Comment amener un arbre à maturité ? Buxus
Transcription
Comment amener un arbre à maturité ? Buxus
Comment amener un arbre à maturité ? Buxus sempervirens Déplacer la cime vers la gauche Ramener cette branche au dessus du petit arbre Textes et photos de François JEKER Couper cette cime Le quatrième article de cette série sur la maturation de nos bonsaï est cette fois-ci consacrée au buis. Cet arbre nécessite en effet des techniques très particulières. L'avantage du buis, c'est qu'il pousse très vite, si on connaît les bonnes techniques de culture. C'est un inconvénient aussi : comme il porte des feuilles toute l'année, on obtient vite un arbre très flatteur, avec de jolis nuages d'un beau vert foncé. Mais sous la "belle robe" se cache souvent une "vilaine âme", avec des branches en tuyau et une ramification complètement enchevêtrée. Fermer les espaces vides à droite Laisser pousser cette branche Raccourcir Tailler fortement Voilà un double tronc que vous avez déjà vu dans Bonsaï Europe. Cette photo a été prise au printemps 1997, juste après le prélèvement. J'ai énormément de plaisir avec mes buis, surtout après la floraison, quand les jeunes pousses d'un vert tendre pointent le bout de leur nez sur toutes les parties de l'arbre d'un vert plus sombre. Cette photo date de septembre 2005. J'ai trouvé 6 défauts à corriger sur ce double tronc. 1 - Même si ces deux arbres sont vigoureux, on peut constater un déséquilibre de la croissance : l'arbre de gauche et la branche juste au-dessus sont trop lourds par rapport à l'ensemble. Il faudra donc une taille drastique de ces deux parties et ne pas toucher au reste pour équilibrer la croissance. 2 - L'asymétrie est trop marquée : l'arbre de gauche est trop large, la cime de l'autre arbre paraît donc trop excentrée. Il faudra raccourcir l'arbre de gauche. 3 - Pour corriger cette asymétrie excessive, il faudra aussi déplacer la cime vers la gauche. 4 - La composition d'ensemble manque d'unité. On voit encore trop qu'il s'agit de deux arbres différents. La solution est de couper la cime du premier arbre, puis de faire pousser la première branche de gauche du grand arbre et de la ramener par dessus le premier arbre. 5 - Les espaces vides du grand arbre sont trop symétriques. L'idéal serait de "fermer" ceux de droite avec un profil arrondi et "d'ouvrir" la partie gauche avec des nuages bien distincts avec un profil plus pointu. 6 - La première branche à droite doit être plus puissante pour équilibrer l'arbre de gauche qui fait office de première branche. LES PETITS SECRETS TRUC Le buis a un bois dense et dur. Sa texture fine permet de créer des détails très fins sur les jin et shari. Sur mes bois morts de 5 à 6 ans, je procède à une "worm attack" pour donner un coup de vieux supplémentaire. J'utilise une fraise pointue pour renforcer des creux et carrément percer des trous dans certains noeuds. • Il vaut mieux tailler à deux feuilles en septembre, puis ligaturer le bois de l'année encore souple. • Tous les 4 ou 5 ans, faire une taille très sévère pour faire rebourgeonner en arrière. En septembre 2005, j'ai effectué une taille très sévère sur l'arbre de gauche et la première branche de gauche du grand arbre. Les objectifs sont toujours les mêmes : créer une belle structure de branche qui pourra bien vieillir, avec une recherche de conicité des branches, des mouvements cohérents par rapport au tronc et une organisation rigoureuse de la ramification. La première réaction d'un spectateur non averti va être de s'écrier "C'est dommage, c'était beaucoup plus joli avant". En fait, nous avons reculé pour mieux sauter et nous allons en réalité gagner du temps. L'arbre va bien vieillir, et, cela est spécifique du buis, une taille aussi sévère va créer un bourgeonnement en arrière et stimuler la croissance. Fin mars 2006, on voit bien le démarrage vigoureux et la naissance de nouvelles pousses sur le bois des deux dernières années. 15 jours après, de nouvelles pousses apparaissent cette fois sur le très vieux bois : elles seront bien utiles pour compacifier ce bonsaï. L'arbre après la taille Voilà mon projet, réalisé sur photoshop. Voilà comment je l'imagine dans 5 ans. L'arbre a gagné en puissance, en sérénité, en unité. Je modifierai également l'implantation dans le pot. Je planterai l'ensemble plus bas encore et je décalerai l'ensemble vers la gauche pour mieux le centrer dans le pot. Le petit arbre vu de haut. Nous consacrons beaucoup de temps, d'énergie et d'amour à nos petits arbres. Cela peut paraître bien dérisoire au regard des terribles images que nous découvrons chaque jour dans les journaux ou à la télé. Nous pouvons légitimement nous poser la question : ça sert à quoi le bonsaï ? Il n'y a pas vraiment de réponse claire. Il y cependant deux choses à dire. D'abord que le bonsaï, ça ne sert à rien, mais qu'on ne peut pas s'en passer... Ensuite, que nous sommes du bon côté. Nous ne posons pas de bombe, nous ne pratiquons pas de violence, nous ne produisons qu'un peu de beauté, qu'un peu de bonheur. Même si c'est dérisoire...