Formes politiques
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Formes politiques
Émancipation ? Militantisme ? Information Autorité ? Légitimité ? Commun ? Collectif ? Politique ? Graphistes ? 5 Formes politiques ? Mémoire de troisième année, design graphique 6 Images politiques? Introduction 7 Images politiques? Introduction Sommaire Une pratique engagée ? Politique, utopie et graphistes Les symboles de l’affiche politique Le syndicalisme et les formes La typographie étirée et le mème Les traces du politique invisibles Isoler les traces du politique visibles Note de fin Bibliographie, webographie 6 –17 18 – 53 54 – 83 84 –107 108 – 131 132 – 165 166 – 233 234 – 235 236 – 241 8 Images politiques? 9 Images politiques? Une pratique engagée ? 10 Images politiques? CONTEXTE Introduction 11 Images politiques? Introduction CHOIX 12 Images politiques? Introduction Comment penser et imaginer une pratique politique de design graphique ? Il s’agit de s’interroger sur le fait de savoir si une pratique graphique est politique où non, dans les nombreux sens que possède le politique. Nous pouvons s’imaginer que le politique se résume aux activités inhérentes aux partis politiques, à savoir leur actualité, les derniers faits de politiciens sur Twitter, bref, quelque chose de finalement assez basique, assez routinier, que l’on ignore, où que l’on n’y prête pas attention, car simplement on ne s’y intéresse pas/plus. Dans un premier temps, il serait peut-être intéressant de démystifier le sujet en y prêtant une attention autre que le simple parti politique. Dans mon sens, est intrinsèquement politisé, de manière engagée tout ce qui nous entoure, du simple choix de conduire une voiture à la décision de voter pour un tel parti, un tel choix d’initiative populaire. Dans ce contexte, il faut se demander comment s’introduit la figure du graphiste, dans les enjeux auxquels le designer est confronté. Comme le dit Annick Lantenois1, il s’agit de «ceux portant sur les conditions de la construction de la parole et du regard des individus en interaction avec le collectif.» Ainsi, tout projet graphique en relation avec un commanditaire serait lié par un lien plus fort que le simple rôle économique entre un client et un simple exécutant. Il faut donc voir les relations économiques, culturelles avec les pouvoirs politiques qu’entretiennent les designers avec leurs com- 13 Images politiques? Introduction manditaire2. La réalisation d’un projet de design reflète donc en ce sens une certaine réalité socio-économique dans laquelle se place le designer, en interaction avec son capital culturel, social et symbolique3. Il s’agit donc de tenter de comprendre une production de design graphique à travers les prismes que notre société contemporaine nous donne à propos de son organisation et de son fonctionnement. Un intérêt des graphistes pour cette question s’est manifesté en Europe de l’ouest et aux États-Unis dès que le design graphique a été reconnu comme discipline à part entière, soit dans la période entre 1891 et 1922, lorsque William Morris lance son «aventure typographique»4 avec le mouvements Arts and Crafts parallèlement aux expérimentations typographiques de Daniel Berkeley Updike. Une profonde remise en question de l’aspect consumériste de l’expansion du design graphique fait son apparition dès la période dadaïste mais trouve réellement racine dans les années trente en réaction aux tentatives hitlériennes d’imposer un système graphique dictatorial. Ce fut le cas avec les photomontages de John Heartfield pour Arbeiter-Illustrierte-Zeitung (AIZ). En 1930, Jan Tschichold déclarait déjà : «Des textes vivants plutôt que des reliures sans vie»5, incluant par la suite dans le modernisme la critique de la «belle édition»6 et dans le même temps l’aspect élitiste de la création graphique se rapportant à une «valorisation excessive et naïve du prétendu progrès technique»7. 14 Images politiques? Introduction D’aspect austère, l’approche de l’art concret et l’enseignement du design graphique en Suisse trouvent un élan fondamentalement social à l’intérieur du contexte helvète, dans le souci et la justification de publier des textes en plusieurs langues8. Ainsi Max Bill trouve, dans son ouvrage Form, en 1952, «la forme juste», abstraite, devenant le symbole de la lutte contre les méfaits du mauvais goût et de la rationalisation américaine9. À la fin des années soixante, les événements de 1968 marquent un tournant dans la manière dont se représente politiquement le graphisme ; ainsi on remet en question en Europe l’ordre et la précision graphique toute helvétique.10 Les prémisses de cette critique se retrouve chez Willem Sandberg lorsque le designer hollandais reprend en main l’identité visuelle du Stedelijk Museum d’une manière plutôt joyeuse, libre et pleine de vitalité11. Le Néerlandais invente de ce fait le genre de l’identité visuelle culturelle comme discipline à part entière, opposée, en Europe de l’ouest, du moins, aux compagnies suivant les logiques du marché et se devant suivre le discours managérial de la rentabilité.12 Créant aussi de ce fait une niche, Sandberg amène une touche personnelle dans les publications du musée, tout en voulant ce lieu un «institut d’éducation»13 et de militantisme, en mettant en avant des artistes d’avant garde14 et des idées peu conventionnelles, quitte à être qualifié de communiste et à être constamment menacé d’exclusion.15 L’esprit des affiches des évènements 15 Images politiques? Introduction de mai 68 marque un tournant dans la manière dont on se fait l’idée d’un certain graphisme «d’utilité publique», en dépassant ses travers techniques et commerciaux pour entamer une véritable subversion à l’égard du regard que l’on porte sur les images. C’est dans ce contexte qui naît les Grapus, fondé en 1970 par Gérard Paris-Clavel, Pierre Bernard et François Miehe, anciens étudiants à l’École nationale supérieure des arts décoratifs (ENSAD). Ayant une volonté d’imposer un changement sociopolitique, les «crapules staliniennes» vont marquer profondément le paysage graphique français en imposant une marque «teintée sociale», souvent critiquée pour son aspect trop «moraliste» et occupant encore aujourd’hui un certain «souffle grapusien» que l’on retrouve par exemple au festival de l’affiche de Chaumont16. Jan Van Toorn est également un des grands acteurs de la prise de responsabilité social et politique propres au métier de designer graphique17. En mettant en cause la neutralité axiologique de l’information, le designer graphique hollandais tient à mettre en avant une image forte, symbolique et chargée d’émotions afin de montrer directement l’information et les intérêts sous-entendus dans le projet. Jan Van Toorn parle ainsi dans ses prouctions de l’«d’image dialogique»18 comme symbole entre le graphiste et le public. 16 Images politiques? Introduction Un autre événement marquant se passe en 1964, lorsque Ken Garland publie son manifeste «First Things First Manifesto» en opposition à la trop grande part éthique que prenait alors la publicité dans la conception graphique19. Le magazine Adbusters le republiera dans une nouvelle version en l’an 2000, malgré le scepticisme du designer britannique20. Ce fait s’ajoute à son travail pour la lutte antinucléaire de 1962 à 196621 où le designer s’essaye à trouver un système graphique militant avec le fameux signe de la paix. Nous pouvons donc le voir, les perspectives politiques d’un graphisme engagé sont nombreuses. Le politique est partout où l’on veut bien le voir et entoure les pratiques des designers graphiques dans leur quotidien mais aussi dans le positionnement que ces derniers prennent par rapport à leurs travaux. 17 Images politiques? Introduction FORME DIFFUSION IDÉAL DURÉE 18 Images politiques? Formes Vives 19 Images politiques? Formes Vives Politique, utopie et graphistes Quelques questions au bureau Formes Vives 20 Images politiques? Formes Vives 21 Images politiques? Formes Vives Selon la présentation fournie sur leur site web, Formes Vives est un atelier de communication politique, utopique et exigeante. Il s’agit d’un studio qui regroupe trois graphistes-dessinateurs en les personnes de Nicolas Filloque, Adrien Zammit et Geoffroy Pithon, installés entre Brest, Nantes et Marseille. Le trio formé à l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs s’intéresse à des éléments politiques et sociaux en collaborant notamment avec des associations à but non lucratif, militantes et collectives. Leur ambition est de produire ainsi des formes «cohérentes et heureuses» pour la pratique de ces collectivités. Le groupe se constitue ainsi sur une pratique basée sur le réfléchir ensemble en s’interrogeant en profondeur sur les besoins graphiques que l’association, le groupe politisé nécessite. J’ai trouvé particulièrement intéressant de connaître un peu mieux leurs intentions et leur pratique graphique car ce qui me frappe avec leurs travaux, c’est l’implication personnelle, foncièrement politique, que font les graphistes en rejetant la notion de mandat, trop proche d’une vision marquetée du design graphique. Quelque part héritiers d’une pratique franco-grapusienne du graphisme, souvent critiquée en Suisse pour ses aspects de «poètes de combat», l’originalité produite par leurs travaux,avec l’économie des moyens engagés, apportent un vrai renouveau dans le paysage graphique européen, politique ou non. 22 Images politiques? Formes Vives Formes Vives. 2009. «Histoire Vive. Issue du «Chantier». Paris. Ensad. 23 Images politiques? Formes Vives Formes Vives. 2009. «Histoire Vive. Issue du «Chantier». Paris. Ensad. 24 Images politiques? Formes Vives Vous avez les trois étudiés à l’ENSAD, une « grande école» française, qui possède des moyens bien plus généreux que la plupart des autres établissements artistiques. Comment avez-vous construit votre rapport à cette école, dans sa portée historique et dans cette fameuse dualité entre le modernisme et la pâte de l’affiche «franco polonaise» ? Quels souvenirs gardez-vous de votre engagement militant dans ce «microcosme politique» qu’est une grande institution scolaire comme les arts décoratifs de Paris ? Adrien Zammit : Notre rapport à cette école s’est d’abord construit individuellement, c’est une lapalissade : comme ailleurs, les étudiants y sont évalués individuellement (le système de notation peut être considéré comme une des bases de la compétition scolaire) et une part du parcours dans l’école est personnalisée (choix de la section mais aussi choix de certaines options). Élément tout aussi important : la pédagogie des Arts déco (comme celle des écoles d’arts) est moins une affaire de programme qu’une transmission «incarnée» via des enseignants reconnus («célèbres» même pour certains), tandis que l’histoire de l’art est amplement établie sur les prouesses d’artistes géniaux, avec le mythe du bohème qui n’est jamais bien loin, ou de l’artiste en marge de la société… sans parler des logiques individuelles dans lesquelles le système libéral ne cesse de tous nous contraindre. Tout cela pousse implicitement les étudiants à se positionner de manière plus ou moins autocentrée. 25 Images politiques? Formes Vives Pour moi, la particularité principale de nos parcours aux Arts déco de Paris a été de réussir à glisser vers des pratiques collectives, à l’intérieur même de l’école (et un peu contre sa logique donc). Nous nous sommes tous les trois retrouvés à travailler en 2007, de manière très intense pendant trois mois, à un journal d’école indépendant, un fanzine subversif et coloré qui a compté plus de 40 participants (et dont Nicolas et Adrien étaient parmi les plus actifs) et paraissait chaque semaine. Ensuite nous nous sommes associés avec Nicolas pour réaliser notre mémoire de fin d’étude (Citoyen-graphiste, partisan de l’intérêt général, 2008), avant de poursuivre cette collaboration avec notre travail de fin d’étude (Chantier - militant-graphiste, 2008-2009) puis, dans une prolongation logique, nous avons monté l’atelier Formes Vives sous sa forme actuelle (collectif de graphistes-dessinateurs éclaté dans plusieurs villes). Geoffroy, de son côté, a aussi fait partie de l’aventure du journal des Arts déco (qui n’avait pas de titre), puis en a monté un second avec d’autres gay-lurons (Cunulus, 2008-2009) . En 2011, il a fait partie d’un collectif d’étudiants ayant mis en place une grève sous la forme d’un workshop autogéré par les étudiants. Enfin, son projet de fin d’étude (Un Instant mon petit, 2011-2012) s’est réalisé en collaboration avec une étudiante de design d’objet, Carmen Bouyer. Toutes ces aventures collectives sont de très très bons souvenirs ! Des histoires politiques mais d’abord d’amitiés. 26 Images politiques? Formes Vives Nicolas Filloque : L’Ensad, c’était chouette. Mon engagement dans l’école était une suite et une continuité de celui que j’avais avant et à côté de l’école, un engagement politique dans les marges plutôt que dans l’institution, dans la rencontre, dans le plaisir. Je n’ai pas vécu cette «dualité entre le modernisme et la pâte de l’affiche franco polonaise», peut-être parce que je n’étais pas en Design graphique (mais en Image imprimée). Je me souviens de guerres de pouvoir plus que de conflits de sens. Après, c’est la découverte d’un monde très protégé, parisien. AZ : La dualité entre le modernisme (entendu comme le modernisme venu d’Allemagne, des Pays-Bas puis de Suisse) et la famille des affichistes «francopolonais» (je pourrais aussi parler d’une forme de modernité à leur endroit) ne se faisait pas franchement ressentir dans la section Design graphique/multimédia. Des héritiers du Bauhaus déclarés (dont une partie est avant tout des opportunistes avisés) ont réussi à faire le ménage même si en 2e année j’ai eu le plaisir d’avoir Pierre Bernard parmi mes enseignants, avant son départ en retraite ; c’est une personne qui m’a clairement marqué. Au moment de notre diplôme, avec Nicolas, Ruedi Baur commençait tout juste à prendre le pouvoir dans la section. Geoffroy Pithon : Pour ma part, j’ai donc étudié entre 2007 et 2012 à l’Ensad. L’enseignement en Design graphique n’était déjà plus du tout du 27 Images politiques? Formes Vives côté de la «patte francopolonaise». J’ai tenté de trouver quelque chose d’approchant en suivant les options de dessin et de sérigraphie ou en allant faire mon Erasmus à la KHB Weissensee (Berlin), en suivant là-bas les cours d’Alex Jordan. Et d’un autre côté, je ne dirais pas non plus que l’enseignement fût totalement moderniste puisqu’il y avait cette vague numérique qui amenait plutôt une espèce de chamboulement global avec beaucoup d’amnésie à l’endroit de l’histoire de l’art en général et du graphisme en particulier. Même si, vers la fin de mon cursus, le «modernisme tardif» s’installait — insufflé par nos cours de typo avec André Baldinger, Philippe Millot, Alexandre Dimos —, c’est plutôt le «design d’interaction» qui s’imposait avec une personne comme Ruedi Baur et beaucoup de théorie. Vous avez écrit vos hypothèses de travail en juin 2009, lorsque vous terminiez vos études à l’ENSAD, sauf pour Geoffroy il me semble. Trois ans et demi après, quels enseignements tirez-vous de vos postulats ? Et quels points vous semblent-ils, au contraire, biaisés ? NF : Le style de nos hypothèses est très empreint de nos lectures de cette époque, c’est assez touchant, aujourd’hui on écrirait peut-être la même chose mais ce serait avec d’autres mots. On tient assez bien cette ligne énoncée il y a plus de quatre ans, on s’en écarte parfois mais jamais sans que ça fasse débat au sein de Formes Vives. 28 Images politiques? Formes Vives 29 Images politiques? Formes Vives AZ : Ce texte a été écrit pour parachever notre parcours d’étudiants et notamment une année et demie de recherches tous azimuts (le texte lui-même a été écrit assez rapidement). Il faut le prendre pour ce qu’il est : un manifeste de jeunes graphistes, des prises de positions très volontaristes, réfléchies dans le cadre d’une recherche. Un texte qui s’adresse d’abord à nous-mêmes. Mais nous pensons que ce texte résonne toujours avec notre travail, articles après articles nous pourrions citer plusieurs productions ou rencontres valant comme exemples concrets. (Ce serait un peu long à écrire !) Nous assumons aussi une part de contradictions avec certains travaux, mais nous tâchons toujours de faire de notre mieux. GP : Pour ma part, je me réfère encore à ce texte qui a été écrit lorsque j’étais au début de mon cursus (entre 2e et 3e années) et il m’a servi de référence pendant pas mal de temps. Son côté frontal, assumé, un peu tendu, où tu sens qu’il y a du cœur à l’ouvrage, à quelque chose de la lutte qui me semble très important de conserver dans Formes Vives même si peut-être intérieurement les choses ont bougé, dans le sens où nous pensons encore que toutes les hypothèses sont valables mais les moyens à mettre en place se sont possiblement détendus ? Formes Vives. 2009. «Extrait d’«Hypothèses de travail». Issue du «Chantier». Paris. Ensad. 30 Images politiques? Formes Vives Pendant ma scolarité à l’ECAL, j’ai trouvé très pesant la présence de gigantesques «openspaces» pour travailler sur des images. Quelle importance accordez-vous à l’espace, que ce soit pour vos mandats, ou dans un cadre éducatif ? GP : Un espace idéal serait un lieu où les meubles, plutôt légers, peuvent se bouger, se déplacer facilement, où l’on peut accrocher des choses, il y a de la lumière naturelle, de l’eau, un endroit pour faire du café et où l’on peut se retrouver pour manger, mais aussi des coins plus confidentiels pour bosser et s’approprier un espace. Il y a des livres et de quoi écouter de la musique. AZ : Pour certains temps de travail, et notamment les workshops, nous aimons les espaces qui permettent, voire qui invitent, au bricolage, à la peinture, que l’on peut salir, qui permettent de déborder sur l’extérieur… Des espaces plein de possibles et où l’ordinateur n’est pas central, juste un outil parmi d’autres. Dans notre pratique quotidienne, Nicolas (à Brest) et moi (à Marseille) faisons le choix, pour l’instant, de travailler à notre domicile (mais j’ai pu partager pendant deux ans un atelier à Paris), Geoffroy a un bureau dans un atelier collectif à Nantes. NF : Je travaille tout seul à la maison, pour l’instant. J’aime bien. Pour l’instant. AZ : C’est un côté frugal avec lequel on s’arrange bien. En parlant d’espace de travail, on pourrait aussi évoquer ce qu’il y a autour, comme le repas du midi, 31 Images politiques? Formes Vives la situation urbaine, on pourrait parler de notre situation géographique : chacun a fait le choix de rejoindre sa région de cœur, dans laquelle il compte des amis, de la famille, des souvenirs, des paysages aimés… Comment avez-vous commencé à collaborer ensemble ? Et comment avez-vous été amené à considérer la politique comme un «champ d’action», de ce «partage du sensible» ? Est-ce que ces questionnements ont-ils eu une importance déterminante dans votre choix de devenir graphistes avant de débuter votre formation ? NF : J’ai fait les Arts déco pour faire du graphisme et de la bande dessinée. J’en faisais déjà dans un milieu associatif brestois plutôt militant, branché éducation populaire. Comme je l’évoque à la question1, les Arts déco c’est ma rencontre avec la bourgeoisie culturelle (pas que les élèves, aussi les profs, les gens autour…), plutôt social-démocrate, très individualiste. Il n’y avait pas tant que ça de gens prêts à construire du commun. Adrien en faisait partie, Geoffroy aussi. AZ : Pour moi, mon positionnement critique et mon apprentissage en arts appliqués ont évolué parallèlement, tout au long de mon parcours scolaire : j’ai d’abord fait un baccalauréat arts appliqués, ensuite un premier cursus (BTS) en design d’objet, avant de rentrer aux Arts déco en design graphique. Petit à petit, mes prises de conscience se sont faites, et c’est dans le design graphique qu’il m’a semblé trouver la meilleure opportunité pour réunir mesdésirs politiques et une pratique artistique. 32 Images politiques? Formes Vives On peut souvent lire que vous avez un rapport assez important à l’épicurien et à la qualité du «vivre ensemble». Quelle dimension prend actuellement le graphisme dans vos vies, en ce sens que votre travail «n’est pas un but supérieur en soi» par rapport à vos autres activités, notamment votre engagement politique ? Comment arrivez-vous ainsi à faire venir la question du graphisme dans des associations militantes et des collectivités ? AZ : Notre activité de graphiste n’est pas, effectivement, notre seule activité. Mais pour les autres activités, il faudrait répondre individuellement, chacun étant investi de diverses manières dans diverses pratiques, actions, groupes… NF : Entre nous on partage plus que le travail, on se parle, on va chez les uns, chez les autres, on mange ensemble. On n’est pas «collègues». On est une entité. C’est assez particulier. Mais on a des vies différentes. On est très liés et très indépendants à la fois. La question du graphisme se pose très souvent dans une association ou une collectivité. Après, quand cette question se pose, il y a des choix : faire «simple» ; faire comme on sait que cela se fait (reproduire les signes de la communication dominante) ; ou prendre ça à bras-le-corps au même titre que le reste. Dans ce cas-là, on répond présent. AZ : Quand, avec les associations ou collectifs que nous fréquentons, sont abordées des questions de communication, on peut apporter notre expérience sur le sujet ; quand est jugée nécessaire la production 33 Images politiques? Formes Vives d’un objet graphique, on peut le réaliser avec Formes Vives. Mais nous ne poussons personne à produire du graphisme sans que cela vienne d’un besoin et d’un désir partagés (il peut même nous arriver de remettre en question des besoins qui ne sont peutêtre pas si nécessaires, tout comme on peut parfois refuser d’aider «professionnellement» des proches). Comment vous introduisez-vous dans des structures militantes ? Et comment arrivez-vous à pousser des associations politisées à apprécier des formes qui sont en dehors du stéréotype militant (bichromie rouge et noir, typos trashs…) ? NF : On travaille dur ! AZ : Nous ne cherchons pas spécialement à introduire des structures militantes, nous n’avons pas de stratégie d’entrisme. Si l’on se retrouve dans de telles structures, ce ne sera pas le biais d’un-e ami-e et/ ou d’un désir aussi intuitif que désintéressé. Quand on discute de communication et de graphisme dans ces structures ou de manière plus générale, on commence à avoir quelques boulots qui peuvent servir d’exemples ou d’illustrations pour divers cas de figure. Donc on présente des trucs, on voit vite si ça accroche ou pas, en général ça accroche ! Le fait d’être dans un positionnement qui résonne avec celui d’interlocuteurs militants, nous permet de gagner facilement leur confiance ; nous ne sommes pas là pour leur vendre des salades et tâchons d’éviter l’écueil d’un positionnement d’experts. 34 Images politiques? Formes Vives Formes Vives. 2011. «Couverture d’Article 11, No 6». Paris. Article 11. 35 Images politiques? Formes Vives Formes Vives. 2011. «La Montilla, adaptation de la calligraphie de la comédienne Leonor Canales. Fonte.». Paris. 36 Images politiques? Formes Vives Du coup, même si nos formes ne sont pas franchement dans les canons de la communication dominante, elles ont une réelle crédibilité, surtout pour des personnes qui de leur côté aussi cherchent des positionnements en décalage avec des pratiques militantes «dominantes». Comment faites-vous le lien entre éducation populaire et subversion ? Est-ce que cela passe t-il par un lien avec les outils de production des formes ? Comment amenez-vous la personne qui regarde une de vos images à mobiliser le moins possible son «capital culturel», à être libre par rapport à son rapport au visuel ? NF : On essaye de faire des images qui sont au premier degré. Ça n’empêche pas d’autres lectures, mais on évite les autoréférences ou les blagues de connaisseurs. AZ : C’est un peu délicat de parler d’éducation populaire en lien avec la communication visuelle ; la communication peut inviter les personnes à s’intéresser à l’éducation populaire, elle peut aussi servir à la transmission d’outils critiques. Dans le même temps, nous essayons de produire des images et des objets qui touchent à la sensibilité, au recul critique, et qui soient comme des pas de côté. Notre liberté individuelle et notre imaginaire collectif dépendent de ça, notre plaisir aussi. Et en appliquant à nous-mêmes ces ambitions d’éducation populaire, nous pensons y participer. 37 Images politiques? Formes Vives Vous avez refusé de participer à la campagne de François Hollande en 2012 pour cause de divergences politiques. Imaginez-vous un jour participer à la communication visuelle d’un parti politique à grande échelle dans le cadre d’événement comme une élection présidentielle ? AZ : Petite nuance : l’anecdote de la campagne de François Hollande (une sollicitation pour le soidisant accompagnement créatif de la campagne de candidature aux primaires présidentielles socialistes de 2011) est purement anecdotique. Cette campagne a d’ailleurs été produite — évidemment ! — par une grosse agence de comm’ qui doit maintenant rafler de nombreux contrats publics juteux. Au regard des pratiques pitoyables des partis politiques (sur le plan de la communication pour ce qui nous concerne ici), de notre manque complet de réseau à cette échelle de pouvoir et de notre localisation en «province», il est impossible que nous nous retrouvions à travailler avec un parti à l’échelle nationale. Peut-être que finira par voir le jour un parti réellement alternatif (dans sa P R A T I Q U E ), ou que la politique professionnelle finira par imploser au profit d’organes plus démocratiques et plus locaux, qu’à ce moment-là des rencontres se feront ? C’est évidemment impossible à prédire et nous n’attendons pas ce grand soir ! 38 Images politiques? Formes Vives Je trouve qu’il y a une certaine ressemblance dans votre pratique avec celle d’artistes plasticiens comme Thomas Hirschhorn, qui a été stagiaire chez les Grapus. Quel rapport entretenez-vous avec des artistes qui se réclament de «l’artivisme» pour reprendre une formule employée par Stéphanie Lemoine et Samira Ouardi dans leur ouvrage du même nom ? Comment voyez-vous le lien entre artistes et designers graphistes du point de vue de l’engagement militant par rapport à leurs pratiques ? AZ : Merci pour la comparaison avec Thomas Hirschhorn, il ne compte peut-être pas parmi nos références principales mais son travail nous touche. Nous ne savions pas qu’il avait droit à l’étiquette «artiviste». Quelle chance ! Si l’on fait un bond 3040 ans en arrière, cette formule n’avait absolument aucune raison d’être, la plupart des artistes développaient un travail appuyé sur des idées politiques. Nous ne sommes d’ailleurs pas sûrs que les artistes travaillant des formes revendiquées comme activistes soient les plus pertinents pour ce qui concerne un idéal d’émancipation collective. En tout cas ces artistes, qui sont pour la plupart dans le happening et le spectaculaire, ne sont pas des références pour notre travail. NF : Il peut y avoir des ressemblances formelles, après dans la pratique il me semble qu’on s’éloigne un peu de ça. En travaillant avec des gens qui mènent des actions très concrètes, nous tâchons avec nos formes d’ouvrir, plutôt que de dire ou de 39 Images politiques? Formes Vives dénoncer. C’est vraiment dans la pratique, plus que dans le discours, que nous plaçons notre engagement. C’est peut-être (pas sûr) un peu différent avec une certaine forme d’art qui s’affirme politique et s’expose presque exclusivement dans les lieux du pouvoir (ou avec le soutien de ce dernier), et sert ainsi la domination. AZ : La manière dont nous connectons une pratique artistique et une pratique de la communication n’est pas facile à expliquer, mais pour nous il y a cette certitude que le graphisme le plus intéressant, pour nous et pour toutes les personnes à qui ces objets s’adressent, c’est celui qui affirme des écritures singulières et libres, c’est un graphisme qui crée de l’altérité, qui n’est peut-être pas aussi efficace ou sobre qu’il le faudrait mais qui prend chaque objet (du tract à l’affiche, du livre au site Internet…) comme support à part entière pour faire exister un peu de générosité. Cette notion de liberté, dans le travail des formes et des sujets, renvoie à l’art. Dans un des entretiens que vous avez donné à une étudiante, vous déclarez que votre pratique est un «anti-pouvoir» en soi de manière positive, soi en apportant votre soutien à des pratiques non commerciales, égalitaire et libertaire. On sent ainsi un certain rapprochement aux idéaux situationnistes de l’autogestion proposés par Guy Debord. Comment voyez-vous ainsi la figure du «graphiste-auteur» dans le sens où son «anti-pouvoir» peut être un autre pouvoir en soi dans 40 Images politiques? Formes Vives un rapport dominant dominé ? Je pense par exemple aux nombreuses critiques que reçoit le festival de Chaumont pour son aspect trop autoritaire quant à son rapport avec les besoins du graphisme en France. AZ : Bien sûr que nous avons dû pouvoir quelque part, mais nous envisageons plutôt celui-ci comme une responsabilité publique. NF : La différence entre le «graphisme d’auteur» et la publicité (pour parler de la critique récurrente faite au Festival de Chaumont), c’est la même que celle entre le livre et les catalogues de pub. Ce n’est pas parce que ça se ressemble que c’est la même chose. On aime les images qui ne disent pas comment le monde doit être. Dans leur ouvrage «Can Jokes Bring Down Government ? Memes, Design, and Politics», le collectif de graphistes Metahaven proclame en quelque sorte la fin du graphisme politique «classique» en prenant comme exemple les Grapus. Ceci dans le sens où les réalités économiques contemporaines ne permettent plus à des graphistes de se rattacher à des institutions comme le faisait auparavant le collectif avec le Parti communiste, par exemple. L’idéal de «l’image dialogique» comme proposée par Jan Van Toorn ne pourrait donc plus exister. Les designers hollandais prennent ainsi cette citation de Thomas Hirschhorn : «Pourtant, en travaillant chez les Grapus, j’ai réalisé qu’ils fonctionnaient comme n’importe quel autre agence de publicité commerciale. Ils travaillaient pour les syndicats, pour le Par- 41 Images politiques? Formes Vives ti communiste… Mais cette prise de conscience a été un choc pour moi. Il n’y avait rien de révolutionnaire à propos de ce travail ! ». Comment s’introduit ainsi une certaine «réalité économique» dans votre travail ? Quelle distance prenez-vous par rapport aux travaux des «crapules staliniennes», auxquels on peut sentir une certaine empathie ? GP : Je ne connaissais pas cette citation de Hirschhorn, je trouve ça un peu gonflé venant de quelqu’un qui alimente le marché capitaliste de l’art contemporain. À l’inverse de Metahaven, nous ne nous posons pas comme prêcheurs d’une avant-garde graphico-politique en faisant un pseudo-état des lieux de la situation économique, sociale et politique du monde et en indiquant comment le graphiste devrait loyalement intervenir dedans. AZ : Ce que je comprends du discours des Metahaven me semble un peu prétentieux et en partie caduque, avec notamment cette théorie qu’Internet serait le nouvel eldorado des résistances ; certes, dans certains pays du Moyen Orient et d’Asie, dans un contexte de censure et de répression très forte, Internet est une des dernières planques pour entretenir et développer la subversion. En Occident la situation est différente, le maintien de l’ordre est beaucoup plus discret et pernicieux (même si très fort aussi), l’information circule assez mal quand même (Internet a un rôle ambigu à ce sujet). Par contre ici je vois de nombreuses possibilités d’agir, de nombreuses alternatives sont déjà à l’œuvre et 42 Images politiques? Formes Vives de loin, les «alternatives» mises en place sur Internet ne sont pas pour moi les plus excitantes. Et je peux difficilement comprendre ces personnes sans cesse connectées à leurs iTruc et qui entretiennent cette idée d’Internet comme fer de lance de futures révolutions (la série Black Mirror me semble d’avantage prophétique à ce sujet que les révolutions égyptiennes ou tunisiennes). Par rapport à leur production graphique, ça ne me touche absolument pas. C’est peut-être une affaire de «goût», peut-être suis-je un peu trop «à l’ancienne» pour apprécier à sa juste valeur cette avant-garde (on pourrait citer une longue liste de graphistes investis dans ce registre formel), j’y vois certes des tentatives postmodernes mais leur intérêt m’échappe. Je crois surtout que ces formes sont profondément cyniques, elles me renvoient invariablement au «droit de cuissage symbolique» très bien décrit par Vivien Philizot (NDR : l’utilistion de codes graphiques populaires par et pour la communication dominante). Hirschhorn a de son côté fait ce choix de quitter le graphisme et les contraintes liées à la communication, après avoir tenté de travailler dans le seul atelier graphique qui lui semblait intéressant (Grapus) à sa sortie d’études. Il a bien fait je crois ! Seulement nous sommes toujours étonnés par l’idée qu’un artiste serait plus libre qu’un graphiste, ou, pour prolonger la citation d’Hirschhorn, qu’un graphiste ne puisse rien faire de révolutionnaire (sous entendu 43 Images politiques? Formes Vives qu’un artiste, lui, le peut) ; certes l’artiste n’a pas les contraintes d’usage de la communication à intégrer, mais sur un autre plan, s’il souhaite vivre de son travail d’artiste, il est quasiment obligé d’intégrer le marché de l’art contemporain et ses institutions qui sont, nous le savons bien, un puissant instrument de pouvoir et une niche fiscale. D’ailleurs les Metahaven utilisent aussi des institutions d’art contemporain pour faire exister leur travail. GP : Par rapport à Grapus, nous nous sentons bien sûr très proches de leur aventure. Le collectif, l’engagement politique, l’héritage de Mai 68, la qualité et la générosité graphique, leur culot, plein de choses nous ont touchés, depuis les débuts jusqu’à la fin, survolant une période très politisée (surtout les années 1970). AZ : Certains d’entre eux sont d’ailleurs devenus des amis, des personnes que nous avons rencontrés pendant nos études et avec qui nous continuons d’échanger. GP : Pour ma part, il y a ce côté fantasmé d’une époque que je n’ai pas connu et je ne peux que m’y projeter au travers de ces images. Il y avait aussi ce collectif hollandais à peu près à la même période qui avait un engagement politique fort (notamment je me souviens de leur démarche autour de l’apartheid en Afrique du Sud) mais dont on ne parle peu, Wild Plakken (1977). Formellement aussi on peut les rapprocher de Grapus ou même d’Ostengruppe. 44 Images politiques? Formes Vives Ostengruppe. 2009. «Affiche pour le festival de Chaumont». Moscou. 45 Images politiques? Formes Vives Wild Plakken. 1980. «Zuid Afrikaanse Vrouwenda». 46 Images politiques? Formes Vives Il me semble que dans les arts en général, la période post-68 a été très forte dans son rapprochement entre des expressions esthétiques non-conventionnelles et la politique, je pense à la free press, au free-jazz, et au punk plus tard ; là encore il s’agit sûrement d’une projection, mais elle me sert d’histoire que je façonne à ma sauce, j’ai plaisir à m’y référer. Bien entendu nous prenons une certaine distance vis-à-vis des expériences de Grapus, aussi parce que plein d’autres choses nous intéressent ailleurs, aujourd’hui. NF : On n’enjolive pas le fonctionnement des Grapus ou d’autres collectifs. On essaye d’être attentifs à notre façon de travailler, à comment on fonctionne à trois. On est assez justes et bienveillants je pense. Au final, les aventures collectives (toujours compliquées) sont beaucoup plus intéressantes que l’avis de untel ou trucmuche. AZ : La réalité économique de notre travail est assez précaire même si notre optimisme ne fait pas beaucoup de place aux angoisses quant à notre avenir. Nous tâchons d’être rémunérés, ou du moins dédommagés, sur chacun de nos travaux. Il y a des travaux payés «normalement» (si l’on se réfère aux prix pratiqués par nos pairs), il y a des travaux mal payés car les structures ont de très petits moyens (mais quand on cumule ces «petits» revenus ce n’est pas insignifiant), il y a la pédagogie (qui sans l’avoir vraiment cherché est une source de revenus régulière) et il y a aussi des travaux non rémunérateurs. Tous ces travaux sont des choix, si nous les faisons c’est que 47 Images politiques? Formes Vives nous pensons pouvoir faire quelque chose d’intéressant et de stimulant, critère économique mis à part. Actuellement notre revenu net individuel avoisine les 1000 euros. Cette réalité économique est aussi celle de nombreuses personnes avec qui nous travaillons ou, plus généralement, que nous fréquentons. GP : Nous cheminons comme nous l’entendons et tentons de travailler avec des structures qui en valent la peine selon notre point de vue, il y a souvent assez peu de moyens mais nous faisons avec. Il arrive parfois que nous travaillions avec des structures plus importantes telles que des villes et dans lesquelles la volonté militante ou artistique est moins palpable, on y trouve tout de même de chouettes personnes, avec des convictions, et qui nous donnent des espaces d’expression intéressant. Tu peux tomber sur un vrai con quand tu bosses dans un lieu autogéré avec qui il n’y a pas moyen de discuter, tout comme tu peux rencontrer une belle personne dans un centre d’art subventionné qui te semblait au départ un peu puant, ce sont des situations. La réalité économique c’est aussi que nous avons décidé pour l’instant de ne pas nous tuer à la tâche, nous vivons modestement mais tout va bien. 48 Images politiques? Formes Vives On peut ressentir chez vous un certain amour du «charnel» dans le sens où on a l’impression que vous accordez une grande importance à l’objet graphique, dans son aspect au toucher, en privilégiant une certaine générosité visuelle. Je pense par exemple à vos travaux pour le Pavé ou bien pour Article 11. Comment s’introduit ainsi l’aspect de recherche graphique dans vos travaux par rapport à vos mandataires ? Quelle importance a «l’objet final» ? GP : Parce que nous sommes amateurs d’objets, collecteurs de formes, que pour nous il y a un vrai plaisir à conserver des cartes postales, les accrocher, les poser sur une étagère, nous essayons de partager ça. Il s’agit d’une attention particulière, de montrer qu’avec un même budget on peut tout de même se permettre de travailler la couleur, le papier, l’impression, le façonnage. NF : On fait souvent des trucs avec du matos cheap. AZ : L’objet final est toujours très important, il est ce qui concrétise nos idées et notre pratique, il est ce qu’on voit d’abord, il est aussi ce qui reste. Il doit nous faire vibrer. On sent également que vous poussez des structures militantes à avoir une présence marquée sur le net, comme ce fut le cas pour vous dans la création de Formes Vives. Ceci dit, je trouve qu’on remarque aussi une certaine «nostalgie poétique» des supports «classiques» du graphisme, comme l’affiche, le dépliant… L’aspect trop technique et rigide du multimédia, comme les éditions 49 Images politiques? Formes Vives pour iPad, sont-ils plus un frein pour vous ? GP : Je pense que le blog est tel un journal, une façon aussi pour nous trois, habitant des lieux différents, d’être connectés dans un travail collectif de rédaction. Pour ça c’est un bon outil, tout comme Skype que nous utilisons quotidiennement. Pour nous le blog est une chose et les «nouveaux médias numériques» une autre. Et concernant ces derniers, nous n’avons au final assez peu de connaissances, de capacités techniques sur cet outil, ce qui vient sûrement d’un scepticisme mais qu’aussi, naturellement, ça nous touche moins que le papier. AZ : Nous sommes quelque peu sceptiques en voyant la frénésie autour des smartphones, des tablettes, il y a une part de consommation compulsive derrière ces objets tandis que les multiples intérêts qu’on nous vante à leur propos nous semblent à relativiser, quand les méfaits de cette production industrielle sont franchement problématiques. NF : Il faut dire aussi, au sujet des tablettes, que personne ne nous a rien demandés pour ce support ; on apprend aussi en fonction des occasions qui se présentent. GP : Après je ne crois pas être nostalgique vu que les supports classiques vont continuer d’exister en parallèle d’Internet (tout comme la radio n’a pas fait disparaître les journaux, la télé n’a pas fait disparaître la radio, etc.), et pour nous ces supports se portent bien, on nous demande régulièrement de travailler sur des affiches, des livres, des revues… 50 Images politiques? Formes Vives AZ : Internet n’en reste pas moins un espace et un outil incontournable, il est important que des initiatives ou des structures y soient présentes dans une volonté, tout d’abord, de partage et de réseau. Sans pour autant faire de cette présence une priorité et y consacrer trop d’énergie et trop de temps. NF : On ne pousse pas à être à tout prix sur Internet, mais on pousse à le faire bien ! On aime faire des gifs animés ! Et on a un blog depuis un paquet d’années. Si ce n’est pas être connectés ! Je trouve que l’on peut sentir dans votre travail typographique une grande exigence de rigueur dans le procédé, comme c’est le cas avec la Montilla où vous avez vectorisé la calligraphie de la metteuse en scène Leonor Canales. Comment amenez-vous ce souci «macrotypographique» dans votre travail ? Et quelle importance accordez-vous à la «microtypographie» de manière générale ? NF : On aime quand c’est singulier, souvent c’est plus juste. AZ : La typographie n’est peut-être pas ce qu’il y a de plus «visible» dans notre production et pourtant nous lui attachons beaucoup d’importance, c’est un sujet d’intérêt à part entière. Elle participe grandement à la qualité de l’objet final et peut accompagner, voire lui donner, son originalité. 51 Images politiques? Formes Vives Dans le même sens, pensez-vous qu’il existe une portée politique, au sens militant, de mettre en valeur le gris de texte par «le micro» ? AZ : Étonnante dernière question. Pour moi le gris du texte est un critère visuel parmi d’autres, mais je ne politiserai pas la typographie, au-delà d’une volonté de produire des objets portant en eux une part de générosité et d’attention. NF : Il faut bien mettre en page… 52 Images politiques? Formes Vives Formes Vives. 2013. «Affiche pour l’école d’arts plastiques de Fontenay-sous-bois». 53 Images politiques? Formes Vives Formes Vives. 2013. «Carte postale «Je n’oublie pas le 28 juin 1969». Brest. Editions Ultra. 54 Images politiques? La Suisse 55 Images politiques? La Suisse Les symboles de l’affiche politique en Suisse 56 Images politiques? La Suisse Burson-Marsteller. 2006. «Forza ! Die Schweizer Bauern bleiben dran.». Zurich. Schweizer Bauern. 57 Images politiques? La Suisse Notter + Vigne 2009. «Lausanne Underground Film & Music Festival». Lausanne. LUFF. Images politiques? 59 La Suisse Images politiques? La Suisse LE POLITIQUE ENJEUX PRATIQUE 58 60 Images politiques? La Suisse Le débat entre Max Bill et Jan Tschichold, une issue très contemporaine ? À la suite de la seconde guerre mondiale, le typographe Jan Tschichold commence à douter lui-même du courant de la «nouvelle typographie» et de la nouvelle modernité typographique apparue et développée notamment grâce à lui.22 Le designer déclare ainsi que «La Nouvelle Typographie n’est sans doute pas dépassée, mais comme il a été prouvé, elle ne convient qu’à la publicité et aux petits imprimés» et que «c’est témoigner d’un zèle trop juvénile de jeter par-dessus bord les vieilles règles avec dédain, de vouloir être autrement et moderne». Il rajoute également que la Nouvelle Typographie est une des causes qui provoqua l’avancée du nazisme en Allemagne, à cause de son «attitude intolérante, (...), comme sa volonté d’ordre, sa prétention à la domination». 23 Sa déception par rapport au mouvement que le graphiste allemand a lui-même lancé est également une réponse à peine voilée à Max Bill, alors extrêmement critique de son retournement de situation, comme évoqué lors de la publication de «Über Typografie» en 1946. 24 61 Images politiques? La Suisse Pour Bill, développant son travail sur de nombreux champs artistiques, et étant engagé dans une perspective militante, comme en témoigne son investissement dans le journal Information dans les années 1930, l’abandon d’une modernité équivalait à une régression politique, morale et bourgeoise dans le sens d’une critique du style Heimat (pseudo-local, régional). 25 Tschichold répond alors que la Nouvelle Typographie laissait trop de côté les usages traditionnels de la typographie en refusant par exemple les alinéas pour les paragraphes, mettant en avant la notion de justesse stylistique. Le designer allemand ajoute également une critique dans l’absence de dimension de classe que prennent les propos de Max Bill, à propos de l’aspect trop rationalisé du travail, promu alors par l’artiste suisse, soit la rigueur, concision, le systématique et le géométrique. «Un artiste comme Bill ne se rend peut-être pas compte de ce que coûte à tous les travailleurs la mise en application des méthodes de production rationalisées, celles de l’humanité «civilisée» déclare alors Jan Tschichold, de plus en plus sceptique par rapport qu’entretiennent les ouvriers du livre avec les machines d’impression. 26 La confrontation entre Max Bill et Jan Tschichold permet de voir avec un certain recul la manière dont s’est pensé le graphisme en Suisse à cette époque-là, en plus du fait que la querelle allait refaire son apparition avec différents protagonistes, au fil du succès du style 62 Images politiques? La Suisse international. Influencé par le Bauhaus, puis l’art concret, «La Nouvelle Typographie» serait donc trop publicitaire pour l’un ou alors en constante amélioration pour l’autre.27 La dimension propre du débat graphique est intéressante, dans la mesure où il s’agit d’un des premiers du genre en Suisse, pour ce qui est de la période contemporaine du moins. Cette querelle oppose malgré elle une vision morale du graphisme et du graphiste, entre un idéal fondamentalement humaniste de la profession et une autre vision, séparant l’esthétique des questions sociales. Alors qu’il fut politicien lui-même, ardent défenseur du design graphique comme outil critique subversif, et élu au Conseil national, Max Bill repose la responsabilité du designer sur lui-même en déclarant en 1964 : «ce sont les connaissances du graphiste et sa conception du monde, ainsi que l’ampleur de et la rigueur de sa conscience, qui décident en définitive de la part de responsabilité qu’il pourra endosser.»28 Jan Tschichold, voit dès l’écriture de «La Nouvelle Typographie» en 1923, le graphiste-typographe comme le serviteur de buts sociaux orienté vers une fonction. Le designer gardera cette ligne tout au long de sa carrière professionnelle comme lorsqu’il contribue comme premier typographe chez Penguin Books de 1947 à 1949, afin de démontrer qu’une maison d’édition populaire n’est pas synonyme de mauvaise qualité 29. 63 Images politiques? La Suisse Ce regard de l’époque de l’après-guerre nous permet de mieux comprendre l’essence de l’affiche électorale de nos jours, en Suisse, car il reflète également une vision autocritique de la représentation graphique du pays lui-même, sur son «identité» construite sur une base «hypernationaliste»30, comme en témoigne la présence récurrente de l’altérité construite sur la figure de l’étranger, si présent dans les affiches politiques depuis plus d’un siècle. L’exposition «L’étranger à l’affiche. Altérité et identité dans l’affiche politique suisse 1918-2010» en est un bon exemple31. On retrouve ainsi dans l’affiche politique suisse plusieurs caractéristiques propres au système helvétique, de la démocratie directe à la représentativité la plus locale. Ainsi, lorsqu’on se promène dans les rues de Genève, il n’est pas rare de croiser sur son chemin plusieurs dizaines d’affiches à caractère électoral pour une votation à venir. On retrouve ce schéma également dans les grandes aires urbaines de la confédération, comme notamment à Zürich et Bâle. Alors que dans des pays comme la France, l’affiche électorale est propre aux grandes élections, présidentielles, législatives, ou même encore européennes, s’affichant ostentoirement dans le cadre d’une campagne politique, le système politique suisse nous conduit à croiser nos regards quasi quotidiennement sur un élément citoyen, engagé et propre à créer le débat. L’affiche électorale est donc un prolongement de l’af- 64 Images politiques? La Suisse 65 Images politiques? fiche politique, en ce sens qu’elle possède un caractère officiel et fait naturellement parti du paysage graphique suisse et des habitudes de ses habitants. Cependant, l’obsession très helvétique de la figure politique basée sur le faux idéal de «l’homme de la rue» comme clou de l’accumulation de spectacles est un regard désabusé sur l’idéal archétypal de la Suisse comme «îlot» conservé entre hypermodernité économique 32 et traditions. La pensée de l’affiche politique se reflète alors dans la «paix du travail», soit la somme des conventions collectives de travail passée entre syndicats et patronat depuis 1937, caractérisé par ses tendances à la neutralité en évitant soigneusement le conflit33. Apparaît alors le caractère du politicien «ami du peuple»34, généralement un politicien pris en image avec un contact direct avec la population, comme ce fut le cas pour la photo du Conseil fédéral en 2008. Ce statut d’être au milieu de la foule, est forcément synonyme d’un certain degré de célébrité mais apparaît également comme un modèle d’homoeconomicus vainqueur et garantisseur du professionnalisme et de la prospérité. Ainsi l’affiche qui se met en avant uniquement par le visage du politicien chercher à rassurer le citoyen, lui montrer une certaine continuité dans cette sombre époque. À cela s’ajoute la figure du visionnaire35, sous sa toute haute mission de représentativité, inspirant la confiance dans le progrès. Cette stratégie du héros Anonyme. 1942. «Die Freudin fürs Leben». La Suisse 66 Images politiques? La Suisse 67 Images politiques? La Suisse nous renvoi à la figure du militaire, dans un pays profondément marqué par son histoire de milice où il a été longtemps de bon ton d’être un haut gradé dans la société civile, même si ce constat touche plutôt les cantons alémaniques que les Romands. Quelques exemples graphiques Roland Barthes déclarait en 1971 dans son ouvrage «Sade, Fourier, Loyola» que «la meilleure des subversions ne consiste-t-elle pas à défigurer les codes, plutôt qu’à les détruire ?»36. Un bon exemple de l’application de ce principe peut se retrouver chez le designer zurichois Cornel Windlin pour son travail pour le «Museum für Gestaltung» de Zurich. La figure si mythique du Che Guevara est détournée de son aspect militant classique pour devenir un symbole économique parmi d’autres, rappelant l’aspect consumériste du graphisme, orné de cercles ou d’étoiles tagués ou encore d’un autre message «Die linke ins museum» qu’on pourrait traduire par la «gauche dans le musée». On retrouve également ce fin esprit de subversion37 pour le travail effectué par le designer pour le «Schauspielhaus» de Zurich avec Gregor Huber. Avec Conseil fédéral. 2008 «Image officielle du Conseil fédéral». Cornel Windlin. 1998. «Hoffnung und widerstand». Zurich. Museum für Gestaltung Zürich. 68 Images politiques? La Suisse 69 Images politiques? La Suisse une apparente simplicité, l’approche radicale est ici reflétée par le schéma du cercle, si propre à l’œil, avec une imagerie très fouillée, ramenant les Zurichois à leur histoire, à leur vécu. En s’accaparant ces symboles et en les réutilisant dans un mandat graphique, les deux designers remplissent donc d’une part leur mandat, mais également poussent le spectateur à réagir, à s’interroger par lui-même, mais avec également le théâtre du Schauspielhaus, en le dépassant. L’interrogation des symboles politiques est également très présente dans le travail des Zurichois de Glashaus38, où l’on retrouve Gregor Huber et Ivan Sterzinger. Dans le cadre du journal mensuel de la Rote Fabrik à Zurich, Fabrikzeitung, les graphistes s’intéressent à la création dans un sens large en s’intéressant aux procédés spécifiques de la réalisation d’images, en se spécifiant dans un des domaines à chaque édition. Ainsi, par exemple, le numéro 265 se spécialise dans le cut-up de William S. Burroughs, et le 296 sur les rapports entre la ville de Tanger et son rapport à son passé utopiste où cohabitaient Jack Keroauc et Allen Ginsberg un temps. En isolant les symboles propres aux sujets qu’ils exploitent, le collectif Glashaus amène le spectateur par la démarche du graphiste à se demander pourquoi et comment ce signe est présent et quel est finalement le sens des images auxquelles nous sommes confrontés dans notre quotidien. Cornel Windlin. 2008-2010 «Schauspielhaus Zurich». Zurich Glashaus. 2013. «Entre les deux». Zurich. Rote Fabrik 70 Images politiques? La Suisse Fogelson-Lubliner. 2008. «Surge Protector». New York. The New York Times 71 Images politiques? La Suisse Ken Garland. 1962. «Aldermaston to London easter 62». Londres. CND. 72 Images politiques? La Suisse Critiqué pour son aspect trop simplificateur, la visualisation de données serait selon le collectif Metahaven «son propre spectacle»39, en donnant une illusion de compréhension sans toutefois changer grand-chose. Au contraire de l’infographie sérieuse, se retrouve le travail du duo Fogelson-Lubliner40 pour le New York Times, en créant des graphiques «sceptiques face aux graphiques», comme ce fut par exemple le cas dans le cadre d’un article sur le changement climatique, où certains lecteurs ont confondu illustrations et information ; c’est un moyen de jouer sur les symboles et les codes. Un autre exemple est la transformation du drapeau de l’Irak en drapeau des Etats-Unis, comme symbole d’opposition au conflit qui opposa les deux pays. Nous croyons imaginer une infographie sur la guerre, en réalité il s’agit d’un moyen subversif de détourner le regard et de s’interroger dessus. Avec le manifeste «First Things First», Ken Garland dénonce dès 1964 les dérives du design graphique livré au seul marché économique, entraînant avec lui de nombreuses réactions sur l’utilité du graphisme, avec de nombreuses sympathies mais avec également beaucoup de réserves. L’activisme politique est pour Ken Garland non pas une nécessité, mais quelque chose qui est simplement présent.41 Cinquante ans après la publication du premier manifeste et de sa copie en 2000 par le magazine Adbusters, nous pouvons voir que les critiques formulés par Ken Garland viennent plutôt de sa gauche, comme ce fut 73 Images politiques? La Suisse le cas de son ami écrivain Ken Campbell, décrivant l’aspect trop corporatiste d’une telle démarche. La contribution du designer anglais au graphisme politique reste néanmoins importante. L’Anglais est l’un des premiers à appliquer une méthode rigoureuse de pensée dans ce champ du design, comme en témoigne son travail pour la lutte antinucléaire, en donnant au signe de la paix crée en 1958 par Gerald Holtom une lisibilité et une rationalité maximale. Pour l’historien de l’art David Mellor, sous les mains de Garland, le «Peace» est devenu un symbole environnementaliste fort, contrebalançant dans la rue les peintures des peintres abstraits des années soixante.42 Ken Garland. 1964. «first things first». Londres. 74 Images politiques? 75 La Suisse Images politiques? La Suisse COMMANDE ACTION CHOIX 76 Images politiques? La Suisse Les affiches politiques produites par l’Union Démocratique du Centre, UDC, sont les exemples les plus marquants de l’application d’un contexte politique particulier sur l’influence de la mise en place d’une forme graphique. L’UDC est un parti politique suisse fondé en 1971 et étant actuellement le premier du pays, représenté au Conseil national avec plus de 54 députés sur 20043. Si à la base le mouvement se voulait être défenseur des paysans, étant surnommé «parti agrarien» dans les médias helvétiques, le mouvement est aujourd’hui conservateur et libéral, en allant chercher un large électorat grâce à une doctrine populiste en faisant l’utilisation de préjugés haineux à l’égard des étrangers44. Les affiches de l’UDC font faire part des idéaux du parti d’une manière très grave, brutale, avec une radicalité qui évoque sans aucun doute les codes des partis d’extrême droite des années 1930 à jusqu’à nos jours45. Les affiches sont pensées par Alexander Segert, un publicitaire germano-suisse zurichois membre du parti et de l’agence de communication Goal à Dubendorf, dans la banlieue de Zurich. En 2010, dans un entretien donné au magazine français «Les Inrockuptibles» 46, le créateur dit vouloir s’intéresser «à l’estomac plutôt qu’au cerveau». En soi, idéalement vouloir choquer la personne confrontée à l’image, à vouloir prendre par les «tripes» plutôt qu’à la réflexion. 77 Images politiques? La Suisse Ce qui est frappant en comparaison avec les autres partis suisses, c’est que simplement, l’UDC, dans sa communication, brise les règles politiques du consensus et de la collégialité tout helvétique. Le parti agrarien propose donc une imagerie auxquelles les autres mouvements politiques ne savent pas comment répondre, comme peuvent le prouver les nombreuses copies de l’affiche «aux moutons noirs» originellement parue en 2007. La dimension graphique de l’UDC fait passer le champ de l’affiche politique dans le conflit, choses à laquelle les différents acteurs de la vie démocratique suisse ne sont pas habitués. La communication du premier parti politique suisse lui permet, grâce à des clichés racistes comme le corbeau ou le mouton noir, de déplacer le centre de gravité politique, l’agenda, vers ses priorités, ses idées, faisant de tous les autres mouvements une opposition politique forte au niveau médiatique. Un bon exemple d’affiche est celle proposée pour l’Initiative populaire fédérale «Pour le renvoi des étrangers criminels» lancée le 10 juillet 2007. Cette désormais célèbre affiche montre dans sa moitié un champ rouge, avec une croix, se référant au drapeau suisse. Sur cet espace, on aperçoit des moutons blancs, dont l’un d’entre eux chasse manifestement de l’endroit rouge un mouton noir. 78 Images politiques ? La Suisse Goal. 2009. «Stop, Ja zum Minarettverbot». Zurich. Union Démocratique du Centre. 79 Images politiques ? La Suisse Goal. 2007. «Pour plus de sécurité». zurich. Union Démocratique du centre. 80 Images politiques? La Suisse Au bas de l’affiche se trouve le message «Pour plus de sécurité» et le logotype de l’UDC, avec un message discret «Ma maison - notre Suisse». «Le jeu» de l’affiche se fait dans l’interprétation que nous faisons du mouton noir, comme couleur de peau ou comme symbole. Pour le rapporteur spécial de l’ONU au racisme, il s’agissait vraisemblablement d’un contenu xénophobe et pour la ville de Genève «une imagerie génératrice d’intolérance et d’exclusion»47. La tension identitaire étant une source «d’instrumentalisation politique» par le parti agrarien. Les reprises de l’affiche ont été nombreuses et témoignent de l’impact politique majeur qu’à effectuer l’affiche «au mouton noir». Ainsi, différents mouvements d’extrême droite ont repris ces codes ; c’est le cas du NPD allemand et de la Lega Nord en Italie48. Le symbole du «mouton noir» est donc pris comme élément graphique de l’exclusion, du tout pour nous. Ainsi aussi de nombreux partis souvent qualifiés ont repris ce code, en l’inversant ; c’est le cas du POP Suisse49, parti ouvrier populaire. qui reprend exactement la même structure d’affiche en mettant en avant un mouton blanc se faisant éjecter de la surface rouge représentée par le drapeau suisse, et portant sur lui un ruban avec le logo du parti agrarien. Dans la zone rouge se retrouvent ainsi un mouton brun, jaune et noir, évoquant une Suisse plurielle et multiculturelle. Le slogan «Pour plus de sécurité» est également détourné ; «Pour plus de diversité». Si l’on peut saluer une certaine oppo- 81 Images politiques? La Suisse sition au joug de l’UDC dans le domaine de la création graphique, on ne peut que déplorer la pauvreté visuelle qui en découle, à savoir la copie simple et formelle des codes déjà existants, quitte à jouer de la confusion. Un autre exemple vient de l’affiche pour soutenir l’initiative sur l’interdiction des minarets en 2009. Sur la partie supérieure de l’affiche, nous apercevons une femme voilée à laquelle se retrouvent des minarets sur un sol constitué du drapeau helvétique. À travers les symboles de la burka et du minaret, l’affiche prétend dénoncer le risque «d’islamisation» de la Suisse. Dressé comme un missile, le minaret évoque sans aucun doute l’amalgame fait entre islam, terrorisme international et prosélytisme religieux. Cette symbolique de la peur a été également copiée de nombreuses fois, dont notamment par le Front National en France50. Les codes de l’agence Goal sont donc devenus symboles de la Suisse, comme pays xénophobe et refermé sur lui-même. 82 Images politiques? GRAPHISTES La Suisse 83 Images politiques? La Suisse COMMANDITAIRE 84 Images politiques? Unia 85 Images politiques? Unia Le syndicalisme et les formes Un entretien avec Unia 86 Images politiques? Au sein du siège d’Unia. Unia 87 Images politiques? Unia Au sein du siège d’Unia. Lucas Dubuis, porte-parole francophone et interviewé. 88 Images politiques? Unia Ce qui m’intéresse en allant interroger le porte-parole d’Unia, un des principaux syndicats en Suisse, c’est la relation qu’entretient la base militante et active du groupe avec les graphistes. En effet, on remarque que l’association possède une charte graphique très forte, créée par le bureau Ivony : Krügel, basé à Zurich. Cette agence de design graphique n’est pas spécialement dédiée au graphisme militant comme le montre son portfolio, disponible sur son site. Ce n’est pas un mal en soi, mais la présence d’identités graphiques pour des grands groupes financiers comme LGT ou bien encore la banque CIC me fait m’interroger. Peut-on accepter de travailler comme graphiste pour un mandat qui demande une certaine prise de position, comme pour un syndicat par exemple, tout en n’ayant aucune hésitation à accepter des mandats pour des entités qu’un autre commanditaire combat ? Etrange paradoxe, et cela me pousse à regarder d’un peu plus près l’exemple de ce grand groupe politique qu’est Unia. Le syndicat actif dans le domaine privé regroupe aujourd’hui plus de 200’000 membres, ce qui en fait le plus grand groupe syndical interprofessionnel de Suisse. Il cherche à défendre les intérêts de tous les travailleurs ; soit allant de l’ouvrière en usine, de la caissière ou encore d’un employé de «call center». Unia cherche donc globalement à améliorer les conditions de travail de plus d’un million de personnes par le renforcement de la législation du travail et des fameuses conventions collectives. L’association est principalement active dans 89 Images politiques? Unia le domaine de la construction, de l’industrie ainsi que dans les arts et métiers, tout en cherchant à se renforcer dans le domaine tertiaire. Issu principalement de la fusion en 2004 du SIB, syndicat de l’industrie du bâtiment, de la FTMH, Fédération suisse des travailleurs de la métallurgie et de l’horlogerie, et de la FCTA, pour Fédération suisse des travailleurs du commerce, des transports et de l’alimentation, le syndicat est un acteur clé de la politique suisse. Malgré toutes les polémiques que traverse ce groupe, comme notamment pour sa capitalisation en bourse, j’ai pris la décision d’aller interroger ce syndicat plutôt qu’un autre, comme notamment Syndicom, celui de la communication, en raison de sa charte graphique qui m’intéressait comme système qui s’applique à l’ensemble des publications de l’association que l’on soit pour une publication à Genève ou pour Berne. Si lors des actions du groupe, on retrouve cette forte marque de l’étendard et de l’omniprésence du rouge, soit en soi, un comportement assez classique pour un syndicat, le groupe se démarque par une base graphique particulièrement uniforme et soignée dans la mise en forme des textes, comme c’est le cas dans la publication «L’Événement syndical» pour la Romandie ou encore et en Suisse alémanique avec «Work». Cette idée de charte graphique construit sur la notion de bulle, avec une typographie bâton bien placée, n’est pas sans me rappeler le système qu’avait développé Ken Garland pour le CND (Campaign for Nuclear Disar- 90 Images politiques? Unia. 2014. Extrait de la charte graphique. Unia 91 Images politiques? Unia. 2014. Extrait de la charte graphique. Unia 92 Images politiques? Unia mament) avec le fameux logo «de la paix» de Gerald Holtom. D’un autre côté, je ne peux pas m’empêcher que cette structure graphique reste dans la continuation d’un certain idéal consensuel évitant tout conflit, toute subversion… Ce qui m’intéressait avec votre charte graphique, c’est que malgré qu’on soit à Berne, Genève… On retrouve toujours votre présence forte, avec le rouge, couleur historique des syndicats et cette idée de bulle. Comment vous mettez en place votre identité visuelle par rapport à vos diverses sections cantonales ? Lucas Dubuis : Il faut rappeler qu’Unia a été fondé en 2004, et qu’avant ça on avait quatre fédérations syndicales qui avaient chacune une identité. Il y avait la FTMH, la Fédération suisse des travailleurs de la métallurgie et de l’horlogerie, un syndicat de l’industrie, il y avait le SIB, syndicat de l’industrie du bâtiment, et deux autres plus petits syndicats, un qui s’appelle Unia déjà, et encore un autre syndicat, la FCTA, qui était un collectif du tertiaire, des services. L’idée a été de fusionner ces quatre syndicats en un seul. Alors qui disait une fusion, disait une nouvelle identité visuelle (NDR : créée par Ivony : Krügel). Et pour l’identité, avec les expériences faites du SIB, alors son identité très forte déjà, dans les manifestations avec ce fameux logo, avec ses longues lettres, donnant une forte présence dans les manifs… Tu distribuais 150 drapeaux et tu avais l’impression d’avoir plus de monde, car ça allonge les manifs, ça 93 Images politiques? Unia crée de l’espace et visuellement ça avait pas mal d’impact. Alors c’est typiquement quelque chose que nous avons repris dans l’identité visuelle d’Unia. Après, l’histoire Unia, c’est «on est ensemble», avec une unicité en implantant l’identité dans toutes les régions, avec des gens qui venaient de fédérations syndicales différentes qui ont dû se mettre ensemble, souvent dans les mêmes locaux. C’était un important changement, avec l’idée d’imposer une image, une identité la plus forte possible. L’idée était aussi de faire arrêter les gens avec un certain nombre de réflexes, notamment l’utilisation de «clips-arts préférés»… Justement, je trouve que dans votre charte graphique, il y a un fort héritage d’une certaine tradition graphique suisse, avec une grande rigueur et je trouvais intéressant ce fait, par rapport au «cliché militant» avec justement l’utilisation de clips-arts de Word, une mise en page très brut… Il y a aussi une idée pratique, le but c’est de pouvoir mettre en oeuvre ça très facilement en unifiants les tracts. Mettons que le secrétaire syndical qui veut organiser une mobilisation dans une entreprise, qui a une info à faire distribuer, qui a n’importe quoi à communiquer, il faut qu’il puisse très rapidement travailler sur une template word en remplissant les cases. Ce sont des modèles word avec toujours l’idée de bulle qui revient. Alors ça peut être soit un bloc rouge avec le petit coin qui représente la bulle ou 94 Images politiques? Unia alors une sorte de container noir qui contient du texte… Ca dépend du texte que l’on va dire. Typiquement, pour un tract noir/blanc, facilement imprimable, on utilise des fontes très imposantes qui «affirment». Ca traduit notre manière de faire : le rouge c’est une couleur effectivement historique, mais aussi agressive. Lorsqu’on voit les photos de manifestations, on voit que vous ressortez clairement, ce qui montre quelque part une certaine réussite de l’identité visuelle… Oui ça nous donne de la visibilité, avec notre logo qui s’est très vite imposé. Et c’est également toujours la crainte, car lorsque tu crée une nouvelle organisation, il faut réussir à ne pas être inaperçu. En même temps, au département de communication d’Unia, il ne faut pas oublier que nous sommes le premier syndicat suisse, avec également d’importants moyens financiers, à relativiser bien sûr par rapport à d’autres départements émanant du privé. La communication à Unia a donc été mise en avant par rapport à l’extérieur, en s’imposant dans les médias et dans la rue. L’identité visuelle participe de cette volonté. En même temps, je trouvais intéressant l’idée que dans le contexte suisse, le succès d’une initiative pourrait reposer sur une image forte, un certain idéal qu’on retrouverait dans une affiche largement exposée. Je pense par exemple à l’initiative 1:12 avec les fameux hamburgers ou dans le camp bourgeois avec «la saucisse». 95 Images politiques? Unia C’est vraiment une question de communication, c’est toujours la question entre le contenu et le contenant… Les deux y participent. Tu ne peux pas vendre quelque chose de mauvais avec un bel emballage. Les gens vont se trouver trompés sur la marchandise ! Il faut que design se rapproche de plus en plus du contenu. Dans l’exemple du hamburger, c’était une affiche que je trouvais très réussie car elle ne laissait personne indifférent. Et puis, elle avait réussie à synthétiser en une image, toute la problématique. Soit, il y en a qui gagnent tellement qu’ils peuvent s’acheter des hamburgers gigantesques, sans toutefois pouvoir les manger, car ce n’est pas rationnel d’avaler une telle quantité de nourriture, et donc qui va forcément pourrir… Alors que voilà les gens qui ont un appétit normal en mangent un et sont rassasiés. On montre donc le contraste dans la métaphore alimentaire, l’idée d’inégalité dans les richesses. C’est clair que nos adversaires, typiquement l’UDC, arrivent à imposer des images fortes dans leurs campagnes… Par exemple, récemment avec Guillaume Tell et l’arbre d’Hodler. Oui, par exemple les moutons noirs, qui ont crée un vrai débat national… Après on ne va pas communiquer dans les mêmes formes de langages, pour des raisons éthiques mais aussi le message que l’on doit faire passer est plus compliqué qu’un message populiste. évidement. Les hamburgers étaient quelque chose de plus combatif, il est vrai, de plus simple. 96 Images politiques? Unia Comité interpartis. 2013. Affiche «Légaliser les saucisses à rôtir» 97 Images politiques? Unia Comité interpartis. 2013. Affiche «12x plus de salaire, ça suffit. 1:12 oui ! 98 Images politiques? Unia Dans la fameuse affiche «Saucisse», on peut aussi voir l’arrivée d’un ton un peu humoristique dans le champ politique. Est-ce que vous trouvez ça plutôt inquiétant, ou on contraire, car cela amène des personnes par forcément intéressées à la politique. Bon, concernant l’affiche «Saucisse», je me demande si beaucoup de gens ont compris… C’est un slogan très alémanique, qui ne marchait pas tellement en Romandie… Il s’agissait plus d’un délire d’agence de communication plutôt que de la communication politique. Est-ce inquiétant ? Effectivement, si on arrive à passer des messages avec humour, ça serait pas mal mais la chose politique ne se prête pas tellement au «drôle». Et ça peut être contreproductif dans un certain côté, car cela peut tomber à plat. D’ailleurs, même si nous avons perdu la votation sur les shops, l’idée de la saucisse mangée au milieu de la nuit comme le montrait l’affiche s’est fait beaucoup contredire. L’effet de l’affiche était donc un peu cassée. Mais bon… Il est vrai que la communication politique mériterait parfois d’être un peu dépoussiérée. Quand on voit ces affiches, beaucoup sont vraiment ennuyeuses…. Oui, il y a souvent la reproduction de mêmes modèles, parfois depuis les années nonante… Pour revenir à l’exemple de l’hamburger, il est vrai que cela dénotait… Après, notre affiche contre les vols des rentes, qui était justement un peu plus « pop- 99 Images politiques? Unia uliste» avec l’idée du Conseil fédéral qui voulait baisser le taux de conversion du deuxième pilier, et donc baisser les retraites avec la même épargne… On dénonçait ça comme du vol et on avait fait quelqu’un qui vole un porte-monnaie dans un sac à main. On avait été affiché partout et on avait gagné avec un taux très important… Bien sûr l’affiche n’est pas le seul facteur mais c’était un message très simple… On dit «on vous vole» et on met quelqu’un qui vous vole, c’est assez basique mais assez efficace. De nouveau, il faut dire que synthétiser un discours politique sur une affiche, c’est très difficile. Dans ce sens, est-ce qu’il existe des réunions entre syndicats, partis politiques où vous discutez des formes graphiques qui vont être mises en place ? Oui, justement, nous avons fait ce travail pour la campagne sur le salaire minimum qui démarre maintenant, avec des discussions à l’interne d’Unia, avec des gens qui participent au groupe de conception du matériel de campagne, et aussi avec la coordination organisée par l’USS (Union Syndicale Suisse). Ils développent aussi leurs supports pour cette campagne. On a eu dans le passé des différences entre la campagne de l’USS et la campagne d’Unia, et des fédérations membres (Unia fait partie de l’USS, NDR). L’Union Syndicale Suisse a souvent une communication assez lisse, très institutionnelle, très classique, presque informatif. Chez Unia, on avait plutôt une communication plus «catchy», plus agres- 100 Images politiques? Unia sive, en essayant de trouver des solutions originales. Souvent pour le même objet, plusieurs syndicats développaient leurs supports, ce qui faisait une multitude d’affiches dans les cantons, ce qui nuisait à la lisibilité. Maintenant, on essaye de trouver un slogan collection pour tous les syndicats, l’USS… Avec des messages simples, des objets simples, c’est plus facile à faire que des objets plus complexes ou il y aurait des enjeux différents pour les différents syndicats. On ressent dans la publication «Work», le journal d’Unia alémanique, un côté un peu «tabloïd», presque proche du «Blick», alors qu’avec «L’Evénement», journal d’Unia romand, on trouve une identité plus proche des journaux de genre classique, comme Gauche Hebdo, Le Courrier… Est-ce c’est expliquer par une certaine différence culturelle, ou c’est juste lié aux graphistes en charge ? C’est surtout lié à la ligne éditoriale ! Chez «Work», il est vrai que c’est plus agressif, plus lié à l’anecdotique, sur les faits et gestes d’un tel, d’une action, des attaques. Pour «L’Evénement syndical» on est vraiment plus dans la réflexion, la communication du syndicat, de manière pas très polémique. Nous sommes dans l’affirmation des idées que dans l’attaque des idées des autres. Le ton est différent et dans ce sens la ligne éditoriale du «Work» colle bien à leur graphisme. Les articles courts font plus penser au «Blick» effectivement. Pour les deux journaux, le fond rejoint la forme ! Il y a aussi une différence 101 Images politiques? Unia d’approche, mais je n’en sais pas plus. «L’Evénement syndical» et le «Work» sont indépendants d’Unia, même s’ils sont financés par nous. Comment structurez-vous à Unia vos rapports à vos graphistes, dans le sens, où l’identité visuelle avait été réalisée par une agence de communication. Existe-t-il des designers en interne ou fonctionnez-vous uniquement avec Ivony : Kruger ? On ne travaille plus avec cette agence de communication. Elle a développée le concept mais il est mis en application à l’interne par nos graphistes. Et aussi à l’externe, lorsqu’on mandate de temps en temps. Les régions mandatent aussi des graphistes, parfois pour leur communication. Les externes doivent donc appliquer notre charte graphique de manière rigoureuse. Nos graphistes maisons sont donc «gardiennes du temple», on va dire. Et puis, ce sont elles qui sont très pointues sur le respect des règles et qui sont plus «aptes» à analyser un document mandaté. Bien sûr, je verrai très vite des choses évidentes qui serraient fausses mais sur la précision, mise en forme des textes, respect de l’interligne… C’est assez précis ! (rires) Oui, nos deux graphistes sont très rigoureuses sur le sujet. Elles sont à Zurich et cela représentation pour les deux un postes à 100 %. 102 Images politiques? Unia Unia. 2014. Extrait de la publication «L’Evénement syndical». 103 Images politiques? Unia. 2011. Extrait de la publication «Work». Unia 104 Images politiques? Unia Les graphistes ne sont pas à Berne, avec vous ? Non, car historiquement, elles travaillaient auparavant pour le SIB, il me semble. Les graphistes sont restés à Zurich, ce qui fait que l’on communique énormément par e-mail, par téléphone. J’avoue ça ne facilite pas toujours le travail, comme quand on doit juste modifier une chose. Ca serait plus simple qu’elles soient là, il est vrai. En même temps, nos deux graphistes sont dans un flux de travail assez tendu, avec beaucoup de production et elles sont donc un peu préservées de nous… C’est vraiment elles qui se préoccupent du design appliqué «à la lettre». On voit qu’Unia possède une forte présence sur le papier, mais est-ce que vous pensez que des structures combatives passeraient de plus en plus par le web, par des applications pour «smartphones» ? Au niveau de la communication online, nous sommes présents, après sur le web, on planche sur un nouveau site web, ce qui représente un boulot énorme. L’ancien a déjà dix ans, ce qui fait un peu vieillot et désuet, pas beau… Je trouve que votre site marche justement plutôt bien, ce qui n’est le cas de tous les syndicats. Oui mais l’idée est d’être aussi sur d’autres types de supports, comme les smartphones, les tablettes, ce qui n’est pas le cas actuellement. On travaille donc sur un site qui s’adapte à plusieurs médias, avec justement une possibilité pour les régions de communi- 105 Images politiques? Unia quer par elles-mêmes et aussi pour nous à la centrale nationale. On est donc toujours dans les deux niveaux pour notre communication et garantir une unité. Entre Zurich et Genève… Voilà, mais aussi pour, mettons le secrétariat de la vallée de Joux ou bien voilà les tessinois… On est dans une communication globale. On développe des identités propres à chaque campagne. Une page Facebook par exemple. On est dans une communication Unia, assez fort, avec des photos, des images fortes. On annonce la couleur. J’ai aussi remarqué ces cinq dernières années qu’il y avait de plus en plus de la part de parti de gauche, une reprise des codes de l’UDC, avec le fameux «mouton noir» comme ce fut le cas du POP par exemple. Est-ce que vous trouvez ça dommage d’un certain côté car c’est répondre par une voie graphique un peu simpliste ? En tout cas, on ne reprendra jamais l’affiche d’opposants, même en la maquillant. Après, pourquoi pas pour rire, pour un post sur Facebook, par exemple. Cela montera aussi que l’on est à court d’idées, et c’est une attitude qui n’est pas à adopter. Dans la communication politique, l’UDC a imposé un style… 106 Images politiques? Unia Le conflit ? Oui, et si on fait abstraction de leurs idées détestables, ils ont imposé un style direct qui était jusqu’alors inconnu en Suisse, surtout dans les campagnes de parti. On a vu aussi qu’ils avaient un certain succès… Il y a donc aussi quelques éléments à en retirer pour notre propre communication. Il y a dans les méthodes de l’UDC dans choses qui sont reprises par certains partis et après cela dépend des objets des votations. Comme je l’ai dit, il est très difficile de synthétiser sur une affiche un ensemble d’idées politiques. C’est plus facile de le faire lorsqu’on est populiste et que l’on veut détruire des choses. Comme le MCG à Genève, par exemple ? Oui, des logiques simplistes. Si on veut faire passer un message simplement, on va toujours le faire de la manière la plus directe possible. Après, on ne va pas mentir aux gens, ce que l’on dit, on le pense ! Le populiste, c’est vraiment très simple… Le populiste amène donc des formes très simples, malheureusement de fait, comme encore avec l’exemple du «mouton noir»… Exact et à Unia, on essaye d’avoir une identité forte comme dans les manifs, les banderoles, les organisations… Et c’est un message à l’extérieur mais aussi à l’intérieur, pour nos membres, qu’ils appartiennent à Unia, le plus grand syndicat de Suisse, pour se bouger ensemble sur les causes que l’on défend. Et cela 107 Images politiques? Unia développe un sentiment d’appartenance. C’est un principe d’unité, la base d’une identité… Tout personne qui réfléchit à l’identité d’une marque a envie de créer ça ! Et je pense qu’on y est arrivé à Unia. Après certaines personnes ont de la peine à se retrouver dans cette identité un peu trop masculine, un peu agressive. Typiquement, les groupes d’intérêts féminins au sein du syndicat trouvent que ce n’est pas toujours adapté. De manière caricaturale, il y a déjà eu des tracts : Unia le syndicat de la vente, avec une belle photo de manif avec plein de maçons et des drapeaux (rires). Si l’on va distribuer ça à des vendeuses, c’est… pas trop leur style, d’aller dans la rue et de gueuler avec un mégaphone. C’est un peu différent selon les branches. Les groupes d’intérêts féminins, féministes, trouvent qu’il faudrait développer quelque chose de plus adapté. Après, ça devient compliqué, car on ne peut pas non plus se permettre de décliner notre identité parce que l’industrie aimerait une petite roue dentée à la place du point du i d’Unia, les jeunes veulent une étoile, les féministes des flyers violets… On ne peut pas se permettre un éclatement de notre identité. Les gens se retrouvent aussi là-dedans… Je ne vous ai pas demandé de vous présenter… Je m’appelle Lucas Dubuis et je suis porte-parole francophone d’Unia. 108 Images politiques? La typographie étirée 109 Images politiques? La typographie étirée La typographie étirée et le mème, le «lolmmunisme» 110 Images politiques? La typographie étirée POPULISME DISCOURS SIMPLISTE FORMES PAUVRES 111 Images politiques? La typographie étirée Le cas des affiches du Mouvement Citoyen Genevois est particulièrement intéressant dans sa mise en pratique. Pour ce parti qu’on pourrait qualifier de «populiste», fondé en 2005 et niant sa xénophobie fait place à «une priorité aux Genevois» en mettant en avant des slogans foncièrement anti-frontaliers, soit les travailleurs français vivant au-delà des frontières du canton de Genève51. Pour l’anecdote, en 2010, le gouvernement genevois avait pris l’initiative de censurer une des affiches du mouvement populiste car mettant trop en avant l’ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi52. L’affiche est ici pensée que d’une manière à propager un large écho médiatique, sans souci visiblement de l’esthétique, au contraire des affiches de l’Union démocratique du centre, l’UDC. Devenu le deuxième mouvement politique en voix du canton, le parti obtient 19,23 % des suffrages le 6 octobre dernier. Sa stratégie d’une communication simple, voir simpliste serait-il donc la recette de son succès ? Premièrement, ce qui peut surprendre, ce sont la multitude des langages graphiques utilisés dans les différents supports utilisés. Sur un exemple d’affiche, nous pouvons remarquer un slogan au langage simple, «moins de frontaliers, moins de chômeurs, non à la loi sur le chômage, qui serre la vis aux résidents genevois», dans une typographie Arial étirée, qui recherche à évoquer simplement un contexte de crise mais témoigne aussi d’un certain amateurisme. Une bande rouge et jaune, couleurs de Genève, survole sur l’affiche sur 112 Images politiques? La typographie étirée Mouvement citoyen genevois. 2011. «Frontaliers assez !». Genève. 113 Images politiques? La typographie étirée Metahaven. 2012. «Wikileaks project». Amsterdam 114 Images politiques ? La typographie étirée 115 Images politiques? La typographie étirée son flanc gauche, dans un but avoué d’identité visuelle puisque nous retrouvons cet élément graphique sur la plupart des éléments graphiques du parti. Une conclusion un peu hâtive pourrait nous faire croire que finalement, l’identité graphique d’un mouvement politique n’aurait que peu d’influences sur son électorat ou/et ses militants. Il s’agit d’un constat également aperçu dans les travaux du collectif Metahaven pour leur recherche sur l’identité visuelle de Wikileaks en 2011. Le groupe de graphistes voit dans l’utilisation de l’Univers d’Adrian Frutger étirée une sorte de référencement intellectuel à l’histoire de la fonte mais aussi à son passé commercial53,54,55. L’idéal aussi d’étirer son esprit, «stretching the mind», est très fort chez le collectif hollandais, qui cherche à combiner le desgin graphique avec l’investigation et la recherche. C’est également une réflexion sur «ce sursaut du visible» provoqué par Internet qui remet en question la bonne lisibilité d’une typographie56. Soit pour Wikileaks le passage d’un simple réseau, site sans identité, à un réseau médiatique ramené en la personne de Julian Assange57. De la page web anonyme à la coiffure du créateur de Wikileaks, Internet a ramené le service à une véritable marque. L’étirement témoigne donc aussi d’une certaine barrière contre tous les éléments intangibles du web, insaisissables, en faisant le lien avec la standardisation provoquée par le style international suisse et l’esthétique web58. Mouvement citoyen genevois. 2011. «Assez !». Genève. 116 Images politiques? La typographie étirée 117 Images politiques ? La typographie étirée Le rapprochement avec les affiches «amateur» du MCG se retrouve chez Metahaven dans la condition temporelle «d’exigence du temps» et d’alerte, au dehors des considérations esthétiques opposant l’utilisation de l’Arial et de l’Univers. L’élongation, c’est donc dénoncer le fait que le design graphique soit devenu une sorte de «censure haute résolution», venant de la décision de publier quelque chose, quoique ce soit. Cette décision entre le designer et la publication trame l’information et l’étirement sont un moyen de le dénoncer, de promouvoir une sorte de transparence de la connaissance. C’est aussi un moyen de rabâcher un message en le voulant simplement plus visible… L’élongation pour, c’est donc dénoncer le fait que le design graphique soit devenu une sorte de «censure haute résolution» entre le designer et le commanditaire. Metahaven. 2012. «Wikileaks project». Amsterdam 118 Images politiques ? La typographie étirée 07 Deterritorial support group. 2011. «But». Londres. Deterritorial support group. 2011. «Educate». Londres. Deterritorial support group. 2011. «Egypt». Londres. Deterritorial support group. 2011. «The post-political». Londres. 119 Images politiques? La typographie étirée Chez l’éphémère59 collectif DSG, pour Deterritorial Support Group, la question du graphisme témoigne d’une volonté de résistance face au refus de la gauche, en particulier britannique, de quitter le carcan de la social-démocratie tout en mettant en évidence la condition de plus en plus précaire d’une certaine partie de la jeunesse européenne, cantonnée à subir des stages non payés (#internstrikenow), comme notamment dans le secteur de la création et du design graphique60. Selon DSG, puis repris par Metahaven, dans leur essai «Goatse as Industrial Sabotage», le groupe suggère que le «Goatse», une très dérangeante image d’un homme étirant son anus, est le retour de l’image dialogique de Jan Van Toorn. L’idée qu’un design présente plusieurs messages conflictuels en forçant son interlocuteur à adopter un point de vue critique est selon les DSG un point important qui ressurgit dans la figure du mème, à savoir ici le «Goatse» 61. Le mème serait donc ici un rejet de la culture du travail post-fordiste en passant par l’humour, pour rejeter le culte de la mise en valeur de soi-même, de ses softs skills, comme un produit de vente aux employeurs. Le groupe prend pour exemple une publicité Fanta ou le mème Goatse est introduit discrètement afin que ceux qui le reconnaissent rigolent par eux-mêmes. Pour les DSG, cette blague fera peut-être rire qu’une seule personne, peut-être vous, mais vous serez connectés à des centaines d’autres gens sur la planète qui comprennent ce symbole. Il s’agit donc de formes dynamiques 120 Images politiques? La typographie étirée et vivantes, presque comme un logotype qui possède un élément vendeur certain. De fait, le mème est une sorte d’avant-garde du commerce, coincé entre son aspect humoristique, vendeur et diffusable à l’international mais aussi terriblement réducteur, peu subversif et quelque peu décevant pour le designer. En effet, le mème est devenu une sorte d’identité visuelle par lui-même, un même symbole pour des milliers de combinaisons de messages différents. Comment peut se placer le graphiste dans ces messages ? En s’autosabordant, à savoir à ne plus suivre un processus de design pour une tache demandée ? Un constat plutôt décourageant se voit dans un contexte où l’humour (le mème) du site web 4chan est utilisé dans des campagnes politiques comme avec l’arrivée du lolcats dans des campagnes politiques en Suisse, et aux EtatsUnis par exemple62. 4chan est un forum d’images anonyme fondé en 2003 et étant réputé pour être la base du mouvement collectif Anonymous, mais étant surtout le repère des fameux «trolls» d’Internet. Si on s’imagine le designer comme un simple fournisseur d’outils, alors 4chan est comparable à une démarche de design. Le mème serait donc devenu une sorte de poster politique comme le fut auparavant le symbole de la paix, par exemple63. C’est aussi le symbole de l’érosion du rôle social du designer graphique comme médiateur d’une institution, passant d’une relation entre mandataire et man- 121 Images politiques? La typographie étirée daté à un simple reflet de la réalité sociopolitique dans laquelle s’introduit aujourd’hui le designer64 Pour faire court, le mème est devenu malgré lui un symbole de l’appauvrissement du designer lui-même et de sa discipline. Deterritorial support group. Goatse as industrial sabotage. 2011 Parti démocrate chrétien. Campagne pour le Grand Conseil Genève. 2013. Le mème est un élément, une idée, une forme repris et décliné en masse sur Internet. Voici ici le mot ECAL associé au fameux mème «Bad Luck Brian». 122 Images politiques? La typographie étirée 123 Images politiques? La typographie étirée L’exemple du Shutdown 124 Images politiques? 125 La typographie étirée National Park Service U.S Department of the Interior L’arrêt des activités gouvernementales fédérales de 2013 aux Etats-Unis est un bon exemple de mise en place de stratégies graphiques face à un contexte nécessitant des décisions rapides. En effet, du 1er octobre au 16 octobre 2013, plus de 800 000 employés fédéraux se sont retrouvés au chômage technique, ce qui a eu pour effet de nombreuses conséquences sur l’ensemble de l’état fédéral américain65. Le traitement médiatique du «Shutdown» fut majeur, au point que certains médias parlent d’une «catastrophe symbolique», laissant «le reste du monde ébahi»66. L’objet de lutte étant principalement le programme d’assurance-maladie du gouvernement démocrate, «l’obamacare». Ces mesures ont dû provoquer en urgence l’impression d’affiches et de messages annonçant la nouvelle de la cessation partielle des activités gouvernementales américaines. En ce sens, la plupart des agences gouvernements ont dû «improviser» le message d’information7. Si nous prenons l’exemple des Parcs Nationaux Américains, dans le haut de l’affiche se trouve une bande noire avec le nom de l’agence gouvernementale affectée, relevant du ministère de l’intérieur américain et du service des parcs nationaux avec deux typographies utilisées, la Frutiger d’Adrian Frutiger et une fonte «corporate», la NPS Rawlinson OT développée par James Montalbano. Les deux fontes sont disponibles sur le site web des Parcs Nationaux américains si l’on est employé. La bande noire est composée uniquement en Frutiger avec le message «National Park Service Images politiques? La typographie étirée 126 Images politiques? La typographie étirée 127 Images politiques? La typographie étirée U.S Department of the Interior». Il s’en suit un autre message «Because of the Federal Gouvernment SHUTDOWN, All National Parks Are CLOSED.» Ce dernier est intéressant dans sa composition car s’il est aussi en Frutiger, le lettrage condensé est légèrement étiré et composé en corps gras dans sa deuxième partie. Cette méthode d’étirement des fontes, typiques des outils informatiques contemporains et notamment de l’utilisation de logiciel de composition comme Word se retrouvent fréquemment dans un contexte de crise et dans des ateliers de graphisme travaillant dessus comme vus avec Metahaven ou les anciens DSG (Deterritorial Support Group). Il est aussi intéressant de voir qu’une composition typographique couramment jugée comme «fausse», en soi étirée, donc ne correspondant plus au dessin originel, soit utilisée par un des principaux acteurs gouvernemental américain, montrant finalement le peu d’importance accordé au statut d’une typographie. Pour le monument de la Statue de la liberté, il s’agit de l’affiche produite par la compagnie de transports «Statue Cruises» dans le cadre de l’arrêt des activités gouvernementales américaines. On retrouve le message écrit en majuscules «Important», suivi du «Gouvernment Shut-down», écrit avec un tiret. Le texte est composé en ITC Legacy Sans dessinée par Ronald Arnholm en 1992, une fonte produite pour la lecture de texte. Une image «type» de la statue de la liberté se retrouve sur l’affiche ainsi que le logo de la compagnie American Shutdown, National Park Service. 2012. Interprétation American Shutdown, National Park Service. 2012. Image Kevin Lamarque American Shutdown, National Park Service. 2012. Image Daniel Schwen American Shutdown, Statue of Liberty. 2012. Image Twitter 128 Images politiques? La typographie étirée de transports. Plus bas dans l’affiche, une flèche indique le sens du message «Important» pour guider le regard. Un second message se détache des événements : «The Government has temporarily shut down both the Statue of Liberty and Ellis Island». On voit une affiche qui utilise les codes classiques du genre pour informer les personnes concernées, à savoir les personnes voulant visiter la statue de La Liberté. Un espace important de l’affiche est pour montrer la gravité du message transmis avec le simple message «IMPORTANT Gouvernment Shut-down». Le musée situé à Washington D.C a transmis le message du «Shutdown» par un simple panneau blanc suspendu indiquant la fermeture du musée en raison des événements politiques. Le texte est composé en Bembo, caractère italien revisité par le Britannique Stanley Morison en 1929. Sa simplicité évidente laisse transparaître un message neutre, moins «extravagant» que les précédentes affiches. Le rapport à l’institution, culturelle, se tisse alors dans la grande sobriété que reflète l’affiche. 129 Images politiques? La typographie étirée THE NATIONAL GALLERY OF ART IS CLOSED DURING THE SHUTDOWN OF THE FEDERAL GOVERNEMENT Pas d’étirements, pas des couleurs, pas d’images, juste un simple message «image». American Shutdown, interprétation de l’affiche pour la National Gallery of Art. 2013 130 Images politiques? La typographie étirée 131 Images politiques? La typographie étirée L’INVISIBLE LE POLITIQUE L’INVISIBLE 132 Images politiques? Les traces 133 Images politiques? Les traces Les traces du politique invisibles 134 Images politiques? Les traces 135 Images politiques? Les traces Comment voir la chose politique qui nous entoure ? Peut-être en l’isolant, en s’arrêtant un peu plus longtemps sur les structures de domination qui consolident notre quotidien, que l’on soit spécialiste du signe ou non. Il s’agit donc ici de quelques extraits d’éléments à l’air plus ou moins invisibles, à un niveau plus ou moins local, qui engendrent, à mon sens, directement un rapport de soumission aux symboles dominants. Images politiques? Les traces 137 Images politiques? Les traces H S Le décor du Flon à Lausanne mélange bizarrement installations contemporaines et restauration rapide pour le plus grand plaisir des amateurs de haute gastronomie. 02 C A L 01 A F A I M 136 Le reflet des logotypes des magasins sur le distributeur permet de ne pas oublier comment se servir de son argent. Images politiques? Les traces 139 Images politiques? Les traces 04 I À la sortie d’une boîte de nuit, la présence d’une infirmerie collée à celle-ci tranche assez cyniquement avec le logotype du lieu. H S 03 I P J A M A I S 138 On retrouve le motif inspiré de la culture hip-hop dans une zone commerciale fortement dense, mais à l’abri des magasins. Images politiques? Les traces 141 Images politiques? Les traces F D 06 P L’ancienneté du logotype tranche avec l’hypermodernité voulue dans ce quartier anciennement populaire et indépendant. . T 05 R A N S P O R T S 140 Il est navrant de sentir la fonction «copier-coller» sur les installations datant des années nonante avec des formes vectorielles très présentes. Images politiques? Les traces 143 Images politiques? Les traces B 08 E Le motif «taggeur» reste synonyme d’un caractère d’«opprimé» pour s’adresser à un type de public susceptible de trouver cette image attirante. Ainsi on le retrouve par exemple sur une caravanne de fête foraine. L F 07 Ê T E É F O T O R N A I N E 142 Ce pictogramme qui interdit de jouer au football renvoi vers ce décor de béton «joyeux» auquel sont astreints les habitants de ce quartier. Images politiques? Les traces 145 Images politiques? Les traces 10 E Un panneau neutre de vente de glace «local» peut aussi cacher une idéologie identitaire forte. L F 09 Ê T S E J E F U N O R E A S I N E 144 L’iconographie du hip-hop comme message de communication pour les adolescents témoigne d’un certain mépris pour l’univers musical du rap et la jeunesse. Images politiques? Les traces 147 Images politiques? Les traces U P 12 A Espace d’affichage commun à Genève dans le quartier des Pâquis. La diversité des quartiers se reflète aussi sur la mise à disposition d’espaces publics et sur les affiches en elle-même, renvoyant vers un certain contexte actuel. L A 11 F F I C H B L I A G C E I T L É I B R E 146 Affichages publicitaires à Genève La publicité est le simple reflet d’un marketing agressif voulant imposer ses ambitions sur le passant, sur la ville en lui créant artificiellement des besoins. Images politiques? Les traces 149 Les traces D T Ç A S A 14 L L’affichage à caractère culturel est souvent cantonné à des espaces spécialement prévus à ses fins. On pourrait observer que l’argent reste un des facteurs dominants pour son exposition ; un spectacle ayant du succès aura une affiche plus «grande» et donc logiquement un espace d’affichage plus conséquent pour asseoir son visuel. F A I R O M U H 13 Images politiques? E E 148 L’utilisation du super-héros comme symbole graphique reste associée à un idéal genré de l’homme musclé comme «sauveur» d’une situation particulière. En conséquence, une prétendue supériorité sous-entendue d’un genre sur un autre. Images politiques? Les traces 151 Images politiques? Les traces U T O 16 A La figure de l’homme héros est un caractère genré de domination d’un genre sur l’autre. S’y ajoute également l’animal, le berger allemand, connu pour ses qualités de «chien chasseur». L’œil présent sur le logotype veut présenter une figure sécuritaire mais elle ne renvoi que vers une oppression et un idéal menaçant. L S 15 É C U R I T R É 150 L’architecture fonctionnaliste donne une impression de bâtiment utilitaire mais également sinistre et extrêmement connoté graphiquement. Images politiques? Les traces 153 Images politiques? Les traces I S L U C X Les panneaux d’affichages publics sont un bon moyen de connaître la diversité culturelle d’un quartier, d’une ville à échelle importante. On peut remarquer que dans ce quartier moins dense que le précédent, le panneau est moins rempli que le premier. Les panneaux d’affichages publics sont aussi un moyen pour certains groupes de faire connaître leurs opinions comme en témoigne ici ce journal public - Eteins ta télé ! 18 L ’ E A 17 F F I C H A G E F L I B R E * 152 On retrouve des publicités pour des objets de luxe à côté d’espaces de nuit prisés pour le sentiment d’exclusivité que ces lieux apportent. Images politiques? Les traces 155 Les traces C 20 E La typographie étirée témoigne d’un certain empressement capitalistique d’un souci «de rentabilité» par rapport au temps passé. On accentue l’impression que l’acte d’achat, ici pour embarquer sur un bateau, doit se faire rapidement, d’où cette idée d’élongation des lettres. U L O T Images politiques? L L 19 E B A T E A U 154 La présence du slogan «eat the rich» contraste avec le logotype d’une multinationale de l’alimentation rapide. Les traces 157 Les traces C K S S I E 22 L Les manchettes renvoient directement aux prises de positions d’un journal ainsi qu’à une certaine sensibilité de ses journalistes. E S T P R L A 21 Images politiques? E R Images politiques? E 156 La communication d’associations politiques minoritaires s’effectue souvent sur des parcelles urbaines délaissées ou peu regardées. Les traces 159 B Les traces 24 L Il est intéressant de relever qu’un logotype d’une assurance, ici la Zurich, paraît d’un aspect beaucoup plus «sérieux» et «rassurant» que celui d’un office d’emplois temporaires. E P A O J N U 23 Images politiques? R T I Images politiques? ? 158 Nous pouvons observer que la façade d’un des plus vieux partis politique suisse n’a pas changé depuis des années. Images politiques? Les traces 161 Images politiques? Les traces C 26 A U Ici on accentue la pression de l’achat, comme s’il était normal de remplir son caddie uniquement de fruits et légumes. Le code-barres accentue la notion d’achat rapide et le stress que celui-ci peut engendrer. S 1 25 0 0 % I S B S I E O S 160 L’utilisation de typographies bâtons, dont notamment l’Univers et l’Helvetica font partie, dans le domaine de la restauration renvoi au passé utilitariste et purement économique de ces typographies. Images politiques? Les traces 163 Images politiques? Les traces N E 28 I Le système suisse implique une forte présence de l’affiche politique, comme ici sous-gare à Berne. On assiste également à de plus en plus de duel opposant les mêmes codes graphiques pour des idées politiques contraires. B S 27 O U S - P G A R L A C E É 162 Le bâtiment de la Banque nationale suisse est placé juste à côté du palais fédéral, siège du Conseil fédéral et de l’Assemblée fédérale. Images politiques? Les traces 165 Images politiques? Les traces R V 30 E Le Rolex Learning Center, lieu appartenant à l’École polytechnique fédérale de Lausanne rappelle combien il est important que l’instruction publique reste libre et indépendante. S S 29 I À 5 E Z 0 - A N S V O U S … 164 Comment un simple message publicitaire placardé à Londres peut rappeler une situation économique douloureuse, teintée d’inégalités. 166 Images politiques? Les traces 167 Images politiques? Les traces Isoler les traces du politique visibles 168 Images politiques? Les traces 169 Images politiques? Les traces Ce mémoire m’amène donc à considérer les éléments structurant l’affiche politique, en m’intéressant à chacun d’entre eux, de par leur singularité. Il s’agit donc ici d’isoler chaque élément pour en démontrer son individualité, en dehors du sens premier auxquels le signe était destiné. Et ce fut une surprise, car de nombreuses pièces d’affiche isolées démontrent finalement une certaine légèreté dans la communication engagée en Suisse. On note ces dernières années un langage populiste de plus en plus présent, amenant avec lui des logiques communicatives simplicistes, appauvrissant le discours politique et le débat citoyen. Les traces 171 Les traces C 02 E Extrait d’une affiche proposée par un comité anonyme antifasciste. Genève. 2013 X - G A U C A U G X E 01 Images politiques? H E Images politiques? H E 170 Extrait d’affiche du parti «Solidarités», 2013 Les traces 173 Les traces R É 04 G Extrait d’une affiche de la jeunesse socialiste, octobre 2013 A U C H E M O D É R É É O D M H E C A U G 03 Images politiques? E Images politiques? E 172 Extrait d’affiche du Parti Socialiste, septembre 2012 Les traces 175 Les traces T R 06 C Structure des affiches du Parti Démocrate-Chrétien (PDC), 2014. E N T R N E C 05 Images politiques? E Images politiques? E 174 Extrait d’un support de communication web du PDC. 2014 Les traces 177 Les traces I 08 D Extrait d’une affiche contre l’initiative du Groupe Suisse sans armée, GSSA. 2013 R O I O R D 07 Images politiques? T E Images politiques? T E 176 Extrait d’une affiche contre le prix unique du livre. Parti Libéral-Radical. 2012. Les traces 179 Les traces I 10 É Extrait du logotype «nucléaire non merci», 1975 - aujourd’hui C O L O G I G L O O C É 09 Images politiques? E Images politiques? E 178 Extrait d’une affiche des Verts, Genève, septembre 2005 Les traces 181 Les traces T 12 E Extrait de l’affiche pour l’initiative sur les minarets, UDC, 2009 X . D R O I T I O R D . X E 11 Images politiques? E Images politiques? E 180 Extrait d’une affiche des jeunes UDC Valais, 2011 Les traces 183 Les traces H 14 E Extrait de POP Info, février 2013 X . G A U C H C A U G . X E 13 Images politiques? E Images politiques? E 182 Extrait d’affiche du parti «Solidarités», 2013 Les traces 185 Les traces R É 16 G Extrait d’affiche du Parti Socialiste, septembre 2012 A U C H E M O D É R É É O D M H E C A U G 15 Images politiques? E Images politiques? E 184 Extrait de la campagne du PS pour le grand conseil, GE, 2013 Les traces 187 Les traces T R 18 C Extrait d’une affiche du PDC suisse, 2007 E N T R N E C 17 Images politiques? E Images politiques? E 186 Extrait d’une affiche du PDC suisse, 2007 Les traces 189 Les traces I 20 D Extrait d’un support de communication web du PLR, 2013 R O I O R D 19 Images politiques? T E Images politiques? T E 188 Extrait d’une affiche du PLR contre l’initiative sur les accords internationaux, 2012 Les traces 191 Les traces I 22 É Extrait du logotype des Jeunes Verts, Genève, 2014 C O L O G I G L O O C É 21 Images politiques? E Images politiques? E 190 Extrait du logotype du Réseau Objection de Croissance (ROC), Suisse, 2014 Les traces 193 Les traces T 24 E Extrait d’une affiche des Jeunes UDC Valais, 2011 X . D R O I T I O R D . X E 23 Images politiques? E Images politiques? E 192 Extrait de l’affiche pour l’initiative sur les minarets, UDC, 2009 Les traces 195 Les traces H 26 E Extrait d’une affiche «Le boss vous baisse», CGAS, 2011-12 X . G A U C H C A U G . X E 25 Images politiques? E Images politiques? E 194 Extrait du logotype «La Gauche» Les traces 197 Les traces R É 28 G Extrait d’une affiche de la Jeunesse Socialiste, octobre 2013 A U C H E M O D É R É É O D M H E C A U G 27 Images politiques? E Images politiques? E 196 Extrait de la campagne du PS pour le Grand Conseil, GE, 2013 Les traces 199 Les traces T R 30 C Extrait d’une affiche du PDC Suisse, 2011 E N T R N E C 29 Images politiques? E Images politiques? E 198 Extrait d’un support web du PDC, 2014 Les traces 201 Les traces I 32 D Extrait de la campagne contre l’initiative 1:12 R O I O R D 31 Images politiques? T E Images politiques? T E 200 Extrait d’un support de communication web du PLR, 2014 Les traces 203 Les traces I 34 É Extrait d’une affiche des Verts Genève, 2013 C O L O G I G L O O C É 33 Images politiques? E Images politiques? E 202 Extrait du logotype «Stop OGM», 2012 Les traces 205 Les traces T 36 E Extrait de l’affiche «contre les abus», UDC, 2009 X . D R O I T I O R D . X E 35 Images politiques? E Images politiques? E 204 Extrait d’une affiche des Jeunes UDC Valais, 2011 Les traces 207 Les traces H 38 E Logotype du parti «Ensemble à Gauche», 2013 X . G A U C H C A U G . X E 37 Images politiques? E Images politiques? E 206 Bannière du parti «La Gauche», 2012 Les traces 209 Les traces R É 40 G Extrait d’une affiche pour l’initiative 1:12, 2013 A U C H E M O D É R É É O D M H E C A U G 39 Images politiques? E Images politiques? E 208 Extrait du logotype de la Jeunesse Socialiste, 2014 Les traces 211 Les traces T R 42 C Extrait d’un support web du PDC, 2014 E N T R N E C 41 Images politiques? E Images politiques? E 210 Extrait d’un support web du PDC, 2014 Les traces 213 Les traces I 44 D Extrait de la campagne de P.Keller pour le Conseil national, 2011 R O I O R D 43 Images politiques? T E Images politiques? T E 212 Extrait d’une affiche pour la loi sur le travail, 2013 Les traces 215 Les traces I 46 É Extrait d’une affiche des Verts Genève, 2013 C O L O G I G L O O C É 45 Images politiques? E Images politiques? E 214 Extrait d’une affiche des Verts, 2013 Les traces 217 Les traces T 48 E Logotype du journal «Il Mattino», 2014 X . D R O I T I O R D . X E 47 Images politiques? E Images politiques? E 216 Extrait de l’affiche «Pour plus de sécurité», 2007 Les traces 219 Les traces H 50 E Logotype du journal «L’Anticapitaliste», 2014 X . G A U C H C A U G . X E 49 Images politiques? E Images politiques? E 218 Extrait du logotype du Parti Ouvrier Populaire, 2014 220 Images politiques? Les traces 221 Images politiques? Les traces Parti Bourgeois Démocratique, droite Parti Pirate, centre Les Verts, gauche modérée à centre droit Les Verts libéraux, gauche modérée à centre droit Union Démocratique du Centre, extrême droite Parti Évangélique Suisse, droite à extrême droite Parti Socialiste, gauche modérée au centre Parti Démocrate Chrétien, centre 00 P A R T I S P O L I T I Q U E S Parti Libéral-Radical, droite Parti Ouvrier Populaire, du travail, ex. gauche 222 Images politiques? Les traces 223 Images politiques? Les traces 2 1 23 01 Logotype du parti «La Gauche», actif aujourd’hui 02 Extrait d’affiche du parti «Solidarités», 2013 03 Extrait de POP info, février 2013 04 Extrait d’une affiche «le boss vous baisse», cgas, 2011-12 05 Extrait de POP info, février 2013 06 Extrait de la campagne pour le non à la loi sur l’asile, 2012 07 Extrait de l’affiche de Solidarités pour le conseil d’état vaudois, 2012 08 Extrait d’une affiche de Solidarités, 2011 09 Extrait d’une affiche contre le seuil d’intolérance, CUAE, 2000 10 Extrait d’une affiche de Solidarités, 2012 11 Logotype du journal «L’Anticapitaliste», 2014 12 Logotype du parti Ensemble à Gauche, 2013 13 Logotype du parti Ensemble à Gauche, 2013 14 Extrait du journal de Solidarités, 2012 15 Logotype du parti ouvrier Populaire, 2012 16 Extrait d’une affiche contre la loi sur les manifestations, GE, 2012 17 Bannière du parti «La Gauche», 2012 18 Extrait de la campagne pour le non à la loi sur l’asile, 2012 19 Extrait d’une affiche d’Antifa. ch, 2012, re p. 23 20 Extrait d’une bannière de Solidarités, GE, 2013 21, 22 Logotypes de La Gauche et Solidarités 3 21 22 4 20 5 19 18 6 7 17 8 9 16 10 15 11 E 01 X . G A U C H E 14 12 13 224 Images politiques? Les traces 225 Images politiques? Les traces 1 01 Extrait d’une affiche de la Jeunesse Socialiste, octobre 2013 02 Extrait d’affiche du Parti Socialiste, septembre 2012 03 Extrait d’affiche du Parti Socialiste, septembre 2012 04 Extrait d’une affiche de la Jeunesse Socialiste, octobre 2013 05 Extrait de la campagne du PS pour le grand conseil, GE, 2013 06 Extrait du logotype de la Jeunesse Socialiste, 2014 07 Extrait de la campagne du PS pour le grand conseil, GE, 2009 08 Extrait du logotype de la Jeunesse Socialiste, 2014 09 Extrait d’une affiche du Parti Socialiste, 1995 10 Extrait d’une affiche du Parti Socialiste, GE, 2013 11 Extrait d’une affiche pour l’initiative 1:12, 2013 12 Extrait d’une affiche du Parti Socialiste, 2009 2 3 4 5 6 5 8 7 9 11 12 G 02 A U C H E M O D É R É E 10 13 226 Images politiques? Les traces 227 Images politiques? Les traces 1 01 01 Identité des affiches du PDC, 2014 02 Extrait d’un support web PDC, 2014 03 Extrait d’affiche du PDC Genève, 2013 04 Extrait d’une affiche du PDC Suisse, 2007 05 Extrait d’une affiche du PDC Suisse, 2011 06 Extrait d’une affiche du PDC Suisse, 2011 07 Extrait d’un support web du PDC, 2014 08 Extrait d’un support web du PDC, 2014 09 Extrait d’une affiche du PDC, 2011 2 02 03 04 05 06 07 08 C 03 E N T R E 09 228 Images politiques? Les traces 229 Images politiques? Les traces 01 01 Extrait du logotype «nucléaire non merci», 1975 - aujourd’hui 02 Extrait d’une affiche des Verts, septembre 2005 03 Extrait du logotype des jeunes Verts Genève, 2014 04 Extrait du logotype des décroissants, 2014 05 Extrait du logotype «stop OGM», 2012 06 Extrait d’une affiche des Verts Genève, 2013 07 Extrait d’une affiche des Verts Genève, 2013 08 Extrait d’une affiche des Verts Genève, 2013 09 Extrait d’une affiche des Verts, 2012 10 Extrait du logotype «nucléaire non merci», 1975 - aujourd’hui 11 Extrait d’une affiche des Verts, 2013 12 Extrait d’une affiche des Verts, 2013 02 03 06 08 04 05 07 09 10 É 04 C O L O G I E 11 12 230 Images politiques? Les traces 231 Images politiques? Les traces 01 01 Extrait d’une affiche contre l’initiative du GSSA, 2013 02 Extrait d’une affiche contre le prix unique du livre, 2012 03 Extrait d’une affiche contre l’initiative ASIN, 2012 04 Extrait d’un support de communication web du PLR, 2013 05 Extrait d’un support de communication web du PLR, 2013 06 Extrait de la campagne contre l’initiative 1:12 07 Extrait de la campagne de PS.Keller pour le conseil national, 2011 08 Extrait d’un support de communication web du PLR, 2013 09 Extrait d’une affiche du PLR, 2013 10 Extrait d’un support de communication web du PLR, 2013 11 Extrait du logotype du PBD, 2014 12 Extrait d’une affiche du PLR, 2013 13 Extrait d’une affiche du PBD, 2012 14 Extrait d’une affiche du PLR, 2013 15 Extrait d’une affiche pour la loi sur le travail, 2013 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 D 05 R O I T E 14 13 15 232 Images politiques? Les traces 233 Images politiques? Les traces 01 02 03 04 05 01 01 Extrait de l’affiche pour l’initiative sur les minarets, UDC, 2009 02 Extrait de l’affiche «contre les abus», UDC, 2009 03 Extrait de l’affiche pour l’initiative sur les minarets, UDC, 2009 04 Extrait du logotype du MCG, 2014 05 Extrait du logotype de vigilance, années 1980 06 Extrait d’une publication du MCG, 2011 07 Extrait de l’affiche pour l’initiative sur les minarets, UDC, 2009 08 Extrait d’une affiche des jeunes UDC Valais, 2011 09 Extrait du logotype de l’union démocratique fédérale 10 Logotype du journal «il mattino», 2014 11 Extrait d’une affiche des jeunes UDC Valais, 2011 12 Extrait d’une publication de la Lega di ticinesi, 2012 13 Extrait d’une affiche de la Lega di ticinesi, 2012 14 Extrait du logotype de l’UDC Valais, 2014 15 Extrait du logotype du mouvement citoyen genevois, 2014 16 Extrait de l’affiche «contre les abus», UDC, 2009 17 Extrait de l’affiche «pour plus de sécurité», UDC, 2007 18 Extrait d’une affiche du MCG, 2012 02 03 07 06 08 09 10 11 12 13 14, 15 T E 16 E 06 X . D R O I 17 18 234 Images politiques? Pour conclure... 235 Images politiques? Pour conclure... En quittant ce travail de mémoire me vient à l’esprit plusieurs sentiments. Il m’est difficile de conclure ce qui est censé être un écrit de fin d’études. En effet, j’ai eu l’occasion d’apprendre de nombreuses choses dans le cadre de cet exercice, comme avec les deux entretiens menés, avec l’atelier Formes Vives, pour voir une pratique graphique concrètement engagée, le syndicat Unia, pour tenter de comprendre comment fonctionnait graphiquement une grande structure politique, ou encore en m’intéressant au projet de manifeste mené par Ken Garland dans les années soixante. Je termine néanmoins ce projet avec un sentiment d’inachevé. La sphère politique, que l’on soit en Suisse, ou non, est un champ très vaste et le cadre de ce travail de mémoire ne me permet évidemment pas de tout couvrir, de tout comprendre. Cet ouvrage m’a néanmoins fait comprendre que la profession apprise dans le cadre dans ma scolarité, graphiste, ne doit pas s’isoler du domaine politique et social en se voulant être comme une bulle isolée avec ses propres codes. Le graphiste doit se montrer en effet plus actif dans ces secteurs, s’il ne veut pas voir les succès populistes s’accumuler en Suisse. Le système helvétique offre en effet une chance unique, même si cadrée, aux designers graphiques d’interagir directement avec leur entourage, de s’engager. Nous avons vu depuis trop longtemps maintenant des discours pauvres amenant des formes simplicistes dans l’espace public, appauvrissant de fait aussi le débat politique et nous-mêmes. 236 Images politiques? Bibliographie 237 Images politiques? Bibliographie Bibliographie Webographie 238 Images politiques? Bibliographie 1- Annick Lantenois, «Le vertige du funambule», Paris, Editions B42, 2010, P. 13 2 - Annick Lantenois, «Le vertige du funambule», Paris, Editions B42, 2010, P. 13 3 - Pierre Bourdieu, «La Distinction : Critique sociale du jugement», Paris, Éditions de Minuit, 1979 4 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 53 5 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 7 6 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 17 7 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 17 8 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 155 9 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 155 10 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 156 11 - Frederike Huygen, Lex Reitsma «The Style of the Stedelijk», Amsterdam, nai010 publishers, 2012, P. 13-14 12 - Frederike Huygen, Lex Reitsma «The Style of the Stedelijk», Amsterdam, nai010 publishers, 2012, P. 13-14 13 - Frederike Huygen, Lex Reitsma «The Style of the Stedelijk», Amsterdam, nai010 publishers, 2012, P. 13-14 14 - Frederike Huygen, Lex Reitsma «The Style of the Stedelijk», Amsterdam, nai010 publishers, 2012, P. 13-14 15 - Frederike Huygen, Lex Reitsma «The Style of the Stedelijk», Amsterdam, nai010 publishers, 2012, P. 13-14 16 - http://www.eyemagazine.com/feature/article/ugly-beautiful-extract le lundi 3 février 2014 17 - http://maxbruinsma.nl/index1.html?vantoorn_FR. htm le lundi 3 février 2014 18 - http://www.eyemagazine.com/review/article/we-need-a-hero le lundi 3 février 2014 19 - http://www.eyemagazine.com/feature/article/reputations-ken-garland le lundi 3 février 2014 20 - http://www.eyemagazine.com/feature/article/reputations-ken-garland le lundi 3 février 2014 21 - http://www.kengarland.co.uk/KG % 20graphic % 20design/cnd/index.html le lundi 3 février 2014 22 - Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005, P. 326-329 23 - Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005, P. 326-329 24 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 125-128 25 - Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005, P. 326-329 26 - Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005, P. 326-329 239 Images politiques? Bibliographie 27 - Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005, P. 326-329 28 - Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005, P. 409 29 - Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012, P. 129 30 - Museum für Gestaltung Zürich, «Paradise Switzerland», Zurich, Lars Müller, 2010 P. 29 31 - Francesco Garufo, Christelle Maire «Altérité et identité dans l’affiche politique suisse 19182010», Neuchâtel, Editions Alphil. 2013 32 - Museum für Gestaltung Zürich, «Head to Head», Zurich, Lars Müller, 2010 P. 24-27 33 - Jean-Jacques Bouquet, «Histoire de la Suisse», Paris, PUF, 2013 34 - Museum für Gestaltung Zürich, «Head to Head», Zurich, Lars Müller, 2010 P. 24-27 35 - Museum für Gestaltung Zürich, «Head to Head», Zurich, Lars Müller, 2010 P. 24-27 36 - Roland Barthes, «Sade, Fourier, Loyola», Paris, Editions du Seuil, 1971 37 - Richard Hollis, Back Cover 5, «Cornel Windlin : le designer graphique en tant qu’artiste ?», Paris, Editions B42, 2012 38 - http://www.glashaus.ch/uebersicht.php?typ=fabrikzeitung le vendredi 7 février 2014 39 - http://next.liberation.fr/design/2013/05/29/la-visualisation-de-donnees-devient-son-propre-spectacle_906707 le vendredi 7 février 2014 40 - Laura Forde, Back Cover 5, «Rencontre avec Fogelson-Lubliner», Paris, Editions B42, 2012, P. 22-25 41 - Adrian Shaughnessy, «Ken Garland : Structure and Subtance», Londres, Unit Editions, 2012, P. 44-50 42 - Adrian Shaughnessy, «Ken Garland : Structure and Subtance», Londres, Unit Editions, 2012, P. 44-50 43 - http://en.wikipedia.org/wiki/Swiss_People’s_Party le vendredi 7 février 2014 44 - Francesco Garufo, Christelle Maire «Altérité et identité dans l’affiche politique suisse 19182010», Neuchâtel, Editions Alphil. 2013 45 - http://blogs.rts.ch/passe-present/affiches-politiques-quand-l’udc-renoue-avec-les-annees-30/ le vendredi 7 février 2014 46 - http://www.lesinrocks.com/2010/11/28/actualite/alexander-segert-le-pubard-qui-boostelextreme-droite-1123008/ le vendredi 7 février 2014 47 - http://icp.ge.ch/po/cliotexte/fin-du-xxe-siecle-et-debut-du-xxie-siecle-actualites/affiches-deludc-en-suisse le vendredi 7 février 2014 48 - http://blog.mondediplo.net/2011-10-18-L-UDC-des-moutons-noirs-aux-rangers le vendredi 7 février 2014 240 Images politiques? Bibliographie 49 - http://blog.lefigaro.fr/suisse/2010/11/suisse-la-guerre-des-affiches.html le vendredi 7 février 2014 50 - http://rue89.nouvelobs.com/regions-en-campagne/2010/02/25/le-fn-repompe-une-affichesuisse-contre-les-minarets-140392 le vendredi 7 février 2014 51 - http://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_citoyens_genevois le vendredi 7 février 2014 52 - http://www.letemps.ch/Page/Uuid/1cbd172a-dd53-11df-8de7-92ad7282a89e|0 le vendredi 7 février 2014 53 - http://www.theverge.com/2013/12/19/5223620/hi-res-censorship-metahaven-on-edwardsnowden-and-rebranding-wikileaks le vendredi 7 février 2014 54 - http://joelvacheron.net/visual-culture/metahaven/ le vendredi 7 février 2014 55 - Metahaven, «Can Jokes Bring Down Governments», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 56 - http://joelvacheron.net/visual-culture/metahaven/ le vendredi 7 février 2014 57 - http://www.theverge.com/2013/12/19/5223620/hi-res-censorship-metahaven-on-edwardsnowden-and-rebranding-wikileaks le vendredi 7 février 2014 58 - http://joelvacheron.net/visual-culture/metahaven/ le vendredi 7 février 2014 59 - http://deterritorialsupportgroup.wordpress.com/2011/12/21/autonomy-tonight-utopia-tomorrow-dsg-is-over/ le vendredi 7 février 2014 60 - http://deterritorialsupportgroup.wordpress.com/2011/12/07/ten-growth-markets-for-crisis/ le vendredi 7 février 2014 61 - http://deterritorialsupportgroup.wordpress.com/2011/09/27/goatse-as-industrial-sabotage/ le vendredi 7 février 2014 62 - Metahaven, «Can Jokes Bring Down Governments», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 63 - Metahaven, «Can Jokes Bring Down Governments», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 64 - Metahaven, «Can Jokes Bring Down Governments», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 65 - http://www.washingtonpost.com/blogs/wonkblog/wp/2013/09/30/absolutely-everything-youneed-to-know-about-how-the-government-shutdown-will-work/ le vendredi 7 février 2014 66 - http://en.wikipedia.org/wiki/United_States_federal_government_shutdown_of_2013#cite_ note-WaPost-Plumer-2013-09-30-2 le vendredi 7 février 2014 67 - http://en.wikipedia.org/wiki/United_States_federal_government_shutdown_of_2013#cite_ note-WaPost-Plumer-2013-09-30-2 le vendredi 7 février 2014 241 Images politiques? Bibliographie Metahaven, «Can Jokes Bring Down Governments», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 Metahaven, «Uncorporate identity», Zürich : Lars Müller Publishers, 2010 Formes Vives, «Citoyen Graphiste», Paris : École nationale supérieure des arts décoratifs, 2008 Pierre Bernard, «Mon travail ce n’est pas mon travail : Design pour le domaine public», Zürich : Lars Müller Publishers, 2006 Pier Vittorio Aureli, «Less Is Enough», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 Keller Easterling, «The Action Is the Form», Londres, Moscou : Strelka Press, 2012 Robin Kinross, «La Typographique moderne», Paris, Editions B42, 2012 Catherine de Smet, «Pour une critique du design graphique», Paris, Editions B42, 2012 Norman Potter, «Qu’est-ce qu’un designer», Paris, Editions B42, 2012 Annick Lantenois, «Le vertige du funambule», Paris, Editions B42, 2010 Bruno Munari, «L’art du design», Paris, Pyramyd, 2012 Francesco Garufo, Christelle Maire «Altérité et identité dans l’affiche politique suisse 19182010», Neuchâtel, Editions Alphil. 2013 Roland Barthes, «Sade, Fourier, Loyola», Paris, Editions du Seuil, 1971 Frederike Huygen, Lex Reitsma «The Style of the Stedelijk», Amsterdam, nai010 publishers, 2012 Pierre Bourdieu, «La Distinction : Critique sociale du jugement», Paris, Éditions de Minuit, 1979 Roxane Jubert, «Graphisme, Typographie, Histoire», Paris, Flammarion, 2005 Museum für Gestaltung Zürich, «Paradise Switzerland», Zurich, Lars Müller, 2010 Museum für Gestaltung Zürich, «Head to Head», Zurich, Lars Müller, 2010 Ce livre a été réalisé par MateoBroillet à l’École cantonale d’art de Lausanne en février 2014. Il s’agit d’un travail de mémoire de troisième année réalisé sous la supervision de Deodaat Tevaearai et d’Alexandru Balgiu. Je remercie vivement toutes les personnes qui m’ont aidé à réaliser cet ouvrage. Impression Laser 242 pages Papier Gmund 100 gr. Typographie Times Ten, Times Monotype