Pratiques en Ophtalmologie

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Pratiques en Ophtalmologie
PRATIQUES EN
OPHTALMOLOGIE
R E V U E
D I D A C T I Q U E
M É D I C O - C H I R U R G I C A L E
dd www.ophtalmologies.org
lecture critique
Perte d’efficacité progressive des
traitements des néovaisseaux
choroïdiens
Difficultés de l’auto-instillation
de collyres par les patients
Dr Guillaume Leroux Les Jardins
En pratique
Prise en charge de l’énophtalmie
Dr Emilie Mercé, Pr Jean-Paul Adenis
Zoom sur
Le rétinoblastome : du diagnostic
au suivi après traitement
Dr Livia Lumbroso-Le Rouic
Cas clinique
Paralysie congénitale du IV
révélée au cours d’une maladie
de Basedow
Dr Corinne Bok-Beaube
Mise au point
Lentilles souples
hydrophiles multifocales
Pourquoi essayer Les nouvelles lentilles ?
Dr Marie-Aude Lureau-Cornuot
Tour d’horizon des nouveautés 2011 par le Dr Lureau-Cornuot.
Mieux visuel ? Plus de confort ? Sécurité accrue ?
Décembre 2011 • Volume 5 • n° 49 • 8 e
PRATIQUES EN
OPHTALMOLOGIE
R E V U E
D I D A C T I Q U E
M É D I C O - C H I R U R G I C A L E
• Directeur de la publication :
Dr Antoine Lolivier
• Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu
• Rédactrice : Laure Guiheneuf
• Secrétaire de Rédaction : Annaïg Bévan
• Directrice de la production : Gracia Bejjani
• Assistante de Production : Cécile Jeannin
• Chef de Studio : Laurent Flin
•M
aquette et illustration :
Élodie Lecomte, Antoine Orry
• Chef de publicité : Emmanuelle Annasse
• Service Abonnements : Claire Lesaint
• I mpression : Imprimerie de Compiègne
60205 Compiègne
sommaire
Décembre 2011 • Vol. 5 • N° 49
www.ophtalmologies.org
Toute l’équipe de Pratiques en ophtalmologie
vous souhaite de bonnes fêtes de fin d’année !
n ActualitÉs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p. 246
Rédacteur en chef
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Responsable editorial
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Comité de Rédaction
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(Conseiller éditorial de la rédaction)
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Dr Catherine Favard (Paris),
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Comité scientifique
Pr Jean-Paul Adenis (Limoges),
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Dr Georges Caputo (Paris),
Dr Sylvie Chokron (Paris),
Pr Béatrice Cochener (Brest),
Dr Salomon-Yves Cohen (Paris),
Dr Howard Cohn (Paris), Pr Joseph Colin
(Bordeaux), Pr Gabriel Coscas (Créteil),
Dr Marie Delfour-Malecaze (Toulouse),
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(Paris), Dr Jean-Claude Hache (Lille),
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Pratiques en Ophtalmologie
est une publication ©Expressions Santé SAS
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Mensuel : 10 numéros par an
Les articles de “Pratiques en Ophtalmologie” sont
publiés sous la responsabilité de leurs auteurs.
Toute reproduction, même partielle, sans
le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite
et constituerait une contrefaçon sanctionnée
par les articles 425 et suivants du code pénal.
n Lecture critique
• Tachyphylaxie ou perte d’efficacité progressive du bévacizumab et du ranibizumab dans le traitement des néovaisseaux choroïdiens
• Etude vidéo sur l’auto-instillation de collyres chez des patients avec déficience visuelle uni ou bilatérale . . . . . . . . . p. 248
Dr Guillaume Leroux Les Jardins (Paris)
n en pratique
Prise en charge de l’énophtalmie :
comment faire ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 250
Dr Emilie Mercé, Pr Jean-Paul Adenis (Limoges)
n Mise au point
Lentilles souples hydrophiles multifocales :
retour sur les nouveautés 2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 257
Dr Marie-Aude Lureau-Cornuot (Boulogne-Billancourt)
n Index pratiques en ophtalmologie 2011 . . . . . . . . . .
p. 262
n zoom sur…
Le rétinoblastome :
du diagnostic au suivi après traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 263
Dr Livia Lumbroso-Le Rouic (Paris)
n cas clinique
Paralysie congénitale du IV révélée au cours d’une maladie de Basedow :
quand deux pathologies s’associent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 267
Dr Corinne Bok-Beaube (Paris)
n Agenda . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n kiosque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n Rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p. 246
p. 255
p. 269
p. 269
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Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).
Photos de couverture : © aricica - fotolia
actualités de la profession
Le chiffre
du mois
1h
dehors pour
limiter la myopie
Ce sont les résultats surprenants
présentés par des médecins
de Cambridge (Etats-Unis)
au congrès de l’Académie
américaine d’ophtalmologie.
Une heure de plus passée
en extérieure par semaine,
réduirait le risque de myopie
de 2 %. Les explications sur
ces résultats sont toutefois
restées assez floues…
EN BREF
Eye-view, pour simuler
les effets du handicap
L’Association des
Aveugles d’Alsace
et de Lorraine
(AAAL) lance une
nouvelle application
IPhone permettant
d’utiliser la caméra
de son téléphone
mobile pour simuler
l’environnement
tel qu’il est
perçu par les personnes malvoyantes.
Pour en savoir plus :
www.argos-services.com
L’assurance maladie (AM)
encourage le “zéro papier”
L’objectif pour l’AM est de
dématérialiser la prescription
médicale. 900 pharmacies
pilotes testent « les prescriptions sur CD-ROM », un
dispositif de télétransmission
est également en phase de
test dans plusieurs officines.
246
PROFESSION
Orthoptistes et opticiens
aux côtés des ophtalmologistes
83 %
des Français estiment que les délais
d’attente pour obtenir une consultation chez l’ophtalmologiste sont trop longs,
voire excessivement longs pour 51 % d’entre eux.
C’est ce que révèle un sondage SNOF-IFOP présenté le 9 décembre dernier. On note un clivage
entre le Nord et le Sud pour cette perception : les
délais sont jugés nettement plus longs au Nord
qu’au Sud. Le Dr Jean-Bernard Rottier, président
du Syndicat National des Ophtalmologistes de
France (SNOF) précise que « de 25 millions, nous
sommes passés à 35 millions d’actes d’ophtalmologie en 10 ans et nous en prévoyons 45 millions
en 2020 ». Pour faire face à cette pénurie d’ophtalmologistes, le SNOF étudie depuis 2000 la mise
en place du « principe de la délégation de tâches
sous contrôle médical ». Les orthoptistes et les
opticiens pourraient ainsi prendre en charge une
partie des actes médicaux, comme l’adaptation
des lentilles simples, le suivi réfractif des enfants
de 6 à 16 ans, le suivi de certains patients ayant un
glaucome stabilisé ou encore le dépistage des rétinopathies diabétiques. Les sondés sembleraient
accepter à 79 % cette prise en charge par un autre
membre de l’équipe médicale du cabinet d’ophtalmologie. Par ailleurs, le SNOF préconise de former
3 % des internes en médecine à l’ophtalmologie
contre 1,4 % aujourd’hui. ß
Sondage réalisé en ligne auprès d’un échantillon
de 1 006 personnes représentatif de la population
française âgée de 18 ans et plus.
Pour en savoir plus : www.ifop.com
LÉGISLATION
Validité de l’ordonnance à cinq ans :
les ophtalmologistes s’insurgent !
U
n projet de loi renforçant la protection de l’information des consommateurs a été adopté
par le Sénat le 22 décembre dernier. Cette mesure
prévoit d’allonger la validité des ordonnances des
verres correcteurs de 3 à 5 ans. Pour le Dr JeanBernard Rottier, président du syndicat National
des Ophtalmologistes de France (SNOF) « c’est un
non-sens sur le plan sanitaire ». Pour lui, «le législateur abandonne le dépistage précoce des maladies
oculaires au profit du commerce d’équipements
optiques ». En effet, on constate que 36 % des patients venus pour une prescription de lunettes ou
un renouvellement ressortent en ayant été dépistés
pour un autre problème médical.
ß
PHARMACOVIGILANCE
Un rapport bénéfice/risque
défavorable pour 4 vasodilatateurs
L
e 15 décembre dernier, l’Afssaps faisait circuler
une lettre d’information destinée aux professionnels de santé suite à la réévaluation de plusieurs
médicaments vasodilatateurs contenant des dérivés
ergotés indiqués en cardiologie, en neurologie et en
ophtalmologie. Parmi eux, 3 sont utilisés en ophtalmologie, on retrouve l’Hydergine®, Sermion® et
Iskedyl®, tous indiqués dans le traitement d’appoint
des baisses d’acuité et troubles du champ visuel
présumés d’origine vasculaire, Iskedyl® étant en plus
proposé dans les rétinopathies aiguës d’origine vasculaire. La conclusion de cette réévaluation du rapport bénéfice/risque est défavorable. Les données
d’efficacité manquent, selon l’Afssaps, de pertinence.
Par ailleurs, les dérivés ergotés peuvent induire des
réactions de fibrose au niveau cardio-thoracique ou
rétropéritonéal. Même si ces effets sont rares, ils restent graves néanmoins.
ß
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
agenda
33e symposium APODEP (Association de
perfectionnement ophtalmologique de Paris)
13 et 14 janvier 2012, Paris
• Coordonnateurs
Pr C. Creusot-Garcher, Dr Y. Lachkar, Dr A. Salvanet
• Directeur scientifique
Pr A. Bron
• Programme scientifique
Les explorations en ophtalmologie, quand, pourquoi,
comment
• Renseignements et inscriptions
JBH Santé
Editions et communications médicales
53, rue Turbigo - 75003 Paris
Tél : 01 44 54 33 54 - Fax : 01 44 54 33 59
Site : www.sympoapodep.fr
5e Journées Interactives de formation de
réalités ophtalmolgiques
26 et 27 janvier 2012, Versailles
• Programme scientifique 
Diabète, sécheresse oculaire, allergie et inflammation : l’œil
au carrefour de la médecine interne - sous la présidence des
Pr G. Chaine et P. Massin
Idées reçues et bonnes pratiques en ophtalmologie - sous la
présidence du Pr J.P. Adenis
• Renseignements et inscriptions
Performances Médicales
91, avenue de la République - 75011 PARIS
Tél : 01 47 00 67 14 - Fax : 01 47 00 69 99
Email : [email protected]
Site : www.jifro.info
Génétique en neuro-ophtalmo-pédiatrie Oculo-motricite
30 janvier 2012, Marseille
• Renseignements et inscriptions
Secrétariat d’Ophtalmologie
Centre St Victor, CHU Amiens
354, Boulevard de Beauvillé - 80054 Amiens
Tel : 03 22 82 41 16 - Fax : 03 22 82 43 93
Email : [email protected]
8th Annual NANOS Meeting (North American
Neuro-Ophthalmology Society)
11-16 février 2012, San Antonio
• Renseignements et inscriptions
North American Neuro-Ophthalmology Society
5841 Cedar Lake Road Suite 204
Minneapolis, MN 55416
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Tél : 952-646-2037 - Fax : 952-545-6073
Email : [email protected]
Site : www.nanosweb.org
WOC - World Ophthalmology Congress
16 - 20 février 2012, Émirats Arabes Unis
• Renseignements et inscriptions
Meeting Minds FZ LLC
Dubai Media City
Shatha Tower – Office Suite 3113
P.O.Box 502464
Tél : 9714 4270492
Fax : 9714 4270493
Email : [email protected]
Site : woc2012.org
INCLO 2012 – Congrès de l’association
innovations en chirurgie et lasers
ophtalmologiques
24-29 mars 2012, Pérou
• Président du Congrès
Pr J.C. Rigal-Sastourne
• Coordination scientifique
Dr M. Assouline
• Comité scientifique
Dr Y. Bokobza – Dr C. Boureau – Dr D. Deidier
Dr M. Dominguez – Dr D. Ducournau
Dr C. Favard – Dr P. Chastang
Dr C. Feumi
Dr C. Ghenassia
Dr P. Koskas
Dr P. Rozot
• Renseignements et inscriptions
Gallic aviation département congrès
158, rue de la pompe – 75116 PARIS
Tél : 01 45 53 27 50
Fax : 01 45 53 22 20
Email : [email protected][email protected]
118e Congrès de la Société Française
d’Ophtalmologie
27-30 avril 2012, Paris
• Programme scientifique :
Ce que le praticien ne doit pas ignorer : les recommandations
récentes en ophtalmologie, DMLA exsudative : prise en
charge, rétine maculaire du myope fort, greffes de cornée,
pathologie cornéenne inflammatoire, Inflammation orbitaire,
leucocorie chez l’enfant.
• Renseignements et inscriptions
Site : www.sfo.asso.fr
247
Lecture critique
© Willie B. Thomas - istock
Nous avons lu pour vous
Publications récentes
Dr Guillaume Leroux Les Jardins*
Tachyphylaxie
Tachyphylaxie ou perte d’efficacité progressive du bévacizumab et du ranibizumab dans le traitement des néovaisseaux choroïdiens
4 Bevacizumab and ranibizumab tachyphylaxis in the treatment of choroidal neovascularisation.
Gasperini JL, Fawzi AA, Khondkaryan A et al. Br J Ophthalmol
2012 ; 96 : 14-20.
Pour certains patients atteints de DMLA exsudative, traités
par IVT d’anti-VEGF, on remarque après plusieurs mois de
suivi et de traitement une perte progressive de l’efficacité
des injections sur l’exsudation. On peut s’interroger sur les
raisons de cette évolution secondairement défavorable.
La perte progressive d’efficacité après administration répétée d’un médicament définit la tachyphylaxie. Ce phénomène a été évoqué dans les DMLA exsudatives traitées par
IVT d’anti-VEGF à partir de 2008 (1, 2).
Dans le cas des néovaisseaux choroïdiens (CNV) les mécanismes ne sont pas clairs et pourraient être des modifications qualitatives et quantitatives des récepteurs sur les
membranes néovasculaires, des modifications des signaux
de transduction ou encore une réaction immune contre les
anticorps anti-VEGF (3).
Évaluation d’un changement d’anti-VEGF
(bévacizumab ou ranibizumab)
Les critères d’inclusions étaient, en OCT, une amélioration initiale des signes exsudatifs (décollement de l’épithélium pigmentaire et/ou décollement séreux rétinien et/ou œdème
maculaire cystoïde) suivie d’une perte secondaire d’efficacité
malgré la poursuite des injections à la demande. Durant le
suivi les critères de retraitement étaient guidés par les résultats de l’OCT mensuel.
Au total, 26 yeux de 25 patients ont été inclus. Il y avait
7 hommes (28 %) et 18 femmes (72 %) pour un âge moyen
de 80 ans.
10 yeux sur 26 (38 %) étaient initialement traités par bévacizumab (dont 7 CNV occultes et 3 CNV visibles) avec un
nombre moyen de 7 IVT avant le changement pour le ranibizumab. Dans le sous-groupe de 7 yeux avec CNV occultes,
1 seul n’a pas répondu au changement de thérapeutique
alors que 6 yeux (85 %) ont eu une amélioration de l’exsudation dès 1, 2 ou 3 IVT de ranibizumab.
Dans le sous-groupe (n = 3) CNV visibles, 2 yeux ont bien répondu (66 %).
Au total, dans le groupe traité initialement par bévacizumab,
8 yeux sur 10 (80 %) ont eu une amélioration des signes exsudatifs lors du passage au ranibizumab.
Amélioration secondaire des signes exsudatifs dans 81 % des cas après changement de
type d’anti-VEGF
Dans cette étude rétrospective monocentrique, les auteurs
ont évalué chez des patients suivis pour DMLA exsudative,
le résultat d’un changement d’anti-VEGF lorsqu’une tachyphylaxie était suspectée. Ces patients étaient initialement
traités par un seul type d’anti-VEGF (ranibizumab ou bévacizumab).
Parmi les 16 yeux traités initialement par le ranibizumab, on
dénombrait 15 CNV occultes et 1 visible. Sur les 16, 13 (81 %)
ont eu une amélioration lors du changement d’anti-VEGF
avec IVT de bévacizumab. Cette amélioration est survenue
dès la première injection pour 6 yeux sur 13 et après 2 injections pour 5 yeux. 3 yeux sur 16 (19 %) n’ont pas eu d’amélioration.
* Hôpital Hôtel-Dieu, Groupe hospitalier Cochin-Hôtel Dieu, Paris
Au total, sur une série rétrospective de 26 yeux dont l’efficacité
du traitement anti-VEGF s’est estompée dans le temps, 21 yeux
248
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Lecture critique
sur 26 (81 %) ont eu à nouveau une amélioration des signes
exsudatifs à l’OCT lors du changement de type d’anti-VEGF.
D’un point de vue méthodologique cette étude est malheureusement rétrospective avec un nombre faible de patients. Elle nécessiterait d’être confirmée sur une plus grande
échelle. Cependant, elle présente une piste intéressante avec
des résultats encourageants lorsque l’on constate une lente
diminution d’efficacité du traitement par anti-VEGF. En attendant l’arrivée en pratique courante de nouveaux traitements
complémentaires validés pour la DMLA exsudative (VEGFTrap, Sirna…), essayer un changement de molécule anti-­
VEGF peut être une option thérapeutique.
n
Bibliographie
1. Keane PA, Liakopoulos S, Ongchin SC et al. Quantitative subanalysis
of optical coherence tomography after treatment with ranibizumab for
neovascular age-related macular degeneration. Invest Ophthalmol Vis
Sci 2008 ; 49 : 3115-20.
2. Schaal S, Kaplan HJ, Tezel TH. Is there tachyphylaxis to intravitreal antivascular endothelial growth factor pharmacotherapy in age-related macular degeneration? Ophthalmology 2008 ; 115 : 2199-205.
3. Binder S. Loss of reactivity in intravitreal anti-VEGF therapy: tachyphylaxis or tolerance? Br J Ophthalmol 2012 ; 96 : 1-2.
Thérapeutique
Etude vidéo sur l’auto-instillation
de collyres chez des patients avec
déficience visuelle uni ou bilatérale
4 A video study of drop instillation in both glaucoma and retina
patients with visual impairment.
Hennessy AL, Katz J, Covert D et al. Am J Ophthalmol 2011 ;
152 : 982-8.
Les traitements en collyres sont le mode d’administration préférentiel des ophtalmologistes. Leur utilisation correcte est indispensable dans de nombreuses pathologies (anti-glaucomateux
au long cours, corticoïdes dans les uvéites, antibiotiques après
injection intravitréenne).
Difficultés à l’instillation des collyres
en cas de déficience visuelle
Cette étude monocentrique, réalisée à Baltimore (USA), a
comparé, de manière prospective par évaluation vidéo, l’autoinstillation de collyre chez des patients atteints de pathologie
rétinienne ou glaucomateuse avec déficit visuel. Les patients ont
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
répondu préalablement à un questionnaire d’auto-évaluation sur
leur capacité à mettre correctement un collyre.
Les critères d’inclusion étaient la présence pour au moins un
œil d’un glaucome et/ou d’une pathologie rétinienne avec une
acuité visuelle inférieure à 20/60 (0,33) mais supérieure à la perception lumineuse. Une atteinte significative du champ visuel
automatisé était nécessaire dans un ou deux yeux. Les patients
devaient avoir un état général leur permettant de mettre euxmêmes leurs collyres. Ils étaient séparés en deux groupes selon
leur pathologie initiale (glaucome ou pathologie rétinienne).
L’évaluation du geste était faite sur l’enregistrement vidéo par
un observateur indépendant, qui ne connaissait ni les patients
ni les pathologies. Le critère principal était la capacité à instiller
correctement une goutte dans l’œil. Les autres critères étaient
la présence d’un contact œil-embout, et l’auto-évaluation des
performances par le patient.
Aucune instillation
dans l’œil dans 1/3 des cas
409 patients ont été inclus : 205 dans le groupe glaucome et
204 dans le groupe rétine. Les principales pathologies étaient
le glaucome à angle ouvert (88 %), la DMLA (39 %) et la rétinopathie diabétique (16 %). Dans le groupe glaucome, les patients
étaient moins âgés (68,9 ans vs 73,5 ; p < 0,005) avec un déficit
visuel plus fréquemment bilatéral (60,5 % vs 42,4 ; p < 0,005)
mais une meilleure acuité visuelle (0,78 ± 0,87 logMar vs 1,12 ±
0,59 logMar ; p < 0,005).
Dans les deux groupes, 30 % des patients n’étaient pas en mesure de mettre une goutte sur la surface oculaire. 47 % et 33 %
des patients touchaient l’œil avec l’embout. En réponse à l’auto-­
évaluation, 143 (35 %) sujets des deux groupes considéraient
faire toujours une instillation correcte. Pourtant parmi eux 29 %
et 35 % n’atteignaient pas l’œil. Les patients ont donc souvent
une mauvaise perception de leur capacité à instiller correctement le traitement.
Au total, ce travail avec une méthodologie originale et bien
conduite montre que pour les sujets de plus de 68 ans avec déficience visuelle uni ou bilatérale, il existe dans près de 1/3 des cas
de grandes difficultés à mettre correctement les collyres ainsi
qu’une mauvaise perception de ces difficultés.
Les praticiens doivent être conscients de ces problèmes et un
effort supplémentaire devrait probablement être apporté sur
l’éducation des patients et de leur entourage par les équipes
n
paramédicales et médicales.
249
en pratique
Prise en charge de l’énophtalmie
Comment faire ?
n L’énophtalmie est une rétrusion en arrière du globe oculaire à l’intérieur de l’orbite soit un enfoncement anormal du globe oculaire dans celle-ci, le globe oculaire étant de volume normal.
C’est le symptôme inverse de l’exophtalmie. Lorsqu’un implant est venu remplacer le globe
oculaire après chirurgie mutilante, on parle aussi d’énophtalmie sans qu’il y ait de notion de
“normalité” concernant le volume de ce dernier.
I
l faut donc distinguer les deux
types d’énophtalmie que nous
sommes amenés à prendre en
charge lorsque l’intervention de
l’oculariste ne suffit plus (prothèse
trop volumineuse et inconfortable) :
• celle entrant dans le cadre du
Post Enucleation Socket Syndrome
(PESS) ou syndrome de l’énucléé
ou de l’éviscéré donnant une impression de cavité creuse (Fig. 1) ;
• celle sur œil, voyant ou non, entrant dans le cadre d’une absence
de chirurgie mutilante (exemples :
post-traumatique, post-irradiation…) (Fig. 2).
Dans ces cas, les différentes techniques synthétisées dans la partie
droite de la figure 3 sont utilisables.
Toutefois, il faudra garder à l’esprit
d’être encore plus vigilant dans le
cadre des yeux voyants pour tout ce
qui passe par une “injection” et ce, à
cause du risque d’embol vasculaire.
En effet, il existe alors chez ce type
de patient un risque vasculaire supplémentaire : celui d’entraîner une
cécité. De façon générale, il conviendra donc à titre systématique de
* CHU Dupuytren, Limoges
250
Dr Emilie Mercé, Pr Jean-Paul Adenis*
prendre des mesures de sécurité (En-
cadré 1).
Concernant la chronologie des différentes interventions lors d’une
prise en charge réparatrice voire
esthétique du regard, le traitement
de l’énophtalmie se situe toujours
en amont de la prise en charge
spécifique du creux sus-palpébral et des anomalies palpébrales
(exemple ptosis) car en corrigeant
celle-ci, il existe un effet indirect,
certes modeste mais réel, vis-à-vis
de ces deux types d’anomalies.
Implantations
secondaires
Figure 1 - IRM : énophtalmie dans le
cadre d’un PESS après chirurgie mutilante.
Figure 2 - IRM : énophtalmie dans
le cadre d’une absence de chirurgie
mutilante.
Absence d’implant
intratétonien (“orbite vide”)
Le déficit de volume peut être dû à
l’absence de bille ; la première étape
dans la prise en charge de l’énophtalmie est alors l’implantation secondaire soit par une bille dont le
choix du biomatériau est laissé à
l’appréciation du chirurgien, soit
par une greffe dermograisseuse.
La greffe dermograisseuse est une
alternative aux implants sphériques ou “billes” et leur est préférée (car biocompatible) lorsque
l’on souhaite diminuer le risque
d’extrusion ou lorsque la cavité est
très rétractée (1). Chez les patients
déjà implantés, son utilisation dans
la prise en charge de l’enophtalmie
est simple notamment chez les patients présentant un bon recouvrement conjonctival.
Taille de la bille initiale
insuffisante
Lorsque la taille de la bille initiale n’est pas suffisante (s’aider
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Prise en charge de l’énophtalmie
de photos, du volume de la ou des
prothèse(s)), cette implantation
intraténonienne doit également
être reconsidérée. Dans ce cas, si
un implant synthétique (bille) est
choisi il sera généralement habillé
au moyen d’un tissu autologue (le
plus souvent de la sclère) ou d’un
biomatériau. Habiller un implant
permet d’augmenter sa taille, de le
placer plus facilement dans l’orbite,
d’y fixer les muscles oculomoteurs
et de réduire les risques d’exposition. En cas de reprise d’une éviscération, une solution originale
consiste à réaliser un équivalent de
la technique d’“énucléation puis
éviscération sur table” qui si
elle est correctement réalisée, évitera tout problème d’exposition de
bille. Il s’agit d’une énucléation avec
mise à plat sur table, dissection de
la fibrose, et réimplantation d’une
nouvelle bille enveloppée par la
sclère. La partie non recouverte
de sclère devra être placée au
fond de la cavité orbitaire et les
muscles oculo-moteurs fixés à la
coque sclérale. Lorsque la sclère est
inutilisable, l’implant est habillé de
préférence avec un autre matériau
autologue (aponévrose temporale,
fascia lata) (2), venant s’interposer
en antérieur entre la bille et la capsule de Tenon.
Les différents types de biomatériaux (implants et treillis) ainsi
que la technique chirurgicale de la
graisse dermograisseuse ne seront
pas évoqués ici.
Implant intraténonien de
bonne taille
Par contre, lorsqu’il existe déjà un
implant intraténonien de bonne
taille, il convient d’augmenter le
volume orbitaire soit par une implantation sous-périostée ou
intra-orbitaire d’un biomatériau soit par une injection intra-orbitaire de graisse autologue, de produits de comblement
DEUX CAS
DE PRISE EN CHARGE
Bille présente
Bille absente ou trop petite
Implantation sous-périostée
GDG
Implantation
secondaire
ou
intraorbitaire
Biomatériaux/greffons autologues/“fillers”
(Coleman, autres*)
(implants synthétiques +/- “habillés”)
+/- Prise en charge du creux sus-tarsal :
greffons autologues, lipostructure, fillers
Voie transcutanée
ou
voie transconjonctivale
* GDG, greffons autologues cartilagineux ou osseux
Figure 3 – Prise en charge de l’énophtalmie dans le PESS.
Encadré 1
Précautions à prendre pour éviter le risque
d’embol vasculaire.
• Eviter les mélanges de substances
• Toujours faire un test d’aspiration
• Ne pas injecter avec trop de pression ce qui implique
de ne pas se servir d’une seringue de volume important
• S’arrêter en cas d’augmentation de résistance,
ressortir et déboucher la canule
• S’arrêter en cas de baisse brutale de résistance
• Ne pas injecter plus de 0,25 ml de manière continue
• En cas de lipostructure, faire des tunnels dans le sens des fibres des
muscles de la face
• Lors d’injections faciales, éviter ou prendre particulièrement des précautions dans la zone des 3 cm3 glabellaire ou sont concentrées des
artérioles provenant de l’artère ophtalmique
fillers ou encore d’implants cylindriques en hydrogel.
❚❚Implantation sous-périostée
Le principe de l’implantation souspériostée est de combler l’orbite
dans sa partie inférieure de manière à rehausser son contenu et
de le pousser vers l’avant. Celle-ci
permet alors de ce fait, de réduire
non seulement l’énophtalmie mais
aussi la dépression sus-palpébrale.
Pour placer un implant dans l’es-
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
pace sous-périosté, le contenu orbitaire peut être abordé de deux
manières : par voie transcutanée
ou par voie transconjonctivale.
Voie transcutanée
La voie transcutanée consiste à
réaliser une incision sous-ciliaire
(3) haut située à 2 mm du bord ciliaire. Elle ne dépasse pas le point
lacrymal inférieur en dedans et ne
franchit pas la projection du rebord latéro-orbitaire en dehors. La
251
en pratique
dissection est menée jusqu’au rebord infra-orbitaire en préservant
le septum orbitaire. Le périoste est
incisé, puis décollé d’avant en arrière. Après mise en place du matériel en position sous-périostée,
l’incision cutanée est suturée au
mieux par un surjet.
Voie transconjonctivale
La voie transconjonctivale est rapide, ne laisse pas de cicatrice et permet une excellente exposition du
contenu orbitaire, tout en donnant
moins de malposition de la paupière
inférieure et moins de rétraction que
la voie d’abord cutanée. La conjonctive et la lame des rétracteurs sont
incisées à 2 mm du bord inférieur
du tarse. L’incision peut se prolonger en dehors par une canthotomie
pour obtenir une meilleure exposition de la région. Une dissection
préseptale est alors menée jusqu’au
rebord infra-orbitaire.
❚❚Implantation intra-orbitaire
L’implantation intra-orbitaire est
une autre façon de combler l’énophtalmie. Lorsqu’il s’agit d’implanter
des morceaux de biomatériaux ne
permettant pas des micro-incisions, la voie d’abord sera réalisée
comme décrit ici : lamelle antérieure musculo-cutanée et lamelle
postérieure septo-tarso-conjonctivale sont individualisées, le septum est repéré puis ouvert environ
3 mm au-dessous du rebord orbitaire pour séparer la graisse intraorbitaire du périoste du plancher
et la décoller jusqu’au fond de l’orbite en prenant soin de ne pas léser
le muscle oblique inférieur. Une
fois individualisée, la graisse est
réclinée vers l’avant puis le haut à
l’aide d’une spatule mousse. Cette
manœuvre permet à la prothèse
qui avait été laissée en place de se
propulser vers l’avant diminuant
l’énophtalmie. Les biomatériaux
peuvent alors être introduits dans
252
l’espace séparant la graisse du périoste, sur le plancher orbitaire.
Les morceaux d’hydroxy-apatite
tricalcium phosphate (HA-TCP)
issus de plaques d’HA-TCP (Fig. 4) ont
notre préférence en tant que biomatériaux à implanter en position
sous-périostée ou en intra-orbitaire
selon les modes chirurgicaux décrits
ci-dessus. De par leur biocompatibilité (composition et structures
identiques à celle de la phase minérale de l’os humain (4), et prolifération fibrovasculaire complète en 4
semaines (5)), ils sont mieux intégrés dans les tissus et donc mieux
tolérés. Ils offrent de plus l’avantage
d’un matériel malléable, facilement
découpable. Lorsqu’ils sont utilisés, ils donnent de bons résultats
sur l’énophtalmie et le creux sustarsal (ou creux sus-palpébral) (6).
Le risque infectieux existe avec ces
derniers car bien que plongés dans
une solution de Bétadine® ou d’antibiotique dilué, ils sont préparés sur
table avec une voie d’implantation
qui reste large comparés aux microincisions qui sont réalisées pour les
“injections intra-orbitaires” citées
ci-dessous.
Injections
intra-orbitaires
Différentes injections intra-orbitaires peuvent être utilisées dans
la prise en charge de l’énophtalmie.
Plus que des injections, ce sont en
réalité des “transferts” ou des “dépôts”, soit de biomatériaux : expanders orbitaires en hydrogel de
type implants cylindriques de la
société Osmed (pins 0,024 ml) ou
fillers ; soit d’un matériel autologue : la graisse autologue selon la
technique de Coleman.
Les adipocytes purifiés selon
la technique de coleman
« Être le moins traumatique
Figure 4 - Un plancher (ou plaque)
d’hydroxy-apatite tricalcium phosphate
(société FCI).
possible pour les cellules graisseuses espérant ainsi un taux
de survie ultérieur le plus élevé
possible pour un résultat esthétique sur le long terme le
meilleur possible ».
❚❚Le prélèvement
Il s’agit d’une lipoaspiration à l’aide
de canules d’aspiration à bords
mousses atraumatiques (longueur
15 cm, diamètre 3 mm) montées
sur des seringues vissées de 10 ml.
Après la réalisation de micro-incisions, celle-ci est effectuée soit en
graisse abdominale, soit au niveau
de la fesse, soit au niveau de la face
externe de la cuisse via de multiples tunnels de prélèvement. Du
xylocaïne 1 % non adrénalinée
diluée dans 250 ml de sérum
physiologique injecté en éventail
au niveau des sites de prélèvement
faciliterait le geste chirurgical le
rendant moins traumatisant. Réaliser un vide limité lors du prélèvement pour prélever sous faible
pression s’avère être également un
gage de sécurité : laisser 0,5 à 1 ml
d’air comme amortisseur. Les micro-incisions seront suturées avec
des points séparés de soie 6,0 par
exemple.
❚❚La purification
Elle peut être réalisée soit par centrifugation, soit par sédimentation
ou décantation ce qui correspond en
fait à un lavage au sérum salé (BSS).
Actuellement, la question centri-
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Prise en charge de l’énophtalmie
Figure 5 - Seringues de 1 ml pour l’injec-
Figure 6 - Pins.
tion de graisse autologue (transfert).
fugation versus lavage au BSS de la
graisse prélevée pour un meilleur
résultat postopératoire et une
moindre résorption graisseuse, n’est
pas complètement résolue. Il en est
de même concernant l’adjonction
de PRF ou PRP (Platelet Rich Fibrin
ou Plasma) ou d’insuline qui semblent toutefois donner en pratique
de bons résultats. Après centrifugation, trois phases sont obtenues et
après élimination des phases supérieure et inférieure, les adipocytes
“purifiés” sont transférés dans des
seringues de 1 ml (Fig. 5). On estime
après la centrifugation à ces paramètres, une réduction du volume
graisseux de 30 % environ.
Le paramètre force de centrifugation de 3 000 tours/minute prônés
par Coleman lors de la description
de la technique est remis en cause,
1 200 tours/minute serait moins délétère (7). Le paramètre de trois minutes comme durée de centrifugation semble par contre validé par la
plupart des auteurs. Cependant à ce
jour, la majorité d’entre eux tendent
à abandonner la centrifugation.
❚❚Le transfert
L’injection consiste à déposer
délicatement des fragments
graisseux de petite taille pour
limiter au maximum la résorption (8). Selon Coleman, l’idéal en
théorie serait de réaliser une série
de dépôts d’un volume de 0,1 à 0,2 ml
chacun pour un résultat optimal.
Figure 7 - Caractéristiques techniques des pins (société Osmed).
Ils doivent être réalisés de façon
rétrograde, rétrotraçante telle un
réel “truffage” respectant le principe des “tunnelisations”.
L’inconvénient de cette technique
est l’impossibilité de prédire le
résultat. La technique de Coleman peut également intervenir
en complément d’une première
prise en charge chirurgicale ayant
conduit à un résultat insuffisant.
Elle s’avère utile en cas d’expulsion d’implant d’hydroxy-apatite
ou de biocéramique évitant ainsi
un nouveau rejet. La limite principale de la technique est la résorption de graisse totalement imprévisible : certains patients ne
présenteront aucune résorption
alors que d’autres perdront plus ou
moins rapidement tout bénéfice
de la technique alors que les autres
se situeront en moyenne à 30 % de
résorption graisseuse à 1 an.
Les self-inflating hydrogel
cylindrical pellets ou “pins
en hydrogel” de la société
Osmed
❚❚Description technique (Fig 6)
Ils sont composés d’un copoly-
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
mère de méthylmétacrylate et
de vinylpyrrolidine. Chaque pins
réalise à l’expansion un maximum
de pression de 243 mmHg et une
taille de pore de 3 nm à l’état initial, soit déshydraté, et de 10 nm,
sa taille maximale, une fois hydraté. A l’état déshydraté, donc à
l’état pré-implantation, les dimensions d’un pins sont les suivantes :
2 mm x 8 mm (diamètre x longueur) correspondant à un volume
de 0,025 ml autorisant le passage dans un trocard 12 Gauges.
In vitro, une fois immergé dans
une solution isotonique de NaCl,
chaque pins atteint son volume
final en 4 à 8 heures. Le volume
final de chaque pins utilisé à
l’état hydraté est de 0,24 ml soit
presque 10 fois (9,6 fois pour
être exact) le volume initial avec
des mesures de : 4 mm x 15 mm
(diamètre x longueur) (Fig. 7). Ainsi,
4 pins dans l’orbite ont un volume approximatif de 1 cc sachant qu’il existe une corrélation
entre le phénomène d’expansion
in vitro (NaCl isotonique) et in
vivo. Wiese et al. ont publié que la
durée nécessaire à l’expansion totale des expanders orbitaires sphé253
en pratique
riques était le double que la durée
retrouvée in vitro (9).
externo en guise d’indentation épisclérale.
❚❚Les implants et le matériel
d’injection
Les pins sont injectés par voie
conjonctivale derrière l’implant
intra-orbitaire en arrière du septum. Selon les opérateurs, ils sont
injectés via un ou plusieurs sites
d’injection. L’ensemble trocart-injecteur est poussé 3 cm à l’intérieur
de l’orbite en s’aidant des marques
gravées sur le guide en métal et espacées par convention de 1 cm les
unes des autres. Lorsqu’il est inséré en intra-orbitaire via un site
conjonctival situé dans un quadrant latéral, son bout doit être
dirigé vers la portion médiale postérieure de l’orbite et vice versa de
façon à ce que les implants soient
disposés dans l’orbite de manière
oblique. Dans notre expérience,
les pins nous ont donné une
grande satisfaction avec un bon
résultat esthétique. La facilité de la
technique et de son apprentissage,
la préparation des produits hautement contrôlés par le laboratoire,
leur bonne visualisation en imagerie, le taux négligeable de complications et même absent dans
notre expérience, sont d’autres
arguments favorables à ces techniques. Toutefois, comme tout
nouveau matériel et toute nouvelle technique, il est possible
d’assister sur le long terme à des
conséquences non anticipées et
inattendues. Notre crainte pourrait en effet venir si notre réflexion
se fait par analogie à la récente vague de complications des éponges
en MIRAGEL utilisées à l’époque
dans la chirurgie des décollements
de rétine rhegmatogène par voie ab
LES FILLERS
254
L’avantage de ces derniers sont :
leur facilité d’injection (absences
de larges abords chirurgicaux), leur
durabilité, leur sécurité, leur réalisation “prothèse oculaire en place”
pour une meilleure appréciation
per-opératoire du résultat, la possibilité d’une anesthésie locale et
donc la possibilité de répéter les
injections pour un résultat optimal
sans sur-correction. Concernant
l’injection intra-orbitaire, deux ont
été plusieurs fois testés, utilisés et
publiés : il s’agit de l’hydroxy-apatite de calcium (Radiesse®) (10, 11)
et d’un acide hyaluronique réticulé
dont le marquage CE date de 1996
(Suède) et a obtenu l’approbation
FDA (Food and Drug Administration) en 2003 : le RestylaneSubQ®
(12). Sa réticulation est chimique. Il
ne présente pas selon la documentation du laboratoire de résidu protéique et son taux de stabilisation
serait identique à tous les produis
Restylane®, ne différant que par la
taille et le nombre de particules. Le
produit est mis dans une seringue
de 2 ml et il est injecté via une canule mousse de 18 ou 16 G.
❚❚Les acides hyaluroniques (ex :
Restylane®) (13)
Naturellement synthétisé dans le
derme et fabriqué par génie génétique, il peut être utilisé dans sa
composition fortement réticulée
dans la prise en charge des orbites énophtalmes étant donné sa
forte densité et sa durabilité dans
le temps. L’acide hyaluronique
est très hydrophile et peut absorber jusqu’à 1 000 fois son poids en
eau. Malgré un risque allergique
faible, les contre-indications classiques sont cependant la femme
enceinte ou allaitante, les antécédents d’hypersensibilité à l’une
des molécules et les infections ou
inflammations au niveau du site
d’injection. Le résultat obtenu est
immédiat avec un renforcement
de l’effet volumateur dans les
72 h, ses effets dureraient environ
6 mois (produit résorbable) avec
une bonne tolérance.
❚❚L’ hydroxy-apatite de calcium
injectable (Radiesse®, BioForm
Medical, San Mateo, CA)
Elle est comme l’acide poly-L-lactique, un filler résorbable contenant des microsphères qui stimulent la production endogène de
collagène (14). Utilisé avec succès
dans les lipodystrophies chez le
patient VIH+, il doit être utilisé
avec précaution dans le domaine
de l’esthétique à cause de la possibilité d’effets secondaires de types
nodules et granulomes (15). Par
contre, il semble donner de bons
résultats dans la prise en charge
de l’énophtalmie. Une étude pilote
sur son utilisation dans la prise en
charge des orbites anophtalmes
sur une série de quatre patients a
été publiée en 2007 dans Archives
of Facial Plastic Surgery (10).
Selon les auteurs, les effets dureraient approximativement une année (11).
n
Mots-clés :
Enophtalmie, Biomatériaux, Greffons
autologues, Fillers, Pins, Implantation
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Prise en charge de l’énophtalmie
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sur table est-elle une bonne technique ? J Fr Ophtalmol 2001 ; 24 : 836-41.
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adjustable prefabricated methylmethacrylate subperiostal implants.
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Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Mise au point
Lentilles souples hydrophiles
multifocales
Retour sur les nouveautés 2011
n
Les laboratoires nous proposent des nouveautés en lentilles souples hydrophiles multifo-
cales. Pourtant nous avions déjà un choix intéressant, avec des adaptations de plus en plus
simplifiées et des matériaux qui progressent. Nous étions assez satisfaits pour une majorité de
nos patients. Alors pourquoi essayer ces nouvelles lentilles ? Apportent-elles un mieux visuel,
en confort ou en sécurité ?
Dr Marie-Aude Lureau-Cornuot*
N
ous diviserons les principales nouveautés en
lentilles souples hydrophiles multifocales (LSH MF) en
équipements symétriques et équipements asymétriques.
Les systèmes
symétriques
Il s’agit des lentilles souples hydrophiles (LSH MF) fonctionnant
avec deux lentilles de même géométrie sur les deux yeux. Ce sont
essentiellement des lentilles à vision de près centrale fonctionnant
sur le principe de la vision simultanée.
L’Ophtalmic® Progressive HR
(haute résolution), du laboratoire
Ophtalmic a été mise sur le marché en 2011. Cette LSH MF possède une zone optique asphérique
progressive. Le centre est dévolu
à la vision de près, puis la zone intermédiaire est progressive “lissée” et enfin la zone périphérique
corrige la vision de loin. Ces zones
* Ophtalmologiste, Boulogne-Billancourt
Figure 1 – Profils de puissance progressifs.
optiques sont de taille constante.
La lentille possède deux profils
d’addition, un low pour les additions allant jusqu’à 2 voire 2,25 et
un profil high au-delà (Fig. 1 et Tab. 1).
Un récent article (1) étudiait l’addition réelle de ces LSH MF afin
de tenter d’expliquer la variabilité
des résultats visuels. D’après le Dr
Vogt, ingénieur en optique, l’addition objectivée par des analyseurs
de front d’ondes serait bien inférieure à ce que l’on attendait (Tab. 2).
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
On aimerait que les auteurs poursuivent leur travail de mesure sur
toutes les lentilles MF… même si
ce n’est pas le seul paramètre qui
détermine la performance visuelle
de près.
Dans le communiqué marketing
livré par le laboratoire Ophtalmic,
les mesures des puissances des
lentilles sont effectuées de façon
comparative entre la Air Optix®
MF Low (Ciba Vision), la Purevision® MF Low (Baush & Lomb),
257
Mise au point
la Focus® Dailies® Progressives
(Ciba Vision) (Fig. 2).
Des différences sont notables également.
La lentille Ophtalmic® a un design
asphérique qui limite les aberrations optiques d’ordre supérieur
(Fig. 3).
Pour une amétropie, certes minime (+1 dioptrie), les images en
aberrométrie avec ou sans lentilles
sont quasi superposables.
L’Ophtalmic® HR progressive
est en silicone-hydrogel avec un
Dk/e de 88,6 ce qui permet un flux
d’oxygène de 96 %.
Son modulus de rigidité est faible à
0,5 MPa (Tab. 3).
Son angle de mouillabilité de 17°
associé à des bords profilés et arrondis améliorent le confort de la
lentille.
Les caractéristiques du matériau
permettent de maintenir un film
lacrymal homogène qui optimise
alors la performance visuelle de la
lentille.
La répartition des lentilles a été
évaluée selon l’hydrophilie et le
Dk/e (Fig. 4) (à titre comparatif ).
On peut ajouter la C2T® et la
C2TT® de Precilens respectivement lentilles multifocales sphériques et toriques à vision de près
centrale un peu plus anciennes
(commercialisées en 2009). Ces
lentilles sont en hydrogel et ont la
particularité d’avoir des zones de
VL et de VP stabilisées. Cette caractéristique, d’après l’étude diligentée
par le laboratoire Precilens, menée
par l’équipe de Peter Walker (2)
permettrait lorsque que l’on augmente l’addition, de ne pas pénaliser alors, ou à peine, la vision de
loin (Fig. 5).
La gamme de la C2T® est complétée par la C2TT® :
258
Tableau 1 – Caractéristiques techniques d’Ophtalmic®
HR Progressive.
Matériau
Groupe FDA
Filtre UV
Traitement de surface
Agent mouillant
Rayon Ro
Diamètre total
Géométrie
Puissances
Additions
Adaptation
Hydrophilie
Module d’élasticité
Angle de contact
Ec
Dk
Dk/e
Teinte
Renouvellement
Durée de port
Conditionnement
Filcon II 3 (SiH)
2
Oui
Non
Non
8,70 mm
14,20 mm
Asphérique progressive antérieure à VP centrale
Asphérique postérieure
-7,00 D à 5,50 D par 0,50 D
-5,00 D à +5,00 D par 0,25 D
+5,50 D à +6,00 D par 0,50 D
Low : jusqu’à +2,25 D
High : +2,25 D à +3,00 D
7,40 < Km < 8,10 mm
58 %
0,50 MPa
17°
0,07 mm à -3,00 D
62*10-11
88,6*10-9 à -3,00 D
Incolore
Mensuel
Journalier
Boîte de 6
Tableau 2 - Additions mesurées des lentilles testées (1).
Lentilles
Air Optix® aqua MF Low
Purevision® MF Low
Air optix® aqua MF Medium
Air optix® aqua MF High
Purevision® MF High Laboratoires
Ciba Vision
Bausch & Lomb Ciba Vision
Ciba Vision
Baush & Lomb
Dioptries
+0,25
+0,59
+1,30
+1,41
+1,54
Figure 2 – Profils des puissances en lentilles progressives.
• C2Trimestrielle® (C2T®) :
- profil antérieur sphéro-asphérique ;
- profil postérieur progressif ;
- Ro de 8 à 9,5 mm par pas de
0,30 mm ;
- diamètre total 14,2 mm ;
- puissances de -25 à 25 D par pas
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Lentilles Souples Hydrophiles Multifocales
Figure 3 – Aberrations avec et sans LSH MF Ophtalmic® Progressive HR.
• C2TT® (torique trimestrielle) :
- puissances de -20 à +20 D par pas
de 0,25 ;
- cylindres -0,75 à 5,5 par 0,25 D ;
axes de 0° à 180° par 5°.
En janvier 2012, la mise sur le marché de la C2Mensuelle est prévue.
C’est également une lentille à vision simultanée, symétrique et VP
centrale en silico-hydrogel. Cette
lentille possédera deux additions,
low et high.
Le matériau devrait avoir une hydrophilie de 58 %, un Dk/e annoncé de 86 et des puissances prévues
de -8 à +6 D, un Ro de 8,6 et un diamètre de 14,2 mm.
Tableau 3 - Différents modulus des LSH multifocales.
Lentilles
Air Optix® MF
Purevision® MF
Biofinity® MF
Ophtalmic® HR progressive Saphir® RX monthly MF
80
Laboratoires
Ciba Vision Bausch & Lomb Coopervision
Ophtalmic Mark’ennovy Mpa
1,2
1,1
0,75
0,5
0,13
Rythmic UV Multifical®
70
Proclear Multifical®
Hydrophilie (%)
de 0,25 ;
- additions : progression 1
(≤ 1,75 D), progression 2 (> 1,75 D).
60
Acuvue Biofocal®
50
Biofinity Multifocal®
40
PureVision Multi-focal®
30
Air Optix Aqua Multifocal®
20
0
20
40
60
80
100
Transmissiblité à l’oxygène (Dk/e)
120
140
160
Données Contaguide
Figure 4 – Figure comparative de la répartition des lentilles en fonction de leur
­hydrophilie et de leur Dk/e.
Les systèmes
asymétriques
Pour rappel, ces lentilles fonctionnent avec une lentille à vision de
loin centrale (œil préféré en VL)
et une lentille à vision de près centrale (œil non préféré en VP).
La Proclear® Multifocal (Coopervision) est l’exemple principal que
nous connaissons.
En juin 2010, le lancement de la
gamme partielle Biofinity® Multifocal est débuté en France. En juin
Figure 5 - Répartition des zones optiques sur les deux lentilles. A gauche : vision
­simultanée classique. A droite : zone optique breveté C2.
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
259
Mise au point
Cette lentille asymétrique peut
également être utilisée en système
symétrique. Particulièrement pour
l’hypermétrope avec une réfraction à peu près symétrique on peut
utiliser deux lentilles Near. Mais
également dans l’ajustement d’un
équipement asymétrique, si la VP
est faible, on ajoute +0,25 D sur œil
N ou bien on passe à deux lentilles
N. De même pour l’ajustement d’un
équipement asymétrique qui donne
une mauvaise VL on peut ajouter
0,25 D sur l’œil D ou passer à deux
lentilles D (Retouches gagnantes.
Dr C. Peyre et X. Subirana. Informations du laboratoire Coopervision).
Le laboratoire Mark’Ennovy a
également commercialisé en 2010
une lentille fonctionnant sur le
principe de l’asymétrie. La lentille
Xtensa® Multifocale, en hydrogel conventionnel, appartient à la
classe 4 de la FDA. Elle possède
un Dk/e de 15,8. Cette lentille est
moulée et est asphérique. Son
diamètre total est de 14,3 mm, sa
zone optique de 8 mm et son Ro de
8,60 mm.
260
Proclear® MF
Ro
8,70
Diamètre
14,4 mm
Epaisseur (-3 D)
0,16
Zone optique totale
8,5 mm
Biofinity® MF
8,60
14 mm
0,08
8,5 mm
VISION SIMULTANÉE
GÉOMETRIES
ASPHÉRIQUES
CD
CN
Conseil d’adaptation:
ADDITION(D)
+0.50 à +4.00
(par 0.50)
VP
VL
- +1,50 -
INTERMEDIAIRE
VP
INTERMEDIAIRE
Hypermétropes >0.75
CN ODG
INTERMEDIAIRE
VL
Myopes et
hypermétropes<0.75
CD oeil dominant
CN oeil non dominant
INTERMEDIAIRE
Cette lentille est en matériau biofinity, que nous connaissons avec
les lentilles Biofinity® sphériques
et toriques. C’est donc la première
lentille progressive “asymétrique”
en silico-hydrogel. La lentille Biofinity® MF possède les mêmes
paramètres que la Proclear® Multifocal (Coopervision). Cependant
la qualité visuelle est améliorée. La
zone optique centrale est customisée et change de diamètre en fonction soit de la sphère, soit de l’addition. Les zones de VL et VP sont
stabilisées et sphériques ce qui
n’était pas le cas avec la Proclear
MF®. La zone intermédiaire est
asphérique (Tab. 4).
Tableau 4 - Proclear® MF versus Biofinity® MF.
PUISSANCE (D)
2011 la gamme complète est lancée
en France, aux USA et au Canada.
VL
- +1,00 - +0,50 -
0,00 -
- - 0,50 - - 1,00 -
ZONE OPTIQUE (mm)
ZONE OPTIQUE (mm)
Figure 6 – Saphir® RX Monthly, vision simultanée : géométries asphériques.
GÉOMÉTRIE
FACE ANTÉRIEURE
ASPHERIQUE
ZONE OPTIQUE
ANTÉRIEURE
PRISME
BALLAST
PARAMETRES ET PUISSANCES
1 TRAIT REPERE
ZONE
LENTICULAIRE
EXCENTRIQUE
FACE POSTÉRIEURE
TORIQUE
ZONE
OPTIQUE
TORIQUE
DÉGAGEMENT
PERIPHERIQUE
COURBE SPHERIQUE
DE DÉGAGEMENT
Figure 7 – Saphir® RX Monthly : géométrie, paramètres et puissances.
Elle a une addition low et une addition high. Sa puissance varie de
-10 D à +10 D et son renouvellement est mensuel. Elle est commercialisée avec un prix attractif
autour de 20 € par mois.
Le même laboratoire fabrique
deux lentilles plus novatrices, la
Saphir® RX Multifocale et la
Multifocale torique mensuelle®
(Fig. 6). Ces lentilles sont en silicohydrogel et ont un Dk de 60. Elles
fonctionnent sur un principe superposable à celui de la Biofinity®
MF mais présentent une gamme
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
très étendue de puissances et paramètres (Fig. 7).
La Saphir RX multifocale torique® est la première
lentille multifocale torique mensuelle en silico-hydrogel. Elle possède un prisme ballast et corrige des
cylindres de -0,75 à -8 D.
Son budget moyen annoncé par le fabriquant s’élève
à 40/45 € par mois mais avoisine plus souvent les
60 € avec le produit, ce qui peut être parfois un frein
pour les patients. C’est donc une lentille un peu
plus coûteuse que la Biofinity® MF mais qui permet
d’équiper beaucoup de patients “hors normes”.
En conclusion
Le développement des lentilles multifocales en silico-hydrogel suit celui des lentilles sphériques et
toriques. Il permet aujourd’hui d’adapter de façon
plus sécuritaire mais aussi plus confortable.
Les gammes s’étendent également et permettent
d’équiper de plus en plus de patients presbytes.
L’année 2012 réserve encore des nouveautés dans ce
domaine, la première est la C2T® Mensuelle Precilens en silico-hydrogel. Gageons que d’autres suivront rapidement… n
L’auteur ne déclare aucun conflit d’intérêts
Références
Laboratoire Precilens
Laboratoire Ophtalmic
Laboratoire Coopervision
Laboratoire Mark-Ennovy
Mots-clés :
Lentilles souples hydrophiles
multifocales, Système symétrique,
Système asymétrique
Bibliographie
1. Vogt AKS, Baterman K, Green T et al. Using power profiles to evaluate aspheric lenses, profiles can help practitionners gain insight
into designs and performance for near-vision tasks. January 2011.
2. Peter Walker , Simon Rose, Pooja Rudrale et al. Etude clinique d’une
lentille hydrogel multifocale - études commanditées par le laboratoire Precilens° centre « Visique Rose » Hamilton 2010. LR0 N0 35.
index pratiques en ophtalmologie 2011
no 40
no 41
no 42
no 43
no 44
no 45
no 46
no 47
no 48
no 49
PRATIQUES EN
OPHTALMOLOGIE
R E V U E
D I D A C T I Q U E
M É D I C O - C H I R U R G I C A L E
dd www.ophtalmologies.org
LECTURE CRITIQUE
Perte d’efficacité progressive des
traitements des néovaisseaux
choroïdiens
Difficultés de l’auto-instillation
de collyres par les patients
Dr Guillaume Leroux Les Jardins
EN PRATIQUE
Prise en charge de l’énophtalmie
Dr Emilie Mercé, Pr Jean-Paul Adenis
ZOOM SUR
Le rétinoblastome : du diagnostic
au suivi après traitement
Dr Livia Lumbroso-Le Rouic
CAS CLINIQUE
Paralysie congénitale du IV
révélée au cours d’une maladie
de Basedow
Dr Corinne Bok-Beaube
MISE AU POINT
LENTILLES SOUPLES
HYDROPHILES MULTIFOCALES
POURQUOI ESSAYER LES NOUVELLES LENTILLES ?
Dr Marie-Aude Lureau-Cornuot
Tour d’horizon des nouveautés 2011 par le Dr Lureau-Cornuot.
Mieux visuel ? Plus de confort ? Sécurité accrue ?
Décembre 2011 • Volume 5 • n° 49 • 8 €
dossiers
• N° 41 - Le glaucome
• N° 44 - Les paralysies oculomotrices
• N° 45 - Spécial congrès SFO
• .N° 48 - Greffes lamellaires de cornée : un nouveau regard sur la
kératoplastie
articles par rubrique
A SAVOIR
• N° 42 - Liste des 77 médicaments et Plan de gestion des risques
BONNE PRATIQUE
• .N° 40 - Conduite à tenir devant un ptosis
• N° 42 - Quelle toxine botulique utiliser ?
CHIRURGIE
• N° 43 - Chirurgie de la presbytie
CONDUITE A TENIR
• N° 42 - Œil et sport
ECHOS DES CONGRES
• N° 41 - 13e Journées d’Ophtalmologie Pratique
• N° 42 - Les Journées Francophones de Nutrition 2010
• N° 42 - 5e édition du congrès Eyesee : de l’enfant à l’adulte jeune
en ophtalmologie
• .N° 43 - Troubles oculomoteurs et chirurgie réfractive
• .N° 44 - Retour sur le Symposium de l’ASCRS* à San Diego
• N° 46 - 13e Journées d’Ophtalmologie Pratique
• N° 47 - 13e Journées d’Ophtalmologie Pratique
• .N° 48 - Les Ateliers Pratiques des Internes en Ophtalmologie
EN PRATIQUE
• N° 47 - Complexe ganglionnaire rétinien en OCT et confrontation
au champ visuel
FOCUS SUR...
• N° 40 - Les douleurs en pathologie lacrymale
• N° 41 - Le traitement médical anti-glaucomateux
• N° 42 - Le signe de Saint-Eloi
262
HISTOIRE
• .N° 46 - Henri Parinaud (1844-1905)
INTERSPECIALITE
• N° 43 - La rétinopathie diabétique en 2011
LECTURE CRITIQUE
• N° 46 - Nous avons lu pour vous : ptérygion – œdème maculaire
• N° 47 - Nous avons lu pour vous : souches résistantes – atteinte
fovéale
• N° 48 - Nous avons lu pour vous : presbytie - uvéites
MISE AU POINT
• N° 40 - L’examen clinique de la surface oculaire
• N° 42 - Prise en charge chirurgicale d’un ptosis
• N° 43 - Décollements de l’épithélium pigmentaire dans la DMLA
• N° 44 - Toxine botulique
• N° 45 - Injection d’acide hyaluronique
• N° 46 - Les allergies oculaires
• N° 47 - Le syndrome de blépharophimosis
• N° 48 - Dacryops de la glande lacrymale
POINT DE VUE
• N° 40 - DMLA exsudative
• N° 45 - Occlusions veineuses rétiniennes œdémateuses traitées
par Ozurdex®
PROFESSION
• N° 41 - Données médicales personnelles
TECHNIQUE EN IMAGES
• N° 41 - Le test d’élongation musculaire peropératoire
• N° 43 - Imperforations lacrymo-nasales
ZOOM SUR
• N° 46 - Le trichiasis
• N° 47 - Quoi de neuf pour le kératocône ?
• N° 48 - La chirurgie de la presbytie avec le logiciel
Laser Blended Vision
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Zoom sur…
Le rétinoblastome
Du diagnostic au suivi après traitement
n Le rétinoblastome est la tumeur maligne la plus fréquente de l’enfant. Il s’agit d’une pathologie rare puisqu’en France cela représente environ 50 cas par an (1). Dans les pays industrialisés son pronostic est bon avec plus de 95 % de guérisons. Malheureusement la conservation
oculaire n’est pas toujours possible.
Diagnostic
Maladie du petit enfant, les deux
signes d’appels les plus fréquents
qui alertent l’entourage sont la
leucocorie et le strabisme.
Leur constatation, la leucocorie
étant souvent constatée sur des
photographies prises au flash, nécessite de réaliser en urgence un
fond d’œil qui permettra de faire
le diagnostic (Fig. 1). Il est fait par
la découverte au fond d’œil, d’une
ou plusieurs formations tumorales de couleur blanche pouvant
contenir des calcifications (Fig. 2).
Ces tumeurs peuvent atteindre un
seul œil (forme unilatérale la plus
fréquente) ou les deux (forme
bilatérale). L’aspect clinique, la
plupart du temps typique, permet
de faire le diagnostic. La ou les
tumeurs peuvent être accompagnées d’un décollement de rétine
ou d’un envahissement du vitré.
ciplinaire avec une évaluation pédiatrique et un bilan d’imagerie.
Une IRM orbitaire et cérébrale
est réalisée de façon quasi systématique pour tous les enfants at-
Dr Livia Lumbroso-Le Rouic*
teints de rétinoblastome. Le reste
du bilan général est discuté et
adapté au cas par cas en fonction
de l’étendue initiale de la maladie
oculaire.
Figure 1 - Aspect typique d’une leucocorie. Reflet blanc dans l’aire pupillaire droite
bien visible sur cette photo au flash, reflet pupillaire controlatéral normal.
Prise en charge
L’évaluation
ophtalmologique
spécialisée est une étape essentielle pour adapter la stratégie
thérapeutique. Mais la prise en
charge de ce cancer rare, du petit
enfant, est bien entendu pluridis-
Figure 2 - Fond d’œil initial d’un enfant présentant de multiples tumeurs, contenant
* Institut Curie, Paris
des calcifications. Un fin soulèvement y est associé en nasal de la papille.
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
263
Zoom sur…
Stratégies
thérapeutiques
Le traitement du rétinoblastome
est complexe. Les propositions
thérapeutiques prennent en
compte le caractère uni ou bilatéral de la maladie, l’âge de l’enfant,
l’étendue de la maladie avec la
taille et localisation des tumeurs
ainsi que la présence d’un essaimage vitréen ou rétinien.
L’énucléation
Encore aujourd’hui une majorité des enfants atteints nécessitent une énucléation (dont
80 % de formes unilatérales).
Ceci est lié à l’étendue de la maladie intraoculaire au moment du
diagnostic qui ne permet pas de
proposer un traitement conservateur. L’IRM doit être réalisée
en pré-opératoire pour éliminer
une atteinte du nerf optique extraoculaire qui ne permet pas de
proposer une énucléation d’emblée
afin d’éviter de sectionner le nerf
optique en zone envahie (Fig. 3 et 4).
Figure 3 - Fond d’œil montrant un rétinoblastome évolué avec importante masse
tumorale et décollement de rétine, atteignant tout le globe oculaire. Pas de traitement
conservateur possible dans ce cas.
Les traitements
conservateurs
❚❚La chimiothérapie
Lorsque l’atteinte intraoculaire le
permet, un traitement conservateur est proposé. Il comporte dans
une majorité des cas une chimiothérapie première suivie, après
une nouvelle évaluation du fond
d’œil, par différentes modalités de
traitements sur chaque tumeur
oculaire qui seront associées à
la chimiothérapie systémique
(cryoapplication pour les lésions
périphériques, et thermothérapie
par laser diode pour les lésions
postérieures ou équatoriales)
(2, 3). La thermochimiothérapie
(l’association de la thermothérapie laser à la chimiothérapie par
carboplatine) est la modalité de
traitement conservateur la plus
264
Figure 4 - IRM oculaire confirmant la masse tumorale mais sans atteinte extraoculaire
en particulier pas d’extension au niveau du nerf optique.
fréquemment proposée (4). Ces
thérapeutiques nécessitent plusieurs cures de chimiothérapie (de 3 à 6 cures à 3-4 semaines
d’intervalle) associées à des
séances de traitements oculaires adaptés au stade de la
maladie et à son évolution en
cours de prise en charge. Une irradiation localisée par un disque radioactif peut être proposée pour
certaines tumeurs périphériques
récidivantes, ou pour traiter des
essaimages vitréens localisés.
❚❚La radiothérapie
La radiothérapie externe, traitement conservateur de référence
il y a 20 ans, est désormais exceptionnellement proposée en
première intention en raison
d’une part des lourdes séquelles
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
Le rétinoblastome
esthétiques et fonctionnelles,
et d’autre part du risque de sarcome radio-induit à moyen ou
long terme. Elle garde encore
quelques rares indications en cas
de tumeurs très évoluées non accessibles aux autres modalités de
traitement ou en cas de rechute
chez un enfant monophtalme.
❚❚Les alternatives thérapeutiques
Ces thérapeutiques permettent
un bon contrôle tumoral avec un
taux de conservation oculaire satisfaisant. Malheureusement un
certain nombre d’échecs mènent
à une énucléation malgré des traitements lourds et prolongés. Il
s’agit des stades intraoculaires les
plus avancés avec atteinte intrarétinienne ou vitréenne étendue
(Groupes D selon la classification
IRC) (5).
C’est pour améliorer le pronostic de conservation oculaire de
ces formes étendues que des alternatives thérapeutiques sont
recherchées afin d’augmenter la
pénétration intraoculaire de la
chimiothérapie. L’administration
de la chimiothérapie peut se faire
par voie intra-artérielle, directement dans l’artère ophtalmique
après cathétérisation de la fémorale, ou alors par voie sous-ténonienne (6, 7). Ces techniques
semblent être intéressantes en
termes d’efficacité, mais ne sont
pas dénuées de complications,
particulièrement la voie intraartérielle ophtalmique qui peut
entraîner des complications ischémiques oculaires et leur place
dans la prise en charge des enfants atteints de rétinoblastome
reste à déterminer (8).
Suivi
Une fois les traitements terminés
et le contrôle tumoral obtenu, la
surveillance est débutée.
Figure 5 - Aspect du fond d’œil après traitement. Une cicatrice périphérique de deux
lésions traitées par cryoapplication plane, avec remaniements pigmentés et deux
autres cicatrices traitées par thermochimiothérapie avec remaniements choriorétiniens cicatriciels.
Elle est bien entendu ophtalmologique mais aussi générale afin
de vérifier l’absence de complications des chimiothérapies administrées (telles que d’éventuelles
surdités parfois observées après
utilisation du carboplatine).
Les enfants bénéficient donc de
contrôles en milieu onco-pédiatrique et ophtalmologique.
Suivi de l’enfant
Un fond d’œil est réalisé afin de
surveiller les cicatrices tumorales
et vérifier leur stabilité (Fig. 5). Initialement très fréquents (tous les
mois après un traitement conservateur et ce pendant un an) et
sous anesthésie générale, ils sont
ensuite progressivement espacés
jusqu’à un rythme d’un contrôle
tous les trois mois, et poursuivis
au long cours. En effet bien que
rares, des rechutes voire l’apparition de nouvelles tumeurs tardives, sont malheureusement
possibles. Une surveillance tous
les trois mois est aussi proposée
aux enfants atteints de rétino-
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
blastome unilatéral énuclé, des
bilatéralisations tardives pouvant
être observées.
Lorsque la coopération de l’enfant permet un examen de façon
satisfaisante, en particulier de la
périphérie, le fond d’œil est réalisé sans anesthésie.
Suivi à l’âge adulte
A l’âge adulte, la ré-évolutivité
tumorale est exceptionnelle, et le
suivi ophtalmologique permet de
dépister et prendre en charge les
possibles complications tardives
des traitements (cataracte, rétinopathies, décollements de rétine…). La consultation peut être
aussi l’occasion d’évoquer avec le
patient le caractère génétique de
la maladie dont il n’a pas toujours
eu connaissance, avec risque de
transmission à sa descendance, et
de lui proposer une consultation
spécialisée de génétique.
La nécessité de la surveillance des
enfants à venir, pour un sujet porteur de la maladie est aussi à rappeler régulièrement.
265
Zoom sur…
Le suivi de la fratrie en bas âge du
sujet porteur est bien entendu nécessaire tant que la consultation
de génétique ne permet pas d’éliminer une forme familiale.
Génétique
Le rétinoblastome est lié à une
anomalie du gène RB1 et la consultation de génétique est proposée
à tout enfant atteint de cette maladie. L’anomalie génétique peut
être recherchée sur la tumeur
en cas d’énucléation d’emblée, et
bien entendu au niveau sanguin.
Lorsqu’elle est retrouvée, elle permet de guider la surveillance des
sujets apparentés.
Partie intégrante de la prise en
charge des enfants traités actuellement, la consultation de génétique n’a pas toujours été réalisée
chez des patients adultes. Elle
est à leur proposer systématiquement surtout en cas de projet
parental afin d’adapter la surveillance des enfants à naître.
L’essentiel
Le rétinoblastome peut être unilatéral (60 %), l’âge moyen de l’enfant est
de 24 mois et 15 % des enfants sont porteurs d’une anomalie du gène
RB1 avec risque pour leur descendance.
Le rétinoblastome est bilatéral (ou multifocal) dans 40 % des cas. L’âge
au diagnostic est de 12 mois et tous les enfants sont porteurs de l’anomalie du gène RB1.
60 % des enfants nécessitent une énucléation.
Le traitement conservateur fait le plus souvent appel à une association
de chimiothérapie et de traitements par thermothérapie laser diode ou
cryoapplication.
Conclusion
Le rétinoblastome est une maladie dont la prise en charge est
complexe et multidisciplinaire.
Le traitement initial fait souvent
appel à une chimiothérapie associée aux traitements oculaires par
thermothérapie au laser diode,
cryoapplication voire disques radioactifs.
Il comporte encore souvent l’énucléation, les traitements conservateurs étant possibles dans les
formes les moins évoluées. Une
surveillance oculaire et générale est
ensuite nécessaire au long cours.
Des progrès restent à faire pour
améliorer le taux de conservation
oculaire tout en minimisant les
effets secondaires des thérapeutiques actuellement utilisées. n
Mots-clés :
Rétinoblastome, Tumeur, Diagnostic,
Traitement, Enucléation
Bibliographie
1. Lacour B, Guyot-Goubin A, Guissou S et al. Incidence of childhood cancer in France: National children cancer registries, 2 000-2004. Eur J Cancer
2010 ; 19 : 173-81.
2. Lumbroso-Le Rouic L, Aerts I, Lévy-Gabriel C et al. Conservative treatments
of intraocular retinoblastoma. Ophthalmology 2008 ; 115 : 1405-10, 1410.e1-2.
3. Shields CL, Mashayekhi A, Cater J et al. Chemoreduction for retinoblastoma: analysis of tumor control and risks for recurrence in 457 tumors. Am
J Ophthalmol 2004 ; 138 : 329-37.
4. Lumbroso L, Doz F, Urbieta M et al. Chemothermotherapy in the management of retinoblastoma. Ophthalmology 2002 ; 109 : 1130-6.
5. Murphree AL. Intraocular retinoblastoma: the case for a new group
266
classification. Ophthalmology clinics of north America. Elsevier Saunders,
2005 : 41-53.
6. Gobin YP, Dunkel IJ, Marr BP et al. Intra-arterial chemotherapy for the
management of retinoblastoma: Four-year experience. Arch 2011 ; 129 :
732-7.
7. Mallipatna AC, Dimaras H, Chan HSL et al. Periocular topotecan for intraocular retinoblastoma. Arch 2011 ; 129 : 738-45.
8. Munier FL, Beck-Popovic M, Balmer A et al. Occurrence of sectoral choroidal occlusive vasculopathy and retinal arteriolar embolization after
superselective ophthalmic artery chemotherapy for advanced intraocular
retinoblastoma. Retina 2011 ; 31 : 566-73.
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
cas clinique
Paralysie congénitale du IV
révélée au cours d’une maladie
de Basedow
Quand deux pathologies s’associent
n
Mme M., 55 ans, est atteinte d’une maladie de Basedow, connue, stable depuis plus de
6 mois. Mme M. se plaint d’une diplopie verticale.
Dr Corinne Bok-Beaube*
Examen clinique
L’inspection note la présence d’un
torticolis (Fig. 1A) : tête penchée
sur l’épaule gauche. En position
tête droite, il existe une hypotropie gauche sans limitation de
l’élévation (Fig. 1B), l’examen de la
motilité montre sur l’œil droit
une limitation de l’abaissement
en adduction ainsi qu’une élévation en adduction modérée. La
manœuvre de Bielshowski est
positive avec amélioration de la
déviation verticale tête penchée
à gauche et majoration tête penchée à droite (Fig. 2A et B).
Cet examen est en faveur d’une
paralysie du muscle oblique supérieur droit.
Le reste de l’examen ophtalmologique montre une discrète exophtalmie droite, une rétraction de la
paupière supérieure droite, on
notera la normalité de la pression
oculaire dans les regards de face
et en haut.
L’interrogatoire retrouve la notion de cervicalgies et d’ancienneté du torticolis, que la patiente
a toujours remarquées.
* Département d’ophtalmologie, Fondation Rothschild, Paris
A
B
Figure 1 - A. Torticolis tête penchée sur l’épaule gauche. B. Pas de limitation
de l’élévation gauche.
A
B
C
Figure 2 - A et B. Manœuvre de Bielschowski. C. Coordimètre.
Examens
complémentaires
Le bilan orthoptique, outre l’examen de la motilité, permet la mesure des torsions et retrouve une
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
extorsion modérée, l’amplitude
de fusion verticale est mesurée
à 8 dp. L’examen coordimétrique
confirme la parésie de l’oblique
supérieur droit (Fig. 2C).
267
cas clinique
Figure 4 - Amélioration post-opératoire du coordimètre.
Figure 3 - Amélioration post-opératoire
du torticolis et de l’hypotropie en position tête droite.
Les rétinophotos montrent une
discrète extorsion au fond d’œil.
L’IRM faite dans le cadre du bilan
de l’orbitopathie basedowienne
montre
l’hypertrophie
diffuse modérée de l’ensemble
des muscles droits, sans fibrose
et une hypotrophie modérée
du muscle oblique supérieur droit.
Prise en charge
Les troubles oculomoteurs sont
donc ici liés à la paralysie de l’oblique
supérieur droit et non à l’orbitopathie basedowienne. La patiente bénéficiera d’un geste chirurgical sur
les muscles obliques.
Résultat
Le résultat est satisfaisant avec
une disparition de la diplopie en
position tête droite, une nette diminution du torticolis. L’examen
coordimétrique confirme l’amélioration clinique (Fig. 3 et 4).
Discussion
La forme la plus typique d’atteinte
268
oculomotrice au cours de l’orbitopathie dysthyroïdienne est la
diplopie verticale par fibrose d’un
muscle droit inférieur. L’hypotropie s’accompagne alors d’une limitation de l’élévation et d’une augmentation de la tension oculaire
≥ 4 mmHg entre le regard de face
et le regard en haut (1). Ces anomalies n’étaient pas retrouvées
chez notre patiente.
L’IRM permet de compléter le bilan en visualisant dans la forme
typique l’hypertrophie et la fibrose
des muscles atteints, absentes
dans notre cas.
Les paralysies congénitales du IV
sont fréquemment diagnostiquées
à l’âge adulte, si le torticolis n’a pas
été trop invalidant (2). Les circonstances de révélation peuvent
être une adaptation difficile à des
verres progressifs, le décours d’un
traumatisme, l’association à une
autre pathologie intercurrente
comme dans le cas présent.
L’ancienneté du torticolis, l’existence d’une asymétrie faciale et/ou
un trouble de l’articulé dentaire,
l’augmentation de l’amplitude de
fusion verticale > 4 dp, sont des
arguments en faveur de l’origine
congénitale de la paralysie.
Dans ce cas clinique, notre patiente présentait des signes cliniques liés à ses deux pathologies :
torticolis et troubles oculomoteurs de la paralysie congénitale
du IV droit, exophtalmie et rétraction de paupières (prédominant
à droite) liés à son orbitopathie
basedowienne.
Conclusion
Il est, comme toujours, essentiel
de faire un examen clinique soigneux, complet.
La prise en charge chirurgicale des
diplopies dysthyroïdiennes repose
sur le bilan des muscles atteints et
l’importance de la fibrose musculaire. Une éventuelle pathologie
associée doit être diagnostiquée
permettant d’adapter la prise en
n
charge.
Mots-clés :
Paralysie congénitale du IV, ­Maladie
de Basedow
Bibliographie
1. Bok C, Hidalgo C, Morax S. Prise en charge
des diplopies dysthyroïdiennes. J Fr Ophtalmol 2007 ; 30 : 390-6.
2. Lebranchu P, Pechereau A. La paralysie
de la IVe paire crânienne. Pratiques en ophtalmologie 2011 ; 44 : 3-5.
Pratiques en Ophtalmologie • Décembre 2011 • vol. 5 • numéro 49
rendez-vous de l’industrie
Erratum
Complément alimentaire rétine Kélior® D3
N
ous vous présentions dans
le numéro d’octobre 2011,
le complément alimentaire rétine Kélior® D3. Suite à une erreur
de packaging, nous vous dévoilons ci-contre le visuel correct
correspondant à ce produit. Pour rappel, kelior®D3 est un
complément alimentaire qui préserver la santé oculaire en
apportant 3 nutriments indispensables au bon fonctionnement de l’oeil et de la vision : des anti-oxydants, des pigments maculaires (lutéine et zéaxanthine) et des omégas
3. Kelior®D3 peut être utilisé par les sujets diabétiques. Il
convient aux végétariens. Kelior®D3 est un complément
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Dr Jacques Voinot
Avec la collaboration de :
Pr Jacques-Pierre Chevaleraud, Pr Georges Hermans,
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Sous la direction du Dr Jean-Bernard Rottier, président du SNOF
Syndicat National des Ophtalmologistes de France
Edité par OPH-Communication
2011, 144 pages, 35 €
Au sommaire :
Préface du Dr Jean-Bernard Rottier
Quelques jalons d’histoire de l’ophtalmologie
Le cadre professionnel des ophtalmologistes de 1850 à nos jours
L’émergence de la spécialité au XIXe siècle - leur développement
L’ophtalmologie belgo-française au XIXe siècle
Les ophtalmologistes suisses en France au XIXe siècle
Diabète & Obésité • Mars 2010 • vol. 5 • numéro 37
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