Il - XV Parlementaire
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Il - XV Parlementaire
Essonne Le Parisien / Lundi 17 juin 2013 II Ils racontentleurpremière annéeàl’Assembléenationale Sur les dix députés essonniens, six n’avaient jamais siégé au parlement. Un an après leur élection, ils reviennent sur leurs premières expériences vécues au PalaisBourbon. I l y a pile un an, certains ne pouvaient contenir leurs éclats de rire, d’autres avaient les yeux embués d’émotion. Les urnes venaient de parler. Tous étaient élus députés. Parmi les 10 heureux élus essonniens, six allaient s’asseoir pour la première fois sur les bancs rouge de l’Assemblée nationale. Deux y siègent à la place des ministres Manuel Valls et François Lamy qui, fraîchement élus, ont dû céder leur fauteuil de parlementaire à leur suppléant. Un autre, Thierry Mandon, y revenait après 20 ans d’absence. La vague rose verte des socialistes et de leurs alliés écologistes n’avait en revanche pas atteint les inébranlables Franck Marlin (UMP) et Nicolas Dupont-Aignan (DLR), tandis que Nathalie Kosciusko-Morizet (UMP) sauvait in extremis son fauteuil. Mais après la joie, vient le temps du travail et parfois des galères. Les primo-députés racontent comment ils ont vécu cette toute première année parlementaire. TEXTES : FLORENCE MÉRÉO Les trois questions que nous avons posées aux néodéputés : 1. Sur quel dossier pensez-vous avoir apporté quelque chose ? 2. Quelle anecdote vous a le plus surpris ? 3. Quelle est votre principale déception ? Thierry Mandon, du minitel… à Internet ! l’avait quittée en 1993, battu par IdelGeorges Tron. Il l’a retrouvée près 20 ans plus tard, prenant sa revanche sur le maire UMP de Draveil. L’Assemblée nationale a entretemps bien changé, assure Thierry Mandon, député socialiste de la 9e circonscription (Ris, Draveil) et désormais porteparole du groupe PS à l’Assemblée. « Déjà, elle s’est rajeunie et féminisée. Ensuite, il y a aujourd’hui beaucoup plus de moyens. L’informatisation et l’accès à des banques de données très larges et partout dans le monde, ont changé la donne », explique l’élu de 55 ans. « Lors de mon premier mandat, entre 1988 et 1993, on était au début du Minitel. On lisait les journaux, préparait les textes de loi en lisant 2 ou 3 livres et en faisant des auditions. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus professionnel, rigoureux. Il faut vérifier les réglementations européennes, étudier des dizaines de documents. C’est un travail de tous les instants. » Quant à l’ambiance, elle a un peu évolué. « Disons qu’aujourd’hui, du fait de la multiplication des médias et des chaînes info, certains sont devenus des spécialistes des prises de parole intempestives, ce qu’on voyait bien moins avant », rigole le député. F.M. Malek Boutih, SOS école EvaSas,lamarqueverte n 48 ans, élu PS de la 10e circonscription (Sainte Geneviève, Grigny). L’ancien président de SOS racisme, Malek Boutih, confie que « l’année fut difficile. On n’a pas eu le temps de manger notre pain blanc que déjà on était au pain sec. Il faut rester serein et travailleur. » 1. Membre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, Malek Boutih a fait de l’école « une priorité. Le rôle des parents est essentiel », appuie celui qui a été rapporteur de l’avis du budget jeunesse et sport et qui a rendu un rapport fort de 27 propositions sur le financement de la vie associative. Situation cocasse pour lui qui nourrit de fortes peurs visàvis d’Internet, et ne possède ni de compte Twitter ni Facebook : il a été nommé membre… du groupe sur le numérique et Internet ! « Je travaille justement sur les questions de sécurisation. » 2. « Le premier jour où j’ai siégé, avant l’élection du président de l’assemblée, nous avons été placés par ordre alphabétique. Du coup, avec mon B, je me suis retrouvé dans la partie droite, non loin de JeanFrançois Copé. Pour un militant SainteGenevièvedesBois, le 26 mai. Malek Boutih lors des festivités du parc Pierre. (DR.) de gauche être d’emblée rangé à droite, c’est assez rigolo. Heureusement, ça n’a pas duré longtemps ! » 3. « Je suis déçu par le comportement trop docile des parlementaires envers les ministres. Il y a un manque d’impertinence et d’indépendance. J’essaie de garder mon indépendance, ce qui me vaut de l’hostilité de la part de certains ministres, notamment celle des sports ». MichelPouzol, tout-terrain 50 ans, élu PS de la 3e circonscription (Dourdan, Brétigny). Ancien scénariste passé par la case chômage, Michel Pouzol a gravi les marches jusqu’à devenir député. Cette année fut, dit-il, déroutante. « C’est palpitant et à la fois étrange. On travaille énormément mais la perception extérieure est très dure sur notre travail. » De sa première entrée dans l’hémicycle, il se souvient du « brouhaha. Au début, on est surpris, après on s’habitue, enfin, on participe », sourit l’élu. 1. Membre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, Michel Pouzol participe à l’élaboration de la loi sur la refondation de l’école. « Je suis fier d’avoir fait voter et intégrer à la loi un amendement sur le maintien des Rased (réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, NDLR) », note celui qui est aussi impliqué sur les questions d’enseignement supérieur et de recherche. 2. « J’ai intégré l’équipe de rugby du XV Parlementaire. C’est drôle, constate Michel Pouzol, de voir sur le terrain, en première ligne un élu UMP, un élu centriste en talonneur et moi, PS, de l’autre côté. En chauvin, supporteur de l’équipe de Clermont-Ferrand, j’ai appris lors d’une rencontre que mon club venait de 42 ans, élue EELV de la 7e circonscription (Savigny, Athis). Pour son tout premier mandat d’élue, Eva Sas a vu gros, et ça a marché. Grâce à l’accord avec le PS, l’écologiste est rentrée à l’Assemblée nationale avec l’idée d’imposer sa marque verte, notamment sur les questions d’économie et de fiscalité. « Je pensais que l’on aurait plus de marge de manœuvre. Il y a une certaine frustration mais je continue à me battre », ne désarme pas la députée Europe Ecologie - Les Verts. 1. Vice-présidente de la commission des finances, Eva Sas, a dans sa ligne de mire, les paradis fiscaux. « On a fait passer un amendement sur le reporting pays par pays pour les banques (l’obligation de rendre transparents les profits et impôts payés dans chaque pays où la structure est implantée, NDLR) », souligne celle qui porte la résolution de fiscalité écologique. Une manière selon elle de « faire peser les taxes sur les comportements les plus polluants plutôt que sur le travail. » 2. « Au début du mandat, les gens ne m’identifiaient pas totalement, concède-t-elle. Certains dans la circonscription me prenaient pour… Valérie Trierweiler. Un jour, après 5 minutes de discussion, un habi- Paris, le 19 juin 2012. Eva Sas n’avait jamais eu de mandat avant d’être élue députée. (LP/F.M.) tant m’a dit : Mais pourquoi la femme du président est-elle là ? Ça m’a beaucoup amusée. » 3. « Le poids des lobbys, que ce soit dans le secteur bancaire, comme dans la téléphonie mobile, est impressionnant. Je savais qu’ils étaient organisés et puissants mais je ne savais pas qu’ils étaient écoutés à ce point. Le gouvernement plie face à eux ». Jérôme Guedj cultive son côté trublion n 41 ans, élu PS de la Dublin (Irlande), le 17 mai. Premier match pour Michel Pouzol (à gauche) au sein du XV parlementaire. (DR.) perdre. Le député UMP des Yvelines, Jean-Frédéric Poisson, m’a invité à prendre un pot. Quelques jours avant, on s’affrontait durement sur le mariage pour tous. Le sport a des valeurs humaines exceptionnelles. » 3. Le mensonge de Jérôme Cahuzac l’a heurté, explique le député. « Un matin, j’ai eu une conversation privée avec lui. Il était très tourmenté. Je suis parti avec la conviction qu’un homme qui avait l’air aussi mal ne pouvait être un menteur. Je suis tombé de très haut. » 6e circonscription (Massy, Palaiseau) Dix points. Trublion. En un an à l’Assemblée, Jérôme Guedj, a agité à la fois l’opposition, pris la main dans le sac en pleine partie de scrabble numérique durant les débats, et la majorité, refusant de voter pour le pacte budgétaire européen. « Agiter les idées, ça sert. Aujourd’hui, une révision de ce pacte va être engagée, c’est bien que nous n’avions pas tort », se réjouit l’élu, également président du conseil général. 1. Membre de la commission des affaires sociales, Jérôme Guedj s’est penché sur les questions de handicap. Il est coauteur d’un amendement pour faire passer de 25 à 30 ans l’âge légal pour obtenir un emploi d’avenir pour les personnes en situation de handicap. « C’était ma première intervention à la tribune, le 11 septembre. Je pétochais un peu. J’ai commencé mon intervention par une citation sur le droit au travail de Salvador Allende », se rappelletil. Défenseur de la langue des signes et la reconnaissance du bilinguisme dans les écoles, il est l’auteur d’un récent amendement œuvrant pour un meilleur accès aux classes prépas. Massy, 11 avril. Jérôme Guedj dans une classe où les enfants étudient en langue des signes. (LP/F.M.) 2. « J’ai vu avec plaisir Henri Gaino participer au groupe d’étude sur la langue des signes que je préside. J’ai pu débattre courtoisement avec lui, alors que l’on avait eu un gros accrochage à la télé (l’exconseiller de Nicolas Sarkozy l’avait traité de sale con, NDLR) ». 3. « On aurait dû, assuretil, légiférer plus vite, dès juillet et août derniers, sur les questions sociétales. Il y a parfois une obstruction parlementaire décevante. »