Interview

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Interview
Interview
Le président du Conseil d’Etat Vaudois nous parle du forfait fiscal
A combien estime-t-on les retombées indirectes de la présence
des forfaitaires pour l’économie de notre région ?
Sur le plan national, on estime leur apport indirect entre 1 et 2
milliards de francs au titre d’investissements immobiliers, dont
environ 1.5% pour l’AVS, 80% par leur consommation (voitures,
maisons, habillement, biens de consommation, etc.), 5% par le
biais de dons à des institutions d’utilité publique et près de 10%
sous forme d’impôts indirects. A cela s’ajoutent les impôts sur
les gains immobiliers, les donations et les successions, ainsi que
les droits de mutation. Le canton profite de leur présence pour
plusieurs centaines de millions de francs. Il ne faut pas non plus
oublier le chapitre de l’emploi : en Suisse, plus de 30 000 places
de travail dépendent de cet impôt, que ce soit dans les services
(avocats, architectes, etc.), dans les activités culturelles ou des
emplois directs (personnel de maison, etc.). Et ces emplois génèrent à leur tour des impôts.
Comment interpréter l’échec de l’initiative à l’encontre du forfait
fiscal dans le canton de Vaud ?
Cela démontre la grande sagesse des Vaudoises et des Vaudois,
car contrairement à ce qui a été dit par la gauche, cet impôt
n’est pas antisocial. Il permet de maintenir sur le long terme
des impôts en faveur des familles et de la classe moyenne bas.
Il est important de rappeler que si les personnes concernées ne
payaient pas leurs impôts dans notre canton, ils les paieraient
ailleurs. La gauche a entamé ce combat fiscal de façon très désunie, ce qui est aussi un signe : elle comprend que l’argent ainsi
perdu devra bien être compensé ailleurs et ils savent que les
Vaudois n’ont pas l’intention de voir leur facture fiscale augmenter.
Ils sont également conscients que cet impôt, créé en 1862 tout
de même, compense le fait que l’impôt sur la fortune, dans notre
canton, est l’un des plus élevés de Suisse ! En outre, la GrandeBretagne ou la Belgique, notamment, ont eux aussi des système
très favorables pour certains de leurs contribuables.
Faut-il maintenir le forfait tel quel ou doit-on envisager certaines
réformes ?
Tout d’abord, le Conseil d’Etat a adopté une attitude très
claire : il n’est pas question de se priver de cette ressource
financière, surtout à un moment où il est essentiel que le canton
maintienne des finances saines, alors que de nombreux projets
d’investissement se profilent à l’horizon. Ensuite, la conférence
des directeurs cantonaux des finances ne demande pas un
maintien en l’état de l’impôt sur la dépense. Un principe est
toutefois certain : les cantons sont souverains en matière fiscale et de
fixation de la quotité de l’impôt. Sur cette base-là, le
Conseil d’Etat examinera certains éléments de cet impôt et
nous avons déjà fait des propositions allant dans ce sens.
Ainsi le niveau de dépense déterminant pourrait être
relevé, par une modification des barèmes pertinents.
On pourrait prévoir que la dépense doive être au moins
égale à 7 fois la valeur locative ou le loyer payé par le
contribuable, au lieu de 5 fois aujourd’hui. Une dépense
minimale pour l’impôt fédéral direct pourrait également être
prévue.
Pascal Broulis,
Chef du Département des
finances et Président du
Conseil d’Etat.
Il est à la tête, depuis le 1er
janvier 2010, de la
Conférence des gouvernements cantonaux (CdC).
Pascal Broulis,
“Chef du Département des
finances” and “Président du
Conseil d’Etat Vaudois”.
Since January 1st 2010
he has presided over the
Conference of Cantonal
Governments (CdC).
Existe-t-il un lien entre abolition du secret bancaire et forfait
fiscal ?
Absolument pas. Le risque réside toutefois dans les amalgames
que certaines personnes auraient intérêt à alimenter. Il faudra
faire un effort d’explication, tant certains esprits semblent surexcités par ces questions fiscales. Mais il ne peut y avoir de
lien puisque les gens qui ont intérêt à pratiquer l’évasion fiscale
vers notre pays n’ont précisément pas l’intention de résider en
Suisse !
Si le forfait tombe, pourions-nous assister à un départ massif des
forfaitaires, et qu’en sera-t-il de l’attractivité de notre canton ?
Cette hypothèse ne peut en effet être exclue car les personnes
bénéficiaires de l’impôt sur la dépense sont extrêmement mobiles. Elles n’hésiteront pas à partir si elles peuvent trouver un
cadre fiscal plus favorable ailleurs. A Zurich, ce phénomène s’est
fait fortement ressentir. Le canton de Vaud n’est pas le canton
fiscalement le plus intéressant de Suisse. Sans cette manne, ou
il conviendra de diminuer certaines prestations, ou il faudra trouver de l’argent ailleurs. L’attractivité du canton ne peut donc que
souffrir de cette perte.
Pensez-vous que l’abolition du forfait puisse avoir une influence
sur le niveau des prix de l’immobilier de prestige ?
Ce serait une erreur d’associer les personnes au bénéfice d’un
impôt à la dépense aux modes de vie de certaines stars du sport
ou du show-business. Beaucoup de ces personnes vivent dans
des logements moins visibles. Il n’empêche : la hausse des prix
de l’immobilier ne dépend pas du nombre de contribuables à la
dépense mais d’une bulle potentiellement spéculative dans la région lémanique.
The President of the Conseil d’Etat Vaudois on lump-sum taxation
What is the estimated indirect income from the presence of
“forfait” taxpayers for the economy of our region?
On the national level we estimate their indirect contribution
between 1 and 2 billion francs through real estate investments,
of which about 1.5% for the AVS, 80% from their consumables
(cars, houses, clothing, consumer goods, etc.), 5% from gifts to
public utility institutions and almost 10% in the form of indirect
taxes. Added to that are the taxes on real estate capital gains,
donations and inheritances, as well as property transfer taxes.
The canton profits from their presence to the sum of hundreds of
millions of francs. And one must not forget the matter of employment : more than 30,000 jobs in Switzerland depend on this tax,
whether through services (lawyers, architects, etc.), in cultural
activities or direct employment (personnel and house staff, etc.).
And these jobs generate taxes in their turn.
How do you interpet the failure of the initiative against the fiscal
“forfait” arrangement in the canton of Vaud ?
This demonstrates the great wisdom of the inhabitants of Vaud,
because contrary to what the Left has been saying, this tax is not
antisocial. In the long term it allows us to maintain taxes in favour of families and the middle class. It is important to remember
that if the people concerned were not playing their taxes in our
canton, they would be paying them elsewhere. The Left has entered this fiscal conflict in a very disunited manner, which is also
significant : they understand that the money thus lost will have to
be compensated for elsewhere, and they know that the Vaudois
have no intention of seeing their fiscal bill increase. They are
equally aware that this tax, which was after all created in 1862,
compensates for the fact that the tax on wealth, in our canton,
is one of the highest in Switzerland ! Moreover, Great Britain or
Belgium, for example, also have very favourable systems for certain taxpayers.
Should we maintain the “forfait” as now, or envisage certain reforms ?
First, the Conseil d’Etat has adopted a very clear attitude: there
is no question of us depriving ourselves of this financial resource,
above all at a moment when it is essential that the canton maintains healthy finances, and numerous investment projects are taking shape on the horizon. Next, the conference of the Cantonal
Financial Directors are not asking for the maintenance of taxa-
tion on expenditure in its present form. However, one principle is
for certain : the cantons have sovereignty in fiscal matters and
fixing the taxation rate. It is on this basis that the Conseil d’Etat
will examine certain elements of this tax and we have already
made certain proposals in that direction. For example the determinant level of expenditure could be raised by a modification of
the pertinent tax scales. One could envisage that the expenditure
should be at least equal to seven times the rental value or the rent
being paid, in place of the five times rental value today. A minimum expenditure for the direct federal tax could also be
envisaged.
Is there any connection between the abolition of bank secrecy and
the tax “forfait” ?
Absolutely not. There is always the risk arising from amalgam
notions that certain people would be interested in feeding. An
effort to explain things is needed, given that certain mind-sets
seem over excited by these fiscal questions. But there cannot be
any connection because it is precisely the people interested in tax
evasion who have no intention of residing in Switzerland !
If the “forfait” were to go, would we see a massive departure of
these taxpayers, and what would then be the attraction of our
canton ?
This hypothesis cannot be excluded because the people who are
the beneficiaries of the lump-sum taxation are extremely mobile.
They won’t hesitate to leave if they can find a more favourable
fiscal framework elsewhere. This phenomenon was very strongly
felt in Zurich. The canton of Vaud is not, in fiscal terms, the most
interesting canton in Switzerland. Without this lump-sum tax income, either it will be necessary to reduced certain services or
it will be necessary to find the money elsewhere. Therefore the
attraction of the canton can only suffer from this loss.
Do you think that the abolition of the “forfait” may have an influence on luxury real estate prices ?
It would be a mistake to associate people who benefit from lumpsum taxation with the life styles of certain stars in sport or showbusiness. Many of the people live in less visible properties. But
nevertheless : the increase in real estate prices does not depend
on the number of lump-sum taxpayers but on a potentially speculative bubble in the Lake Geneva region.
Le forfait en quelques chiffres
Lump-sum taxation in figures
En Suisse
5’000 personnes paient un impôt sur la dépense en Suisse.
In Switzerland
5’000 people pay lump-sum taxes.
578 millions de francs en impôts directs pour tout la Suisse.
578 million francs in direct taxes for all of Switzerland.
Dans le canton de Vaud
In the canton of Vaud
1’366 forfaitaires dans le canton de Vaud à fin 2009.
1’366 taxpayers in the canton of Vaud at the end of 2009.
165 millions de francs d’impôts directs (50% vont au Canton,
23% aux communes et 27% à la Confédération).
165 million francs in direct taxes (50% go to the Canton,
23% to the communes and 27% to the Confederation).
Représente 1,8% des rentrées fiscales du Canton.
Representing 1.8% of tax income for the Canton.

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