L`élection départementale de 2015 dans le canton de Menton

Transcription

L`élection départementale de 2015 dans le canton de Menton
L'ELECTION
DE 2015
2015 DANS
DANS LE
LE CANTON
CANTON DE
DE MENTON
MENTON
L’ELECTIONDEPARTEMENATALE
DEPARTEMENTALE DE
Sous la direction de Pascal PERRINEAU et Anne MUXEL
Mémoire réalisé dans le cadre du cours « Les formes de la participation politique en Europe » par
Florent CHAMPION et Dylan BABAÏ
Menton, le 14 mai 2015
1
SOMMAIRE
Avant propos………………………………………………………………………………………….………………………………………p. 3
I. Présentation du territoire…………………………………………………………………….………………………………………p. 6
II. Présentation des candidats………………………………………………………………………………………………..……..p. 13
III. La campagne électorale : enjeux et stratégies….…………………………………………………………..………….p. 16
IV. Résultats et analyses……………………………………………………………………………………………………………….p. 21
Perspectives………………………………………………………………………………………………………………………………….p. 26
Sources…………………………………………………………………………………………………………………………………………p. 27
Remerciements…………………………………………………………………………………………………………………………….p. 28
Annexes…………………………………………………………………………………………………………………….………………….p. 29
2
AVANT-PROPOS
Le 22 et le 29 mars dernier, les Français étaient conviés aux urnes afin de renouveler les
conseils départementaux (anciennement appelés conseils généraux).
Le travail de recherche qui suit s'intéresse à l'élection départementale qui a eu lieu à cette
occasion dans le canton de Menton. Il vise à analyser la campagne électorale, dresser les principaux
enjeux du scrutin et à en présenter les résultats en proposant quelques clés de compréhension.
L'élection de mars dernier est le dix-huitième scrutin de ce type sous la Vème République.
Des innovations notables ont été introduites à l'occasion de cette élection par la loi de 17 mai 2013 :
c'est ainsi la première fois que les Français se sont rendus simultanément aux urnes sur tout le
territoire pour renouveler leurs conseillers départementaux. C'est aussi la première fois que les
conseils départementaux sont entièrement mixtes. Nous y reviendrons.
Cette réforme n'est cependant pas la première dont font l'objet les conseils départementaux.
L'histoire des départements est ancienne, remontant à la Révolution française. Nous nous proposons
dans les lignes suivantes de revenir sur les évolutions successives qu'a connu cet échelon central
dans l'organisation administrative du territoire.
Les départements sont créés en 1790 à la Révolution lorsqu’est repensée la géographie
administrative du pays. Sous la royauté, l'organisation administrative du territoire se caractérisait par
une pluralité des circonscriptions de tailles et de fonctions variables, qui ne se recoupaient que
rarement. La volonté de remédier à l’enchevêtrement des échelons existe alors de longue date ; elle
ne se concrétise toutefois qu’avec la chute de l’Ancien Régime. Dans les semaines qui suivent les
débuts des travaux de la Constituante, plusieurs projets de redécoupage sont esquissés et soumis au
débat. Peu à peu, se dessinent les contours de la nouvelle carte administrative de la France.
Pour les révolutionnaires, la préoccupation est alors double : il s’agit à la fois d’améliorer en
la rationalisant l’organisation administrative du pays, de supprimer les circonscriptions inutiles, mais
aussi d’unifier la nation. Les anciennes provinces de France, issues des contingences de l’histoire
féodale de la France, porteuses d’identités locales très fortes, apparaissent rapidement aux yeux des
révolutionnaires comme un obstacle à l'unification du territoire et la décision est prise de
les subdiviser. L’Alsace est scindée en deux. L'ancienne province occitane de Guyenne est remplacée
quatre départements. Sur la carte, les anciens « pays » disparaissent pour faire place aux
nouvelles circonscriptions, fruits du jacobinisme révolutionnaire.
Dès leur création, les départements sont dotés d’une assemblée composée de trente-six
membres élus au suffrage censitaire, le conseil de département. Supprimé par la loi du 14 frimaire an
II (4 décembre 1793), il est rétabli sous le nom de conseil général de département par la loi du 28
pluviôse an VIII (17 février 1800). Les membres du conseil général ne sont plus élus, mais nommés
par le gouvernement. Dans le même temps sont créées les préfectures et les sous-préfectures,
auxquelles Napoléon confie l’exécutif local. L'élection des conseillers généraux au suffrage censitaire
n'est rétablie qu'en 1833 par la Monarchie de Juillet. Le suffrage universel masculin, d’abord institué
en 1848, sera définitivement adopté à la création de la IIIème République en 1871.
Cependant, le Conseil général tel que nous le connaissons aujourd’hui n'apparaît vraiment
qu'avec la loi de décentralisation de 1982 que fait adopter le ministre de l'Intérieur de l'époque
Gaston Defferre. La loi Defferre, qui inaugure la décentralisation, étend les compétences des conseils
généraux, leur transfère l’exercice de l’exécutif, lequel était jusqu’ici détenu par le préfet de
département, et donne aux départements plus de poids dans la vie économique nationale. Des
réformes successives étendront les prérogatives du Département.
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Les compétences du Département se répartissent autour de quatre grands axes :
- L'action sociale, à destination de la petite enfance, des personnes âgées, des personnes en situation
de handicap et des bénéficiaires du RSA. Le Département a notamment la charge de la protection
maternelle et infantile, de l’adoption, du soutien aux familles en difficulté financière. Il met en œuvre
les politiques d'insertion sociale pour les personnes handicapées et pourvoit aux prestations de
compensation du handicap. Il crée et administre les maisons de retraite et les politiques de maintien
des personnes âgées à domicile. Enfin il gère le revenu de solidarité active et la contribution à la
résorption de la précarité.
- L'éducation. Le Département construit, entretient et équipe les collèges
- L'aménagement. Notamment : l’équipement rural, le remembrement, l’aménagement foncier, la
gestion de l'eau et de la voirie rurale. Il gère les ports maritimes, de pêche et des transports routiers
non urbains
- La culture. Par la création et la gestion de bibliothèques, de services d'archives et de musées.
Plusieurs nouveautés ont été introduites à ce scrutin par la loi du 17 mai 2013. Un
redécoupage a été en outre effectué de manière à ce que les cantons aient approximativement la
même population.
Dans le département des Alpes-Maritimes, tous les cantons ont été redimensionnés. Le
département compte ainsi vingt-sept cantons aujourd'hui au lieu de cinquante-deux auparavant.
Il y a certes moins de cantons, mais il y a plus d'élus. De cinquante-deux conseillers départementaux
avant la réforme, le nombre de conseillers départementaux est passé à cinquante-quatre en 2015.
Désormais tous les conseillers départementaux sont élus en même temps tous les six ans et non plus
renouvelés par moitié tous les trois ans comme c'était le cas avant la réforme.
Le scrutin enfin devient binominal mixte majoritaire à deux tours et la parité totale est
introduite dans les départements. Les candidats se présentant doivent concourir en binôme avec une
personne du sexe opposé.
Cette élection est la première depuis la réforme. Elle se tient dans un contexte
d’impopularité persistante du couple exécutif et de montée du Front national qui enregistre des
succès électoraux à chaque élection.
Afin d'enrayer la montée de l'extrême droite, Manuel Valls a décidé une stratégie de
confrontation avec le Front national en le désignant au cours de la campagne comme son principal
adversaire.
A l'approche de l'échéance électorale, chaque parti a donc des objectifs différents qui
détermineront la stratégie employée au cours de la campagne, que l'on peut résumer comme suit :
Pour le Parti socialiste, il s’agit avant tout de limiter l'ampleur de la défaite annoncée. Le Parti
socialiste est en effet particulièrement exposé. Les élections cantonales sont une élection
intermédiaire généralement défavorable à l'équipe au pouvoir. Elles se caractérisent
traditionnellement par le poids important des enjeux nationaux sur le résultat du scrutin et une
moindre mobilisation de l'électorat de la majorité. Aux dernières élections cantonales, le Parti
socialiste avait remporté plusieurs départements in extremis. Les sondages réalisés avant le scrutin
lui prédisent la perte de 20 à 40 présidences de conseils généraux.
Le Front national, arrivé en tête aux élections européennes de 2014, souhaite quant à lui
réitérer la percée aux départementales et s'enraciner dans le paysage électoral, et peut-être
conquérir des départements.
L’UMP cherche à disputer au Front national sa place de premier parti de France et se
positionner pour la présidentielle de 2017. Le président de l’UMP Nicolas Sarkozy et les caciques du
parti sont particulièrement conscients que les résultats de l'élection et notamment le parti arrivé en
tête à la sortie des urnes seront regardés avec attention par les médias dans la perspective de la
présidentielle de 2017. C'est ce qui a motivé l'UMP à conclure une alliance avec l'UDI là où aux
européennes la formation de centre-droit avait opté pour une alliance avec le Modem.
4
Le Front de gauche, enfin tente d'exister à la gauche du Parti socialiste et d'incarner une
alternative à la politique menée par le gouvernement, au mot d'ordre de la lutte contre l'austérité. A
Menton, c'est la stratégie de la confrontation qui a été décidée. Malgré les faibles chances de succès
la gauche à Menton, le Front de gauche a décidé de présenter des candidats dans le canton, ce qui a
suscité des interrogations jusqu'au sein même de son camp.
A priori, il n’y a pas de risque d'élection du Front national dans le canton même si celui-ci se
tient en embuscade. En dépit de la forte poussée de l’extrême droite dans le pays et particulièrement
dans la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, la droite classique résiste mieux dans les Alpes-Maritimes
que dans les départements voisins comme le Var, et les Alpes-Maritimes ne sont pas annoncés
comme un département pouvant basculer dans l'escarcelle du Front national.
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I. PRESENTATION DU TERRITOIRE
Tout d’abord, il est indispensable de contextualiser ces élections dans leur environnement
local, au sein du territoire cantonal. En effet, les attributs et dynamiques propres au canton revêtent
une influence toute particulière dans le scrutin et expliquent en partie les enjeux et le vote des
électeurs.
1. Géographie et démographie
Des nouveaux cantons ont été dessinés, redécoupés pour cette première élection
départementale.
a) Géographie
Le nouveau canton de Menton, canton n°14 des Alpes-Maritimes, compte 45533 habitants
(selon le dernier recensement de 2012) répartis sur six communes (Castellar, Castillon, Gorbio,
Menton, Roquebrune-Cap-Martin et Sainte-Agnès) et s’étend sur 59,52 km². Le nouveau canton de
Menton regroupe les anciens cantons de Menton-Est qui englobait Castellar et la très grande
majorité de Menton (24930 habitants sur les 29073 au total) et de Menton-Ouest qui englobait
Gorbio, Roquebrune-Cap-Martin, Sainte-Agnès et une petite partie ouest de la ville de Menton.
Castillon, auparavant dans le canton de Sospel, a ainsi été rattachée au canton mentonnais.
Carte du canton de Menton, n°14 des Alpes-Maritimes
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b) Démographie
Dès qu’on se penche sur la démographie de ce canton n°14 des Alpes-Maritimes, le poids
démographique des villes du littoral (Menton principalement et Roquebrune-Cap-Martin) est
flagrant. En effet, ces deux villes concentrent, à elles-seules, 92% du nombre d’habitants total sur le
canton (64% de mentonnais et 28% de roquebrunois).
30000
25000
Nombre d'habitants
(2012)
20000
Nombre d'inscrits
(01/01/2015)
15000
10000
5000
0
Nombre d'habitants (2012)
Castellar
Castillon
Gorbio
Nombre d'inscrits (01/01/2015)
Castellar
Castillon
Gorbio
Menton
Roquebrune-CapMartin
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- Croissance démographique dans le canton :
Cependant, si on s’attarde sur la croissance démographique au sein du canton entre 2007 et
2012, on s’aperçoit que la partie ouest est moins attractive que la partie est. En effet, Gorbio et
Sainte-Agnès ont vu leur population stagner (respectivement moins un habitant et moins huit
habitants) alors que Roquebrune-Cap-Martin, touchée plus durement, a perdu cinq-cent-sept
habitants. A l’est du canton, c’est la dynamique opposée : Castillon, Castellar et Menton ont vu leur
population augmenter sur la même période. Ainsi, Castillon a gagné cinquante-et-une âmes, Castellar
vingt-cinq et Menton cinq-cent-quarante-et-une. Au total, entre 2007 et 2012 le gain démographique
du canton est de cent-une personnes.
2. Sociologie
a) Valeurs
Les Alpes-Maritimes et notamment le territoire mentonnais partagent une histoire singulière.
En effet, le bassin mentonnais est français depuis un peu plus de cent-cinquante ans seulement.
Auparavant, il a été sous suzeraineté de la principauté de Monaco pendant plus de cinq siècles (de
1346 à 1848) avant de se mettre sous la protection de la maison Savoie du royaume de PiémontSardaigne. Il faudra attendre le règne de Napoléon III pour que les habitants de Menton jusqu’à Nice
décident par plébiscite de devenir français en 1861.
- Forte tradition catholique.
Le bassin mentonnais a conservé une forte tradition catholique héritée de l’influence
monégasque et italienne (où le catholicisme a une place très importante). Cette tradition se perçoit à
travers les fêtes et processions importantes qui célèbrent les saints-patrons des communes ou les
temps forts de la liturgie catholique : la Saint-Sébastien à Castellar, procession de la Fête-Dieu à
Gorbio, la Sainte-Agnès à Sainte-Agnès, la procession votive à Roquebrune-Cap-Martin, la procession
du Vendredi Saint, de la Saint-Pierre et de la Saint-Michel à Menton.
- Attachement viscéral au territoire.
Dans les mentalités des habitants du mentonnais, ce territoire est considéré comme un
splendide écrin entre mer et montagne, un pays béni. Par le passé, on naissait, on vivait et on
mourrait ici. Malgré l’évolution des mœurs, on constate toujours aujourd’hui une très faible mobilité
de la population du bassin mentonnais. Même si certaines personnes naissent puis partent, ailleurs
en France ou à l’étranger pour des raisons professionnelles, beaucoup d’entre-elles reviennent par la
suite. Quand on leur demande pourquoi elles sont rentrées, ces personnes, avant de vous évoquer la
présence de la famille, confient que le Campanin (le clocher de la Basilique Saint-Michel, symbole de
ce territoire), leur Campanin, leur manquait.
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Comme un cordon ombilical qu’on ne pourrait jamais vraiment couper, les mentonnais
manifestent également leur attachement au territoire à travers leur langue. Le « mentounasc » parlé
encore abondamment jusque dans les années 1940 (les professeurs de français durent interdire aux
petits mentonnais de le parler à l’école) est présent sur l’inscription des rues et de nombreuses
chansons en « mentounasc » louent les merveilles de ce territoire (cf. ci-après). Cependant, avec le
renouvellement générationnel la langue mentonnaise a du mal à perdurer.
Mentan, ô men belou Mentan
Acouardou ma quiterra
Per pourè te cantà
Una cansan d’amoù !
Mentan, ô men belou Mentan
N’y ese lueg s’a terra
Qu’aigu’un chelou pu blu
E de pu bele fioù.
Menton, ô mon joli Menton
J’accorde ma guitare
Pour pouvoir te chanter
Une chanson d’amour !
Menton, ô mon joli Menton
Aucun lieu sur la terre
N’a un ciel plus bleu
Et d’aussi belles fleurs.
A pu bella de tout’è vallade
Es ou nouaish Ver de Mentan,
Pien de fioù, de belle proumenade,
Parfumàia a r’audoù citran.
Dapertout’y è de serenade
Cada topia ha sa cansan.
A pu bella de tout’è valade
Es ou nouaish Ver de Mentan.
La plus belle de toutes les vallées
C’est notre Val de Menton
Plein de fleurs, de belles promenades,
Parfumé à l’odeur du citron.
Partout il y a des sérénades
Chaque tonnelle a sa chanson
La plus belle de toutes les vallées
C’est notre Val de Menton.
Refrain de Mentan, ô belou Mentan, François Borfiga
Refrain de Ou Ver de Mentan (dit aussi : « La Mentonnaise »),
François Borfiga
- Rapport particulier à « l’autre ».
Cet attachement viscéral au territoire induit un rapport particulier à « l’autre ». L’accueil et
l’intégration d’un « autre » est particulier. Dans un premier temps, « l’autre » va être perçu comme
un élément exogène qui pourrait perturber l’équilibre local. Quand nous parlons de « l’autre » nous
faisons référence à toute personne qui ne serait pas du bassin mentonnais. Ainsi, même un niçois ne
serait pas spécialement le bienvenu. Passé ce temps de méfiance, et le besoin de côtoyer,
d’appréhender « l’autre » celui-ci est alors intégré. Comme aime le souligner le Député-maire de
Menton, Jean-Claude GUIBAL, « ici les gens ne sont pas indifférents, il y a un besoin de se confronter
à l’autre pour l’accepter […] il faut casser l’écorce pour arriver à l’amande » (Discours de bienvenue
aux étudiants de Sciences Po, lundi 25 août 2014).
b) Répartition selon les âges
Par rapport à la répartition de la population selon les âges, le canton mentonnais devrait être
représenté par une personne quadragénaire. Comme sur l’immense majorité de la Côté d’Azur, la
proportion des plus de soixante ans y est forte (25,63% de la population totale du canton). Les villes
les plus âgées du canton sont les deux villes du littoral (Menton et Roquebrune-Cap-Martin) où les
personnes âgées bénéficient de toutes les structures urbaines, ainsi que Gorbio, village où le
renouvellement générationnel a du mal à s’opérer.
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c) Mouvements de la population
- Villages « dortoirs »
Si les villages de la couronne mentonnaise sont plus jeunes c’est parce qu’ils ont une fonction
de « dortoirs ». Le prix de l’immobilier étant très élevé sur les villes du littoral, les familles modestes
qui n’ont pas les moyens d’y vivre ou qui souhaitent une plus grande surface préfèrent s’installer
dans les villages et afin d’être locataire ou propriétaire d’un logement plus confortable par rapport à
ce qu’elles auraient pu prétendre sur Menton ou Roquebrune-Cap-Martin. Dans la journée, ces
familles rejoignent bien souvent les principaux bassins d’emplois : Menton, Monaco et Nice dans une
moindre mesure.
- Menton, lieu de socialisation.
Menton est le lieu de socialisation principal du canton. Menton est la ville la plus importante
qui recouvre toutes les fonctions et infrastructures urbaines. La zone piétonne, le cinéma ou les
plages sont les lieux où se retrouvent les jeunes et les moins jeunes du canton.
d) Chômage
On constate que le chômage est inférieur ou égal à la moyenne nationale dans toutes les
communes du canton à l’exception de Menton où le chômage atteignait 12,1% au dernier trimestre
2011 et où le chômage des jeunes y est important (plus de 25%).
Moyenne nationale : 9,4
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3. Politique
a) Elus locaux
Les élus locaux sont ancrés depuis des années, surtout sur les villes du littoral. Les villages ont
connu un renouvellement au cours des années 2000 et en particulier en 2008. Ainsi Michel ISNARD
est élu maire (DVG) de Gorbio depuis 2001, Huguette LAYET est maire (DVD) de Castellar depuis
2004, Philippe RION est élu maire (SE) de Castillon en 2008 comme Albert FILIPPI maire (UMP) de
Sainte-Agnès. Les élus locaux de Menton et de Roquebrune-Cap-Martin contrôlent tous les mandats
locaux importants depuis les années 1990. En effet, Patrick CESARI est élu au Conseil Général en
1994 (vice-président depuis 2008), puis maire de Roquebrune-Cap-Martin depuis 1995, il est
également président de la Communauté d’Agglomération de la Riviera Française (CARF) depuis 2008.
De même, à Menton, Jean-Claude GUIBAL est élu maire de Menton depuis 1989, puis député à partir
de 1997 et fut président de la CARF entre 2003 et 2008 ; son épouse Colette GIUDICELLI est premier
adjoint à la ville de Menton de 1989 à 2009, conseiller général depuis 1994 (vice-présidente depuis
2004), premier vice-président de la CARF entre 2003 et 2009 et sénatrice depuis 2008.
Dans le canton de Menton et notamment dans les deux principales villes, il ya une véritable
incarnation, personnalisation de la politique (cela est aussi vrai pour certaines figures de l’opposition
comme Jean-Michel CUCINELLI pour le PCF-Front de Gauche ou Pascale GERARD pour le PS
mentonnais).
b) Ancrage politique
Quand on regarde l’étiquette politique des élus locaux du canton, on se rend compte de
l’ancrage politique à droite, que la présence d’un élu DVG, Michel ISNARD (qui s’explique de part la
personnalité de la personne dans un contexte villageois) ne remet pas en question.
- Vote UMP
Au vu des résultats au cours des scrutins nationaux, le bloc de droite arrive largement en
tête. En effet, sur l’ensemble des résultats, au premier tour, des différentes élections nationales
entre 2007 et 2014, l’UMP affiche des scores supérieurs (et même jusqu’à près de quinze points
supérieurs à Roquebrune-Cap-Martin) à sa moyenne nationale dans toutes les communes (à
l’exception de Castillon où le score est tout de même très proche de la moyenne nationale).
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- Vote FN
Malgré le fait que le canton soit un bastion de l’UMP, il n’en est pas moins une terre à succès
pour le Front National. En effet, sur l’ensemble des résultats, au premier tour, des différentes
élections nationales entre 2007 et 2014, le FN affiche des scores supérieurs entre cinq à dix points à
sa moyenne nationale dans toutes les communes sans exception (mention particulière à Castillon où
le score du FN est supérieur d’environ douze points par rapport à la moyenne nationale).
- Abstention
Quand on applique encore la même grille d’analyse (résultats du premier tour des élections
nationales entre 2007 et 2014), on constate que l’abstention suit plus ou moins la courbe nationale.
On note que les villages participent plus que les villes du littoral où l’abstention y est plus forte qu’au
niveau national (d’un point à Menton et de trois points à Roquebrune-Cap-Martin).
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II. PRESENTATION DES BINÔMES CANDIDATS
Quatre binômes entièrement mixtes se présentent en 2015 à l'élection départementale dans
le canton de Menton : huit candidats et leurs « remplaçants », selon la nouvelle terminologie.
Procédons à un rapide tour d'horizon des binômes en présence.
1. Binôme UMP
Le binôme UMP est formé des deux
conseillers généraux sortants, Colette GIUDICELLI
et Patrick CESARI.
Patrick CESARI est maire de RoquebruneCap-Martin et conseiller général sortant de
Menton Ouest, élu depuis 1994 sous l'étiquette du
RPR puis de l'UMP
Colette GIUDICELLI est conseillère générale
du canton de Menton-Est depuis 1994, réélue depuis, d'abord sous l'étiquette de l'UDF, puis à partir
de 2001 sous celle de l'UMP. Elle est depuis 2004 vice-présidente du conseil général des AlpesMaritimes en charge des Finances et de l'Administration générale. En plus de ses fonctions au Conseil
général, elle siège au Palais du Luxembourg au titre de sénatrice des Alpes Maritimes, où elle est
membre de la Commission des Affaires sociales.
Notons qu’il s’agit là d’une candidature d'union de la droite puisque la remplaçante de
Colette GIUDICELLI est la responsable de l'UDI à Menton, Martine CASERIO. L’UMP et l’UDI suivent en
cela la stratégie nationale d'union de la droite dès le premier tour.
2. Binôme FN
Le binôme Front national est composé en
premier lieu de Thiery GAZIELLO, le plus politisé
des deux candidats. C'est l'une des principales
figures du Front national à Menton, il figurait ainsi
en deuxième position sur la liste Front national
Rassemblement Bleu Marine à la dernière élection
municipale.
S'agissant de son binôme, on aurait pu
s'attendre à ce qu'il fasse équipe avec Lydia SCHENARDI, qui était tête de liste à Menton à la dernière
élection municipale, mais celle-ci a décidé de se présenter dans le canton de Contes où le FN estime
qu'il a une chance plus grande de victoire.
A la place de Lydia SCHENARDI, c'est Gaëlle GUCHER, jeune candidate Front national, qui a
été désignée pour représenter le Front national à Menton. Engagée au Front national seulement à la
dernière municipale lors de laquelle elle a occupé la onzième position sur la liste du Front national
Rassemblement bleu marine, elle a encore peu d'expérience politique. Bien qu'engagée récemment
au FN, elle affirme partager les idées du parti de longue date, avant l'arrivée de Marine Le Pen à la
direction du Front national. A la question de savoir si le parti de Jean Marie Le Pen a changé depuis
l'avènement de sa fille, elle juge qu'il n'a pas changé en termes de contenu, mais dans la manière
d'expliquer ses idées aux Français.
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3. Binôme PS-EELV-PRG
Le binôme du Parti socialiste est le binôme
avec le plus grand écart d’âge. Francis LEBORGNE,
70 ans est conseiller municipal de RoquebruneCap-Martin sous l’étiquette du PS depuis 2008.
Fanny VANDEN BOSSCHE étudiante de 22 ans est
la plus jeune des candidats titulaires. Elle est
militante au PS depuis ses 16 ans, pour qui c'est la
deuxième élection. Elle était en quinzième position
sur la liste de Pascale GERARD lors de la dernière élection municipale mentonnaise.
Malgré le soutien d’Europe Ecologie-Les Verts aucun candidat de ce ticket ne porte ses
couleurs. En revanche, Claude CALVIN en position de remplaçant, représente le Parti Radical de
Gauche local.
4. Binôme PCF-FdG
Le binôme Front de Gauche enfin est
représenté par Jean-Michel CUCINELLI et Annie
POLLERI.
Leader du Front de Gauche à Menton,
Jean-Michel CUCINELLI a conduit la liste Front de
Gauche à la précédente élection municipale.
Engagé depuis plusieurs années au Parti
communiste, c’est la grande figure de l’extrême
gauche à Menton.
Son binôme, Annie POLLERI est également membre du Parti communiste. Elle figurait en
deuxième position sur la liste Front de Gauche à la dernière municipale, et c’est la cinquième élection
à laquelle elle se présente.
5. Remarques
Il est dès à présent possible de formuler quelques remarques sur les candidats :
- On notera en premier lieu que les candidats sont tous originaires de Menton et de Roquebrune Cap
Martin, les deux principales communes du canton. Cette absence des villages tient probablement à la
faiblesse démographique de ces derniers au regard des deux villes : sur les 32 718 électeurs inscrits
dans le canton, les villages réunis en comptent seulement 2976 contre 20 507 inscrits pour Menton
et 9235 inscrits pour Roquebrune Cap Martin. S’il a un temps été question d’intégrer un remplaçant
issu des villages dans le ticket UMP, cette option a été écartée de manière à ne pas donner le
sentiment de favoriser un village au détriment des autres.
- Il est apparu au cours de l’entretien que les candidates féminines étaient globalement plus effacées
que leurs binômes masculins. Ainsi, sauf dans le cas de Mme Giudicelli que nous avons rencontrée en
l’absence de son binôme, le membre féminin du binôme prenait moins part à la discussion et restait
plus souvent en retrait.
- On constate en outre que le degré de professionnalisation politique a tendance à diminuer à
mesure que l’on va à l'extrémité de l'échiquier politique. Par professionnalisation, nous entendons ici
la « maîtrise d'un corpus de savoirs spécialisés et d'un langage et d'une rhétorique spécifique ; la
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compréhension pratique de la logique immanente du champ politique et l'adhésion au jeu
politique » 1.
- Ce constat est particulièrement clivant chez les femmes. Le moindre degré de professionnalisation
politique se traduit lors des entretiens par une plus faible implication dans l'échange, des réponses
stéréotypées, et l’incapacité de s'extraire de sa propre situation.
- Ce constat n'est toutefois pas systématique : ainsi il est évident que Mme Giudicelli, élue depuis
1989 au conseil municipal de Menton puis à partir de 1994 au conseil général, a une connaissance
très précise du fonctionnement du jeu politique et en maitrise parfaitement les discours et les codes.
De la même manière, nous avons pu apprécier la lucidité, la finesse et la pondération des analyses de
M. CUCINELLI au cours de l'entretien, notamment son analyse des ressorts du vote Front national qui
témoigne d'une véritable réflexion sur le sujet.
- On peut émettre l’hypothèse que c’est l’obligation pour chaque candidat de faire campagne avec
une personne du sexe opposé qui explique cette différence de professionnalisation politique entre
hommes et femmes. Dans une classe politique française encore très masculine, les écarts bien
connus de compétence politique entre hommes et femmes sont d'autant plus perceptibles que
l’élection est locale. On peut cependant penser que la féminisation de la vie politique française
imposée par l’introduction de la parité totale permettra progressivement de rééquilibrer la situation
en faveur des femmes, à mesure que se constitue une nouvelle génération d’élues et de femmes
politiques plus expérimentées, qui auront eu le temps de se familiariser avec le militantisme
politique.
1 Définition empruntée à Gérard MAUGER, « Sur la participation des classes populaires aux nouveaux
« jeux électoraux » » in Savoir/Agir, Editions du Croquant, 2007
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III. LA CAMPAGNE : ENJEUX ET STRATEGIES
1. Enjeux locaux et nationaux
Nous avons eu l'opportunité de nous entretenir avec chacun des candidats à l'élection
départementale dans la semaine qui a précédé le premier tour, à l'exception de M. CESARI. Ces
entretiens nous permettent d'esquisser les grands thèmes autour desquels s'est cristallisé le débat.
Nous nous sommes tout d'abord attachés à recueillir les impressions des candidats sur la
réforme du scrutin.
La première nouveauté de ce scrutin, s'agissant du canton de Menton, est la fusion des
cantons de Menton-Est et de Menton-Ouest, reformant l'ancien canton telle qu'il existait avant le
tracé de 1994 et y ajoutant Castillon.
S’ils saluent unanimement la réunification du canton de Menton, les candidats ont une
perception globalement négative du redécoupage. Les principaux reproches adressés au
redécoupage sont de ne pas tenir compte des réalités locales et de faire perdre en proximité avec les
administrés en confiant des circonscriptions deux fois plus grandes aux élus.
M. CUCINELLI note ainsi que, comme à chaque redécoupage, ce dernier a été réalisé de manière à
favoriser le parti au pouvoir. M. GAZIELLO accuse le gouvernement d'avoir cherché en redéfinissant
les limites des cantons à faire obstacle à la progression du Front national. Mme GIUDICELLI dénonce
le manque de cohérence de certains découpages, à l'image de celui de Contes-L'Escarène.
En ce qui concerne l’obligation de parité dans les binômes, l'impression est en revanche
positive. Tous les candidats interrogés considèrent qu'il s'agit d'un progrès, à l’exception notable de
Mme GIUDICELLI, laquelle estime que les femmes n'ont pas besoin de lois pour accéder aux fonctions
électives.
Il est frappant de constater que sur ce sujet les candidats FN rejoignent les candidats de
gauche, jugeant l'introduction de la parité dans le scrutin très positive, là où au contraire Mme
Giudicelli se prévaut d'une position plus « idéologique » (précisons que nous n'accordons ici ni
connotation à ce terme ni ne portons de jugement de valeur) fondée sur une certaine conception de
la politique et du traitement des inégalités : la loi n'a pas à discriminer les candidats en fonction de
leur sexe pour favoriser l'élection de femmes. Ce n'est pas à l'Etat d'imposer « par le haut » l'égalité
des sexes mais aux femmes de mobiliser leurs ressources propres pour la conquérir.
La position, en apparence surprenante du binôme Front national, s'interprète de plusieurs
manières. Elle témoigne en premier lieu du rajeunissement et de la féminisation du parti qui s'ouvre
à de nouvelles catégories de la population, plus jeunes, moins conservatrices, ce qui le pousse à
adapter ses positions. Elle est en outre l'illustration que la formation d'extrême droite, à la faveur du
renouvellement générationnel qui s'opère, est capable de faire preuve d'un certain libéralisme
culturel sur les questions ayant trait à la famille, aux relations entre les hommes et les femmes et à
l'homosexualité, en se ralliant ici au mouvement législatif amorcé à la fin des années 1990 en faveur
de l'égalité des sexes et de la parité hommes-femmes, dès lors que celui-ci ne remet pas en cause les
fondamentaux du parti que sont le souverainisme, l'autorité, la critique de l'immigration et de
l'Europe.
L'un des autres thèmes qui a animé la campagne était l'incertitude pesant sur l'avenir du
Département.
En effet, tandis que la campagne suit son cours, un projet de loi portant nouvelle
organisation territoriale de la République (NOTRe) est en discussion au Parlement, tendant à revoir la
répartition des compétences entre collectivités territoriales. Il vise à revoir les compétences du
16
Département pour en transmettre certaines aux Régions et aux agglomérations.
Ce projet de loi fait suite à la tribune de François HOLLANDE du 3 juin 2014, dans laquelle le
Président de la République a annoncé sa volonté de supprimer à terme le conseil départemental, le
département demeurant une circonscription pour l'administration déconcentrée de l'Etat.
Les partis de droite ont pointé du doigt au cours de la campagne l'incertitude entretenue par
le gouvernement autour de l'avenir du Département, destinée selon eux à favoriser la montée de
l'abstention pour justifier plus tard la suppression du département.
Aussi les candidats de droite ont-ils affirmé leur volonté de transformer ce scrutin en référendum
« pour ou contre le Département »
Jean-Claude GUIBAL lors de la réunion publique de Colette GIUDICELLI et Patrick CESARI
Menton a ainsi affirmé à l'audience « Je suis un départementaliste », témoignant de son attachement
au département.
Pour les responsables de l'UMP, l'échelon de trop est la Région, dont ils jugent qu'elle est
trop théorique et lointaine des préoccupations des administrés et qu'elle n'accorde pas
suffisamment d'argent au territoire.
Le Front national dénonce quant à lui la volonté de supprimer le Département au profit de
super-Régions destinées à accélérer le processus de métropolisation et la fusion du pays dans l'Union
européenne. Marie-Christine ARNAUTU, cadre du Front national en charge du département des
Alpes-Maritimes, invitée à s'exprimer devant les militants mentonnais voit ainsi dans la suppression
des départements la volonté de démanteler une circonscription de proximité chargée d'identité afin
de favoriser la dissolution de la nation dans l'ensemble européen. On voit ici que Mme ARNAUTU
parvient habilement à associer dans une même critique les topos chers à l'extrême droite que sont
l'identité et l'attachement à la terre, aux thèmes plus classiques de dénonciation de l'Union
européenne, du processus de mondialisation et de défense des périphéries rurales et périurbaines
face aux centres.
Nous avons en outre eu l'occasion de revenir avec les candidats sur le déroulement de leur
campagne. De l'avis général celle-ci a été très courte, commençant seulement à trois semaines du
scrutin.
De faibles moyens ont été engagés par les candidats. Les candidats de gauche ont pris la
décision de ne pas faire de réunion publique car cela leur coutait trop cher, optant pour des moyens
plus classiques de militantisme comme le tractage dans les marchés et le porte-à-porte.
Cette campagne s'est surtout axée sur les enjeux locaux pour les partis de gouvernement
quand les partis extrémistes se tournent vers les enjeux nationaux.
2. Stratégies
A partir des entretiens, il nous est possible de dresser les grandes lignes de la stratégie et du
discours déployés par chaque parti.
a) UMP : Défendre un bilan
Au cours de l'entretien qu'elle nous a accordés, Mme GIUDICELLI s'est essentiellement
attachée à défendre son bilan, étant élue de la majorité sortante.
Elle fait ainsi valoir le fait qu'elle a permis d'apporter cinquante millions d'euros sur le canton
de Menton-Est au cours du dernier mandat, sans que le conseil départemental n'ait eu à augmenter
17
les impôts ni à diminuer l'aide aux communes, malgré les baisses des dotations de l'Etat. Ce bilan est
rendu possible, dit-elle, grâce à la bonne gestion départementale des frais de fonctionnement et la
lutte contre la fraude. Les Alpes-Maritimes ont ainsi été le premier département à créer une
commission de contrôle quant à la distribution du RSA, qui a permis de récupérer vingt millions
d'euros jusqu'ici détournés par les fraudeurs, une initiative pour laquelle le Conseil Général a reçu les
félicitations de la Cour des Comptes.
Elle met également en avant sa proximité avec les électeurs, son expérience, son écoute des
élus locaux du canton et le fait qu'elle répond à leurs demandes.
Pour elle, les deux enjeux principaux du scrutin sont, en premier lieu de faire comprendre
aux gens à quoi sert le Conseil général car, explique-t-elle, bien souvent ils ne savent même pas ce
que c'est, et d'informer les électeurs des actions du Conseil général et de son bilan.
D'autre part, elle affirme que le FN représente pour elle l'ennemi numéro un. Elle dénonce au
cours de l'entretien des candidats parachutés (elle cite l'exemple de Mme SCHENARDI qui se
présente dans le canton de Contes-L'Escarène alors qu'elle habite Grasse) ; des candidats
incompétents qui ne sont pas au fait des dossiers ; des candidats enfin qui ont des propositions
aberrantes. Elle prend pour étayer son propos l'exemple de deux propositions du programme de la
liste Front national à la dernière élection municipale : faire du Musée Cocteau une discothèque et
proposer des moments de détente et des massages aux employés municipaux pendant la journée.
De façon intéressante, comme Nicolas SARKOZY au plan national, elle établit un parallèle
entre les propositions du Front national et le programme de l'extrême gauche en Grèce.
Une telle rhétorique s'adresse à l'évidence à un électorat UMP que sa sociologie rend
particulièrement réceptif à ce type d'argument. En effet, l'électorat UMP est majoritairement
composé de retraités, de commerçants et d'artisans. Pour cette petite bourgeoisie soucieuse de son
épargne la sortie de l'euro et la ligne étatiste impulsée par Florian PHILIPPOT et adoptée par Marine
LE PEN représentent un obstacle au vote Front national.
A cet égard, les deux sondages réalisés par l'IFOP à l'occasion des élections présidentielles de
2012 et des élections européennes de 2014 fournissent de précieux renseignements sur la structure
de l'électorat de l'UMP. En 2012, la catégorie socioprofessionnelle « artisan ou commerçant » était
celle qui accordait le plus massivement ses suffrages à Nicolas SARKOZY (43%), suivi des retraités
(37%) et des professions libérales et cadres supérieurs (27¨%).
La tendance se confirme aux européennes où 31% des artisans et commerçants, 29% des
retraités et 20% des professions libérales et cadres supérieurs déclarent avoir voté ou avoir
l'intention de voter pour une liste UMP.
S'il ne faut bien sûr pas confondre élection locale et élection nationale, un sondage réalisé à
l'occasion de l'élection municipale à Menton par le CSA paraît vérifier cette intuition: 49% des
retraités déclarent avoir l'intention de voter pour Jean-Claude GUIBAL, et 33% des CSP+ soit 10% de
plus que Pascal Gérard.
Or, les retraités, les artisans et commerçants, les professions libérales et cadres supérieurs
forment les trois catégories de la population les plus hostiles à la sortie de l'euro d'après un sondage
IFOP réalisé en 2012, respectivement à 75, 71 et 85%.
18
b) Front national : capitaliser sur le rejet des partis de gouvernement et le renouvellement de la classe
politique
Notre entretien avec les candidats Front national a eu lieu après une réunion organisée en
présence de Marie-Christine ARNAUTU lors de laquelle elle s’est adressée aux militants frontistes.
Cela nous a permis d'apprécier la symétrie entre le discours national du Front national et les thèmes
développés par ses candidats à Menton.
En premier les candidats frontistes se sont attachés à dénoncer la déconnexion des élus UMP
d'avec les électeurs. Estimant qu'ils ne sont plus au contact de la population, ils critiquent leur
fonctionnement en « système » destiné selon eux à conserver leurs mandats. Ils nous font en outre
part d'un fort rejet des élus sortants lors de leur campagne de terrain témoignant d'une volonté de
changement dans le canton et de sanction des responsables politiques au pouvoir. A propos de
l'UMP locale, ils utiliseront à plusieurs reprises le thème de « mafia » ciblant en particulier JeanClaude GUIBAL et son épouse.
Ils mettent également l'accent au cours de la discussion sur la gabegie financière à laquelle se
livrerait selon eux le département. Notons qu'il s'agit là d'un thème porteur dans un électorat
mentonnais très ancré à droite. Ils affichent ainsi pour ambition de lutter contre les dépenses inutiles
de la majorité départementale (un million d'euros à la candidature JO) pour investir davantage.
Leur demandant les points forts de leur programme, les candidats frontistes mettent en
avant la lutte contre le gaspillage inutile de l'argent public, le contrôle de la distribution du RSA,
l'instauration d'une préférence départementale, la revalorisation des associations grâce à la fin du
clientélisme et des subventions à certaines associations. On retrouve ici un certain nombre de
thèmes classiques du Front national transposés sur la scène locale.
Enfin, interrogés sur leur choix de reprendre le tract national, sans développer
d'argumentaire s'intéressant aux problématiques proprement locales, les candidats Front national
ont mis leur faible connaissance des enjeux locaux du scrutin sur le compte de ce que, ne siégeant
pas au conseil départemental, ils ne peuvent pas connaître les dossiers. Ils dénoncent dans le même
temps la faible communication du Conseil général, laquelle manifeste selon eux une volonté des élus
sortants de tenir à l'écart les citoyens des dossiers traités en assemblée.
Mais cet accent donné aux thèmes nationaux est aussi stratégique : ils se concentrent sur ces
enjeux là car de leur propre aveu c'est ce qui intéresse les gens, davantage que les élections
départementales.
c) PS : Affirmer les valeurs républicaines
Les candidats PS, interrogés sur le bilan du conseil général sortant, dénoncent également le
gaspillage et la mauvaise gestion des deniers publics.
Ils ne renient pas la politique menée sur le plan national par le gouvernement, mais affirment
souhaiter axer leur campagne sur les thématiques locales contrairement aux candidats frontistes.
Cette stratégie a pour but de se détacher du contexte national très difficile pour la majorité actuelle.
D’ailleurs on peut noter que l’inscription « parti Socialiste » n’est pas clairement présente sur la
profession de foi (où seul le logo est présent_cf. pages annexes) et est complètement absente du
bulletin de vote (cf. pages annexes).
Leurs mots à l'encontre du conseil général sont très durs, peut être les mots les plus durs sur
le bilan des sortants parmi les candidats rencontrés puisqu'ils le qualifient de catastrophique.
Pour autant, on constate surtout une prévalence des thèmes moraux. D'emblée lors de
l'entretien, ils ont mis en avant l'étiquette rassemblement démocratique et laïc avec laquelle ils se
19
présentent. Ils dénoncent la proximité de l'UMP avec le FN dans le canton en évoquant les propos de
Colette Giudicelli qui aurait comparé le mariage homosexuel au mariage avec les objets. Ils critiquent
également la reprise du mot laïcité par le Front national, principe que d'après eux il dénature et
transforme en instrument afin de stigmatiser et exclure les musulmans.
c) Front de Gauche : Décliner la lutte contre l'austérité à l'échelle locale
Si M. CUCINELLI reconnaît le bilan de Colette GIUDICELLI dans le social, il reproche à la
majorité sortante des investissements trop importants et certains choix budgétaires, comme la
subvention à la candidature des Jeux Olympiques d’Hiver à Nice.
Interrogés sur leurs priorités s'ils sont élus, les candidats du Front de gauche affirment désirer se
concentrer sur les personnes âgées, l'insertion professionnelle des jeunes et les collèges.
Ils ont très rapidement mis en avant le thème de la lutte contre l'austérité, en insistant sur la
nécessité du combat pour la création d'emplois et de logements sociaux qui manquent dans le
canton et le département, ainsi que la création de maisons de retraite publique plus accessibles et
moins chères, et le maintien à domicile des personnes âgées le plus longtemps possible.
Très lucides sur la situation de la gauche à Menton, les candidats du Front de gauche
reconnaissent qu'ils ont peu de chances à Menton, le bloc de gauche n'ayant, même à ses heures de
gloire, que rarement dépassé les 35%-40%. Ils se fixent pour objectif de dépasser les 5% pour que les
frais de campagne soient remboursés.
Ils affirment en fait envisager ce scrutin avant tout dans une perspective nationale, en se
plaçant en opposition avec la politique d'austérité qui est menée, qui est selon eux la même que
l'ancien gouvernement, avec pour objectif de faire changer la politique gouvernementale et
l'orienter vers une véritable politique de gauche.
20
IV. RESULTATS ET ANALYSES
1. Les résultats et analyse du premier tour
a) Résultats
Les résultats de ce premier tour ont été surprenants à plusieurs égards. Même si le tandem
UMP arrive, sans surprise, en tête avec 42,63% des suffrages exprimés, il ne devance le tandem Front
National que d’environ 3% soit moins de cinq cent voix sur les 14514 suffrages exprimés. Les
résultats de Roquebrune-Cap-Martin, où le binôme UMP-UDI s’impose plus largement, ont permis
aux sortants d’être en tête au soir du premier tour. A noter que sans le vote des roquebrunois, le FN
serait arrivé en première position sur l’ensemble du canton au soir du premier tour.
Le FN enregistre ainsi son plus haut score historique lors de ce type d’élection. Le binôme
GAZIELLO-GUCHER arrive même en tête dans tous les villages (à l’exception de Gorbio) et est tout
proche du binôme CESARI-GIUDICELLI sur Menton où cinquante-deux voix les séparent.
Le ticket PS-EELV et alliés, enregistre, inversement, un de ses plus bas scores en recueillant à
peine plus de 10% des suffrages exprimés. Le couple PCF-Front de Gauche est quant à lui tout proche
des 8% ce qui est plutôt une bonne opération (lié à la personnalité des candidats) dans ce canton
fortement ancré à droite.
Il est aussi important de souligner que la participation s’élève à 46,67% des inscrits soit un
peu plus de trois points de moins par rapport à la moyenne nationale. Le total des bulletins blancs
(3,20%) et nuls (1,95%) dépasse les 5%.
b) Analyse
Si on regarde de plus près la répartition géographique du vote dans le canton, on note que le
vote FN est fort dans les villages, les vallées et les marges de Menton (Careï, Borrigo, Monti ainsi que
dans la Vieille ville) et dans la partie ouest de Roquebrune-Cap-Martin (bureau de vote n°11 Ange
Gai, proche de Beausoleil), zones souvent moins favorables aux sortants. Le FN réalise aussi de très
bons scores dans certains secteurs aux problématiques particulières comme la Vieille ville de Menton
(trafic de drogue) et un score proche de sa moyenne cantonale dans le quartier résidentiel de
Garavan à Menton (passage des immigrés clandestins qui arrivent de l’Italie). Les résultats dans ce
quartier bourgeois, votant fortement à droite et où le tandem PS réalise un score supérieur de près
de trois points à sa moyenne cantonale, voient tout de même le FN recueillir près de 38% des
suffrages exprimés. La dynamique du FN est donc plurielle : elle s’articule à la fois sur le rejet des
sortants, sur le malaise entre une périphérie marginalisée par rapport aux villes centres, ainsi que sur
la politisation d’enjeux locaux sécuritaires et identitaires.
Le binôme UMP réalise des scores particulièrement élevés dans le centre-ville, dans les
quartiers résidentiels bourgeois (dans les bureaux de vote n°10 et 22) et sur tout le littoral de
Menton et de Roquebrune-Cap-Martin.
Enfin, on constate que les scores des tandems PS et PCF-FDG sont faibles notamment à
l’ouest du canton (Gorbio, Roquebrune-Cap-Martin, Sainte-Agnès) car le bloc de gauche était très
mal implanté, et parfois même inexistant (absent des cantonales de 2008) dans l’ex-canton de
Menton-Ouest qui regroupait ces communes. La liste PS réalise ses meilleurs scores en centre-ville,
dans la vieille ville et sur tout le littoral de Menton (comme l’UMP). On remarque que le PS a aussi
beaucoup de mal à convaincre dans les vallées, les villages et les quartiers plus populaires. De même,
le PCF-Front de Gauche obtient ses résultats les plus importants en centre-ville, dans la vieille ville et
devance même le binôme socialiste dans les villages.
On relève également que la présence d’un candidat dans un quartier peut favoriser le bon
score de la liste qu’il représente au sein de son bureau de vote (même si ce n’est pas systématique).
C’est particulièrement vrai pour le vote PCF-Front de Gauche qui est plus fort dans les bureaux de
vote 3 et 4 (quartier où vit la candidate Annie POLLERI), dans les bureaux 26/27 (lieu de résidence de
21
Hubert PINAULT, remplaçant), dans les bureaux du secteur de la Condamine (où habite Jean-Michel
CUCINELLI). Cette corrélation est aussi fondée dans le cas de l’UMP (49,68% pour le bureau de vote
n°10, lieu de résidence de Colette GIUDICELLI et Jean-Claude GUIBAL) ou du FN (les bons résultats de
Thiery GAZIELLO à Castellar où il est domicilié).
Ainsi, on relève une fracture centre/périphérie importante sur laquelle s’articule, en partie, le
vote Front National et qui arrive également à politiser et instrumentaliser à son profit les enjeux
spécifiques de quelques quartiers.
Réactions à l’issu des résultats du premier tour extraites de Nice Matin, édition du 24 mars 2015 :
•
•
•
Thiery Gaziello, candidat FN : « Il ne fait aucun doute que si Patrick Césari s’était allié à une
autre personne moins clivante que Colette Giudicelli, nous n’aurions pas fait un tel score
surtout à Roquebrune. Et parallèlement, Mme Giudicelli peut dire merci à M. Césari qui lui
donne un peu d’air sur l’ensemble du canton ».
Colette Giudicelli, candidate UMP : « Je note que les électeurs ont massivement exprimé leur
colère. Leur ras-le-bol du gouvernement socialiste et de sa politique nationale qui entraîne le
pays à la dérive et qui profite aux extrêmes. Le Front National fait d’ailleurs le plein sur cette
contestation. Mais cela, je ne l’accepte pas et je serai sur le terrain toute cette semaine pour
rappeler tout le travail que nous avons accompli avec le conseil général et pour dénoncer ce
qu’est le FN, le vide et l’incohérence de son programme »
Françis Leborgne, candidat PS éliminé : « Nous ferons barrage au Front National surtout dans
une ville comme Menton où le FN s’est dangereusement approché de l’UMP ».
22
2. Campagne d’entre-deux-tours
Au vu du score inattendu du FN et des déclarations à l’issue des résultats du premier tour,
nous aurions pu nous attendre à une campagne d’entre-deux-tours très active et très offensive. Or,
cette deuxième phase de la campagne a été assez calme : chaque camp a continué à tracter et à aller
à la rencontre des gens, s’inscrivant dans la continuité de la campagne de premier tour. Il n’y a pas
vraiment eu de changements de stratégies (quant à l’orientation de la campagne) ou de braquet
(quant à son intensité). D’ailleurs, il n’y a pas eu beaucoup d’échange et de communication par voie
de presse.
a) Du côté du FN
Les candidats et militants du FN ont continué à tracter dans les rues de Menton et de
Roquebrune-Cap-Martin. Seule nouveauté du Front National durant l’entre-deux-tours : la mise en
place d’une « FN mobile » (voiture arborant affichant le logo du parti, les affiches des candidats et
des drapeaux tricolores), qui avait déjà été utilisée lors des municipales, pour sillonner le canton et
aller à la rencontre des gens. Cependant, ce dispositif n’a été mis en place que dans les derniers jours
de campagne.
b) Du côté de l’UMP
A l’UMP, le tractage dans les rues de Menton et de Roquebrune-Cap-Martin a continué. La
candidate Colette GIUDICELLI, dont la fibre sociale est reconnue de tous, a fait un effort particulier en
allant faire du porte à porte dans certains logements sociaux des quartiers périphériques (nord-Careï
principalement) ce qu’elle n’avait pas autant fait avant le premier tour. Enfin, jeudi 26 mars, Eric
CIOTTI, président sortant du Conseil Général des Alpes-Maritimes et réélu dès le premier conseiller
départemental tour à Levens, est venu soutenir deux de ses vice-présidents sortants. Eric CIOTTI a
donné une rapide conférence de presse à Nice-Matin depuis la permanence de l’UMP (place de la
Mairie de Menton) où les militants s’étaient retrouvés.
23
3. Les résultats et analyse du second tour
a) Résultats
Les résultats du second tour ont consacré la victoire des conseillers généraux sortants,
Patrick CESARI et Colette GIUDICELLI. En effet, les électeurs les ont placés en tête avec 55,66% des
suffrages exprimés devant le couple FN qui obtient un score de 44,34%.
Le FN se console en l’emportant à Castillon et à Sainte-Agnès.
Il faut noter également l’augmentation non négligeable de la participation qui atteint 50,97%
des inscrits soit une augmentation de plus de quatre points par rapport au premier tour. Cette
hausse place le canton de Menton au dessus de la participation nationale moyenne (50,02%).
Il faut également mettre en évidence le poids des votes blancs (4,82% des votants) et des
votes nuls (3,08% des votants) qui représentent 7,90% des votants.
b) Analyse
Quand on regarde la répartition géographique des résultats, elle coïncide avec la dynamique
du premier tour même si par la mobilisation accrue et une partie du front républicain, le ticket UMP
a réussi à repasser devant dans certains bureaux de vote qui avaient placé le FN en tête au premier
tour. La fracture centre/périphérie est toujours perceptible. On constate que le travail de Colette
GIUDICELLI dans le haut Careï a eu des résultats : l’UMP arrive en tête dans les bureaux de vote n°26
et 27, même si le score du FN y est plus élevé que sur l’ensemble du canton.
L’augmentation de la participation de plus de 4% montre que les électeurs se sont plus
mobilisés dans le cadre d’un duel UMP-FN.
Cependant, la progression des votes blancs (+1,62%) et des nuls (+1,13%) qui pèsent à eux
deux près de 8% des votants est le révélateur que certaines personnes n’ont pas voulu apporter leur
soutien aux élus sortants sans franchir le pas du vote Front National.
On peut également s’interroger sur l’impact de la personnalité clivante de Colette GIUDICELLI
(soulignée au soir du premier tour par Thiery GAZIELLO). Par exemple, nous avons pu noter que sur
quelques bulletins le nom de la sortante mentonnaise était rayé. En effet, on remarque que la
proportion de votes blancs ou nuls sur Menton (5,35 au premier tour et 8,41 au second) est plus
forte que sur Roquebrune-Cap-Martin (4,12 et 6,74). Cependant, structurellement la part de bulletins
blancs ou nuls est globalement supérieure à Menton (cf. ci-après). De même, les votes blancs et nuls
ne sont pas spécialement plus élevés que lors des cantonales de 2008 (qui avaient vu un duel entre
Colette GIUDICELLI et la socialiste Pascale GERARD dans le canton de Menton-Est, et la victoire au
premier tour de Patrick CESARI -en l’absence de liste de gauche- dans le canton de Menton-Ouest_cf.
pages annexes). L’importance de la personnalité de la candidate sortante sur les résultats, bien
qu’objet symbolique de critiques par les adversaires, est à minorer.
24
Malgré tout, le FN gagne près de mille voix entre les deux tours en dépit du front
républicain déclaré. Ce facteur met en évidence le caractère « référendaire » du vote par rapport aux
élus sortants bien plus que l’influence d’un gaucho-lepénisme ou d’un front républicain. D’ailleurs,
une électrice, qui avait voté pour le ticket socialiste au premier tour, nous faisait part de son
incertitude pour le deuxième tour considérant qu’un vote FN serait contraire à ses convictions mais
que l’envie et l’occasion de « dégager » les sortants la faisait hésiter.
La logique de vote du second tour a donc été d’approuver ou de rejeter l’action des sortants.
Réactions extraites de Nice Matin, édition du 30 mars 2015.
•
•
Colette Giudicelli : « C’est une victoire que j’apprécie tout particulièrement puisque le
premier tour avait été disputé. Mais nous avons réalisé un très beau score et c’est une très
belle victoire. Ce qui m’a le plus touchée c’est que l’habitat social qui avait massivement voté
FN au 1er tour s’est révolté, s’est mobilisé et au second tour a fait campagne pour nous ».
Thiery Gaziello : « Nous ne sommes absolument pas déçus, car nous n’avons pas les mêmes
moyens. Eux, ils ont le pouvoir. On gagne plus de mille voix sur le canton donc nous sommes
très satisfaits. Il faut qu’ils se rendent compte qu’ils sont réélus de justesse, que leur bilan a
été rejeté. Il faut qu’ils changent de politique. Ils ont été réélus, on les félicite mais pour eux
c’est une défaite et pour nous un triomphe ».
25
PERSPECTIVES
Ainsi, après analyse de l’élection départementale dans le canton de Menton nous pouvons
dresser plusieurs constats.
L’effondrement du socialisme local (en suivant le contexte national) depuis les municipales
de 2014 s’est confirmé : le PS, qui franchit à peine les 10%, affiche son plus bas score historique.
La gauche déclarée « d’opposition », PCF et Front de Gauche résiste mieux et obtient de
meilleur résultats par rapport à sa moyenne nationale dans un canton ancré fortement à droite.
Cette performance est liée à la personnalité reconnue des candidats.
Le Front National est plus que jamais profondément ancré dans le territoire cantonal (même
à Roquebrune-Cap-Martin, imperméable jusqu’alors au FN, le parti de Marine Le Pen y réalise de
bons scores). Si la dynamique de progression perdure, le Front National est même en mesure de
prendre le pouvoir dans plusieurs localités du canton, notamment dans les villages.
Cette menace frontiste devrait inquiéter l’UMP locale dont le binôme a été le moins bien élu
de tout le département. Cet indicateur met en avant l’érosion électorale de la droite républicaine
dans le canton, déçue du manque de renouvellement générationnel au sein des élus. Les
résultats de cette élection sonnent donc comme un avertissement.
26
SOURCES
Site du ministère de l'Intérieur : http://www.interieur.gouv.fr/
Portail vie-publique.fr : http://www.vie-publique.fr/
Sondage IFOP-Fiducial « Premier tour de l'élection présidentielle 2012 : profil des électeurs et clés du
scrutin » : http://www.ifop.com/media/poll/1848-1-study_file.pdf
Sondage
IFOP
« Les
Français
et
l'Europe
Maastricht » : http://www.ifop.com/media/poll/1978-1-study_file.pdf
20
Sondage IFOP-Fiducial « Jour du Vote : profil des électeurs
européen » : http://www.ifop.com/media/poll/2670-1-study_file.pdf
et
ans
clefs
du
après
scrutin
Sondage
CSA :
« La
situation
politique
à
Menton » :
http://www.csa.eu/multimedia/data/sondages/data2014/opi20140218-la-situationpolitique-a-menton.pdf
Documents de la Mairie de Menton
27
REMERCIEMENTS
Nous voulons remercier chaleureusement l’ensemble des candidats pour nous avoir reçus
pour un entretien.
Nous aimerions également remercier la Ville de Menton qui a bien voulu nous communiquer
les documents en sa possession concernant cette élection départementale.
Enfin, nous adressons nos remerciements à M PERRINEAU, professeur des universités à
Sciences Po, et à Mme MUXEL, directrice de recherche au CNRS, tous les deux enseignants sur le
campus de Menton qui ont assuré la direction de notre travail.
28
ANNEXES
Paroles Mentan, ô belou Mentan, François Borfiga, 1931
29
Paroles Ou Ver de Mentan, François Borfiga. Cette chanson est considérée comme « La
Mentonnaise », l’hymne de Menton, et est chantée pour diverses occasions culturelles, folkloriques,
religieuses ou encore politiques.
30
Recto de la profession de foi de Patrick CESARI et Colette GIUDICELLI pour le premier tour du scrutin.
31
Verso de la profession de foi de Patrick CESARI et Colette GIUDICELLI pour le premier tour du scrutin.
32
Recto de la profession de foi de Gaelle GUCHER et Thiery GAZIELLO pour le premier tour du scrutin.
33
Verso de la profession de foi de Gaelle GUCHER et Thiery GAZIELLO pour le premier tour du scrutin.
34
Recto de la profession de foi de Fanny VANDEN BOSSCHE et Francis LEBORGNE pour le premier tour
du scrutin.
35
Verso de la profession de foi de Fanny VANDEN BOSSCHE et Francis LEBORGNE pour le premier tour
du scrutin.
36
Recto de la profession de foi de Jean-Michel CUCINELLI et Annie POLLERI pour le premier tour du
scrutin.
37
Verso de la profession de foi de Jean-Michel CUCINELLI et Annie POLLERI pour le premier tour du
scrutin.
38
Bulletin de vote pour CESARI-GIUDICELLI
Bulletin de vote pour VANDEN BOSSCHE-LEBORGNE
Bulletin de vote pour CUCINELLI-POLLERI
Bulletin de vote pour GAZIELLO-GUCHER
39
Résultats du premier tour de l’élection départementale de 2008, source : Mairie de Menton.
40
Résultats du premier tour de l’élection départementale de 2015, source : Mairie de Menton.
41
Représentation graphique des résultats du premier tour de l’élection départementale de 2015 sur la
ville de Menton, source : Mairie de Menton.
42
Représentation graphique des résultats du premier tour de l’élection départementale de 2015 sur le
canton de Menton, source : Mairie de Menton.
43
Répartition géographique des suffrages exprimés au cours du premier tour sur la ville de Menton,
source : Mairie de Menton.
44
N°Bureau de vote UMP
F. Gauche PS
1-2-3-4-5-6-7
(Secteur : CentreVille)
975
208
8-9-10-11-12
(Secteur :
Condamine +
Corniche des
serres de la
Madone)
745
167
13-14-15-28
(Secteur :
Borrigo)
538
122
16-17-18 (Secteur
Careï)
411
74
19 (Secteur :
Monti)
33
6
20-21 (Secteur
Vieille-Ville)
191
79
22-23 (Secteur
Garavan)
261
29
24-25 (Secteur :
Carnolès)
343
50
26-27 (Secteur :
Saint-Roman /
Nord-Careï)
278
62
Total
3 775
797
FN
270
783
205
636
158
673
96
505
5
47
78
226
75
224
84
325
49
1 020
304
3 723
Répartition géographique des suffrages exprimés au cours du premier tour sur la ville de Menton.
45
Répartition géographique des suffrages exprimés au cours du premier tour sur le canton de Menton,
source : Mairie de Menton.
46
Résultats du second tour de l’élection départementale de 2015, source : Mairie de Menton
47
Résultats par bureaux de vote
48
49
50
Représentation graphique des résultats du second tour de l’élection départementale de 2015 sur la
ville de Menton, source : Mairie de Menton
51
Représentation graphique des résultats du second tour de l’élection départementale de 2015 sur e
canton de Menton, source : Mairie de Menton.
52
Répartition géographique des suffrages exprimés au cours du second tour sur la ville de Menton,
source : Mairie de Menton.
53
N°Bureau de vote UMP
FN
1-2-3-4-5-6-7
(Secteur : CentreVille)
1 359
8-9-10-11-12
(Secteur :
Condamine +
Corniche des
serres de la
Madone)
1 038
13-14-15-28
(Secteur :
Borrigo)
766
16-17-18
(Secteur : Careï)
584
19 (Secteur :
Monti)
41
20-21 (Secteur :
Vieille-Ville)
309
22-23 (Secteur :
Garavan)
341
24-25 (Secteur :
Carnolès)
464
26-27 (Secteur
Saint-Roman /
Nord-Careï
420
Total
5 322
961
797
782
614
62
301
246
392
361
4 516
Répartition géographique des suffrages exprimés au cours du premier tour sur la ville de Menton.
54
Répartition géographique des suffrages exprimés au cours du second tour sur le canton de Menton,
source : Mairie de Menton.
55
ELECTIONS DEPARTEMENTALES
ENTRETIEN AVEC MME GIUDICELLI, CANDIDATE UMP-UDI POUR LE CANTON DE
MENTON, 18/03/2015
Comment voyez-vous la modification de la loi électorale ?
Dans l’ensemble, je considère que le redécoupage n’est pas une bonne chose, les cantons plus grands
nous font perdre en proximité. Dans les Alpes-Maritimes les élus auront plus de mal à couvrir les 163
communes du département. Certains canton comme celui de Conte-Peillon-L’Escarène sont des
aberrations et ne respecte en rien la géographie locale regroupant ainsi des personnes qui n’ont pas
grand chose en commun. Heureusement, sur le canton de Menton nous avons été épargnés et le
redécoupage nous ramène au canton presque tel qu’il était en 1994 (seul Castillon se rattache) et reste
donc cohérent. En ce qui concerne, l’obligation de la parité homme-femme, je suis contre. En tant que
femme j’estime que c’est à nous les femmes de nous investir et de s’impliquer sans obligation de la
législation. Je trouve que la parité parfaite à tout prix n’est pas vraiment une bonne chose.
Comment avez-vous été investi ?
L’investiture s’est faite naturellement, Eric Ciotti président du Conseil Général, satisfait de notre
travail de vice-président nous a demandé de nous présenter ensemble. Mme Caserio représentante UDI
pour la circonscription s’est également jointe à nous.
En tant que conseiller général sortant, quel est votre bilan dans le canton ? Et celui du conseil
général ?
J’ai participé en tant qu’élue du Conseil Général a apporté 60 millions d’euros sur le canton de
Menton-Est. La majorité départementale n’a pas augmenté les impôts depuis deux mandats et n’a pas
diminuer son aide aux communes malgré les baisses des dotations d’Etat. Cette politique est possible
grâce à une bonne gestion départementale, dans la gestion des frais de fonctionnement et dans la lutte
contre la fraude. Notre département à a d’ailleurs était le premier à créer une commission de contrôle
quant à la distribution du RSA, cette commission a permis de récupérer 20 millions d’euros jusqu’ici
détournés par les fraudeurs. Pour cette initiative, le Conseil Général des Alpes-Maritimes a reçu les
félicitations de la cour des Comptes. Le Conseil Général c’est 4500 agents pour un budget total de 1,3
milliard dont 500 millions d’euros pour le social. CF FICHE
Quels sont selon vous les enjeux du scrutin dans le canton ? Dans le département ? Comment se
superposent-ils aux enjeux nationaux ?
L’enjeu principal de cette élection est de faire comprendre aux gens à quoi sert le Conseil Général car
bien souvent ils ne savent même pas ce que c’est. Notre enjeu est de battre le FN, c’est aujourd’hui
notre ennemi numéro 1. Elus parachutés à l’image de Mme Schénardi, élu de la région parisienne dans
les années 1990, vivant à Grasse, conseillère municipale de Menton et candidate pour ces élections sur
le canton de Conte-L’Escarène. De même ces personnes ne sont pas compétentes. Je prendrai deux
propositions du programme de la liste FN aux dernières municipales mentonnaises : faire du musée
Cocteau une discothèque et proposer des moments détentes et massages aux employés municipaux
pendant la journée, c’est délirant ! Au niveau départemental Arnautu est pareil, sur la Voix Libre je
l’entendais dire que s’ils étaient élus dans les Alpes-Maritimes ils s’occuperaient du RSA et des
personnes âgées mais enfin c’est ce que nous faisons depuis des années. Les personnes du FN ne sont
pas compétentes. Ils manquent de connaissance. Proposition de sortir de l’euro occasionnerait une
diminution du pouvoir d’achat des français de près de 40%.
56
Comment s’est déroulée la campagne ?
Avec Patrick Césari nous avons fait le tour de toutes les communes du canton où nous avons tenu à
chaque fois une réunion publique. Nos documents de campagne ont été distribués dans tout le canton.
Nous avons voulu faire une campagne de terrain, concentré sur les enjeux locaux en mettant tout
particulièrement l’accent sur le social. Nous sommes allés à la rencontre d’habitants de HLM dans la
vallée du Careï. Vous savez il y a beaucoup de difficulté aussi sur Menton. Par exemple, la
fréquentation de notre banque alimentaire, les Coeurs du Campanin, ne cesse de s’accroitre : nous
sommes à plus de 500 bénéficiaires aujourd’hui. En ce qui concerne la presse, la campagne a été très
courte. Les premiers titres concernant les élections ne sont apparus qu’à trois semaines du scrutin.
Quels sont pour vous les points forts de votre programme ?
Notre proximité, notre expérience. Nous répondants aux demandes des élus locaux du canton, nous
sommes en phases avec leurs besoins, et nous sommes constamment à leur écoute. Nous voulons
continuer comme ça notre travail.
On remarque que tous les candidats au départementales sont soit de Menton, soit de Roquebrune,
aucun n'est d'un village. Est ce qu'il n'y pas une fracture entre ?
Non puisque nous sommes constamment à l’écoute de tous les élus locaux. Cependant, oui c’est vrai
qu’on aurait pu intégrer à notre liste un élu des villages. J’y étais favorable. Mais Patrick Cesari n’y
était pas favorable craignant la une forme de rivalité et de jalousie quant aux villages qui aurait été
représenté. C’est pour cela que nous sommes restés sur Menton et Roquebrune-Cap-Martin.
Quel est votre ressenti par rapport au terrain, comment les électeurs perçoivent-ils cette élection ?
On s’aperçoit qu’il y a une mauvaise communication par rapport aux compétences et aux actions du
Conseil Général. Les hésitations de la majorité présidentielle sur l’avenir des départements n’ont pas
amélioré la situation.
Les gens n’ont plus confiance en la politique et dans les politiques. Aujourd’hui on sent que la
République est attaquée par l’abstention et le vote FN.
L’abstention sera sans doute forte dans ce contexte, n’avez-vous pas peur d’une percée du FN dans le
canton ?
Nous ne voulons pas d’élus FN dans les Alpes-Maritimes. L’abstention sera forte. Convaincre les gens
d’aller voter.
Votre pronostic pour le scrutin ?
Il sera très difficile d’être élu au premier tour, cependant nous espérons l’emporter au deuxième.
57
ELECTIONS DEPARTEMENTALES
ENTRETIEN AVEC MME GUCHER ET M GAZIELLO, CANDIDATS FN POUR LE CANTON
DE MENTON, 18/03/2015
Présentation des candidats :
Gaelle Gucher, mère au foyer, habite Menton. Je suis proche de ce parti depuis un petit moment et
mais je n'avais pas envi de m'afficher publiquement à cause du regard des autres. J'ai adhéré au FN
juste avant les municipales parce que j'en avais ras-le-bol de tous ces politiques qui ne comprenaient
pas les préoccupations des gens. Quand Marine Le Pen parle je l'a comprend, c'est très clair et ça
l'ait pour tout le monde.
Thiery Gaziello, travail dans le bâtiment, j'ai adhéré au FN en 2001, habite Castellar, élu Conseiller
municipal de Menton. En 2011, j’ai même réussi à batte l'UMP à l'Escarène. Ce que j'apprécie au FN
c'est la vision patriote de la France, on ne se préoccupe pas de sa réélection mais du pays.
Comment voyez-vous la modification de la loi électorale ?
Même si le découpage électoral ne correspond pas à des réalités locales dans de nombreux cas, la
canton de Menton est épargné. Gaelle Gucher trouve qu'en tant que femme la parité obligatoire est une
bonne chose.
Comment avez-vous été investi ?
Commission départementale d'investiture.
En tant que conseiller général sortant, quel est votre bilan dans le canton ? Et celui du conseil
général ?
Mme Giudicelli est une sénatrice fantôme. Giudicelli et Cesari se sont toujours les mêmes, les élus
locaux ont marre de ce monopole. Nous ne pouvons pas en dire plus puisque nous n'avons pas les
dossiers du Conseil Général en main. Il faut lutter contre les dépenses inutiles de la majorité
départementale (1 million € à candidature JO) pour investir d'avantage.
Quels sont selon vous les enjeux du scrutin dans le canton ? Dans le département ? Comment se
superposent-ils aux enjeux nationaux ?
Les enjeux du scrutin sont les enjeux nationaux. Il y a a une insatisfaction vis-à-vis de l'UMP dans le
canton. Il n'y a pas d'opposition, ce sont toujours les mêmes qui s'arrangent entre eux pour conserver
leurs mandats. Sur le plan plus local, nous devons aller au contact de la population pour montrer que
nous sommes présents.
Comment s’est déroulée la campagne ?
Nous avons tenu une conférence de presse à l'hôtel Le Napoléon à Menton le … Nous avons ensuite
déposer des documents dans les boites aux lettres et nous sommes allés dans la rue à la rencontre des
gens. Nous avons fait cela dans toutes les villes même si nous avons mis l'accent sur Menton et
Roquebrune-Cap-Martin. Nous avons fait tout ça avec un budget de 9000€ contrairement aux
candidats UMP qui sont au plafond, nous on fait attention à l'argent public.
58
Quels sont pour vous les points forts de votre programme ?
Les points forts de notre programme sont la lutte contre le gaspillage inutile de l'argent public,
contrôler d'avantage le RSA, instaurer une préférence départementale, revaloriser les associations et
mettre fin au clientélisme entretenu par des élus mafieux au pouvoir depuis des décennies dans les
Alpes-Maritimes.
On remarque que tous les candidats au départementales sont soit de Menton, soit de Roquebrune,
aucun n'est d'un village. Est ce qu'il n'y pas une fracture entre ?
Non il n'y a pas de fracture. On connaît bien les villages de la couronne mentonnaise, et nous y allons
régulièrement. Menton et Roquebrune sont les deux plus grosses villes, il est logique que nous y
consacrions plus de temps.
Quel est votre ressenti par rapport au terrain, comment les électeurs perçoivent-ils cette élection ?
Les gens ne veulent plus voir les mêmes têtes depuis des années. De plus en plus de déçus de l'UMP
nous rejoignent souvent discrètement. Ils veulent mettre fin à ce système.
En tant qu'élus d'opposition au Conseil municipal de Menton vous êtes très discret et vous votez
souvent pour ou vous vous abstenez pour les délibérations municipales, mais vous ne votez pas
contre ? Pourquoi ? Est ce le signe d'une proximité avec l'UMP local ?
Nous ne voulons pas être dans l'opposition systématique, nous voulons jouer le rôle d'une opposition
constructive. Après nous n'avons pas vraiment accès aux dossiers de la Ville par conséquent c'est
difficile d'avoir un avis tranché dessus.
Votre pronostic pour le scrutin ?
L'abstention sera forte, autour de 50 %. Nous serons au deuxième tour.
59
ELECTIONS DEPARTEMENTALES
ENTRETIEN AVEC MME POLLERI ET M CUCINELLI, CANDIDATS PCF-FG POUR LE
CANTON DE MENTON, 19/03/2015
Comment voyez-vous la modification de la loi électorale ?
Nous sommes très attachés à la conservation des départements, ils s'inscrivent dans un héritage
historique napoléonien qui représente une réalité. Nous souhaitons donc le maintien des départements
avec des moyens financiers suffisants afin d'assurer la pérennité de cette instance.
En ce qui concerne le redécoupage territorial bien souvent il n'a pas de sens, on perd en proximité et
ile ne correspond pas à une réalité par exemple le nouveau canton de Contes-L'Escarène regroupe cinq
anciens cantons en coupant complètement les vallées. Idem pour certain quartier de Nice où le
découpage n'est pas cohérent. Le canton de Menton est cependant épargné, on revient finalement au
canton de Menton d'avant 1994 avec Castillon en plus. Ce redécoupage comme tout redécoupage
favorise le gouvernement au pouvoir. Nous considérons cependant que la parité est une avancée.
Comment avez-vous été investi ?
A la base nous sommes tous deux adhérents au PCF, mais nous avons décidé de nous allier avec le FG
comme nous le faisons depuis un moment. Commission d'investiture.
En tant que conseiller général sortant, quel est votre bilan dans le canton ? Et celui du conseil
général ?
Nous jugeons le bilan des sortants comme contrasté. Le bilan local est plutôt bon et en particulier pour
le social où Mme Giudicelli est vraiment très concerné par ce domaine. Cependant, sur le plan
départemental certains choix budgétaires ne sont pas cohérents, les frais importants d'investissement
ne sont pas forcément judicieux. Il faut arrêter avec le gaspillage avec par exemple des subventions
pour la candidature des JO. Il faut faire un choix politique fort et ce concentrer sur les personnes âgées
(maintien à leur domicile et maisons de retraite publics), l’insertion professionnelle des jeunes, la
voirie, les collèges.
Quels sont selon vous les enjeux du scrutin dans le canton ? Dans le département ? Comment se
superposent-ils aux enjeux nationaux ?
Nous sommes dans le même état d'esprit que pour les municipales. Le canton est fortement ancré à
droite et ne bougera pas. Le département non plus. Nous voulons donc nous placer dans une
perspective nationale, nous voulons faire changer la politique gouvernementale, nous voulons une
véritable politique de gauche. Par la modification de la loi électorale, le PS veut limiter les dégâts et
survalorise le FN pour brouiller les pistes et l'utiliser afin de limiter la débâcle.
Comment s’est déroulée la campagne ?
Nous n'avons pas beaucoup de moyens, par conséquent nous n'avons pas tenu de réunion publique.
Nous avons assuré l'affichage sur les panneaux dédiés à cet effet, nous sommes allés à la rencontrer
des personnes dans la rue et nous avons tracté. Nous sommes aussi allés dans les villages, même si
nous nous concentrons sur Menton et Roquebrune. La campagne a été très courte (environ 3
semaines).
Quels sont pour vous les points forts de votre programme ?
Les points forts de notre programme sont la lutte contre l'austérité, le combat pour la création
d'emplois et de logements sociaux qui manquent cruellement dans le canton et le département. Nous
voulons des maisons de retraite publiques plus accessibles et moins chères, maintenir les personnes
âgées le plus longtemps possible chez elles, apporter une aide plus forte à l'insertion professionnelle
des jeunes.
60
On remarque que tous les candidats au départementales sont soit de Menton, soit de Roquebrune,
aucun n'est d'un village. Est ce qu'il n'y pas une fracture entre ?
En effet, nous sommes tous les quatre mentonnais car c'est à Menton, et dans une moindre mesure à
Roquebrune, que nous avons notre force militante et notre permanence. Nous ne disposons pas d'assez
de relais pour couvrir plus amplement les autres villes et villages du canton.
Quel est votre ressenti par rapport au terrain, comment les électeurs perçoivent-ils cette élection ?
On sent le poids du rejet du politique et de l'abstentionnisme. Il y a une désaffection de l'électorat en
général. On constate peu d'engouement pour ces élections qui n'ont pas été valorisées par le
gouvernement. Nous avons eu globalement un bon accueil au sens de la population mais beaucoup de
refus de prendre nos tracts par exemple. On sent très clairement un ras-le-bol qui s'exprime soit par
l'abstention soit par le vote FN. Les gens ne nous ont pas fait part de préoccupation particulière, c'est
plus un rejet généralisé alimenté par les effets de la crise et les affaires qui touchent le milieu politique.
On perçoit une prégnance du vote FN qui n'est pas un vote homogène. On peut distinguer un noyau
d'extrême droite préoccupé par les thèmes de l'insécurité et de l'immigration, et un autre groupe porté
sur les questions d'ordre économique.
Ne regrettez vous pas que la gauche ne soit pas unie pour ce genre d'élection ? Dans le canton ?
Aujourd'hui nous sommes clairement dans l'opposition face au PS qui conduit la même politique
d'austérité que le gouvernement précédent. Dans certains cantons nous avons de très rares accords
avec le PS pour contrer le FN. En qui concerne une alliance avec EELV les approches nationales
varient fortement selon les leaders du parti c'est pour cela qu'un rapprochement global au niveau
national est difficile, même si nous nous entendons avec eux dans de nombreux cantons. Nous
regrettons que comme les municipales, EELV local ait préféré s'allier avec le PS.
Manque de dynamique du PCF-FG comparé à Syriza en Grèce ?
Le FG n'a pas réussi à créer la dynamique espérée, le mouvement marque le pas depuis l'élection
présidentielle de 2012. Notre médiatisation reste assez faible, nous manquons de visibilité. De plus,
nous devons faire face à une droitisation des idées. La désindustrialisation entraine la perte de
syndicats qui étaient notre force. Ls luttes dans les pays marque le pas et nous n'arrivons plus à attirer
la jeunesse qui préfère se tourner vers le FN.
Pourquoi ? Comment expliquer vous la dynamique du vote FN ?
La plupart des jeunes sont abstentionnistes car peu ou pas encore politisés. Le FN apparaît comme le
mouvement qui correspond le mieux à la contestation lié à la jeunesse. Le FN se réapproprie
également des symboles traditionnellement à gauche comme Jean Jaurès. Le FN s'inscrit aussi dans
une tradition démagogique incarnée par de nouveaux tribuns qui apporte leur verve et leur intelligence
comme Marine le Pen, Marion Maréchal-Le Pen, Philippot...Ces théoriciens savent très bien manier
les formules autour des frontières et de la dénonciation ultra-libérale.
Votre objectif et votre pronostic pour le scrutin ?
On va essayer de dépasser les 5 % afin que nos frais de campagne soient remboursés. De manière
général ce sera difficile pour la gauche ici, même à ses heures de gloire le bloc de gauche ne
représentait que 35 à 40 % des voix dans les années 1980-90. L'abstention sera très forte. Le binôme
UMP sera réélu au deuxième tour.
61
ELECTIONS DEPARTEMENTALES
ENTRETIEN AVEC M. LEBORGNE ET MME. VAN DEN BOSSCHE, CANDIDATS PS POUR
LE CANTON DE MENTON, 20/03/2015
Comment avez-vous été investi ?
Nous nous présentons au titre du rassemblement démocratique, solidaire et laïc. Cela nous a permis
d'obtenir l'investiture du Parti socialiste, du PRG, du MRC, du Front démocrate et d'EELV par le biais
de commissions d'investiture.
Nous regrettons qu'il n'y ait pas eu d'union de la gauche dès le premier tour. Plusieurs militants du
Front de Gauche étaient pourtant favorables à cette union et nous ont fait part de leur
incompréhension.
Quels sont selon vous les enjeux du scrutin dans le canton ? Dans le département ? Comment se
superposent-ils aux enjeux nationaux ?
Le problème à Menton est le couple Guibal. Il y a aujourd'hui une très grande porosité entre les idées
du Front national et leurs élus. Cela se traduit par des mots, des expressions, des petites phrases.
Sur le plan des pratiques, les élus sont insultés, parfois privés de parole au conseil municipal.
Mme Giudicelli a eu une réflexion très grave lors du débat sur le mariage pour tous. Elle a dit au Sénat
que le mariage pour tous, c'était comme marier des animaux. Ce n'est pas acceptable.
S'agissant de Cesari, il n'a jamais eu de candidat Front national en face de lui. Ce qui signifie que
Cesari leur convient. L'incertitude porte donc sur le score que va faire le Front national à Roquebrune
face à Cesari.
Dans sa commune, M. Cesari a mis en place un système de vidéosurveillance pour un montant de 1
million d'euros. L'argent aurait pu être utilisé plus utilement.
A l'heure actuelle, nous comptons sur le rejet du couple Guibal et sur les voix du centre de Novelli
laissées orphelines.
L'étiquette PS n'est-elle pas trop difficile à porter en ce moment ?
En tant que militants socialistes nous assumons la politique menée par le gouvernement. Pour cette
élection, nous nous présentons au nom du rassemblement démocratique et laïc. Nous avons souhaité
insister sur la présence du mot laïcité par rapport au Front national. Nous tenons à afficher,
revendiquer cette valeur. Le FN utilise le mot « laïcité » aujourd'hui comme « antimusulmans », et en
fait un instrument contre cette religion. Le PS prend lui la laïcité au sens de 1905, comme soutien à
toutes les religions.
Il faut savoir qu'actuellement il n'y a pas de collège public à Roquebrune Cap Martin. Les parents qui
ne souhaitent pas ou ne peuvent pas scolariser leur enfant dans le privé se tournent vers le collège
Vento. Les classes à Vento sont surchargées. Il y a 35 élèves par classe, et 7 ou 8 classes par niveau.
C'est un grave problème auquel le département doit remédier.
Quels sont pour vous les points forts de votre programme ?
Actuellement les élus, la démocratie élective est de plus en plus impopulaire. Une fois élus, les élus ne
connaissent plus leurs électeurs. Nous nous engageons à tenir les administrés informés de
l'avancement des travaux du conseil départemental par des réunions publiques
Comment s’est déroulée la campagne ?
62
Nous avons fait des tractages et du boitage. Nous avons également rencontré les maires des villages
sauf Saint-Agnès car nous n'avons pas eu de réponse du maire. C'est une surprise. Nous aurions voulu
recueillir les préoccupations des habitants de Saint-Agnès.
Ces villages sont enclavés. Ils ont besoin de route. A Gorbio, un grand manque de moyen se fait sentir.
Quel est votre ressenti par rapport au terrain, comment les électeurs perçoivent-ils cette élection ?
La plupart ne savaient pas qu'il y avait des élections. Ils sont étonnés qu'une jeune s'intéresse à la
politique.
Les gens manifestent surtout une envie de changement au Conseil général.
L'accueil est très ouvert lors des rencontres. Il n'y a pas de rejet partisan, le tract étant l'occasion
d'établir un contact.
Les gens ne comprennent pas le rôle de ces élections. Le conseiller départemental n'est pas un élu
local, il n'exerce pas directement de pouvoir exécutif. On ne leur explique pas.
Vos adversaires reprochent au gouvernement d'entretenir le flou autour de l'avenir des Départements
afin de faire monter l'abstention et de justifier leur suppression future. Qu'en est-il ?
En réalité les gens ne savent pas qu'il était question de les supprimer. De plus, avant cette volonté,
l'abstention était déjà très forte.
Sur cette vote-face politique, il y a effectivement eu une incertitude due au fait que la suppression du
département nécessite une modification préalable de la Constitution. La réforme actuellement discutée
au Parlement prévoit la fin de la compétence générale pour éviter que les échelons administratifs ne
soient en compétition sur les mêmes dossiers.
Avec la réforme, le département conserve le social. Les routes ne seront plus dans les attributions du
Conseil général, mais le social y reste.
Comment voyez-vous la modification de la loi électorale ?
A chaque fois, on accuse le parti au pouvoir de se favoriser par le découpage.
La parité est l'aspect le plus important. Elle permet enfin que les femmes soient à égalité avec les
hommes. Il est indispensable de passer par la loi pour imposer la parité, pour l'imposer dans les
mœurs.
Quel regard portez-vous sur le bilan des sortants ?
Le bilan des sortants est catastrophique. Certaines promesses n'ont pas été tenues, comme la route de
la Condamine, qui est proposée depuis 20 ans.
La sociologie du canton est particulière avec un important segment de plus de 70 ans.
On ne fait à l'heure actuelle pas grand chose pour les actifs, les jeunes. Rien non plus n'est fait pour le
transport inter-urbain.
Il n'y a pas de maison de retraite publique de réalisé. Nous défendons un Epad public. Il y a un manque
de solidarité.
L’abstention sera sans doute forte dans ce contexte, n’avez-vous pas peur d’une percée du FN dans le
canton ?
L'abstention sera forte. Les gens sont désabusés. C'est lié aussi au contexte national.
63
Comment analysez-vous le vote Front national dans le département ?
Le vote FN est dû premièrement à la migration de la population pied-noir dans le département après
l'indépendance de l'Algérie.
Sur Roquebrune, ce n'est pas un FN de prolétaire, mais un FN de l'ancienne extrême-droite.
Il y a enfin une dernière couche d'anciens électeurs de gauche frappés par la crise qui croit en un
discours simplificateur.
De nombreux jeunes votent aujourd'hui pour le Front national et les effectifs du parti se rajeunissent.
Comment l'expliquez-vous ?
Avant la crise d'adolescence se traduisait à l'extrême gauche. Aujourd'hui l'extrême droite incarne
mieux la contestation que l'extrême gauche.
Votre pronostic pour le scrutin ?
Nous comptons être présent au second tour.
64