MKT Helv.cond 10 - Méthode Busquet

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MKT Helv.cond 10 - Méthode Busquet
Complexe odonto-gnathique et posture
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.
D. GASQ, L. BUSQUET, R. MONTOYA, J. GAUJAC, P. DUPUI
A l’heure actuelle, il n’est pas concevable
d’aborder une pathologie posturale sans se
préoccuper du complexe odonto-gnathique
(COG). Inversement, tout traitement d’une
pathologie odonto-gnathique doit veiller à ne
pas déclencher de trouble postural. Les thérapeutes impliqués dans la prise en charge des
pathologies odonto-gnathiques ou posturales
sont nombreux (médecins, chirurgiens-dentistes, thérapeutes manuels, orthophonistes,
orthoptistes et ophtalmologistes, podologues), et doivent nécessairement communiquer et synchroniser leurs pratiques pour permettre une prise en charge thérapeutique
optimale. Les relations entre le COG et la posture sont très complexes et ont fait l’objet de
nombreuses théories depuis plusieurs décennies. Nous définirons d’abord les systèmes
étudiés, puis nous effectuerons ensuite un
panorama des données de la littérature
concernant les liens supposés et établis entre
COG et posture de l’individu. Puis nous donnerons quelques clés neurophysiologiques et
biomécaniques pour éclairer les relations
entre le COG et le système postural. Enfin,
nous donnerons les grandes lignes de
l’approche clinique du patient présentant une
symptomatologie odonto-gnathique ou posturale, de la sémiologie à la prise en charge thérapeutique.
Complexe odonto-gnathique et
posture : définition des termes et
mise en place
Le complexe odonto-gnathique présente trois
composants : l’articulation temporo-mandibulaire (ATM), les muscles manducateurs et les
dents des arcades maxillaire et mandibulaire.
Ces trois composants sont dans leur fonctionnement indissociables des muscles linguaux
et péri-hyoïdiens. Le COG possède trois fonctions fondamentales que sont la mastication,
la déglutition et la phonation, dont les dysfonctions sont susceptibles d’interférer les
unes avec les autres. L’état de repos mandibulaire correspond à une position d’inocclusion, ménageant un espace libre d’inocclusion
antérieur de 2 mm environ, qui définit la
dimension verticale de repos. Dans cette position, les muscles élévateurs de la mandibule
présentent une contraction tonique pour lutter
contre la pesanteur, sous la double dépendance de la boucle myotatique réflexe et du
système nerveux central. Cet état de repos
est la position habituelle de la mandibule, en
dehors des phases de déglutition, mastication
et phonation [90]. La position d’intercuspidation maximale (PIM) est la position de
dimension verticale d’occlusion la plus faible.
1 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
La PIM est une position transitoire, observée
uniquement lors des mouvements de déglutition fonctionnelle, où elle assure un calage
fonctionnel aux muscles de la langue et du
cou, durant une demie seconde environ. Les
mouvements de déglutition physiologiques
sont basés sur la succession d’un réflexe de
fermeture et d’ouverture. Ils sont répétés
autour de 1 500 fois par jour pour compenser
la production salivaire quotidienne d’environ
1,5 litre, et avaler les aliments préalablement
mastiqués. Le temps total de PIM est de
l’ordre de 15 minutes/jour [8, 23]. Des épisodes de serrage dentaire physiologiques
existent toutefois en dehors de la déglutition
ou de la mastication, notamment lors de la
réalisation de travaux de force ou dans la pratique sportive [66, 71]. En dehors de ces
situations physiologiques, le fait d’avoir les
dents en contact relève le plus souvent de
parafonctions (souvent pathologiques) à type
de serrage dentaire (ou clenching) diurne
et/ou nocturne (stade 1 du sommeil lent, juste
avant le sommeil paradoxal) centré ou excentré, ou de bruxisme [1, 44].
Seulement 25 % des sujets présentent une
déglutition fonctionnelle en PIM, correspondant au contact de la pointe linguale sur le
palais dur, en arrière des incisives maxillaires.
75 % des sujets présentent une déglutition
dysfonctionnelle (dite atypique, primaire ou
infantile également), avec une malposition linguale, le plus souvent par interposition entre
les arcades dentaires. La position de la
langue en situation de repos et lors de la
déglutition est un facteur important en raison
de sa probable implication sur la croissance
du massif dento-facial et la genèse de
troubles occlusaux [17]. Une obstruction
nasale responsable d’une respiration buccale
lors de la croissance, entraîne une glossoptose (langue basse), qui pourrait être un facteur
favorisant le développement d’une endomaxillie [44]. La persistance d’une déglutition atypique serait un des principaux facteurs de
–( 2
récidive après traitement orthodontique [23].
La prise en charge d’une déglutition dysfonctionnelle ou d’une langue basse sera donc
essentielle en cas de pathologie du COG [58].
La mastication physiologique est unilatérale
alternée, avec souvent un côté préférentiel.
Elle est sous la dépendance d’un générateur
central situé dans le tronc cérébral, lui-même
modulé par le cortex cérébral. La mastication
unilatérale exclusive est fréquemment liée à
une atteinte de l’ATM homolatérale ou à des
douleurs dentaires. Elle est pathologique,
notamment chez l’enfant où elle conduit à un
développement maxillo-facial asymétrique [4].
La pathologie du complexe odonto-gnathique
est extrêmement riche et variée. Dans notre
exposé nous abordons uniquement le cadre
des ADAM ou Algies et Dysfonctionnement de
l’Appareil Manducateur (temporomandibular
joint disorders des Anglo-Saxons), connu
depuis les travaux de Costen en 1934 [22].
L’ADAM est un cadre nosologique plus ou
moins défini, qui regroupe trois signes cliniques principaux : limitation de l’ouverture
buccale, bruits articulaires lors de la mastication et de l’ouverture buccale, et douleurs orofaciales jugales ou pré-auriculaires. Dworkin
et Le Resche proposent de classer ces
troubles en trois catégories : troubles musculaires (douleurs, hypomobilité), déplacements
du disque articulaire réductibles ou non
(bruits, mobilité limitée ou altérée), et atteintes
articulaires proprement dites (dégénératives
ou inflammatoires) [31]. D’autres symptômes
sont également décrits dans le cadre de
l’ADAM : céphalées temporales ou frontales
(souvent matinales en lien avec un serrage
dentaire nocturne), sensations d’oreilles bouchées ou acouphènes, sensations vertigineuses, douleurs et contractures cervicales,
fatigabilité. La plupart des signes cliniques
sont aspécifiques et fréquents : 60 à 70 % de
la population aurait au moins un des signes
d’ADAM, mais seulement 5 % de ces personnes suivraient un traitement, la plupart
étant des femmes adultes jeunes. Certains
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Complexe odonto-gnathique et posture
signes sont plus spécifiques comme les bruits
articulaires. Ils sont éventuellement associés
avec un trajet en baïonnette de la mandibule
lors des mouvements d’ouverture/fermeture,
ou avec une limitation des mobilités, et sont
liés à des déplacements réductibles ou non
du disque articulaire [11, 28, 42]. Une étude
par imagerie des ATM de 76 sujets sains et
102 patients présentant un ADAM montre que
33 % des sujets asymptomatiques présentent
une luxation discale. Cette malposition discale, majoritairement antéro-latérale, est plus
importante en cas d’ADAM (77 %), avec un
odds ratio à 3.9 en cas de luxation discale
réductible, et à 42.7 en cas de luxation irréductible [50]. Les causes d’ADAM relevées
dans la littérature sont extrêmement nombreuses : traumatismes des ATM ou du rachis
cervical, anomalies occlusales (prématurité,
interférence non-travaillante, instabilité de
l’occlusion en intercuspidie maximale, décentrage transversal, articulé inversé, classes
d’Angle dentaires II et III, perte de calage postérieur, dysfonction du guide incisivo-canin)
[65], parafonctions (serrage dentaire diurne
ou nocturne, et bruxisme), foyers dentaires
infectieux ou inflammatoires (granulomes apicaux), micro-galvanismes, contractures des
muscles manducateurs secondaires à un
désordre postural à distance (troubles de
l’oculomotricité par exemple), arthropathie de
l’ATM, et facteurs psychiques (stress notamment). Il semble que les parafonctions (élément dynamique) aient réellement un pouvoir
pathogène car elles favorisent l’apparition
d’un ADAM à long terme. Les troubles occlusaux semblent être moins pathogènes de
manière directe, mais participent probablement au développement des parafonctions.
L’étiologie de l’ADAM est de toute manière
plurifactorielle. Les limites de l’adaptation au
niveau dentaire, musculaire et articulaire sont
difficiles à cerner, et variables selon les individus. Il est fréquent de voir des situations
d’instabilité occlusale longtemps bien tolérées, basculer brutalement dans le domaine
de la pathologie, ce qui correspond probablement à un défaut d’adaptation des systèmes
de compensation de l’individu. Les patients
évoluent souvent dans un contexte de douleur
chronique. Il est difficile de faire la part des
choses entre les éléments organiques et psychologiques, et d’établir un lien de causalité
entre les plaintes du patient et les anomalies
observées. Il n’y a souvent pas de proportionnalité entre les anomalies constatées cliniquement et les plaintes du patient. Nous verrons
que la prise en compte de cette dimension
psychosociale de l’ADAM est un des éléments
majeurs de la prise en charge. L’ADAM n’est
souvent qu’une des plaintes du patient, reflétant la souffrance du complexe odonto-gnathique, et s’intègre dans un défaut d’adaptation de l’individu aux contraintes externes et
internes [11, 20, 28, 31, 39, 41, 43, 44, 52,
55, 82].
La posture d’un individu se définit par la position des différents segments corporels entre
eux d’une part, et par rapport à la verticale
gravitaire d’autre part. Trois approches permettent de caractériser la posture d’un sujet.
L’approche statique est basée sur
l’observation du sujet en position orthostatique de repos et consiste à relever les déformations des différents segments corporels
(massif céphalique, rachis, ceintures scapulaire et pelvienne, membres) dans les trois
plans de l’espace. Elle est complétée par
l’étude de l’état de tension (ou tonus) de certains groupes musculaires lors de mouvements passifs et actifs. L’approche dynamique étudie la cinématique des différents
segments lors d’activités motrices automatiques (marche ou course par exemple) ou
imposées (geste sportif par exemple). Enfin,
le contrôle postural est appréhendé en proposant au sujet des tests fonctionnels cliniques,
ou en analysant les déplacements de son
centre de pression résultant sur plate-forme
de force, en conditions statique ou dynamique, dans différentes conditions de disponi-
3 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
bilité (yeux ouverts et fermés, repos mandibulaire ou serrage dentaire, mousse podale) ou
perturbation sensorielle (cotons inter-dentaires, serrage dentaire en latérodéviation). La
définition du trouble postural est vaste étant
donné qu’il correspond à une anomalie relevée lors de cet examen : simple asymétrie
anatomique asymptomatique, limitation ou
altération des mouvements liées à une hypertonie musculaire, douleurs musculo-squelettiques, ou encore altération du contrôle postural. Le syndrome de déficience posturale est
une entité nosologique décrite depuis 30 ans,
qui mêle de nombreux symptômes : douleurs
de l’axe rachidien, sensations vertigineuses,
troubles oculomoteurs, signes d’ADAM, perturbations du “tonus postural” [36]. La pathologie dite posturale n’est pas bien caractérisée, car elle correspond souvent à des douleurs ou plaintes chroniques, avec ou sans
déformation anatomique, pour lesquelles la
médecine classique n’a pas trouvé de cause,
ou du moins de traitement efficace.
Une différenciation entre l’ADAM, dysfonctionnement locorégional du complexe odontognathique, et la pathologie posturale proprement dite n’est pas toujours aisée, mais doit
être établie par les cliniciens.
Données de la littérature sur
les liens entre complexe odontognathique et posture
Notre pratique clinique peut se résumer de
manière simple, comme étant le fruit d’un
compromis entre notre expérience individuelle (avec nos représentations et convictions),
les souhaits et attentes du patient, et les données validées de la médecine factuelle. Cette
brève revue de la littérature concernant les
liens entre la posture et la sphère odonto-gnathique, va nous permettre d’éclairer le troisième point, et de mieux appréhender la com-
–( 4
plexité de la question. Nous pouvons déjà
remarquer que malgré l’engouement pour la
posturologie et la multiplicité des théories
énoncées, très peu de travaux de bon niveau
méthodologique sont publiés. Hanke et al. ont
évalué le niveau de preuve de 355 articles
concernant les liens entre la sphère odontognathique et le système posturo-moteur,
publiés de 1925 jusqu’en 2005 : 99.2 % ont un
niveau de preuve faible (à III, IV ou V) [45].
Les paradigmes expérimentaux utilisés pour
établir des liens entre une pathologie de la
sphère odonto-gnathique et un trouble postural peuvent être catégorisés en quatre types :
perturbations de l’occlusion chez des sujets
sains et évaluations des conséquences sur la
posture, relevé des anomalies occlusales
chez des sujets sains et suivi longitudinal afin
d’évaluer le potentiel pathogène de ces anomalies, études transversales établissant dans
une cohorte de sujets des corrélations entre
anomalies occlusales et troubles posturaux,
et enfin comparaison des effets de plusieurs
modalités thérapeutiques.
Complexe odonto-gnathique et
posture cervico-céphalique
En position de repos mandibulaire, les rapports entre mandibule et maxillaire sont
dépendants de la position de la tête par rapport au tronc, dans le plan frontal et sagittal :
l’extension cervicale est associée à une augmentation de l’espace libre d’inocclusion et à
un recul de la mandibule, et inversement lors
d’une flexion cervicale [73, 90]. Lors de la réalisation d’une fermeture buccale active, il
semble y avoir peu d’influence de la posture
corporelle (assis/décubitus dorsal) sur la PIM
de sujets sains avec une dentition complète
[59, 86]. Les liens potentiels entre la posture
cranio-cervicale et la morphologie dentofaciale ont été étudiés par de nombreux
auteurs. La position du crâne par rapport au
Complexe odonto-gnathique et posture
rachis cervical en fonction de la classe
d’Angle dentaire (fig. 1) fait l’objet de nombreux résultats contradictoires : la présence
d’une classe II (rétrognathie) est tantôt associée avec une hyperextension sous-occipitale,
tantôt avec une majoration de la flexion [80].
La lordose cervicale semble augmentée en
présence d’une classe II, et diminuée en présence d’une classe III [25, 33].
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Une association est notée entre la présence
de chevauchements dentaires et une hyperextension du rachis cervical supérieur.
L’hyperextension serait responsable d’une
mise en tension des tissus cutanés et souscutanés de la face, représentant une gêne au
développement des arcades mandibulaire et
maxillaire [80]. La mise en place d’un dispositif d’expansion maxillaire dans le cadre d’une
endomaxillie avec troubles de la ventilation
nasale, s’associe à une augmentation de la
flexion cervicale haute et à une translation
postérieure du rachis cervical de faibles
amplitudes [84]. Matheus et al. n’objectivent
pas de lien entre la présence d’un ADAM avec
ou sans luxation discale, et la posture craniocervicale [57]. Quelques revues de la littérature récentes s’accordent sur le fait qu’il y ait de
très nombreux travaux objectivant des associations entre posture cervicale et pathologie
du COG, mais peu de résultats concordants
et de travaux de bonne qualité pour en tirer
des conclusions [2, 45, 64]. Il ne semble pas
y avoir d’association stéréotypée entre la pos-
Fig. 1 : Schématisation de la classification d’Angle des rapports dentaires
(I : incisives, PM : premières prémolaires, M : premières molaires) (modifié d’après Lejoyeux, 1996 [53]).
5 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
ture cervico-céphalique (fig. 2.1) et les caractéristiques odonto-gnathiques du sujet. Ceci
s’explique probablement en partie par
l’asservissement de la position du massif
céphalique aux référentiels gravitaire (système vestibulaire, avec projection bilatérale du
faisceau vestibulo-spinal médial au niveau
cervical) et visuel (verticale) [75], qui ne sont
jamais évalués dans les travaux cités précédemment.
Complexe odonto-gnathique et
posture globale
Saito et al. analysent les asymétries anatomiques de 16 sujets présentant un ADAM
avec luxation discale antérieure réductible
(évaluation clinique) versus 10 sujets sains. Il
n’y a pas de modification de la statique podale, mais dans le groupe ADAM il y a plus de
troubles de la statique rachidienne (laterocoli,
hyperlordose lombaire et perte de la cyphose
thoracique) et de rétroversion pelvienne. Ces
résultats ont peu d’intérêt car les sujets sont
évalués une seule fois, et leur faible nombre
ne permet d’en tirer aucun élément explicatif
cohérent [76]. Bricot propose des associations stéréotypées entre les rapports sagittaux
des deux arcades dentaires, classés selon les
classes d’Angle dentaires, et le profil postural
sagittal de l’individu : une classe II (rétrognathie) est associée à un plan scapulaire antérieur, alors qu’une classe III (prognathie) est
associée à un plan scapulaire postérieur [9].
Si ces données sont confirmées sur plateforme de force par Nobili et Adversi [63],
Clauzade propose un schéma strictement
opposé avec un déport sagittal du corps dans
le même sens que celui de la mandibule [21].
Lippold et al. ne trouvent aucune différence
des courbures sagittales du rachis thoracolombaire entre des sujets présentant soit une
classe d’Angle I (18 sujets), II (38 sujets) ou III
(18 sujets) [54]. Une revue de la littérature
–( 6
montre que de nombreux travaux font état de
corrélations entre la présence d’anomalies
occlusales et d’une scoliose, mais les résultats sont disparates et souvent contradictoires, ce qui doit rendre prudent quant aux
conclusions à en tirer [2]. Une revue de la littérature [24] et une lettre à l’éditeur la contestant [69], confirment l’existence de vifs débats,
autour de travaux de faible qualité méthodologique : des associations (non stéréotypées)
sont mises en évidence entre le système stomato-gnathique et la posture par certains
auteurs, alors que d’autres ne l’objectivent
pas. Il manque encore une fois de publications de bonne qualité sur cette thématique.
La disparité des résultats est possiblement
liée à l’absence de méthodologie d’approche
commune des anomalies posturales. Le piège
est d’effectuer de nombreuses corrélations
entre l’observation d’un trouble occlusal et
des anomalies posturales (fig. 2.1, 2.2 et 2.3).
Trouver une ou plusieurs corrélations significatives ne signifie en aucun cas qu’il y ait réellement une association (confirmation par
d’autres auteurs nécessaire), et encore moins
qu’il y ait un lien de causalité. Enfin, ne perdons pas de vue que l’on traite le plus souvent
une souffrance : la modification anatomique
n’est probablement qu’un critère d’évaluation
secondaire, qui présente peu d’intérêt si elle
n’est pas accompagnée d’une amélioration du
patient. Malheureusement, il ne semble pas y
avoir de corrélation anatomo-fonctionnelle
stéréotypée.
Complexe odonto-gnathique et
évaluation stabilométrique sur
plate-forme de force
Ferrario et al. comparent les données podométriques de trois groupes de dix sujets
(sains, ADAM modéré et classe II unilatérale
asymptomatique), en position de repos mandibulaire, en relation centrée, en PIM avec
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Complexe odonto-gnathique et posture
serrage dentaire maximal, et avec interposition de cotons inter-dentaires (avec et sans
serrage). Les résultats des enregistrements
(yeux ouverts durant 30 secondes)
n’objectivent aucune différence entre les
3 groupes sur l’ensemble des conditions [32].
Michelotti et al. comparent des paramètres
stabilométriques entre 26 enfants présentant
un articulé inversé postérieur isolé, avec ou
sans latérodéviation mandibulaire, et
52 sujets témoins appariés sans désordre
occlusal. Les paramètres analysés sont
l’asymétrie frontale et la vitesse du centre de
pression résultant (CP), obtenus en condition
statique les yeux ouverts, en PIM et avec
interposition de cotons entre les molaires.
Aucune différence n’est mise en évidence, en
fonction de la présence ou non d’une latérodéviation, d’un articulé inversé postérieur, ou
de l’interposition de cotons inter-dentaires
[62]. Perinetti n’objective pas de modification
des paramètres stabilométriques (surface,
longueur et vitesse du CP) obtenus chez
36 sujets asymptomatiques sans désordre
occlusal, lors d’enregistrements effectués en
position de repos mandibulaire et en PIM [68].
L’interprétation du résultat de ce travail de
méthodologie correcte, est présentée de
manière erronée comme la preuve d’une
absence d’effet de l’occlusion sur la posture :
il s’agit au contraire d’un élément rassurant
étant donné que les sujets ne présentent pas
de pathologie odonto-gnathique. Bracco et al.
montrent une diminution statistiquement significative, mais cliniquement peu pertinente
(1.4 mm) de l’asymétrie frontale du CP en
position mandibulaire myocentrée par rapport
à la PIM, chez 95 sujets sains [7]. Tardieu et
al. analysent la stabilité de 10 sujets asymptomatiques sans désordre occlusal, en conditions statique et dynamique les yeux ouverts
et fermés, avec 3 types de positions mandibulaires : position de repos, PIM et latérodéviation. Les seules différences mises en évidence sont une augmentation de la vitesse du CP
et de la puissance spectrale en condition
dynamique les yeux fermés entre la position
de repos et de latérodéviation mandibulaire. Il
n’y a pas de modification de la statique cervico-céphalique entre les différentes conditions.
L’intérêt de ce travail est de montrer qu’il est
parfois nécessaire de mettre les sujets en difficulté pour que s’exprime une altération du
contrôle postural. Toutefois, le très faible
nombre de sujets ne permet pas de conclure
à l’absence de résultat dans les autres conditions [83]. Gangloff et al. étudient les performances stabilométriques de 36 sujets (condition statique yeux ouverts et fermés, 1 essai
de 20 secondes dans chaque condition), en
conditions occlusales variées : PIM, relation
centrée et latérodéviation droite et gauche de
3 mm, les trois dernières conditions étant
imposées avec une gouttière. Le seul résultat
est une réduction statistiquement significative
de la surface du statokinésigramme (STK) en
relation centrée par rapport à la PIM les yeux
ouverts, mais cliniquement peu pertinente
(35 mm). Chez les 18 sujets experts inclus, la
précision d’un lancer de balle est également
évaluée dans les différentes conditions
d’occlusion, les meilleurs résultats étant obtenus en condition de relation centrée [37]. Une
évaluation stabilométrique avant et après
anesthésie tronculaire unilatérale du nerf
mandibulaire pour extraction d’une dent de
sagesse, effectuée chez 27 patients, montre
une augmentation de la surface du STK (de
l’ordre de 40 mm) après anesthésie uniquement les yeux ouverts, sans modification
significative de la longueur du STK. Chez
78 % des sujets, une déviation homolatérale à
l’anesthésie du X moyen est notée les yeux
fermés, alors qu’elle est aléatoire les yeux
ouverts (valeurs non précisées) [38]. Les
conclusions restent cependant très limitées
du fait de l’absence de groupe contrôle, des
conditions de passation du test (1 seul essai
de 20 secondes), du faible nombre d’effectif,
et de la pertinence clinique limitée des différences mises en évidence. Sakaguchi et al.
objectivent une moindre longueur du STK en
7 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
relation centrée qu’en position de repos mandibulaire, et une augmentation de la surface
du STK en diduction droite par rapport à la
relation centrée, chez 45 sujets asymptomatiques. La surélévation du talon droit entraîne
une asymétrie de la répartition des forces
d’occlusion vers le côté droit par rapport à une
position orthostatique naturelle, ce qui est en
faveur d’une influence ascendante sur
l’équilibre occlusal [77]. Il s’agit toutefois d’un
effet observé juste après la perturbation, mais
qui ne perdure peut-être pas dans le temps
(adaptation du sujet).
Nous remarquerons que certaines conclusions sont trop hâtives : par exemple,
l’absence de retentissement stabilométrique
d’un articulé inversé postérieur [62] n’est pas
un critère suffisant et pertinent pour affirmer
qu’il n’a pas de retentissement postural.
Globalement, seules les modifications de posture mandibulaire semblent avoir un retentissement stabilométrique, ce qui pourrait être
en faveur d’une plus grande influence de
l’ATM que de l’occlusion dentaire sur le
contrôle postural. Certains auteurs justifient
cette hypothèse en soulignant le fait que les
dents ne sont que rarement en contact,
excepté lors de la déglutition et de la mastication. Toutefois, les sujets serrant les dents de
manière excessive en cas de pathologie
(parafonctions), on pourrait penser que dans
ce cadre-là le facteur occlusal puisse être
réellement pathogène. Cette hypothèse n’a
pas encore été explorée à notre connaissance, probablement en raison de la difficulté à
évaluer et quantifier le serrage dentaire réel
d’un sujet en situation écologique. On remarquera également qu’il n’y a pas de travail évaluant spécifiquement le retentissement postural stabilométrique du port d’une gouttière
occlusale. Enfin, ne perdons pas de vue que
la stabilométrie est un outil permettant seulement de quantifier un des aspects du contrôle
postural de l’individu (contrôle du centre de
pression) (fig. 2.4), et n’est pas à l’heure
actuelle un critère suffisant pour justifier un
traitement, ou juger du résultat d’un traitement. Il n’y a effectivement aucun paramètre
stabilométrique validé qui permette d’obtenir
une information plus pertinente que la clinique. Plus simplement, quelle est la pertinence d’une diminution de la longueur du STK
pour juger de l’efficacité d’un traitement
(sachant qu’en général on cherche à améliorer la souffrance du patient) ? La stabilométrie
Fig. 2 : Illustration d’une analyse posturale clinique statique (1 et 2) et dynamique (3), et d’une analyse stabilométrique (logiciel WinPosture© de Médicapteurs) (4).
–( 8
Complexe odonto-gnathique et posture
reste un outil irremplaçable pour évaluer le
contrôle postural, mais n’a de valeur
qu’intégrée au sein d’un bilan clinique exhaustif. La problématique est différente si on
cherche à améliorer la performance d’un sportif asymptomatique (tir ou sprint par exemple)
en modifiant son occlusion dentaire : il pourrait alors être intéressant de vérifier la validité
de certains paramètres stabilométriques,
comme étant prédictifs d’une amélioration de
la performance.
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Comparaison de l’efficacité des
différentes modalités thérapeutiques
du COG sur les pathologies
posturales et l’ADAM
Nous remarquerons tout d’abord l’absence de
littérature
anglo-saxonne
concernant
l’efficacité de diverses modalités thérapeutiques du COG sur les pathologies posturales
proprement dites (en dehors de l’ADAM et de
la posture cervico-céphalique) [45]. L’exemple
le plus évident est celui des liens entre orthodontie et scoliose : si quelques travaux ont
étudié le retentissement du traitement de la
scoliose par corset sur le développement
dento-facial, il ne semble pas y avoir de travaux pertinents ayant évalué l’effet de divers
traitements orthodontiques sur la survenue ou
l’évolution de la scoliose [2]. Un travail récent
suggère que l’association d’un traitement
manuel et d’un traitement de l’occlusion par
gouttière essentiellement (groupe 1), est plus
efficace sur la diminution des symptômes
douloureux que l’application de l’une ou
l’autre des prises en charge isolément
(groupes 2 et 3). Ces résultats sont intéressants et semblent corroborer notre impression
clinique, mais l’interprétation doit en être prudente : les 3 groupes sont de taille inégale (44
patients dans le groupe 1 versus 11 patients
dans les 2 autres groupes), les motifs de
plainte sont très hétérogènes (ADAM, rachial-
gies, douleurs des membres), avec une répartition disparate entre les trois groupes [47].
L’absence de preuve de l’efficience d’un traitement du COG sur des plaintes posturales
ne signifie évidemment pas que cette voie
thérapeutique n’est pas efficace. Tous les praticiens constatent régulièrement l’efficacité
d’une prise en charge posturale par le biais
d’une thérapie du COG (thérapie manuelle,
gouttière). Il serait probablement plus aisé de
démontrer une efficience de nos pratiques sur
des populations de patients bien définies, ce
qui implique de mieux caractériser les différentes entités pathologiques. L’ADAM doit
être différencié des autres pathologies posturales. La pathologie posturale doit être mieux
caractérisée sur le plan général (douleurs permanentes ou intermittentes, délai d’évolution,
composante psychologique) et nosologique
(céphalées, cervicalgies, dorso-lombalgies,
tendinopathies chroniques, tableaux de fibromyalgie, simples asymétries anatomiques ou
toniques…), et tous les capteurs posturaux
doivent être évalués. Il est nécessaire, à
l’avenir, de développer la recherche clinique
dans ce domaine en appliquant une méthodologie rigoureuse afin que les résultats puissent participer à étayer de manière réelle nos
pratiques : groupe contrôle avec randomisation, évaluation en insu avec des tests pertinents standardisés et un recul suffisant,
nombre de sujets adapté à l’objectif du travail.
Concernant les traitements visant à soulager
l’ADAM proprement dit, les critères de jugement habituels sont l’amélioration des douleurs, la diminution de la limitation d’ouverture
buccale ou des bruits articulaires. Il s’agit
d’une pathologie fonctionnelle dont le pronostic en l’absence de traitement est favorable.
Les différentes modalités thérapeutiques évaluées sont les dispositifs oraux amovibles
(gouttières essentiellement) ou fixes (orthodontie), l’équilibration occlusale en bouche
(coronoplasties additives ou soustractives),
les thérapies physiques (thérapies manuelles,
rééducation, physiothérapie), l’acupuncture,
9 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
les médicaments antalgiques et anti-inflammatoires, la toxine botulique, la chirurgie
(extractions dentaires, ATM), la relaxation, le
soutien psychologique et l’abstention thérapeutique (conseils uniquement). Le nombre
de travaux recensés dans la littérature est
extrêmement important. De ce fait, nous
retranscrivons essentiellement les conclusions des revues de la littérature concernant
ce domaine. Globalement, toutes les synthèses de la littérature mettent en avant le
faible niveau de preuve de l’efficacité des
divers traitements sur l’évolution de l’ADAM. Il
apparaît clairement qu’il faut privilégier les
traitements conservateurs en première intention dans le cadre d’un ADAM. Les traitements invasifs comme les meulages sélectifs,
l’orthodontie ou la chirurgie n’ont pas prouvé
leur efficacité et sont parfois délétères dans
ce cadre-là. Ce sont des traitements de
seconde intention, réservés à l’échec d’un
traitement conservateur bien conduit. Il y a
bien entendu des cas particuliers qui n’entrent
pas dans le cadre de ces recommandations
(meulage sélectif après mise en place d’une
prothèse dentaire amovible ou fixe sur support dentaire ou implantaire, responsable
d’une interférence non-travaillante par
exemple). Le traitement conservateur le plus
utilisé est la gouttière occlusale. Celle-ci est le
plus souvent mandibulaire car elle est moins
visible, non gênante pour la phonation, ne
perturbe pas la déglutition et peut favoriser un
repositionnement de la langue en position
haute. Dans certains cas, son positionnement
sur l’arcade supérieure s’impose (supraclusie
importante notamment). Différents types de
gouttières existent en fonction des indications,
avec des modalités de confection et de port
spécifiques, que nous ne détaillerons pas.
L’effet retenu comme étant le plus significatif
est l’obtention d’un relâchement des muscles
–( 10
manducateurs. L’efficacité du port d’une gouttière sur l’ADAM semble supérieure à
l’abstention thérapeutique, mais similaire à un
ensemble d’autres alternatives thérapeutiques : application de mesures préventives et
d’économie articulaire, pratique de techniques
de détente musculaire ou de rééducation du
rachis cervical, relaxation, acupuncture. Cet
élément confirme l’absence de lien exclusif
entre un trouble de l’occlusion et/ou une
pathologie discale de l’ATM, et le cortège de
symptômes de l’ADAM. La gouttière conserve
sa place dans l’arsenal thérapeutique, notamment en cas de parafonction (serrage dentaire ou bruxisme), mais ne doit pas être systématique en première intention. Elle doit
s’intégrer dans une prise en charge polymodale, notamment en cas de troubles psychologiques avec de mauvaises capacités
d’adaptation, afin d’être efficiente [1, 16, 18,
20, 28, 34, 35, 48, 60, 74, 82, 87, 88, 91].
L’analyse des données de la littérature impose plusieurs remarques. La méthodologie des
travaux est le plus souvent insuffisante en raison de l’absence de groupe contrôle, de randomisation et d’évaluation validée et standardisée. Le plus souvent, le faible nombre de
sujets ne permet pas de conclure sur
l’absence de différence (manque de puissance possible). Les résultats souvent contradictoires et la grande hétérogénéité des paradigmes et procédures expérimentales ne permettent pas de tirer de conclusion définitive,
d’autant plus qu’aucune méta-analyse n’a été
réalisée dans ce domaine. Il nous faut donc
être humble et prudent dans notre pratique et
rester critique face aux théories stéréotypant
les interactions entre posture et COG, car
comme nous le rappelle Nietzsche en 1878,
“les convictions sont des ennemis de la vérité
plus dangereux que les mensonges”.
Complexe odonto-gnathique et posture
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.
Bases neurophysiologiques et
biomécaniques des interactions
entre complexe odonto-gnathique
et posture
Nous rappelons très brièvement les bases
neurophysiologiques permettant de comprendre les relations du complexe odontognathique avec le contrôle postural. Le nerf
trijumeau (V) est un nerf mixte. Son contingent sensitif est composé de la réunion au
niveau du ganglion de Gasser des nerfs ophtalmique (V1), maxillaire (V2) et mandibulaire
(V3), responsables de l’innervation de la peau
de la face, des dents, de la muqueuse buccale, des ATM et des muscles masticateurs. Les
récepteurs sont extrêmement nombreux :
nocicepteurs et mécanorécepteurs desmodontaux sensibles à des modifications
d’épaisseur de quelques microns, récepteurs
pulpaires et dentinaires polymodaux, fuseaux
neuro-musculaires, organes tendineux de
Golgi, et récepteurs articulaires (ATM). Le
nerf trijumeau se distribue au sein du tronc
cérébral et de la moelle dans trois noyaux :
mésencéphalique, sensitif et spinal. L’aire
nucléaire de la portion motrice, située dans le
toit du métencéphale, reçoit des influx bilatéraux par le faisceau cortico-nucléaire, et se
distribue par le V3 aux muscles masséter,
temporal, ptérygoïdien médial et latéral, ainsi
qu’aux muscles mylo-hyoïdien, ventre antérieur du digastrique, tenseur du voile du palais
et tenseur du tympan [30, 40]. De très nombreux travaux effectués chez l’animal et
l’Homme ont permis d’établir une cartographie
des connexions neurologiques entre les
noyaux centraux du V et de nombreuses
structures impliquées dans la régulation des
mouvements des yeux et de la tête, ainsi que
dans la régulation du tonus postural : noyaux
vestibulaires et formation réticulée du tronc
cérébral [13, 26, 27, 46, 70, 85], nerfs crâniens oculomoteurs (III, IV et VI) avec le
réflexe trigémino-oculomoteur [3, 12, 61], cervelet [56], nerfs crâniens X (nerf vague), XI
(nerf spinal) et XII (nerf hypoglosse) et nerfs
cervicaux supérieurs [10, 19, 51, 56, 78, 79],
motoneurones lombaires [89]. Même si
l’étude de ces connexions est souvent réalisée chez l’animal pour des raisons éthiques et
techniques, il existe un réel substrat neurologique aux interactions entre la sphère odontognathique et le système postural, notamment
par le biais des relations avec les noyaux vestibulaires qui sont les véritables centres intégrateurs du système tonique postural (fig. 3).
Les différents systèmes sensoriels impliqués
dans le contrôle postural, communément
nommés capteurs posturaux, sont le système
visuel, l’appareil labyrinthique et le système
somesthésique. Ce dernier comprend essentiellement les récepteurs cutanés de la plante
des pieds, les récepteurs articulaires et musculaires des membres inférieurs et du rachis,
les propriocepteurs des muscles oculomoteurs, et les récepteurs du complexe odontognathique. Enfin, le contrôle postural est sous
la dépendance d’influx corticaux et sous-corticaux susceptibles de moduler l’intégration des
différentes afférences sensorielles [29]. On
peut donc concevoir par exemple que des stimuli algogènes péri-dentaires puissent entraîner des modifications du tonus des muscles
oculomoteurs, cervicaux ou plus à distance.
Pour approfondir ces aspects neurophysiologiques, des documents ou ouvrages plus
détaillés peuvent être consultés [29, 49, 67].
La connaissance de ces interrelations neurologiques est nécessaire mais non suffisante
pour appréhender le fonctionnement du système postural en pratique quotidienne. De nom-
11 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
breux auteurs ont souligné l’existence de liens
mécaniques entre le COG et le système postural (cf. chapitres précédents). Plusieurs
auteurs ont d’ailleurs proposé un système de
chaînes musculaires pour éclaircir les relations entre les adaptations posturales de segments corporels distants [9, 15, 21, 72, 81]. La
schématisation classique du lien entre les
aspects neurophysiologiques et mécaniques
peut s’exposer de la manière suivante : le système musculaire tonique, mettant en jeu les
muscles extenseurs anti-gravitaires (système
tonique), est sujet à des tensions asymétriques (asymétries toniques posturales),
sources de douleurs. L’origine de ces asymétries est liée à une asymétrie de la commande
centrale, elle-même secondaire à l’intégration
d’afférences sensorielles perturbées, ou à la
mauvaise intégration d’afférences non
congruentes. En pratique, il semble cependant que le système posturo-moteur obéisse
à un schéma de fonctionnement plus complexe. Les contractures musculaires ne
s’organisent pas uniquement autour des
contraintes gravitaires (système tonique),
mais également autour de dysfonctionnements segmentaires (système phasique) dont
voici une liste non exhaustive : pathologies
articulaires périphériques ou rachidiennes,
cicatrices pathologiques, pathologies viscérales thoraciques, abdominales ou pelviennes
[14]. Ce phénomène d’asservissement du
système postural à des problèmes locaux est
lié à des réflexes segmentaires poly-synaptiques responsables de la mise en place d’une
stratégie d’évitement de la douleur (fig. 3). Il
Fig. 3 : Schématisation des relations entre le système trigéminal et les noyaux vestibulaires (partie gauche), et
du contrôle vestibulo-spinal et segmentaire de la motricité (partie droite) (inspiré de Dupui, 2003 [29]).
–( 12
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.
Complexe odonto-gnathique et posture
est donc nécessaire de lever les adaptations
posturales locales (système musculaire phasique), avant de parler de pathologie posturale liée à une asymétrie tonique, pour laquelle
on va s’attacher à modifier les afférences des
capteurs posturaux (œil, pied et complexe
odonto-gnathique essentiellement). Pour
déchiffrer correctement les adaptations posturales du patient, il est donc nécessaire d’effectuer, dans un premier temps, un examen
programmé, afin d’éliminer une pathologie
locale ou segmentaire (articulaire, cutanée ou
viscérale par exemple) passée inaperçue. Un
exemple d’approche intégrant cette dimension est celle des chaînes physiologiques
(antérieurement chaînes musculaires) proposée par Busquet. Elle présente l’intérêt d’être
une synthèse de plusieurs méthodes décrites
antérieurement (Piret et Bézier, Mézière et
Struyf-Denis notamment), et propose un
décryptage de l’anatomie et de la physiologie
du système posturo-moteur. La démarche
diagnostique est clairement décrite, et permet
d’être reproduite et communiquée par différents thérapeutes. Elle intègre l’analyse de
l’ensemble du système musculo-squelettique,
et les relations contenant-contenu dans
l’interprétation finale [14]. Cette démarche
permet d’intégrer les dysfonctionnements
segmentaires à l’analyse posturale globale.
Par exemple, il y a une intrication anatomique
et fonctionnelle évidente des différents
muscles masticateurs avec les muscles sus et
sous-hyoïdiens (fig. 4) et avec les muscles
cervico-scapulaires. L’os hyoïde est un carrefour musculaire, au croisement des chaînes
musculaires sagittales et croisées. La schématisation en chaînes permet de mieux
appréhender les multiples possibilités
d’interactions entre la position mandibulaire et
la statique cervico-céphalique, et la difficulté
de stéréotyper ces interactions (fig. 5).
Fig. 4 : Continuité entre muscles masticateurs et
muscles péri-hyoïdiens (d’après Busquet, 2005 [14]).
Proposition de démarche clinique
Les patients vus dans le cadre d’une pathologie posturale ont souvent déjà bénéficié de
multiples investigations, et d’un échec des
thérapeutiques traditionnelles. L’analyse clinique doit donc être systématique et approfondie, pour dégager la logique des adaptations posturales pathologiques. L’interrogatoire permet d’établir la chronologie des symptômes, et de mettre en évidence des facteurs
13 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
Fig. 5 : Illustrations schématiques des chaînes de flexion et extension (à gauche), du carrefour musculaire périhyoïdien (au centre, vue de dessus), et des chaînes croisées de fermeture (à droite) (d’après Busquet, 2007 [15]).
déclenchants éventuels. L’évaluation psychologique ne doit pas être négligée, d’autant
plus qu’il s’agit d’une pathologie douloureuse
chronique. L’examen physique doit être programmé et précis. Il n’est effectivement pas
rare de voir des patients pour une pathologie
dite posturale (car chronique), alors qu’il
s’agit simplement d’une lésion locale non diagnostiquée (au niveau des articulations du
membre inférieur notamment). L’objectif n’est
pas d’aborder ici le détail de l’examen postural, mais d’insister sur les points essentiels
dans l’analyse pré-thérapeutique d’un dysfonctionnement du COG et/ou du système
postural. L’examen postural global est
d’abord statique à la recherche d’asymétries
anatomiques, puis dynamique à la recherche
d’hypertonies musculaires. L’analyse statique
est intéressante car elle reflète l’adaptation
du corps aux tensions subies. Cependant,
l’interprétation de certains tests cliniques fait
l’objet de divergences importantes entre différents auteurs. Par exemple, l’analyse des
bascules des ceintures dans le plan frontal et
horizontal est utilisée par certains comme le
témoin instantané de l’implication d’un capteur postural [9], alors que pour d’autres, il
–( 14
s’agit d’un élément qui ne se modifie qu’après
plusieurs semaines de traitement, voire qui
ne se corrige pas (ceci sans compromettre le
résultat fonctionnel) [36]. Cet exemple est
intéressant car il illustre la nécessité d’utiliser
des tests les plus objectifs possible, dont
seules les modifications nettes doivent être
retenues. L’analyse dynamique évalue l’état
de tonicité de certains groupes musculaires
spécifiques (rotateurs cervicaux lors du test
de rotation cervicale par exemple), ou plus
globalement des muscles extenseurs des
membres inférieurs (test de Fukuda et ses
variantes par exemple). L’évaluation dynamique est incontournable, car l’hypertonie de
certains groupes musculaires est parfois isolée, sans modifications anatomiques statiques concomitantes. Enfin, le praticien
effectue une synthèse de l’examen en
essayant de mettre en évidence la logique
des adaptations posturales du patient [14].
Les techniques manuelles ont une place
importante à ce moment-là, d’une part pour
diagnostiquer, et d’autre part pour traiter les
dysfonctionnements segmentaires [5]. La
synthèse de l’examen est facilitée si celui-ci
est standardisé : des anomalies qui parais-
Complexe odonto-gnathique et posture
saient très éloignées peuvent s’intégrer dans
un même schéma dysfonctionnel. La
recherche d’une cohérence dans la lecture
de l’examen du patient est essentielle. Il
s’agit probablement d’un élément qui fait
défaut dans la littérature concernant les liens
entre posture et complexe odonto-gnathique
(cf. supra). A condition d’être réalisé et interprété de manière rigoureuse, l’examen stabilométrique sur plate-forme de force peut être
réalisé de manière complémentaire, et apporter des informations objectives et intéressantes sur le contrôle postural du sujet.
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.
Le complexe odonto-gnathique
est-il coupable, victime, ou
simple spectateur des désordres
posturaux ?
En présence d’un ADAM isolé, nous rappelons qu’il faut privilégier en première intention
les traitements conservateurs. La prescription
d’une gouttière occlusale bien que souvent
nécessaire, n’est pas systématique, et doit
être adaptée à chaque cas. Sa prescription
nécessite un examen détaillé des articulations
temporo-mandibulaires, des muscles masticateurs, de l’occlusion et de la déglutition.
L’équilibration occlusale par meulages sélectifs ne sera qu’exceptionnellement réalisée en
première intention. Il est impératif de chercher
un trouble orthoptique associé, qui devra être
traité avant toute modification occlusale définitive. Des facteurs tels que la présence d’une
dysfonction linguale, ou la présence de courants micro-galvaniques devront être également pris en charge afin d’optimiser les bénéfices thérapeutiques. Dans certains cas, le
soutien psychologique et les techniques de
relaxation sont les facteurs clés de l’efficacité
de la prise en charge. Dans la plupart des cas,
les techniques manuelles sont indiquées, et
sont avantageusement complétées par des
exercices d’autorééducation.
En présence d’un trouble postural (avec
ou sans ADAM) persistant ou récidivant
malgré la correction des dysfonctions segmentaires, l’objectif est d’identifier le ou les
capteurs posturaux déficients. L’hypothèse
de départ considère que la dysfonction des
capteurs favorise ou entretient une hypertonie de certains muscles, engendrant la
pathologie douloureuse. Des propositions de
protocole d’examen existent pour établir une
base de communication entre le posturologue et l’occlusodontiste [6], mais cette
démarche n’est pas consensuelle à l’heure
actuelle. En présence d’un trouble postural
et d’un ADAM, il est toujours difficile de
savoir si il y a un lien de causalité ou non
entre les deux entités : la simple observation
d’un ADAM ou de troubles occlusaux n’est
pas suffisante pour conclure à leur responsabilité dans la genèse du trouble postural.
L’imputabilité d’une dysfonction odonto-gnathique dans la genèse d’un trouble postural
peut s’évaluer de deux manières. La première est basée sur l’anamnèse, où la constatation d’une pathologie du COG précédant
l’installation du trouble postural suggère un
lien de causalité. La seconde est basée sur
l’observation d’une modification des tests cliniques effectués en fonction des conditions
d’occlusion dentaire. De manière générale,
la modification des afférences trigéminales
ne devrait pas modifier le tonus postural [6],
en tout cas ne pas générer d’hypertonies
musculaires. Si les tests semblent pouvoir
nous orienter vers un complexe odonto-gnathique “coupable” dans la genèse du trouble
postural, l’inverse n’est pas évident. En effet,
la présence d’une altération de la posture
cervico-céphalique, de contractures des
muscles cervicaux et masticateurs, ainsi que
de troubles de l’oculomotricité sont susceptibles de modifier les rapports occlusaux et
de générer un ADAM. La mise en évidence
d’un COG “victime” est difficile à mettre en
évidence, et reste souvent une constatation
faite a posteriori.
15 )–
Sphère odonto-gnathique et thérapies manuelles
Il faut toutefois être prudent sur l’interprétation
des tests posturaux, car peu sont réellement
validés. Le fait qu’un test se modifie entre la
condition dents serrées et avec interposition
d’une cale entre les deux arcades signifie certainement qu’il y a une interaction réflexe,
mais son pouvoir prédictif du succès d’un traitement occlusal n’est pas connu. Un élément
compliquant la tâche est l’absence fréquente
de proportionnalité entre l’importance de
l’anomalie observée et son retentissement
postural. Le principe général est d’effectuer
plusieurs tests dont les résultats doivent
converger, afin d’en tirer des déductions thérapeutiques. En règle générale, une symptomatologie posturale apparaîtrait lorsqu’au
moins deux capteurs posturaux seraient déficients [9, 36]. Dans la phase thérapeutique, il
nous semble plus logique de prendre en charge les capteurs posturaux déficients de
manière successive, afin de pouvoir évaluer le
résultat à chaque fois. Dans tous les cas, il
s’agit nécessairement d’un travail d’équipe
trans-disciplinaire, le médecin (ou le posturologue) devant gérer l’intervention des différents acteurs de la prise en charge : thérapeute manuel, occlusodontiste, orthoptiste,
orthophoniste et podologue. Nous rappelons
que l’intervention du thérapeute manuel est
souvent nécessaire avant d’entamer une thérapie posturale pour traiter les dysfonctionnements segmentaires, mais parfois également
au cours et à la fin du traitement.
CONCLUSION
L’existence de liens entre le complexe odonto-gnathique et la posture de l’individu paraît
indiscutable, car il existe de réels fondements
neurophysiologiques et biomécaniques aux
interactions entre ces deux systèmes.
Toutefois, les nombreux travaux effectués à
ce sujet, dont la plupart sont de faible niveau
méthodologique, ne mettent pas en évidence
–( 16
de lien stéréotypé entre les deux systèmes.
La prise en charge d’un trouble postural ou
d’une pathologie du complexe odonto-gnathique doit faire suite à un examen global intégrant les dysfonctionnements segmentaires et
les troubles toniques des muscles antigravitaires, avec l’objectif de démasquer la logique
des adaptations posturales pathologiques. En
l’absence de niveau de preuve suffisant,
l’implication d’une dysfonction du complexe
odonto-gnathique dans la genèse d’un trouble
postural doit être prudente et raisonnée, pour
déboucher sur une prise en charge thérapeutique conservatrice et non invasive en première intention. Les thérapies manuelles sont
parfaitement indiquées dans ce cadre-là.
Devant le grand nombre de théories et de pratiques très différentes, il est nécessaire de
développer des protocoles de recherche clinique de bonne qualité méthodologique à
l’avenir, en utilisant des approches diagnostiques holistiques et validées. La progression
de nos connaissances et la validation de nos
pratiques sont essentielles dans ce domaine.
RÉSUMÉ
L’existence de liens entre le complexe odonto-gnathique et la posture de l’individu est
indiscutable, notamment dans le cadre de la
pathologie posturale. Malgré l’existence de
réels fondements neurophysiologiques et biomécaniques aux interactions entre ces deux
systèmes, les nombreux travaux de recherche
effectués à ce sujet ne mettent pas en évidence de schéma postural adaptatif stéréotypé en lien avec les dysfonctionnements du
complexe odonto-gnathique. La prise en charge d’un trouble postural doit faire suite à un
examen global intégrant à la fois les dysfonctionnements segmentaires et les troubles
toniques des muscles antigravitaires. Cet examen doit permettre au thérapeute de démasquer la logique des adaptations posturales
Complexe odonto-gnathique et posture
pathologiques. L’implication d’une dysfonction
du complexe odonto-gnathique dans la genèse d’un trouble postural doit être prudente et
raisonnée, pour déboucher sur une prise en
charge thérapeutique conservatrice et non
invasive en première intention. Les thérapies
manuelles s’intègrent parfaitement dans la
prise en charge des dysfonctionnements du
complexe odonto-gnathique et des adapta-
tions posturales pathologiques. Il s’agit d’un
domaine où il est surprenant de constater un
grand nombre de théories et de pratiques très
différentes. Pour faire progresser nos
connaissances et valider nos pratiques, il sera
nécessaire de développer des protocoles de
recherche clinique de bonne qualité méthodologique à l’avenir.
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