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Culture23 Tribune de Genève | Mercredi 4 juillet 2012 Cinéma Carnet noir «Le jazz, c’est une émotion… et jamais les mêmes notes!» Sylvia Kristel au plus mal Mort d’un «bronzé» Elle avait déjà survécu à deux cancers. Sylvia Kristel, mythique actrice du film érotique «Emmanuelle», est hospitalisée depuis samedi à Amsterdam suite à un grave accident vasculaire cérébral. L’acteur Maurice Chevit, rendu célèbre par le film «Les bronzés font du ski», s’est éteint à l’âge de 88 ans. Il avait reçu deux Molières. DR Larry Coryell Guitariste de jazz DR Il a dit… Musique «Opération Libertad», après le film, le disque. Punk! La B.O. du film de Nicolas Wadimoff paraît sur CD, éditée par l’Usine. Pas un hasard… Fabrice Gottraux Une ligne de basse puissante, encastrée dans les graves, trois accords de guitares saturés jetés à grande vitesse. Du rock réduit à l’essentiel, une énergie brute parée pour soulever le texte scandé au micro: «Personne ne peut comprendre les gens désespérés!/Arbeit macht frei/Stammheim macht Frei.» Voici Tot 77, une chanson punk coup-de-poing des années septante, signée Technycolor. Une chanson emblématique aussi pour le cinéaste Nicolas Wadimoff, qui avait 15 ans lors de sa sortie en 1979. Le groupe était genevois. Nicolas Wadimoff était fan. Les paroles évoquent le décès dans la prison de Stammheim, à Stuttgart en 1977, des leaders de la Fraction Armée rouge, la célèbre Bande à Baader. Chanson protestataire. Musique contestataire. Esprit révolutionnaire. Toutes choses que Wadimoff a mis dans son dernier long métrage, Opération Libertad. Et dont voici aujourd’hui éditée par le label genevois Urgence Disk la bande originale sur CD. Sauf qu’en 2012, c’est un groupe bien vivant qui reprend le morceau, et bien du cru également: Faute de frappe, fer de lance du punk aujourd’hui à Genève. Un film musical? Et la suite de se décliner avec non moins de force. Et boum, que résonne le rock déglingué de Richard Hell and the Voidoids. Reboum pour Riot, de Basement 5, autre titre des années 1970. Puis Johnny Thunders et son You Can’t Put Your arms Round a Memory. Et encore No More Heroes, chanson hyper-dynamique des superhéros du punk rock anglais The Stranglers… Ainsi va Music from Opération Libertad. Puisqu’il fallait bien titrer autrement que le film… En- «Opération Libertad», un groupe révolutionnaire tel qu’il apparaît dans le film du même nom de Nicolas Wadimoff. Et, désormais, la bande originale du film, recueil de dix chansons punk qui poursuit en musique cette plongée dans la contre-culture des années 1970. DR «Les musiciens, mêmes les plus indépendants des années 70, n’ont aujourd’hui plus aucun contrôle sur leurs œuvres» Nicolas Wadimoff Cinéaste core que la musique et le film sont indissociables, l’une reflétant l’autre. L’histoire du punk, éphémère, libertaire, renversant, résumant malgré lui mais avec précision pourtant les utopies marxistes et autres déclinaisons de l’extrême gauche d’alors. Le film de Wadimoff est-il une fiction? Les avis sont partagés. Quant au disque, il a failli ne jamais voir le jour… «Lorsqu’on a négocié les droits de ces musiques, pour le film d’abord, ça s’est avéré tellement compliqué que d’éditer un disque ensuite devenait presque un jeu d’enfant…» Explication de Nicolas Wadimoff, cinéaste, mais également mélomane, et jadis musicien dans les caves de l’Usine: «Les artistes, mêmes les plus indépendants des années 1970, n’ont aujourd’hui plus aucun contrôle sur leurs œuvres. Les plus petites maisons de disques ont toutes été rachetées par les majors du disque. Qui n’ont aucun état d’âme vis-à-vis de l’usage qu’on peut faire de leur catalogue. Vous faites un film sur la musique punk? Rien à faire! Que ce soit Universal ou Warner, on applique les mêmes raisonnements que pour Madonna. Richard Hell, par exemple, n’y pouvait rien si on nous demandait une fortune pour un de ses titres. Mais lui voulait participer au film! Il a donc fini par nous envoyer une bande-son de sa propriété, un inédit enregistré en concert en 1976.» Téléphone aux Vernets Le choix des musiques du film, que l’on retrouve sur disque, Nicolas Wadimoff l’a fait selon ses goûts personnels. «La musique que j’aime appartient essentielle- ment à cette époque, 1977-1978, les débuts du punk. A dire vrai, j’ai un peu triché. Ado, j’étais d’abord dans le prog. Jusqu’à ce que débarque le hard rock, Def Leppard et AC/DC. En 1978, j’écoutais Téléphone en concert aux Vernets. Et ce n’est que deux ou trois ans plus tard, au tournant de 1980, que j’ai découvert les Clash.» On imagine Nicolas Wadimoff écoutant du punk à fond durant le tournage. En réalité, tous les jours sur le plateau, il y avait du Kraftwerk, les pionniers de l’electro avec leur Radioactivity. Mais pour les droits, c’est niet complet. Un autre pionnier de l’electro, suisse celle-là, remplace les Allemands. Ce sera Bruno Spoerri et son aquatique Waves of Montreux. La boucle ne serait pas bouclée sans un groupe du cru, et d’aujourd’hui: Faute de frappe, donc. Deux titres des ancêtres Technycolor sur le disque. «Entre les deux groupes, comme entre l’histoire passée et le présent, j’établis un continuum. Avec une pointe de mélancolie pour le passé. Mais pas de la nostalgie! Trop complaisant.» Passé, ou presque, c’est l’Usine, dans laquelle le cinéaste œuvrait à ses débuts. Et dans l’Usine, le label Urgence Disk, bien indépendant celui-là, et animé par Damien Schmocker. Né en 1964, comme Nicolas. Et le futur? Ou le présent tout du moins? «Ce qui fait sens, c’est de retrouver chez des musiciens jeunes et d’aujourd’hui cette énergie et ce souffle qui parcouraient les années 1970.» Alors, punk not dead, Monsieur Wadimoff? «A fond!» «Music from Opération Libertad» CD Urgence Disk. Disponible chez Sounds, sur www.akkafilms.ch et sur www.darksite.ch/urgences. Le film «Opération Libertad» passe actuellement au Cinélux. Pour le meilleur et pour le pire, les stars débarquent au Montreux Jazz Concerts Ce soir à l’affiche du festival, l’ex-leader d’Oasis, Noel Gallagher, et la bombe glamour Lana Del Rey La presse musicale anglaise l’a surnommé «le Sage». Selon son cadet, Liam, Noel Gallagher était au contraire «le cinglé de la famille». Et cela a un sens dans la bouche de celui que le Beatles George Harrison appelait «le crétin». Sage ou cinglé, le fondateur, leader, chanteur occasionnel, guitariste et principal compositeur d’Oasis l’est sans doute à parts égales. Ce soir, la figure la plus marquante du rock britannique Contrôle qualité Lana Del Rey, en concert dimanche dernier aux Eurockéennes de Belfort. SEBASTIEN BOZON/AFP des années 90 joue à Montreux avec son «groupe solo». Sa première incursion hors de la formation phare de la britpop, sabordée en août 2009 après une ultime altercation, quelques minutes avant son concert parisien. En concert, Noel joue sans honte Oasis, dont il a composé 90% du répertoire. Après trois ans sans aucun contact, les deux frères Gallagher se sont envoyé des textos remplis d’amour, lors de la victoire du championnat d’Angleterre par Manchester City, le 13 mai dernier… Les parieurs pronostiquent déjà la reformation du groupe. L’autre concert événement de ce soir au 46e Montreux Jazz Festi- val, c’est bien sûr celui de Lana Del Rey au Miles Davis Hall. Le buzz a rarement connu une telle intensité qu’avec cette artiste découverte l’an dernier. Plusieurs mois avant la sortie de son album Born To Die, en janvier 2012, tout ce que compte la planète en prévisionnistes annonçait un succès «hénaurme» à la jeune femme née en 1986 sur la base d’un titre accrocheur, Video Games. L’album tarde et les fans précoces s’impatientent. L’attente démesurée génère aussi son lot de jalousies. La starlette est attendue au tournant. Et les procès ne manquent pas: Lana Del Rey aurait plagié une chanteuse grecque pour son fameux tube, elle se serait inventé son personnage de pin-up faussement ingénue en se faisant indécemment gonfler les lèvres (ce n’est pas la première), son album ne vaudrait le détour que pour ses trois tubes (Born to Die, Video Games et Blue Jeans, pas faux). Ses prestations – son passage au Saturday Night Live – sont disséquées avec malveillance. De passage dimanche dernier aux Eurockéennes de Belfort, l’apprentie diva n’a pas trébuché, même si les éloges restent discrets. «Un set posé et poseur. Pas désagréable, mais pas assez incarné pour générer de l’émotion», écrivait Libération. Peut-elle mieux faire à Montreux? F.B./B.S.