DE LA LITTERATURE :
Nous avons donc fait appel à l'opinion de huit patients amputés de
cuisse, appareillés en Suisse par la toute récente emboîture CAT-CAM, afin
de déterminer si ce nouveau fût apporte un plus dans leur vie quotidienne.
Cette étude est néanmoins biaisée en raison du caractère rétrospectif.
Il s'agit de cinq femmes et trois hommes, âgés de 25 à 55 ans. Tous,
sauf un, sont de nationalité Suisse. Deux personnes seulement vivent en
milieu rural (Tableau 2).
Les huit patients ont un emploi. Trois femmes exercent à temps
partiel. Les trois hommes ont dû entreprendre une reconversion
professionnelle, suite à leur amputation (Tableau 3).
L'âge de survenue de l'amputation est de 17 ans en moyenne avec
des extrêmes de 4 à 26 ans (Tableau 4).
Sur huit cas, sept sont d'origine traumatique, un d'origine tumorale
(Tableau 4).
172
Les niveaux d'amputation se répartissent, sur les huit cas, de la façon
suivante (Tableau 4, Figure 70) :
- cinq amputations au tiers supérieur (quatre pour traumatisme, une
pour tumeur),
- deux au tiers moyen,
- un au tiers inférieur.
Figure 70
a : Tiers supérieur
b : Tiers moyen
c : Tiers inférieur
La durée de l'appareillage par une emboîture quadrilatérale est en
moyenne de 20 ans. La période la plus courte est de deux ans, la plus
longue de 36 ans (Tableaux 4 et 9).
Les patients utilisent la CAT-CAM depuis au minimum six mois
(Tableau 9).
173
Quelle que soit la forme de l'emboîture, le matériau le plus
fréquemment retrouvé est le bois. Deux personnes ont changé de matériau
lors du passage au fût CAT-CAM : l'une a reçu une emboîture en résine de
synthèse, l'autre a bénéficié d'un matériau souple (ISNY® : en polyéthylène)
(Tableau 9).
IXI.1APPRECIATIONS GLOBALES DE L'EMBOITURE CAT-CAM
IX.1.1. Temps d'adaptation du fût:
Le temps d'adaptation du nouveau fût est variable : MS et JLS
précisent qu'il a été immédiat après l'essai d'un seul fût, alors que FT et DL
signalent qu'un an leur a été nécessaire pour s'adapter. Les trois autres
patients ont eu besoin d'une à deux semaines pour obtenir un bon résultat
avec l'emboîture CAT-CAM ; PAG n'a pas interrompu son activité
professionnelle et les essais n'ont duré qu'une semaine. Le dernier patient,
HF, a estimé le temps d'adaptation "rapide" (Tableau 9).
Pour FT, DB et HF, deux fûts ont été indispensables à un ajustement
satisfaisant (Tableau 9).
On peut constater que le temps d'adaptation du fût CAT-CAM est,
pour nos huit patients, moins long de deux semaines en moyenne que celui
des patients, qui ont participé à l'étude de MAIERTENS et FRANCHIMONT
(25). Les prothésistes, qui ont collaboré à l'étude, ne connaissaient pas les
techniques de moulage du CAT-CAM : pour les trois premiers patients, ils ont
donc testé différentes méthodes et également différents matériaux (ils ont
finalement adopté le New Polyéthylène ® pour la fabrication de fûts souples).
Cette période de mise au point a facilité la réalisation des emboîtures des
quatre autres patients.
174
On peut également imputer à cette période de "tâtonnement" un plus
grand nombre de fûts (trois en moyenne) pour atteindre un bon résultat, alors
qu'il a suffi d'un fût et demi en moyenne pour nos patients.
Il ne semble pas exister de relation entre la durée de l'appareillage par
l'emboîture quadrilatérale et le temps d'adaptation du fût CAT-CAM : si FT,
dont l'appareillage par l'emboîture quadrilatérale totalise 33 ans, a eu besoin
d'un an pour s'adapter, MS, qui compte 36 ans de quadrilatérale, a ressenti
un confort immédiat avec le CAT-CAM.
De même, la longueur du moignon ne paraît pas avoir de
retentissement direct sur le temps d'adaptation (Tableaux 4 et 9).
Par ailleurs, le matériau utilisé pour la fabrication de l'emboîture
CAT-CAM n'interfère pas de façon significative avec le temps d'adaptation ou
l'adaptation elle-même. Sept de nos patients sont appareillés à l'aide d'un fût
en bois : ils n'éprouvent pas plus de difficultés ou de douleurs que le groupe
de patients recrutés par MAERTENS et FRANCHIMONT (25) et qui sont
appareillés en matériau souple (New Polyéthylène ®).
IX.1.2. Temps de mise en place :
Les patients notent en général un temps de mise en place de
l'emboîture CAT-CAM plus rapide que celui du fût quadrilatéral :
l'amélioration est en moyenne d'une minute (Tableaux 6 et 10).
175
MAERTENS et FRANCHIMONT (25) constatent également un progrès
du temps de mise en place lors du passage au fût CAT-CAM pour tous leurs
patients. Cela mérite d'être souligné : un temps de mise en place rapide est
un élément de confort, notamment pour les personnes plus âgées, qui
peuvent vite se décourager lorsque plusieurs tentatives pour chausser
l'emboîture sont nécessaires.
Pour MAERTENS et FRANCHIMONT (25), cette rapidité et cette
facilité sont principalement dues au fait que l'emplacement exact du moignon
dans l'emboîture est réalisé d'une manière plus systématique avec
l'emboîture CAT-CAM qu'avec le fût quadrilatéral.
IX.1.3. Temps de port :
Le temps de port de la prothèse CAT-CAM au cours de la journée est
augmenté pour la plupart des amputés par rapport à celui de l'emboîture
quadrilatérale.
DB conserve le même temps de port qu'avec son ancienne prothèse,
mais le moignon qu'elle décrivait "souvent blessé" avec l'emboîture
quadrilatérale, présente un état "variable" avec le CAT -CAM, c'est-à-dire
moins régulièrement pathologique. DL peut supporter sa prothèse une heure
de plus, mais le moignon reste toujours inflammatoire.
Pour les autres, l'état cutané du moignon est satisfaisant à l'ablation
de la prothèse (Tableaux 6 et 10).
Le temps de port est peut-être supérieur à celui des patients de
MAERTENS
et
FRANCHIMONT
(25),
sans
pouvoir
l'affirmer
catégoriquement, les auteurs ayant choisi de donner des
176
fourchettes plutôt qu'une estimation plus approchée.
D'une façon générale, les patients équipés en CAT-CAM semblent
moins souffrir de problèmes cutanés à l'ablation de la prothèse que lorsqu'ils
étaient appareillés par le fût quadrilatéral. La grande précision du moulage
de l'emboîture CAT-CAM n'y est certainement pas étrangère : elle contribue,
pour une grande part, au respect des structures anatomiques du moignon (4,
5, 6, 17, 36, 38, 40,41).
IX.1.4. Appréciation de la station debout et de la station assise :
Sept des huit patients (un n'a pas donné de réponse) estiment que
l'appareillage CAT-CAM procure une station debout confortable contre trois
seulement lorsqu'ils étaient équipés de l'emboîture quadrilatérale.
La station assise est pour six d'entre eux confortable. DL se plaint de
sensations de pression (sans en avoir précisé le niveau) avec le fût
CAT-CAM, alors que la station assise avec l'emboîture quadrilatérale lui
paraissait confortable (Tableaux 7 et 12).
Ces informations rejoignent les données de la littérature et corroborent les
propos d'ANDREWS (2), d'HAAS (17), de KAPHINGST (21) et ceux de
LEHNEIS (23) lorsqu'ils affirment que la tablette ischiatique, surface
généralement horizontale dans les plans médio-latéral et antéro-postérieur,
provoque une gêne lors de la station assise et qu'elle ne peut offrir un appui
qu'à la seule tubérosité ischiatique, surface porteuse extrêmement réduite,
occasionnant un point de pression non physiologique. La suppression de la
tablette
177
ischiatique dans le système CAT-CAM réduit notablement les phénomènes
douloureux.
FT signalait d'ailleurs l'impossibilité de porter son poids sur la prothèse
lorsqu'elle était équipée de l'emboîture quadrilatérale ; ce phénomène a
disparu lors du passage au fût CAT-CAM (Tableaux 7 et 12).
IX.1.5. Douleurs et problèmes cutanés :
Les tableaux 7 et 12 donnent quelques indications sur les sensations
de douleur et le retentissement cutané présentés par les patients selon le
type d'appareillage. Il semble que l'emboîture quadrilatérale favorise
davantage ce genre de troubles que l'emboîture CAT-CAM.
Sur les six patients qui se plaignaient de douleurs du moignon avec le
fût quadrilatéral, deux ont constaté leur entière disparition avec l'appareillage
CAT-CAM (FT et JLS).
PAG signalait des douleurs au niveau périnéal, ischiatique et distal. Il
persiste encore quelques douleurs au niveau périnéal avec le CAT -CAM.
AC souffrait de douleurs ischiatiques et périnéales avec l'emboîture
quadrilatérale ; elle présente, depuis que sa prothèse est équipée du fût
CAT-CAM, des douleurs plutôt distales qui ne semblent pas trop gêner sa
marche (décrite comme étant moins pénible).
Des douleurs ischiatiques et de la racine du moignon dont se plaignait
DB, il ne subsiste, après le passage au CAT-CAM, que des douleurs
ischiatiques.
PAG, DL et DB présentent toujours quelques problèmes cutanés à
type d'irritations, d'eczéma ou de blessures. AC, qui
178
développait des furoncles de l'aine, n'en souffre plus depuis l'appareillage en
CAT-CAM.
De même, FT, atteinte d'infections chroniques de l'aine et du périnée,
voit ses troubles "disparaître gentiment".
Ces deux cas cliniques sont en accord avec la publication de HAAS
(17), qui fait mention de la régression des troubles cutanés de 17 patients sur
23 dès lors qu'ils ont été appareillés par le fût CAT -CAM.
De même, MAERTENS et FRANCHIMONT (25) signalaient le cas de
deux patients souffrant avec le fût quadrilatéral de plaies récidivantes, qui se
sont corrigées après le passage au fût CAT-CAM.
IX.2.
CATCAM :
APPRECIATION
DE
LA
STABILITE
DE
L'EMBOITURE
Les partisans de l'emboîture CAT-CAM insistent sur la stabilité que
procure ce type de fût (2, 4, 5, 14, 15, 17, 21, 23, 25, 36, 38,40,41).
Le verrouillage osseux (Bony Lock, comme le dénomme SABOLICH)
est assuré par l'englobement de l'ischion àl'intérieur de l'emboîture où il est
ménagé une logette en position dorso-médiale d'une part, et par le
contre-appui latéral sous-trochantérien d'autre part. L'ischion est intégré dans
le fût et non plus "assis" sur le fût, comme il pouvait l'être dans l'emboîture
quadrilatérale.
Ainsi positionné, il contribue, avec l'appui sous -trochantérien et la
compression modérée des parties molles dans le sens médio-latéral
179
au maintien de l'adduction du fémur au cours des phases du cycle de
marche, tout en laissant à la hanche une plus grande liberté de mouvements
(2).
Sur les huit patients, quatre (PAG, DL, MS, HF) présentaient des
problèmes de stabilité avec l'emboîture quadrilatérale : PAG en piston, DL en
rotation, les deux autres amputés n'ont apporté aucune précision.
Le passage au CAT-CAM a permis une amélioration pour trois
patients : MS estime la stabilité excellente, DL et HF plutôt bonne.
PAG éprouve toutefois quelques difficultés en raison d'une instabilité
en rotation (il s'agit aussi du seul patient àchausser sa prothèse en position
assise) (Tableaux 7 et 12).
IX.3. APPRECIATION DE LA MARCHE AVEC LE CAT-CAM :
Seule MS a besoin d'une aide à la marche (canne).
La marche avec l'emboîture quadrilatérale était, pour sept des huit
patients, lente, pénible, accompagnée d'une boiterie. DL décrivait une
marche plutôt rapide et régulière. Le fût CAT-CAM autorise une démarche
plus fluide et moins pénible ; néanmoins, FT, DB, MS et HF signalent une
boiterie toujours présente (Tableaux 8 et 12).
Le temps de marche quotidien, exprimé en heure, est augmenté pour
DL, AC et JLS d'au minimum une heure (HF n'a pas répondu). Les autres
patients conservent le temps de marche qu'ils avaient initialement avec
l'emboîture quadrilatérale (Tableaux 8 et 12).
180
Il existe pour cinq patients (PAG, DB, MS, AS, JLS) un réel progrès du
périmètre de marche (deux personnes n'ont pas répondu ou l'ont fait de
façon incomplète). Cette augmentation est en moyenne de 700 mètres avec
des extrêmes de 200 à 2 000 mètres. DL n'a pas remarqué pouvoir marcher
plus loin avec son emboîture CAT-CAM qu'elle ne le faisait avec l'emboîture
quadrilatérale (Tableaux 8 et 12).
Ces résultats paraissent cohérents avec ceux de FLANDRY (14), de
GAILEY (15) et de MAERTENS et FRANCHIMONT (25) et tendent à
confirmer la supériorité du fût CAT-CAM sur l'emboîture quadrilatérale en
matière d'économie d'énergie et d'autonomie de marche. Indépendamment
des mécanismes d'articulation prothétique (dont certains sont très
perfectionnés et "intelligents"), le type d'emboîture a un retentissement direct
sur la qualité de la marche. La biomécanique du fût CAT-CAM se rapproche
étonnamment du modèle physiologique (2, 21). La configuration de
l'emboîture permet l'action de deux forces dirigées en oblique sur le centre
de l'articulation de la hanche. La résultante de ces forces assure la
transmission des charges dans le sens vertical, en partant de la hanche (21).
Le fémur est maintenu en adduction par l'englobement de l'ischion et
l'appui sous-trochantérien. Le déplacement latéral du bassin et les
mouvements relatifs d'abduction du fémur sont donc limités (2, 21, 35).
Les muscles fessiers retrouvent leur efficacité et stabilisent le bassin
au cours de l'appui monopodal (2, 17, 21, 25). Ces actions conjointes
permettent au centre de gravité de suivre une ligne, qui se rapproche de la
ligne de progression physiologique.
181
IX.4. LE CAT-CAM AU QUOTIDIEN :
L'emboîture ne semble pas avoir amélioré le quotidien de deux
personnes (HS et DL) par rapport à leur ancien appareillage. Pour les autres,
la marche leur paraît plus confortable car moins douloureuse (FT, AC, JLS,
MS et DB). FT précise que la station debout est avec le CAT-CAM plus
agréable (Tableau 13).
Les avantages retirés du fût CAT-CAM pour la vie quotidienne se
retrouvent également dans la vie professionnelle. Cinq amputés sur les six
qui ont répondu (PAG, FT, DB, MS, AC) estiment que le fût CAT-CAM leur
apporte un agrément dans leur travail à plus d'un titre : il permet une marche
plus rapide, avec moins de fatigue, une position assise et une station debout
plus confortables.
DL ne retire cependant aucun avantage, sans fournir de détail
(Tableau 13).
A l'heure où la société privilégie les loisirs ou les activités sportives, il
est réconfortant de considérer que l'amputation ne constitue pas un obstacle
rédhibitoire à la pratique d'un sport.
La plupart de nos patients ont conservé une ou plusieurs activités
sportives après l'amputation. Seul, PAG a cessé de pratiquer un sport, ayant
d'autres centres d'intérêt.
L'appareillage CAT-CAM a permis à quatre patients (DB, MS, AC,
JLS) de faire davantage de sport (JLS et AC signalent notamment la
possibilité de marcher plus longtemps) (Tableau 13).
182
MAERTENS et FRANCHIMONT (25) ont eu l'occasion de rencontrer
aux Etats-Unis plusieurs jeunes sportifs présentant une amputation de
cuisse. Ils étaient unanimes pour considérer que ce type d'emboîture avait
entraîné une très nette amélioration de leurs possiblités de déplacement et
de contrôle de la prothèse. La caractéristique la plus importante est la
possibilité de courir en n'ayant plus à craindre à chaque pas le choc de la
tubérosité ischiatique sur la tablette.
IX.5. EN RESUME :
Le bilan de l'appareillage par l'emboîture CAT -CAM se révèle dans
l'ensemble positif pour nos huit patients.
Les tableaux 14 à 21 reprennent les appréciations de chacun
concernant le CAT-CAM par rapport à l'emboîture quadrilatérale.
183
Ta
bleau 14 (PAG)
Tableau 15 (FT)
Tableau 16 (DL)
Tableau 17 (DB)
184
185
Tableau 18 (MS)
Tableau 19 (AC)
Tableau 20 (JLS)
Tableau 21 (HF)
186
187
Conclusion
188
189
X. CONCLUSION:
A l'issue de cette revue de littérature et de l'analyse de nos
observations, nous voudrions souligner les points suivants.
- Le CAT-CAM est un concept. La nature du matériau (bois, matériau
souple, résine) n'entre pas en ligne de compte.
- La biomécanique de l'emboîture CAT-CAM se rapproche davantage
du modèle physiologique que celle du fût quadrilatéral (2, 5, 21).
L'articulation de la hanche semble pouvoir reprendre son rôle de point
de transmission des charges, l'ischion étant englobé dans l'emboîture et non
plus soutenu par l'emboîture. De plus, elle retrouve une certaine liberté de
mouvements, notamment la rotation, l'anté- et la rétroversion, le
déplacement latéral, grâce à la suppression de l'appui ischiatique (2).
L'enveloppement de l'ischion, l'appui sous-trochantérien ainsi que
l'aplatissement des parties molles dans le sens transversal assurent le
maintien de l'adduction du fémur au cours des phases du cycle de marche.
Ce verrouillage permet une meilleure répartition des forces s'exerçant sur le
moignon, lesquelles, en évitant toute action excessive, contrôlent la
stabilisation du bassin du côté de la prothèse durant la phase statique (21).
190
Sur le plan dynamique, l'emboîture CAT-CAM est efficace pour au
moins deux raisons : le fémur est maintenu en adduction durant la marche ;
cette adduction met en tension le moyen fessier, celui-ci peut alors jouer son
rôle de stabilisateur du bassin lors de l'appui monopodal (2, 17, 25, 38).
- La bioénergétique découle des résultats de la biomécanique. De ce
fait, la consommation d'énergie est bien moindre avec le fût CATCAM qu'elle
ne l'est avec l'emboîture quadrilatérale. GAILEY (15) constate une diminution
de la consommation d'énergie de 20 % chez les patients appareillés en
CAT-CAM ; argument qui peut paraître primordial lorsque l'on sait que la
cause la plus fréquente d'amputation est l'artérite, laquelle existe
généralement dans un contexte d'altération de l'état clinique.
- Selon HAAS (17), la prescription du fût CAT-CAM comme premier
appareillage évite l'atrophie musculaire, en particulier au niveau des
abducteurs, que l'on retrouve fréquemment avec l'emboîture quadrilatérale.
Dès le début de sa rééducation, le patient amputé a la possibilité de
contracter de façon efficace les muscles stabilisateurs du bassin : la marche
prothétique n'en sera que meilleure.
De plus, le fût CAT-CAM, de par sa forme ovale longitudinale qui
respecte les parties molles et la pompe musculaire, n'entrave pas
l'écoulement du sang veineux et la microcirculation : l'emboîture CATCAM
agit donc activement contre l'oedème (17).
- Néanmoins, les qualités indéniables du fût CAT-CAM ne doivent pas
faire ignorer la grande complexité de réalisation de ce type d'emboîture, à
laquelle sont confrontés les techniciens-prothésistes (5,
191
17, 36, 40, 41). Le fût CAT-CAM ne souffre pas la médiocrité : il est tout juste
ou tout faux. La rigueur, la précision et le contrôle de chaque étape de
fabrication sont des éléments indispensables pour obtenir le résultat
CAT-CAM.
- Par ailleurs, HAAS (17) souligne que des exigences tout aussi
importantes sont adressées aux patients eux-mêmes : s'ils ne sont pas
suffisamment intéressés et s'ils n'exploitent pas la possibilité de revoir leur
prothésiste pour une bonne adaptation de leur emboîture, la tentative d'un
appareillage optimal est vouée à l'échec. Le manque de motivation
poursuivre une rééducation aussi poussée que possible a les mêmes
conséquences.
- Dans notre pays, l'équipe de médecine de réadaptation et l'amputé
se heurtent à l'écueil du non-remboursement de l'emboîture CAT-CAM,
lequel peut être responsable en partie du peu de diffusion de ce système.
L'emboîture CAT-CAM possède de réelles qualités et apporte une
amélioration dans tous les domaines de la réadaptation fonctionnelle.
A l'heure où la qualité de vie est un des fils conducteurs de notre
médecine, nous pourrions citer HAAS (17) lorsqu'il affirme que le fût
CAT-CAM n'est pas un phénomène de mode, mais une exigence
anatomique.
192
Annexe1
193
194
APPAREILLAGE CAT-CAM, UNE MEILLEURE QUALITE DE VIE?
QUESTIONNAIRE
Anonyme, au seul but d'un travail de thèse
.
Amputation de cuisse, toutes causes confondues, exceptées vasculaires.
Patients adultes actifs.
195
196
197
198
199
200
201
202
203
204
205
Bibliographie
206
207
1.
ABOIRON H
Emboîture quadrangulaire ou emboîture CAT-CAM. Kinésithér Sci
1989, (284) : 43-47.
2.
ANDREWS JT
A propos de la CAT-CAM. In : BONNEL F, BARRAULT JJ, BLOTMAN
F Eds. Appareillage des membres inférieurs. Paris : Springer Verlag,
1989 : 162-170.
3.
BARDOT A, HINDERMEYER J
Amputations congénitales. In : GROSSIORD A, HELD JP Eds.
Médecine de Rééducation. Paris : Flammarion, 1981 : 588-605.
4.
BOTTA P
CAT-CAM Schäfte bel alten Menschen. In : Alpenländisch-adriatisches
Symposium. 8. 1994. Luzern/ Bellikon Internationale Zusammenarbeit
in der Rehabilitation.
5.
BOTTA P
Ist die querovale Schaftform noch vertretbar ? Med Orth Tech 1990,
110(5) : 252-254.
208
6.
BOTTA P
Oberschenkelschäfte aus Holz. Communication personnelle. 1994.
7.
BRIAND D, BONNEL F
Adaptations morphologiques à la marche bipède dans l'échelle
animale. In : PELISSIER J, BRUN V Eds. La Marche humaine et sa
pathologie. Paris : Masson, 1994 : 6-9.
8.
CHAULANGES, MANRY, SEVE
Textes historiques 1815-1848. ln : Documents et civilisation du
Moyen-Age à 1944. Paris : Hachette, 1974 : 135.
9.
CODINE P, MAITRE M, BRUN V
Qualité de vie des amputés du membre inférieur. In : HERISSON C,
SIMON L Eds. Evaluation de la qualité de vie. Paris : Masson, 1993 :
236-243.
10.
D'ANGELI-CHEVASSUT M, GAVIRIA M
La Marche humaine : description et repères sémantiques. In :
PELISSIER J, BRUN V Eds. La Marche humaine et sa pathologie.
Paris : Masson, 1994 : 9-20.
209
11.
DUFOUR J Récupération post-traumatique du schéma corporel et de
l'image du corps. In : ROQUEFEUIL B, FERRAGUT E Eds. Thérapie
de Relaxation et Psychosomatique. Université Montpellier 1 ; Faculté
de Médecine, 1993 : 1-18.
12.
DULIEU V, CASILLAS JM, COTTIN Y, MOUALLEM J,
MARCER 1, DIDIER JP, BRENOT R Coût énergétique de la marche
chez l'amputé de membre inférieur. In : PELISSIER J, V. BRUN Eds.
La Marche humaine et sa pathologie. Paris : Masson, 1994 : 274-280.
13.
ENJALBERT M, LUIGI A, MICALEFF JP, PERUCHON E,
MAITRE M, KOTZKI N, RABISCHONG P, PELISSIER J Cinématique
et cinétique de la marche chez l'amputé des membres inférieurs. In :
PELISSIER J, V. BRUN Eds. La Marche humaine et sa pathologie.
Paris : Masson, 1994 : 267-273.
14.
FLANDRY F, BESKIN J, CHAMBERS RB et al.
The Effect of the CAT-CAM above-knee prosthesis an functional
rehabilitation.
Clin Orthop 1989, (239) : 249-262.
210
15.
GAILEY RS, LAWRENCE D, BURDITT C,
SPYROPOULOS P, NEWELL C, NASH MS The CAT-CAM socket
and quadrilateral socket : a comparison of energy cost during
ambulation. Prosthet Orthot Int 1993, 17(2) : 95-100.
16.
GOTTSCHALK FA, KOUROSH S, STILLS M,
Mc CLELLAM B, ROBERTS J Does socket configuration influence the
position of the femur in above-knee amputation ? J Prosthet Orthot
1990, 2(l) : 94-102.
17.
HAAS F
Indikation und Qualitâtskontrolle zum CAT-CAM-Schaft. Orthop Techn
1993, 44(ll) : 856-863.
18.
HENLIN JL, LECOCQ J, VAUTRAVERS P, DEVILLER J,
MARCHAIS JF, PARRATTE B, JESEL M, ISCH F La Rééducation
après amputation de Gritti. In : SIMON L, PELISSIER J Eds. Actualités
en rééducation fonctionnelle et réadaptation. 14e série. Paris :
Masson, 1989 : 447-452.
19.
JAEGERS S, VOS L, RISPENS P, HOF L
The Relationship between comfortable and most metabolically efficient
walking speed in persons with unilateral above-knee amputation. Arch
Phys Med Rehabil 1993, 74 : 521-525.
211
20.
JENDRZEJCZYK DJ
Flexible Socket systems.
Clin Prosthet Orthot 1985, 9(4) : 27-30.
21.
KAPHINGST W, FITZLAFF G Aspekte quer-und längsovaler
Schaftformen im Vergleich. Orthop Techn 1990, 41(12) : 796-801.
22.
KOTZKI N, MAITRE M, ENJALBERT M, PELISSIER J
Rééducation à la marche de l'amputé artéritique. In : PELISSIER J,
BRUN V Eds. La Marche humaine et sa pathologie. Paris : Masson,
1994 : 281-287.
23.
LEHNEIS HR
Beyond the quadrilateral. Clin Prosthet Orthot 1985, 9(4) : 6-8.
24.
LONG IA
Normal shape-normal alignment (NSNA) above-knee prosthesis. Clin
Prosthet Orthot 1985, 9(4) : 9-14.
25.
MAERTENS DE NOORDHOUT B, FRANCHIMONT P
Intérêt de l'emboîture CAT-CAM pour l'appareillage des amputés de
cuisse. Rev Réadapt Fonct Prof Soc 1989, 19 : 27-41.
212
26.
MALAWER MM, LINK MP, DONALDSON SS
Sarcomas of Bone. In : DE VITA VT, HELLMAN S, ROSENBERG SA
Eds. Cancer principles and practice of oncology. 4e ed. Philadelphia :
JB Lippincott Company, 1993 : 1509-1547.
27.
MIAULT D, DESCHAMPS E, PILLU M
L'appareillage des amputations de cuisse. Techni Media 1989, (12) :
34-36.
28.
PAQUIN JM, MARTINET N
A propos des emboîtures fémorales de type CAT-CAM. RRR Santé
1991, (19) :8-10.
29.
PAQUIN JM, ANDRE JM, MARTINET N
Emboîtures pour amputés de cuisse et de jambe. In : BONNEL F,
BARRAULT JJ, BLOTMAN F Eds. Appareillage des membres
inférieurs. Paris : Springer Verlag, 1989 : 144-159.
30.
PAQUIN JM
Les Emboîtures. in : Appareillage des handicapés moteurs. 2e ed.
Nancy : Faculté de Médecine B, Université de Nancy 1, 1982 : 74-77.
213
31
PAQUIN JM, ANDRE JM
Pathologie des moignons d'amputation.
In : Appareillage des handicapés moteurs. 2e ed.
Nancy : Faculté de Médecine B, Université de Nancy 1,
1982 : 36-43.
31.
PARRATTE B, ARNOLD C, CALMELS P
Appareillage : contraintes et tolérance. Techni Média 1991, (27):
13-16.
32.
PIERQUIN L, ANDRE JM
Histoire des prothèses des membres inférieurs. In : Appareillage des
handicapés moteurs. 2e ed. Nancy : Faculté de Médecine B,
Université de Nancy 1, 1982 : 5-15.
33.
PIERQUIN L
Le Moignon normal et la rééducation préprothétique. Ln : Appareillage
des handicapés moteurs. 2e ed. Nancy : Faculté de Médecine B,
Université de Nancy 1, 1982 : 26-34.
34.
PLAS F, VIEL E, BLANC Y
La Marche humaine. Kinésiologie dynamique, biomécanique et
pathomécanique. 2e ed. Paris : Masson, 1979 : 122 p.
214
36.
POHLIG K
Modellabnahmetechnik für CAT-CAM. Schâfte-3-Phasen.
Wendetechnikverfahren nach Kurt Pohlig.
Orthop Techn 1992, 43(5) : 388-397..
37.
RAUPP JC, GRUMLER B, LARDRY JM
La Rééducation et l'appareillage des amputés. Paris : Masson, 1991 :
96 p.
.
38.
SABOLICH J
Contoured Adducted Trochanteric-Controlled Alignment Method
(CAT-CAM) : introduction and basic principles. Clin Prosthet Orthot
1985, 9(4) : 15-26.
39.
SCHUCH CM
Modern above-knee fitting practice (a report on the ISPO workshop
an above-knee fitting and alignment Techniques May 15-19, 1987,
Miami, USA). Prosthet Orthot Int 1988, 12(2) : 77-90.
40.
TOURNEUX A Le Concept CAT-CAM.
Une approche rationnelle de la prothèse fémorale. Fontenay/s/Bois :
C.E.R.A.H., Antenne d'Ile de France, 10 Avenue du Val de Fontenay,
1991.
41.
TOURNEUX A
L'Emboîture à assise concave et collet morphologique. Techni Média
1991, (32) : 17-26.
215
42.
YANG JC, ROSENBERG SA, GLATSTEIN EJ, ANTMAN KH
Sarcomas of soft tissues.
In : DE VITA VT, HELLMAN S, ROSENBERG SA.Eds.
Cancer principles and practice of oncology. 4e ed.
Philadelphia : JB Lippincott Company, 1993 : 1436
1488.
216
217
TABLE DES MATIERES
218
219
I. INTRODUCTION
Il. HISTORIQUE
II.1. DE L'APPAREILLAGE DE FORTUNE A L'APPAREILLAGE
EVOLUE
II.2. L'EMBOITURE, UN ELEMENT PRIMORDIAL
II.2.1. Ses fonctions
II.2.2. Description
II.2.3. Matériaux
II.2.4. Les différents concepts d'emboîture
a. Les emboîtures à contact partiel
b. Les emboîtures à contact important
c. Les emboîtures à contact total
III. L'AMPUTATION, UN CONSTAT D'ECHEC ?
III.1. LES TRAUMATISMES
III.2. LES TUMEURS MALIGNES
III.2.1. Les sarcomes des tissus mous
III.2.2. Les tumeurs malignes touchant le squelette
III.3. LES AMPUTATIONS CONGENITALES
III.3.1. Généralités
III.3.2. Classification
III.3.3. Aplasies à squelette discontinu
a. Les aplasies fémorales
b. Les aplasies tibiales
III.3.4. Phocomélie
III.3.5. Amputations congénitales
III.3.6. En résumé
III.4. LES AUTRES CAUSES
1
5
7
10
10
10
15
22
22
22
24
27
30
33
33
34
36
36
37
40
40
42
42
43
44
44
220
IV. UNE CHIRURGIE POUR UN MEILLEUR APPAREILLAGE
46
IV.1. NIVEAUX D'AMPUTATION ET QUALITE DE VIE
47
IV.2. LES TECHNIQUES CHIRURGICALES
51
IV.2.1. Le moignon classique
51
IV.2.2. Le moignon d'ostéomyoplastie
51
IV.2.3. Le moignon ouvert de cuisse
53
IV.3. LES ETATS PATHOLOGIQUES DU MOIGNON
56
IV.3.1. Les moignons défectueux
56
IV.3.2. Les moignons douloureux
57
IV.3.3. Les solutions
58
V. LA MARCHE HUMAINE, UNE ACQUISITION INESTIMABLE
61
V.1. LA MARCHE PHYSIOLOGIQUE
63
V.1.1. Les conséquences anatomiques de la bipédie
64
V.1.2. Description
66
V.1.2.1. Les paramètres de la marche
65
V.1.2.2. Le cycle de marche
67
a. La phase d'appui
67
b. La phase oscillante
69
V.1.3. Les effets des mécanismes du cycle de marche sur le
centre de gravité
74
V.2. LA-MARCHE DE L'AMPUTE DE CUISSE
82
V.2.1. Déroulement de l'examen d'un patient présentant une
marche pathologique
83
V.2.2. Le cycle de marche d'un amputé de cuisse appareillé
(avec une emboîture quadrilatérale)
84
V.2.2.1. L'attaque du talon au sol
84
V.2.2.2. Le pied à plat sur le sol
85
V.2.2.3. Décollement du talon, puis des orteils
85
V.2.2.4. La phase oscillante
85
V.2.3. Les principaux défauts de marche chez l'amputé de
cuisse
86
VI. AMPUTATION DE CUISSE CHEZ L'ADULTE JEUNE QUELLE
EMBOITURE PROPOSER ?
89
VI.1. L'EMBOITURE QUADRILATERALE UNE LONGUE
EXPERIENCE
92
221
VI.1.1. Description
92
VI.1.1.1. La tablette ischiatique
92
VI.1.1.2. Le bord antérieur
95
VI.1.1.3. Le bord interne
95
VI.1.1.4. Le bord externe
96
VI.1.1.5. Le corps du fût
96
VI.1.2. Techniques de moulage
97
Vi.1.3. Alignement de la prothèse dont l'emboîture est
quadrilatérale
99
VI.1.3.1. Alignement statique
99
VI.1.3.2. Alignement dynamique
102
VI.2. LA PROTHESE FEMORALE DE FORME ET D'ALIGNEMENT
NATURELS : NSNA
103
VI.2.1. De la réflexion
100
VI.2.2. A la pratique
103
VI.3. LE-FUT CAT-CAM
107
VI.3.1. Les prémices d'une évolution
107
VI.3.2. Description du fût CAT-CAM
107
VI.3.3. Techniques de moulage du fût CAT-CAM
118
VI.3.3.1. "Isolement" du moignon
118
VI.3.3.2. Les repères et les mesures
118
VI.3.3.3. Préparation des bandes plâtrées
120
VI.3.3.4. Les trois phases d'enlèvement du modèle
CAT-CAM
120
VI.3.4. Alignement de la prothèse CAT-CAM
124
VII. L'INFLUENCE DE L'APPAIREILLAGE SUR LA READAPTATION
FONCTIONNELLE
125
VII.1. BIOMECANIQUE
127
VII.1.1. Généralités
127
VII.1.2. Application au fût quadrilatéral
131
VII.1.3. L'emboîture CAT-CAM : ce qui change avec elle
136
VII.2. BIOENERGETIQUE DE LA MARCHE
141
VII.2.1. Généralités
141
VII.2.2. Dépenses énergétiques durant la marche
quadrilatérale-CAT-CAM : un face à face décisif
143
VII.3. EN. RESUME
146
VII.4. APPAREILLAGE ET QUALITE DE VIE
148
222
VIII.,DONNEES PERSONNELLES
153
VIII.1. PROFIL SOCIO-PROFESSIONNEL
156
VIII.2. DONNEES CLINIQUES
158
VIII.3. EXPERIENCE EN QUADRILATERALE
160
VIII.4. PASSAGE EN CAT-CAM
163
VIII.5. LE CAT-CAM AU QUOTIDIEN
167
IX. ANALYSE DE NOS OBSERVATIONS ET CONFRONTATION AUX
DONNEES DE LA LITTERATURE
169
IX.1. APPRECIATIONS GLOBALES DE L'EMBOITUR CAT-CAM 173
IX.1.1. Temps d'adaptation du fût
173
IX.1.2. Temps de mise en place
174
IX.1.3. Temps de port
175
IX.1.4. Appréciation de la station debout et de la station assise
176
IX.1.5. Douleurs et problèmes cutanés
177
IX.2. APPRECIATION DE LA STABILITE DE L'EMBOITURE
CAT-CAM
178
IX.3. APPRECIATION DE LA MARCHE AVEC LE CAT-CAM
179
IX.4. LE CAT-CAM AU QUOTIDIEN
181
IX.5. EN RESUME
182
X. CONCLUSION
187
ANNEXE
193
BIBLIOGRAPHIE
205
TABLE DES MATIERES
217