El burlador de Sevilla, Tirso de Molina

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El burlador de Sevilla, Tirso de Molina
Tirso de Molina: Eléments d’introduction:
Pour présenter le contexte, voir manuel p.482.
La scène présente la mort de Dom Juan, foudroyé par le spectre de Don Gonzalo, malgré une
tentative in extremis de repentir.
Problématique: quelles sont les réactions que ce dénouement vise à susciter chez le spectateur?
1. Un dénouement spectaculaire
– Un spectacle total:
Le chant, venu d’ailleurs, qui retentit sur la scène, précise bien l’imminence du châtiment du ciel et du
« divin courroux » (l. 2). Il concourt à frapper les esprits et annonce que le temps est venu de payer
d’autant plus que « le froid glacial » qui pénètre le cœur de Don Juan suggère la mort et contribue à
la montée dramatique.
On peut ajouter à cela le jeu sur les lumières, « toute la chapelle s’embrase » et le décor en
mouvement: « le sepulcre s’entrouvre et engloutit Don Juan et la statue ».
– Une atmosphère infernale
Tout concourt à rappeler le monde des Enfers: le tombeau, le feu, les aliments du souper « ongles
noirs ». A cela on peut s’ajouter la mise en scène de la souffrance de Don Juan, à l’agonie, qui
préfigure son supplice « Ah, ton feu me brûle! », « Je brûle! ». « C’est peu de choses auprès des
flammes qui t’attendent, don Juan. » Réplique qui ouvre sur un hors-scène qui convoque toutes les
représentations traditionnelles de l’Enfer.
– La mort sur scène
On assiste également à la mort du personnage sur scène, en trois temps. Tout d’abord il exprime son
malaise physique (on peut noter l’importance du corps) « un froid glacial me pénètre le coeur » puis
« je brûle ». Dans un deuxième temps, le personnage essaye de frapper la statue « je te percerai de
ma dague… Hélàs! Mes coups ne frappent que le vide… ». Il négocie ensuite « laisse-moi appeler un
confesseur… » Puis meurt « Je suis mort ». L’intensité dramatique est très forte et la mort est
spectaculaire.
On perçoit donc ici que le dénouement doit impressionner le spectateur et lui montrer la puissance
du châtiment divin (consacrée par la machinerie, incarnée par de le commandeur), le sensibiliser au
malheureux sort de cette victime de la vindicte du Commandeur. «Chacun paiera selon ses actes. »…
2. Un dénouement édifiant
– L’entêtement de Dom Juan
Don Juan devrait, pour le moins, témoigner un certain effroi, s’il n’était un être différent, remettant à
plus tard le moment de s’amender ; on peut penser que chez lui, tout est jeu, que son courage se
résume à ne rien entendre et surtout pas les menaces proférées par le chant qui se fait entendre. Le
froid glacial qui lui pénètre le cœur semble plutôt une réaction physique qu’un témoignage de peur.
D’ailleurs, don Juan va d’abord faire entendre son corps ; c’est un être de chair : il a froid avant de
brûler. Pour l’instant, sa première réaction à la suite du repas, c’est de mettre un terme au défi engagé
avec la statue « j’ai fini de souper, qu’on desserve la table ». La main que lui tend Don Gonzalo le
retient. Son courage, son orgueil le poussent à ne pas prendre en compte les avertissements
précédents. C’est ce même courage qui l’amène de manière irréfléchie, voire ridicule à frapper un
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El burlador de Sevilla,Tirso de Molina - Dom Juan, Molière
Le dénouement du Don Juan de Tirso de Molina vise d’abord à marquer le spectateur par son côté
spectaculaire et à montrer la puissance de Dieu. Il frappe son imagination et le convainc de la
scélératesse de Don Juan condamné aux flammes de l’enfer. Par là, en causant chez lui une sorte
d’effroi, il l’incite à mener une vie en accord avec Dieu.
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mort. C’est aussi de manière dérisoire qu’il cherche à négocier avec Le Commandeur, comme s’il
n’avait pas compris que sa dernière heure était arrivée. Il ne s’agit qu’une question de vie ou de mort.
Don Juan cherche-t-il à gagner du temps? On pourrait le penser. Cependant, sa réplique à la ligne 27
« Laisse-moi appeler un confesseur qui m’absolve de mes péchés! » laisse entendre qu’il y a une prise
de conscience de la gravité de l’instant et qu’il est temps de s’amender. Et pour la première fois Don
Juan use dans cette scène d’un langage religieux, fait appel à la pitié du Commandeur avant de se
consumer.
– Le rôle de Catalinon
Toute différente est l’attitude de Catalinon. Il est toutes ouïes et réagit rapidement à ce qu’il entend et
ce qu’il voit. Il explicite les propos chantés. S’il associe son sort à celui de son maître, « c’est de nous
deux qu’il s’agit » (l. 8), s’il essaie de jouer au bouffon « des ongles de tailleur, sans doute », en
ramenant la situation à un moment très concret, il se tait ensuite pour mieux exprimer sa peur au
moment de la mort de Don Juan. Catalinon souligne la toute puissance de Dieu, celle que Tirso de
Molina veut fixer chez le spectateur. L’homme du peuple s’oppose ainsi au seigneur, à son maître.
Catalinon, contrairement à son maître, a bien compris la leçon: la crainte est le commencement de la
sagesse. «Pas moyen d’y échapper», s’exclame-t-il. (l. 31). Aussi montre-t-il une attitude des plus
serviles. Il dresse un bilan de la situation. Il constate le fait religieux, s’affirme comme un serviteur
fidèle, attaché à la maison de son maître et s’en remet à sa foi et à la protection divine pour sortir
vivant. Cette attitude d’humilité et de respect est celle à laquelle le spec- tateur est convié. A l’instar
du chœur antique dans les tragédies antiques, on peut considérer que Catalinon tire les leçons de la
pièce.
– La leçon
Le message de Tirso de Molina est tout entier dans la bouche du Commandeur, une statue de pierre
qui clame une loi immuable. «Chacun paiera» (l. 5, 22, 35). Il revient comme un leitmotiv et un rappel
pour le spectateur tout au long de cet extrait. Il s’agit bien de lui faire comprendre que chaque acte
nous est compté, que les fautes doivent être expiées. Il est temps d’y penser avant qu’il ne soit trop
tard. Le châtiment de Don Juan a donc valeur d’exemple. Don Juan ne semble pas comprendre cette
leçon donnée par un mort qui ne le lâche plus. Le Commandeur l’entraîne avec lui. Don Juan a beau
résister, se débattre. Il semble réagir comme un enfant pris en flagrant délit. On a dit plus haut qu’il
cherchait à négocier, à gagner du temps. C’est aussi la réaction d’un homme attaché à la vie pour qui
rien n’est plus important. Après avoir tenté de réduire physiquement au silence la statue, il cherche à
mettre en doute sa détermination (« je n’ai pas dupé ta fille: elle avait déjà découvert ma ruse ! »).
Don Juan lui parle comme si le mort était encore un homme, comme s’il était encore un père. Sa
réplique (« laisse-moi appeler un confesseur ») pourrait laisser entendre qu’il a compris qu’il était
nécessaire de s’amender. Dernière habileté ou vrai repentir né de la peur de mourir ? Peu importe, il
est trop tard. La justice de Dieu est inflexible, comme aime à le rappeler Don Gonzalo.
Présentation du texte: voir séquence sur Dom Juan.
Situation: il s’agit du dénouement. Dom Juan a précédemment été invité par la statue du commandeur
à dîner et il se rend sur les lieux. Le spectateur qui a vu toutes les provocations du personnages,
jusqu’à l’hypocrisie d’un faux repentir à la fin, attend le dénouement, et le châtiment annoncé par les
victimes comme Done Elvire ou Dom Louis.
Problématique: quelles sont les réactions que ce dénouement vise à susciter chez le spectateur?
1. Un dénouement fantastique et baroque
– Le merveilleux
Les didascalies sont en ce sens à mettre en évidence : Le Spectre, en femme voilée, change de figure, et
représente le Temps avec sa faux à la main, Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur
Dom Juan; la terre s’ouvre et l’abîme; et il sort de grands feux de l’endroit où il est tombé. Comme dans le
texte précédent, le dénouement est très spectaculaire: décors, lumière, son…
Dom Juan se trouve – pourrait-on dire – aux portes de l’enfer avec un spectre, le Temps et sa faux et
le Commandeur qui symbolise aussi la mort. Il y a d’abord la rencontre avec une voix, un spectre en
femme voilée que Sganarelle reconnait «au marcher.» Il est intéressant de noter que Dom Juan, qu’on
ne peut suspecter de superstition croit aussi connaitre son identité. Voix d’une femme ou des
femmes ? Il n’a pas le temps de s’interroger que le personnage change de figure pour prendre une
dimension allégorique qui évoque le temps et la mort; mais n’est-ce pas le langage même du Ciel? On
peut dire qu’à travers les trois images allégoriques du Spectre, du Temps et de la Statue, il s’adresse à
Dom Juan.
– Le mélange des registres
Tension dramatique
Le spectre crée une attente « Don Juan n’a plus qu’un moment à pouvoir profiter de la miséricorde
du Ciel; et s’il ne se repent ici, sa perte est résolue. » La mort se fait en deux temps: le spectre
annonce la mort et provoque une dernière fois DJ qui résiste « je veux éprouver avec mon épée si
c’est un corps ou un esprit » puis « non, non, il ne sera pas dit… ». Dans un deuxième temps la
damnation par la statue.
Le registre comique
On peut s’interroger sur le traitement de la triple intervention divine: s’agirait-il d’une parodie des
dénouements des pièces dites « à machine » (un deus ex machina vient tout arranger à la fin).
D’autant plus que Sganarelle occupe la scène avec des mimiques, qui sont comiques: on l’imagine
terrifié « Ah! Monsieur » x2 et la mention des « gages » à la fin introduit un décalage propre à faire
rire. L’accumulation dans sa dernière réplique « ciel offensé, lois violées, filles séduites, familles
déshonorées, parents outragés, femmes mises à mal, maris poussés à bout » est comique aussi par sa
progression decrescendo qui s’achève sur les maris cocus…
Le registre tragique
En même temps, la détermination de Dom Juan est tragique « il ne sera pas dit, quoi qu’il arrive, que
je sois capable de me repentir » et le conduit à une mort violente pour sa démesure « je n’en puis
plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. »
On peut noter également que l’esthétique est baroque: pas de respect des unités, de la bienséance et
de la vraisemblance, goût pour l’hyperbole, l’illusion, le mélange des registres, thème de la mort et de
la fragilité de la vie… et le goût pour l’ambiguité.
Ce mélange des registres est d’ailleurs le signe esthétique de l’ambiguité du dénouement. Madame Potter-Daniau – année scolaire 2014-2015
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Molière: Eléments pour l’introduction
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2. Un dénouement ambigu
Quelle leçon en tirer? Dom Juan est-il condamné?
– Le décalage entre DJ et SG
On a montré précédemment le décalage entre le caractère tragique de DJ et au contraire la réaction
comique de Sganarelle. Son comique est cependant ambigu. En criant «Ah! mes gages, mes gages» par
deux fois Sganarelle se montre matérialiste, comme son maître. Son comportement est loin d’être
celui d’un bon chrétien respectueux devant la mort, qui plus est devant une telle manifestation du
divin. Il est à remarquer que sa réplique a été censurée dans l’édition de 1682 comme celles de Dom
Juan l’ont été à l’acte III scène 2. La suppression d’un jeu de scène comique et l’insistance sur la
vengeance du ciel visent à donner du sérieux à la damnation de Dom Juan.
– Dom Juan, un héros?
Il est le propre metteur en scène de ses derniers moments. C’est lui qui appelle une parole plus claire
« il faut qu’il parle un peu plus clairement » et qui veut «voir ce que c’est.», qui veut «éprouver avec
[son] épée si c’est un corps ou un esprit». «Suis-moi. » dit-il à Sganarelle comme une invitation à
entrer dans son jeu. Il fait preuve de courage, de panache, jusque dans la mort. Enfin, sa mort, tout
effrayante qu’elle soit, lui permet de faire entendre sa souffrance et non un repentir qu’il refuse « Un
feu invisible me brûle, je n’en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent »
Il se dresse contre Dieu plutôt qu’il ne nie son existence. Sa démarche est toute rationnelle : « Si le
Ciel me donne un avis, il faut qu’il parle un peu plus clairement, s’il veut que je l’entende. » Façon polie
de dire à Sganarelle que son avis importe peu. Son orgueil lui impose un face à face avec Dieu, seul
interlocuteur capable de le vaincre. Mais c’est encore la raison qui lui fait dire: «je veux éprouver avec
mon épée si c’est un corps ou un esprit. » Il est dans sa période d’« endurcissement », ultime phase
de l’abandon d’une âme au péché, moment où Dieu décide de retirer ses grâces au coupable; c’est au
Spectre que revient le soin de prononcer l’ultime avertissement. En tirant l’épée, Dom Juan affirme
son entêtement de pêcheur obstiné. Il est irrévocablement voué à la damnation et sa dernière
réplique rend bien compte des souffrances des damnés.
D’une certaine façon, il court au suicide, ce qui aux yeux de la religion est une nouvelle provocation. Il
en devient bouleversant, du fait même qu’il est confronté à une statue gigantesque ; c’est une figure
tragique, qui possède la grandeur du maudit, qui transgresse avec courage des interdits. C’est sans
doute parce que Dom Juan meurt et que sa mort est présentée comme une punition, que ses actes
peuvent être rappelés. Mais il n’en reste pas moins, que pour le spectateur comme pour chacun de
nous, il est l’homme qui est confronté au mystère de la mort et qui, mieux que nous, l’affronte; c’est
en ce sens qu’il garde toute notre sympathie, et cela d’autant plus qu’encore une fois, c’est Sganarelle,
personnage bouffon qui tire la leçon.
– La leçon finale
« Tout le monde est content » dit Sganarelle, mais on peut en douter… Mais rien ne rappelle le
Christianisme, saut peut-être la vision traditionnelle de l’Enfer, où brulent les damnés (« un feu invisible
me brûle » La religion montrée ici est plutôt païenne : la foudre et la terre qui s’ouvre renvoient
plutôt au monde greco-romain.
Le Don Juan de Tirso de Molina face à la Statue de Don Gonzalo perd se sa superbe. Il semble vouloir
lui échapper, chercher à gagner du temps en réclamant « un confesseur qui l’absolve de ses péchés. »
On peut même penser qu’il est sincère et que son crime, c’est d’avoir remis toujours le moment de
s’amender, de se repentir. Chez lui, aucune révolte contre le ciel. Le Dom Juan de Molière récuse les
avertissements de Sganarelle et reste ferme dans sa vision du monde de libertin. « Non, non, il ne sera
pas dit, quoi qu’il arrive, que je sois capable de me repentir» (l. 23). Face à la Statue, il montre un
courage que certains pourraient juger comme de l’entêtement: en ce sens, Dom Juan, à l’instar des
Questions possibles pour les deux textes
Quelle est la morale de cette fin?
Ces deux scènes sont-elles originales?
Quels problèmes de mise en scène pose cette fin?
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personnages comiques de Molière, respecte la tradition du monomaniaque. La question se pose aussi
de son athéisme. En défiant la statue, Don Juan ne défie-t-il pas le Ciel ? Mais le défier, c’est aussi
admettre qu’il existe et le «quoi qu’il arrive » n’est-ce pas de sa part l’aveu d’un châtiment éventuel?
Constatons son courage et l’idée qu’il est avant tout l’homme des expériences ultimes, l’homme qui se
révolte contre l’ordre. Il n’est pas vraiment possible de trancher clairement sur la morale de la pièce et
la position de Molière et c’est aussi ce qui fait la richesse de la pièce.

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