Dossier Presse

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Dossier Presse
DOSSIER DE PRESSE
LE 2 SEPTEMBRE AU CINÉMA
Distribution & Presse
SPLENDOR FILMS - 2 bld Saint-Denis 75010 PARIS - T. 09 81 09 83 55
www.splendor-films.com
Synopsis
Psychologiquement et affectivement perturbée, Kay éprouve de profondes angoisses dans la vie. Son
mariage avec Louis n’arrange que momentanément les choses. Le retour de sa sœur aînée Sweetie, va
bouculer l’existence du couple.
Notes de la réalisatrice
« L’expérience des festivals comme Cannes ou ailleurs m’a fait me rendre compte que les gens semblaient
apprécier le style de films que j’avais commencé à faire. Ça m’a décidé à essayer de faire un long métrage
moderne à petit budget attaché à mon propre style. Je pensais que si nous ne demandions pas beaucoup
d’argent, on nous laisserait essayer quelque chose de peu commun. Je me disais qu’il aurait été fantastique
de faire un film avec la génération de cinéastes avec qui j’ai grandi. Pour la plupart d’entre nous, ce fut
notre premier long métrage. »
JANE CAMPION
Entretien avec Jane Campion
Propos recueillis par Michel Ciment (Cannes, 17 mai 1989)
Extraits tirés de Jane Campion par Jane Campion, Michel Ciment, Éditions Cahiers du Cinéma, 2014
« Qu’avez-vous fait pendant ces trois années qui séparent vos courts métrages de Sweetie ?
Après la présentation de mes films au Festival de Cannes, j’ai réfléchi à ce que j’allais entreprendre dans la
mesure où des possibilités s’ouvraient à moi. Le premier projet que je voulais mener à bien c’était Sweetie,
car il me semblait reposer sur le point de vue le plus moderne et le plus provocateur. De plus, il était
financièrement réalisable. Je pensais aussi qu’après un film plus « sérieux », ce serait difficile de réaliser
Sweetie ! je sens en moi un côté provocateur et cela me plaisait beaucoup d’attaquer ce sujet. J’ai
commencé à développer cette histoire avec mon coscénariste Gerard Lee, l’ami qui avait déjà écrit avec
moi Passionless Moments et qui est quelqu’un de très intelligent. C’était un matériau qu’il connaissait bien,
qui nous appartenait à nous deux, et nous étions sur la même longueur d’onde. »
« Avez-vous eu des difficultés pour financer Sweetie ?
[…] Quant à la production même de Sweetie, elle s’est faite sans trop de problèmes, car le film était très
bon marché, moins d’un million de dollars. Le scénario a été écrit dans cette perspective. Il m’a été inspiré
par des gens, des événements que j’ai connus. Je procède toujours ainsi, cela me donne ensuite plus
d’autorité pour écrire, et même si je m’éloigne ensuite de ces expériences, j’ai toujours une base vers
laquelle je peux revenir. Le personnage de Sweetie a été inspiré par un homme mais, pour des raisons
familiales, nous avons changé de sexe. Cela m’a déçue au départ, mais j’ai respecté les sentiments de mon
coscénariste. Ce que j’aimais dans Sweetie, c’était tout le potentiel qu’il y avait en elle et la façon dont elle
s’écroulait. Cela nous arrive à tous. Un jour, nous explorons ce que nous pourrions être, ce jour s’enfuit et
c’est trop tard. C’est un personnage poignant et sans espoir. »
« Avez-vous étudié des cas psychiatriques, lu des ouvrages sur le sujet ?
Non, pas vraiment. Nous avions des exemples vivants autour de nous. Et nous parlions beaucoup de gens
que nous connaissions et qui étaient devenus fous. […] Je ne voulais pas que l’on passe par les obligations
narratives habituelles mais que l’on traite davantage des états mentaux ou des émotions. Je voulais parler
de la difficulté d’aimer tout en introduisant souterrainement des courants plus sombres. C’est alors que j’ai
eu l’idée de la superstition. J’avais aussi envie d’utiliser des métaphores car je pense que les gens pensent
beaucoup plus souvent qu’on ne le croit par métaphores et qu’on ne voit pas cela souvent sur un écran.
Cela me semblait donner des dimensions supplémentaires au film. »
« Le sujet aurait pu donner lieu à un film misérabiliste. Vous filmez au contraire la laideur et la vulgarité
en les stylisant.
Le directeur artistique a créé volontairement des décors ternes et moches. Nous avons réfléchi sur les
intérieurs en tenant compte du fait que les gens apportent leurs meubles dans les appartements où ils
emménagent tout en gardant des objets qui appartenaient aux locataires précédents, si bien qu’il y a un
mélange de styles. Ce qui est laid peut être aussi vu avec élégance par la lumière ou le cadrage. C’est une
marque de sympathie. C’est plus poignant pour moi qu’un décor « joli », qui offre beaucoup moins de
contrastes possibles. »
« Vos cadrages sont étonnants. Sont-ils préétablis ou bien êtes-vous inspirée par le tournage ?
[…] Au début, j’avais peur que mes cadrages ne paraissent prétentieux, mais je n’ai plus ce sentiment
horrible. Ce que je voulais, c’était franchir cette ligne qui permet au cadre de créer le caractère poignant
d’une situation comme dans la photographie, qui est un art beaucoup plus aventureux de ce point de vue
que le cinéma. Il y a une sensibilité, une sophistication dans la photographie que je ne retrouve pas souvent
au cinéma, et je voudrais pouvoir continuer à mener de front cette recherche visuelle et le développement
du récit. »
« Y a-t-il des films où vous avez senti une recherche proche de la vôtre, un désir de décrire les états
mentaux ?
C’est une chose courante en littérature et je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas au cinéma. Il suffit de
le vouloir, de désirer l’accomplir, comme David Lynch. On ne découvre pas la vérité juste en développant
une intrigue mais en explorant plusieurs niveaux. Je ne désire pas seulement regarder les comportements
mais découvrir les pensées et les émotions, comme dans certains romains de Marguerite Duras ou de
Flannery O’Connor. […] »
Biographie de Jane Campion
Jane Campion est originaire de Wellington en Nouvelle-Zélande. Elle sort diplômée d’Anthropologie à
l’Université Victoria de Wellington, avant d’intégrer l’Australian Film and Television School, où elle réalisa
trois court-métrages : Peel, Passionless Moments, et A Girl’s Own Story, son projet de fin d’études.
En 1986, Jane Campion fait sensation au Festival de Cannes : Passionless Moments, A Girl’s Own Story et 2
Friends (un téléfilm qu’elle réalisa en 1985), sont programmé dans la sélection Un Certain Regard. Et Peel
remporte la Palme d’Or du Meilleur court-métrage.
C’est en 1989 qu’elle réalise son premier long-métrage, Sweetie, présenté en compétition au 42ème Festival
de Cannes. Il assoie les thèmes de prédilection de la réalisatrice qui connaissent de multiples variations
dans son œuvre : le désir féminin, l’émancipation d’héroïnes au caractère singulier et souvent marginales,
la lutte contre les carcans sociaux, la quête d’identité ou encore le nouveau départ.
Son second long-métrage, Un Ange à ma Table sort en 1990. Ce film remporta le Grand Prix du jury à la
Mostra de Venise.
En 1993, Jane Campion réalise son troisième long-métrage, La Leçon de Piano. La cinéaste atteint une
renommée internationale en obtenant la Palme d’Or pour ce film. Elle devient alors la première femme à
remporter cette distinction, et la seule personnalité à détenir à la fois la Palme d’Or du long et du courtmétrage. Les récompenses s’accumulent pour ce film : Prix d’interprétation féminine (Festival de Cannes) et
Oscar de la meilleure actrice pour Holly Hunter, Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle à la jeune
Anna Paquin, César du Meilleur film étranger, etc.
En 1996, elle adapte Portrait de Femme de Henry James, avec Nicole Kidman.
En 1997, Jane Campion préside le jury de la 54ème Mostra de Venise, et attribue le Lion d’Or à Hana-bi de
Takeshi Kitano.
Elle réalise ensuite Holy Smoke en 1999 avec Kate Winslet et Harvey Keitel, In the Cut en 2003, un thriller
érotique, coproduit par Nicole Kidman, puis Bright Star en 2009.
Présidente du jury de la Cinéfondation et des courts-métrages au 66ème Festival de Cannes, elle reçoit
pendant cette édition le Carrosse d’Or de la Quinzaine des réalisateurs au cours d’une séance spéciale où
sont diffusés les deux premiers épisodes de sa mini-série Top of the Lake, co-produit avec Gerard Lee. Il
s’agit d’une série policière, dans laquelle Holly Hunter interprète une gourou.
En 2014, Jane Campion préside le jury du 67 ème Festival de Cannes, et attribue avec les autres membres la
Palme d’Or à Winter Sleep de Nuri Bilge Ceylan.
Filmographie
1989 - Sweetie
1990 - Un ange à ma table
1993 - La Leçon de piano
1996 - Portrait de femme
1999 - Holy Smoke
2003 - In the Cut
2009 - Bright Star
2013 - Top of the Lake (série TV)
Genevieve Lemon (Sweetie)
Genevieve Lemon est une actrice et chanteuse australienne. Elle commence sa carrière en 1982 avec une
apparition à la télévision dans The Young Doctors. Depuis, elle est apparue dans des programmes tels que
Rafferty’s Rules, The Flying Doctors, Neighbours, Always Greener, et plus récemment, Rake.
Elle fit partie des compagnies des Théâtres de Melbourne, Sydney et de Queensland. Ses apparitions sur les
planches comptent des pièces comme Seaming et The Madras House, mise en scène par Rodney Fisher, The
Venetian Twins, Brilliant Lies, Merrily We Roll Along, Piaf, Hanging Man, Priscilla Queen of the Desert - The
Musical, Fat Swan, The Pirates of Penzance, The Wharf Revue et The Mouse Trap.
Genevieve Lemon travailla à trois reprises avec Jane Campion : Elle interprète le personnage qui donna le
titre du film, Sweetie en 1989, qui lui permit d’atteindre une reconnaissance internationale ; et est au
casting de La Leçon de Piano (1993) ainsi qu'Holy Smoke (1999). Plus récemment, Genevieve Lemon
illumine par son interprétation de Bunny dans la série télévisée de Jane Campion, Top of the Lake (2013).
En 1990, elle reçut le Prix de la Meilleure Actrice à l’Australian Film Critics Awards pour son interprétation
dans Sweetie.
Parallèlement, sa carrière s’étend à la musique. Genevieve Lemon illumine par ses performances dans des
cabarets : avec le rôle de la professeure de danse Mrs Wilkinson dans Billy Elliot - The Musical pour lequel
elle reçoit en 2008 le Green Room Award et le prix Helpmann Award de la Meilleure artiste en premier rôle.
Elle est nominée pour le prix du Meilleur Second Rôle Féminin en 2006 à l’Australian Film Institute Awards
pour son interprétation dans Suburban Mayhem.
Elle est aussi chanteuse au-delà des planches de théâtre. Son premier album de musique country avec son
groupe, Angels in the City, sort dans les bacs en 2006 (un live au Bennelong Point).
Filmographie
Sweetie de Jane Campion - 1989
La Leçon de Piano de Jane Campion - 1993
Billy’s Holiday de Richard Wherrett - 1995
The Well de Samantha Lang - 1997
Holy Smoke de Jane Campion - 1999
Soft Fruit de Christina Andreef - 1999
Le Feu sous la Peau de Paul Goldman - 2006
Chacun son cinéma - 2007
court métrage The Lady Bug de Jane Campion
8 - 2008
court métrage The Water Diary de Jane Campion
The Dressmaker de Jocelyn Moorhouse - 2014
Dans la presse
New York Times - Vincent Canby (06.10.1989)
Après avoir réalisé uniquement quatre courts métrages, Jane Campion, une réalisatrice néo-zélandaise de
34 ans, fait un premier pas spectaculaire vers le long-métrage avec Sweetie, un film assez différent de que
vous êtes susceptibles de voir, jusqu’à ce que le prochain film de Campion arrive. Entre autres choses, c’est
une histoire d’amour (et de haine) entre deux sœurs qui, rassemblées, pourraient faire une personnalité
présentable.
Sweetie semble être un petit film, et il l’est en beaucoup de points, mais il possède une remarquable force
et ténacité. C’est drôle, même si l’on ne rigole pas beaucoup, et triste, sans pourtant jamais provoquer les
larmes. Au lieu de cela, le film exige d’être pris selon ses propres modestes conditions, sans considération
pour les conventions sentimentales présentes dans les autres films. En ses meilleurs aspects, ce film est
audacieusement déraisonnable.
Dans un sens, le film Sweetie est très semblable au personnage inhibée de Kay (Karen Colston), le
personnage central qui retrace l’histoire occasionnellement en voix-off - parfois, contre son gré, semble-t-il.
Kay serait une jeune femme séduisante (elle a un beau visage) si elle n’avait pas cette expression
rébarbative. Son esprit est aussi pincé que ses lèvres.
Kay apparaît toujours comme désapprouvant les autres, allant dans des étendues infinies pour repousser
des calamités peu vraisemblables et, dans les moments de repos, contrôlant les signaux radios venant de
Mars. Kay est la saine d’esprit.
Le drame de l’existence de Kay est sa joyeuse sœur simple d’esprit, Dawn (Genevieve Lemon), surnommée
Sweetie, une jolie jeune femme avec un visage d’ange et le corps de quelqu’un qui force trop sur la junk
food à chaque opportunité. Sweetie a un sérieux problème de poids. Elle ment aussi, triche, ramasse les
hommes au hasard et, généralement, a tout de l’humour libre que Kay refoule de son côté. Depuis qu’elles
sont enfants, Sweetie a toujours été la favorite de la famille. Maintenant qu’elles sont toutes les deux
adultes, leurs parents continuent d’être gâteux devant Sweetie. Le père, en particulier, encourage la fiction
qu’a besoin Sweetie pour devenir une star du show-business.
« Les arbres m’effraient », dit Kay au début du film. « Ils ont des pouvoirs humains ». Elle fait cette
déclaration avec une telle finalité que ça ne permet pas de discussion. Kay est à la fois pragmatique et
effrayamment mystique. Quand une voyante qui lit les feuilles de thé lui dit qu’elle se mariera avec un
homme portant un point d’interrogation sur son front, Kay fait tout pour que cette prophétie devienne
réalité.
A une fête de bureau célébrant les fiançailles d’une collègue, Kay remarque que le futur marié a une mèche
de cheveux bouclée qui ressemble à un semblant de point d’interrogation. Elle poursuit le jeune homme,
Lou (Tom Lycos), jusqu’au parking du sous-sol où, 55 minutes après l’annonce de ses fiançailles, elle lui fait
l’amour sous une voiture.
Lou et Kay semblent heureux au début. Comme dit Kay en voix-off, « Lou a fait en sorte qu’il y ait sept plans
spirituels, et que l’amour que nous avions se trouve quelque part près du sommet ». Kay n’est pas facile à
vivre pourtant. Elle est furieuse quand il plante un jeune arbre dans le jardin. Quand Lou refuse d’entendre
ses remontrances, elle sort au milieu de la nuit pour le déterrer.
Puis Sweetie débarque, accompagnée d’un pitoyable Bob lubrique, son « producteur ». Leurs incessantes
bruyantes cavalcades sexuelles rendent furieuse Kay et intriguent Lou. Pendant une sortie à la plage sans
Kay, Sweetie tente de séduire Lou en léchant ses jambes. La nuit suivante, Lou tente de faire fondre une
Kay de plus en plus refroidie en léchant sa jambe. Kay lance « j’ai cru qu’un gros escargot était en train de
ramper jusqu’à ma chemise de nuit ».
La relation entre Kay et Lou se détériore jusqu’à ce que, à la fin, Kay et Sweetie redeviennent à peu près ce
qu’elles étaient avant de quitter leurs parents.
Le style de Mlle Campion a été comparé - sans trop de crédit, à mon avis - à celui de Jim Jarmusch (Stranger
than Paradise, Down by Law, Mystery Train). Les deux partagent une affection à l’euphémisme et à l’ellipse,
mais ils sont sinon complètement différents. La méthode impassible des films de Jarmusch est drôle, la
comédie est limpide.
Le travail de Mlle Campion, même s’il est souvent drôle, est beaucoup plus sombre. Les gens sont
physiquement blessés dans Sweetie. Mlle Campion est plus près de David Lynch, réalisateur de Blue Velvet.
Elle et M. Lynch partagent ce qui équivaut à une obsession concernant les terreurs de la nature,
notamment la vie grouillante qui existe juste en dessous de la surface des choses, que la surface soit le
front d’un visage ou une pelouse.
Les films de M. Lynch, quoi qu’il en soit, sont très rococo. Sweetie est aussi fin qu’un dessin animé. Son style
visuel détient une luminosité terne, et une efficacité narrative semblable à celle des dessins animés. Les
événements se passent et l’histoire suit son cours. Aucune explication psychologique n’est donnée. Les
spectateurs doivent digérer eux-mêmes l’information comme ils l’entendent.
M. Lynch fait des mélodrames. Sweetie est une mélo-comédie. En plus de Mlle Colston, Mlle Lemon et M.
Lycos, l’excellente distribution inclut Jon Darling et Dorothy Barry, les parents très singuliers de Kay, et
Michael Lake, le producteur de Sweetie. Gerard Lee collabora avec Mlle Campion pour le scénario, et Sally
Bongers fut la directrice de la photographie. Bravo à tous.
Sweetie est un original.
24 Images - Philippe Elhem (n°44-45, 1989)
Femmes, Famille, Folie
Révélée à Cannes en 1986, via une poignée de courts métrages mémorables (Passionless Moments, A girl’s
Own Stoy, Peel qui reçut la Palme d’Or) et un très curieux téléfilm (Two Friends), Jane Campion est venue
avec Sweetie, son premier long métrage, amplement confirmer tous les espoirs que l’on avait pu mettre en
elle. L’accueil réservé au film, très divisé (il a fait l’objet de spectaculaires rejets), est à bien des égards
révélateur : du court au long métrage, il existe une solution de continuité si évidente dans l’œuvre de Jane
Campion qu’il ne fait aucun doute que c’est à l’avènement de ce qu’il faut bien appeler un auteur […], que
nous venons d’être conviés.
Pour autant Sweetie reste une curieuse entité, à la fois ancrée dans un naturalisme farouche et pourtant
comme décalée par le regard particulier que porte la réalisatrice néo-zélandaise sur ses personnages et leur
environnement. Rarement, il est vrai, on aura eu le sentiment d’une osmose aussi parfaite entre le regard
d’un cinéaste et les cadrages de son film. […] Il n’empêche que, comme le cinéaste de Blonde Vénus, Jane
Campion conçoit chaque plan comme une découpe et non comme un moment dynamique. Le film renvoie
d’ailleurs à un univers esthétique d’ordre essentiellement plastique, où peinture et photographie se
répondent également au sein d’une œuvre qui, si elle frôle constamment et de manière parfois un peu
crispante le maniérisme, refuse d’y céder pour autant.
Car loin de se résumer à n’être qu’un pur jeu formel, Sweetie est aussi sujet, histoire, personnages. Il y a
chez Jane Campion un goût (et un don) évident pour la narration comme pour la direction d’acteurs. Ceuxci, contrairement à ce que l’on pourrait croire, sont loin d’être laissés-pour-compte de la mise en scène. Au
contraire. Si le dispositif d’énonciation est fortement marqué et, en apparence, contraignant, il n’a, en
dernier lieu, pas d’autre justification, d’autre finalité, que celle de se mettre au service des personnages.
Et des personnages, il n’y a justement que ça dans Sweetie : mari, parents, voisins, sœur qui gravitent
autour de Kay, jeune femme de plus en plus enfermée dans sa névrose. Hypothèse : et si Sweetie, nouveau
conte de la folie ordinaire, fidèle en cela à sa morale cinématographique, était double, nous livrant tout à la
fois l’histoire de cette névrose et le récit symbolique de son analyse ? Comme Chabrol et Rohmer parlant
d’Hitchcock, on est tenté de dire de Jane Campion qu’elle a su formidablement « manier les vertus, en
apparence contraires, de la forme allégorique et du document. La réalité concrète "fournissant" au conte la
chair sans laquelle il n’est qu’un pur jeu de l’esprit ». Ainsi Sweetie, sœur aînée de Kay, à la fois son absolu
contraire mais aussi son double monstrueux, au-delà de l’approche naturaliste mais nourrie par elle, ne
serait rien d’autre que l’expression matérialisée de son inconscient. […]
L’on ne saurait ramener Sweetie aux seuls paramètres de ses interprétations possibles. Tel est en fait la
paradoxale richesse du film (par ailleurs drôle et inquiétant) de Jane Campion : c’est l’hétérogénéité de ses
éléments mêmes qui, sollicitant l’imaginaire du spectateur, en fait une pure affirmation du cinéma.
Informations sur le film
LISTE TECHNIQUE
Réalisatrice : Jane Campion
Producteur : John Maynard
Scénario : Jane Campion, Gerard Lee
Montage : Veronika Haussler
Musique : Martin Armiger
Directeur de la photographie : Sally Bongers
Décors : Peter Harris
Costumes : Amanda Lovejoy
Format image : 1:85 - couleurs
Format son : Dolby
Année : 1989
Nationalité : Australie
Langue originale : Anglais
Durée : 105 min
Visa d'exploitation : 72290
Genre : Drame
LISTE ARTISTIQUE
Sweetie
Kay
Louis
Gordon
Flo
Bob
Clayton
Genevieve Lemon
Karen Colston
Tom Lycos
Jon Darling
Dorothy Barry
Michael Lake
Andre Pataczek
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