Comment lire les courbes de puissance

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Comment lire les courbes de puissance
MACHINISME
Analyser les courbes moteur
d’un tracteur
Une lecture simple et rapide permet de mieux comprendre les caractéristiques
du moteur qui équipe son tracteur et d’optimiser son utilisation au travail.
L
es courbes moteurs sont représentées sur un graphique
que l’on retrouve dans les
brochures commerciales des
tractoristes, ou lors d’une acquisition
de données après le passage au banc
du tracteur.
La lecture se concentre sur trois
courbes : la puissance, le couple et
la consommation. Quelques notions
de vocabulaire technique et de petites
formules permettent d’analyser les
courbes moteurs. Seules quelques
minutes sont nécessaires pour déchiffrer rapidement les caractéristiques
du moteur qui équipe votre tracteur.
LA PUISSANCE EN KW
La puissance est égale au couple
multiplié par la vitesse radiale du
moteur (régime). Elle est exprimée
en kilowatt (kW). Un cheval vapeur
est égal à 0,736 kW. Sur le graphique,
elle est représentée par la courbe qui
est croissante de gauche à droite.
Sur les tracteurs de dernière génération, le sommet de la courbe
se situe à un régime inférieur au
régime nominal. Ceci s’explique par
le paramétrage de la cartographie
électronique qui gère l’injection.
La puissance maximale est atteinte
dans une zone où la consommation est plus faible grâce au régime
moteur inférieur au régime nominal
(92 kW, soit 125 ch à 1 900 tr/min
pour notre exemple). Dans les
années quatre-vingt, les courbes de
puissance étaient linéaires. Plus le
régime moteur augmentait et plus
il y avait de puissance.
Dans les années quatre-vingt-dix, les
motoristes ont proposé des moteurs
à plage de puissance constante.
Entre 1 800 et 2 300 tr/min,
selon les marques, la puissance
était approximativement la même.
Aujourd’hui, pour bon nombre de
tractoristes, la première puissance
donnée est la puissance maximale,
qui se situe autour des 1 900 tours.
La surpuissance d’une quinzaine
de chevaux est la différence entre la
puissance maximale et la puissance
au régime nominal.
Quant à la puissance additionnelle,
également appelée « boost », elle est
fournie par une augmentation de l’injection de gasoil dans les cylindres.
LE COUPLE EN NM
Le couple fourni est la conséquence
de l’effort de travail demandé au
moteur et s’exprime en Newton
mètre. Le couple maximal dépend
de la cylindrée, du taux de remplissage des cylindres (turbo, 4 soupapes
par cylindre), de la qualité de combustion (taux d’oxygène, rampe
commune, haute pression) et de la
quantité de gasoil injecté dans les
cylindres. Lorsque le moteur fonc-
tionne au régime nominal, la réserve
de couple exprime sa capacité à faire
face à une augmentation de l’effort
résistant sans caler. Elle correspond
au rapport entre le couple moteur au
régime nominal et le couple maximal qu’il peut délivrer. Exemple du
schéma : 525-390/390 = 35 %.
Pour mieux comprendre la réserve
de couple, voici une comparaison
avec un cycliste. En descente, il
atteint sa vitesse maximale et ses
jambes tournent très vite. Une fois
dans la montée, soit le cycliste a suffisamment de force dans les jambes
et grimpe la côte sans changer de
vitesse. Dans ce cas, cela correspond
à un moteur ayant une réserve de
couple importante (> 35 %). On dit
alors qu’il est coupleux.
Si le cycliste n’a pas la force de monter la côte, il change de vitesse afin
de trouver le bon régime de pédalage
pour gravir la montée. Dans ce cas, le
moteur bénéficie d’une faible réserve
de couple (< 25 %).
En agricole, la réserve de couple est
surtout utile lors d’une utilisation
à la prise de force et à la traction.
C’est la raison pour laquelle certains
tractoristes proposent une augmentation de la puissance (boost) pour
mieux passer ces pics de besoins de
puissance, favorisant ainsi la capacité
d’un moteur à conserver son régime
sans changer de vitesse. Cependant,
A QUOI CORRESPONDENT LES NORMES DE PUISSANCE MOTEUR ?
La puissance donnée par les tractoristes
est prise directement à la sortie du villebrequin, et ce pour toutes marques
confondues. Sur un tracteur annoncé à
Norme
Caractéristiques
Exemple de puissance
New Holland TS 110
110 ch, après passage au banc, il en ressort
une puissance de 98 ch à la prise de force
(norme OCDE), soit plus de 10 ch de différence avec la donnée du constructeur. La
puissance aux roues est encore plus faible
après entraînement de la boîte de vitesses
et des accessoires (climatisation, faisceaux
électrique...).
SAE J1995
ISO 14 396
SAE J1349
ECE R 24
DIN 70020
OCDE
Puissance brute,
sans accessoire
Puissance brute,
sans ventilateur
mais avec alternateur,
silencieux et filtre à air
Puissance nette avec
ventilateur mais sans
alternateur et sans le
ventilateur viscostatique
Puissance
nette avec
ventilateur
et alternateur
Puissance moteur
disponible, comme ECE
R 24 mais le ventilateur
viscostatique est embrayé
Puissance nette
utilisable à la prise
de force
112
108
105
104
101
98
LA FRANCE AGRICOLE 3431 - 46 - 13 AVRIL 2012
Groupe France Agricole, 8 cité Paradis, 75493 Paris Cedex 10, Tél.: 01 40 22 79 00. http://www.lafranceagricole.fr
MACHINISME
en kW (kilowatt)
en Nm (newton mètre)
560
540
Couple maxi : 525 Nm
Couple
100
Puissance maxi : 92 kW
95
520
90
500
85
480
80
460
75
440
70
Puissance
65
420
Réserve de couple (en %)
400
60
380
55
360
50
en g/kWh (grammes par kilowattheure)
240
235
230
Puissance
additionnelle
(boost)
Consommation
Consommation mini : 217 g/kWh
(rendement optimal)
225
220
215
210
Zone de calage
1 000
1 100
1 200 1 300
Régime
nominal
Plage d'utilisation optimale
1 400
Courbes : tracteur lambda
Image : Perkins
1 500
1 600 1 700 1 800
1 900
2 000 2 100
2 200
Régime moteur en tr/min
Une évolution de la puissance liée à l'électronique
100
90
en kW
100
Années 80
90
80
en kW
100
Années 90
90
80
en tr/min
La puissance est proportionnelle
à l'accélération.
cela entraîne une augmentation de la
consommation. Cette fonction peut
généralement être déverrouillée en
cabine depuis le terminal du tracteur.
LA CONSOMMATION EN G/KWH
La consommation est représentée
par la courbe incurvée en bas du
graphique. La consommation spécifique indique, pour chaque kW
fourni par le moteur, la consommation de carburant en grammes
par heure. Elle permet de comparer
l’énergie absorbée (en grammes
de carburant) avec l’énergie mécanique restituée par le moteur en
kWh.
Plus la consommation spécifique
est faible, meilleur est le rende-
2000 - 2012
80
en tr/min
en tr/min
1 900 2 100 2 300
en kW
1 900
2 100 2 300
1 900 2 100 2 300
Grâce à l'électronique, les motoristes ont su proposer des courbes à puissance constante,
puis une puissance maximale à un régime moteur inférieur au régime nominal.
ment. Par conséquent, au régime
de puissance maximal, on obtient
toute la puissance du moteur mais
la consommation spécifique est
élevée et le rendement médiocre.
Au régime où la consommation
spécifique est la plus faible, on
obtient le meilleur rendement mais
le moteur ne développe pas toute
sa puissance.
Pour connaître la consommation
théorique à la puissance maximale, il suffit de la multiplier par
la consommation lue sur le graphique (220 g/kWh). Le résultat
en g/h doit être multiplié par
la densité du gasoil (0,850) et
divisé par 1 000 pour connaître la
consommation en l/h. Dans notre
exemple : 220 x 92 = 20 240 g/h,
soit 17,2 l/h. Pour une conduite économique, il faut adapter le régime
du moteur et le rapport de vitesse en
fonction de la puissance nécessaire.
Lorsque l’outil ne nécessite pas toute
la puissance, il faut choisir un rapport
de boîte de vitesses élevé, afin d’augmenter la charge du moteur. Mais il
faut également faire fonctionner le
moteur à un régime intermédiaire
pour obtenir un meilleur rendement
et limiter la consommation. Sur les
tracteurs de dernière génération,
cette conduite est gérée par le système de management du tracteur, qui
choisit le rapport de boîte de vitesses
en fonction de la charge moteur.
Henri Etignard
LA FRANCE AGRICOLE 3431 - 47 - 13 AVRIL 2012
Groupe France Agricole, 8 cité Paradis, 75493 Paris Cedex 10, Tél.: 01 40 22 79 00. http://www.lafranceagricole.fr