LE PORT VIEUX DE LA CIOTAT
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LE PORT VIEUX DE LA CIOTAT
1 LE PORT VIEUX DE LA CIOTAT Du port abri des origines au port moderne d’aujourd’hui, les infrastructures portuaires de La Ciotat, ont été profondément modelées par l’évolution la nécessité d’apporter aux navires qui y séjournaient, une protection suffisante et aussi par l’évolution des techniques de construction navale qui n’ont cessé de s’améliorer, se complexifier, entre les barques de pécheurs d’autrefois, et les navires très sophistiqués d’aujourd’hui. Ce sont ces mutations successives du Port Vieux, que nous allons tenter d’exposer, depuis la création des môles jusqu’à la situation contemporaine. A l’origine, soit avant la création de La Ciotat en 1429, le port était des plus rudimentaires ; pas de quais, pas de digue pour se protéger de la mer et des vents de sud et d’est. Seuls les secs forment obstacle aux vents dominants de nord-ouest, le mistral. On ne trouve hélas aucun croquis montrant le port d’origine. Les seules iconographies dont nous disposons montrent l’enceinte portuaire dotée de ses deux môles, le « môle vieux » et le « môle neuf ». Le port en 1810 Le port de nos jours L’ensemble de ce chapitre est extrait de « L’histoire de la Construction navale à La Ciotat » tome 1 de Yves LAGET et de l’ouvrage de BONNAFE 2 I - Description du port de La Ciotat à la fin du XVIIIe siècle Le port vieux autrefois CITHARISTOE La vieille ville et les deux moles 1780 Entre Marseille et Toulon, au fond d'un golfe abrité par une montagne, se trouvait à une date déjà lointaine, un point de la côte provençale qui était un lieu de ravitaillement, de pêche et de refuge, réunissant toutes les conditions voulues et nécessitées par la navigation de cette époque. Ces avantages attirent les pêcheurs, les navigateurs et aussi les pirates qui débarquent soit au pied du Sec, au Mugel ou au Pré, soit à Figuerolles. Ils trouvent là des plages au fond de calanques abritées, de l'eau en abondance et au surplus, des bois qui couvrant les collines de Ste Croix jusqu'à Cassis et vers le Cannet, leur offraient .des matériaux et des refuges en cas de poursuites. Quelques estacades en bois pour faciliter l'embarquement ou le débarquement des marchandises, quelques pieux pour amarrer les bateaux, constituaient toute l'installation de ces mouillages. Ce port, dont les rares habitants se réfugiaient en cas d'attaque des pirates sur les hauteurs de Ceyreste, était connu sous le nom de Cytharistoe. Voici ce que dit l’ouvrage intitulé « Pilote côtier » paru en 1805 : « … de l’autre côté du cap de l’Aigle, tirant vers le nord environ un mille, est la ville de La Ciotat… Son port est fait en forme de fer à cheval et sur la gauche en entrant, on voit deux petits môles qui renferment le port : celui du dehors s’appelle le môle neuf et l’autre le vieux. A la point de la droite en entrant, il y a une petite forteresse pour défendre l’entrée : les galères mouillent ordinairement entre ces deux môles mais il n’y en peut contenir que sept à huit, en conillant leurs rames, c’est-à-dire, les tirant en dedans ; elles doivent tourner la poupe vers le môle neuf et s’amarrent à quatre de part et d’autre, n’ayant seulement qu’une ancre de la droite vers le nord ; elles y sont par dix, douze et quinze pieds d’eau, fond d’herbe vaseux… Il peut aussi mouiller quatre à cinq galères dans le port, proche les vaisseaux qui y sont, suivant leur nombre : il y a dix à douze pieds d’eau ; même fond, observant de ne pas s’approcher du côté de la ville qui est le moins profond mais bien sur la gauche, outre qu’on serait trop à découvert de la mer du large. Lorsqu’on veut entrer, soit entre les deux môles ou dans le port, il faut ranger la tête du môle où il y a un crucifix à cause de quelques roches qui s’avancent sous l’eau, à la pointe du château. 3 On peut faire de l’eau fort aisément à une fontaine qui est dans un pré du côté de l’ouest, tout proche. Le traversier de ce port est le vent d’est-sudest ; mais étant dans le môle il n’y a rien à craindre, d’autant que l’île Verte couvre de la mer et du vent du large… On peut mouiller au-dehors du môle neuf, à deux ou trois longueurs de câbles par quatre, cinq et six brasses d’eau mais il ne faut pas y passer la nuit… ». sont pas encore de mise et n’ont pas modifié le paysage. Pour imaginer le port dans l’Antiquité, il faut faire abstraction des deux môles et des constructions à terre, fort, murailles, chapelles et habitations. Extrait du portulan Ollive 1664 XVIéme siècle La construction de môle vieux 1539: Le tonnage des navires augmentant, le tirage à terre devient de plus en plus difficile à réaliser. Le golfe de La Ciotat C’est succinct mais le tableau est complet et tous les problèmes que connaît le port au moment de la rédaction de ce texte se retrouveront jusque dans la première partie du XIXe siècle. On note un fond inégal avec très peu de profondeur par endroits et des roches sournoises surtout près de l’emplacement du fort. Avantage très net de cet abri, le point d’eau, qui bien avant la fontaine coulait tout naturellement sous le forme d’une source, la « Source du Pré ». L’abri est tellement bien protégé du vent dominant, le mistral, que l’auteur ne le mentionne même pas. Seul le vent d’est-sud-est est néfaste mais les deux môles sont là pour en atténuer les effets. Lors de la rédaction du « Pilote côtier », la topographie du lieu a peu évolué depuis les origines. Les grands travaux portuaires ne Le besoin d’augmenter la protection offerte par l’abri naturel se fait sentir. La sécurité par vent d’Est doit être assurée impérativement. Il ne s’agit pas de créer ex-nihilo un port mais de consolider ce qui existe ou de l’améliorer par la construction d’un môle protecteur. Au mois de juin 1539, une délibération de la commune cite un procèsverbal diffus et incomplet : il est question de « barquades de pierres à porter au môle avant StMichel ». Cette phrase traduit l’existence antérieure d’un môle de pierre qu’il faudrait consolider ou plus simplement d’une première estacade en bois (pour accéder plus facilement au bateau). L’estacade en question servirait de guide pour empierrer le môle. Les travaux entrepris doivent être conséquents puisque deux ans après la première mention des travaux, le Conseil de la cité délègue un commissaire, nommé Peyron Bermon, alias Galhardon, à la « facture du mol », autrement dit du môle. Il devient 4 urgent de faire « exécuter l’ordonnance touchant ceux qui doivent payer d’argent, tant par maison ou par chef de famille pour la facture dudit mol ». Le Conseil en précise * les modalités d’acquittement de la dette par les intéressés : « Chaque barque payera une barcada de peyres et un homme pour le mol et que ceux qui n’auront pas de barques iront avec les patrons ». La décision précédente est prise le 24 juin 1543 et le 8 septembre de la même année deux « prud’hommes, Carle Fougasse et Bertrand Marin, sont commissionnés pour cueillir l’argent de ceux qui ont une barque : deux états sont établis, un pour ceux qui ont une barque entière et un pour ceux qui n’en ont qu’une partie ». construiront pendant la durée de la construction du môle ». La réparation ou la finition du môle prend de l’ampleur. Une fois terminé, il mesure 70 cannes de long (soit 136,64 mètres exactement), 7 cannes de large (soit 13,66 mètres) et sur le milieu, une muraille de 6 pans de hauteur sur 3 de largeur (soit 1,46 m sur 0,73 m, le pan valant 24,4 cm sous l’ancien régime). Jusqu’à l’avènement des Messageries au milieu du XIXe siècle, cet ouvrage existera et sera désigné sous le vocable de « môle vieux ». Peinture « romantique » du port vieux Sept années plus tard, le môle est terminé mais il se dégrade déjà et les Consuls décident de le « faire refaire, rhabiller et dresser ». Comme toujours, il est besoin d’argent. Les ressources de la Communauté étant limitées, il est décidé de faire appel un taxe exceptionnelle et tout le monde doit mettre la main à la poche. Pour les agriculteurs et gens du terroir, « un dizain est imposé sur tous les fruits du terroir, blé, avoine, orge, raisin et figues ». Pour les propriétaires de bateaux, « il est exigé un écu d’or sol ou un demi écu par centenal suivant la jauge ». Les constructeurs d’embarcations ou de navires sont soumis à un barème identique pour « les barques qui se Tableau de J. B. de La Rose 1664 Le môle neuf 1560/1573 : Il est décidé dans la foulée, de construire un deuxième môle. La décision en est prise en 1558 et les premiers travaux débutent deux ans plus tard. En 1573, ils ne sont pas terminés et la Communauté délibère pour son achèvement et sa « perfection ». Les travaux traînent en longueur et leur ampleur semble dépasser les possibilités pécuniaires locales. Depuis 1481, la Provence est française et le roi Henri III vient au secours des finances de la Communauté en signant un arrêt le 12 mars 1582 « permettant et confirmant les travaux 5 du château, des murailles, du port et du môle ». Le môle en question est le second et prend bientôt sa désignation de « môle neuf ». Lui aussi sera toujours en fonction lors de l’arrivée des Messageries. Le XVIIe siècle Le Chantier de l'Escaret Le nouveau môle est établi à 60 cannes (117 mètres) du môle vieux. Il mesure 125 cannes de long sur 7 de largeur (244 m sur 13,50 mètres). Les activités du chantier naval se déroulent sur l’emplacement occupé par le futur chantier Benet, trois cents ans plus tard. Une délibération de la Communauté nous en fournit la description. La zone occupée par les gens de mer s’étend d’une part entre le môle vieux et le chemin du Pré et d’autre part et entre le môle vieux et le fort St-Antoine. Au Nord, ces terrains sont bordés par le rivage ; au Sud et à l’Ouest, par la chapelle St-Antoine, la Savonnerie, N-D des Calfats qui était placée juste à la naissance du vieux môle et enfin, la chapelle St-Elme appartenant à la Communauté et le plan de l’Escaret (ou Escalet), lieu chois pour la construction des bateaux. Le port en 1776 Jusqu'à cette époque, il semblerait qu'aucun remplacement bien précis et défini n'ait été affecté à la construction des bâtiments. -1601 – Mais, en 1601, le Conseil Général de la Communauté "décide à l’unanimité des voix, Au cours du siècle, la bourgade de La Ciotat s’est agrandie en passant d’une trentaine d’habitations à un millier. Elle est maintenant entourée de murailles, possède un petit fortin, une église et une tour. qu'en dehors du lieu désigné, il ne se fabriquera plus aucune barque neuve depuis le Fort de St Antoine jusqu'au môle neuf de St Antoine et point aussi au port de St Esprit, mais seulement pourront se fabriquer depuis la plateforme du môle La topographie du port change avec la présence des deux môles. La Ciotat devient une ville présentant la panoplie complète des activités maritimes avec des chantiers navals, un commerce maritime et une industrie artisanale de pêche. Ses habitants sont charpentiers de marine ou exercent des métiers connexes, marins, armateurs et commerçants. vieux jusqu'à l'Escaret, en payant un droit de 15 livres par 100 quintaux de port. " Cette délibération fut confirmée par celles de 1603, et 1611, qui imposent à ceux qui ne se conformeraient pas à ce règlement une amende de 30 livres. Un arrêt de la Cour du Parlement de Provence du 2 août 1611, portant défense aux "cy-dénommés et à tous autres du dit lieu de construire n'y fabriquer aucune barques, ni vaisseaux, aux endroits 6 prohibés par les délibérations de la dite communauté sur les peines y contenues." En 1617, les Consuls de la commune décident de bâtir un quai : « faire une ribe neuve depuis le nouveau moulin des gragnons jusqu’au petit môle ». Les navires pourront désormais accoster, ce qui facilite les opérations de manutentions des marchandises entre le bord et la terre. La zone de l’Escalet devient strictement réservée à la construction navale et il est interdit d’y construire de nouvelles habitations. Une délibération municipale entérine le fait en février 1623. Par contre les constructions immobilières sont permises au quartier de la Tasse. Le terrain dorénavant affecté à la construction des navires et des embarcations ne doit plus servir de lieu de stockage et la Communauté ordonne « de débarrasser le chemin et le rivage de l’Escalet dans un mois (avant fin mars 1623) de tous les bois qui y sont et de n’occuper dorénavant en aucune manière le dit rivage ». Malgré ces dispositions l’on constate que des constructeurs ou plutôt les futurs propriétaires et armateurs veulent se dispenser des taxes frappant constructions. Ils n’utilisent pas les terrains communaux affectés à cette activité. Qu’à cela ne tienne, les Consuls les imposeront aussi ! : « (Les) barques qui se feront à la tour St-Esprit, seront à intaxer ». Une donnée chiffrée concernant la topographie du port est livré dans un rapport de 1633 : à son embouchure, il a 20 pieds (6,50 mètres) de profondeur. La même année, il est dit que le plan d’eau peut recevoir jusqu’à soixante navires de commerce et embarcations d’un tonnage de 3 à 400 quintaux1*. VII - Le XVIIIe siècle Le port et la vieille ville Le canal de Bucelle : La grande affaire du siècle précédent a consisté à établir les deux môles qui transformèrent le port naturel en abri presque sûr. La transformation de la topographie des lieux se poursuit au XVIIIe avec les aménagements des quais. La disposition, l’utilisation et les surfaces du chantier de l’Escalet ou Escaret sont règlementés. Dans cette période, l’on commence à prendre conscience du danger représenté par les roches à fleur d’eau en avant du fort Bérouard. Ce dernier problème ne sera pourtant résolu que cent cinquante ans plus tard. Un autre problème se fait sentir mais il existe depuis les origines, celui du déversement des eaux de pluie dans le port. Avec l’urbanisation croissante qui est pourtant bien loin de celle d’aujourd’hui, de nombreux ruisseaux viennent s’y déverser. Il n’existe pas de ramassage d’ordures et tout se retrouve à la mer nécessitant un dragage du port. A Marseille, le même phénomène est cuisant et Arnoul, l’intendant des galères de Louis XIV, en fait son problème numéro un. 7 A La Ciotat, le déversement dans le port est intermittent car les ruisseaux venant de la colline de N-D de la Garde sont de véritables oueds et ne coulent vraiment que lorsqu’il pleut. Non seulement, la terre et les cailloux arrachés par l’érosion ainsi que les déchets ménagers et autres s’accumulent au fond du port mais les écoulements d’eau érodent les quais. Il faut donc les consolider ces derniers en les empierrant et le plus urgent concerne qui borde le chantier de construction. Le Conseil de la Commune décide dans sa délibération du 19 mai 1743, d’établir un quai au quartier de l’Escalet : « L’orage des 3 et 4 décembre dernier a emporté une partie du terrain et il a fallu renverser des bateaux qui étaient dressés et faute de place, certains font construire hors du lieu. Le chantier est presque de niveau avec la mer et n’est que de terre mêlée de sable, les vagues l’emportent un peu tous les jours. Nécessité de faire un quai dont on a prié le sieur Auguste Martin, un des constructeurs, de faire le plan. » « Délibéré de faire faire le devis de ce plan et l’examiner pour le mettre à exécution et faire remontrances à Sa Majesté pour qu’elle veuille bien, de même que la Provence, y participer ». Comme il est bien préciser à la fin du texte, la Commune n’entend pas assurer toute seule le financement. Les sept torrents de La Ciotat 1747 En plus de la consolidation des quais le curage du port devient aigu. Les Consuls de la cité se réunissent pour discuter de la question, faire le point et prendre des décisions. Le comblement du port et notamment la partie comprise entre la Consigne et L’Escaret, le rendent impraticable tant pour la navigation que pour la mise à l’eau des bâtiments construits sur les chantiers situés dans ce quartier. Les travaux de curage entrepris depuis longtemps deviennent très onéreux et ne suffisent plus à le maintenir à la profondeur nécessaire : « Après maintes démarches des Consuls, le Père Pézenas, professeur d’hydrographie à Marseille et dom Grégoire Marchand, associé à l’Académie des Beaux-Arts de Lyon, sont délégués par Mgr le Chevalier d’Orléans, Commandant en chef à Marseille, à l’effet d’examiner le moyen de détourner plusieurs torrents venant des montagnes de la Garde et de St-Croix, d’où ils entraînent avec impétuosité quantité de pierres et de terre dans la partie Sud-Ouest du port ». Des experts délégués sont désignés par l’autorité et le 21 août 1747, ils se rendent à La Ciotat pour examiner les lieux. Ils constatent que sept torrents causent tous les désastres dont on se plaignait à juste titre. Le Père Pézenas établit un rapport daté du 9 septembre 1747 préconisant l’établissement d’un canal dérivant les sept torrents et en conduisant les eaux en dehors du port vers le Pré. Le rapport fait son chemin et par délibération du 11 septembre 1751, sur la demande de la Communauté de La Ciotat, l’Assemblée du Pays décida que la Provence y contribue pour un tiers, le Roy un tiers et la Communauté, l’autre tiers. Un arrêt du Conseil du 11 juillet 1752 confirme cette décision, limitant la part du Roy à 12 000 livres. Les travaux de ce canal, dit de Bucelle, sont commencés le 19 septembre 1753 par Valentin Suquet, architecte de la Communauté de La Ciotat. 8 Avant le début des travaux de canalisation des eaux de ruissellement, le Conseil de la Communauté se penche à nouveau sur le problème des quais à aménager. L’ancienne résolution de 1743 connaît enfin une amorce de réalisation en 1748, soit cinq ans après : « Par délibération du 19 mai 1743, il avait été examiné la nécessité de faire un quai à L’Escaret à l’endroit où est le chantier et de mettre les travaux aux enchères. La Communauté n’avait pu disposer cette année-là que de 1 000 livres. En conséquence, décidé de continuer, le quai et de mettre aux enchères ce qui reste à faire ». Avant même l’application de cette décision, l’Assemblée des Consuls décide le même jour de « faire retirer des bords du quai, 100 batelées de terre et graviers apportés par la mer (le coût d’une batelée étant d’environ trois livres l’une) ». L’année suivante, le 11 mai 1749, le Conseil Général approuve les dépenses pour le prix-fait donné l’année dernière à François Degagi et Pierre Notier pour la construction de 19 cannes carrées du quai que la Communauté a fait faire à l’Escaret soit 1 881 livres avec l’achat de 512 quintaux de terre argileuse pour cette réparation soit 371 livres. L’entretien du chantier prime sur les autres travaux portuaires destinés à améliorer l’accueil des navires de commerce. L’activité construction navale prend une importance accrue dans l’économie locale. A l’exact milieu du siècle, le problème des eaux fluviales ressurgit uniquement à propos du chantier. A ce sujet, le Conseil communautaire du 15 novembre 1750 décide de divers travaux à effectuer au chemin de ND de la Garde pour « parer au danger que les eaux pluviales qui viennent de ce chemin ne tombent au chantier de construction et n’y portent préjudice ». La ville de La Ciotat et les môles 1720 Vingt ans après, l’agrandissement du chantier s’avère nécessaire. Le Conseil de la Communauté assigne la partie du port située près de la chapelle St-Antoine et de la grande digue pour y démolir les vieux bâtiments. Le lieu désigné devient exclusif pour la construction navale. Par contre, il est dorénavant interdit de construire ailleurs sur le rivage de La Ciotat. Pour se prémunir contre cette éventualité, on ne peut plus agrandir d’autres terrains « avec défense à tous d’en démolir dans tout autre lieu du port à peine de cent livres d’amende et des dépens, dommagesintérêts de la Communauté ». Le nouvel emplacement choisi pour agrandir le chantier deviendra vers le milieu du XIXe siècle, celui de la cale de halage. L’agrandissement du chantier va de pair avec l’accroissement du tonnage des navires lancés. Une infrastructure plus élaborée devient nécessaire pour caréner, radouber et mâter. La nature de la surface du plan d’eau et son accès commencent à soulever le problème des roches sournoises du fort Bérouard. D’autres bancs rocheux empêchent une utilisation pleine et entière du plan d’eau. Le conseil communautaire s’empare du sujet en 1777 avec toujours en arrière pensée, l’amélioration du chantier : « il manque dans ce port un endroit destiné au carénage des bâtiments et pour les mâter… Le sieur Vian vient de proposer de faire les ouvrages 9 nécessaires pour cet objet, au fond du port vers ND des calfats. Cette partie du port est d’une bien petite utilité à cause d’un banc de rochers qui ne pourrait être enlevé qu’à grands frais et sur lequel on peut à peu de frais, faire les ouvrages qu’il offre de faire ou pour le compte de la Communauté ou pour celui de l’hôpital ou pour son compte si la communauté veut lui accorder à perpétuité la levée du droit qui lui sera fixé et désigné par un règlement sur les bâtiments qui en feraient usage et sans qu’on soit obligé de caréner ni mâter audit endroit. Il lui paraît qu’il conviendrait d’écouter cette proposition et qu’il serait superflu d’entrer dans le détail des avantages qui résulteraient de l’exécution de ce projet ce dont personne en peut méconnaître l’utilité et l’avantage qui en reviendrait au pays par l’abord des bâtiments étrangers qui viendraient y caréner… » Evolutions du port de 1789 à1834 Le chantier entre les deux môles 1810 Avec les guerres incessantes qui « pompent » leur quota d’hommes à la fleur de l’âge et le blocus britannique ajouté à l’insécurité sur mer, les activités maritimes de La Ciotat sont en net déclin. Pêche, commerce et construction navale sont étroitement liés. Lors d’une délibération de 1810, la municipalité constate que le curage du port n’est plus réalisé depuis 1789. Trois ans plus tard, le conseil municipal constate que « l’activité du chantier est quasiment nulle ». D’une part, le blocus empêche l’arrivée des bois, d’autre part, les clients sont rares. Au mois d’octobre 1815, la municipalité émet des considérations pessimistes : « les bords du chantier de construction sont entièrement démolis », « les quais sont en mauvais état » et subissent une « extrême dégradation » et de plus le terrain bordant le port « est inondé lorsque la mer est agitée ». Les récriminations contre l’Administration, longtemps restées lettres mortes, finissent par être entendues par les Ministères parisiens et en 1824, « les travaux du port sont entrepris » mais trop lentement et « le quai du chantier de construction qui était déjà dégradé l’a été davantage encore par la tempête du 8 décembre 1825 de sorte qu’il est entièrement submergé et que l’eau de mer envahit le bas du chantier d’où il résulte qu’il est nécessaire de faire une échelle plus longue que par le passé pour mettre à l’eau les bâtiments nouvellement construits, ce qui rend la construction plus pénible et plus dispendieuse. Aucun entretien n’a eu lieu jusqu’ici ». Le 15 mai 1827, le conseil municipal renouvelle sa demande de réparation du quai de construction entièrement détruit en mettant l’accent sur « les débris restés tout au long du chantier (qui) rendent dangereuse la mise à l’eau des navires ». Il ajoute « les constructeurs sont obligés de s’écarter de la mer en dressant leurs navires mais la place est limitée par les maisons et ils doivent faire une échelle * beaucoup plus longue qu’auparavant ». Cette même année, l’Etat accorde 8 000 francs pour le curage du port. 10 Maintenant le problème numéro un du port devient sa protection par vent d’est. Il est très bien abrité du mistral, le vent dominant soufflant du nord-ouest, par la chaîne rocheuse se terminant par le Bec de l’Aigle mais lorsque souffle le vent marin apportant le plus souvent de la pluie, les bâtiments au mouillage dans le port sont fort malmenés. Les barques de pêche sont tirées en haut du rivage lorsque la houle pénètre dans l’abri mais les tartanes et les autres voiliers de commerce ne peuvent compter que sur leurs amarres. A ce danger s’en ajoute un autre et non des moindres, constitué par l’ensemble des roches au pied du fort Bérouard. Elles sont sournoises car presque à fleur d’eau. Les vagues soulevées par le vent d’est brisent sur elles et les voiliers entrant dans le port sont poussés vers ces récifs, attirés pourrait-on dire car on ne compte plus les naufrages en cet endroit. La première précaution à prendre est la protection du plan d’eau et le 20 janvier 1834, le conseil municipal adresse au Préfet une pétition destinée au Ministre des Travaux Publics portant sur « l'urgence de la réalisation d'une jetée à l'entrée du port ». Pourtant, les Ponts et Chaussées maritimes s’étaient penchés sur les diverses questions soulevées par l’état du port et l’on trouve dans leur statistique annuelle la liste des travaux déjà effectués : « Des bornes en nombre suffisant ont été placées aux chantiers de construction en janvier 1831 à la satisfaction des constructeurs et des capitaines marins qui ne savaient où amarrer leurs bâtiments dans la partie du port la plus sûre » ; « On a installé en octobre 1831, une bouée qui a été mouillée par un corps mort à environ 115 mètres de la tête du môle neuf à peu près à l’E ¼ N E. Cette bouée facilite l’appareillage des navires avec des vents à la partie de l’E, favorables pour aller à Marseille et dans l’O et par ce moyen on évite le danger de faire naufrage sur la pointe du fort comme cela est arrivé plusieurs fois » ; « Quoique le curage du port ne fut pas terminé et que les fonds affectés à ce travail ne fussent pas épuisés ; l’entrepreneur qui avait commencé par le plus facile et par conséquent le plus lucratif, est parvenu à faire résilier son marché, lorsqu’il voulait encore le plus essentiel à faire mais en effet le plus difficile, c’est-à-dire de donner du fond là où il y en a très peu. Le ponton partit donc dans le courant de mai 1831 laissant le curage du port très imparfait ». Golfe de La Ciotat Le port de La Ciotat reçoit chaque année, 1 100 ou 1 200 navires de toutes grandeurs. Pour les accueillir tous, il faudrait « enlever quelques blocs de pierre qui rendent le fond inégal et quelquefois peu sûr pour de gros navires ». Avant d’envisager une jetée isolant complètement l’abri, l’Administration reconnaît qu’il convient de réparer les deux môles, le vieux et le neuf : « ainsi qu’on l’a souvent répété, le môle neuf avait besoin d’être réparé de manière à en consolider sa tête ruinée depuis longtemps par le brisement de la mer. La réparation du môle vieux ou du môle intérieur est nécessitée par l’état où il se trouve ». Ce môle vieux protégeait bien mais les bâtiments « ne pouvaient plus s’y amarrer parce que les bornes sont presque toutes détachées ou fortement ébranlées par les coups de mer » et les Ponts et Chaussées maritimes font « espérer que cette réparation urgente aura lieu pendant la belle 11 saison en 1832 ». Le mémoire envisage aussi la future jetée mais sans donner de date, « jetée qui partant de la pointe du fort devait en demicercle croiser le môle neuf en passant près du danger qui a déjà fait périr plusieurs navires et qui par ce moyen ne serait plus dangereux et rendrait le port aussi sûr qu’une darse. On arrêterait aussi l’impétuosité de la mer du large que l’on a vu entrer dans le port et sur les quais avec une telle violence qu’elle enfonce les portes des magasins et des maisons situés sur les quais ... » La statistique des Ponts et Chaussées pour 1834, dresse le tableau de ce qui a été réalisé (ce qui est peu !) et de ce qui reste encore à faire (ce qui est beaucoup !) : « La réparation de la partie intérieure du môle vieux, est entièrement terminée. Reste à réparer, la partie extérieure du dit môle et surtout le musoir du môle neuf, qui est d’une grande urgence. L’on avait promis le curage du port pour cette année ; je ne vois pas que l’adjudication ait lieu : il serait très nécessaire de donner une profondeur uniforme de six mètres entre les deux môles et de cinq mètres dans la partie intérieure du port. Enfin, la chose la plus utile pour ce port si heureusement situé pour les relâches, serait la jetée de la pointe du fort qui prolongée en forme de courbe dans les (illisible) de 110 ou de 150 mètres, procurerait au port l’avantage du double de bâtiments qui peuvent s’y loger actuellement ». A la suite de toutes ces péripéties politiques, les frémissements d’une reprise des activités économiques se font sentir. Le nouveau roi Louis XVIII se trouve à la tête du pays apportant un semblant de stabilité retrouvée. A La Ciotat, comme ailleurs, il semble bon de repartir sur de nouvelles bases. En 1819, le maire de la ville signe un nouveau règlement du port. Nous nous apercevons que les pêcheurs ont grignoté l’espace dont ils ont besoin sur l’emplacement des chantiers. Ces derniers ne sont pas morts mais ils sont moribonds. En leur conservant une place, la mairie espère une résurrection : « Art. 1 - Le corps des patrons pêcheurs continuera de faire usage de la place qui lui est actuellement assignée pour caréner et radouber les bateaux de pêche… au couchant de ladite place sous l’ancienne chapelle de N-D des Calfats, du côté Nord, en suivant la même ligne, sous la place adjacente qui est devant l’entrée de cette ci-devant chapelle, jusqu’au mur qui termine le chantier de construction dans cette partie, un espace de douze mètres et demi (cinquante pans) de largeur sur toute la longueur des dites chapelle et place adjacente pour y retirer leurs bateaux à terre . Art. 2 - Les patrons pêcheurs sont soumis à laisser entre les deux espaces de terrain susmentionnés, un passage de deux mètres de largeur pour la libre communication du chantier avec le môle vieux. Art. 3 - Il ne pourra être construit aucun bâtiment ni bateau de commerce ou de pêche dans les deux espaces de terrain ci-dessus désignés. Art. 4 - Le place ci-dessus mentionnée pour le carénage et le radoub des bateaux de pêche demeure ainsi que par le passé commune pour le carénage des chaloupes et canots des bâtiments de commerce ». Le XIXe siècle 12 Après la disparition politique de Napoléon, la municipalité émet de nouvelles considérations pessimistes au mois d’octobre 1815 sur le mauvais état des quais, l’inondation des terrains autour du port. Il s’ensuit des difficultés pour les constructeurs de navires en cas de reprise économique. Pendant longtemps, l’Administration fait la sourde oreille mais finalement, la situation se débloque en 1824. Trois ans plus tard, l’Etat accorde un crédit pour le curage du port, travail de première urgence. Rien n’avait été fait pendant la période révolutionnaire et l’Empire. Le brise-lames flottant 1845 : Le deuxième problème à résoudre et que nous avons déjà soulevé concerne la disparition des hauts-fonds et de l’écueil hautement dangereux devant le fort Béroard. Le troisième problème revient à protéger davantage le plan d’eau par vent d’est. La nécessité d’une jetée est admise mais son coût paralyse toute la bonne volonté. Une demi-mesure est envisagée avec la construction d’un brise-lames en bois. En attendant, les deux môles existants sont réparés, consolidés et des bornes d’amarrage sont de nouveau mises en place en 1831. « Monsieur Benêt loue pour mon compte à Monsieur Lakeman les deux magasins du chantier à 25 francs par mois. Ce monsieur qui est anglais va faire construire des brise-lames pour défendre de la mer l'entrée du port" » [11-7-43] ; « Nous cédons à l'entrepreneur des brise-lames, le contremaître Hermite et des ouvriers » [17-7-43]; « Un navire anglais débarque de grandes ancres et de fortes chaînes pour servir aux brise-lames » [5-9-43] ; Cette aventure du brise-lames en bois entreprise à partir de 1843 mais qui ne se conclura qu’en 1850 par un échec total, entraînera au passage la faillite du constructeur anglais Lakeman. Lorsque les activités du chantier se développent, l’aspect du port est devenu convenable, compte tenu de ce qu’il était auparavant dans les siècles passés. Extension du môle neuf 1852 : Dès 1852, la construction du prolongement du Môle Neuf, en arc de cercle, est décidée, les travaux seront commencés dès le 2 juin 1852. Si l'idée de la jetée demeure un vœu pieux, les Ponts et Chaussées essaient de pallier au problème avec un brise-lame flottant placé devant le port. L'ingénieur chargé des travaux est un britannique, M. Lakeman. Le dispositif comprend à l'origine six sections construites en charpente de bois. Après nomination de deux commissions municipales successives, le nombre des sections sera porté à dix. Le bois de l'ensemble, pour être protégé des effets de l'eau salée, est enduit de « glu marine ». L'ingénieur Lakeman, lors de son séjour à La Ciotat côtoie J.E. Vence qui le cite plusieurs fois: L’extension du môle neuf Ce nouveau môle comporte un grand arc sensiblement centré sur le môle Bérouard et son extrémité recevra ultérieurement un phare rouge qui ne sera démoli que dans les années 70. 13 Approfondissement du port 1883 : Avec l’augmentation du tonnage et du tirant d’eau des navires, il devient alors indispensable d’approfondir le port de La Ciotat. Une demande à cet égard est faite en 1869 par les Messageries Impériales. Après bien des tergiversations, enfin, le 21 octobre 1874, un ponton à vapeur arrive à La Ciotat. Ce n’est, en fait que le 8 décembre 1882 que l’adjudication des travaux d’approfondissement et d’amélioration du port de La Ciotat est prononcée. Les travaux sont évalués à 701.305 francs. M. Shokke Conrad est adjudicataire après 12 % de rabais. Il consiste notamment en un caisson en tôle de 12 x 8 x 2,10 surmonté de 3 cheminées de 2 m. de hauteur. Un ponton de mêmes dimensions, sortant des chantiers Curet de La Seyne est équipé d’une machine soufflante pour faire le vide dans la cloche, ce qui permettra de travailler à sec au fond de la mer. Les travaux ont commencé le 31 juillet 1883. En septembre on doit réparer le caisson avarié dans le bassin de radoub. Le 23 juin 1890 à l’occasion de l’achèvement des travaux d’approfondissement du port, un banquet offert par l’entrepreneur Schokke est servi à son personnel et à la presse locale, dans le caisson à air comprimé utilisé pour réaliser ces travaux, caisson immergé dans les eaux du port, qui depuis 1883, avait assuré ce travail. Travail en caisson Le 15 mars 1883 arrive le matériel destiné à l’approfondissement du port. Le port et les chantiers en 1852 Caisson