Evolution future de l`enneigement en Savoie

Transcription

Evolution future de l`enneigement en Savoie
Dossier Climat, N°17, juin 2011
Evolution future de l’enneigement en Savoie
et conséquence sur les sécheresses
Nous ne disposions jusqu’à l’heure actuelle que de peu de résultats de modèles sur l’avenir de
l’enneigement en Savoie sur le moyen et le long terme. Grâce aux résultats préliminaires du
projet SCAMPEI (Scénarios Climatiques Adaptés aux zones de Montagne : Phénomènes
extrêmes, Enneigement et Incertitudes), porté par de multiples laboratoires de recherche
français - qui doit à terme s’intégrer dans la plateforme internet DRIAS (voir OsCC Projet
n°1) -, nous pouvons mieux quantifier les effets du changement climatique (températures,
précipitations) sur l’évolution du manteau neigeux, et ce en fonction des massifs alpins et des
altitudes. Nous nous concentrerons sur la Savoie.
Les températures hivernales : un constat, elles ont augmenté en Savoie de +0.5°C entre les
périodes climatiques 1961/1990 et 1981/2010, et ce de manière uniforme sur les Alpes
françaises.
En moyenne, et quelque soit les scénarios d’émissions des gaz à effet de serre, il est prévu une
augmentation de 1°C à l’horizon 2021/2050 par rapport à la période 1981/2010.
Notons que ce réchauffement de +0.5°C est concomitant avec une baisse de l’enneigement
d’environ 20 à 25% vers 1000m, 20% vers 1500m, 15% vers 2000m et quelques % vers
2500m. Cette évolution est à relier avec la remontée de la limite pluie-neige provoqué par le
réchauffement.
A l’horizon 2071/2100, le réchauffement est plus fort, et surtout pour les scénarios d’émission
pessimistes (A2), où il atteint +3.5°C en moyenne, contre +2°C pour un scénario optimiste
(B2). Les fourchettes d’incertitude ne sont pas fournies dans ce rapport préliminaire.
Les altitudes supérieures n’ont pas connu de diminution significative, mais depuis 2003 on
observe une diminution des précipitations hivernales, ce qui impacte directement
l’enneigement à toutes altitudes (comme pour l’hiver 2010/2011). Depuis 1959, les saisons les
moins enneigées sont aussi les moins pluvieuses, d’où l’importance de ce paramètre.
Les précipitations hivernales : les modèles restent très incertains, à tous les horizons, avec
des différences spatiales marquées sur les Alpes.
Concernant la Savoie, les tendances vont plutôt vers une diminution pour l’horizon 2021/2050
et une stagnation pour la fin du siècle.
Les Alpes de l’extrême sud verraient plutôt une augmentation des précipitations hivernales,
ainsi que pour les Alpes de l’extrême nord, proche de la Suisse.
Il convient pour ce paramètre de rester extrêmement prudent.
La situation connue lors de l’hiver 2010/2011 pourrait donc se répéter plus souvent à court et
moyen terme, ainsi qu’une forte variabilité naturelle.
1
Finalement, l’impact le plus important resterait au niveau des plus basses altitudes. Par
exemple, en dessous de 1500m, la hauteur du manteau neigeux pourrait bien être divisée par
deux d’ici trente ans par rapport aux années 60. Les pourcentages de réduction sont inscrits
dans le tableau suivant. L’incertitude n’est pas indiquée.
2021/2050
A2
2021/2050
B2
2071/2100
A2
2071/2100
B2
1200m
-60%
-45%
-90%
-70%
1500m
-50%
-35%
-80%
-55%
1800m
-40%
-20%
-70%
-40%
2100m
-25%
-10%
-60%
-25%
2400m
-20%
-5%
-45%
-20%
2700m
-15%
0%
-35%
-20%
Réduction de la hauteur moyenne de neige
au sol (%) en fonction de l’altitude et des
scénarios d’émission de GES, pour les
périodes 2021/2050 et 2071/2100 par
rapport à 1961/1990.
SCAMPEI
A2 : scénario avec fortes émissions
B2 : scénario avec émissions réduites
Tableau ci-contre ou en courbes cidessous
2021/2050
0%
-10%
-20%
-30%
A2
-40%
B2
-50%
-60%
-70%
1200m
1500m
1800m
2100m
2400m
2700m
2071/2100
0%
-10%
-20%
-30%
-40%
A2
-50%
B2
-60%
-70%
-80%
-90%
-100%
1200m
1500m
1800m
2100m
2400m
2700m
2
Une conclusion inquiétante ressort du projet Scampei quant à l’évolution du nombre de jours
sans neige pour la fin du siècle et avec le scénario A2 :
Le massif du Chablais (nord des Alpes françaises) connaitrait autant de « jours sans
neige » que la région du haut-Var / haut-Verdon (sud des Alpes) actuellement !
Traduit en jours de présence de neige au sol, le Chablais perdrait 90 jours de neige entre
1000m et 1500m, soit une réduction de trois mois, passant ainsi de plus de 5 mois de présence
de neige au sol à deux mois vers 1200m et trois mois à 1500m.
En dessous de 1000m, on n’observerait pas plus de 15 jours de neige contre trois mois
actuellement !
Vers 1800m, on perdrait deux mois et demi de jour de neige, passant de 7 mois à 4,5 mois.
Au-delà de 2000m, on aurait deux mois de perte de jour de neige au sol, mais l’impact serait
faible car on garderait malgré tout au moins 6 mois de neige au sol.
Conséquences sur les sécheresses des sols en zone de montagne.
D’après le rapport final du projet CLIMSEC, dont les résultats viennent d’être présentés, les
zones de montagne seront les premières touchées par de longues sécheresses des sols à partir
de la moitié du siècle. En effet, les modèles mettent en évidence que l’augmentation des
températures devrait faire augmenter l’évaporation dans les zones qui actuellement
bénéficient des sols les plus humides, tout en réduisant l’enneigement en montagne comme vu
précédemment, et modifiant ainsi le régime nival. Ce scénario est probable même sans
changement des régimes des pluies.
La diminution des ressources en eau des zones de montagne et l’assèchement des sols,
pourraient donc impacter gravement le secteur agricole.
Pour la fin du siècle, l’étude montre que les sécheresses que nous avons connues comme en
1976 pourraient devenir la norme sur l’ensemble de la France.
La gestion des ressources en eau, au travers de ces études, s’affirme encore comme étant la
pierre angulaire de l’adaptation au changement climatique.
Et afin de limiter le réchauffement, n’oublions pas l’importance de la réduction des émissions
de gaz à effet de serre.
3