cliquant ici - La machine à rêves
Transcription
cliquant ici - La machine à rêves
Miel Schizophrène Miel schizophrène, les propos La prophétie inavouable Chercher sa maladie Mon bon plaisir Mes souvenirs de bébé Sublime intuition Libre dans la vie folle Le syndrome du nourrisson « i », le frisson de l’évolution Cuero na ma Love apocalypse Le général Kati Vampires La nef des fous La famille Seguin Le monde du silence 2001 odyssée du géant fauché Eyes wide shut Rétro-théorème La vache et l'extraterrestre La nuit du crabe Lao-Tseu roi La vague Le miel de la trahison Le zonard du 5ième La belle Jérusalem Dragons Philosophie sur l'oreiller Le faux compère Zorba le pas-Grec Papa shampoing Non-violence Zennerie Moment de métamorphose La petite maison dans le bidonville Le huitième jour Les révoltés du Bounty Le nouvel indien La prophétie inavouable Tout ce que nous apprend l’éducation, à nous qui sommes éduqués, est la chose suivante : Ne nous appartient que ce qui nous a été volé. C’est pour cette même raison de l’éducation, qu’à l’école, bastion de l’éducation, nous devons nous ranger par deux avant d’entrer en classe, pour cette raison encore, que dans la classe, nous sommes chacun fixés avec notre petite table, notre petite chaise, pour cette raison que nous devons nous taire des heures durant quand parle monsieur l’instituteur. Ce monsieur, l’instituteur est là pour nous faire assimiler une sorte de conscience collective, une appartenance à un groupe, à la société. Et le but de ses efforts, bon gré, mal gré, est que nous nous y plions. Celui qui aura été plié sera éduqué, et celui qui aura été éduqué, pourra survivre dans le groupe en toute équité. Au sortir de la scolarité, s’ouvre alors le jeu de carte, c’est la distribution des rôles de chacun. Il y a la carte du plombier, le plombier donc, carte de peu de points, le boulanger, le policier. Nous avons aussi l’ingénieur, carte qui possède plus de points, l’avocat, le docteur. Il y a le directeur général, qui sort de l’ENA et le politicien avec sa science politique, ces dernières cartes sont au sommet des attributions. Ah j’oubliais, dans le jeu, il y a une carte maudite, que tout le monde redoute, car quand elle apparaît sur la table, tout monde doit se plier et abdiquer. Cette carte est le joker, espèce de clown hystérique qui se rit de tout. Une carte qui emporte tout, en donnant à toute chose, la preuve de son contraire. Cette carte, chacun en rêve inconsciemment. C’est l’ultime, celle qu’on redoute aussi, car personne ne la comprend vraiment. Chacun se voit donc attribuer une carte, et cela en relation à ses capacités à avoir assimilé le paramètre éducatif, à pouvoir le générer de nouveau, et cela dans cette perspective de rendre service à l’œuvre collective, à la conscience collective donc. Notre carte est notre identité, tel un rouage qui nous a été attribué, pour faire fonctionner la machine. Ainsi, se déroule le jeu social, chacun avec sa carte. Cela donne au tout comme un air de chanson, avec le constructeur qui fabrique la voiture, le marchand qui les vend, le mécano qui les répare, et bien sûr l’utilisateur qui en profite. Souvent, nous sommes confrontés à des tricheries, c'est-à-dire des rôles qui ne se contentent pas d’eux-mêmes et qui par conséquent, dérègle le jeu. Pour cette raison ont été inventés les limbes, ce que les gens communs appels l’université. L’université est là pour courir après le temps universel, c’est-à-dire donner à chacun une heure compréhensible pour tous. Pour cela, il faut en permanence perfectionner la montre de la conscience collective, c'est-à-dire le temps social. Une pièce qui triche est en fait une pièce défectueuse, qui a mal été étudiée, et qui donc, crée des frottements. La montre sociale n’aime pas les frottements, car cela la dérègle. Il faut alors repenser, comprendre et ré imaginer le mécanisme, pour que la pièce opère sa fonction, sans frottement. Là est la raison de l’université, comprendre, améliorer, pour éviter tout frottement, pour éviter toute tricherie. Celui qui aura vécu se rendra vite compte que la vie ne cherche qu’elle-même : jouir ! Et qu’il ne sert à rien de comprendre l’univers, ni d’y trouver sa place, ni de faire partie d’une machine. L’univers est là, au service de nos bons plaisirs. La civilisation, la conscience collective, ou l'art de mettre l'autre au service de ses bons plaisirs ! Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie, N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins Le canevas banal de nos piteux destins, C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie. (Baudelaire) Terrible dichotomie, que cette réalité, et que l’on pourrait nommer l’inconscient, la non-réalité de cette conscience collective. Cet inconscient, tel un poète en délire, est là, présent. Il ne rêve que de destruction, en contrepoids à toutes ces constructions. Tous ces rouages ne sont pour lui que des bâillements ennuyeux qu’il serait bon d’éradiquer. Cet inconscient, ce mauvais génie de la conscience collective nous susurre de façon permanente, le « Karpediem » salvateur. Les poètes sont pour cette raison aimés, et aussi redoutés, car le poète ne répond qu’à son bon plaisir et en chante les louanges. Pour en revenir au jeu de carte, et comme je l’annonçais auparavant, tout le monde rêve inconsciemment, tout le monde court après cette carte qu’est le joker, car le joker permet tout, il ramasse tout. Dans la jungle sociale, chacun espère un jour arriver au sommet de la hiérarchie, au rôle de celui qui va prendre toutes les décisions, car cette position est celle du joker. Les politiciens d’en haut, tels des poètes, ont le droit de la raison d’État, le droit de tout, le droit du joker. Ils ordonnent, manipulent, peuvent retirer la vie de quelqu’un ou de celui d’un peuple. Il faut bien le dire, ils sont l’égal du poète dans ce sens qu’ils sèment la destruction, et cela au gré du bon plaisir de la conscience collective qu’ils représentent, et qu’il s’agit de servir et d’entretenir. L’histoire ne pourra que le confirmer, l’humanité est bohème et fille de bohème. La vie en général est bohème, fille du poète. À l'instar des politiciens, le poète ne tue pas. Il chante la destruction en rapport à un paradis perdu, mais ne passe pas à l’acte. Il est une épine, pour sortir une autre épine, celle que nous avons enfoncée dans le pied. À quoi sert finalement l’éducation : à nous plier au joug que l’histoire n’est pas bohème, que la vie elle-même n’est pas bohème. Les sciences en général sont là pour analyser les poèmes, pour analyser la vie, et donner comme raison que finalement tout n’est que rouage et que de poésie, il n’y a point. Celui qui aura eu la carte du joker entre les mains vous le confirmera : c’est la carte la plus jouissive. On se rit de tout, et plus encore que de s’esclaffer, on passe notre temps à faire chier le monde. Cela doit commencer par ses parents, puis ses enfants, ses amis, ses collègues de travail, la société, tout le monde sans exception. C’est comme cela que l’on est aimé, c’est comme cela que naît l’amour, et comme cela que se règle le temps super universel, à savoir le temps personnel. Le temps super-universel, le temps personnel ne vit que de frottement et c’est comme cela qu’il génère du bénéfice. Le temps super-universel, le temps personnel est complètement instable. Il hait toute rhétorique, il hait toute ponctitude. Il faut bien le dire, il est fou, c’est le joker, c’est le clown hystérique, à la mesure de l’histoire, à la mesure de l’humanité. Chercher sa maladie Il faut avoir connu Angel pour pouvoir vous le raconter. La cadre : tropicale. Angel est un charmant jeune homme de soixante-cinq ans, on lui en donnerait vingt de moins. Frais comme un gardon sorti tout droit de la rivière, il frétille en de fraîches conversations, convivialité oblige. Personnage de la rue, vaquant d’un carrefour à l’autre, toujours de bonne humeur, et le plus important, son sourire polisson toujours aux lèvres. Je lui demandais un jour : « Mais quel est ton secret Angel ? » Il me fixa alors dans les yeux, histoire de voir si je n’étais pas un imposteur, puis il sortit de sa poche intérieure un petit flacon de rhum. « Mon secret le voilà, c’est ma petite corruption. Une fois le flash terminé, je me sens alors l’âme d’un adolescent, et alors je cours après les filles histoire de savoir si l’une d’elles me fera ses grâces. » Freud nous a bien englués de ses théories sexuelles, il préconisait surtout, que l’amour est le résultat de névroses complémentaires. Pas très reluisant, on pourrait espérer mieux comme rencontre, mais il faut bien l’admettre, il y aurait bien du vrai dans tout cela. De la même manière qu’il y aurait du vrai en affirmant que vivre, c’est chercher sa maladie. Être ou ne pas être, là n'est pas la question ! La question est de trouver le point de combustion entre " l'être " et le " pas être ". C'est la raison même pour laquelle chacun est porté à aller vers les autres, vers le monde extérieur. " Être " en soi n'est rien, n'est pas une fin, ne " pas être " non plus, tout ce qui existe, c'est la danse, la transe, l'extase entre les deux. " Être " devient donc jouir, et ne " pas être " pas jouir, à savoir dégénérer. S'il devait y avoir un Dieu, ce serait donc celui de la jouissance, de la vie, et le diable comme dégénérescence, comme maladie, comme corruption. Les choses vues ainsi rendent le schéma du monde plus simple et plus compréhensible, et plus juste surtout. L'important est de garder l'équilibre entre la vie et sa dégénérescence. Un système tombe quand il y a trop de maladie ou quand il n'y en a pas assez. Avec cette équation, on comprend très bien qu'un système qui arrive à la perfection, sans maladie donc, est un système qui va s'effondrer. La vie est une rencontre, une éternelle rencontre entre soi-même et ce qui n’est pas encore. Ce soi-même n’est pas grand-chose, il ne pourra être dévoilé que dans la rencontre avec le monde extérieur. On a souvent vu « l’être » comme une vertu détachée de l’homme. Je dis détaché de l’homme, en disant existant de façon indépendante, tel un savoir, telle une vérité absolue, indépendante des individus. Vertu qu’il s’agirait de peaufiner jour après jour, telle une œuvre d’art, telle une sorte de Dieu ou d’œuvre philosophique que l'on adorerait et auquel on s’accrocherait. Les choses sont plus simples. Nous ne pouvons séparer un « être absolu », une perfection humaine, un schéma général de l’homme en lui-même. L’individu apparaît au fur et à mesure de ses expériences. Un individu focalisé sur lui-même n’est pas grand-chose, et n’a pas grande marge de manœuvre. Pour s’ouvrir, il devra aller vers ce qui n’est pas lui-même. Il devra aller au-delà du cumul de ses expériences et de l’héritage physique et psychologique qui lui ont été légués. Il devra donc se corrompre, intégrer des paramètres qui ne sont pas lui-même. S’il va vers le connu, rien de nouveau ne se révélera. Il lui faut aller vers l’inconnu, vers sa corruption, vers sa maladie, et c’est pour cette bonne raison que vivre, c’est chercher sa maladie. Être, c’est danser, avec son néant. Si cette danse n’a pas lieu, ou n’a plus lieu, vient alors la maladie, la dégénérescence. En effet, l’individu se voit alors confronter à sa propre consanguinité, il danse avec lui-même, il est lui-même la maladie qui s’empresse alors de prendre ce qui lui appartient. L’homme tombe quand il s’arrête de danser. Fable d’Angel, qui me racontait aussi sa jeunesse, avec ses chemises bien repassées, sa cravate bien nouée, ses petites conversations bien réglées : « j’avais vingt ans et j’étais un vieux » Santé ! Mon bon plaisir Tant de littératures, de théories, de maux de tête pour donner un nom à ce qu’est l’univers, pour lui donner une forme, un sens. Tout un tas d’extravagantes spéculations, qui finalement se contredisent toutes les unes les autres, et n’arrivent à aucune conclusion, hormis les maux de tête. Il ne sert à rien de comprendre l’univers ni d’y trouver sa place, l’univers est là au service de notre bon plaisir. Pourquoi ? Parce que si l’on devait donner un nom à l’univers, ce serait celui de mon bon plaisir. Peu de mots, trois, qui expliquent tout, centre et déploiement de tout savoir, qui englobe la question et sa réponse. Bonne blague bouffonne ? Allez donc expliquer à une fourmi ou à une souris la théorie de la relativité. En vous voyant arriver, leurs premiers réflexes seront de se sauver, tout simplement parce que vous êtes plus gros qu’elles, et que leur premier bon plaisir sera de ne pas se faire écraser par votre pied. Voyez-vous, je ne me trompais que peu. Afin donc d’expliquer l’univers à la fourmi et à la souris, il faudra d’abord s’approcher d’elles, lentement, pour essayer de les apprivoiser. Vous vous rendrez vite compte, aussi, que c’est peine perdue. Pourquoi ? Parce que nos plaisirs mutuels sont trop éloignés l’un de l’autre L’unique chose que vous aurez pu découvrir, c’est le bon plaisir de la fourmi et de la souris, qui n’est pas le vôtre. En cela, la fourmi et la souris sont plus intelligentes que vous, car elles savent que tout ce qui compte en ce bas monde, c’est son bon plaisir, et elles savent de plus que votre plaisir n’est pas le leur. Elles défendent avant tout leurs bons plaisirs, défaits de toutes corruptions, de toute bêtise. Le plaisir de la fourmi et de la souris est sans faille, leurs discours, leurs attitudes, valent mieux que toutes vos théories, vos maux de tête. Voilà, tout a été dit, encore, en peu de mots. J’en vois déjà quelques-uns venir avec leurs grosses loupes, leurs télescopes, pour voir, ausculter cette rhétorique, celle de mon bon plaisir. Ils vont commencer à disséquer, mon bon plaisir donc, qui n’est pas le leur. Ils vont commencer à regarder, comme des voyeurs, comme des concierges. Il faut bien le dire, leurs plaisirs consistent à se mêler des affaires des autres, histoire de les corrompre, histoire de les réduire à néant. Bon plaisir de concierge, bon plaisir de pervers que celui de la loupe et du télescope. Ne soyons pas si méchant. Mon bien-aimé Lao-Tseu situait de façon très correcte les choses : La voie engendre le un Le un engendre le deux Le deux engendre le trois Le trois engendre la multiplicité des êtres La voie est mon bon plaisir, cette jouissance engendre le sentiment de ce que je suis, mon être, l’un. Il faut bien l’avouer, Descartes était fou, dans son « je pense donc je suis », il part du principe que sa folie mène au « je suis ». Le « je suis » vient d’abord de mon bon plaisir, et non de mes maux de tête, ce qui s'écrit : « jouir, donc je suis ». Descartes était malade, et il fait de cette maladie l’outil de sa personne. Après le « un » vient le « deux ». Le sentiment de ma jouissance donne mon être, et automatiquement, ce sentiment de mon être appelle mon non être, mon néant, ma maladie, ma corruption, ce qui n’est pas moi, à savoir l’autre. C’est à ce stade que la notion de l’autre apparaît, fruit de corruption. Le un fait donc apparaître le deux, à savoir la maladie de ce que je suis. Avec cette maladie, et comme je l’avais exprimé dans le texte précédent, je peux danser. De cette danse, de cette sexualisation apparaît le « trois », c'est-à-dire toutes les créatures de ma progéniture, car je peux alors engendrer ma chaire. Nous en sommes donc là : Jouir induit « je suis », et si « je suis » je me mets à penser. Le fruit de mes pensées de ma folie fera apparaître mon mauvais génie, mon néant, mon cauchemar, avec lequel je pourrais danser, danser puis engendrer. Nous pouvons donc remarquer, et c’est bien pour cela que je disais que Descartes était fou, qu’il voyait le monde à l’envers, que c’est le « je suis » qui engendre le « je pense » et non le contraire. Ce qui va en deçà de mon bon plaisir, ne vaut pas mieux qu’un tas de cailloux, et mon bon plaisir se limitera alors à les casser, casser des cailloux. Ce qui va au-delà de mon bon plaisir, ne vaut aussi pas mieux que des cailloux, que je devrais porter sur mon dos. Dans un cas comme dans l’autre, nous sommes réduits à l'esclavage, tout ce qui n’est pas mon bon plaisir me réduit à l’esclavage, de mon propre ennuie ou de l’ennui d’un autre. Mes souvenirs de bébé Dans son livre « Avant Adam », Jacques London retrace au travers de ses rêves, le souvenir des balbutiements de l’humanité, à savoir les premiers pas de nos amis les singes. De la même manière, je retrace au travers de ces vers, le souvenir des émotions et sentiments, de quand j’étais bébé : Mes souvenirs de bébé. Première grosse surprise : D’abord, je ne suis pas né seul, nous étions deux. Moimême bien sûr, et ce que j’appellerai mon absence. Mon absence n’est pas mon double ni mon mauvais génie style Dr. Jacky et Mister Hide. Seulement mon absence, c'est-à-dire ce que je ne suis pas. À l’époque de ma nativité, nous sommes donc nés tous les deux. Je suis né sous un corps physique, lui donc, est né sous la forme d’une absence de corps physique, un corps spirituel dira-t-on. Je n’étais encore rien, lui donc était tout. Ce tout existait en termes de possibilités, et de la fusion de nos deux personnages. Nous formions une promesse pour nos parents, promesse heureuse de ce que nous allions advenir dans les années futures. Deuxième grosse surprise : J’ai toujours existé, et je suis parfait ! Comment pourraitil en être autrement ? Si j’avais – moi bébé – l’idée que je viens de nulle part et que je finirais nulle part, et de surcroît que je suis un grouillon, je lâcherais de suite le téton de ma mère pour me laisser mourir. Mais il n’en est pas ainsi, j’ai le mamelon dans la bouche, c’est l’extase, ensuite je dors, et c’est encore l’extase. Je suis venu au monde, mais j’existe depuis toujours, j’ai seulement eu l’opportunité de prendre chair grâce à mes deux parents. J’ai toujours existé du fait de ma propre absence, j’étais ce que je ne suis pas maintenant. Avec mon absence, je forme ce que vous pourrez aisément comprendre une sorte de continuum. Notre binôme propose à chaque instant, ainsi que sur la longitude de la ligne du temps, une complétude sans faille. Nous sommes sur le plan personnel, collectif et cosmique, l’intégralité de toutes choses, de la pire à la meilleure. Ce continuum a existé depuis toujours : je n’étais avant qu’une possibilité, en relation à ce que je suis maintenant, cette possibilité d’avant ne pouvait être elle-même possible qu’en relation au fait que je devais naître un jour, de par ce fait, je vous le confirme, j’ai toujours été là, accompli. Hermann Hess, autre écrivain, a très bien décrit de ce phénomène dans son livre « l’enfance d’un magicien ». Durant toute son enfance, Hermann est accompagné d’une sorte de lutin gris, un compagnon imaginaire qui quelques fois apparaît lors d’événements extraordinaires, et en général pour l’aider à sortir de situations difficiles. Histoire d’absence, histoire de lutin gris, une chose est sûre, je ne lâcherais pas le téton de ma mère, je ne lâcherais pas mon bon plaisir. Sublime intuition Sublime intuition que celle du Ying et du yang, du Tao. L’insigne du Tao ne prête pas à confusion, il est explicite dans ces moindres recoins. Cette onde blanche qui se mélange à l’onde noire, et chacune des parties contenant l’intuition de l’autre, et sublime intuition aussi, que celle de la danse entre ces deux ondes, entre l’être et le néant. L’insigne du Tao nous l’affirme bien. L’onde blanche, « l’être » contient l’intuition du « néant », et vis versa, ils forment un continuum sexué. Si nous devions donner un nom à la partie blanche, à l’être, et cela à des fins d’explication, nous la nommerions « féminité ». À la partie noire, nous lui donnerions le nom de la « masculinité ». Blanc comme la liberté folle, comme la joie, noir comme la nuit, l’unicité, la psychose. La féminité contient l’intuition de la masculinité, ou pour dire les choses autrement, le sexe de la femelle est la fonction de l’homme. Il en va de même pour le sexe du mâle, qui est l’intuition de la femelle, la fonction de la femelle. La danse peut donc commencer. Chacun des partenaires possède l’intuition de l’autre de par son sexe. Je dirais presque que dans le désir, dans l’attirance sexuelle, vient cet appel du retour aux sources, le sexe de chacun revient vers sa terre, vers ce qui lui est propre. Dans l’initiation au coït, vient d’abord notre mâle faire le beau auprès de la belle, pour la stimuler. La femelle, dans sa fonction féminine, est comme un pénis, hystérique, elle a besoin de stimulation pour s’éveiller, pour se mettre en branle, pour se dresser. Le mâle est ensuite là pour recevoir ce pénis humain. La femelle est stimulée, elle présente alors son intimité, à savoir l’intuition du mâle. Le sexe du mâle, que notre femelle enfiévrée à appeler, se dresse aussi, se réveille, et la femelle reçoit alors dans son précipice ce qui lui appartient. Mouvement du coït, mouvement de danse, de confusion, où l’on ne se sait plus qui reçoit et qui donne, qui est l’intuition et qui est le fondement de cette intuition. On ne sait plus qui est le mâle et qui est la femelle. Puis vient l’orgasme. L’ovule, l’unicité est fécondée par la multiplicité des spermatozoïdes, l’un d’eux viendra s’accrocher à l’ovule qui migrera alors vers la matrice. Belle petite démonstration, qui pourra paraître à certains un peu ringarde, mais il en est bien ainsi, de la sublime intuition. Le tao va au-delà de la masculinité et de la féminité, le tao de par son Ying et son yang embrasse tous les phénomènes dans toutes leurs splendeurs. Il est la définition même de ce qu’est un continuum, et comment fonctionne ce continuum, via le processus de sexualisation. Tao comme source du continuum de la vie, rencontre entre deux forces, entre « l’un et le multiple » entre « l’hystérie de la multiplicité » « et « la psychose de l’unicité ». Au-delà de ce petit conte, et pour passer à un autre sujet, nous pouvons voir toute l’hypocrisie qu’ont refoulé les écrits de notre histoire universelle. Tout d’abord, le néant vient de l’être, l’être venant du bon plaisir de chacun. Le « notre père qui êtes aux cieux » fait alors triste figure. Bon Dieu dans sa forme d’unicité, dans sa forme de psychose, dans sa forme de néant. Le néant vient de l’être, et donc si nous devions donner une consonance sexuelle « aux cieux », nous devrions donc accepter qu’il soit avant tout féminin. Une femme donc, pas un papa, une maman, ce qui semble des plus logiques. C’est d’abord la femme qui enfante, qui donne la lumière, et quand vient l’enfant au monde, il prend le sein à sa mère, pas à son père. Le père vient après, après la mère. Toute créature se voue d’abord à « l’être », le néant vient après. Dans cette perspective, Adam viendrait d’une côte d’Eve, et pas le contraire. Il y avait le paradis, dans ce paradis, a jailli Eve. Dans son ennui, elle s’est sortie une côte, et quand Adam est apparu que le paradis s’est corrompu … Bref, du début jusqu’à la fin, on nous a raconté que des conneries, de pomme il n’y en avait point, hormis celui qui est conduit à croire à ce genre de sornette. Au-delà de ces disputes, à savoir qui a raconté le plus de conneries, il y a le fait que la féminité, l’être, est une force, et que la masculinité, le néant, est aussi une force. La rencontre des deux donne la vie, génère le continuum de la vie. Avant le continuum de la vie, il y a la vie elle-même, à savoir une possibilité en respect à un destin, le tout enrobé d’un voile de mystère, mystère aux allures de mon bon plaisir. Libre dans la vie folle République Dominicaine, 2001 À Yaraïda qui m’en a donné le goût. Le paradis, contrairement à ce que l’on pourrait s’imaginer ou croire n’est pas rempli d’oiseaux multicolores batifolant au milieu de paysages idylliques, aux murmures des cascades et de ruisseaux scintillants. Le paradis est rempli de gens à moitié fous. Les mouches tourbillonnent et vous collent à la peau. Les ordures traînent de-ci de-là, partout, lancées par ces mêmes gens à moitié fous. La maladie déforme les corps. Les « maricones » (Homosexuels) tombent leur partenaire en l’espace d’une danse, les sexes des hommes et des femmes sont là excités prêts à se vautrer les uns dans les autres ; les corps souillés de sueurs frémissent dans le vice des sens. Ce qui fait la qualité d’un paradis, c’est qu’il n’y a rien de sale, tout y est propre, non au sens propre mais au sens figuré. Pas de honte, pas de culpabilité, pas de pêcher, tout s’accomplit naturellement dans la jouissance de l’instant présent. C’est en remontant la route qui va vers le nord, depuis Santo Domingo, que l’on tombe sur la vallée du Cibao. On remonte peu à peu la vallée, puis apparaît la chaîne de montagnes de la cordillère centrale, avec à ses pieds, la ville de Bonao. Bonao est le commencement du paradis. Yaraïda a grandi à Bonao, Yaraïda est de Bonao, et elle était pour moi, un bon prétexte à des escapades vers ce lieu mirifique. Yaraïda est éblouissante, pas physiquement, mais spirituellement dira-t-on. Une bonne humeur permanente faite de rire et de blagues, une joie de vivre permanente et contagieuse. Avec Yaraïda, nous avons fleureté pendant une année. C’est maintenant chose révolue. Elle m’a cependant appelé, une démangeaison au bas du ventre m’explique-t-elle, une envie de me voir, de me croquer. Malheureusement, je ne suis pas disponible lors de son invitation, je viens donc un mois plus tard, par surprise à mes amours perdus. Qu’elle surprise en arrivant. C’est la mère de Yaraïda qui me reçoit, elle m’apprend que sa fille est tombée enceinte, c’est tout récent. « Que perra que esta Yaraïda ? », elle m’a invité dans un traquenard, histoire de me faire porter une paternité qui n’est pas la mienne. Ne t’inquiète pas ma belle, comme diraient les Mexicains, l’amour se paye avec l’amour. Je reste donc avec toute la famille. Un des beaux-frères, l’époux de Anaïris qui est elle-même sœur de Yaraïda, me promène dans sa voiture pour la tournée des grands ducs. On boit beaucoup, on voit de nombreux amis, et surtout, les nombreuses maîtresses que compte le larron. Le lendemain, histoire de continuer la fête, on se retrouve tous au « rio », à la rivière. Petite tenue exigée, grande bouteille de rhum débouchée, on coule un après-midi heureux fait de bulle aquatique et éthylique. On en profite aussi pour danser dans un petit boui- boui posé là au bord de la rivière. On est là, à boire et à danser dans nos tenues ruisselantes d’eau et l’esprit éméché par quelques grammes d’alcool. Je sais depuis longtemps qu’Anaïris est secrètement amoureuse de moi, ses petits regards furtifs en disent long. Elle ne faisait seulement qu’attendre son moment. Yaraida est d’une beauté régulière, Anaïris à des allures de Miss Univers. Il faut bien l’avouer, le Cibao, de par son mélange de sang, a cette vertu de produire des Miss Univers à chaque coin de rue. Beauté irréelle, visage sculpté à merveille, corps aux contours indiscutable, et surtout, une gentillesse hors pair. Nous nous retrouvons donc à danser ensemble. L’alcool a décuplé nos sens et rompu la barrière de la bien séance. Le fluide délicieux de l’amour circule autour de notre couple et nous enveloppe de ses délices. Nous tournons, valsons, dans l’excitation des sens. Le mari lui s’est trouvé une donzelle avec qui danser, et notre mascarade ne semble pas l’intéresser outre mesure. Les meilleures choses ont une fin, et chacun retourne chez soi, la tête et le corps farci de plaisir. Le lendemain, toute la famille se retrouve de nouveau. Je sais comme dans un rêve, le monde réel s’est dissipé pour laisser place à une ambiance de conte de fée. Il manque une tomate pour faire la cuisine, Anaïris se propose d’aller la chercher. Je m’empresse de la suivre. Nous étions dans notre bulle. Nous ne le savions même pas, mais Bonao est sur le coup d’une insurrection. Chez nous, cela porte le nom de grève, en République Dominicaine, on parle d’insurrection. Le peuple s’est levé, furieux, pour d’habituelles injustices. Le peuple a sorti les fusils à pompe, en face, la police et les militaires pour répondre avec des armes automatiques. La ville est un paysage de guerre urbaine. Des pneus brûlés jonchent les routes de toutes parts, voitures défoncées, et d’incessants tirs d’armes à feu qui crépitent. Anaïris est au guidon de sa petite mobylette, avec moi derrière. Nous circulons dans les rues désertes, avec cette vocation de trouver une tomate. Il faut bien l’avouer, le spectacle de cette destruction ne nous intéresse pas trop, voir nous stimule, car c’est l’heure de notre déclaration. Accroché derrière Anaïris, je lui passe les mains subrepticement sur les seins. Dans l’entrecuisse, je la caresse sensuellement, et elle de goûter mes fièvres, qu’elle accepte, en toute humilité, en toute complicité. Il faut bien voir la chose ainsi, car nous avons dû faire trois fois le tour de la ville avant de trouver la tomate. Notre déclaration s’est éternisée, au crépitement des M16, des coups de fusil à pompe et des jets sporadiques de quelques cocktails Molotov. Le temps s’est arrêté par trois fois, les trois tours de la ville, et cela nous a semblé une éternité. L’éternité d’une fleur qui s’ouvre, l’éternité d’une déclaration. Finalement, la tomate a été trouvée. Les choses sont rentrées dans leurs ordres naturels, Anaïris avec son mari et Yaraïda voulant me faire porter son enfant. Puis, je m’en suis retourné à mon bastion. Je n’ai revu Anaïris qu’un mois plus tard, à Sosua, dans mon fief. Nous avons réussi l’un et l’autre à nous échapper de nos obligations, et nous nous sommes retrouvés sur une plage déserte, en pleine nuit, sous un magnifique clair de lune. Nous nous sommes aimés sur la page, là où la mer lèche le sable dans son flux et reflux. Soirée inoubliable, faite de claire de lune, de cocotiers et de clapotis d’eau. Ce n’est qu’à la fin de nos ébats que la bulle de notre rêve a éclaté. Anaïris a fondu en larme, a pris son visage entre ses mains et s’est écrié : « Qu’ai-je fait ! » J’avais oublié de lui dire, mais Anaïris, plus que d’être une épouse, est aussi mère de quatre enfants. Qu’avais-je à lui répondre, si ce n’est que la vie est folle, et qu’il ne nous reste qu’à goûter à cette folie, sans honte, sans culpabilité, sans péché, où les corps souillés d’eau fraîche, frémissent dans le vice des sens, car la vie folle est avant tout sensuelle, sexuelle. Nous n’avions d’autres alternatives que celle d’accomplir nos fièvres, et à nous vautrer l’un dans l’autre, une fois encore, et de tomber dans le précipice. Elle essuya donc ses larmes, et le loup se mit à gémir une seconde fois. Deux fois valent mieux qu’une, il n’y a alors aucun repentir acceptable. Le syndrome du nourrisson Notre nourrisson est là, la bouche ouverte, prêt à recevoir le téton de sa mère. Expérience la plus intime et la plus sublime pour l’être qu’est le nourrisson. Si le téton se refuse à la bouche, et voilà notre créature en pleure, à se tordre de colère et de douleur. La première confrontation d’un individu face à la vie, est l’expérience du téton. Le bon plaisir du téton est là, indéniable. Les choses se compliquent quand l’un des belligérants, c'est-à-dire la bouche ou le téton, veut plus que ce que le bon plaisir oblige. Un nourrisson tétant trop, et voilà notre bonne maman réduite à l’état de vache. Une maman aimant trop se faire téter, et voilà notre nourrisson réduit à l’état de veau. Dans un cas comme dans l’autre, nous sommes dans une situation de discorde, dans une situation proche de la pathologie. Cet état de pathologie est ensuite enfoui dans les tréfonds de l’oubli, partiellement tout au moins, dans l’inconscient diraient les freudiens. Cette mauvaise combustion, cette fumée noire de la discorde entre le téton et la bouche sera bien présente dans l’individu. Ce sera son fondement, son sang, et toute sa vie, il se définira comme un veau ou comme une vache, veau à vouloir téter, vache à se faire téter. Tous les spéculateurs boursiers du monde sont des veaux en puissance, et il faut bien le reconnaître, cela relève de la maladie, de la pathologie. À quoi sert-il de gagner des millions, quand on en a déjà trop en banque, si ce n’est que cet éternel besoin de téter, de sentir l’émotion du téton dans la bouche qui va vous donner son lait, et sur lequel on s’accroche de manière frénétique. Ce besoin de toujours plus, ce besoin d’avoir la bouche pleine de lait, est le résultat de ce syndrome du nourrisson. Voilà où nous en sommes, avec nos spéculateurs boursiers, bande de veaux tétant. Il faut cependant bien comprendre que quand il y a un veau, il y a une vache. La vache est celui qui va se faire téter sans broncher, patiemment, et en toute humilité. C’est le chinois, la pakistanais, l’africain, le pauvre en général, celui qui travaille pour un bon salaire journalier d’ un Euros par jour, celui qui donne son bon lait. La relation pathologique de la bouche et du téton mènera donc notre individu à générer des situations, des systèmes faits de veaux et de vaches. Pour cette raison même il spécule, il crée une scission. De cette scission naît une devise, qu’il fait ensuite monter et descendre tel un yoyo, pour à chaque fois générer un bénéfice, le bon lait donc. Devise : Euros, Dollars, Yen, Dirham … Corrompre en spéculant, en créant une scission, qui développera une énergie, un potentiel, qui se transformera par la suite en devise, et plus qu’une devise, un pouvoir. Les brillants individus de notre histoire universelle nous ont fait comprendre, que plus que le lait maternel, tout est négociable, tout peut être corruptible, converti en devise. Il s’agit simplement de spéculer, à savoir créer la scission, générer une vache et un veau. On peut spéculer sur la sagesse, la corrompre, de cette corruption naît la philosophie. On peut spéculer sur l’amour, et l’on obtient la chrétienté. On peut spéculer sur le sentiment de supériorité, et cela donne Hitler. Les USA spéculent sur la guerre, Sade spécule avec la douleur, Gandhi avec la non-violence, la liste pourrait être longue … Au final, nous nous trouvons nez à nez avec une vache et un veau. L’église tétant les pauvres, c'est-à-dire les impuissants de l’économie, et cela à travers la dîme, pour cela il n’y a qu’à regarder le fabuleux trésor du Vatican. Les philosophes tétant les impuissants de la vie en leur faisant acheter des livres et des idéaux bon marché, le but étant à un moment ou à un autre d’accumuler un colossal trésor. Les psychiatres avec leurs névrosés, les docteurs avec leurs pilules … il faut bien le dire, tout le monde s’en fout plein les poches. Nous sommes sur les terres sacrées de monde animal, de la nature, de l’univers, où il doit y avoir un vainqueur et un vaincu, où règne la loi du plus fort, du plus malin, du plus spéculateur. C’est le vent de l’évolution dont la finalité est de générer un bénéfice. Reste à définir qui est qui : qui va se faire téter et qui tétera, qui sera le puissant et qui l’impuissant. Reste donc à définir la situation ou le système de la scission, et de la faire accepter par tous, de gré ou de force, par la raison ou par la confusion. Là intervient le monde du savoir, qu’il soit religieux, philosophique ou technologique : Comment convaincre l’autre à la soumission ? Comment le convaincre de se faire vampiriser ? Voilà où nous en sommes, voilà ce en quoi nous pouvons prétendre, et quelles peuvent être nos ambitions. Les choses devraient rester ainsi, le veau tétant sa vache. Proclamer l’égalité à mener à des bénéfices gigantesques, du jamais vu dans l’histoire universelle. En créant cette scission du puissant et de l’impuissant, et cela à grande échelle, au travers du sentiment démocratique, démocratie comme la paix chez et les voisins pour se faire téter, l’Occident a inventé une monstrueuse exploitation agricole pour veaux et vaches. Nous naissons libres et égaux en droit … mais cela vaut chez soi, pas chez les voisins. À un niveau hors de chez soi, international donc, le droit est toujours celui du plus fort, scission donc entre le puissant et l’impuissant, création de la vache et du veau. À chaque fois que l’Occident lâche une bombe dans un conflit, puissant soumettant l’impuissant, et cela dans des rapports de force de mille contre un, il perd de sa crédibilité, car il montre alors son vrai visage, celui du spéculateur, et il prépare mieux que toujours sa chute. Qui aime les vampires ? Les vampires doivent agir dans l’obscurité, ils ne peuvent survivre dans la lumière, car ils sont alors hués, lynchés, taillés en pièces puis jeter aux cochons. Ousama Ben Laden l’avait bien compris, il a commencé à tirer une bombe sur les américains, eux-mêmes ont répondu avec un million de bombes sur l’Irak, et sans s’en rendre compte, ils ont perdu. À chaque fois, les Américains tombent dans le même piège, dans la même erreur. Terrorisme comme appel à « foutez-nous des bombes sur la gueule », car au final, vous perdrez. Le hasard des choses a voulu que Georges W Bush soit président lors des événements du 11 septembre. Les événements se sont construit avec Georges W bush. Il faut bien le dire, Georges W. bush est l’idiot du village, il est tombé dans le piège et a fait tomber les USA avec lui. Ousama Ben Laden est un fin spéculateur. Il a gagné, ce jour du 11 septembre 2011, les USA sont tombés de leur Olympe. Je vois cependant se dessiner dans les limbes, une nouvelle fumée blanche, une nouvelle combustion, de celui qui spécule sur les spéculateurs. Les champs et possibilités sont illimités, infinis comme la disgrâce et la frustration qui règne sur cette planète. Celui qui comprendra cette science, du spéculateur des spéculateurs sera élevé dans la voûte céleste du roi des maquereaux, et le monde lui appartiendra, tel un immense filet qui attraperait tous les poissons. « i », le frisson de l’évolution Je me souviens d’un professeur qui demandait à ses élèves : « qu’est-ce que l’intelligence ?» Chacun s’empresse de répondre, du mieux qu’il peut, en donnant son point de vue, le plus intelligent possible vous vous l’imaginerez bien. À tout ce fracas de réponses, en surgit une, belle, resplendissante. « L’intelligence » s’exprime la damoiselle, c'est cette faculté à savoir vivre dans son milieu, à être heureux dans le milieu ambiant, à être heureux avec les siens. Réponse darwiniste, en relation avec l’évolution, ou l’intelligence est cet art, cette faculté, comme celui du marin, de prendre le vent, le vent de l’évolution. Si ce jour-là notre damoiselle aurait eu la bonne idée d’accélérer un peu son raisonnement, pétard aidant, il lui serait alors aisément venue à l’esprit, que plus que prendre le vent de l’évolution, il serait plus judicieux d'être le vent de l’évolution, sommet, Everest de tous évènements. « i » est un personnage imaginaire, un peu comme le Marsupilami de Spirou et Fantasio. Le cri de ralliement de « i » est un « Hiiiiiiiiiiii » strident, un cri qui déchire, proche de l’hystérie. Quand vous étendez ce cri, vous êtes pris de frisson, car il s’agit du cri de l’évolution, évolution comme imaginaire pure, où le rêve et la réalité se confondent, et où la vie devient semblable à un rêve. Heureux celui qui aura entendu ce cri, heureux celui qui aura senti le frisson, car il s’agit d’une réminiscence qui vous ramène à vous-même, quand la vie est semblable à un rêve. Le parcours pour arriver à « i » est un long parcours, semé d’embuches vous vous l'imaginerez bien. Nous en restons en général à une humanité de nourrisson, au syndrome du nourrisson, ou comme je le citais dans le texte précédent, le monde est divisé, s’articule entre des vaches et des veaux. Individus collés à une mamelle, que ce soit celle de la patrie, de la famille, des amis, de ses amours ou de son idole, état de nourrisson, syndrome du nourrisson. Ce syndrome est la première étape de la vie, de l’évolution, ou temps bien que mal nous ne faisons que survivre. Dimension où l’initiative relève du zéro, dimension du nourrisson, dimension du zombie. Il est cependant possible de faire passer notre individu à l’étape suivante. Cette deuxième phase de l’évolution, est celle de la vie. Après la survie, la vie. Notre individu est alors un compromis entre le zombie et l’imagination, une espèce de limbe schizophrène où les créatures sont prises dans la dichotomie de la vie, eternel rebondissement entre la tentation de l’obligation et celle de la liberté. Situation difficile, conflictuelle, où on est tenté de rester sur sa mamelle, et aussi de se lancer vers l’appel du grand large. Conflit entre le zombie et la vie imaginaire, qui donne lieu à une confrontation permanente, à des troubles permanents. Les individus de cette deuxième génération, sont au sens social, des montres, car sujet à la fameuse dichotomie de la vie, pris dans l’éternel écartèlement de la culpabilité et du déni de la culpabilité. Ces individus de deuxième génération sur l’échelle de l’évolution font en général peur, car la dichotomie amène à des visages contorsionnés. Vivre fait peur, car vivre est une déchirure permanente. Faire passer un individu de l’état de nourrisson, de zombie à l’état de schizophrène est simple. Le zombie est très vulnérable car il ne peut comprendre que le langage de la culpabilité. Lui faire comprendre, lui suggérer que téter une mamelle relève d’un délit, d’un crime, et cela de gré ou de force, créera chez lui une rupture profonde qui le fera basculer à l’état de schizophrène, la deuxième étape de l’évolution, celle de la vie. "i » se situe dans cette sphère défaite de toute culpabilité, de toute attirance à quelques mamelles que ce soit, il les tient toutes en horreur, il s’éloigne dès qu’il en voit une apparaître. « i » est le vent de l’évolution, qui suit l’onde de la vie tel un rêve, il imagine son bon plaisir, et celui-ci, de retour, lui tend la main. Il n'y a rien d’étrange à cela, car telle est la nature profonde de l’univers, imaginaire pur, un bon plaisir faisant des bulles, rien que des bulles. Frisson indescriptible, frisson qu’il est préférable d’ignorer, car alors tout bascule. Ce livre, « Miel Schizophrène » ne s’adresse pas aux zombies, car ils ne pourront pas le comprendre, ce livre leur fera peur, peur de sombrer dans la vie, au second niveau du vent de l’évolution. Comme je l’ai déjà dit, vivre fait peur, les gens vivants font peur. Ce livre s’adresse aux individus vivants, pour leur donner la force, la nourriture et l’inspiration de passer à « i », à la troisième et dernière génération de l’évolution, et cela afin d’être le compagnon de l’imagination, de la vie semblable à un rêve. Frisson préférable aux meilleurs des drogues, préférable au sexe, l’ultime venin, celui du mystère. Cuero na ma Platon a été extrêmement clair, l’amour mène aux larmes, et si les larmes ne suffisent pas, au sang. Il ne l’a pas dit comme cela, car il ne parlait ni de larmes ni de sang, il s’interrogeait sur les passions, et le fait que plus celles-ci sont extrêmes, naturellement, plus importante est la destruction. Il préconisait donc l’amour sans amour, à savoir la stérilisation de l’amour, amour qui ne génère plus d’effets. Tout cela est-il bien raisonnable ? Les Sud-Américains, avec leur Samba, leur Salsa, chantent l’amour, ils le distillent, l’élèvent en de sublimes chansons, faites de percussions, de chocs, de rythmes plus endiablés les uns que les autres, comme un hymne à l’amour. La plus réussie de toutes les salsas, la plus majestueuse, la plus enivrante, la plus finie à mon goût est celle intitulée « Cuero na ma ». Les uniques paroles de la salsa sont cet éternel refrain « cuero na mas, cuero na ma …, délicieuse musique, délicieuse folie ou les différents instruments résonnent les uns avec les autres, cela est presque orgasmique. « Cuero na ma », pour la traduction, signifie « une pute, rien de plus ». Gloire à l’amour dans toutes ses extravagances qui ne vaut pas mieux qu’une pute, l’amour est une pute. Ho ! Blasphème. Reprenons le chemin de Platon, qui n’a pas été jusqu’au bout de son raisonnement, de l’amour qui mène aux larmes et au sang. Une fois que ces deux derniers où l’un d’eux s’est annoncé, il faut bien retomber sur ses pieds, chacun doit rapporter une compensation, compensation pour que chacun se sente bien et se retrouve lui-même en toute quiétude. Si l’amour a failli, ou nous a tendu un piège, il faut donc une réparation, et la réparation est pécuniaire. L’argent posé sur la table sous forme d'un diamant, d’une belle voiture ou d’un chèque chez l’avocat, est la seule manière de résoudre le problème, le problème de l’amour qui détruit. Voilà! La dernière étape de l’amour, omis par Platon, c’est qu’il doit être réparé, la fissure doit être colmatée, et cela avec des billets de banque. Toutes les bonnes ou mauvaises « Novela » du monde nous l’aurons appris. Il faut payer, et c’est dans ce sens que je soutiens que l’amour est une pute, un jour ou l’autre apparaîtra le diamant, la belle voiture ou le chèque chez l’avocat. L’amour a son langage, je dirais même qu’il a son bon plaisir, et le bon plaisir de l’amour est donc de se faire payer. Que ce soit notre ami Platon ou notre fils Jésus, les deux ont spéculé sur cette devise de l’amour, ils ont spéculé sur elle pour la faire baisser de valeur, pour la rendre en deçà de sa valeur réelle. Le résultat est celui de la tristesse et de l’ennui. N’a-t-on pas vu chose plus ennuyeuse qu’un amour plat ! Ou de tendre la joue quand on vous gifle, dans les deux cas, c’est la fin des hostilités, l’arrêt des combats, et chacun rentre chez soi, stérilisé. Nos amis Platon et Jésus sont sages. De l’autre côté, à l’antipode de ces mets sucrés, il y a les voyous, les délinquants, ceux qui spéculent en surenchérissant sur l’amour, pour cela les femmes les aiment tant, car la devise est forte, cependant l’amour devient semblable à une obsession dévorante. Dans un cas comme dans l’autre, de la sous-enchère ou de la surenchère, l’individu qui spécule se fait rouler, car il est dans un cas comme dans l’autre réduit à l'esclavage, esclavage de l’ennui, esclavage de l’excès. Notre bon ami Freud était plus lucide quand il préconisait que l’amour est le résultat de deux névroses complémentaires. Pour être plus explicite, un excès qui rencontre un manque. Imaginons que les individus soient comme des gâteaux. Un gâteau réussi est un gâteau ou les doses d’ingrédients ont été respectées, les unes en harmonie avec les autres. Trop de farines, pas assez d’œuf, et notre bon gâteau aura la tronche du mauvais goût, de la névrose. L’individu névrosé est celui à qui il manque quelque chose ou qui en possède en excès, ce qui se traduit dans ses relations avec le sexe opposé par l’ennui ou l’obsession. L’amour, naturellement, connecte ce qui manque et ce qui excède, et comme deux bacs reliés l’un à l’autre, les quantités s'équilibrent. Cette rééquilibration se fait dans la douleur, car elle relève de l'évolution, et suivant le degré de névrose, elle s'opérera avec les larmes ou avec le sang, puis, au final, apparaîtra le diamant, la belle voiture ou le chèque chez l’avocat. Ne plus vouloir l’amour, surenchérir sur lui, vous n’aurez alors que le résultat d’une multitude de gâteaux aux salles tronches, qui n’auront d’autres destinés, chaque matin que se regarder dans la glace, et désespérément de s’écrier « Quelle salle tronche », et cela sans remède possible. Les spéculations sont donc mauvaises, après, tout relève de l’art de chacun à savoir se situer avec l’amour, et de s’en faire un ami, un ami qui consiste en « gosar mucho y gastar poco », à savoir bien profiter et dépenser peu. Je ne peux croire en la défaillance de Platon, qui nous aurait dit seulement la moitié des choses, choses par ailleurs que tout le monde sait, et qui relève du savoir populaire. Platon avait sûrement des choses à cacher, comme qu’il n’aimait pas payer pour l’amour, qu’il refusait catégoriquement de payer. Chez les latins ce type de personnages a pour nom « el chulo », chez nous, un maquereau, une personne qui vit au crochet de l’amour, histoire de se faire entretenir et de se faire inviter à tous les banquets. La sagesse est le travail de l’amour. Spéculer sur le travail de l’amour, c’est être un maquereau, pour cette raison, je ne peux que prétendre que Platon était un coquin. Sur ce, je vous souhaite bon vent dans vos amours. Love apocalypse Celui qui prétend rendre hommage au roi des chiens, le grand baiseur de toutes les femelles, celui-là oui est prêt pour le spectacle de « Love apocalypse ». Tout conte cauchemardesque se doit de commencer par des petits airs de paix et de plénitude, c’est ce qui s’appelle, confondre l’ennemie. Respectons donc ce chemin, et approchons-nous du lieu où se lèvera la tourmente. Sosua Abajo, Sosua « d’en bas » ( si l’on va de l’Espagnole vers le Français ), est un petit quartier populaire du district de Sosua. Pour se rendre à Sosua Abajo, on part de la route principale que va sur Puerto Plata. On descend. C’est en arrivant en bas que l’on tombe sur le fameux quartier. Il suffit alors juste de tourner sur la gauche, au feu. À l’époque, Sosua abajo n’était pour moi qu’une consonance, un lieu-dit dont j’avais entendu parler. Le hasard de mes balades m’y avait amené. Arrimé sur ma moto, je sillonnais les dédales des rues. Une maison d’emblée attira mon attention. Je l’avais entrevue dans un rêve. Les fenêtres de la salle, plus haute que large, faisaient penser aux vitraux d’une église. Par ailleurs, la maison était isolée, comme sur une île, identique à ma prémonition, une église sur une île. Dans ce songe, j’étais avec mon bien-aimé, nous revenions de notre mariage, moi en complet, elle dans sa robe blanche, et nous volions vers notre destination qui était cette église sur l’île. Regina, la propriétaire de la maison me reçut, aimable au plus haut point, souriante, tel un ange. Elle a du mal à marcher les escaliers qui mènent au second niveau de la maison, et cela pour aller voir l’appartement qu’elle désir louer. Regina est enceinte, cela explique l’escalier qui lui semble long à gravir. L’appartement vient d’être terminé, il reste juste quelques retouches à régler, tel que la peinture, poignées de porte… Un fluide passe entre nos deux personnes, on appelle cela un bon feeling. Nous nous mettons vite d’accord, pour la semaine qui suit, l’appartement sera mien, en tant que locataire tout en moins. Je suis encore jeune, et je n’ai de ma vie, possédé quoi que ce soit, ni tant soit peu un lit pour dormir. L’appartement est grand, cela fait un peu vide, telle une église où le moindre bruit se répercute et résonne d’une pièce à l’autre. Entre-temps, je me fais prêter un lit. Il n’y a donc que lui dans la maison, dans cette grande demeure de quatre chambres. Je l’installe en plein milieu de la salle principale, ce sera mon trône. La première créature à avoir mis les pieds dans l’appartement, c’est Mabel. Jeune mulâtresse que j’avais rencontrée à Boca Chica et qui pour fuir sa famille vint se réfugier chez moi. Mabel a tout de la perverse, ses jeux, idem pour son rire. Tout chez Mabel relève de la fièvre et de l’orage. On ne l’entend pas parler le jour durant, puis, en fin d’aprèsmidi, l’orage éclate. Elle est alors comme prise de folie, et se met à rire à la manière des déments. C’est alors seulement que nous pouvons commencer de nous amuser, car alors, rien ne l’effraye, nous savourons sans retenue le met exquis de la jouissance. Jouissance intense et perverse, nos ébats se terminent toujours par des jeux s’approchant de l’intimidation, voire de l’appel à la torture. Cela va pour un temps, je ne suis pas prêt à grimper cette montagne, ni à m’habituer à ce genre de dérèglements. Je demande donc aimablement à Mabel de rentrer chez elle, et c’est non aimablement qu’elle se décide à rentrer. Ouf, un peu de tranquillité. Mais toute paix, pareillement à la perversité, à ses limites, et l’ennuie arrive vite au triple galop. Tous les jours, je vois passer Lucie, une voisine, autre donzelle aimable que j’invite à boire un café. Tout se passe sur le lit, car il n’y a que lui où s’asseoir. Lucie vient maintenant quotidiennement boire son café. Elle m’invite aussi un jour à la plage, et c’est là que je rencontre Karina. Douce Karina, tellement belle, tellement radieuse. Elle aussi aimerait bien déguerpir du toit familial, « j’étouffe » me dit-elle, « entre mon père et mon fils, j’aimerais vraiment un peu d’air ». Ainsi soit-il. Karina arrive un beau jour à la maison, sa petite valise à la main. Elle ne restera pas longtemps, rien que deux petites semaines. Un peu comme dans les contes de fées, c’est le premier contact, celui que vous lie à jamais. Malheureusement, un ogre est là, jaloux de notre relation, et il nous a séparés. Cette amourette a cependant mis le feu aux poudres, autant Mabel m’avait peu impressionné, Karina elle, m’a mis le doigt dans l’œil, et j’en suis tout remué. Karina est finalement partie, mais ce n’est que le début d’une longue et sinueuse histoire. Je suis de nouveau seul, avec le sang en émoi. Je vais donc rendre visite à Mabel, et finalement reviens avec Maribel, encore une autre donzelle. Que ce soit avec les unes ou avec les autres, toutes finissent allongées sur le lit, les pattes en l’air, à chanter gloire à Dieu. Le sceau officiel et invisible qui fume là, au-dessus de la porte de mon appartement, c’est un chien couronné. Maribel est attachante, mais ses copines lui manquent, elle repart donc pour Boca Chica. J’en profite pour rencontrer de nouveau Karina. Elle ne vit plus chez moi, mais je la vois régulièrement, histoire de lui conter fleurette. Maribel est toujours ravie de revoir ses amis, mais d’elles aussi elle se fatigue, et finit donc chez moi. Je vous adore, les unes et les autres. Mieux vaut cependant qu’elles ne se rencontrent, l’accrochage est alors de mise. Tout n’est qu’une question d’administration, bien regarder l’heure, rien de plus. On a bon être un architecte du temps, les heures sont là, avec ses bagarres qui ne font qu’enivrer un peu plus tout ce petit monde. L’onde sensuelle qui est entrée dans cette maison est en train de se propager, elle commence aussi de tourner sur elle-même, de plus en plus rapidement, et à prendre de la force. Lucie m’a fait connaître Marisol, sa sœur, elle-même entourée d’une myriade d’amies. Les quatre chambres sont vite occupées d’une ribambelle de femelles, qui passent leur journée, à se faire les ongles et à se chamailler pour une culotte qui a disparu. Le devant de la maison est devenu la cour de récréation du quartier. Il s’y déroule tout type d’aventures, on vient s’y donner en spectacle, burlesque, érotique, de boisson et bien souvent aussi de heurts. La terrasse de l’appartement est spacieuse, et nous sommes là, les énergumènes d’en haut, à acclamer ce spectacle de rue, comme on le ferait dans une arène. Personne ne travaille, personne ne prétend à rien, nous sommes tous oisifs, en attente d’une quelconque aventure, que nous n’avons même plus besoin d’appeler, elles surviennent toute seule, sans frapper à la porte. Les voisins commencent à se plaindre, entre les gémissements des amants qui jouissent, et les insultes de ceux qui se bagarrent, c’en est trop. La tornade a pris trop de vitesse, et il faut bien l’avouer, elle est devenue incontrôlable. Lucie qui maintenant vit de façon permanente dans cet antre du diable, est souvent sujette à des crises d’épilepsie. La folie gronde, bientôt, c’est à coup de couteau que se règlent les histoires, le sang coule. Les habitants de cette maison sont tous devenus un peu fou, on se sait plus ce qu’on fait, qui on aime, on est là comme des chiens en rut, à copuler le ou la première venue, pour ensuite se battre, c’est « love apocalypse ». Il faut malgré tout une morale à toute chose, une fin. Un peu comme dans la nouvelle d’Edgar Poe « la Chute de la maison huchère », la maison de Sosua Abajo a été engloutie. Peu importe comment, ni pourquoi. Tout le monde a fui, en courant. Je suis là, seul, au milieu de l’appartement vide. La dernière créature à y être entrée, c’est Kati. À crier au loup, et voilà le diable qui rapplique, il est venu sous la personne de Kati. Les gens ont fui la maison de Sosua Abajo non pas pour les événements qui s’y déroulaient, mais pour Kati. Kati a tout détruit, mon beau jeu, ce beau refuge pour halluciner. Depuis, je vis avec elle, Kati, la tourmente de ma vie, ma tornade, mon ouragan. Kati, tel le démon à toujours les yeux rouges, injectés de sang, on ne se sait plus si c’est les nerfs à vif, ou l’excès de rhum, mais la rumeur est là, Kati c’est le "démonio" , une Calamity Jane version tropicale. Si l’on écrit Kati à l’envers, on tombe sur Itak. Plus que la terre promise, c’est mon nouveau bastion, ma nouvelle raison de vivre, l’œil du cyclone, qui d’un clignement de paupière, vous rend semblable à un oiseau déplumer, mais ça, c’est une autre histoire. Le général Kati Imaginez-vous une petite garnison, plantée au fin fond d’une île des Caraïbes. La caserne est là depuis cinq cents ans, de guerre il n’y en a jamais eu, et il n’y en aura par ailleurs jamais non plus. Vingt gardes armés sont là, à défendre on ne se sait plus trop quoi. Au milieu du bataillon, et pour raffermir les troupes, le général Kati. Il va sans dire que les journées sont longues et fastidieuses, avec en plus ce soleil de plomb à vous casser la tête, et cette humidité à vous ramollir. Une fois les lits faits, une fois la caserne balayée, il ne reste plus grand-chose à faire. Avec le temps, ennuie et habitude oblige, notre petite escadre s’est inventé une sorte de manœuvre quotidienne. Elle commence par le garde-à-vous devant le général, avec nos soldats bien rangés sur deux lignes. Kati fait la revue. De soldat sérieux, elle n’en veut point, il lui faut des soldats souriants, pas à s’esclaffer de rire, respect oblige, souriant, de bonne humeur. Kati scrute les visages un par un, tous avec ce léger sourire aux lèvres. Quand elle est sûre que le bataillon est prêt pour l’exercice, la colonne se met alors en branle et on les voit sortir, en rang pas deux, partir vers on ne se sait quelle destination. Les escapades mènent au même point, un petit boui-boui de campagne où la sono vous débouche les oreilles, et où les serveuses sont peu vêtues et de peu de vertu. Toute notre petite troupe s’installe, chacun sur une chaise, chacun une fille sur les genoux. Kati commande les bières, et voilà, la manœuvre peut commencer. Vous l’aurez bien compris, il s’agit d’une bataille avec le plaisir, tous nos larrons, au bout de deux heures, sont complètement ivres, on rit, on chante, on boit, on caresse. Quand la troupe arrive à épuisement, cahin, caha, elle reprend le chemin du retour et s’en revient à la garnison. Chacun fait alors de beau rêve, jusqu’au lendemain, jusqu’à la prochaine manœuvre. Je me souviens de ce que disait la mère de Kati quand elle parlait de moi, du fiancé de sa fille : « Ton amour avec le Français, c’est pire que le sida » Pour situer les choses, Kati fit ma rencontre dans le petit boui-boui dont je vous ai parlé, et où un jour je m’étais perdu. Quand je la rencontrais, elle était déjà éméchée. Quelques soldats tentèrent de m’en interdire l’approche, mais le général, c’est Kati. Nous passâmes la nuit à boire, danser et à nous ébattre. Vous vous imaginerez aussi très bien, qu’après avoir passé vingt ans dans sa caserne, le général Kati aspirait à d’autres choses qu’une bande de troufions rigolards qui n’étaient bon qu’à passer le balai et avaler des bières. Le malheur fit donc, que ce cœur vaillant, ce cœur qui se languissait depuis vingt ans déjà, entra soudain en éveil. Pour dire la chose simplement, Kati tomba amoureuse de moi. Son cœur se mit à battre, proche de la tachycardie, signe que l’âme et le corps sont dans un profond émoi, signe que la terre tremble. Le général Kati en a même oublié sa garnison, elle rêve maintenant d’amour et d’eau fraîche, nue, sur les plages paradisiaques de l’île. Cependant, notre général peu enclin à de vraies batailles, peu enclin à la vraie lutte armée de l’amour, se rendait bien compte que ses vingt ans passés à faire des bulles ne lui avaient servi à rien, et plus encore, ne lui avait rien appris. Moi, je suis un soldat deuxième classe mais qui a cependant ses classes. Je sais tenir un fusil, pointé, tirer. Je n’ai qu’un simple fusil, pas une mitrailleuse, mais je sais m’en servir, et faire mouche. La lutte avec mon général devint donc vite inégale. Pour alléger l’atmosphère, Kati me proposait ses sempiternelles manœuvres, faites de filles sur les genoux et de caisses de bière bien fraîches. Moi, je lui proposais le style romantique français, le style tombeur de cœur, le french glamour. Elle ne put résister, mes élucubrations romantiques la mettaient comme face à une paroi verticale, sans aucune accroche. Elle essaya en vain de monter, de gravir la montagne, mais l’exercice se révélait impossible. Alors un jour, elle dévissa, elle tomba. La chute a failli être mortelle. Depuis, de notre général Kati, enclin à la danse, à la bonne bière et aux grosses rigolades, j’en ai fait sans le vouloir, un guerrier assidu. Dorénavant, la caserne reste éternellement propre, de manœuvres nocturnes, il n’y en a plus. Nos soldats ont perdu leur rire et leur bonne humeur, l’exercice physique journalier est devenu obligatoire. Je vous le dis, de mon général, j’en ai fait un vrai guerrier, un vrai soldat. Un guerrier de l’amour !, Est-ce bien raisonnable ? Elle a appris à me craindre, elle a aussi appris à craindre les parois verticales, celles qui ne laissent aucune accroche et qui vous projettent dans le précipice. Le général maintenant, c’est moi. Je la fais courir un baluchon et un balai sur les épaules, elle doit me faire trente fois par jour le tour de la cours, jusqu’à ce qu’il ne reste plus une poussière par terre. Jamais elle ne rechigne, jamais une note de contestation. Les autres soldats ont finalement été limogés, et il ne reste plus dans la forteresse que nous deux, avec moi le général pour donner des ordres et notre soldat Kati pour exécuter les ordres, pour remplir la mission de l’amour. De temps en temps, je vois passer dans ses yeux comme une étincelle, le souvenir du bon vieux temps, fait de manœuvre, de filles sur les genoux et de bonnes bières. Mais maintenant que Kati a connu la guerre, elle n’en veut point descendre, nous sommes donc là tous les deux, dans notre caserne inutile, à attendre un ennemi fictif qui ne viendra jamais. Je me demande parfois si cette histoire a un sens. Mais quoi qu’il en soit, l’histoire du Français et du général Kati a fait le tour de l’île, c’est comme cela que les gens nous aiment, et c’est comme cela aussi que nous nous sentons aimés, le général et son soldat au service de l’amour. Vampires Paysages de Vampires, Paysage de nuit et de brouillard, car comme tout le monde sait, le vampire agit dans l’obscurité, il opère ses larcins quand personne ne peut le voir, il ne peut en être autrement, car qui aime se faire sucer le sang. Oliver Stone, fameux cinéaste nord-américain s’était bien ri de lui-même et des Américains en général, il avait bien compris que notre buveur de sang avait besoin de l’obscurité, et que la lumière lui faisait peur. Les Américains vivent avec ce syndrome permanent de la peur, en relation avec leur perpétuelle manie de spéculer sur tout ce qui bouge. Peur qui depuis quelques années prend le premier pas de la maladie mentale, la paranoïa. Toujours nos cinématographes, ceux des dernières années, nous ont rempli les écrans de vampires. Avec le temps, les phagocyteurs de l’hémoglobine prennent presque forme humaine, ils deviennent bons pour les humains, ils n’osent même plus les engloutir, et ce serait les humains qui seraient tenté de devenir vampire, pour pouvoir les aimer en toute quiétude. Vous l’aurez bien compris, les vampires, ce sont les spéculateurs en tout genre, qui vous soumettent, qui vous sucent le sang, et vous rendent semblables à eux-mêmes, c'est-à-dire des vampires. Il faut bien l’admettre, celui qui a subi le joug du spéculateur, et qui ne peut en sortir, entre lui-même dans cette espèce de diagonal du spéculateur, du vampire. Il opère alors de la même manière avec les siens, avec lui-même, il devient lui aussi un vampire pour lui-même et pour les siens. Il en vient à ne plus aimer son bon plaisir mais celui des autres, portes ouvertes à tous les esclavages. Accepter la spéculation de l’autre, c’est accepter d’une manière ou d’une autre d'être un vampire. Pour revenir au point de départ de notre conversation, la stratégie de survie, pour le vampire, est de ne pas le paraître, car alors, comme je le disais, celui-ci sera hué, lynché, mis en pièces et jeté aux cochons. C’est pour cela que nos sociétés modernes ont inventé le concept de transparence, manière dire « Nous ne sommes pas des vampires », « nous sommes propres, les dents bien blanches et non tachées de sang. » Concept, vous le comprenez bien qui est là pour mieux nous confondre, histoire de dire, « les vampires, c’est les autres ». Chaque maison de vampire a bien compris l’affaire, transparence, transparence, tout ne doit être que transparence. Il y a cependant dans chacune des maisons, une écoutille cachée, une porte vers un petit laboratoire secret, dans lequel il est préférable de ne pas entrer. Toute la cinématographie nous gave encore de ces spectacles des chambres de l’horreur, avec une table de dissection, emblème de tous les plaisirs nauséabonds. Vampires habillés de blanc, au bon sourire commercial, au bon sourire humain et où la dernière phase de leur sinistre dessein est de spéculer sur l’homme lui-même, pour nous humilier jusqu’au trognon, jusqu’à la dernière goutte. Humanité qui prend les allures d’un cadavre vidé de son sang, qui prend des allures d’un immense incendie que plus personne ne peut éteindre, il faut maintenant négocier avec les vampires, et plus que négocier, les aimer. Nous sommes près du scandale interplanétaire, l’indignation ne fait que commencer, un jour ou l’autre, les spéculateurs devront rendre des comptes, les vampires devront rendre des comptes, c'est-à-dire être jeter aux cochons. Nous n’en sommes cependant pas encore arrivés là, les larrons ont pris le pouvoir, et ne sont pas prêts de le lâcher, je dirais même plus, ils ne le lâcheront pour rien au monde, car alors ils termineront dans la gueule des cochons. Il ne reste donc plus qu’à avancer, dans cette farce de la transparence, vers la nuit et le brouillard. Le temps est venu des abattoirs géants. Abattoirs comme industrie du vampirisme, où nous aurons tous droit à une petite table de dissection, où nous nous ferons sucer, lobotomiser, scalpéliser, tous les bons plaisirs de notre cher « Gaspar le gentil fantôme », qui du haut de sa transparence, nous vomira tous dessus, nous les hommes. Ultime étape que celle de la limpidité, de l’universalité de la propreté, une table de dissection pour tous. Pour cette raison, à celui qui me parlera de transparence, je me méfierais, car qui peut prétendre qu’au milieu des flammes, l’air est limpide comme une fraîche matinée de printemps. Transparence comme ultime piège, comme alternative au laboratoire secret, celui des abattoirs géants, abattoirs où les cochons, c’est nous, l’éternel bon peuple, l’éternelle bonne pitance, la viande à spéculateur. La nef des fous L’introduction de la notion de passage à l’acte, est-elle, la première, un passage à l’acte, œuvre de sadisme. Certains auraient le droit de jouir, et d’autres pas, et comme le disait si bien Baudelaire : Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie, N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins Le canevas banal de nos piteux destins, C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie. Je me souviens de ma petite usine, quand je dis ma petite usine, elle n’était pas à moi, je n’étais qu’un acteur, un OS, dans le circuit de production. Ce qui était à moi, c’était mon temps volé, ma jeunesse volée, à faire l’idiot sur des machines, pour que certains s’en mettent pleins les poches. Leurs rôles étaient de me faire comprendre que je n’étais pas grand-chose, comme ils disaient si bien d’un rire goguenard : « Je colle un coup de pied dans une poubelle et il y en a cinquante comme vous qui en sorte ». Je n’étais pas grand-chose, et cela les arrangerait bien, pour se payer des grosses voitures et faire les beaux devant des donzelles aussi ridicules qu’eux. Toujours est-il, j’étais un rouage de la machine, et ne devais pas en sortir … même pour aller pisser, le besoin et le plaisir le plus élémentaire qui soit. Le conflit a commencé ainsi, quand je leur ai fait comprendre, que je pissais qu’en m’en venait l’envie. Le petit chef de section, lui, m’a fait comprendre que chacun ne faisait pas ce que bon lui semblait, que la grosse machine n’avait que faire des exigences de ma vessie. Je lui ai répondu, que mon soulagement valait plus que n’importe quelle machine ou système. Comme le coq dans l’évangile, il a lancé son cri trois fois, histoire que je reconnaisse son évangile. La troisième fois, faute de la reconnaître, je l’ai gentiment prévenue que la prochaine fois, c’est mon poing sur la figure qu’il recevrait. Il n’a pas aimé, sa plainte a été comme la déclaration de ma déchéance dans la petite usine. Mouton noir, qu’il faut éviter, celui qui va pisser sans autorisation, ils m'ont fait la vie impossible, faite de petites lâchetés, histoire de m’user. Manque de chance, cette petite usine produisait des explosifs, produits sensibles qu’il ne s’agirait pas de laisser tomber à terre par je ne sais quel geste maladroit. Bras de fer d’idiots, ou je me retrouvais un jour face à la responsable du personnel. Elle me fit cette grande déclaration : « Vous n’allez quand même pas mettre le feu à l’usine ». Qu’est-ce qu’elle s’imaginait la vieille, que j’allais courir dans les couloirs de son établissement et m’écrié devant tous les employés : « prolétaires de tous les pays, mettez le feu à vos usines ». Je n’ai rien dit, non que je consente, mais que cela ne m’intéressait absolument pas. L’introduction de la notion de passage à l’acte relève de la même symphonie, certains peuvent jouir, d’autres pas, vestige d’une tradition d’esclavage, ou le politiquement correct là pour vous la faire boucler. Personne ne m’enlèvera de l’esprit que la civilisation, c’est l’art de soumettre l’autre au service de ses bons plaisirs. Personne donc ne m’obligera à vouloir assumer le rôle de vaincue. Vaincue par millions, par milliards, et au nom de quoi ? D’une meilleure croissance, et cela à des fins d’accroître la commodité de chacun. Vision pédéraste, où le seul plaisir sur terre serait de se faire fourrer. Que l’on vienne non plus me susurrer la vision d’un monde égalitaire, car il n’existe pas : l’introduction de la notion du passage à l’acte au nom d’une chose qui n’existe pas ! Désolé, c’est le refus catégorique. Tous cependant ne voient pas les choses ainsi, et devant ces millions, ces milliards de bouches belliqueuses chantant les louanges de l’égalité pendant que le sang de la vie coule dans les égouts de leur boucherie, je ne vois d’autres solutions que de me sauver en courant. Car celui qui est vivant, qui aime la vie et qui a encore de bons réflexes, devant de tels établissements, prend la fuite, telle une vision cauchemardesque qui ne laisse à son protagoniste que le choix de lever les bras en criant et de prendre les jambes à son cou. Établissement aux allures d’hôpitaux psychiatriques, introduction de la notion de passage à l’acte comme le sadique qui viendrait vous lobotomiser À tous ceux qui n’ont pas encore le cerveau dépecé par je ne sais quel type de chirurgies douteuses, fuyez, non pas comme les rats fuient le navire, mais comme le vivant qui se retrouve nez à nez avec la nef des fous. Le Harakiri du 20 heures Journal du professeur Chorron, Harakiri, journal bête et méchant. Le professeur Chorron avait au moins cette présence d’esprit, de la lucidité. Voyeurisme grossier, vulgarité au ras des pâquerettes qui avait au moins le mérite de nous faire rire. Dans les temps reculés, dans un de ces petits villages perdus sur une colline, où dans je ne sais qu’elle plaine lointaine, les visites n’étaient pas fréquentes. Quand le visiteur venait, on lui faisait toutes les garces. Celui-ci ne devait seulement que se soumettre à une seule courtoisie, celle de ne pas apporter de mauvaises nouvelles. Dans ce cas de la courtoisie enfreinte, le visiteur était lynché, et tel un oiseau de mauvais augure, on lui demandait illico presto de rentrer chez lui, et cela à coups de pied dans le derrière en guise de prime. Le visiteur, et toujours dans ces temps reculés, était considéré comme une forme de bon Dieu, d’un messager du ciel qui nous apparaîtrait, et qui pourrait, peut-être changer nos vies, telle une promesse. Pour cela, il était bien reçu, sauf quand il commençait à déblatérer ses refrains vénéneux. Je me souviens d’un film, le nom me fait défaut, il traitait de façon parfaite, à l’introduction du monde de l’audio-visuel. Il ne faut jamais l’oublier, mais le fait de prendre une caméra en main, et par le petit trou de la lorgnette, et le doigt enfoncé sur la gâchette, filmer, relève du voyeurisme. Dans ce film, énoncé de la cinématographie, le héros, caméra à la main, torture des sujets humains et graves donc le tout sur la pellicule, comme le souvenir d’une enchère morbide. Plus que du voyeurisme, on tombe dans le sadisme, dans le sadomasochisme. Œuvre des 20 heures, œuvre de l'anti-évangile, œuvre de la mauvaise nouvelle, comme si dans cela, on pourrait y trouver quelques terrestres nourritures. Œuvre sadomasochiste, où le spectateur médusé, voir défiler devant lui, et avec le sourire du présentateur, tous les malheurs du monde. Œuvre proche du suicide, et où devant ce spectacle, on assiste à l’ »humanité les veines ouvertes. Œuvre de Harakiri, car personne ne nous y oblige à allumer le programme, à prendre le sabre pour que nos tripes sortent. Rite bizarre, que celui du 20 heures, où tout le monde est invité à ce festin dégoulinant. Rite de voyeuriste, où des visages apparaissent, dans la tourmente des évènements, visages qui ressemblent plus à des gueules, car la tourmente déforme les visages et les rends inhumain, animal. Pourquoi en est-on arrivé là ? À qui profite le crime ? L’espèce humaine a ce fâcheux penchant aux commérages, où, de haut de nos petites vies sans intérêt, l’intérêt se trouve chez le voisin, dans le dénigrement de celui-ci. On mélange tout cela avec la liberté d’expressions, et l'on obtient la cuisine du 20 heures. Comme s’il y aurait un mystère à percer, celui de la bassesse humaine, comme si on ne le savait pas, comme si on devait le réannoncer chaque jour. Avec cela - L’expression - comme rempart au nihilisme, comme tremplin à un monde meilleur, sur sa base de sadomasochisme. Toujours la même farce d’arroseur qui a peur de se faire arroser, et qui, donc, arrose encore plus, toujours cette même farce que l’humanité serait une nymphomane psychotique, avec toujours ce besoin de la fourrer, histoire de lui passer ses fièvres belliqueuses. Journal, 20 heures, histoire du petit flic qui vient regarder par le trou de nos serrures histoire de voir si nous ne sommes pas l’un des représentants de cette nymphomane, histoire de ce petit flic qui dans son petit uniforme se prend vraiment pour le bon Dieu, et qui décide du destin du monde, en partant du principe que l’on est tous coupable, et que pour cela, il a le devoir de vous vomir dessus tous les jours. Dans ce jeu morbide, le journaliste a tous les droits, de vous déculotter, de faire des gros plans sur votre tragédie, avec si possible la gueule de l’individu déformé. Cette symphonie anti-évangéliste est soutenue par l’acclamation et le prétexte du monde meilleur, que nous sommes tous coupable donc, et qui nous annonce qu’elle est une bonne nouvelle. Que cela ne tienne, et rendons à chacun ce qui lui appartient : en ce qui concerne le journaliste, et tel le visiteur qui s’impose chez vous pour vous déculotter, votre devoir est de le recevoir à coup de fusil, à coup de chevrotine, et dans la gueule tant qu’à faire, pour que le lendemain, en se regardant dans la glace, il est le souvenir et le goût de ce qu’est une gueule déformée. Œil pour œil, dent pour dent, psychose pour psychose. Je n’ai pas à me justifier en écrivant de tels arguments. On pourrait seulement me répondre que pour toute gifle flanquée, doit être tendue l’autre joue, dans ce cas, je tirerais un second coup de fusil, histoire de parfaire le travail commencé. Ne vous effrayez pas Mesdames et Messieurs les journalistes, je ne fais que suivre une logique qui est la vôtre et pas la mienne. L’hospitalité relève du savoir-vivre, elle demande et s’accomplit dans la courtoisie, quelle que soient la personne et la situation, elle ne s’impose pas. Un peu de convivialité bordel ! La famille Seguin La famille Seguin est le résultat d’une longue tradition, tradition d’instituteurs, ellemême le résultat d’une tradition de professeur, cette dernière découlant de la croyance en les prophéties. On ne peut réfuter la prose parfaite d’Alfonse, qui dans son moulin se surprend à voir les lapins gambader. Notre cher Alfonse a sûrement beaucoup étudié, et sa vision du monde et des hommes s’est élaborée, j’imagine, au l’ombre d’une bibliothèque, arbre à toutes les prophéties, à toutes les confitures, et qui en excès, deviennent vite nauséabondes. Le résultat, comme on peut s’en douter, c’est de nous rendre chèvre, et de nous faire croire, que le summum de la vie, c’est d’être attaché à un piquet. Piquet, parc, petits espaces, tout cela sent la prison, tout cela sent la bibliothèque. L’espace entre la chèvre de Monsieur Seguin et Alfonse lui-même est très réduit, nous restons dans le juron de la croyance d’une espèce de maman bonne à tout. Qui dit bonne maman, dit vérité bonne pour tout le monde, qu’en soit tout le monde est pareil, que nous sommes du bétail à vérité et qu’il ne serait pas trop bon de s’écarter de cette vérité, car le loup est là, prêt à nous manger. Les idéaux proviennent des systèmes industriels, quand je dis industriel, c’est qu’ils vont au-delà des limites du bon plaisir des individus, vers des systèmes qui ont pris le devant sur l’individu. Le poulailler est donc là à imposer des vérités, en donnant le bon grain, et cela afin de donner un sens à la vie de chacun. Pauvre petite chèvre, dont l’unique rêve, est de rester bien sage. On lui en fait tant de promesses, que demain sera meilleur, là est le sens du collier et de la chaîne, que demain le collier et la chaîne leur seront enlevés. Mais alors pourquoi ne pas les enlever tout de suite répond notre petite créature frissonnante d’émotions, car elle a osé s’indigner de son sort. À cause du loup lui répond Monsieur l’instituteur. En dehors du système, il n’y a rien, tu fais partie du système ou alors tu n’es plus rien, car le système, c’est tout, là est le loup : le système, c’est tout. Il ne reste donc plus qu’à manger les salades de Monsieur Seguin, et de faire de ses laitues, des professions de fois. De temps en temps, une chèvre ose aller au-delà de l’indignation, de rage, elle se révolte, toute alors, les autres chèvres et en cœur lui répond : mais que vaux-tu, que vaut ta révolte, tu es une contre mille, contre un million, un milliard, tu ne peux donc qu’avoir tort. Certaines chèvres, plus belliqueuses encore que les autres se lèvent de leur chaise et s’écrient d’indignation à la face de Monsieur l’instituteur : « Que vous soyez mille, un million, un milliard, que m’importe, c’est moi qui est raison, car je ne veux pas devenir chèvre, parce que je ne veux pas mourir, et ce que vous m’imposez vaut bien la mort. Devant un tel discours, Monsieur Seguin, qui est habitué à ce qu’on le respecte, somme à la chèvre récalcitrante de se retirer de la classe, et de façon très Démocratique, d’aller vers la salle des punitions. Nous avons rencontré peu de ces chèvres qui soient prêtes à aller jusqu’au bout, et, flanqué devant l’instituteur, les yeux droits dans les yeux, lui lancer cet affront : « Tes mots qui puent, ta viande pourrie, ta viande psychotique, c’est pire qu’un film d’horreur, l’adoration des Macabées ne me fait pas bander ». Puis, de prendre la chaise, et d’un geste non démocratique, la balancer à la figure de Monsieur l’instituteur. Geste non démocratique, d’un contre mille, un contre un million, un milliard. Qui a tort ou qui a raison, une chose est sûre, nos sociétés modernes ont généré des armées de crétins, par milliers, par millions, par milliards. Ce n’est plus un loup, mais une espèce de monstre difforme, un Godzilla, qui dans son ennuie, et d’un simple bâillement, serait prêt à avaler le monde. Mille, millions, milliards de crétins répondant au stimulus des prophéties, à croire aux miracles de la salade universelle et des vérités bonnes pour tout le monde, ce qui revient à dire chacun enchaîné à un piquet. Dans son introduction à ses « lettres de mon moulin », Alfonse commençait ainsi : « ce sont les lapins qui ont été surpris…». Alfonse aurait mieux fait de ne rien écrire, et de ne pas surprendre les lapins, et aussi ne pas mentionner les chèvres, car tout cela fait partie de la sordide histoire de la famille Seguin, histoire qu’il soit mieux de ne pas compter aux enfants. La vraie histoire de notre chèvre, et des autres individus de la famille Seguin, c’est qu’à la fin, et à force d’être enchaînés et de glorifier le piquet, ils sont tous devenus fous. La chèvre a pris un fusil et a commencé à tirer partout, sur tout ce qui bouge ; les gens ont été surpris, et ont commencé à courir comme des lapins. C’est la prophétie et la tragédie finale de la famille Seguin, où l’homme est un lapin pour l’homme, et où, plus que d’être surpris, il faut alors courir vite, histoire de ne pas se faire plomber les fesses. Le monde du silence James Cameron, bon pédagogue, nous l’aura appris : Derrière les grosses technologies, derrière les gros paquebots, derrière la folie des grandeurs qui se veut reine du monde, se cachent les océans glacés de l’Antarctique, où ces mêmes paquebots font naufrage, et où l'on termine seul, sous deux mille mètres de fond dans des eaux glacées, où l’on est englouti dans le monde glacial du silence. Éternel refrain que celui du pouvoir, de celui de la mauvaise gestion du pouvoir. Pourvoir qui va au-delà de nous-même, qui nous enivre et nous fait échouer sur les écueils de « je suis le roi du monde ». Celui qui aura eu ce genre de vision, telle une malédiction, finira au fond d’un océan glacé, seul et pétrifié de froid. Celui qui sera monté à bord d’un tel bâtiment, et en aura senti les fièvres et la vision, lui aussi sombrera. Occident, énorme paquebot où tous ses participants, à leurs manières s’écrient « je suis le roi du monde ». Occident, superpuissance qui donne à chacun le sentiment de puissance, puissance qui va au-delà du pouvoir des individus, et qui nous fait délirer, et qui nous fait nous écrier « je suis le roi du monde », chant qui comme vous le savez, et comme je l’ai déjà dit, nous amène dans le monde du silence. Les choses sont finalement tellement simples : Qui est au-dessus ? Celui qui est gorgé de vie ! Quel qu’en soit son style ou sa forme, car il vous fait sortir de l’ennui. Cet ennui insatiable propre à chacun, où l’on ne se sait que faire, et qui nous engloutit dans un bâillement. Le chef donc, le meneur, est cette espèce de cellule électrique qui dynamise, qui donne le choc, qui nous fait rire, pleurer, qui nous donne une émotion. Confondre la technologie et le pouvoir de donner une émotion, c’est comme de faire croire que l’on peut acheter de l’amour avec de l’argent. Résultat désastreux, de celui qui sort des billets de banque de sa poche et achète le plaisir, achète un morceau de vie. La vie alors s’accélère, au rythme des frustrations, chaque plaisir donnant le résultat de son propre ennuie, ce qui oblige à une surenchère. Les poches peu à peu se vident, et finalement, de capital, il n’en reste point, et vous êtes alors seul au monde, car vous ne savez qui ou quoi acheter, tout, vous ennuie. Le factice roi du monde est cet individu, qui pense que la technologie, que le pouvoir de la technologie, va lui donner de l’émotion. Il est finalement seul, avec son téléphone portable, sa tablette, il est seul au fond de l’océan, dans le monde du silence. Monde du silence comme preuve de force, qui est censé nous émouvoir, et qui du haut de son ennuie, vous prouverait qu’elle vaut plus que vous. Amoureux transi qui entre deux séances de t’chat, n’ont plus rien à se dire. Quand l’un rencontre l’autre, quand l’amoureux rejoint sa compagne, l’embrasse, il lui vient alors à l’esprit : « Qu’est-ce que je vais encore me faire chier à écouter ce con ». Les amoureux dînent ensemble, ils passeront une heure ensemble. Tout ce qui sortira de leur conversation, c’est que demain, oui, je te donnerais de l’émotion. Puis les amants se séparent, s’embrassent, tout en pensant encore : « enfin il s’est barré, il m’emmerde tellement, retournons à la maison, seul, car il est préférable de se faire chier seul qu’à deux. » Ennuie arrogant qui va te persuader que demain il arrivera à t’émouvoir. Grosse farce scientiste. Personne ne se rend compte que le bateau prend l’eau et que la grosse carcasse va bientôt finir sous deux mille mètres de fond. Superpuissance, grosse technologie, pouvoir au-dessus des hommes, pouvoir qui n’est plus celui des hommes. Superpuissance, grosse technologie, pouvoir démesuré, qui n’est finalement que le refrain de l’ennui, d’un ennuie incurable, et qui nous fait tous croire, que le chef, c’est celui qui nous ennuie le plus. L’implosion est proche, implosion qui vient de cette confusion entre pouvoir des hommes et pouvoir de l’ennui. Ennuie proclamé comme roi du monde, comme combustible à demain sera meilleur, à demain je vais t’émouvoir. Il faut bien le dire, tout cela est pathétique, et ressemble fortement à un gros furoncle. Plus encore que pathétique, car le pathétique a au moins le mérite de nous faire rire ou pleurer. Là, il ne s’agit que de bâillement, il s’agit pour tous que de se faire chier, et temps qu’à se faire chier, autant se faire chiez tout seul, le roi du monde devient alors le roi des cons. 2001 Odyssée du géant fauché Dans la fantasmagorie occidentale, l’année 2001 est liée à l’espace, en relation avec le superbe film de Stanley Kubrick. Film magnifique, où il est d’abord question de singe, puis d’engins spatiaux qui dérivent et dansent dans le vide, et d’un gros ordinateur, "HAL», qui se rebelle devant quelques humains pris de stupeur devant l’immensité du cosmos. L’autre fait crucial de l’année 2001, celui-ci bien réel, est l’effondrement des deux tours du World Trade center. La menace est, elle aussi, venue de l’espace, à travers des engins d’acier, venus s’écraser sur les tours. Dans le cas de la fantasmagorie comme dans celui du monde réel, l’ambition et la peur viennent de l’espace. L’espace, nous dirons les physiciens, est intimement lié au temps, lui-même lié à des différences. On calcule le temps au travers de différences, de vitesse par exemple. L’espace humain se mesure en mètres, kilomètres, l’espace cosmique lui, en annéeslumière. Hum … que dire. Quand on voit le bazar de la secte humaine, qui au nom de quelques petites différences d’interprétation sur la vision du monde, ou sur la façon de casser les œufs, est prêt à s’étriper, pour ne pas dire à tout détruire, je le répète, Hum … que dire. Qu’en serait-il avec des différences cosmiques ? La secte humaine, dans son interprétation et son actualisation des faits, se retrouverait littéralement pulvérisée, désintégrée. Pour l’instant, aux yeux de l’homme, le cosmos n’est qu’un gros tas de cailloux, pour ne pas dire une poubelle dans laquelle on peut envoyer des tas de ferrailles, et plus si affinités. Ces différences, ces espaces cosmiques, nous pouvons les entrevoir, les distinguer, mais en ce qui concerne ses règles, nous sommes loin de les connaître. L’espace cosmique nous rit au nez, avec nos petites navettes, nos petits avions, nos disputes afin de savoir s’il est préférable de casser les œufs par le milieu ou par le bas. Dans notre ambition à tout conquérir, jusqu’à l’univers - car c’est bien de cela qu’il s’agit à travers l’odyssée de l’espace, de nos avions, de nos navettes - nous ne mettons en place qu’une proposition à notre propre suicide. Rêve de grandeur des représentants de la secte des hommes, ces petits morveux arrogants qui crient à la face de la voûte céleste que leurs érections valent mieux que tout. La secte humaine sera donc clouée chez elle, l’espace lui a gentiment fait comprendre, que de petits voyous, elle n’en veut pas, et qu’il est préférable pour leur santé de rester chez eux. Soyons plus précis, ce n’est pas l’espace qui a déclaré cela, ce sont les événements du 11 septembre. Le géant Américain, le géant occidental a été fauché, touché aux deux jambes. Il a été fauché dans son orgueil, dans ses rêves, dans ses ambitions. 2001 aura été un désastre, l’odyssée de l’espace s’est réduite en une tragédie grotesque. Au-delà de la tragédie humaine, des morts, des destructions de bâtiments et de croyances - qui n’est en fait que le résultat de règlements de compte entre morveux nous pouvons apercevoir le gouffre, l’espace cosmique entre ce qui sépare le rêve et la réalité », entre 2001 odyssée de l’espace, et les deux tours du World Trade center foutues par terre. Quelle différence ! Entre L’homme, ce qu’il s’imagine être à travers ses petits rêves de conquête, et ce qu’il est réellement, un voyou, un asticot grouillant qui, pour une sucette qui lui a été volée répond du poing dans la figure. Vide cosmique, espace cosmique qui s’est déployé devant nous, il faut bien l’avouer, entre ce qui relie le rêve de la réalité. Les grands espaces nous sont apparus, soudainement, ils nous sont apparus comme une baffe en pleine figure, devant le ridicule de nos faits ; tellement forte, qu’il est à parier que le géant va vaciller, et tomber à terre. C’est d’ailleurs chose faite, il n’a plus de jambes. Il ne lui reste plus qu’à regarder la situation en face, et d’accepter sa médiocrité, chose qu’il ne pourra faire, arrogance oblige, il continuera donc de se fourvoyer, et de croire que ses érections valent mieux que tout. La baffe a cependant été donnée, l’humiliation est bien là, et de vengeance il n’y aura pas. Vous vous imaginez, nos présidents, sautillant sur leurs pieds, et dans cette mimique de vouloir défier ou donner des baffes à la lune ou au soleil ou je ne sais quelle galaxie, là encore, le ridicule serait grotesque, cosmique et le résultat en serait plus que pathétique. Il ne reste donc plus à nos bonhommes de la secte humaine, que de nager dans la pathétique et de proclamer que la baffe du cosmos n’a pas eu lieu, et que la lune et mars n’ont qu’à bien se tenir. Autre rêve d’un géant qui ne peut même plus se lever, et qui ne se rend pas compte que ses heures sont comptées. Ses heures sont comptées car il a la fâcheuse manie de fonctionner de façon binaire. Il doit être tout, il en bave alors de plaisir, ou il ne doit être rien, alors, l’idée du suicide lui vient vite à l’esprit. Telle est l’odyssée du géant fauché. Eyes wide shut (Les yeux grand fermés) Nous avons deux protagonistes : La jouissance, c'est-à-dire l’exécution et le déploiement de notre bon plaisir, puis l’amour. L’amour est le fruit de cet arbre qu’est la jouissance. Cet amour, on peut le manger, car il est plein de saveur. La jouissance ne se mange pas, car elle est une force, une force qui donne une incidence aux évènements. L’arbre se trouve avant le fruit, car c’est l’arbre qui donne le fruit. Entrer dans cette dispute que c’est le fruit qui donne l’arbre et non le contraire, est une dispute inutile. L’arbre donne le fruit, le fruit le pépin, et le pépin pourra donner un nouvel arbre. Un nouvel arbre n’est pas un arbre, mais une promesse d’arbre, ce qui donne les fruits, ce sont les arbres, et non les promesses, ce qui se passe avant et après n’intéresse personne, ce qui nous intéresse, c’est maintenant. L’histoire se dessine d’une accumulation de maintenant, et non de promesses sur ce que sera demain, ni de nostalgie sur ce qu’était hier. Nous avons donc d’une part, l’amour tel qu’il a été défini par Jésus et aussi tout ce qui tourne autour de la non-violence et des rapports égalitaires, et cela est mis en place par les philosophes des lumières. Nous avons d’autre part, la jouissance, dont on ne peut se détacher, qu’on ne peut oublier ni nier, car l’arbre est bien là. Les deux ensembles donnent un drôle de spectacle, proche de la grimace. D’une part, notre amour et nos sentiments non-violents essayant de déployer un joli sourire innocent, et d’autre part notre jouissance, avec elle aussi son sourire, mais un tant soit peu ironique. La jouissance sera toujours la reine, et l’amour son serviteur, la jouissance dans la diversité des négoces qu’elle propose, l’amour, ce travail du temps qui arrondit les angles de la jouissance et crée les conditions de la convivialité. Quand la jouissance se réveille, l’amour n’a plus qu’à fermer les yeux. L’amour, la non-violence, les sentiments égalitaires ne sont qu’une promesse, et tel un enfant qui affronterait une situation qui le dépasse, son unique possibilité est alors de fermer les yeux, car c’est un spectacle au-delà de son entendement. La jouissance est au-delà de tout entendement. Ce mélange sulfureux donne au final des sentiments troubles tels ceux exprimés dans le film de Stanley Kubrick, « Eyes wide shut », des sentiments proches de la folie, où au final on se demande « qui suis-je, qui est cet homme ou cette femme avec qui je vis ». Si vient l’analyse, la rétrospective, vient aussi le sentiment de temps perdu, de jouissance perdue, de la vie qui n’a aucune valeur, d’un profond dégoût de soimême, et surtout de la haine de l’autre, - son ou sa – compagne, celui-ci étant le support de tout ce gâchis. Devant ce spectacle, devant cette réalité imprononçable qu’est notre impuissance à vivre, il ne nous reste plus qu’à fermer les yeux, depuis le lever du jour jusqu’à son crépuscule, c’est la nuit de la jouissance, c’est la dictature de l’amour et de l’égalité, dictature bien éphémère, il faut bien l’avouer. On aura beau vouloir enfermer la jouissance, la nier, elle réussira toujours à s’échapper, et à chaque fois qu’elle réapparaîtra, ce sera alors, encore une fois, la stupeur, l’effroi, et tout le monde n’aura alors qu’à fermer les yeux. Tout le monde n’aura qu’à fermer les yeux, non que la jouissance soit vicieuse, mais que les circonstances lui donnent un caractère vicieux. À titre d’exemple, la négation de la violence mène à des systèmes ultra-violents, mène au monde de « orange mécanique » de notre même Stanley, mène à des abattoirs géants tels ceux qu’on a pu voir le siècle dernier. Quand ce type d’évènement survient, il ne reste plus alors, je le répète encore, qu’à fermer les yeux, à prier, et quand c’est terminé, de dire plus jamais, histoire que perdure le mensonge, histoire de croire, tel un enfant, que peut- être un jour, l’amour sera plus fort que la jouissance, que le déploiement de notre bon plaisir. Continuer de nier la jouissance, aller plus loin encore dans sa négation, c’est préparer les conditions de sa réapparition dans des circonstances toujours plus terrifiantes, monstrueuses : La jouissance est reine, elle fait ce que bon lui plaît, et n’aurait d’ordre à recevoir d’un domestique. Si le domestique se montre impertinent, elle le mettra à mort, avec aussi tous ceux qui croient en lui et le représentent. Pour en revenir à notre couple : Nos deux belligérants, partenaires amoureux, sont figés dans cette structure atomique, comme deux nucléons collés l’un à l’autre, l’un étouffant l’autre, l’un créant le malheur de l’autre. Sur ce couple viennent se nicher des enfants, ce qui accumule le poids de la structure, le poids du malheur. Tous ces atomes sont reliés entre eux par le fil sensible de l’acceptation de la situation, un statu quo qui définit les choses comme suit : « ça à toujours été comme cela, c’est comme ça et le restera aussi toujours ». Que ne vienne ce jour où l’un des atomes ouvre les yeux, car ce sera alors une réaction en chaîne, une réaction nucléaire, tous nos petits atomes vont fissionner jusqu’à produire une immense explosion. Ce ne sera plus alors « Eyes Wide Shut », les yeux grands fermés, mais « Eyes Gouged », les yeux crevés. Rétro-théorème Staley Kubrick avec son film 2001 odyssée de l’espace, nous a éblouis, d’une espèce de lumière noire, tellement enivrante, tellement psychotique. Avant Stanley, il y avait Arthur. Arthur, avant d’être écrivain, est un scientifique, gavé de science et de mathématique. Son livre commence avec la venue d’un monolithe, qui comme une force, donne l’énergie à nos chimpanzés, une énergie créatrice qui fera d’eux des hommes. Monolithe, qui comme il nous l’avouera à la fin de son livre, n’est pas un morceau de vie envoyé par quelques nations extra-terrestres, non, juste un code mathématique créé par une matrice elle aussi mathématique qu’est l’univers. Le monolithe était donc un théorème qui dérivait là dans l’espace et qui a eu la mauvaise idée d’atterrir sur la terre. Telle est le message d’Arthur, un code mathématique qui envoie un autre code mathématique, tels des ordinateurs, et voilà, le tour est joué, la vie peut jaillir. Je l’ai déjà dit, Arthur est un scientifique, et sa vision du monde et de l’univers sont, elles aussi scientistes, et sur la lignée de tous les scientifiques et de tous les philosophes, tout ne devient que code mathématique, telle une vérité absolue dans laquelle nous baignerons. Hum … essayons d’être plus réalistes. Pour cela, commençons à mettre les choses sur la table. La base des mathématiques, est de prendre un élément, puis un autre, de les mettre ensemble afin de voir le résultat en relation avec une opération. Cette opération se fait en partant du principe que les deux éléments sont bien distincts l’un de l’autre, qu’ils n’ont rien à voir ensemble. Dès le départ, nous partons d’un principe faux, qui n’existe pas, qui n’existe nulle part dans l’univers, tous les phénomènes, quels qu’ils soient, sont intimement liés les uns aux autres, d’une façon ou d’une autre, et il n’est pas possible de séparer l’un du multiple, de définir des éléments existant par euxmêmes de façon distincte. Le continuum « un / multiple » peut être déformé par une force, déformé, rien d’autre. Les mathématiques sont comme une force, comme un estomac, qui analyse, c’est lui qui sépare les éléments pour arriver au produit final, un substrat au nom de « résultat ». Dans le cadre de la digestion, le but est, avec toute cette nourriture avalée, de séparer les éléments les uns des autres, pour donner les molécules de base nécessaires au corps, nécessaires à la vie de l’individu porteur de l’estomac. Les mathématiques sont une force, comme celle par exemple liée au concept de rond, et ou avec Pi, on tombe sur tout ce qui a trait au rond, dans sa forme la plus irréductible possible. Cette digestion servira à tous nos petits artistes, pour créer des ronds parfaits, ou presque tout au moins. C’est dans ce sens que je dis que les mathématiques sont une force, ils s’appliquent sur son sujet pour lui donner une incidence. Les mathématiques sont donc comme un petit bras musclé, qui donne forme aux choses, qui les développe. La grande question est la suivante : Cette force mathématique existe-t-elle dans l’univers, comme une espèce d’origine, ou comme le résultat d’un petit bras musclé qui va donner forme aux choses. Une chose est certaine, car dans les mathématiques il faut être certain de tout, Monsieur nombre est né de mon cerveau, et mon cerveau est planté là sur mon corps, à savoir sur un individu vivant. Dans mon cas, Monsieur nombre est né d’un petit muscle, c’est-à-dire mon cerveau, lui-même lié à la vie, Monsieur nombre est donc le fruit de la vie et pas le contraire. On me répondra alors que la vie est elle-même le fruit de Monsieur nombre, et voilà, on tourne en rond. Soyons raisonnables, et comme je le disais dans un autre texte, L’arbre se trouve avant le fruit, car c’est l’arbre qui donne le fruit. Entrer dans cette dispute que c’est le fruit qui donne l’arbre et non le contraire, est une dispute inutile. L’arbre donne le fruit, le fruit le pépin, et le pépin pourra donner un nouvel arbre. Un nouvel arbre, à travers le pépin, n’est pas un arbre, mais une promesse d’arbre, ce qui donne les fruits, ce sont les arbres, et non les promesses. La vache et l’extra-terrestre Il faut le dire, et elle-même doit bien l’avouer, Caroline est attribuée d’un sexe énorme, nous ne rentrerons pas dans les détails géophysiques, mais le fait est là, les institutions de Caroline sont plus celles d’une vache que celles d’une femme. La réponse à cette déclaration est: Belle affaire ! Malgré tout, les perspectives sont intéressantes. Il faut aussi l’avouer, Caroline déclenche chez ma personne quelques montées fulgurantes d’hormones, qui me donnent envie de la rouler dans la farine, de la frire, pour ensuite me l’engloutir. La petite histoire pourrait se répéter jusqu’à ce que mort s’ensuive. En effet, ce dessert quotidien me plonge dans des nuées déconcertantes, je ne sais plus si je suis un chien, ou moins encore, et crains bien d’en mourir un jour. Cette chute dans les abymes des sens n’est cependant pas sans contreparties joviales. Quand je tombe, elle tombe avec moi, nous nageons alors dans les eaux troubles de la démence des corps. Parfum hallucinogène qui, le temps d’une galipette, vous met en émoi. D’amour il ne faut pas trop compter, avec Caroline, nous restons dans la gymnastique pornographique, et c’est ce qui nous plait, c’est comme cela que nous nous comprenons, c’est là-dessus qu’est fondée notre relation. Certains affirment que l’on se fatigue vite du sexe, nous sommes depuis dix ans à ces jeux et ne sentons pas encore l’essoufflement. Tous les coups sont bons, tous les trucs imaginables, le but est de rester créatif, et de laisser la brèche ouverte, celle de l’obsession. Espèce de blessure par laquelle suintent des effluves enchanteresses. Nous avons souvent pensé sortir de cette spirale sans fin, mais le reste nous indiffère, dîner au resto, disco, voyage, amis, tout cela ne fait que respirer l’ennui, et nous comprenons qu’il est bien de rester à ce que l’on sait faire. Après tout, pourquoi pas, à chacun sa maladie. Mais Caroline à quelque chose de plus, un petit coté panthère, corps d’athlète avec un visage d’ange, une beauté hors du commun. Caroline, objet de mon adoration, sait être belle, rendre les hommes fous, mais ne peut en aimer aucun. Là est le négoce, scellé à jamais. Un homme n’est pour elle que ce tremblement qu’elle ressent lors de la jouissance, au-delà, il n’y a rien. Ces petites parties de jambes en l’air font partie de son équilibre, du mien aussi, je m’alimente de son venin, et voilà, tout le monde est content. Une histoire qui finalement n’intéresse personne, si ce n’est que ses belligérants. À chacun ses cochonneries, mais chez soi, tout le monde aime bien les petits cochons, mais qu’ils restent dans leur temple. De temps en temps, nous serions bien tentés par l’exhibition, nos parties ne se limitent pour l’instant qu’à nous-mêmes, c’est ainsi qu’a été frappé le contrat, et c’est ainsi qu’il se déroule. Que se passerait-il, vous vous imaginez, si le jeu débordait. J’aime par exemple que Caroline entre à la maison avec le bouton de son pantalon décroché, et la fermeture éclair légèrement abaissée. C’est mon truc, je le lui demande toujours, et cela me met de bonne humeur et de bon appétit. Vous vous imagineriez ça, Caroline, qui après une bonne étreinte, sortirait de la maison, le bouton du pantalon décroché et la braguette vers le bas ! Inutile de vous compter les regards lubriques qui se porteraient sur elle, les commentaires des femmes, et ceux des hommes. Il faut bien le dire, ce serait le début d’une belle intrigue. Le jour suivant, lors de la nouvelle sortie de Caroline, les hommes seraient là à épier, si la fermeture éclair est oui ou non bien baissée. Nous avons enchéri sur la braguette, mais il pourrait aussi s’agir de la chemise entreouverte, qui laisserait suggérer quelques formes avantageuses. Si je demande à caroline de tondre la pelouse, cela n’intéressera personne, même pas les voisins. Par contre, si Caroline tond cette même pelouse en jupe courte et sans petite culotte, vous vous imaginez alors le spectacle. Pas besoin pour le voisin d’allumer la télévision pour trouver une distraction, il sort lui-même dans son jardin, et comme par hasard, pour arroser le gazon. Les films pornos ne demandent pas de grandes arabesques dans leurs scénarios, la voisine qui tond la pelouse en petite tenue, le voisin qui arrose, voila, il n’y a pas besoin de plus. On me répondra vite que ces polissonneries relèvent d’adolescents en pleines pubertés, et que ce ne sont que des enfantillages, et qu’en tant que bons citoyens civilisés, on peut espérer mieux. Reste cependant, et toujours pour en revenir à Caroline avec sa mini jupe, que cela fait baver tout le monde, des sept à soixante dix sept ans, du plus coquin au plus vertueux, et temps que les formes sensuelles seront là à se montrer, il y aura des yeux pour s’en délecter. Triste tropique, que celui de la jouissance, quand on présente le menu, tout le monde fait le dégoûté, mais finalement, quand le plat est sous les yeux, c’est la régalade. Je parle du voisin, mais je n’ai pas parlé de la web Cam, car alors on multiplie l’audition. Qu’est-ce qui fait le mieux sortir le voisin de sa maison ! ? C’est les fesses de la voisine, terrible mais concrète réalité. Enfin, nous devrions cependant être content de cette situation, ou pour être plus précis de l’exploiter. L’humanité rêve depuis des siècles de se faire des amis avec d’autres civilisations, sur d’autres planètes. Mais il faut le dire, nous n’intéressons pas grand monde. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a rien à voir. Plutôt que d’envoyer dans l’espace des scripts relatant je ne sais qu’elle vertu de la race humaine, nous devrions leurs envoyer des filmes pornos, ou les codes de la web Cam de Caroline, afin qu’ils se rendent compte qu’il se passe des choses sur notre petite planète. Je vous le dis, c’est le cul qui sauvera le monde. Pour cette raison, ma petite Caroline, tu as du bon temps devant toi, continue de te promener en jupe courte et sans culotte dans le jardin, qui sait, tu feras peut- être chavirer un énergumène en rut, qui, sur sa constellation xxx69, est en train de te lorgner avec une méga longue-vue. Je ne sais pas comment il te contactera, ni comment vous vous rencontrerez, mais ce qui est sûr, c’est que ce sera une rencontre du troisième type. Si on ne compte pas Caroline et moi-même, le troisième type, c’est ce voisin à antenne, ce petit voyeur donc, qui sera ravi de connaître la panthère et ses arguments de vache. Nous espérons qu’ils feront ensemble de beaux films, et que le prochain long métrage intergalactique « la vache et l’extra-terrestre » sortira bientôt dans toutes les salles de la galaxie. La nuit du Crabe On entre dans le quartier du crabe comme on entre dans une église, le silence s’impose. Ces baraques, assemblement de tôle et de planches, à chaque pas-deporte, des silhouettes petites ou grandes comme figées dans le temps, scrutent un horizon figé lui aussi dans ces mêmes tôles et ces mêmes planches. Ma tenue de jeune scout n’arrange rien, les têtes me dévisagent, je suis un intrus, je n’ai pas de pinces sortant du corps ni d’antenne sur la tête, de surcroît, j’ai la peau blanche. Je longeai la traverse qui me mena jusqu’à la baraque de Mélissa, d’un pas de statue qui ne peut échapper aux regards. Mélissa était nonchalamment couchée sur ce qui lui servait de lit, juste vêtue d’une parure gazeuse qui laissait apparaître ses deux tétons pointés en avant. Mon intrusion ne l’avait pas réveillée, elle dormait là tendrement, d’une respiration longue et paisible. Je lui titillais le bout des seins juste pour tester l’état de son sommeil.Sa réponse fût de grommeler, histoire d’avoir la paix et de continuer sa sieste. Je n’avais donc qu’à attendre et faire suffisamment de bruit pour qu’elle se décidât à sortir de sa léthargie. « Mal dito ombre » me lança-t-elle, une fois certaine qu’elle ne pourrait point dormir, « Amor de mi vida » lui répondis-je. Et on partit à rire tous les deux. Ses petits seins bakélites comme disait Gainsbourg, m’obsédaient, il fallait que je les triture et les malaxe sans arrêt, en faisant rouler la pointe entre mes deux doigts, ce qui chaque fois l’agaçait, je ne suis pas une chienne me rétorquait-elle à chaque fois. C’est vrai que dans ces moments-là, je ne valais pas mieux qu’un chien, mais c’était plus fort que moi, comme tout autant certaines femmes rendent les hommes chèvres, les tétons de Melissa me rendaient chien. Ma petite mulâtresse!, le terme peut paraître un peu péjoratif voire insultant, mais il n’en est rien. Melissa a tout de la mulâtresse, une mulâtresse des îles. Il faut en avoir connu une pour savoir que dans la mulâtresse, il n’y a que du bon. Ses petits seins bakélite d’abord et surtout, et puis ce tempérament un peu animal qui rend les hommes chiens. Corps musculeux dépourvu de toute cellulite, un vrai gymnaste, une catcheuse, une athlète, que du bon je te dis, et je ne te dis pas tout. Enfin, n’exagérons rien, n’embellissons pas trop, Melissa, elle a aussi du cochon, dans son caractère je parle et de la mule sûrement, et je dirais même un peu de tigresse aussi, si bien qu’au final, je ne sais plus à quel saint me vouer, sans vouloir faire de jeu de mot provocant. José, au final, et au commencement, est un sorcier. Comme tout bon Haïtien qui se respecte, il aime secouer les gris-gris et t’impressionner de ses fantômes. Mais lui José, c’en est un vrai de sorcier. Sa voix, trop douce, trop surnaturelle, envoûtante comme la flûte aux cobras. Quand il parle, il t’endort, te fait somnoler pour enfin te manger tout cru. Chevelure hirsute, sourire de renard, tu m’en fais un toi, José, de causeur à spectre, d’ensorceleur de brebis égarées et de jolies donzelles au derrière eux aussi surnaturels. Il s’en vînt donc, notre José, accompagné de sa femme. Magali sourit tout le temps, elle ne parle pas, elle sourit, elle rit aussi, et quand elle ne fait ni l’un ni l’autre, elle jette son bébé en l’air, ce qui amuse beaucoup l’enfant, et le papa de surcroît, si bien qu’on est tous pliés de rire. Puis Magali s’en retourne à sourire, la boucle est bouclée. José s’en était venu pour nous faire participer à son petit festin de crabes. Qu’est-ce qu’on peut faire d’autre que manger du crabe dans le quartier du crabe, vous voulez bien me le dire ! On peut le pêcher aussi, ou en rêver. Son fantôme rôde là, toutes les nuits, et vient frapper à chaque porte. Malheur à celui qui le laisserait entrer. Quand s’en vient l’obscurité; de son épaisse cape noire, on tremble. On espère qu’il s’en va aller visiter la maison d’à côté, et que le cadavre qu’il va ramener dans son terrier, ne sera pas celui de la maison. Nuit du crabe, nuit lugubre et insidieuse, nuit de cauchemars. Ainsi donc, pour conjurer le mauvais sort, nous voici à croquer les petites bestioles, et leur sucer les entrées. Ça craque sous la dent, les cartilages se rompent et laissent échapper le jus. Melissa à l’air d’y trouver un goûteux plaisir, elle croque et se léchotte les doigts de temps en temps pour ne rien perdre. Ses mains brillent au soleil du jus huileux, sa bouche ne vaut pas mieux, et tous ces bouts de cartilage coincés entre ses dents. Pour finir, il ne va rien rester de la pauvre bête, c’est vraiment ce qu’on appelle se faire sucer jusqu’à la moelle. Elle me regarde maintenant de son air ingénu, cela relève de l’orgasme culinaire, elle est satisfaite, repue et en grogne de joie. C’est bien beau tout ça, mais l’enfant a faim, José part en quête de quelques nourritures, la maman, tant bien que mal, dorlote l’enfant. Celui-ci chiale à nous rompre les tympans. Magali reprend la vielle technique du lancer de bébé dans les airs. Toujours plus haut, toujours plus tourbillonnant, attention, la chute est proche. Voilà, c’est bon, l’enfant est à moitié assommé, il ne lui reste maintenant qu’à dormir. Le voisin d’en face a assisté à toute la scène. Depuis que nous sommes là, il n’a pas bronché ni bougé un de ses poils. Sa tête s’affaisse vers le bas, résignée. De temps en temps, son regard semble s’allumer de quelques soubresauts. Sa pauvre femme… entre les raclées qu’il lui met quand il a bu, et les mauvaises histoires, qu’il ramène aussi quand il a bu…Chaque fois c’est le même cinéma, il bat les gosses ou la femme, il s’en veut à mort, et se saoule de la même manière, à mort. Ses premières saouleries d’après tabac, il allait les finir dans la forêt. On le retrouvait le lendemain, allongé sur un plan d’herbes, entre deux cocotiers et une vache broutante. Avec le temps, il est sorti de sa forêt pour aller provoquer les copains et les voisins, le but du jeu étant bien sûr, qu’il se prenne une bonne raclée à la fin. Maintenant, ses sorties alcoolisées se passent avec une machette à la main, et les voisins, les copains prient pour que le crabe vienne l’emporter au plus tôt. Entre deux tôles, on peut assister au déshabillage. Bigre, José, tu me l’avais caché, ce slip léopard, t’as vraiment l’air d’un pornographe comme ça. L’étreinte sera rapide, intense, sans faire trop de bruit pour ne pas exciter tout le quartier. Les voilà tous les deux, sortant de la cabane, sourire coquin aux lèvres. Maintenant, la voisine d’à côté, que ces coquineries ont échauffée, me regarde d’un petit air sans équivoque. Elle me sourit, là, bêtement, et je suis là, tout suant, devant elle avec sa robe cachant à peine sa poitrine, la tentation est féroce de se vautrer comme l’ont fait les deux autres oiseaux, le petit café du pauvre comme disent certains, avant de passer à autre chose …comme le gamin qui va sûrement se réveiller d’ici peu. Mélissa est impassible, elle vient d’entrer dans ses moments – je regarde dans le vide en attendant que le temps passe. Je la secoue, juste pour voir dans quel état de léthargie elle sombre, mais elle n’a pas l’air d’apprécier, sa réponse est de m’enfoncer son poing dans l’épaule, pour entrer de nouveau dans son sommeil éveillé. Les gens viennent de partout, de gauche, de droite, de derrière, de partout. Une autre voisine qui s’ennuie et vient faire la causette, une autre encore, a fait acquisition d’un chapeau et se pavane pour épater la galerie. Les enfants courent partout, le vieux d’en face continue son immuabilité. L’enfant s’apprête à se réveiller, José en profite pour annoncer qu’il a une bonne idée de négoce et qu’il va en parler à son pote, il en profite pour se défiler. On n’avait rien à faire, avec ma petite Mélissa, nous voilà l’un dans l’autre, elle a miaulé, j’ai grogné, le lit tremble, et par vibration, la cabane entière, de quoi chasser tous les rats et autres bébêtes à poils, à cornes ou à écailles. En bon homme civilisé, je m’étais prémuni d’un préservatif, Mélissa me l’arracha, « si tu me baises, c’est comme une chienne, « ton plastique, fous-le toi dans la bouche et mâche-le comme un schwingum. Je m’exécute, gloire au sida, gloire à une descendance généreuse, et si le crabe doit nous emporter, que le diable l’emporte lui aussi, mais pour l’instant, jouissons. D’une manière générale, les activités ici ne sont pas extravagantes ni incomptables sur les doigts d’une main. D’abord manger, et trouver à manger, boire, discuter, forniquer et dormir. Si on manque à boire, on discutera ou on forniquera un peu plus, et vice-versa dans tous les sens. C’est seulement quand on manque de tout que les choses se compliquent. On va alors voir la dame du dispensaire, celle qui se dévoue aux autres, celle qui soigne, nourrit, dorlote et soulage. Paulette, donc, la patronne du dispensaire, elle s’est rendu compte qu’il y avait un truc qui clochait dans sa vie une fois atteinte du cancer, vous savez, ces petites cellules débiles qui se mettent à batifoler dans tous les sens pour former des ganglions gros comme des yeux de baleines. Elle est alors venue ici, en pensant peut-être qu’entre eux, les crabes se boufferaient. À raison sûrement, à tort il se peut, deux crabes ensemble, ça peut aussi se reproduire et faire plein de petits. Toujours est-il que Paulette joue le rôle de la matrone du village, dans l’unique baraque en ciment du coin. Ses jeunes acolytes, que l’on appelle des coopérants de l’humanitaire, sont venus l’aider dans sa tâche. Tous de jeunes scouts en culotte courtes (il fait chaud), pleins de bonnes idées et pleins d’énergie à revendre. Ça peint, ça bricole, ça fait des piqûres et des pansements, ça ampute quand il faut, je vous le dis, de vrais scouts. Paulette est donc là, toujours présente, la mère bobo qu’on pourrait l’appeler, les bobos du corps et les bobos de l’âme. Quand Paulette ne peut rien pour nous, car elle ne peut nourrir le village en entier, et que l’estomac commence à couiner, il ne reste alors que le chant lugubre des envies qui tournent en rond et vous rendent dingo. C’est pire qu’une envie de fraise, la faim, ça reste là gravée dans l’esprit, ça tourne, ça se retourne, et à la fin de la journée, t’es dingo et tu vas te coucher tellement tu t’es épuisé. Quelques années de ce sport et vous êtes comme le voisin d’en face, ou comme José. Au quartier du crabe, il n’y a de place que pour les sorciers ou les âmes perdues, entre les deux, navigue le crabe afin que chacun choisisse son camp. Tout ça pour dire que nous en étions à déambuler, José, Mélissa et moi-même sur le chemin poussiéreux menant à la plage. Nous croisâmes dans notre promenade le dispensaire de Paulette. Celle-ci est prise aux griffes avec notre voisin d’en face. Il lui réclame je ne sais quoi, elle semble faire tous les efforts du monde pour le contenir. Il l’insulte, la menace, fait tourner son bras en l’air. Elle reste impassible, matrone oblige, ce qui énerve de plus l’autre énergumène. Ça tourne en rond leur histoire, y en a pas un qui lâchera le morceau, elle de ne pas lui claquer la porte au nez, lui de s’acharner sur elle, enfin, qu’ils se débrouillent. Comme d’habitude, José me fait part de ses idées de négoce. Le problème n’est pas dans le négoce lui-même, mais dans le fait qu’il ne veut jamais l’assumer seul, « la mise de départ « m’explique-t-il, c’est le plus important. Je me débine comme d’habitude en noyant le poisson. Il m’annonce alors un négoce plus fumeux encore, puis un autre, à la fin, il me propose inévitablement de devenir son compagnon d’escroquerie. Il fait chier José, mais on rigole bien. En conclusion, il nous propose une partie de pêche au crabe sur la plage, juste à l’embouchure de la rivière. La pêche au crabe, c’est tout un sport. La tenue d’abord : Le maillot de bain, voyons. Lui José, a gardé son slip léopard. Il se regarde, nous regarde, impressionné de sa propre virilité, voilà qu’on peut voir son membre – impressionnant aussi – commencer à prendre des formes démesurées et à déformer le slip léopard. Ça prend les allures d’un film porno, Tarzan baisse la tête en direction de son anaconda, il en est tout fier, son regard nous revient comme pour que l’on l’acquiesce « vous avez vu de quoi je suis capable », nous lance-t-il. Pour la pêche au crabe, je crois que c’est terminé, Tarzan n’en peut plus, il doit passer à l’action et s’assouvir. Il veut bien sûr que l’on aille avec lui, il en connaît deux ou trois « bien chaudes », toujours prêtes à se faire cuire. « Va al diablo » lui répond Mélissa. Ces effervescences m’ont aussi mis dans mes états, me voilà aussi en pleine ébullition, Mélissa en semble désolée, et son sourire en dit long …Que je me démerde tout seul avec mes éruptions. Peu importe, rien de tel qu’une bonne eau bien fraîche pour calmer toutes ces ardeurs. Mélissa me rejoint. Je batifole au milieu des poissons et dans les bras de ma chère mulâtresse. Notre José s’en revient, son air coquin en dit long, il nous étale ses exploits : on a le droit à l’épisode complet, dans les moindres détails, c’est vrai qu’elles font envie, les sirènes du coin. Franchement José, tu n’as donc que ça à faire de tes journées, que d’aller féconder toutes les matrices du coin. En parlant de ça, voilà Magali qui arrive, la matrice officielle. Magali, allégrement, et encore, s’amuse à lancer l’enfant dans les airs pour le rattraper au dernier moment. Ça c’est une famille unie – dans les sauts périlleux -. Menteur comme il est, José raconte à sa femme que la pêche au crabe fut bien mauvaise, mais qu’il ne désespère pas pour le lendemain. À ce sujet, il me demande si je n’ai pas une paire de palmes pour nager plus vite, et par hasard, non plus, un filet pour en pêcher plus d’un coup. Mélissa commence franchement à s’ennuyer, elle me fait comprendre qu’elle aurait bien envie qu’on s’en aille. José, qui ne veut rester sans compagnie commence à vouloir allumer un feu. Pour manger quoi ? Faisons le feu, on verra après. Le galon de rhum est presque vide, ça représente beaucoup, un galon de rhum, presque quatre litres. Au début, le liquide passe en brûlant, quelques verres après, du vrai petit lait. On sirote par petites gorgées en faisant à chaque fois de grands Haaaa. La discussion suit son cours, serpentant autour de tous les ragots et âneries qui peuvent se compter, sans oublier les petites histoires croustillantes, celles auxquelles on met une petite touche personnelle, les autres qui relèvent du mythomane. Mais qu’importe, la rivière du rhum coule tranquille, le clapotis des vagues est là pour nous bercer; les étoiles veillent sur nous haut dans le ciel. Tous les cours d’eau finissent à l’océan, et dans ce genre de réunion éthylique, vient toujours le moment de la surenchère, de l’histoire la plus extraordinaire. José tient bien sûr à porter le flambeau, et nous raconte ses passages dans le vaudou. Notre réaction, bien rigoler. José semble s’offusquer, il est vraiment piqué au vif, orateur enflammé de la magie blanche et noire, il s’enlise dans des histoires peu croyables, ce qui nous fait rire de plus belle. On tourne en rond nous aussi, José monte en pression, et pour ne pas nous exploser à la figure, se lève et s’éclipse. Il s’éloigne d’un pas déterminé, se retourne un instant, nous agresse d’un « je vous aurais prévenu » et disparaît dans la nuit. Maintenant parti, nous en profitons pour chanter quelques classiques du répertoire local, romance, amour, souffrances, cœurs déchirés et beaucoup de larmes. Lentement, nous nous éteignons, le feu aussi, quelques lueurs en émergent encore, l’assoupissement final est proche. Nous entendîmes soudain un drôle de bruit. Des espèces de craquement cartilagineux, style robot de chair déboîté. La pénombre ne nous permet pas d’en identifier l’origine. Des sortes d’éructations semblent provenir du même endroit. Nous crûmes au début être victimes d’hallucinations, nous en restâmes pétrifiés. José nous fit signe de ne pas bouger et de faire comme si de rien n’était. En face de nous, se dressait le roi des crabes, haut d’environ deux mètres, perché sur ses pattes démesurées, avec ses pinces aussi impressionnantes que des pales d’hélicoptère prêtes à découper. L’envie nous prend de fuir en hurlant tels de pauvres hères ayant entrevu le démon, ou pleurer comme des enfants. En définitive, et avant que n’ayons pu avoir quelque réaction, le roi des crustacés s’enfuit vers le quartier habité. Nous restâmes là à nous dévisager, figés dans notre stupéfaction. « Je vous l’avais dit, je vous l’avais dit », nous lance l’autre énergumène, je suis un sorcier, un grand sorcier. José en avait les yeux écarquillés, il semblait dans un autre monde, aussi, nous eûmes la présence d’esprit de ne point répondre, qui sait, que pour la fois suivante il nous appelle un cyclope. Nous n’avions vraiment plus l’âme ni à dormir ni à festoyer, seulement de vite rentrer chez nous. « Il va revenir, vous devez rester là », que faire, c’était là un choix bien difficile. Un silence régnait sur notre petit campement, un silence lourd qui fut coupé par le retour du crustacé. José sourit de ses belles dents, il semblait satisfait. L’horreur continuait, on pouvait voir, sorties de l’extrémité de la bouche de l’animal, les extrémités de ce qui devait être quatre jambes. À en repérer les chaussures et les lambeaux de tissus, il s’agissait du voisin d’en face et de Paulette. Il les avait engloutis tous les deux, et finissait de les avaler, sa gorge étant trop petite pour les gober d’un coup. Nous restions là pétrifié de peur, avec l’animal à nos côtés. Celui-ci se dressa sur ses pattes et commença une sorte de danse. José applaudissait tout en battant la mesure de ses mains. Les pitreries de son ami le crabe l’amusaient beaucoup, car il s’agissait bien de pitreries. La grosse bête nous fit tous les tours que l’on peut faire sur six pattes, quatre, avec deux, il se retrouvait en général la carapace en l’air, avec José pour l’aider à se remettre d’aplomb. Nous avions du mal à nous dérider, mais le spectacle était si drôle, qu’au bout d’une heure de ces charlataneries, nous riions nous aussi de bon cœur. Inépuisable, le crustacé, un vrai gamin, à nous faire dix fois le même spectacle si on lui prêtait nos rires. Et ça recommençait pour une nouvelle variation. Avec son copain José, ça frôlait le Laurel et Hardy, gros gags où tout le monde tombe par terre, se cogne la carapace sur la tête de l’autre en éructant. Car il continuait inlassablement d’éructer. José nous invita même à monter sur son dos. Après quelques hésitations, nous montâmes à crabe sur la carapace de la bête afin qu’il nous fasse faire le tour de la plage. On se crut, l’espace d’une bonne heure, sur un manège enchanté, à traverser la plage de long en large, à sauter, à virevolter, bondir et trotter au pas de crabe. C’est inconcevable à dire, mais ce fut une soirée inoubliable, qui resterait gravée dans nos petites têtes. Apparu l’aurore au doigt de rose, le crabe nous fit comprendre qu’il se devait de rentrer dans son océan. Nous parcourûmes l’espace qui nous séparait de la mer, main dans la main dans la pince, et nous lui fîmes un dernier au revoir de la main lorsqu’il s’engloutit dans l’eau. Nous étions sur le chemin du retour. Le soleil resplendissait. Nous passâmes devant le dispensaire où se pressaient une foule de badauds. On jeta un regard pardessus la foule. Le voisin d’en face et Paulette gisaient là dans un bain de sang, égorgés tous les deux. La foule s’empressait de savoir qui des deux avait tué l’autre, le premier. Nous sourîmes gentiment, fîmes demi-tour et continuâmes notre promenade vers le retour à la cabane. Nous fredonnions de petites chansons où il était question de romance, d’amour, de larmes, le tout entrecoupé de quelques éructations. Lao-Tseu Roi Il est difficilement compréhensible, qu’au 21ème siècle, et après tant de civilisations et d’esprits brillants, qu’il ne soit pas encore compris ce que les Taoïstes appellent le non agir. Notre cher compagnon Lao-Tseu, il y a déjà quelques millénaires de cela, avait bien compris ce que l’on pourrait appeler l’inconscient des êtres, du monde, ou pour être plus vaste, de l’univers lui-même dans sa présence naturelle. Quand je dis inconscient, je parle plutôt d’une force invisible agissante. La science actuelle est capable de définir la position d’un astre avec une précision de l’ordre du millimètre, ce qui est un effort insurmontable de calcul de force, d’attraction, et de phénomènes plus compliqués les uns que les autres. Mais elle n’est pas capable de comprendre, et cela est la base même de la physique, compréhensible par un enfant de trois ans, qu’à toute force, à toute action, s’oppose une contre force de sens inverse. Si j’appose mon poing sur un mur et que j’appuie, au même instant, le mur exerce une force de réaction contraire, de même intensité que celle que j’exprime, c’est la résistance du mur à l’action de mon poing. Cette réaction est une force invisible, inconsciente dans le fait que moi, je suis conscient d’appuyer mon poing sur le mur, la contre force non, mais elle est bien là. Il en va de même pour toute chose, et c’est ce que Lao-Tseu enseigne dans sa formulation de non agir ; à savoir que si l’on tente de régler les choses, une même force de dérèglement vient entraver la première action, ce qui au final, complique tout le système et ne fait que créer plus de confusion, et donc plus de dérèglement. Pour cette même raison, notre amant du Tao n’aime guère les bienfaiteurs, car derrière un bienfaiteur vient toujours un faiseur de trouble, de terreur. Qui a tort ou a raison ? Le bienfaiteur ou le terroriste ? Une chose est sûre, c’est que le bienfaiteur amène le terroriste, pour cette raison encore, Lao-Tseu préfère s’en tenir à une situation plus simple, à savoir que pour éteindre les semeurs de trouble, il suffit tout simplement de ne plus proclamer les bienfaiteurs ; en faisant taire les bouches de bonté, par contre réaction, l’argument de la terreur s’éteindra de lui-même. Cet état de repos, de non agir, sans traction et attraction aucune est l’état de l’âge d’or, où finalement, tout s’articule librement et sans frottements aucuns, où l’on peut jouir de l’autre sans avoir à le soumettre, comme dit Lao-Tseu, l’obscurité côtoie la lumière dans une délicieuse harmonie. Nos avons tous connu de ces moments, où toutes les tensions psychologiques sont éteintes, et où les réunions entre personnes sont une source de miel. Devant cet énoncé on ne peut plus simple, de la force et la contre force, du repos de l’âge d’or, il ne nous reste plus qu’à pleurer devant notre condition d’homme civilisé, où le bonheur ne peut être entrevu que par le fruit d’une action. Qui va oser blasphémer que la démocratie n’est pas bonne, qui ne veut pas d’un bon ami, d’un bon voisin, de rapports équitables avec les siens, avec tout le monde, qui ne veut pas du fruit de l’âge d’or ? Qui ? Personne ! Mais la nature est ainsi faite qu’à vouloir promulguer l’âge d’or à coup de lois et de règles, pour ne pas dire à coup d’efforts surhumains, vient l’ombre de cette même démocratie, vient son mauvais génie, son propre démon, démon du désordre, du chaos, de la guerre et de l’abus de l’autre. La démocratie ne trouvera donc jamais la paix, car elle est le fruit d’un effort, d’une action, elle ne fait que générer son propre poison, qui peu à peu l’asphyxiera et la rongera. Le destin de la démocratie est le chaos, son propre effondrement. Vous me direz, c’est le devenir de toutes choses, comme l’onde qui passe, qui se lève et s’abaisse, et quand la démocratie s’écroulera, nous établirons d’autres règles, plus étroites, plus contraignantes, plus solides, pour endiguer la marée de l’évolution. Lutte inutile nous dit Lao-Tseu, vous vous fatiguerez avant la mer, car la mer prend son temps, la mer suit le cycle de la nature, je dirais presque du repos, elle ne peut donc point se fatiguer, elle n’imagine pas autre chose qu’elle-même. Nous continuerons donc à faire nos petites règles, nos petites lois, pensant qu’un jour, le repos sera d’actualité. Rêve d’idiot, il faut bien le dire, qui prend comme référence que le monde est meilleur - devant - que sous nos, pieds, et qu’il faut donc suer et marcher, jusqu’à ce que mort s’ensuive. Il faut bien rendre à Lao-Tseu ce qui lui appartient, qu’il n’y a de bonheur que dans le non-agir. Reste à savoir si c’est bien le bonheur qui intéresse nos bonhommes. À les écouter, oui, à les voir s’agiter, non. Devant cette mauvaise farce, du gars qui dit une chose et qui en fait une autre, nous devons bien avouer que nous sommes pris dans le tourbillon d’un grand délire. Une espèce de fièvre où l’esprit ne peut plus se reposer, et chaque fois qu’elle prétend quelque chose, ce n’est en fait, que la prétexte à la prochaine spéculation, égal au délire. Un délire peut être intéressant, comme prêcher le faux pour avoir le vrai, mais il faudra bien à un moment, revenir, car les fièvres relèvent de la maladie, et la maladie, si elle est chronique, abat son sujet. Que l’on ne vienne donc plus me parler des petites lois et des petites règles, d’un bonheur pour tous comme fruit d’un effort commun, car alors, je serais obligé de rire. Je rirais de la même manière que si un malade sur son lit, souffre de me voir en bonne santé, et qu’il veuille me faire croire, qu’un seul de ses délires vaut mieux que toutes mes bonnes respirations. Voilà, la chose est dite, elle est on ne peut plus simple, vous voulez du bonheur, proclamons donc la dissolution des tous les états et de toutes les structures socioculturelles. S’il y avait un bon film à faire, version sauce paranoïaque américaine, ce serait celui de la dissolution de l’état. Le film commencerait par un discours de Monsieur le président, qui annoncerait sa destitution ainsi aussi que toutes celles de l’état. Je vous rassure, dans le film, tout se terminerait bien, il y aurait bien un couillon pour faire tout foirer, le bienfaiteur donc, et finalement, les honnêtes gens reprendraient leurs esprits, c'est-à-dire retourneraient à leur maladie. Après un moment de frayeur, se reformerait le nœud. Dernière scène du film, un clampin qui reprend le chemin du travail. Action: il se retourne comme pour chercher quelque chose, quelque chose qu’il a perdue, ou plutôt qu’il avait retrouvé et qu’il a de nouveau perdue. Il reprend donc le chemin de son travail, mais une graine a germé, il s’en va donc d’un pas gai et sifflotant. La vague L’homme racontait : J’étais là, sur une plate-forme pétrolière, au milieu de l’océan. On m’avait envoyé pour quelques travaux techniques. Accoudé sur la balustrade, je sondais l’horizon, en quête de je ne sais quelle méditation. Puis vint la vague, scélérate, celle qui surgit d’on ne sait où, par le hasard des choses. Des vagues comme cela, on n'en voit que très peu. Les marins les ont quelquefois rencontrées, et en parlent. Du haut de leurs trente mètres, ces monstres peuvent renverser et avaler un paquebot. Quand elle arriva et qu’elle frappa de plein fouet la plate-forme, je me souvins alors de Schrödinger, et de ses équations. Équations d’ondes, où de temps en temps l'une d'elles capte l’énergie des autres et prend alors des mesures en dehors de la normale. La traîtresse devient alors énorme, elle devient scélérate car en dehors de ce que la nature peut supporter. Elle emporte tout, les cargos, les hommes, c’est la vague scélérate, c’est la vague de Schrödinger. Le surf est de nos temps très à la mode surtout chez la population jeune, les adolescents dira-t-on ou ceux qui ont perduré sur ce chemin. Espèce de spiritualité de la vague, on fait du surf comme on entrerait en religion. Le but est de trouver la vague, et de la surfer. Certains extrémistes de ce sport en ont fait un art de vivre. Le film « Point Break » en est le reflet. Plus que de surfer, on part à la quête de la vague métaphysique, presque à la recherche d’un Graal, fait d’eau et de mouvement d’eau. Ces relents « new âge », il faut bien le dire, est une sorte de philosophie qui a pour ressort la prophétie d’un âge nouveau, d’une nouvelle manière de vivre, sur la vague, sur la vie. Nous pourrions en rester là, à la vague métaphysique, celle qu’il s’agit de surfer, mais que, sûrement, on ne rencontrera jamais, et que si par le malheur des événements, nous finissions par rencontrer, nous emporterait et nous broierait, ainsi se termine le film « Point Break », la vague comme point final. Faisons malgré tout un pas de plus, essayons d’être raisonnable, de sortir de la légende, du mythe, et de retourner à Schrödinger. Les équations sont bien là, elles ne prêtent pas à confusion, alors pourquoi les nier ? Je n’ai pour cela qu’à me rappeler, mon adolescence, ou pour être plus général, l’adolescence. Il se forme comme une dépression, un trou. Au fur et à mesure que ce gouffre avance, se lève une vague, monstrueuse. Toutes les promesses qui nous ont été faites depuis l’enfance sont comme aspirées et servent à élever cette montagne. Montagne traîtresse qui prend tout notre capital, tout notre bonheur pour le mettre à l’épreuve. Ce n’est pas l’épreuve du feu, mais celle de l’eau, celle de la folie, ou tout doit être remis en cause, ou tout doit se faire chaire. Cette montagne se dresse soudain devant nous, elle porte le nom de « vie ». La vie soudain nous apparaît, énorme, majestueuse, et dans sa nouveauté, effrayante. Le bruit est assourdissant, tellement assourdissant qu’il nous rend muets de peur et de stupéfaction. Plus les promesses ont été nombreuses, et plus la vague sera haute, terrifiante. Le mutisme et l’autisme de l’adolescence viennent de cette vision, de cette vague qu’il va falloir affronter. Il va falloir ce jeté à l’eau, prendre la planche et foncer dans l’antre de l’ogre. Moment, je le répète encore, terrifiant, celui du premier envole, celui où l'on se jette dans le vide. Moment terrifiant certes, mais qu’il faudra dépasser. Heureux celui qui aura subi le baptême de la vie, car de toute peur, il se sera défait. La vague est eau, nous sommes aussi d’eau, l’une et l’autre ne peuvent se faire de mal, l’une et l’autre ne sont que des mouvements qu’il va falloir appréhender et intégrer, apprendre à surfer, voilà, rien de plus. Le premier choc est brutal, la confrontation assourdissante, on croit que l’on va se noyer, mais finalement, on s’en sort avec une bonne tasse d’eau avalée, et nous voilà initiés au jeu de la vie, avec ce réconfort que, finalement, on y a très bien survécu, ce qui laisse la place à bien de nouvelles aventures. Malheureux celui qui aura pris peur, et qui restera toute sa vie comme un oiseau déplumé dans son nid. À quoi bon avoir des ailes si l’on ne peut voler. L’aigreur au fil des années ne fera qu’augmenter, et d’aventures, il n’y en aura point. Seulement, que de rester dans son nid douillet, tel un bateau amarré dans son port et qui ne verra jamais le large, un bateau de décoration qui ne pourra avoir de prétentions, que celles de ses aventures manquées. La vie ne sera alors qu’un long refrain amer, d’un amour qui n’aura jamais vu le jour, d’un amour avorté. Le miel de la trahison Vérité inavouable, imprononçable que celle du " le miel de la trahison ". Nous savons tous que l’abeille va de fleurs en fleurs, pour récupérer le matériel sexuel de ces mêmes fleurs, le transporter dans la ruche et en faire du miel. Le miel est avant tout un condensé, un substrat de matériel sexuel. Matériel sexuel, pollen, qui seul ne sert à rien, il doit en appeler un autre, l’autre moitié du matériel génétique, pour que la fusion des deux donne la vie. C’est là qu’intervient l'abeille, vectrice de polenisation, vecteur sexuel, l’abeille prend mais si féconde. Dans les esprits, le miel est symbole de douceur, de sucre, du délicieux nectar. Cette douceur est métaphoriquement collée à ce qui est bon, et ce qui est bon est bien, le miel a donc prit figure de vertu. Le miel humain, si l’on peut s’exprimer ainsi, viendrait d’une purification, d’un filtrage, ou l’on retirait ce qui est bien de ce qui est mal, jusqu’à obtenir cette potion de la douceur, et donc de la vertu. Dans nos esprits, on fait du miel en raffinant, en extrayant toujours ce qu’il y a de mieux. Mais les choses ne sont pas ainsi. Le miel reste avant tout un condensé de matériel sexuel, le miel est un substrat sexuel, une métaphore de la sexualité, de la jouissance. On aime le miel comme on aime la jouissance. Tout ce matériel sexuel qui a été volé aux fleurs, nous nous en réjouissons. Mais c’est aussi en volant les fleurs que l’abeille les féconde, c’est un jeu ou tout le monde gagne, où tout le monde trouve son parti. Métaphore de l’abeille, métaphore du miel, métaphore de la jouissance, métaphore d’un vol qui finalement convient à tout le monde. La trahison est acide, elle est ce coup de couteau dans le dos qui nous fait désespérer de notre ami, d’un être que nous chérissons. Il nous a trahis, tout est détruit, il ne reste plus que le désespoir et l’amertume. La fleur j’imagine, en voyant venir l’abeille, pourrait avoir la même réaction et se mettre à penser : « Elle va me voler mon pollen, de fleur je ne suis plus car je ne vais avoir de descendance. » Cependant, notre fleur est un peu plus maline que cela, car elle sait qu’elle aura une compensation, l’abeille est commerçante, et donc quand elle prend, elle donne aussi, elle est donc la bienvenue. La fleur fait donc tout ce qu’elle peut pour faire venir l’abeille à soi, et cela avec de jolis pétales, avec des couleurs qui se voient de loin. OK pour l’abeille et pour la fleur, le conte est joli, reste à voir ce qu’il vaut ! En effet, derrière le coup de couteau, il n’y a qu’une trahison, et la trahison ne donne pas, elle prend, et détruit tout. Moment incompréhensible que celui de la trahison, moment où tout s’effondre, moment de destruction. Qu’est-ce qui est détruit, qui est détruit ? Celui qui est détruit, c’est moi, celui qui a été trahi. Me viendrait-il à l’idée, moi, de me planter un coup de couteau dans la jambe, dans le bras ou ailleurs ? Non ! Non, parce que je suis moi-même, et ce simple fait n’a pas besoin de preuve. « Je suis », et je me sens très bien ainsi, « je suis » n’a pas besoin de preuve. Quand je reçois un coup de couteau, viens donc cette contrevérité à ce « je suis ». Il y a donc autre chose que moi, qui pense différemment, dont l’intérêt est autre que le mien, un autre « moi » en quelque sorte. Autre « moi » car un « moi » ne peut se faire du mal à lui-même. Si cet autre « moi » donne une preuve qu’il existe ( le coup de couteau ), c’est automatiquement qu’il est autre que moi-même. Le coup de couteau, en l’espace d’un instant, en l’espace d’un tranchant qui vient me rompre la chair, en l’espace de cette blessure ouverte, est avant tout une expérience que je ne suis pas que moi et qu’il existe un autre moi. Cette expérience douloureuse nous ouvre au monde, nous ouvre la dimension de l’autre, c’est là qu’il apparaît. Au-delà de cette apparition, survient aussi la polarisation de ces deux «moi », entre je te désir ou je ne te désir pas, c’est alors qu’apparaît la possibilité de la sexualité, de la possibilité de la vie. La trahison détient cependant un autre paramètre. Pour être trahi, il faut d’abord avoir eu la confiance de l’autre, de celui qui nous a trahis. La confiance est comme une promesse, qui peu à peu prend forme, promesse qui nous laisse dire que l’autre finalement est identique à moi-même. Nous nous confions donc à lui, nous nous développons ensemble, nous pensons pouvoir être égaux, deux « moi » qui n’en font qu’un, mirage impossible car la vie est avant tout sexuelle. Sexuelle dans le sens où elle nous porte à aller vers les autres, autre que moi, invitation donc à la trahison. La vie va avec la multiplication, avec la sexualité, à savoir deux « moi » différents qui vont se rencontrer, et former un nouveau capital. Le fruit de cette rencontre ne peut avoir lieu qu’après la trahison, pour que les deux « moi » soient bien distincts et qu’est lieu la polarisation. La trahison, la chute de l’amitié, vient donc de deux « moi » qui se font des promesses, promesses que nous sommes différents, mais que nous pouvons cependant bien nous entendre. Cette entente ne peut d’ailleurs se faire que par des promesses, mensonges que nous sommes différents, mais que nous pouvons malgré cela être lié l’un à l’autre. Deux « moi » avant l’expérience de la trahison ne peuvent donc vivre qu’au travers du mensonge. Promesse de bonheur, que tout ira bien, illusion d’un monde meilleur. Tant que nous en restons là, à un jeu de bisounours, l’illusion peut perdurer. Mais que ne viennent traîner une femelle ou une possibilité de lucre important, car alors plus rien ne tient, car alors la pulsion vitale se réveille, et alors, alors, vient le coup de couteau qui nous donnera la preuve que notre amitié n’était faite que de futilités, et que les futilités valent moins que les pulsions de la vie. J’imagine déjà la tête de tous nos écoliers, qu’ils soient adultes ou enfants, et qui me répondront que les pulsions vitales doivent être transcendées. La seule transcendance qui existe, c’est la trahison. Si l’on ne peut la supporter, il ne reste donc qu’à la nier et à vivre de rêves infantiles. On est alors devant le petit garçon à qui on fait croire au père Noël, que le père Noël est partout, qu’il est la vie même et qu’il va nous faire plein de cadeaux. Moment de stupidité, que celui du père Noël, moment impensable, intenable, où nous serions toujours obligés de nous reclure un peu plus au fond de nous-même, afin d’attendre la venue du papa à la barbe blanche, avec ses cadeaux, cadeaux comme négation de la vie. À ce jeu, nous finirions tous atrophiés, à la limite du gâtisme, recroquevillé sur nous-même, dans notre monde de puérilités, puérilités qui finiraient par nous étouffer. Il y a dans la guerre cet énoncé que le père Noël ne nous intéresse point, et que l’autre, je vais lui fendre le crâne. Il y a dans la guerre cet énoncé, qu’une fois le crâne rompu, et une fois la peine terminée, de ses cicatrices naîtra le désir, et puis l’amour. Mais bon le sujet de ce texte n’est pas celui de la guerre, mais celui de tous ces petits « moi » confrontés à cette trilogie que sont les promesses, la trahison et la sexualité. L’enfance est faite de promesses, pour cette raison l’enfant a le don de l’amitié, l’enfant est le meilleur des amis, car il n’y a aucune interférence de type sexuelle qui vient pâlir la relation. L’enfant se nourrit de promesses, c’est ce qui le fait vivre, c’est ce qui le fait croître, si intervenait le paramètre sexuel, il cesserait alors de grandir, pour cette raison, les enfants doivent être soumis le moins possible à la trahison. Mais il faut bien comprendre que la finalité de l’enfance est d’en faire un bel adulte. Adulte sexué qui devra connaître la pulsion de la vie s’il ne veut pas rester un adulte enfant toute sa vie. Il devra donc connaître la trahison de toutes les promesses qui lui ont été faites. Pour cette raison, dans les tribus ancestrales, les adolescents étaient soumis au rite de l’initiation. Rite douloureux aux allures de trahison, où les promesses et l’enfance doivent être humiliées. C’est le seul moyen pour faire qu’un enfant devienne adulte, pour éviter d’arriver aux enfants adultes avec leurs croyances de père Noël. Là est la raison du miel de la trahison, que toutes les promesses devront être trahies. Dans ce point se situe la vie, dans ce point se situent la vie sexuelle et la continuation de la vie. Le zonard du 5ième Il n’était pas venu à l’esprit de Jean-Paul et Benoît, qu’en roulant avec leur voiture cloche à fromage, ils ne passeraient pas inaperçu. La première patrouille de police leur demanda donc de se ranger sur le bas-côté : « Vos papiers, et aussi celle de la voiture » « Nos papiers ? Nous n’en avons point, idem pour la voiture. » « Et cette bagnole, c’est quoi ? » « Une Papamobile » « Intéressant, veuillez descendre du véhicule s’il vous plaît » Les policiers examinent la voiture cloche à fromage, et que découvrent-ils : une tonne d’or, là, caché sous les sièges. Situation embarrassante que Jean-Paul et Benoît auraient préféré ne pas découdre. « C’est mon cousin du Vatican, il est en train de repeindre les murs de sa chambre, et il nous a demandé d’évacuer les monstres ». « Vous n’avez rien de mieux comme réponse ». « Si, si, parce que mon cousin, il vient d’Afrique, il m’a donc demandé de pouvoir l’héberger, mais la couleur de la pièce ne lui convenait pas, toutes ces dorures, cela lui donnait le mal de mer … » Jean-Paul et Benoît sont devant le fait accompli, ils sont rois du Vatican et assis sur un palais en or, et ne savent pas plus comment justifier d’où vient le magot, et ce qu’est le magot. Voilà en quelques mots l’état du siège ecclésiastique, prêchant la foi dans le monde, rendant hommage au roi des pauvres, et qui ne savent plus comment faire, auprès de leurs fidèles, pour justifier les gigatonnes d’or. Il faut bien l’avouer, on est au bord de l’abîme, abîme d’un magot qui est là, injustifiable. Abîme d’une escroquerie qu’on ne peut plus cacher, qu’on ne sait plus comment cacher. Jean-Paul et Benoît continuent donc de nous parler de leur cousin, qui vient d’Afrique, qui cherche une piaule … Notre petit Jésus, il en deviendrait pâle et en perdrait son Hébreu, s’il devait se rendre compte où ses propos ont été catapultés par ceux qui devaient le représenter. Il faut donc le dire, l’arnaque est là, gigantesque, c’est le plus grand casse de l’histoire, des mégatonnes d’or, objets d’art en tout genre qui valent chacun mille fois leurs pesants en diamant, le Vatican, la caverne d’Alibaba, et ses quarante papes, et ses quarante... Cela n’est pas nouveau, des papes, il y en a eus, et ils n’ont fait chacun, l’un après l’autre, que perpétuer une tradition, une tradition de casseur de coffre, une tradition de bandit. Plus que de casser des coffres, ils ont légalisé la chose, et ce sont les pauvres qui payent, et ce sont les représentants du roi qui encaissent. L’arnaque dans toute sa splendeur, qui se répète de génération en génération, et tout le monde reste là, sur la place Saint-Pierre, à regarder nos larrons en toqués s'élever toujours plus, du haut de leur montagne d’or. C’est quoi le truc ? Le truc a commencé dans les quatre évangiles et dans leur propagation. Il y aurait eu un homme, Jésus, qui aurait parlé au nom de son père, Dieu, et ses paroles seraient comme du miel qui retirerait toute douleur de la vie, ce miel aura un nom, l’amour. Soyons un peu rhétoricien et analysons la forme des quatre évangiles. Ils viennent de quatre personnes différentes, donc quatre interprétations différentes, car les sensibilités ont le don d’accaparer les histoires et de les transcrire de manières différentes. Non, les quatre évangiles sont à peu près identiques, trop identiques. On y parle de mêmes choses, des mêmes événements, cela ressemble trop à un usage de faux, une espèce de commun accord pour sortir une feuille, œuvre de communication. Accord avec qui, pour qui, on ne sait plus, mais accord, il y eut. L’arnaque peut donc commencer. Rome était maître d’œuvre dans la communication, pareil que dans nos temps modernes avec ses médias, toute information lâchée, un mois plus tard est complètement oublié, et rapidement, on ne s'en souvient plus la source ni même la raison d'être, cela s’appelle noyer le poisson, afin d'entretenir le poisson, c'est-à-dire manipuler ! L’arnaque je le répète, peut donc commencer. Au-delà de la forme, analysons le fond. Les quatre évangiles retracent une espèce d’histoire monocorde, les personnages n’ont aucune résonance les uns avec les autres, une mauvaise « Novela » dirait les cinématographes, un mauvais script. Les personnages de ces évangiles apparaissent là, les uns après les autres, comme par le hasard des choses, rien ne les relie les uns avec les autres, je le répète, une mauvaise histoire, un mauvais film. Viens Magdalena, prostituée retentissante, apparaît Barabbas, assassin lui aussi retentissant, apparaît Juda, faisant un baiser à Jésus, apparaît toutes sortes de personnages dans une histoire sans trame, tels des fantômes venant errer, et censé annoncer une bonne nouvelle. Tous ces personnages cependant forment comme les pièces d’un puzzle, qu’il s’agirait de remettre en place, histoire de découvrir, ce qui s’est vraiment passé, et ce qu’a vraiment été la vie de Jésus, et qui il était réellement. Comme si les quatre évangiles avaient été écrits, déformés, afin de légitimer un mensonge. Il fallait mentir sans mentir, et cela afin de rester à peu près crédible auprès des acteurs et spectateurs de l’époque, vérité travestie … rien de plus, pour que le mensonge reste crédible. Si nous devions retrouver le cinquième évangile, le vrai, il y aurait bien des surprises. Ce Cinquième évangile, je lui donnerai bien un nom : « Le zonard du cinquième ». Un zonard qui se fait laver les pieds par les prostituées, qui reçoit des baisers par de beaux garçons en guise de trahison, avec des amants jaloux qui prennent des allures d’assassins. Je vous parle d’une vraie « Novela », avec des interactions entre les personnages, où l'on s’aime, où on se déteste, on se trahit, où on se tue. Le héros de cette Novela ne peut être quelqu’un de bonne société, ni de bonnes mœurs, car l’exploit que Jésus a réalisé ne se conforme pas dans les compromis de gens de bonnes sociétés ni de bonnes mœurs. Jésus vient d’en bas, zonard et halluciné. Il ne pouvait être qu’un zonard, car seul un zonard sait faire valser les filles, sait faire valser les prostituées, jusqu’à ce qu’elles soient folles de lui, au point de le vouloir mort. La valse de l’amour est un sport que seul le voyou connaît, faire tomber l’autre à terre, et cela par l’humiliation de l’amour, et plus encore si affinités ... le voyou sait plaire, et pour plaire, il doit humilier. L’humiliation n’est pas alors une fin, mais un moyen, pour être le maître, pour être le mâle de toutes les femelles. Il en est ainsi. Le sacré s’est levé de cette valse démente. Il est aussi sûrement à parier que Jésus était très beau, il flairait l’amour, avec ce style mystique, il ne pouvait que toutes les faire tomber, les femmes, les prostitués, et les hommes aussi. Le cinquième évangile, Espèce de Novela informelle, sans frein, où la sensualité a rendu tout le monde fou, et où tout le monde est tombé dans l’abîme de la jalousie, de la vengeance et de la manipulation. Gigantesque fête lubrique, où l’on valsait, on valsait, et où tout le monde valsait aussi, par les fenêtres ou sur des croix. Cette fête démoniaque, jalousie oblige, a dérangé les voisins, au point que cela s’est su, jusqu’en haut, jusqu’aux gens de pouvoir. Les gens de pouvoir n’aiment pas les fêtes qui ne sont pas les leurs. On a donc arrêté Jésus, sous un quelconque prétexte. L’année zéro de notre histoire est inscrite dans une époque de fortes tensions politiques et religieuse, les romains d’un côté, le pouvoir religieux juif de l’autre côté, et qui se trouve de par sa situation de colonie Romaine, le pantalon baissé, bref … Qui a manipulé qui ? Qui s’est servi de qui ? Qui a spéculé sur qui ? L’information est perdue, mais une chose est certaine, les uns et les autres se sont mis d’accord, ont décidé de partager le gâteau ensemble, et de commencer la plus grosse arnaque de tous les temps. Le but est de rester riche d’avoir de jeunes donzelles dans sa couche la nuit tombée, et pour cela garder le pouvoir. Chacun donc de son côté a commencé de se laver les mains, les Romains sous le personnage de Pons Pilate, les religieux en affirmant qu’ils ne voulaient pas d’un pouilleux dans leurs églises. Chacun déclare qu’il n’a rien à voir dans tout cela, que l’enfer, ce n’est pas eux mais les autres, chacun est vierge, chacun à son alibi, la casse peut commencer. On a donc inventé cette légende du roi de pauvres, cette légende de l’amour, d’un commun accord entre le pouvoir romain et le pouvoir religieux, histoire que tous les pauvres du monde payent, qu’ils payent pour dix mille ans. Qu’ils payent en premier lieu les Romains, puis le pouvoir religieux en place. Les religieux par ce stratagème remontent leur culotte, et les Romains n’ont même plus besoin d’aller chercher la dîme ni de faire régner l’ordre, c’est le nouveau pourvoir religieux en place qui s’occupe de tout, via les pauvres, car c'est toujours le pauvre qui doit fournir l’effort. Jésus, on peut se l’imaginer, a bel et bien existé, et j’espère bien, qu’un jour, quelqu’un aura le courage, la raison et l’intuition de réécrire la vraie histoire du zonard du cinquième. La belle Jérusalem Le cœur guerrier : Le plus valeureux des guerriers est le guerrier israélien, le guerrier juif, il est là, comme a protégé son amour, son amour qui n’est jamais venu, et qu’il attend de pied ferme, prêt à affronter tous les dangers, dans cette attente. Notre bon juif attend son bien-aimé, depuis des siècles déjà, depuis des millénaires, il attend son messie. Cœur courageux, cœur romantique, il rêve de sa belle, qui il l’espère, un jour, viendra. Notre bon guerrier juif n’aime que ce qui est fictif, la bien-aimée est dans le futur, dans un futur qui n’arrivera jamais, une bien-aimée aux allures de fantômes, aux allures d’ailleurs, c’est le cœur romantique, c’est le cœur guerrier. Excès d’un mâle orgueilleux, qui ne saurait trouver chaussure à son pied, et qui rend les hommes et les femmes sans désir, chacun campant sur sa position. La bite guerrière : Le plus lâche des guerriers est le guerrier chrétien. Il ne rêve que de puissance, que de guerres, sans fin l’une après l’autre, quand il gagne, c’est à cent contre un, délire de puissance, de destruction, tel un bulldozer, il est vainqueur en écrasant tout. Comme le dit la Bible, « derrière mon amour, se cache la guerre ». Le chrétien a bien rencontré sa bien-aimée, mais la bien-aimée, la vierge bien-aimée, est frigide, elle ne peut rien recevoir des hommes. Pour cette raison, nos hommes invoquent devant elle des arguments toujours plus puissants, espérant un jour, briser cette frigidité. Guerrier chrétien, guerrier superpuissant, puissant comme cent hommes, car son bien-aimé est frigide, il lui faudra donc toujours, encore et encore, être plus mâle, pour rompre la malédiction. Malédiction d’un monde qu’il faut changer et rendre toujours meilleur, malédiction d’une femme qui ne peut être aimée telle qu’elle est, malédiction de l’amour qui finalement n’en est pas un et rends ses femmes frigides, c’est la bite guerrière. La chatte guerrière : Le plus tendre des guerriers est le guerrier musulman, car qui fait la guerre chez les musulmans ? Ce sont les femmes. On les cache de leurs attributs féminins, la guerre n’aurait pas de connivence avec ce qui touche aux sens, au sexe, la femme est alors couverte d’un voile, d’une burka. Les Musulmans, plus que d’aimer leurs femmes, les vénèrent, telle une mère, on ne peut donc la touchée, et c’est de cette frustration que viendrait le sentiment d’aller faire la guerre, c’est dans ce sens que je dis que c’est la femme qui fait la guerre, c’est la chatte guerrière, sexe inaccessible qui fait baver les hommes et les rend fous de désir, désir inaccessible qu’il va donc falloir évacuer d’une manière ou d’une autre. La guerre est sainte, la guerre est sacrée, comme sa mère, hymne ou le sacré de la vie n’a que peu d’effet, hymne où la vie n’est qu’un désert, hymne au désert, où la femme est torride et rend les hommes fous, fous et impuissants, il ne leur reste plus alors qu’à se battre, c’est la chatte guerrière. Nos trois larrons, nos trois guerriers, ont pris place à Jérusalem. C’est l’histoire de guerriers en respect de leurs amours pour les femmes, que d’une manière ou d’une autre, ils ne peuvent aimer, sujet donc à toutes les frustrations, femme comme outil de guerre, à faire la guerre. Que Jérusalem périsse dans ses amours impossibles, car finalement, les histoires de fesses des autres ne nous intéressent pas, qu’ils se démerdent, qu’ils se débrouillent, les valeureux, les tendres et les lâches. Il y a des histoires de cul qui sentent mauvais, et celles-ci sont dans ce cas. Celui qui prétend ne pas pouvoir aimer les femmes, se doit d’avouer qu’il a une tentation secrète pour les rites sodomites. Le monothéisme est une histoire d’homme, de mâle impuissant pris dans une diagonale de la psychose du père, de la destinée, et où finalement, ils haïssent tous les femmes. Ces histoires de cul ont toutes comme destination qu’elles se termineront tragiquement ( la croyance en l’apocalypse est là pour nous le confirmer) ne nous intéresse pas. Je le répète, qu’ils se démerdent, et si apocalypse, il devait y avoir, ce sera celui des chrétiens, des Musulmans et des Juifs, en espérant quand même qu’ils ne se trompent pas de trous, car ces psychopathes manquent franchement de tact. La dernière Tentation du christ aurait été de s’accoupler avec sa mère, ultime désaveu, qu’il aurait tant aimé tuer son père. Haine qui tourne à la folie, folie qui va jusqu’à faire sortir les morts de leurs tombes, cauchemar qui tourne au film d’horreur, tout au moins, telle est la légende. Je vous laisse deviner ce qui revient aux Juifs, et ce qui revient aux musulmans. La belle Jérusalem, face à un mur, qui ne peut que se lamenter de son sort, et pleurer. Dragons L’histoire médiévale et antique est remplie de légendes, et elles-mêmes de dragons. On décrit le dragon comme une espèce de serpent, crachant du feu et circulant dans les airs. Dans le dragon, il faut bien sûr voir le signe du démon, être obscur qui vient semer la terreur chez les humains. Le dragon est aussi assigné du mystère animal sorti tout droit de la fantasmagorie, et qui dépasse l’entendement des faits réels. Le fait du démon et du mystère mènent au fait du pouvoir, force qui bien souvent tourne au noir, tourne à la folie et à la monstruosité. Allez, soyons un peu pédagogue. Les trois éléments de cette trilogie mystère-démonpouvoir, et cela dans la fantasmagorie des époques qui lui appartiennent porte un autre nom que celui du dragon: la femme. Plus que la femme, la jouissance de la femme, qui, si on l’analyse bien, est imprégnée des couleurs du Mystère, du démon et du pouvoir. Femmes jouissantes proches de la démence, femmes qui avec leurs sexes en feu rendent les hommes fous, hommes qui perdent la tête, et hommes qui réduisent tout en cendres. Sexes féminins qui par leurs éclats font tomber les mâles dans les précipices du désir, sexes féminins aux allures de dragons. Les étapes de la jouissance féminines sont très simples, elles sont comme des étages, l’une portant l’autre, l’autre toujours plus fort que le précédent. La première étape de la jouissance est son absence, c'est-à-dire la frigidité, qui correspond au stade de l’enfance, le corps n’est pas encore mûr. L’enfant devient femme, la femme jouit au contact du sexe de l’homme, c’est le premier feu. Au simple orgasme, vient l’orgasme multiple, de la femme épanouie, qui crache du feu quand bon lui semble, qui sait gérer sa jouissance et l’amener où elle veut, cela correspond à l’âge de la trentaine. Puis vient l’orgasme tellurique, qui tel un tremblement de terre secoue le corps de notre Ève, le choc est violent, toutes les sécrétions sont évacuées du corps, l’urine la scelle. Ce type d’orgasme peut survenir chez les femmes à la quarantaine. Vient ensuite l’orgasme hémorragique avec perte de sang, les cellules explosent tellement, le plaisir est ressenti fortement, cette forme ne peut apparaître qu’à la cinquantaine. L’orgasme de la soixantaine est létal, il correspond à l’arrêt cardiaque, donc peu recommandable. Celui-ci intervient plutôt chez les hommes qui n’ont pas pris gare à leur âge. Voilà, tout est dit, ou à peu près, les dragons correspondent à des états sexuels, à des états de la sexualité. Un peu comme les étages d’une fusée, ils permettent au protagoniste de se déplacer dans l’espace, voire même de créer l’espace, toujours plus d’espace. L’activité sexuelle crée un espace, un espace psychologique qui lui permet d’entrevoir le monde et l’univers, telle une loupe. Plus la sexualité est développée, plus le prisme grossit, plus le monde aussi grandi. Le champ psychologique d’un individu correspond à sa propension sexuelle, à sa mode de jouir, à l’épate de feu sexuel dans laquelle il se trouve. Chaque étape correspond, si l’on pouvait expliquer les choses ainsi, à un moteur, à un type de fonctionnement, à une organisation des forces que donne la sexualité. Chaque étape aussi génère une nouvelle forme de Mystère, c'est-à-dire cette façon de percevoir le monde, toujours plus impénétrable, toujours plus puissant. La jouissance de la femme pourrait être comparée à un cyclone. L’œil au milieu, solitaires et tranquilles et toutes les turbulences qui viennent autour. Les vents s’organisent peu à peu, catégorie, une, deux … correspondants à des niveaux de forces, à des niveaux d’organisation de force. Nous avons pu compter cinq niveaux de force dans la jouissance féminine, il y a en a aussi cinq dans les catégories d’ouragans. Il serait bien de pouvoir d’écrire pour ne pas dire énumérer ces catégories, correspondant à la jouissance de la femme. La jouissance féminine est le feu qui révèle la beauté d’une femme, qui lui donne son éclat et sa saveur, ce qui nous donne à nous les hommes l’envie de la croquer. Plus encore qu’une comparaison naturaliste, la meilleure correspondance serait celle des forces nucléaires dans une étoile, dans un soleil, car ce dernier brille, rayonne, égal à une femme. Notre premier dragon sera donc jaune, comme le soleil, il s’agit d’une beauté commune, celle que l'on rencontre tous les jours, fait de douceur et d’impermanence. Un soleil en fin de vie tourne à la géante rouge, il se dilate, prends des proportions grotesques. Ce sera notre dragon rouge, énorme, de sa bouche ne sort pas du feu, mais de la lave, celle-ci coule de ses lèvres comme de la bave. Nous avons en face de nous une femme au fort caractère, beauté un peu masculine, fait de tempête et d’éclat de rire. Notre soleil meurt, il explose, cela donne une naine blanche, moment de flash, éblouissant, c’est notre dragon blanc, femme à la beauté éblouissante qu’on ne peut regarder en face tellement, elle éblouit. Dragon noir, dragon redoutable, correspondant à notre étoile qui a éclaté et qui s’est contractée sur elle-même, c’est le trou noir, c’est la beauté obscure qui nous trouble, nous fait peur. Le plus dangereux des dragons est le dragon transparent, l’ultime. À force de se concentrer sur elle, la matière en vient à s’annihiler, à disparaître, tout devient donc transparent, notre trou noir s'est transformé en matière invisible. Nous l’avons vue auparavant, l’orgasme final est l’orgasme qui mène à l’arrêt cardiaque, à la mort. Quand on rencontre un dragon transparent, le mieux donc est de se sauver en courant. Mais ce dernier est transparent, on ne le voit donc pas. Cela donne chez la femme, une sorte d’innocence, un feu que l’on ne peut voir, une beauté l’on ne peut même pas nommer tant, elle paraît simple. L’unique chose que l’on sait du dragon transparent, c’est qu’à sa naissance, il fait pleurer sa mère. Cette dernière qui a l’intuition des choses, sait intuitivement qu’elle a engendré un monstre, pour qui les hommes ne valent pas mieux que des fourmis. Il faut bien le dire, le dragon transparent n’est pas de ce monde, il flotte là dans l’espace, dans son immatérialité, vous épie, et jamais vous ne savez quand il vous tombera dessus. Petite histoire de dragon, petite histoire de jouissance, de sexualité, de mode fonctionnel de la sexualité. Quand dorénavant vous croiserez une femme, ou plus que de la croiser, vous ne la rencontrerez, faites le nécessaire pour savoir de quel dragon il s’agit, cela pour savoir à quoi vous pouvez vous attendre. Mais je le répète encore s’il s’agit d’un dragon transparent, celui que l’on ne peut voir, fuyez. Philosophie sur l’oreiller Il est plus dans les mœurs, sur l’oreiller, d’y faire des confidences que de la philosophie. Une confidence est cette chose que l’on ne peut avouer à tout le monde. On la confie donc à son amante, avant ou après une bonne étreinte. Une confidence ne peut être divulguée à tout le monde, car elle relève d’un excès ou d’une faiblesse. La conter au premier venu, il s’effaroucherait et vous répondrait : » Mais pourquoi me racontez –vous ces choses-là ? Les confidences sont de petits secrets que l’on ne consomme qu’avec des personnes choisies, et il nous pèse souvent de ne pas nous donner ouvertement à cette gourmandise, on rêve secrètement de trouver l’amante idéale avec qui on pourra se régaler. La confidence relève presque du pêcher de gourmandise sous des allures de confession, et qu’est-ce que l’on va confesser ? Souvent que l’on ne peut pas assez. Pour cela, vient la confidente qui va nous donner la preuve du contraire. L’amante, la confidente, est là pour nous comprendre, pas nous jugé, non, pour nous écouter dans notre déroute, dans notre sentiment d’une impuissance à vivre. Telle est notre gourmandise, ou tout au moins, c’est ainsi qu’elle s’exprime, frustration qui se veut gourmande. En signe d’assentiment, notre compagne nous fera l’amour, comme une expiation à notre peine, comme une preuve du contraire à notre frustration. Confidence d’hypocrite, où l’on vient chercher une pilule à sa déficience, où l’on vient pleurer pour être caressé. L’inquiétude est dissoute, résolue par la copulation, l’excès et la manque, de puissance est résolue par l'acte sexuel libérateur, et dans cette chute, l’oreiller pour nous confirmer que finalement tout va bien, que notre petite tête trouvera son repos, au cœur des câlins. Les hormones du doute auront été brûlées, tout va bien. Dans le cas de la philosophie, les choses sont plus compliquées ; Socrate déclare clairement qu’il aime la sagesse. En général, on aime une femme. Non, lui, Socrate aime la sagesse, sagesse qui est tout sauf une femme, car les femmes, nous le savons bien, ne sont pas sages, tout au moins, dans le rapport qui les lies aux hommes. Ainsi, va Socrate : on doit le respect à une femme, comme on le doit à sa mère, à savoir qu’on ne la touche pas, on l’aime d’un amour …platonique, voilà, rien de plus. C’est sous ses effets que notre ami Socrate commence à parcourir la cité et de chanter son chant lubrique : Toucher les hommes, pas les femmes, car celui qui touchera une femme touchera ma mère, et personne ne manquera de respect à ma mère. Nos petits hommes, défaits de toutes sensualités, se regroupent donc dans de petits comités, pour commencer le vaudou des idées. On fait s’entrechoquer les idées, on les faits se monter ensemble, à travers des « oui » et des « non », le résultat est un orgasme, ou telles des substances chimiques, les éléments se rassemblent pour en donner d’autres, c’est la maïeutique, l’accouchement des esprits, ou pour être plus précis, la création des esprits. Cette création relève du coït salvateur, les inquiétudes des uns et des autres se coagulent ensemble. Socrate le dit encore clairement, l’homme, le monde sont comme des individus solitaires, et qu’il est bon de vivre dans une caverne, en dehors de toute sensualité. Il doit repousser toute présence féminine, perturbable, et se tourner vers la lumière des idées, imperturbable. L’homme doit être hibou, la lumière de la vie fait mal aux yeux. Plus que la lumière des idées, l’obscurité comme absence de lumière, est là, bienfaisante Socrate aime le néant, cette matrice idéale qui jamais ne se trompe, c’est elle qui doit annoncer la vie, et non le ventre des femmes. Socrate, n’aimant pas les femmes, ne pourra pas leur soumettre ses inquiétudes, il devra, pour son impuissance à vivre, trouver d’autres interlocuteurs pour se délivrer de ses inquiétudes. Si ce n’est pas les femmes, à qui pourra-t-il s’adresser ? Aux hommes eux-mêmes bien sûr. Voyage dans le néant, comme on retournerait dans le ventre de sa mère, désir de protection, peur de vivre au lieu d’aller voir son amante, on se réfugie dans la matrice de sa mère. La maman de Socrate aurait quand même due expliquer à son avorton, que plus que d’être mère, et avant d’être mère, elle était une femme, et que cette femme était lui aussi le fruit de la vie et non pas d’une opération du Saint-Esprit, d’une belle idée. « Mon fils, je suis mère, mais avant d'être mère, je suis femme, je suis moi-même venue d’un ventre qui lui aussi a été fécondé, nous sommes tous fille et fils de la vie. Mais Socrate n’a que faire de ces jérémiades, il se blottit dans les jambes de sa maman, en espérant bien un jour retourner dans sa caverne sanguinolente qui lui donne tant de joie. Socrate a inventé la chimie des idées, la chimie de la création. La chimie est quelque chose de simple : on purifie d’abord, c’est la raison du « oui » et du « non », et une fois que l'on a notre substance, on la mélange à d'autres, que ce soit par frottement, par bouillonnement ou je ne sais quoi encore. Les idées se collent les unes aux autres, et il devient alors très facile de recréer toutes choses à travers ce jeu de collage. Le collage a pour modèle l’univers qui telle une matrice, donne naissance, a la vie. Socrate a réussi, il a crié haut et fort que plus que tout, il n’aimait que sa maman, et tout le monde l’a cru. De femmes, il ne veut point, et cette tare ne peut être comblée qu’en prétendant aimer la sagesse. Subtil mensonge, où la frustration de vivre, au lieu d’être brûlée, est utilisée comme poison. Le monde des sens est détruit pour donner place au monde des idées, les frustrations se multiplient à l’infinie et remplissent tout l’espace, ce qui donne naissance à la caverne, à la domination des idées au lieu des sens. Là encore, la maman de Socrate devrait le rappeler à l’ordre et lui expliquer : Mon fils, tu n’es pas seul au monde, nous ne sommes pas seules au monde, avant d’être ta mère, je suis moi aussi sorti d’un ventre, ainsi est la vie ! Mais notre garnement n’en a que faire, porte ouverte à tous les petits savants en herbe, qui dans leur laboratoire, dans leur caverne, vont continuer le mélange des mots, des idées et des concepts. Ah !, quel bon chimiste tu fais, mais tu devrais cependant savoir qu’une substance chimique n’est pas propice à la vie, une substance purifiée est un poison pour le corps, un poison pour l’esprit, il ne donne pas la vie, mais la mort. Athènes était à l'époque remplie de ces petits farceurs. Politique oblige, ils ont mis Socrate au pied du mur, et ils lui ont demandé : - Qu’as-tu inventé Socrate ? - La chimie ! - La chimie est-elle bonne ? - Oui bien sûr - Alors si elle est bonne, bois là, car celui qui vivra verra. Socrate à bue la sigue, et bien sûr il en est mort. Il s’en est retourné dans le monde des ombres, et qui sait, a-t-il retrouvé sa caverne. Toujours est-il, la chimie est née. Elle a aussi fait son chemin, on la retrouve partout, cette espèce de manie de tout purifier pour arriver à l’essence des choses, à la vérité absolue qu’est la caverne de maman. À tous les hommes qui se sont engagés sur le chemin de la philosophie, tous ont reniflé cette senteur de mort, tous s’en sont enivrés, tous ont retrouvé le goût de la caverne : La dernière passion de Descartes, à la fin de sa vie, sera de triturer des carcasses d’animaux morts pour y chercher l’essence subtile de la vie. Il purifie aussi l’inquiétude, le doute et le rend lui-même femme en lui donnant le statut de liberté. On ne verra pas la suite Marianne, dame liberté aux seins nus, qui d’une main brandie un étendard et de l’autre un fusil. Marianne qui donne raison à l’état, état comme une grande maman avec tous les citoyens baignant dans les humeurs sanguinolentes de son utérus, utérus du nom de démocratie. La chimie de Socrate a pris les allures d’une chanson qui rend hommage à la mort, qui glorifie la mort. Personnellement, en guise de grotte, je préfère celle de mon amante, ce petit bijou ciselé qu’il ne me viendrait pas à l’esprit de purifier, mais de glorifier. Le faux compère Montaigne et la Boétie avaient des propriétés, bien assises économiquement ils pouvaient donc choisir leurs plaisirs, choisir leurs amis. La légende veut que Socrate fît un rêve, et que lui apparaisse un cygne, Platon. Hum ! Je dirais plutôt que Socrate fit un songe, et que lui apparut une hyène affamée. Il n’y a pas de hyène à Athènes, nous tomberons donc d’accord que Platon fit un rêve, fait de festins, de bonnes viandes et de bons vins. Le seul point noir dans l’amitié entre Montaigne et la Boétie, c’est quand l’un allait chez l’autre, ils se mettaient alors en situation de se faire attaquer, car quand les uns ont de grandes propriétés, c’est que d’autres n’en ont point du tout, et que quand il ne reste aucune autre espérance que la misère, s'il faut brigander, alors brigandons. Plus que de vouloir posséder des propriétés, Platon voulaient avoir des amis choisis, et tel le paon, parader, pour s’entendre dire : « Platon, que tu es beau ». Mais dans l’immédiat, Platon est sans le sou, ses dernières affaires ont été mauvaises, il a du talent mais point de génie, il est sans économie, et ne peut donc prétendre à aucune ambition, car que ce soit à Athènes, Rome ou à New York, pour faire le beau, il faut de l’argent, et plus que l’argent, la renommé. Cercle vicieux qui doit être brisé si l’on veut sortir de la misère, il faut donc un miracle, la venue de quelqu’un, là est apparu Socrate, là, est apparu le cygne. L’image présentée ci-dessous, tiré de la sagesse populaire, de la couverture d’un livre proposé à grand tirage est explicite. Tellement, explicite, là sous les yeux, tout nous est expliqué, c’est tellement évident que cela en devient grotesque, et l’on se demande comment ce message on ne peut plus clair ne puisse entrer dans nos petites cervelles. Voilà, tout est dit : Platon faisant l’apologie de Socrate, c’est le titre. Dans les faits, une main qui tend à une autre main le poison. À l’époque de ces évènements, il n’y avait alors que peu de scripts, d’écrivains donc, écrire était un luxe, il n’y avait donc aussi que très peu de recoupement possible car très peu de témoignages, un peu comme maintenant sur internet, chacun raconte ce qu’il veut sur qui il veut, la véracité des dires de chacun, des écrits de chacun, laisse beaucoup de marge d’incertitude. Socrate avant tout était un sophiste, espèce de magicien des mots, d’alchimiste de la rhétorique, qui faisait apparaître des lapins, des idées qui accouchent, des « je sais que je ne sais pas » … C’était son plaisir à Socrate, faire de la chimie devant un petit public, et montrer les belles bleues, les belles jaunes que peuvent produire des réactions chimiques. Toute l’ambition de Socrate se résumait à cela, il allait, tel un saltimbanque faire ses petits tours à qui voudrait bien le regarder, à qui voudrait bien l’entendre, nous dirons un chimiste du dimanche inspiré, qui dans son jardin s’adonne à sa passion, s’adonne à ses petites cultures, un jardinier de génie. Vient donc notre compère, Platon, les dents aiguisées par la faim. Il se frotte les mains, et se met à penser : derrière ce saltimbanque, derrière ce chimiste, se cache un génie, génie dont je n’ai point et qu’il s’agirait de faire fructifier, il y a de gros bénéfices derrière. Socrate spéculait sur les idées, la seule bonne idée de Platon aura été de spéculer sur Socrate. Il est fort à parier que Platon commença à faire le mielleux avec Socrate, et cela à travers une longue et inépuisable apologie, il lui rendait hommage, non pas pour la chimie mais pour le chimiste. Socrate est un grand chimiste racontait-il à tout le monde. Et tout le monde commença à s’intéresser au chimiste, et non à la chimie, on venait voir Socrate comme on viendrait voir un animal de cirque. Socrate s’esclaffait, faisant ses tours à qui mieux mieux, d’un petit public, il passait à un large public, à un divertissement entre copain, on passait à un spectacle digne de la tragédie, digne des dieux de l’olympe. Le spectacle fit tant de bruit, qu’il en arriva bientôt aux oreilles des gens de pouvoir, et que derrière cette chimie, ce chimiste, pouvait s’établir une source de pouvoir autre que la leur, et perturber le bon fonctionnement de la société. Toute source non légitime du pouvoir doit être tarie ou retirée des mains de son propriétaire. Qui mieux que la jeunesse aime le spectacle, la diversion ! La jeunesse couvrait Socrate de ses ovations, car la jeunesse est naturellement rebelle. On fit donc un procès à Socrate, qui corrompait la jeunesse, en leur apprenant à fouiner sur ce qu’il y a dans le ciel et sous la terre, on prit Socrate à son propre jeu, à son propre piège. On lui demanda si la chimie est bonne, il répondit que oui. On lui fit alors comprendre que si la chimie était bonne, il lui fallait en donner la preuve, et qu’il lui faudrait la boire. Socrate, honnête homme par excellence, ne put répondre que non, car pour lui, la chimie était bonne. Il voulut faire comprendre à ses juges que tout homme, dans son jardin, peut faire pousser des sorcières, que des sorcières qui poussent dans un jardin ne peuvent faire de mal à personne. Les juges déclarèrent que s’ils acceptaient que les uns fassent pousser des sorcières dans leur jardin, il leur fallait aussi accepter pour les autres, et qu’au final, il pousserait dans tous les jardins d’Athènes des sorcières. Socrate n’avait rien à répondre. D’ailleurs, ce procès ne l’intéressait que bien peu. Pour ce qui est des juges, on peut l’imaginer, cela ne les intéressait bien peu aussi. Le seul qui avait un bénéfice à tirer c’était Platon. On ne saura jamais s’il réussit à convaincre Socrate qu’on ne pouvait l’empêcher de faire sa jardinerie, que ce serait un crime, ou si ce sont les juges qui se sont laissés susurrer que si l’on laissait pousser n’importe quel légume dans n’importe quel jardin, Athènes paraîtrait bientôt à un zoo horticole. On ne sait comment, mais finalement Socrate accepta de boire la cigüe. Socrate a été vaincu non pas par la cigüe, mais par la main qui le lui a donné, à savoir Platon le médiateur, le communicateur. Premier cas de ce genre dans l’humanité, où la communication va au-delà de l’individu lui-même, confusion entre jardin personnel d’un passionné du dimanche confronté avec le pouvoir médiatique. Mais Platon lui savait ce qu’il faisait, il a seulement laissé croire à tout le monde, qu’il ne devait pas y avoir de frontière entre un jardin personnel, les idées de chacun donc, et les jardins publics, c'est-à-dire ce qui est bon pour tout le monde, les idées communes. Plus qu’une frontière, c’est partir du principe même que les idées communes valent plus que les idées individuelles. C’est la fameuse allégorie de la caverne, avec à l’intérieur les grouillons, et au-dessus, cette lumière des idées communes à tout le monde, acceptable par tous, identifiable pour tous car non soumise au changement, et non soumise au changement car acceptée par tous. Cette lumière a plus de droit que l’individu lui-même, plus de droit que la lumière de chacun. C’est le pouvoir de la médiatisation qui a comme principe que ce qui est plus fort doit dominer ce qui est le plus faible, et que si on est 10 à penser une chose, le onzième doit se plier, car 1 est inférieur à 10, c’est faire entrer le genre humain dans une matrice mathématique. Pouvoir médiatique au-dessus du pouvoir individuel. Joli mensonge qui a aussi comme prédicat que dans le groupe, dans cette acception commune du bien de chacun, nous avons tous les mêmes chances, que nous sommes tous égaux. La chimie n’est comprise que par quelques-uns car elle relève du génie, la chimie, on ne peut la faire que dans son jardin, pas en public, car alors vient un Platon qui dira que la chimie est bonne pour tout le monde, histoire d’en vendre les droits, et avec ces droits, acheter des propriétés, et choisir ses plaisirs et ses amis, en espérant qu’un autre brigand ne viendra pas le détrousser. Vouloir les idées comme lumière pour tous, c’est déclarer de façon frauduleuse, c’est légiférer de façon démocratique, qui aura le pouvoir et qui ne l’aura pas, la caverne s’érige alors comme une tour d’ivoire, et celui qui y prend position domine le monde, domine les autres. Je n’aurai qu’une chose à dire : Platon, tu n’es qu’une crapule, une canaille, un brigand, un assassin. Le pouvoir ne va pas de pair avec le génie personnel. L’intérêt du groupe ne va pas non plus de pair avec l’intérêt de l’individu. Vouloir mêler l’un à l’autre par on ne sait quel tour de magie, c’est mettre en face de vous une catin les jambes écartées qui demande de façon perpétuelle votre argent. Rêve de fille de joie, fait de festin, de bonnes viandes et de bons vins, rêve de pouvoir et de belles propriétés. Zorba le pas-Grec Zorba le grec est clair avec tout le monde : Il aime chanter, danser, boire, il aime les femmes. Il y a une seule chose qu’il n’aime pas, c’est les bouquins. Pour lui, les livres ne sont que l’ombre de la danse de la vie. Qui va croire une telle farce ? Zorba est un personnage sortit tout droit d’un livre, d’un monsieur qui aimait les livres et qui en a écrit un autre s’intitulant « Zorba le grec ». Zorba est une farce d’écrivain, essayant de nous faire croire quelque chose qu’il ne connaît pas lui-même. Fable de Zorba, fable existentialiste, où l’on est fou, où l’on danse pour être libre. Qu’elle est la liberté de Zorba ? Pas grand-chose si ce n'est qu’à chaque fois qu’il est content ou qu’il a un problème, il danse. Il danse, là est le problème. Zorba danse seul, il s’enivre de ses propres tourbillons. Il reste enfermé sur lui-même. De liberté, il n’a que la sienne, liberté inutile, bonheur inutile partagé par personne d’autre que lui, il est seul à se comprendre, dans sa folie. Zorba ne peut être que sorti de la plume d’un écrivain, qui n’a jamais dansé avec une femme ou avec un homme, et qui ne connaît pas le plaisir de ce qu’est danser. Si notre écrivain aurait connaissance de ce qu’est danser, il saurait que danser seul est d’une infinie tristesse, c’est la tristesse elle-même dans toute sa splendeur. Zorba, avouons-le au public, est le fruit de Descartes, de la danse du doute. Danse frénétique, danse d’un fou, où l’on tournoie avec son doute, jusqu’à le faire exploser, jusqu'à ce que se déploie un espace où l’on est définitivement seul, où l’on est là, dans son propre silence, défini comme liberté. Que n’en déplaise à Descartes et à tous les acolytes de sa lignée, on ne danse pas seul, car danser seul, trouver le « je suis » avec soit même, c’est se masturber. C’est trouver un plaisir qui n’en est pas un car il ne nous lie à personne, plaisir d’un prisonnier qui ne sait plus quoi faire pour tuer le temps et trouver un peu de grâce, et qui pense faire reculer les murs de sa cloison en s’offrant un plaisir solitaire. Voilà en quoi consiste la danse de Descartes, la danse de Zorba. Des personnages comme Zorba, et en enlevant ce vilain vice de danser seul, on en trouve plus sous nos latitudes. Pour en trouver un, il faut aller plus vers le sud. Petits vieux qui pètent le feu, petits vieux qui chantent, qui boivent, qui rient et qui dansent avec des filles, pas avec le doute. Sous nos latitudes donc, on ne trouve plus de ces petits vieux qui pètent le feu, car sous nos latitudes, tout ce que l’on nous apprend, c’est à être seul, on nous apprend la solitude, à être éloigné des autres, pas à danser avec eux. Et un cœur qui a trempé dans ce bouillon pendant quatre-vingts ans, ne peut être que triste, le feu ne pète plus, le feu est éteint. Descartes et sa danse macabre devrait être rayé de toutes les cartes du monde, Descartes et la liberté comme fruit de cette danse devrait aussi être éradiqué de toute carte terrestre, car c’est un pays où l’on n’arrive jamais, un pays qui n’existe pas, c’est un mythe inutile, c’est la danse d’un fou avec son propre cadavre, avec sa propre impuissance à vivre. Voir de la vitalité dans « je pense donc je suis », c’est comme prendre un squelette dans ses bras, le faire tournoyer, lui donner un baiser, et lui dire « je t’aime », lui dire nous aurons de « beaux enfants ». Danse macabre je le répète encore qui a fait tant d’émule, qui a fait tant de désastre. Croyance en une liberté inutile, croyance en un tas de charbon, croyance en un néant qui ne mène nulle part. On est libre quand on est bien avec les siens, on peut alors faire ce qu’on veut, aller où on veut, l’espace nous apporte alors cette douceur et cette gratitude, d’un monde bien ordonné, d’un monde en harmonie. Être libre, ce n’est pas vivre dans sa petite bulle, loin de tous les échos sonores, loin de tout entendement autre que le sien. Doute de Descartes qui ne vaut pas mieux qu’une bonne bouteille d’alcool, où l’on se saoule la gueule pour oublier ses problèmes. Fallait-il autant de proses pour une chose aussi … vulgaire je dirai. On se saoule la gueule pour diminuer le poids des problèmes, et pourquoi, pas les dépasser, mais se saouler la gueule comme un art de vivre, il faut bien le dire, relève du pathétique, de la démence. Notre fameux Descartes, à la fin de sa vie, s’est lancé dans une nouvelle tâche : Il allait fouiner dans les entrailles de cadavre d’animaux pour y trouver l’essence vitale de l’existence, le « je suis », pour suivre son raisonnement. Nos petits vieux qui pètent le feu, eux, vont danser avec les filles, et pourquoi pas finir la nuit avec elles, car les filles aiment le feu, la vie se trouve dans la vie et pas avec les morts, et encore moins avec les fous qui dansent avec des squelettes et vont fouiner dans les charognes. Il faut bien le dire, l’œuvre de Descartes est l’œuvre d’un fou, œuvre qui continue son chemin pour nous faire croire en un Zorba le bien heureux. On se saoule la gueule quand on est plus libre, quand on a perdu le fil conducteur avec les siens, quand on est mal à l’aise avec eux, alors vient le doute. Boire de l’alcool à haute dose, c’est faire apparaître le doute devant soit, le voir tel qu’il est, lourd et pesant, et lui foutre un bon coup de pied dans le cul, histoire de la faire sortir de notre tête. Il ne s’agit en aucune manière de faire apparaître le doute en face de soit, et de lui dire je t’aime, car cela revient à se vautrer dans son vomi. On quitte les siens pour mieux les retrouver, on accepte le doute, on peut le faire virevolter ; on quitte son oasis quand l’eau est tarie, et si on le quitte, c’est pour traverser le désert, et avec comme ultime finalité de retrouver une autre oasis. On ne quitte pas une oasis pour finir cuite comme un œuf, car le désert n’est bon pour personne, avec ou sans turban, il vous donne mal à la tête et vous arrache la gorge. Que l’on ne vienne me dire que le désert est un havre de paix. Il est un havre de paix quand on l’a comme voisin, à l’ombre d’un dattier, avec un puits pour vous donner son eau, et surtout, surtout, les siens assis autour de soit. Là oui, le désert donne toute sa puissance, là oui, il vous fait vibrer de bonheur, car vous l’avez défié. Papa Shampoing Tout ce qui se dit, s’écrit ou se fait sur cette terre n’est que vanité, et tout le monde le sait, la vanité ne vaut pas plus qu’une crotte de chien. Chien qui a bien mangé, et qui devant vous, les jambes arrières arquées et tremblantes, vient vous faire sa crotte. C’est son trophée, c’est sa manière de dire « moi j’ai bien mangé ». Même les animaux, à leur manière, ont cette capacité de vouloir vous humilier, ils ont le goût du triomphe. « Le papa shampoing » de l’expression hispanophone « papi shampo », il y a donc papa et du shampoing, ou pour dire les choses plus simplement, papa a les cheveux bien shampooiné, sa crinière ondule dans la brise et dégage ce subtil parfum de propre, du « je sens bon ». « Je sens bon en corrélation à « vous peut être pas, moi sûrement ». Petite marque de dédain, petite marque de vanité, qui sert à définir qui est qui et ce que l’on attend de l’autre, qui aura la plus belle crinière, qui aura le plus beau panache. La France est avant tout Kantienne, Kant a laissé son empreinte dans le sang Français. Le Français est Kantien, le Français a fait la révolution, le Français se sent glorieux d’annoncer que l’homme est une fin pour l’homme et non un moyen, et qu’il plaide pour l’abolition de l’utilisation de l’homme par l’homme comme moyen. C’est le Climax de Kant, c’est la raison de Kant, c’est le shampoing de Kant. L’homme, contrairement aux animaux, a cette faculté de pouvoir distribuer ses plaisirs comme bon lui semble, histoire de les faire lever comme on élèverait une mayonnaise. Le chien fait sa crotte, l’homme va au-delà, sa crotte, il vous la fera manger, il prendra la scène en photo et la fera circuler sur facebook, pour que l’humiliation soit rayonnante et irréversible. Quoi qu’il en soit, on en reste au monde de la vanité, et en cela, le chien est plus sage que l’homme, ses plaisirs sont raisonnables, il ne va pas, pour humilier l’adversaire, utiliser la défécation à l’atome. Que prétend Kant ? Que l’homme est civilisé, qu’il doit faire ses besoins dans les toilettes, et surtout, être bien shampooiner, pour sentir bon et pour que la crinière ondule dans la brise légère du matin. Vous pouvez shampooiner votre chien, et en faire un bon toutou parisien, mais dites-vous bien que si vous le laisser plus de dix seconde sans attention, il fera sa crotte sur le trottoir, c’est pour cela que Paris est remplis de crotte de chien. Vous pouvez le laver votre toutou, lui retirer les puces, tics et poux, lui donner un poil vigoureux, mais notre bon animal, à la première escapade possible, ira fouiller dans les poubelles, ira patauger dans la boue pour courir vers la première femelle en chaleur, il faudra donc le shampooiner, souvent, tous les jours, à tous les instants. Rêve de Kant, rêve de l’homme qui est une fin pour lui-même et non un moyen, rêve de shampoing. Si les choses n’étaient pas ainsi, alors pourquoi Emmanuel aurait pris toute cette peine à écrire un livre, et pourquoi toute cette peine aussi à lire ce même livre. Cette peine relève de celui qui a droit au shampoing, il vient se faire frotter, triturer, fouiner la tignasse hirsute qui font de vous un vagabond, le but étant, le poil brillant. Rêve Kantien, rêve qu’il n’y a pas de vagabond qui vaille, et qu’il faille sentir bon. Il faut le dire, avant de faire plaisir aux hommes, Kant s’est fait plaisir à lui-même, il est le premier des «papa shampoing », et il en a imposé le style, la mode, où l’homme sentirait bon. Que ne viennent quelques femelles, que ne viennent d’autres mâles en rut, car alors de rêve, il ne restera plus rien, les coups de dents seront remplacés par le nettoyage à l’atome. La mode Kantienne est une mode risquée, vouloir être un dandin pour l’univers a ses conséquences, la première et la plus importante, est de vouloir retirer le naturel, et voilà que celui-ci rapplique au galop, tel un buffle en colère. Toujours est-il, le style Kantien, le style Français est bien là. Tous les petits bons hommes, toutes les petites bonnes femmes, éduqués avec goût, éduqués au bon goût et à la classe, la crinière ondulante au vent, c’est l’heure Française, l’heure du raffinement. Plaisir de Kant, plaisir de Paon qui nous a laissé croire qu’il voulait sauver les hommes, mais voulant d’abord se sauver lui-même, pour que dans les siècles des siècles, les gens s’esclaffent « qu’est-ce qu’il est beau Kant, regarde comme son poil brille ». Vanité qui ne vaut pas plus qu’une autre, livre illisible que l’on ne peut absorber qu’avec des douleurs de crâne. Il faut fouiner pour se rendre compte que Kant nous a menti. Comme les autres, il a fait sa petite crotte, comme les autres, il a dit que c’était de l’or, comme les autres, tout le monde s’en est régalé, et on l’a fait savoir un milliard de fois sur internet ou ailleurs. La particularité de l’œuvre de Kant, plus que les autres encore, est que la lecture de ses livres donne vraiment mal à la tête, pareil à une séance de hard –shampoing. Ne soyons pas plus royaliste que le roi, Kant a laissé une empreinte, nous pouvons tous le voir à travers l’élégance Française. Malgré tout, que le Français ne soit pas dupe de lui-même, car partout dans le monde, quand on voit un chien faire sa crotte devant nous, le réflexe c’est la savate. Partout dans le monde, quand un Français fait le paon, il reçoit le coup de savate, ça il ne le sait pas, il serait donc bien qu’il voyage, histoire qu’il se rende compte du « encore un de ces cons de Français ». Le Français croit donc le contraire, que son parfum est incomparable et qu’il est beau, et qu’il n’y a que lui. Parfum de mensonge, parfum que la raison n’est jamais pure et qu’il s’y cache toujours quelques poux et quelques tics, et surtout, que la critique doit rester ce coup de savate, à tous les chiens qui vous disent qu’ils ont bien mangé, et que cela est leur triomphe. Non-violence Pour tromper l’ennemi, Satan est toujours habillé de blanc, blanc comme la colombe, blanc comme la paix, blanc comme la non violence. Comme je le disais dans un texte précédent, l’histoire, les histoires, nos histoires, nos vies sont une accumulation de « maintenant », rien d’autre. Le pouvoir s’exécute tel un tambour à coup de « maintenant ». Chaque coup porté sur la membrane donne le rythme au système, au corps du système. La vie sociale se situe dans ces interstices, dans cet espace qui sépare chaque « maintenant ». Interstices, espaces entre des « maintenant », qui prennent figure de différence. Le jeu social prend forme dans toutes ces différences qui vont s’affronter, c’est le fameux frottement social, qui génère le bénéfice. Il y a bénéfice car affrontement, et qui dit affrontement dit gonflement des petits muscles de chacun. Des différences qui vont s’affronter, et s’arrondir, naturellement, telle l’eau s'écoulant du point le plus haut vers le point le plus bas. Comme disent les théoriciens du chaos, tout système va d’un état plus chaotique vers un moindre, le contraire n’existe pas. Cela se fait naturellement, sans aucun effort, je le répète, telle l’eau qui ruissèle vers le bas. Le chaos social n’a donc pas besoin de remède, il se soigne lui-même, il faut juste être patient. Là intervient la non violence, sentiment d’impatience qui ne peut accepter les choses telles qu’elles sont, qui ne peut accepter le jeu social dans son intégralité, et qui veut donc le déformer … pour son intérêt. L’intérêt du non violent est que la violence s’arrête. Mais on ne peut pas aller plus vite que la musique, et ceux qui prétendent aller plus vite que la musique, qui prétendent la non violence, ne prétendent au fond qu’une seule chose : Je veux la paix, la paix chez moi, et ce qui se passe chez les autres finalement ne m’intéresse pas. Peu importe la symphonie globale, ce qui m’intéresse, c’est ma partition de musique il n’y a que la mienne. Sentiment égoïste où l’on prétend la paix, alors que finalement, de façon très hypocrite, on ne veut que sa propre paix. Ainsi ne vont pas les choses, car alors ne s’écoule plus l’eau du point le plus haut vers le point le plus bas, car alors les choses restent dans leur état, car alors les angles ne peuvent plus s’arrondir, car il n’y a plus d’affrontements. Celui qui prêche la non violence ne fait que prêcher son intérêt personnel, que finalement les choses sont bien ainsi et qu’il serait dommage que cela change, la distribution en place convient parfaitement, et un renversement des forces pourrait être défavorable. En regardant les choses en face, et sans se mentir, le non violent prêche la statique, d’affrontement il ne veut plus, et d’affrontement il doit y avoir car le chaos doit sortir de lui-même. Le fruit de la non violence est un appel à la prochaine guerre, mais il faut bien l’entendre, chez les autres ; un appel à plus de violence, car en empêchant que l’eau s’écoule du haut vers la-bas, on ne fait que frustrer un peu plus le système, et qui dit frustration, dit guerre, guerre chez les autres, alors qu’importe. Tragique réalité, de Satan habillé de blanc, et qui de colombes, les aiment bien farcies dans sa marmite. Triste réalité, d’un sentiment égoïste, qui ne pense qu’à lui-même, qui ne pense qu’à ce qu’il trouvera dans son assiette. Ceci est un sentiment commun, et que l’on ne vienne pas me dire » je ne savais pas, je me suis trompé », ceci je ne peux le croire. Le sentiment de la non violence vient de gens assis sur des fauteuils confortables, l’estomac bien rempli, vient de gens qui ne produisent plus rien, et qui se surprennent eux-mêmes de cette situation, ils en viennent même à penser, presque de façon consciente, que tous ces fauteuils confortables, toutes ces bonnes bouffes pourraient bien s’arrêter un jour. Moment impensable qu’il ne s’agirait d’avouer, et pour cela a été inventé la non violence, pour que la guerre, pour que les frottements, ce soit chez les autres, en continuant de se faire entretenir par ces mêmes indigents, ceux qui n’ont pas accès à la non violence, ceux qui produisent. Il y a dans l’aspiration à la non violence cette insulte du gigolo, qui par obligation veut se faire entretenir à vie, sans avoir même à prendre la fourchette. La nourriture doit lui être déposée dans la bouche, d’effort il n’y en a point, d’effort il n’y en a plus, tout lui est dû. La non violence ne sera jamais une fin en soit, mais un moyen, et qui dit moyen, pour cette raison même de la violence et de la non violence, dit arme, la non violence est une arme. La non violence ne sied qu’à celui qui a le ventre creux et les mains désarmées, il ne lui reste alors plus que le courage de s’élancer vers son ennemi et de s’écrier : « je me battrais les mains vides, mais même comme cela, tu ne me fais pas peur ». Que pourrait-il proclamer d’autre, celui qui a le ventre creux et les mains vides ? L’histoire nous l’a enseigné, les indiens s’avançaient ranger par quatre, devant leurs ennemis, devant leurs bourreaux, ils se donnaient en pâture, et sans rechigner, sans un mot, sans lever le petit doigt, ils allaient se faire rompre la tête. Quatre qui tombent, et quatre autres qui arrivent, même scène de désolation. Bientôt gît sur le bas-côté de la route des corps par milliers, avec la tête fracassée. La guerre a été gagnée, non pas par les fracasseurs, mais par les fracassés, car la guerre ne sert qu’à définir un héros, et dans ce cas de figure, les plus courageux ont été ceux qui les mains vides, le ventre creux, et sans même lever le petit doigt, ont osé affronter le Goliath. Il y a dans la violence, dans la guerre, le mythe du héros. Il y a dans la non violence, le même mythe, celui du héros. Mais je le répète encore, la non violence ne sied qu’à celui qui a le ventre creux et les mains vides, c’est la seule manière de gagner et d’avoir la paix chez soit. Cela ne règle cependant pas le problème de la non violence dans son aspect général, c'est-àdire la paix chez soit, et la guerre, chez le voisin. « Nuit de la liberté », au-delà de toute violence et non violence, tu n’as pas encore vu le jour, car l’homme est, et sera avant tout un héros pour lui-même et pour les siens, parce que le héros crée du bénéfice, et que l’univers lui-même aime le bénéfice, c’est ainsi qu’il s’est créé, et que créer, c’est faire un bénéfice. Celui qui ne veut comprendre cela, veut la paix chez lui, et la guerre chez les autres, c'est-à-dire tout le bénéfice pour lui, et rien pour les autres. Non violence édifiée comme hypocrisie honteuse, comme prophétie de gigolo que veut se faire entretenir jusqu’à la fin des temps, c’est « la nuit sans liberté possible ». Zennerie L’énergie est un potentiel, et qui dit potentiel, dit possibilité. L’énergie est donc un pouvoir de possibilités, le pouvoir de la multitude. Les taôistes appellent cela le Ying. Si Ying, il doit y avoir un yang, car toute force appelle une contre-force, c’est la loi physique, c’est la loi de la nature, éternel équilibre. Les philosophes de l’Antiquité grecque avaient bien cerné le problème. Ils ne parlaient pas de Ying et de yang, ils s’accrochaient à la notion de « l’un et du multiple ». Si l’énergie est le propre de la multitude, nous devons alors avoir le propre de « l’un », à savoir la destinée, ce qui réuni, ce qui centre, ce qui a déjà été réalisé, la réalisation, le réel, à l’encontre donc du monde du possible. Il faudrait juste faire cette petite parenthèse, que « l’un », ce qui est réalisé, déjà créé, la destinée donc, se trouve derrière et non devant. Celui là même qui naît avec une carence génétique au cœur, sera celui qui aura plus de chance qu’un autre de souffrir d’un infarctus, la destinée se trouve donc derrière, pas devant. Celui qui se sera essayé à la méditation, aura pu entrevoir cette paix qui se dégage naturellement de nous, sans effort aucun. Malraux annonçait qu’au fond de nous il n’y a que l’épouvante, c’est faux, au fond de nous, il y a cette lumière tranquille de la vie, qui rayonne et qui ne demande qu’à se déployer. Le destin est comme un terreau, une matrice, vient une graine, une possibilité, et voilà, notre graine qui donne un arbuste, qui donne la vie. La vie est donc ce point de rencontre entre une destinée et une possibilité. Ce point de rencontre est un moteur, ce point de rencontre est la vie elle-même, ce point de rencontre est avant tout lumière. Un arbuste n’est qu’une métaphore de lumière. Celui qui s’essaye à la méditation, verra donc cette lumière au fond de lui. Là commence la contradiction : Le bouddhiste, celui qui suit le chemin de l’éveil, part à la recherche de cette lumière, le but étant, d’arriver à la lumière, et être la lumière elle-même. Pour arriver à ce point, il devra nier la vie, celle-ci considérée comme souffrance. Le théorème est le suivant : Nie la vie pour arriver à la pureté, sort de la vie pour être la lumière elle-même dans sa forme pure, défaite de toutes taches. Duel drôle de dilemme, quelle drôle de farce. Les bouddhistes vous le diront clairement, il faut faire fructifier cet espace entre deux « maintenant », cet espace n’est plus une différence, mais un vide, un espace de calme entre deux jouissances, ils appellent cela réaliser le sentiment de la vacuité. Il faut développer cette vacuité pour sortir définitivement de tous les "maintenants", pour sortir de la jouissance et de son désir, pour sortir de la vie, pour être la vie défaite d’elle-même. Beaux bouddhistes, beaux et translucides comme la lumière. Mais ces éveillés devraient bien comprendre que pour que la vie continue, il faut avant tout des possibilités et aussi un monde réel. À entrer dans la lumière elle-même, il en détruise le support, à savoir la fonction de l’un et du multiple, la fonction sexuelle qui donne la vie. Nos petits bouddhistes, s’en vont alors s’isoler dans de petits châteaux, loin du bruit, loin de toute agitation, pour profiter en toute quiétude de leur bonheur rayonnant. La moindre agitation les effraye, les frustre, et leur font perdre leur bonheur. Ils vivent tous dans une espèce de club Med, fait de soleil et de tranquillité. On vient même leur donner à manger, car cela leur produirait de l’agitation que de se démener pour trouver de la nourriture, il faut bien le dire, la vie est belle, sans souffrance aucune. Ces mêmes bouddhistes vous rétorqueront qu’étant donné que la vie est une malédiction, il est bien que certains donnent la paix aux âmes meurtries. Il faut apprendre la lumière, et pour cela nier toute forme de violence, il faut nier la violence elle-même, on en vient alors au texte précédent sur la non violence, qui a pour proposition la paix chez soit et la guerre chez les autres, la fameuse aspiration du gigolo. Tous ces petits monastères perdus dans les montagnes en sont bien la preuve, le club Med pour nous, et les autres au turbin. Quand je disais que l’arbuste est la métaphore de la lumière, je ne disais pas que l’arbuste est la lumière. L’arbuste est métaphore de lumière, l’arbuste est lumière à travers tous ses petits malheurs et tous ses petits bonheurs, à travers une accumulation de « maintenant ». L’arbuste est une accumulation de maintenant et pas le contraire, il ne peut et sera jamais cette accumulation entre «les maintenant », à savoir une vacuité déployée. La vie, la lumière ne pourra se déployer qu’au travers de tous les petits bonheurs et malheurs de chacun, être la lumière elle-même est une farce, une contradiction, car c’est la vie qui donne la lumière et non le contraire. Que ces messieurs prétendent à une paix intérieure incomparable ne m’intéresse pas, car cette paix incomparable ne produit rien, et pendant qu’elle ne produit rien, d’autres doivent produire, d’autres doivent nourrir ces bouches improductives, d’autres doivent payer les monastères, et cela pour la promesse qu’un jour la souffrance n’existera plus, que la vie n’existera plus. Promesse de gigolo qui a trouvé le truc pour ne fournir plus aucun effort, et à qui on doit mettre la nourriture dans la bouche afin qu’il nous prêche ses belles paroles de la malédiction de la vie. Le rêve bouddhiste n’est pas un rêve réaliste, car il ne vit pas dans le monde réel, il n’est soumis à plus aucune destinée, si ce n’est que des promesses. Le point de rencontre entre le destin et la possibilité s’effondre, la vie elle-même s’effondre. Ils le disent eux-mêmes, l’éveil, c’est la flamme qui s’éteint. Elle ne peut s’éteindre uniquement parce que d’autres sont encore là pour produire. Rêve bouddhiste, rêve qui sort du réel, rêve égoïste. Je ne peux souscrire à la peine des Tibétains qui se sont fait envahir par les Chinois, car le monde est fait d’affrontement, de frottement, à vouloir la non violence, et voilà, ils ont été mangés par un gros enzyme glouton qui ne croit pas trop aux balivernes et à la bonne fois de bouddéités perchés sur leur montagne en quête de lumière. Je ne peux aussi souscrire au bon gros rire de notre Daila Lama, émissaire de la paix, qui dans ses grosses pantoufles moelleuses vient faire la morale au vivant, et qui vient nous parler d’une lumière qui n’est que la sienne. Il y a dans le bouddhisme, cette fable d’un âne qui refuse de porter la charge qui lui incombe, et qui s’en décharge sur le dos d’un autre en lui faisant croire que pour cela il ira au paradis. Âne farceur qui nous raconte bien des zenneries. Si tel n’est pas le propos du bouddhiste, telle au moins est sa réalité, et ce qui m’intéresse, c’est la réalité, pas les promesses, en cela je suis bouddhiste dans « l’ici et maintenant » Hi Han. Moment de métamorphose Charlotte me contait : « Lorsque j’ai voulu mettre mon fils à l’école, aux USA, il était alors très jeune encore, la directrice de l’école qui avait évalué le chérubin m’a annoncé : Votre fils ne sait pas se battre, les autres enfants vont l’écrabouiller. Si vous ne me croyez pas, allons droit à l’épreuve. Je vous certifie que si je le lâche avec les autres, cinq minutes suffiront pour qu’ils en fassent de la chaire à pâté, il vous faut lui apprendre à se battre. » Charlotte a poliment répondu qu’elle se passerait très bien de cette épreuve, et que l’enfant pourrait très bien attendre une année de plus. Charlotte toujours me contait : Sous d’autres horizons, dans une petite île caribéenne, son fils avait participé à un camp d’été. Jeune encore, le bambin passa quelques semaines inoubliables. La fin des festivités fut marquée par une petite cérémonie, celle des au-revoir. Chaque enfant devait offrir une fleur à un autre enfant, celui qui à ses yeux avait été le plus marquant, le plus sympathique, lui remettre la fleur et lui expliquer l’objet de sa gratitude. C’est à se demander qui est le sauvage du civilisé. Il faut bien le dire, l’humanité, la civilisation, au jour d’aujourd’hui est un échec. On a longtemps cru, on a longtemps laissé croire que la matière humaine était améliorable, que la civilisation l’améliorerait ! Quoi ? Cela reste le grand mystère. La civilisation ne fait que déformer, changer de forme donc, mais en rien, n’améliore. Là où le chaos est éradiqué, il apparaît sous d’autres formes, souvent plus vicieuses et vindicatives. Devant ce fait, devant ce désespoir que personne n’ose exprimer, on voudrait maintenant nous faire croire que bientôt la solution, la vraie, serait là. Cette solution est celle de la magie, de l’alchimie, de la transmutation. Si déformer reste stérile, nous transmuerons. C’est la nouvelle dimension de l’homme, après laquelle tout le monde court, le premier qui arrive gagne le pompon, le pompon de l’homme nucléaire. Nucléaire car avec du plomb on fait de l’or, car avec ses jambes et sans ailes on peut voler, défier la gravité, bref, faire tout ce que l’on veut, je dirais presque, être immortel. Toute la cinématographie de ces dernières décennies est remplie de ces héros volants. Tout le monde donc court après la magie. Après nous avoir ressassés pendant des siècles que tout est logique, que tout était raisonnable, que chaque chose porte en elle-même une explication, on nous apprend maintenant que la solution n’a rien de rationnel, qu’elle est magique. Pour atteindre ce moment magique, ce point culminant que l’on pourrait nommer le « moment de métamorphose », la bagarre doit aller jusqu’à son comble. C’est au bord de la crise de nerfs, au bord de l’ultime collision qu’aura lieu le flash, la transmutation. Tous nos petits scientifiques s’affairent donc autour de gigantesques machines, les collisionneurs, pour tout fracasser, la matière, j’entends. Il faut atteindre l’ultime collision, arrivé à ce moment où tout s’effondre, pour que l’univers nous délivre ses secrets, pour qu’apparaissent les arabesques de la métamorphose, pour qu’apparaisse la génération spontanée de la vie, ou pour dire les choses plus simplement, la vie ellemême. Quel détour, quelle immense acrobatie arrogante, quel théorème inutile, pour finalement arriver au point de départ. La vie demande-t-elle une preuve à elle-même ? La vie reste avant tout mystérieuse, et le mystère se suffit à lui-même. Vouloir rendre le mystère plus mystérieux qu’il n’est lui-même, et cela à travers je ne sais qu’elle logique, n’aura pour résultat que de tout détruire. Le monde moderne est en train d’essayer de forcer une porte, tout ce qu’elle trouvera, et un peu comme dans le film « les aventuriers de l’arche perdue », c’est le visage de sa propre mort. La seule façon d’élucider le mystère de la vie serait de la détruire, on ne pourra donner de preuve à la vie qu’en la réduisant à néant ... drôle de théorème, drôle d’ambition ! Le mystère se suffit à lui-même, simple, doux. Il n’y a rien à forcer, aucune bagarre à programmer, juste présenter une fleur et déclarer : Ceci est un cadeau, à toi que je ne connais pas, et qui a été tant aimable avec moi, et qui laissera dans mes pensées un souvenir inoubliable. J’espère bien pouvoir te rencontrer une autre fois, pour mieux te connaître et mieux t’apprécier. La petite maison dans le bidonville J’eus ce soir-là, l’heureuse visite d’un grillon volant. Ces jolis insectes portent ici le nom de « Chichara ». La lumière l’avait attiré, et le voilà virevoltant dans la salle à manger, se cognant contre les murs dans sa recherche vaine d’une sortie qu’il ne trouvera pas. Les locaux ont une sainte horreur du Chichara égaré. En effet, dans sa folle course, il atterrit parfois sur la jolie chevelure d’une de ces dames confortablement assises sur un sofa. Les pattes de l’insecte sont crochetées, et les cheveux ont vite fait de s’y emmêler, notre cher animal est pris au piège, il se débat, fait fredonner ses ailes, et tout cela sur la toison chevelue de notre protagoniste, qui ne manque pas d’entrer dans des hurlements, de se taper la tête avec la main, comme si un incendie s’y était déclaré. Ce genre de petit spectacle se termine en général mal, aussi bien pour le Chichara qui est mis à mort que pour la pauvre protagoniste que l’on retrouve souvent au bord de la crise de nerfs. Ainsi, à chaque fois qu’un grillon volant entre dans une demeure, tout le monde s’enfuit, ou au mieux se colle une protection quelconque sure la tête. Crier semble aussi une bonne stratégie peut être plus pour mettre de l’animation dans la soirée que pour effrayer l’animal. Depuis certains temps, tous les soirs, vient donc me visiter un ou le Chichara, je ne puis certifier qu’il s’agisse du même, mais il est là à virevolter dans la salle, se repose un instant pour recommencer sa course folle. Tous les soirs aussi, Lucy, ma petite voisine se trouve en visite, à boire quelques cafés et passer un moment avec moi. Lucy vint un soir, accompagnée de Karina, une autre voisine. Karina avec son charme juvénile et sa beauté angélique me fit une vive impression. Son premier passage fut du domaine de la salutation, elle entra, me fit les bonjours d’usage pour repartir aussitôt, Lucy s’enfuit avec elle. Les deux étaient à peine parties qu’entra mon Chichara dans sa visite quotidienne. Chose étrange, ce soir-là, alors que j’étais assis sur le sofa, la folle course de l’insecte s’arrêta sur mon genou. Je ne bougeais pas et restais à le contempler. Au bout d’une demi-heure, je me rends compte qu’il ne bougeait plus, je le poussais légèrement du doigt, l’animal était inanimé pour ne pas dire bien mort. Je pris le cadavre par ses petites pattes crochues et le lançais par la fenêtre, par là où il était venu. Douce Karina, tu pourrais être une enfant du paradis, tu es une fille des bidonvilles, je pourrais être un enfant de la civilisation, mon bidonville à moi, est intérieur. Nous nous aimons. Notre Hiroshima à tous les deux, ce sont les planches, les tôles et les ordures. Karina voudrait bien venir habiter dans ma jolie maison, mais je lui répète que dans une jolie maison, on s’y ennuie, ce n’est juste que du béton et de belles faïences. Elle, Karina, ne veut rien entendre de mon romantisme franchouillard, elle est saoule de mes bons sentiments « tu m’ennuies » me dit-elle, tes belles paroles, ton romantisme ne sont que des mots auxquels je ne comprends rien. Voilà, avec Karina, nous nous aimons, mais tout est tellement compliqué, tout fonctionne à l’envers, de ce que l’un attend et désire de l’autre, et de ce que l’autre peut donner ou rendre au premier. Chaque petit détail devient le motif d’une montagne d’incompréhension, à chaque fois que jaillit la flamme d’un sentiment, celle-ci s’éteint presque aussitôt pour ne laisser derrière elle que des cendres. Nous tournons en rond, notre amour marche à reculons et ne fait que creuser des trous au lieu de les boucher, et les cadavres de ce qui reste de nos sentiments forment un petit tas à côté des autres, celui des ordures, je parle, nous ne pouvons sortir de la malédiction qui pèse sur nous. Je vais régulièrement voir Karina, dans son quartier du joli nom de « Tablon ». Je me souviens, la première fois que j’y ai mis les pieds, non pour Karina (cela remonte d’avant sa connaissance) mais pour une autre occasion, j’ai failli ne jamais en ressortir. Les loulous qui voulaient me faire la peau - et après les avoirs amadouésme firent cette fleur que je pourrais ressortir du bidonville mais tout nu. Il m’a fallu une bonne demi-heure supplémentaire de négociations et d’amadouage pour finalement obtenir le droit de partir sain et sauf, et avec mes habits. En bref, juste une présentation de mon initiation …au Tablon. Maintenant que je connais Karina et en ce qui concerne mes balades dans ce joli quartier, c’est tout autre chose, je suis protégé. Karina est intouchable car fille de Motéo, et on ne rigole pas avec Motéo, il a la machette facile et cette réputation de personne avec qui il vaut mieux éviter les problèmes. Voilà, je peux désormais déambuler dans les ruelles, comme bon me semble et où bon me semble. Pour arriver à la maisonnette du papa de Karina, cela demande une mémoire d’éléphant. Tous ces petits chemins, ruelles, murets, pontons, qui montent et qui descendent. Quand je dis chemin, je suis large, on y passe juste les épaules, et rien de plus. Tous ces petits sentiers sont parsemés de gros cailloux. Les premiers temps, je me demandais leurs utilités ! Après la pluie, j’ai compris, comme les crapauds, on saute de pierre en pierre pour éviter le plongeon. Parfois, afin de traverser une d’eau noire, un tronc d’arbre, attention à la glissade, la chute est salissante. Donc : d’abord à gauche, puis à droite, le petit muret qu’il faut escalader, de nouveau à gauche, le ponton … de temps en temps, il y a un remaniement dans le parcours, une famille a étendu le linge et on ne reconnaît plus l’entrée entre les deux bicoques. Mais maintenant, je connais le tracé par cœur, les yeux fermés, sauf par temps de pluie où je ne connais pas encore par cœur chacun des cailloux. Quand je rencontre Karina, elle est toujours dehors. À chaque fois je la surprends avec un voisin, une copine. Elle me salue toujours d’une moue de princesse capricieuse, en ayant l’air de dire « ne vois-tu pas que tu me déranges, Manan ». Hé oui, le Tablon est rempli de princesses, cela va de la plus laide à la plus belle, de la plus stupide à la plus éveillée. Mais toutes sont des princesses. Le propre d’une princesse est d’être persuadée - donc – d’être une princesse, l’unique, et que le monde ne saurait se passer d’elle. Le coup est jouable pour chacune d’elles, individuellement, quand elles se regardent dans le miroir. Là où les choses se compliquent, c’est quand l’une d’elles en rencontre une autre, le monde ne peut en supporter qu’une seule. Dans ce cas – de la rencontre -, le ton monte très vite, ces charmantes princesses sortent alors toute une panoplie d’armes, lames de rasoir, couteaux, tessons de bouteille …le but du jeu étant d’entamer le beau visage de son adversaire, qui voudrait d’une princesse balafrée, dites-le moi ! Enfin, Karina, c’est vraiment une princesse, toujours habillée du plus bel habit (le dernier jean à la mode), elle se pavane ainsi des heures durant, histoire que tout le monde la voie, avec son dernier pantalon tout neuf. Ça me coûte cher, mais c’est le prix à payer pour avoir une princesse dans son cœur. Et comme elle me le dit, lorsque je me pavane avec mon beau pantalon, je ne connais plus personne, je marche la tête haute et fais mine de ne pas entendre les salutations que l’on me lance, je suis alors sur des hauteurs inaccessibles. J’ai offert à Lucy un petit bar sur la plage. Pauvre Lucy, à travailler comme une dératée, à offrir tes plus beaux sourires, tes plus belles manières, et cela pour le salaire de la peur. Un joli bar donc, elle en sera la patronne et tous les bénéfices pour elle, affaire à suivre… Lucy est un cœur, celui qui y entre jamais n’en ressort, une amitié à vie faite de petits câlins, de bonnes intentions, de sorties dans la petite discothèque du coin, enfin bref, plein de petits plaisirs. Je me demande quand même si je n’aurais pas du lui offrir – à Lucy – une boucheriecharcuterie. Ce soir-là, elle est venue à la maison. Elle avait les cheveux en pétard, le regard halluciné et les mains ensanglantées. «Qu’est ce qui t’arrive, Lucy » ? «Rien, rien » J’insiste, elle est muette. Lucy, ton cœur est d’or mais tes mains sont vicieuses, elles aiment les couteaux, lames de rasoirs… ta malédiction c’est ça, une fois le mois, il faut que le sang coule, il te faut trancher, balafrer. Ma pauvre petite Lucy maudite, ta sœur me racontait, tes parents … qui avaient cette fâcheuse habitude de passer leur temps à se battre : arrêt des combats lorsque le sang coule. Voilà, ce n’est pas bien compliqué Lucy, tu as eu un héritage rouge vermillon. Dans ta campagne, personne ne veut plus de toi, tu en as écorché trop, même les hommes, les mâles virils ont peur de toi. Tu es venue t’échouer sur mes rives, je t’ai acceptée comme tu étais, un coco dérivant. Tu es maintenant le petit cocotier sur mon île déserte. Tu me donnes l’ombre par les chaudes journées ensoleillées, le bruissement de tes palmes bercées par la brise marine est l’invitation aux voyages et aux rêves lors de mes longues siestes. Lucy et Karina sont les meilleures amies, ou tout du moins l’étaient. Lucy a un petit faible pour moi, attention, la dialectique des princesses pourrait bien faire son œuvre. Ton beau visage, Karina, il va falloir que je le surveille. Je n’ai pas si bien parlé. Karina, qu’est-ce que tu avais à faire les jolis yeux au voisin ? Voilà, maintenant, tu as un bout d’oreille en moins. Elle ne t’a pas loupée, la femme du voisin, mais bon, cela t’apprendra, on ne fait pas les jolis yeux à son voisin. Je pourrais continuer cette petite histoire, ce serait sans fin, avec des princesses, des ruisseaux d’eaux noires et des tôles ondulées. Vous seriez curieux d’en connaître la suite, mais on ne fait pas d’histoire avec un bidonville, il n’y a pas d’histoire de bidonvilles qui vaille, avec Karina, nous n’aurions jamais dû nous rencontrer, et les bidonvilles n’auraient jamais dû exister. Histoire où Karina, restera toujours un petit poisson innocent, avec d’autres petits poissons innocents. Le bidonville est un cercle noir dont on ne peut sortir, on y naît et en y meure. L’erreur de Karina a été de me connaître, a été de sortir de cet océan, d’avoir délaissé sa queue de poisson, et de se munir de deux jambes pour essayer de me suivre, pour essayer de m’atteindre. À me suivre ainsi, cela ne fait que l’épuiser, il ne lui reste plus, si elle veut garder son intégrité, qu’à me tuer, ou à se suicider, pour retourner à l’écume, à l’océan, au bidonville. Finalement, Karina est devenue chrétienne, la douleur que lui donnent ses jambes a été absoute par le pardon. Pardon de quoi ? D’être un petit poisson et d’être un jour sorti de son océan. Elle peut donc continuer à nager, avec ses frères, avec ses sœurs, avec les autres petits poissons, et aussi avec une croix qu’elle porte accrochée entre les deux seins, telle une cicatrice qu’elle devra assumer et accepter pour toujours. Le huitième jour Au premier jour était l’obscurité : Je t’embrassais et savourais le fruit défendu de ta bouche. Je mordais la chaire pulpeuse de tes lèvres, une goutte de sang perla. Mes lèvres contre les tiennes, nous jouissions de ce même fruit défendu. Au second jour, apparut la lumière, je pus admirer les merveilles de ton corps, ton visage, tes seins, ton sexe. Le parfum enivrant de ta sensualité m’envoûtait. Je te décapsulais et te bus jusqu’à la dernière goutte. Au troisième jour, apparurent toutes sortes de créatures, elles sortaient de ton ventre, c’étaient nos enfants, nous nous multiplions. Au quatrième jour, nous étions là, toi, moi et notre marmaille, comme une bande de singes chamailleurs, nous jouissions des plaisirs de la famille. Au cinquième jour, tu me contemplais, je vis dans tes yeux le feu de la déception et de la tristesse. Je te fis un baiser sur la bouche pour te calmer. Mais ce baiser était un mensonge car il n’y avait aucun remède à ta déception. Au sixième jour, nous étions deux vieux grincheux, bons pour nous mordre les fesses l’un, l’autre. Ta beauté avait disparu et je courais après d’autres beautés, après d’autres jeunesses. Au septième jour, alors que tout devait s’accomplir, tu pris un couteau et me le planta dans le ventre. Tu mis un doigt sur le sang qui coulait et puis le posas sur tes lèvres, en souvenir du premier jour. Le huitième jour n’a jamais existé, car c’est le nôtre, et nous sommes un rêve, notre amour est un rêve. Il ne reste plus qu’à fermer les yeux et chanter (*) : On ira, où tu voudras quand tu voudras, et l’on s’aimera encore, lorsque l’amour sera mort … (Vers de la chanson de Joe Dassin) Les révoltés du Bounty L’humanité est un rêve, un rêve tragique où chacun ne pense qu’à crever la bulle, histoire de revoir les étoiles. Celui qui aura revu les étoiles, reniera sa mère, son père, ses frères, ses sœurs, ses amis, et sa patrie. Il ne peut en être autrement, car les étoiles, sont avant tout, nos mères, pères, frères et sœur, amis et patrie. Que ne vienne un de ces odieux capitaines, qui pour des raisons de lucre, pour des raisons de satisfaction personnelle, pour des raisons de pain, viennent vous faire endurer toutes les fatigues et toutes les turbulences que le genre humain peut engendrer. Que ne vienne un de ces odieux capitaines, qui fera – non pas que s’ouvre la boîte de pandore- mais que le barrage craque. Celui qui a revu les étoiles, est comme un mouton béni à l’auberge de la grande ourse. Que l’on ne vienne lui parler d’arbre à pain, que l’on ne vienne lui parler de combat, de guerre, de travail comme la guerre, de paix, de paix comme la guerre. Celui qui aura connu l’odieux capitaine, se bannira lui-même de l’humanité, humanité qui ne connaît que le fouet et l’humiliation, tout cela pour un arbre à pain. Celui qui connaît le cinglant du fouet se révoltera, mettra le capitaine sur une barque et l’enverra au diable. Il ira alors se réfugier dans une île, chez le bon sauvage, où la vie est simple, loin de toute humanité, et il pourra de nouveau goûter le ciel étoilé. L’humanité ne sera pour lui qu’une peste, et il brûlera son propre bateau pour ne point avoir la tentation, un jour d’ennui, d’y retourner. Que ne viennent un de ces odieux capitaines … Que ne viennent non plus un de ces nouveaux indiens, qui aura retrouvé la paix sous les étoiles, la paix chez le bon sauvage, la paix dans la simplicité, car alors il chantera haut et fort dans la clameur de la nuit : « Occident, du haut de tes 5000 années de guerre, tu perds ton temps, peuple d’occident, vous perdez votre temps. Sur les îles, la vie est douce, l’humanité n’est qu’un furoncle, défaites-vous de ce fardeau inutile ». Il faut aussi l’avouer, le peuple d’occident n’est pas aidé. On ne fait que lui rabâcher, jour après jour, que le monde est dangereux, vénéneux. Que ce soit en Chine, à Tombouctou, à Bogota ou chez les papous, nous dit-on, tout n’est que viols, couteaux, incendies, poisons, voitures piégées et drones espiègles. Mieux vaut donc rester chez soi à alimenter la grosse machine, mieux vaut être retenu dans un barrage que d’être lancé dans la tourmente. Cependant, dans son désir de frigos bien remplis, le peuple d’occident a dû sortir de sa tanière. Il a donc voyagé. Voyages où il s’est rendu compte, que le reste du monde comme ennemi mortel est une belle fable qui ne sert qu’à alimenter le barrage. Le mythe du barrage est en train de craquer, il craque car il est rempli de failles, il est rempli de failles car on s’est bien rendu compte, qu’une seule de ces îles paradisiaques vaut mieux que toute la moribonderie que l’humanité a pu inventer. Le barrage craque, l’Europe craque, l’occident craque, l’individu craque car il en vient à penser : « À quoi bon ? À quoi bon 5000 ans de guerres sans compter celles à venir ? » Je me souviens de Daniel, abeille Roumaine, abeille sortie de la ruche de Roumanie, il me disait : « Chaque fois que je reviens sur le sol Caribéen, toute ma peine, en une seconde disparaît, je me sens vivre de nouveau, je me sens libre, avec les fameuses étoiles pour me faire des clins d’œil. » Qu’on ne parle plus à Daniel de ruche et de miel, car alors il deviendra fou de rage, vous regardera méchamment et vous dira : « Ton miel, ce n’est que du venin, si tu aimes le venin, bois-le toi-même et maintenant dégage, car ta vue m’importune, sors de mes étoiles. » Que l’on ne vienne plus parler à Daniel de Capital, de production, d’organisation, de machine sociale ou politique, car vous le mettrez dans un tel état de stress, qu’il en vomira. Daniel vit comme un vagabond, à l’auberge de la grande ourse, le reste ne l’intéresse pas, le reste ne l’intéresse plus. Celui qui aura revu les étoiles sera comme foudroyé, car il aura conscience de ce qu’est le pain, quand on peut avoir la paix. Le barrage est fendu de partout, et bon gré mal gré, ses techniciens tentent de colmater les brèches, mais il finira par se rompre, car être né quelque part, sur les trottoirs de Manille, dans les rues de Téhéran, sur les chaînes de montage de Renault, ou assis sur un fauteuil d’Orange- Téléphonie , ce quelque part n’est rien d’autre qu’un vilain furoncle. Quand le barrage va se rompre, ce sera un raz-de-marée, raz-de-marée du ras- le-bol d’une humanité qui ne fait que tous nous étrangler, ce sera la venue de l’indien, du nouvel indien, qui renaît de ses propres cendres, salue de nouveau la voûte céleste. Le nouvel Indien L’Indien, plus qu’un peuple, plus qu’un Iroquois, un cheyenne ou un Paoni, est avant tout un état d’esprit. Pas une idée non, un état d’esprit, une façon de voir les choses, une façon d’entrevoir les évènements, et d’y réagir. L’Indien, une interprétation bien spécifique de lui-même face, au reste du monde. Il faut bien le dire, l’Indien a été labouré, il en reste quelques débris, cloîtrés dans quelques réserves moribondes. L’Indien a été évincé car il s’est trouvé face à une créature face à laquelle il ne savait que répondre, face à une créature blanche qui l’a englouti. L’Indien a été englouti, avalé, et s’en est retourné à la terre jusqu’à la prochaine floraison. Voilà comment doit être vu l’Indien, voilà comment il a disparu, et voilà comment il va réapparaitre. On peut détruire un corps, mais pas une vision du monde. L’Indien tribal est mort, mais il ne demandait qu’à renaître. De quoi a besoin notre autochtone : De grands espaces, de collines verdoyantes à perte de vue sur lesquelles s’ébattent quelques troupeaux de bisons. Il lui faut aussi une rivière, pour se laver et se désaltérer, le reste importe peu. Le tipi mobile lui permet de se déplacer aux caprices des migrations des troupeaux ou des dérèglements passagers de la nature. L’Indien suit sa nourriture et plante son village aux pieds de son festin. Quoi de plus simple, même Lapalice en pâlirait devant tant d’ingéniosité. Les temps ont un peu changé. Les collines vertes ont laissé la place à des cités grises, toutes plus grandes les unes que les autres, à des autoroutes, et je ne sais encore quel autre gigantisme de l’extravagance humaine. Qu’il en vaille ainsi, le nouvel indien ira chasser sur les collines grises de béton et de bitume. C’est un peu artificiel il faut bien l’avouer, mais après tout, que ce soit en vert ou en gris, il s’agit d’espaces grandioses, où l’herbe est remplacée par quelques tissus plus moléculeux. Un Indien sur ses prairies vertes vaut un Indien sur son bitume, leur vision reste la même. Celui qui n’aura pas compris que demain sera nomade, ou plutôt celui qui aura compris que demain sera nomade, lui, sera au sommet du vent de l’évolution, siégeant là, sur sa colline, dans la brise de l’après-midi, avec une vue surplombante. Il récoltera les fruits qui se présentent à lui, car ils lui appartiendront. Adieu petite France, adieu petite Angleterre, Allemagne, Chine et USA. Les flux économiques vont tellement vite, les économies d’un point de vue général sont tellement changeantes et fluctuantes, qu’aujourd’hui mon terrain de chasse est Paris, et demain Tokyo. De façon très simple, je suis les pas du bison qui, lui-même, est le fruit des flux économiques. Il n’y a en cela rien d’extravagant, cela s’appelle s’adapter aux changements, aux nouvelles, aux nouvelles situations. Dans cette perspective, de suivre les flux économiques, nous ne sommes encore que dans l’élan de l’Indien. L’Indien va au-delà cette bienséance à un festin. À avoir quitté la France, il se dira bientôt « À quoi bon la France », et une fois arrivé en Australie, il en viendra aussi vite à se dire « À quoi bon l’Australie ». J’étais Français, je suis en passe de devenir un peu Australien, et voilà, grande affaire. Pour éviter toute tracasserie identitaire, autant être simplement Indien, dans le sang. Sur la peau, je marquerais à coups de tatouages mes amours passés, comme un testament. Mon avenir se situe dans mon présent, à savoir ce que je vais manger, avec qui je vais partager ma couche, et quels seront mes compagnons. Un seul de mes compagnons vaudra plus qu’une bible, qu’une encyclopédie universelle ou n’importe quel contrat social. A penser ainsi, à agir ainsi, et d’un simple coup d’œil, et en l’espace d’un éclair, toutes ces belles cités ne sont plus grand-chose, et ne valent pas mieux qu’un tas de débris. Uniquement des collines grises sur lesquelles je partirais à la chasse au bison, afin qu’elles me donnent ma nourriture. J’aimerais ces collines car c’est sur elles qu’apparaîtront mes déjeuners, et c’est de leurs tonsures que je me réchaufferais. Et lorsqu’on me posera la question : - Qui es-tu ? Je répondrais : Je suis le nouvel Indien - Et quelles sont tes prétentions ? - Aucune. - Si tu n’as pas de prétentions, de quoi vis-tu - Des prairies qui poussent sur ton dos - Je ne t’autorise pas à me tondre. - Je le ferais sans ton autorisation, car je suis au sommet du vent de l’évolution, et je suis là pour te brouter. Mais c’est odieux, tout cela. - Odieux non, car tu seras ma colline, et tu apprendras à m’aimer. - Va te faire foutre. - C’est dorénavant de ton foutre que je vivrais, et pour cela, je te suis vivement reconnaissant et toujours je te protégerais. Voilà, j’ai répondu à ta question, je suis le nouvel Indien. Petite fable mignonnette que celle du nouvel Indien. Lui-même s’est fait labourer il y a de cela quelques siècles, lui ne se contentera que de brouter et de tondre, et de temps en temps, abattre un bison. Les histoires sont toujours les mêmes, avec de vertes collines, de verts pâturages, des troupeaux qui paissent paisiblement dans des étendues perdues, et des chasseurs qui se nourrissent de nos bovins. L’Indien ne prétend que de se nourrir lui-même, il ne s’agirait pas d’ouvrir dans le fond de la vallée un dépôt de viande en gros, ou je ne sais encore quelle délirante industrie. L’Indien se nourrit de ce qui vient de la terre, et maintenant, de ce qui vient du béton et du bitume. En guise de plume, il est décoré d’écouteurs en tout genre, le tomahawk est remplacé par une tablette IPAD, mais cela ne l’empêche pas d’aller à la chasse au bison, et le soir, autour d’un feu, de raconter les aventures du jour. Qui aime la chasse au bison sur les collines grisonnantes de nos cités me suive.