Le guide du coloc parfait - Blog

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Le guide du coloc parfait - Blog
N° 30
avril 2015
Pages 62-67
3410 mots
CONNAÎTRE
Le guide du coloc parfait
PARTAGER UN MICRO-ONDES, ÇA DEMANDE PAS MAL DE COMPROMIS. VOICI 13* QUESTIONS À SE POSER AVANT D'EMMÉNAGER DANS L'AUBERGE ESPAGNOLE.
2 COLOC = PLAN CUL NICKEL ?
1 C'EST QUOI, LA COLOC IDÉALE ?
Déjà, le nombre magique est trois :
« A deux, si ça colle pas, bonjour
l'ambiance. A trois, il y a toujours une
des deux autres personnes avec qui
ça passe mieux. Au-delà de trois, ça
devient plus compliqué à gérer »,
prévient Thomas Villeneuve, fondateur du site Weroom, le réseau social
de la coloc. A noter que le psy Damien Aupetit recommande de ne pas
se mettre en coloc avec des amis : « Il
est plus facile d'être clair avec quelqu'un pour lequel il n'y a pas d'affect
au départ, car on n'a pas peur de le
vexer, ou de le blesser. Et si la cohabitation se passe mal, on ne perd pas
un pote. » L'appart idéal compte trois
chambres disposées en étoile, salon
et cuisine, toilettes et salle de bains
séparés, et fait au minimum 70 m2 .
Pour Thomas Villeneuve, « c'est important d'avoir de VRAIS espaces
communs, sinon, il n'y a pas de partage. »
A priori, faire trois pas dès qu'on a
envie de rouler des galoches, c'est
pratique. Dans les faits, c'est plus
complexe. Bernard (le prénom a visiblement été modifié), 26 ans, a flashé sur son coloc : trois mois à flirter,
quelques semaines pour devenir accro, et six mois pour s'en remettre.
« J'étais en mode petit chien. Le savoir au bout du couloir m'empêchait
de me raisonner. » Résultat : entre
deux bisous, Bernard se prend pas
mal de râteaux, et quand à la fin de
son Erasmus son coloc s'en va, sa
présence est toujours palpable.
« Chaque pièce me rappelait des souvenirs. Trop dur de tourner la page. »
Aujourd'hui, Bernard a une règle
d'or : no zob in coloc. « La proximité
amplifie tout : le positif, mais surtout
le négatif. »
Votre coloc n'a toujours pas fait la vaisselle ? Avant de le
noyer dans l'évier,
tentez la méthode
douce avecLe Blocnotes du râleur (éd.
Milan et demi, 9,33
€). Nous vous offrons quelques
notes à découper
pages suivantes. Photo :
Photos NEON
3 COMMENT SAVOIR SI ON EST
FAIT POUR ÇA ?
« Tout le monde peut vivre en coloc », tranche Thomas Villeneuve
(Weroom). Tout le monde, peut-être,
mais pas pour toujours. « La coloc,
c'est avant tout une transition », précise Damien Aupetit, psychologue :
« de la vie familiale à la vie d'adulte »,
principalement, mais aussi à des moments charnières, comme une séparation. Rien ne vous empêche de faire
l'ermite, ne sortant de votre chambre
qu'après avoir vérifié que le couloir
est désert. Mais soyons clairs : la coloc est surtout un idéal communautaire, « vivre ensemble avec ses différences », un bel héritage peace and
love qui marche bien. Tant que personne ne finit le dernier yaourt.
1
4 COMMENT BIEN CHOISIR SON/
SES COLOCS ?
On trouve tous chaussure à son pied.
On peut avoir quelques ampoules au
départ, mais avec le temps, on fait
la godasse. Généralement, le coloc
idéal, c'est plutôt quelqu'un comme
nous : 94 % des étudiants préfèrent
vivre avec d'autres étudiants ; et 57 %
des femmes ont une préférence pour
des colocs féminines, selon appartager.com. Pour trouver votre clone, le
Tinder du coloc existe : autroisieme.com. Via Facebook, le site recense les intérêts que vous avez en
commun avec votre potentiel voisin
de chambre. Mais sortir de sa zone de
confort peut s'avérer tout aussi cool.
Comme Caroline, qui a vécu avec des
gens visiblement frappés : « J'ai habité un an avec deux mecs à mille lieux
de moi qui suis plutôt calme, jamais
dans l'excès… Mon coloc russe hurlait “Mummy I love You ! ” la nuit,
transpirait beaucoup et parlait seul.
Mon coloc canadien, lui, dormait
dans la forêt car il faisait trop chaud
dans l'appartement l'été, se lavait
une fois par semaine et filtrait sa
crasse avec une sorte de filtre à thé
dans la baignoire. Je me demande encore parfois comment j'ai fait pour
tenir, mais au fond, c'était chouette,
on a vraiment eu des bons moments. »
« Ton intimité s'arrête là où commence celle des autres » : un principe de base que la coloc de Mathilde,
19 ans, n'a toujours pas intégré. « Elle
est très intrusive : il n'y a pas de verrou dans la salle de bains, alors elle
y entre quand j'y suis. Dès qu'elle a
envie de parler, elle déboule dans ma
chambre, que je sois occupée ou
non. » Mathilde aimerait bien pouvoir prendre sa douche tranquille,
mais elle ne veut pas braquer sa coloc, alors elle laisse couler. « La cohabitation et l'intimité sont un paradoxe permanent, explique le psy. On
“vit ensemble”, mais on a aussi besoin de moments à soi. Il faut répartir l'espace entre pièces communes et
lieux privés : on partage la cuisine et
le salon par exemple, mais on respecte l'intimité de chacun dans les
chambres et la salle de bains. »
6 FAUT-IL
RYTHME ?
AVOIR
LE
MÊME
Non. Mais ça marche à une condition : s'aménager régulièrement des
moments de retrouvailles. Et disposer d'une grosse pile de Post-it. Aurélien, 34 ans, qui bosse de 8 heures à
20 heures, et Marina, oiseau de nuit,
en utilisent beaucoup. « Surtout la
semaine, pour se donner des petites
infos. Quand on se retrouve le weekend, on apprécie le temps qu'on
passe ensemble. L'avantage, c'est
qu'on vit chacun à notre rythme. Je
peux jouer toute la nuit sur ma
console sans l'embêter, et quand elle
se fait les ongles pendant la journée,
je ne suis pas dérangé par l'odeur du
dissolvant ! » Mais Aurélien et Marina
font figure d'ex ceptions : 42,2 % des
colocataires préfèrent habiter avec
quelqu'un « compatible avec leur
rythme de vie », selon appartager.com.
7 QUI PAIE QUOI ?
5 DOIT-ON TOUT PARTAGER ?
Raphaël, 29 ans, est en coloc avec Simon et Zac. Chacun sa chambre.
« Celle du fond pour Zac, afin de ne
pas entendre ses ébats quand vient
sa nana, et Simon a la plus grande,
donc il paye 50 euros de plus chaque
mois. » Les charges sont divisées en
trois, et les courses, c'est à l'à-peuprès : « Zac fait ses courses de son côté, il est encore étudiant, il a moins
de ronds. Simon et moi, on les achète
ensemble, et on partage à la louche :
on mange aussi des pâtes, mais on
met plus de trucs dedans ! » Leurs petits arrangements sont souples et
fonctionnent bien.
Chez Clémentine, par contre, c'est
moins simple : ils vivent à sept. Une
vraie petite entreprise, avec un
compte commun et un chef comptable. « Quand on fait des courses
pour tous, on met le ticket de caisse
avec notre nom sur le frigo. Chaque
mois, le mec qui s'occupe de la compta fait la balance, et dit qui doit verser quoi. » Si vous n'avez pas de colocs passionnés par Excel, vous pouvez vous en remettre à la technologie. Le New York Times a développé
une appli pour partager équitablement le loyer en fonction du nombre
de colocs et de la taille des chambres,
The Rent Division Calculator. Et pour
le quotidien, une appli type Tricount
(gratuite sur smartphone et web),
c'est impec : on indique qui a payé
quoi, qui a participé à quoi, et l'app
calcule qui doit combien et à qui.
8 QUEL TYPE DE BAIL POUR
QUELLE COLOC ?
Il existe deux formules : 1/ le bailleur
conclut un contrat unique avec
l'ensemble des colocataires. En cas
de départ ou d'arrivée en cours de
bail, il faut signer un avenant au
contrat initial ; 2/ le proprio conclut
un bail avec chacun des colocs. Les
baux sont indépendants : à chaque
départ d'un colocataire, il faut faire
un état des lieux de sortie et un nouveau bail avec le nouvel entrant. Les
particuliers proposent rarement ce
2
genre de baux, plus compliqués à gérer. En revanche, certaines agences
immobilières en ont fait leur spécialité. C'est le cas de l'Auberge (l-auberge.com) : celle-ci établit un
contrat de bail général avec le proprio, puis des baux individuels avec
les colocataires. Plus pratique si vous
voulez partir rapidement, ça évite
aussi les désagréments du type
« clause de solidarité » qui vous engage (vous et votre caution) auprès
du bailleur à payer pour votre coloc
s'il n'assure pas ses traites. Nouveauté : la loi ALUR (pour l'accès au logement et un urbanisme rénové) du 24
mars 2014 vous dispense de ces remboursements dès qu'un nouveau colocataire remplace le mauvais payeur
sur le bail.
Puis lorsqu'il lui a demandé de faire
la vaisselle à sa place. Depuis, elle
continue la vie à plusieurs mais affiche un principe : « Je suis ta coloc.
PAS TA MÈRE. » Côté politique,
Vincent, lui, a eu quelques sueurs
froides quand il a découvert ses deux
colocs en train de défiler dans le salon en faisant le salut nazi à 3 heures
du matin. « Les différences culturelles peuvent rajouter des difficultés
supplémentaires. Incompréhensions,
tensions qui vont pousser certains à
se replier et d'autres à aller à
l'affrontement. » confirme Françoise
Zannier, psychologue et spécialiste
des relations interculturelles. Seule
solution pour ne pas se retrouver
avec des nazis : stalker en amont vos
futurs voisins de chambre.
10 LA COLOC DE PROPRIOS, ÇA
EXISTE ?
Oui, et ça porte même un nom : la
coopérative d'habitants (ou habitat
participatif). La loi ALUR du 24 mars
2014 encadre ce nouveau type de copropriété. L'idée : un groupe de personnes conçoit, construit et gère collectivement un habitat organisé autour d'espaces communs. Généralement, on ne partage pas le salon mais
un jardin, ou une laverie par
exemple. Avantage : pas de frais
d'agence et un retour à l'esprit de
partage. Plus d'infos sur les sites habitatparticipatif.net
et
habitatgroupe.org.
LA DIFFÉRENCE 9 CULTURELLE :
GAVANT OU ENRICHISSANT ?
Soyons clairs : si le mélange des
genres vous angoisse, vous n'êtes pas
faits pour la coloc. Après, il y a des
limites à ne pas franchir. Pour Alice,
ça a commencé à coincer quand elle
s'est rendu compte que son coloc cubain vivait toujours à l'heure de son
pays : avec six heures de décalage.
11 LA COLOC AVEC PAPI, C'EST
L'ÉCLATE ?
La colocation intergénérationnelle
est en plein développement : aujourd'hui, sur appartager.com, les
étudiants ne représentent plus que la
moitié des clients. Les autres sont
des actifs ou des retraités (entre 2012
et 2014, le nombre des personnes
âgées de 40 ans et plus a augmenté de
43 % sur le site), et des familles monoparentales. Vos chances de vous
retrouver à slurper du potage devant
Questions pour un champion ne
cessent donc d'augmenter. Marianne,
25 ans, elle, a adoré ça. Pendant six
mois, elle a vécu auprès de Sabine, 82
ans. Contre 400 euros, elle disposait
d'une chambre, partageait des espaces communs… et de chouettes
discussions : « Elle me racontait sa
vie à mon âge, était bienveillante et
pas étouffante. On parlait de tout,
c'était cool. Ça m'a appris à écouter.
On est restées en contact. C'est ma
troisième mamie. » Son conseil : si
vous ne voulez pas vous transformer
en aide-soignant, passez par les assos spécialisées (reseau-cosi.com).
12 SOUS-LOUER SA CHAMBRE, ÇA
SE FAIT ?
Si vous avez l'accord écrit de votre
bailleur, rien ne vous empêche légalement de le faire. Selon Weroom, la
sous-location représente environ 10
3
% des annonces sur leur site. Mais
mieux vaut mettre ça au clair avec
vos colocs. Quand Marie est partie
s'installer à l'étranger, elle a mis sa
chambre en sous-loc, histoire de garder un pied-à-terre à Paris, au cas où.
Sauf que les mois passant, ses colocs
en ont eu ras-le-bol. « La coloc qu'ils
avaient choisie, c'était moi. Non
seulement je n'étais plus là, mais en
plus j'avais laissé mes affaires. J'ai fini par quitter définitivement ma
chambre pour régler le problème. »
13 GESTAPO VS CRACRA, C'EST GÉRABLE ?
D'un côté, le coloc de Florent, despote archi-maniaque, si pointilleux
qu'il lui interdit d'accrocher une tenture indienne au mur : « Mot pour
mot, il a dit : “Il y a plein de petits
trucs dedans, et ça prend trop la
poussière.” » De l'autre, Mathilde (la
même qui a des problèmes de
douche), laquelle a moyen rigolé
quand elle a retrouvé une capote usagée de son coloc dans son linge sale.
Pour éviter les crises d'hystérie, le
psy Damien Aupetit conseille de bien
s'assurer qu'on a à peu près les
mêmes notions du « propre » et du
« sale » et de s'entendre sur des règles
de base dès le départ, quitte à les assouplir. Ça vaut pour l'hygiène
comme pour la répartition des
tâches. Pour ça, il existe l'appli Fairshare (gratuite sur Apple et Android)
: chaque coloc y indique sa contribution à la vie de la maisonnée, et
l'appli fait le compte des participations, permettant ainsi de s'assurer
que chacun fait sa part du taf. ■
par Montety, Elodie Barakat et Boris Courret.
* Pourquoi 13 ? Parce qu'en octobre
dernier, un Français (qui n'avait pas
lu ce dossier) a écopé de 13 ans de
prison après avoir tué son coloc tyrannique. Les joies de la vie en communauté, tout ça.
4
ENCADRÉS DE L'ARTICLE
54%
54% des colocs sont actifs, 45 % sont étudiants, et 1 % sont retraités (Source CSA / Guy Hocquet, 2014)
4 colocs de pop stars
Bob Dylan et Johnny Hallyday Mai 1966. Bob Dylan, dont les premiers albums ont déjà
déclenché partout un cataclysme musical, a 25 ans et fait son premier Olympia. Mais il
s'ennuie un peu, seul dans sa chambre du George V. Il décide alors d'habiter quelque
temps chez l'idole des jeunes, à Neuilly. Et apparemment, ce n'est pas non plus la fête
tous les soirs. « Bob s'enfermait tout le temps pour écouter ses maquettes et puis, un matin, je me suis réveillé et il était parti. Je ne l'ai jamais revu depuis », a avoué Johnny à Télérama en octobre
2014.
Les Beatles1963. Les quatre garçons dans le vent cherchent un lieu pour s'installer ensemble et durablement. Leur choix se porte sur un appartement de l'Est londonien, au 57
Green Street. Une coloc éphémère : Paul et John quittent le navire dès la fin du premier
mois et les autorités demandent à George et Ringo de déguerpir à cause de la présence
permanente de trop nombreux fans.
Les Spice Girls Le manager Heart Management lance un appel en 1993. Cinq jeunes filles
sont retenues. C'est le début des Spice Girls. Pour qu'elles apprennent à s'entendre et
s'apprécier, l'imprésario les installe dans une maison au 58, Boyn Hill Road, à Maidenhead. Un an après, elles sortent leur album, deviennent riches et quittent la coloc.
Gorillaz Deux potes, Damon Albarn et Jamie Hewlett, viennent de se séparer de leurs petites amies et emménagent ensemble dans un appart londonien. Nous sommes en 1997,
ils ont 29 ans. C'est en regardant MTV, affalés dans le canapé, qu'ils racontent avoir eu
l'idée de monter leur groupe : Gorillaz.
45%
45% des hommes envisagent de choper leur coloc, contre 25 % chez les femmes (Source Weroom)
59%
59% des colocs en France ont entre 18 et 34 ans (Source Guy Hocquet, 2014)
Parution : Mensuelle
Tous droits réservés 2015 Neon
Diffusion : 41 965 ex. (Diff. payée Fr.) - © OJD DSH 2014
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