La richesse de l`expression orale des apprenants de FLE à travers
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La richesse de l`expression orale des apprenants de FLE à travers
La richesse de l'expression orale des apprenants de FLE à travers le corpus HY-TALK Mémoire de mastère de philologie française Département des langues romanes Université de Helsinki Août 2009 Päivi Karpio et Tiina Korhonen 1 TABLE DES MATIÈRES 1. Introduction …………………………………………………………………….…4 2. 1.1 Le projet HY-TALK ……………………………………………………… 6 1.2 Le corpus ………………………………………………………………… 8 La langue parlée ………………………………………………………………… 11 3. 2.1 Les traits particuliers de la langue parlée…………………………………..11 2.2 Les caractéristiques de la langue parlée en français………………………..14 Le vocabulaire……………………………………………………………………..16 4. 3.1 La définition du mot ……………………………………………………….16 3.2 La compétence lexicale …………………………………………………….18 Le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECR)………….20 4.1 Les compétences d’un apprenant dans le CECR…………………………...22 4.1.1 Les compétences générales …………………………………………23 4.1.2 Les compétences à communiquer langagièrement…………………..24 4.1.2.1 La compétence linguistique…………………………………24 4.1.2.2 La compétence sociolinguistique……………………………25 4.1.2.3 La compétence pragmatique………………………………...26 4.2 Les six niveaux de compétences……………………………………………26 4.3 L’échelle des compétences langagières en Finlande…………………….….28 4.4 Le Plan national d’enseignement finlandais ………………………….…….30 4.5 Les descripteurs des compétences dans le CECR…………………………..31 4.6 L’approche actionnelle ……………………………………………………..32 4.6.1 Les tâches communicatives langagières dans le CECR……………..33 4.6.2 Les domaines d’utilisation de la langue dans les tâches ……………34 5. L’évaluation de la compétence langagière orale………………………………..36 5.1 L’évaluation holistique vs l’évaluation analytique…………………………39 5.2 Évaluation normative vs évaluation critériée……………………………….40 5.3 L'évaluation du vocabulaire………………………………………...……….41 2 6. Le choix des mots et des constructions grammaticales inclus ………………44 dans les statistiques 6.1 L'étendue du vocabulaire…………………………………………………..44 6.1.1 La prononciation……………………………………………………45 6.1.2 Le contexte…………………………………………………………46 6.1.3 Le problème de forme……………………………………………....47 6.1.4 Les expressions maladroites………………………………………..48 6.1.5 Les interférences……………………………………………………48 6.1.6 La répétition………………………….……………………………..49 6.2 Les structures……………………………………...………………………50 6.2.1 Les subordonnées…………………………………………………..51 6.2.2 Les interrogatives…………………………………………………..51 6.2.3 Les temps et les modes verbaux……………………………………53 6.2.4 L’expression de la possession……………………………………...55 6.3 Les problèmes de classement particuliers…………………………………55 6.3.1 Les problèmes de classement particuliers : les noms et les adjectifs….………………………………………...56 6.3.2 Les problèmes de classement particuliers : les verbes……………..58 6.3.3 7. Les mots composés………………………….…………………..…59 L'analyse des résultats…………………………………………...……………60 7.1 La corrélation entre le nombre de mots ou de structures grammaticales et l'évaluation de la richesse de l'expression ……………..61 7.2 Les différents facteurs qui influencent l'évaluation de la richesse de l'expression………………………………………………………………..65 7.2.1 Le nombre de mots différents et de structures grammaticales….….66 7.2.2 Le nombre de mots total ………………………….……………….67 7.2.3 Les évaluateurs……………………………………………...……..70 7.2.4 Les autres facteurs …………………………………………………70 3 7.2.4.1 La maîtrise des autres composants de la compétence orale………………………………………….76 7.2.4.2 Le partenaire ………………………………………...…….78 7.2.4.3 Le français parlé à la maison………………………………79 7.2.4.4 La maîtrise des constructions grammaticales………………80 8. Conclusion…………………………………...………………………………..81 Bibliographie……………………………………………………………………..85 4 1. Introduction La première chose dont un apprenant d'une langue étrangère a besoin est les mots. Pour les combiner les uns avec les autres, il faut des structures. Ce rôle fondamental des mots et des structures est le tout premier point de départ de ce mémoire dont le propos est d’étudier l'étendue du vocabulaire et des constructions grammaticales que les étudiants finlandais en première année de lycée sont capables d'employer oralement après en moyenne six à sept années d'études de français (v. tableau 1). Étant donné que dans les écoles finlandaises le niveau des élèves est en général beaucoup plus élevé en anglais que dans les autres langues vivantes (ce qui se manifeste même dans les objectifs du Plan national d’enseignement 1), nous pensons qu'il peut être assez exigeant pour les élèves de s'exprimer oralement dans une autre langue étrangère. Cependant, il a été décidé qu'à partir de 2010, chaque étudiant au lycée sera obligé de se présenter à un examen oral de la langue obligatoire. La compétence orale des élèves a été assez peu étudiée en Finlande. Comme nous sommes deux futures enseignantes, il nous a paru intéressant de faire une étude dans ce domaine. Nous avons voulu écrire ce mémoire à deux puisque cette façon de travailler nous convient le mieux. Nous travaillerons donc en étroite collaboration dans chaque phrase de cette étude. Par le projet HY-TALK de l'Université de Helsinki, nous avons eu accès à un corpus unique que nous présenterons plus en détail à la fin de cette introduction. L’approche de ce mémoire est surtout quantitative. Tout d’abord, nous compterons tous les mots lexicaux, après quoi nous établirons les calculs statistiques qui montrent la richesse de vocabulaire de chaque étudiant. Afin d'étudier la richesse du vocabulaire et des constructions grammaticales des lycéens, nous présenterons des statistiques détaillées, comme le nombre de mots différents et de structures utilisés dans le corpus. Ensuite, nous comparerons nos résultats avec les évaluations données par les évaluateurs du HY-TALK qui ont une longue expérience de l’évaluation aussi bien qu’une formation supérieure dans la langue française. Leur niveau en français 1 http://www.oph.fi/SubPage.asp?path=1,17627,1558 5 correspond au moins au niveau C1 dans le Cadre européen commun de référence pour les langues (désormais « le Cadre » ou « CECR ») (v. chap. 4.3). Nous utiliserons la méthode qualitative dans l’analyse des statistiques : nous examinerons s'il y a d'autres facteurs que l'étendue du vocabulaire et des constructions grammaticales qui, éventuellement, influencent l'évaluation de la richesse de l'expression. En présentant l’arrière-plan théorique de cette étude, nous nous référons à plusieurs reprises au linguiste Blanche-Benveniste (1990, 1997) qui a beaucoup examiné le français parlé. De plus, nous nous servirons du Cadre comme un des principaux points de référence. Il est actuellement un outil essentiel dans l'enseignement et surtout dans l'évaluation de la compétence en langues vivantes. La Finlande (comme plusieurs pays) a élaboré son propre cadre qui convient mieux aux besoins de ses citoyens. Le Plan national d'enseignement finlandais (PNE), qui suit les mêmes indications que le Cadre, définit qu'à la fin du collège (yläaste) l'obtention de la note 8 dans une langue vivante du programme A, autre que l'anglais, exige une compétence d’expression orale du niveau A2.1 (A2 = utilisateur élémentaire 2).3 Nous chercherons à savoir si les étudiants de notre corpus, qui viennent de commencer leurs études au lycée, ont atteint ce niveau. Naturellement, il faut tenir compte du fait que la compétence d’expression orale ne consiste pas seulement en la richesse du vocabulaire et des constructions. C’est toutefois à ces composantes de la compétence orale que nous nous intéressons dans notre étude. Dans le département des langues romanes de l’Université de Helsinki, cette étude sera l’une des premières qui traite l’évaluation langagière orale dans le projet HY-TALK. 2 3 http://www.oph.fi/ops/perusopetus/pops_web.pdf . p.136 Peruskielitaidon alkuvaihe. Dans les écoles finlandaises, les notes vont de 4 à 10, la note 4 étant refusée. En général, les élèves n'obtiennent pas de note séparée sur la compétence orale, elle est donc plus ou moins prise en compte dans la note générale d’une langue vivante. Le programme A signifie que les élèves suivent le cycle long dans l'enseignement de cette langue. Ils ont généralement commencé l'étude de la langue en troisième ou en cinquième année du primaire. Contrairement au Cadre européen commun de référence pour les langues, dans le système scolaire finlandais, dix niveaux de compétence langagière sont utilisés dans l'évaluation au lieu de six dans l'échelle de compétence langagière globale (cf. chap. 4.1 et 4.2). 6 Ce travail sera organisé de la manière suivante : après l’introduction, dans le chapitre 2, nous nous pencherons sur la nature et les caractéristiques de la langue parlée en général. Le chapitre 3 sera consacré à la notion de vocabulaire. Ensuite, dans le chapitre 4, nous présenterons le Cadre européen commun de référence pour les langues. Nous nous concentrerons sur les parties de ce document qui ont un lien avec notre mémoire. Nous étudierons également, mais plus brièvement, le Plan national d'enseignement finlandais des collèges et celui des lycées finlandais. Dans le chapitre 5, nous présenterons certains principes de l'évaluation de la compétence des apprenants. L'accent sera mis sur l'évaluation de l'expression orale. Après avoir ainsi établi les bases théoriques, nous analyserons les prestations orales. L’objectif du chapitre 6 sera de classer les mots que nous avons acceptés. Dans le chapitre 7, nous nous intéresserons à la corrélation entre l’évaluation de la richesse de l'expression et le nombre de mots et de structures grammaticales que les étudiants de notre corpus ont utilisés. Nous essayerons également de trouver des réponses à la question portant sur l’influence de différents facteurs dans l’évaluation de la richesse de l’expression. À la fin, dans le chapitre 8, nous présenterons les conclusions de notre analyse et nous répondrons à la question concernant le niveau oral des lycéens dans le corpus par rapport à ce qui est défini dans le Plan national d'enseignement finlandais (PNE). 1.1 Le projet HY-TALK HY-TALK 4 est un projet d'évaluation de la compétence langagière orale auquel participent le département des études pédagogiques (SOKLA) et plusieurs départements de langue de l'Université de Helsinki : ceux d'anglais, d'allemand, des langues romanes et des langues nordiques. Le projet a obtenu un financement pour trois ans, de 2007 à 2009. Les buts de ce projet sont d'améliorer l'enseignement et l'évaluation de la compétence orale dans les langues vivantes à différents niveaux d'enseignement et de valider l'échelle des 4 Le projet HY-TALK sur Internet : http://www.helsinki.fi/sokla/vieki/vieki_hytalk.htm. 7 compétences langagières correspondant au Plan national de l’enseignement finlandais. Les principaux points d'intérêt peuvent être divisés en trois parties. Premièrement, le projet examine de quelle manière les composantes de la compétence orale (la fluidité, la prononciation, la richesse et la correction de la langue utilisée) se développent d'un niveau de l'échelle à l'autre. Deuxièmement, il s'agit d'étudier la correspondance entre l'évaluation holistique et analytique des traits qualitatifs, autrement dit de comparer les notes données séparément sur la fluidité, la prononciation, la richesse et la correction et la note générale de la prestation5. Troisièmement, comme il est question de la validation de l'échelle des compétences, un grand intérêt sera également porté à la manière dont les prestations des apprenants se placent sur l'échelle, c'est-à-dire s'il existe un grand écart entre les évaluations données par différents évaluateurs, si les divergences éventuelles sont systématiques, etc. Les participants au projet ont préparé quatre tâches communicatives et les performances des apprenants en première année de collège et en première année de lycée ont été enregistrées en vidéo. Avant d'exécuter les quatre tâches, les étudiants avaient un échange avec un locuteur natif (ou une locutrice native). Les évaluateurs ont donné une note générale à chaque tâche et à la conversation avec le natif (ou la native) et quatre notes séparées sur la fluidité, la prononciation, la richesse et la correction de la langue. En plus de ces enregistrements et les évaluations, la documentation recueillie par le projet HY-TALK comprend les transcriptions des prestations et des conversations qui les précèdent et les auto-évaluations des apprenants. Les discussions entre les évaluateurs sur la performance des apprenants ont aussi été enregistrées en vidéo. En ce qui concerne les transcriptions françaises, les versions finales n’ont pas encore été faites, mais nous ferons usage des versions les plus récentes. 5 Cf. chap. 5.1 et 5.2 pour l'évaluation holistique et analytique. 8 1.2 Le corpus Notre corpus est composé de prestations orales d’apprenants du français qui sont en première année de lycée et qui ont 15 ou 16 ans. Ils viennent de deux lycées à Helsinki. Tous les étudiants suivent le programme A dans leurs études de français (v. la note en bas de la page 3). Nous étudierons la performance de 16 étudiants, dont 10 filles et 6 garçons. L'étudiant numéro 11 qui n'a fait que la première tâche ne fait pas partie de notre corpus. Les informations de base concernant les étudiants du corpus sont présentées dans la figure 1 ci-après. Elles se basent sur les formulaires que les apprenants ont remplis au moment d'exécuter les tâches. Tableau 1 : Les étudiants du corpus étudiant 1 étudiant 2 étudiant 3 étudiant 4 étudiant 5 étudiant 6 étudiant 7 étudiant 8 étudiant 9 étudiant 10 étudiant 12 étudiant 13 étudiant 14 étudiant 15 étudiant 16 étudiant 17 âge/ sexe nombre d'années d'études de français langues parlées à la maison note de français dans le dernier bulletin de notes 16/F 5 finnois 9 16/F 5 finnois 8 15/G 7 finnois 8 16/G 7 finnois 8 finnois, français 10 16/F « 6ème année » 16/G 7 finnois 8 15/F 6 finnois 9 15/F 6 finnois 9 16/F 7 finnois 8 16/F 7 finnois 8 16/G 6 finnois 9 16/F 6 7 16/G « presque 10 » finnois finnois, français, anglais, suédois, « marocain » 16/G « presque 8 » finnois 8 16/F 6 finnois 8 15/F 6 finnois 9 9 9 Nous examinerons la prestation des étudiants dans les quatre tâches (v. annexe 3) conçues dans le projet HY-TALK (v. chap. 1.1). Les tâches ont été préparées pour le niveau A2.1 qui est le niveau exigé pour la note 8 à la fin du collège (v. ci-dessus) et les thèmes appartiennent au monde des adolescents. Les instructions sont en finnois et les étudiants ont 20 minutes pour se préparer. Le tableau 2 ci-dessous présente les tâches dans le projet HY-TALK. Tableau 2 : Les tâches du corpus seul / en paires sujet tâche 1 seul vidéo d'introduction tâche 2 en paires arrivée et l'accueil de l'invité(e) tâche 3 en paires discussion à propos d'un film et de la musique tâche 4 en paires organiser une sortie La première tâche s'appelle « une vidéo d'introduction » : L'étudiant doit se présenter à un jeune imaginaire (Anna ou Nico) qui habite à l'étranger et qui va venir rendre visite à la personne en question. Les étudiants peuvent soit parler d'eux-mêmes, soit s’inventer une nouvelle identité. Les instructions contiennent une liste des choses dont il faut parler dans la vidéo, par exemple les membres de la famille, les loisirs et l'école. Il est aussi mentionné qu'il faut d'abord dire bonjour et finir la présentation d'une manière polie. Les tâches 2, 3 et 4 sont effectuées à deux et il est conseillé de choisir les rôles avant de commencer. Comme dans la première tâche, il est possible de s'inventer une nouvelle identité. Les étudiants ont été encouragés à s'exprimer d'une manière aussi naturelle que possible. Selon les instructions, le but est d'être compris, de parler le plus possible et de ne pas traduire directement les répliques telles que « Nico/Anna : Dis quelque chose de poli à propos de la chambre dans laquelle tu seras logé(e) ». « Toi : Dis qui habite 10 dans cette chambre normalement et où est cette personne en ce moment »6. Ces répliques se trouvent dans la tâche 2. Il s'agit donc d'une situation dans laquelle Anna/Nico vient d'arriver en Finlande et le/la jeune Finlandais(e) l'accueille, montre la maison et explique les routines de la famille. L'invité(e) donne des cadeaux. Dans la troisième tâche, les personnages sont les mêmes et il faut imaginer qu'ils viennent de voir un film dont ils parlent maintenant. En plus du film, il faut parler de la musique finlandaise et, à la fin de la discussion, remarquer quelque chose d'imprévu. Dans la dernière tâche, il s'agit de prévoir une sortie. Contrairement aux tâches 2 et 3, il n'a pas été déterminé dans les instructions de celle-ci ce que chacun doit dire, mais il y a une liste des choses qu'il faut inclure dans la discussion, par exemple où aller et comment, où manger et quoi, etc. 6 Nous avons traduit nous-mêmes ces répliques. Voici les répliques originales : « Nico/Anna : Kommentoi kohteliaasti huonetta, jonka olet saanut käyttöösi. » « Sinä : Kerro, kuka siinä yleensä asuu ja missä tämä henkilö nyt on. » 11 2. La langue parlée Comme le corpus de cette étude traite exclusivement la production orale, il nous a paru essentiel de souligner le caractère fondamentalement différent de la langue parlée comparée à la langue écrite. Ce phénomène a été étudié entre autres par Blanche-Benveniste (1990, 1997), Gadet (1989), Luoma (2004) et Tiittula (1993). Les différences se trouvent à plusieurs niveaux et concernent également le vocabulaire et les structures grammaticales qui constituent le centre d'intérêt de notre mémoire. Dans ce chapitre, nous présenterons quelques caractéristiques de la langue parlée, d'abord de manière générale et ensuite l'accent sera mis sur les particularités du français parlé. 2.1 Les traits particuliers de la langue parlée Blanche-Benveniste (1997) constate à plusieurs reprises qu'en France, la langue parlée évoque souvent des connotations négatives et qu'elle est opposée à la langue écrite et à la vraie grammaire (1997 : 5). La langue parlée est alors associée à la spontanéité tandis que la langue écrite est souvent considérée comme étant « élaborée » (Blanche-Benveniste 1997 : 10). Cette approche est moins marquée chez Tiittula (1993 : 64) qui, en caractérisant la langue parlée, part du principe que le processus de production et la situation de communication sont les facteurs décisifs qui différencient l'oral de l'écrit. Tiittula constate que la compréhension de la langue pose des exigences différentes pour la langue parlée et la langue écrite. Autrement dit, il est important de comprendre les caractères différents de l'oral et de l'écrit. Luoma (2004 : 27), de son coté, prend comme point de départ le caractère spécifique de la grammaire et du vocabulaire dans la langue parlée. Defays (2003 : 64– 65), par contre, approche cette problématique du point de vue de l’enseignant : d’après lui, dans la didactique des langues étrangères, il ne faudrait pas séparer de manière trop stricte la langue parlée de la langue écrite dans l'enseignement. Toutefois, l'enseignant doit tenir compte de certains facteurs distinctifs. 12 La problématique de l'oral et de l'écrit peut être approchée de plusieurs points de vue mais, comme le montrent les études de nombreux linguistes, leur nature différente est évidente. Blanche-Benveniste (1997 : 11) et Gadet (1989 : 43) constatent qu’il y a beaucoup d'éléments dans la langue parlée dont on ne peut pas tenir compte dans l'écrit. Blanche-Benveniste mentionne entre autres l'accent d'insistance, l'allongement, la montée de la voix et le ton ironique. Cependant, malgré les différences, savoir s'il est possible de faire une distinction nette entre l'oral et l'écrit est une autre question à envisager que nous n’avons pas l’intention de faire dans cette étude. Tiittula (1993 : 70) donne le courrier électronique comme un exemple où la langue écrite se rapproche de la langue parlée. Selon Blanche-Benveniste (1997 : 35), au lieu de voir une opposition rigide, la linguistique contemporaine a proposé qu'il y a « un continuum de pratiques différentes de la langue, tant par écrit que par oral ». Cette citation renvoie à l'existence de différents niveaux ou genres de langue dont Blanche-Benveniste (1997 : 51–52) présente le classement suivant : familier, populaire, soutenu, académique, littéraire, poétique et archaïque. Elle rapporte aussi un autre type de classement dont l’origine se trouve dans le domaine sociolinguistique : dia-topique (selon le lieu), diachronique (selon le temps), diastratiques (selon les différences sociales) et dia-phasiques (selon les registres). Le fait qu'il existe différents niveaux et genres de langue est étroitement lié à l'idée qu'il ne faudrait pas séparer la langue de sa situation de communication. Selon Defays (2003 : 67), cette idée est généralement acceptée à l'heure actuelle et représente un des principes centraux aussi dans le Cadre 7. Il faut ainsi toujours considérer le contexte, autrement dit, tenir compte de l'interaction et de la présence possible du langage gestuel. Tiittula (1993 : 65) remarque que cette interaction non-verbale contribue au sens des paroles et à la façon dont elles sont interprétées. En ce qui concerne l'interaction, Blanche-Benveniste (1997 : 19) et Luoma (2004 : 28) remarquent que les interlocuteurs s'entraident constamment : ils peuvent s’échanger les structures et les phrases et s'entraider afin de trouver le mot correct, ce qui conduit au changement du tour de parole. Un autre phénomène 7 v. chap. 4 pour le Cadre 13 de l'interaction dans la langue parlée est le fait que le locuteur peut répondre lui-même à sa propre question (Blanche-Benveniste 1997 : 51). Riegel et al. (2006 : 36) ajoutent à ces phénomènes de l’interaction l'utilisation des locutions phatiques comme hein? n'est-ce pas? ou vous voyez? qui servent à contrôler si l'interlocuteur suit ce qui a été dit. Les procédés de l'interaction mentionnés ne sont que quelques exemples mais l'influence de l'interlocuteur est un phénomène constamment présent dans notre corpus. Nous avons dû nous demander à plusieurs reprises si tel ou tel élève aurait atteint un niveau plus élevé ou, au contraire, se serait exprimé moins bien avec un autre partenaire. Nous avons traité jusqu’ici la nature de la langue parlée d'un point de vue assez général. Les exemples plus spécifiques ainsi que les éléments suivants se répètent chez plusieurs linguistes : hésitations, pauses, corrections, chevauchements de parole, répétitions et inachèvements (Blanche-Benveniste 1997 : 21–25, 46 & Luoma 2004 : 9–28 & Tiittula 1993 : 71–72). Ces éléments, liés au processus de production, sont des aspects tout à fait naturels dans le discours oral. Ils ne gênent pas l'interlocuteur qui se concentre sur ce que la personne en question veut dire, non sur la forme exacte et littérale de son discours dont l'interlocuteur ne se rend compte que si tout est transcrit (Blanche-Benveniste 1997 : 9). Au lieu de perturber le discours, ces procédés ont des fonctions importantes dans la langue parlée : par exemple, les pauses peuvent servir non seulement comme marque d'insistance mais aussi pour laisser du temps au locuteur pour réfléchir à ce qu'il va dire et garder son tour de parole (Tiittula 1993 : 71). Selon Blanche-Benveniste (1990 : 25–29), une différence discursive importante entre l'oral et l'écrit tient au « travail de dénomination », autrement dit, dans la langue parlée, le locuteur s'interroge sur l'emploi du terme exact, ce qui se traduit par des commentaires métalinguistiques (comme on dit, comment dire, non pas.., mais...etc) ou par l'utilisation de termes vagues comme truc, machin. Parfois, en cherchant des mots, le locuteur a recours des expressions telles que j'arrive plus à trouver le nom (Blanche-Benveniste 1997 : 18). De plus, des vocalisations et des marqueurs discursifs tels que euh ou ben, ont leur rôle dans l'interaction : ils peuvent signifier une approche indirecte du locuteur ou adoucir le message. (Tiittula 1993 : 72). Blanche-Benveniste (1997 : 21) remarque qu'en dépit 14 des corrections, hésitations et autres caractéristiques de l'oral mentionnées cidessus, dans la plupart des cas, le locuteur arrive à finir ce qu'il avait l'intention de dire. 2.2 Les caractéristiques de la langue parlée en français En ce qui concerne le français en particulier, Blanche-Benveniste (1997) introduit de nombreux éléments. Elle écrit sur « les fautes qui n'en sont plus », autrement dit des phénomènes langagiers devenus si courants qu'ils ne peuvent plus être considérés comme fautes : l'emploi de on pour nous, le nonaccord en nombre de c'est, l'interrogation qui est formulée par est-ce que et le participe non-accordé là où il devrait l'être (1997 : 38–41). BlancheBenveniste remarque (1997 : 44) qu'une grande partie des « fautes » sont plus anciennes « qu'on aurait cru » même si elles ont été expliquées par des facteurs tels que l'influence de la langue étrangère, le manque de maturité ou le développement récent de la langue, ce qui est le cas par exemple de la dislocation mon père, il arrive (1997 : 37). Selon Blanche-Benveniste (1997 : 38–44), d’autres types de fautes sont des « marquages sociaux » liés à l'entourage familial et à l’éducation : l'absence du subjonctif, l’auxiliaire avoir pour être et les relatifs renforcés par c'est que. Blanche-Benveniste classe en tant que « régionalismes » certaines façons de parler liées à la région d'origine du locuteur. Après avoir traité les caractéristiques de la langue parlée du point de vue des fautes, Blanche-Benveniste adopte une autre perspective : elle relève l'existence de nombreux niveaux, registres et genres que nous avons évoqués dans le chapitre précédent. Prenant l’exemple des éléments qui séparent les différents niveaux, Blanche-Benveniste mentionne entre autres les marques de prestige, par exemple l'emploi du passé simple, et le recours aux mots familiers (1997 : 53–54). D’autres éléments mentionnés comprennent le passif qui est presque totalement absent des conversations et le futur simple qui y est beaucoup moins fréquent que dans la langue écrite (1997 : 57). Selon Riegel et al. (2006 : 36), le futur simple est souvent remplacé par le futur proche dans l'oral. En ce qui concerne la syntaxe, selon Blanche-Benveniste 15 (1997 : 56), on pense souvent que dans la langue parlée les subordonnées sont moins fréquentes que dans la langue écrite. Cependant, les études dans le domaine ont montré que les subordonnées font aussi bien partie de la langue parlée que de la langue écrite (idem : 56). En ce qui concerne notre corpus, il faut tenir compte du fait qu'il s'agit d’apprenants d'une langue étrangère et que le point de départ dans l'enseignement du français en Finlande est le français standard. À partir de cette perspective, nous pouvons supposer que les traits qui caractérisent la langue orale des étudiants de notre corpus et celle des locuteurs natifs francophones sont différents, surtout en ce qui concerne les marquages sociaux et l'influence de la région. Il faut se rappeler aussi que les étudiants ont eu quelques minutes pour se préparer, donc la spontanéité généralement associée à la langue parlée ne se réalise pas entièrement. Malgré cela, il sera intéressant de voir si nous pourrons observer les caractéristiques générales de la langue parlée dans l'analyse de notre corpus. . 16 3. Le vocabulaire La maîtrise du vocabulaire dans une langue étrangère représente aujourd'hui un domaine de recherche important qui a des liens étroits avec plusieurs compétences générales et linguistiques (v. chap. 4.1.). Dans ce chapitre, nous nous concentrerons sur deux questions centrales du point de vue de notre étude : Quelle est la définition du mot ? Quelles sont les éléments qui constituent la compétence lexicale ? 3.1 La définition du mot Tout d'abord, nous voulons faire une distinction entre les termes « vocabulaire » et « lexique». Tréville et Duquette constatent (1996 : 12) que « le vocabulaire d'une langue est un sous-ensemble du lexique de cette langue ». D’après elles, le lexique comprend toutes les unités dans un dictionnaire tandis que le vocabulaire renvoie aux unités ou aux mots réalisés dans la communication. Dans notre étude, nous nous tenons à cette distinction, c'està-dire que l'objet de notre étude est le vocabulaire. Tréville et Duquette (1996 : 12) et Read (2000 : 18) divisent les unités lexicales en deux catégories principales : les mots lexicaux et les mots grammaticaux. Dans notre étude, nous suivons cette distinction. Les mots lexicaux comprennent les noms, les verbes, les adjectifs et les adverbes, c'està-dire les classes auxquelles nous nous intéressons. Les mots grammaticaux consistent en déterminants, prépositions, auxiliaires et conjonctions. Read (2000 : 18) y ajoute les pronoms. Le nombre de mots grammaticaux est limité tandis que la catégorie des mots lexicaux est ouverte et illimitée (Tréville et Duquette 1996 : 12). Le choix de ce sujet nous a obligées à réfléchir à la définition du mot. En établissant les statistiques des mots utilisés par les étudiants, nous avons été face à cette question à plusieurs reprises : jouer le piano constitue-t-il une seule unité lexicale ou faudrait-il considérer jouer comme étant un verbe 17 séparé de son complément le piano qui est un nom ? Nous reviendrons à cette question dans le chapitre 6.3.2. Le concept d'une famille de mots renvoie aux unités lexicales qui ont la même base mais des préfixes et des suffixes variés qui peuvent changer la catégorie grammaticale du mot (Tréville et Duquette 1996 : 7 ; Read 2000 : 19). Read remarque que les mots d'une même famille sont parfois comptés comme des unités séparés, parfois comme des occurrences d'une même unité, ce qui fait que les résultats de la recherche sur l'étendue du vocabulaire ne sont pas toujours comparables (2000 : 19). Un autre aspect dont il faut tenir compte est la distinction entre ce que Read (2000 : 17-18) appelle tokens et types. Token renvoie au nombre total de mots dans un corpus tandis qu'avec les types il s'agit de compter le nombre des unités différentes. Autrement dit, on appelle token chaque unité individuelle lorsqu’on compte la totalité des unités dans un corpus donné. Type, lui, correspond à chaque unité différente. Ainsi, un corpus peut contenir par exemple 512 tokens mais seulement 420 types. Dans notre étude, nous nous intéressons plutôt au nombre des unités lexicales différentes, donc types, mais nous tenons également compte de la fréquence d'une même unité, car la répétition est un phénomène typique de la langue parlée (v. chap. 2.1). Revenons à la question de la définition du mot : il est souvent considéré qu'un mot est une unité graphiquement séparée des autres qui l'entourent. Cependant, dans la recherche sur le vocabulaire, on tient compte des idiomes et des mots composés. Les études semblent prouver que, dans la langue, il y a beaucoup d'éléments qui constituent des ensembles et qui ont un rôle important dans la compréhension et dans la production de la langue. Par ces ensembles, on entend des groupes des mots ou syntagmes à sens non prévisibles, des phrases entières ou certains énoncés. D’après Tréville et Duquette (1996 : 15), ces expressions sont « faites chacune d'une chaîne de mots continue, indissociable, qui semble entreposée en mémoire comme un tout préfabriqué et que le locuteur produit d'un bloc sans avoir à effectuer d'effort de construction grammaticale ». Certaines de ces chaînes sont telles que leur sens peut être difficile à déchiffrer à partir des significations des mots individuels (par. ex. Read 2000 : 21). 18 Selon la classification du Cadre, la compétence lexicale est une des souscatégories de la compétence linguistique (v. chap. 4.1). En ce qui concerne les composantes de la compétence lexicale, Read (2000 : 28-35) relève quatre éléments fondamentaux que nous présenterons dans ce chapitre. Premièrement, il y a bien sûr le nombre de mots maitrisés, c'est-à dire l'étendue du vocabulaire. Selon Picoche (1993 : 57), le vocabulaire quotidien d'un francophone natif ne consiste qu'en quelques milliers d'unités et un vocabulaire de 8.000 à 10.000 mots est« déjà une belle richesse ». Toutefois, Read (2000 : 32) remarque que selon les principes de l'approche communicative, on ne devrait pas chercher à estimer l'étendue du vocabulaire totale, mais à évaluer si le vocabulaire de l'apprenant suffit dans une situation donnée. Les deux derniers éléments qui caractérisent les compétences lexicales sont de nature psycholinguistique : l'organisation du lexique (lexicon organisation) qui concerne la manière dont les mots sont stockés dans le cerveau, et les processus lexicaux fondamentaux (fundamental vocabulary processes) dont un locuteur a besoin pour avoir accès à sa connaissance du vocabulaire pour pouvoir comprendre et s'exprimer (Read 2000 : 32–33). Selon Read (2000 : 33), ces processus seraient plus rapides et automatiques chez les locuteurs natifs que chez les apprenants étrangers. Dans la partie empirique de ce mémoire, nous pourrons constater que cela se manifeste sous la forme d’hésitations et de répétition de la part des étudiants. 3.2 La compétence lexicale Defays (2003 : 44) présente le terme lexique mental qui contiendrait, selon les cas, entre vingt mille et cent mille mots. Ce lexique, qui est influencé par l’expérience de la vie en société, se développe tout au long du processus d'acquisition d'une langue (maternelle ou étrangère). L'idée d'un lexique mental est intéressante du point de vue de la didactique. Defays (2003 : 44) constate qu’ « Il sera aussi fort utile de savoir comment ce lexique mental est activé au cours d’une communication, que ce soit au plan de la compréhension ou de l’expression ». Selon Defays (2003 : 44), les 19 enseignants peuvent aider les apprenants en leur demandent d’expliciter les stratégies auxquelles ils ont recours quant à la mémorisation et à l'emploi des mots, et leur offrir de nouvelles stratégies d'apprentissage. Selon Tréville et Duquette (1996 : 152), « à un degré approfondi de la connaissance d'un mot, le candidat doit être capable de produire ce mot et de l'employer conformément aux règles d'usage imposées par la situation ». Cette remarque tient compte de la compétence pragmatique qui est une partie importante du deuxième facteur défini par Read : la connaissance des caractéristiques d'un mot. En plus du côté pragmatique, cette compétence inclut un certain savoir sur la façon dont les mots se comportent syntaxiquement. La maîtrise des différentes significations d'un même mot a aussi sa place dans les connaissances des caractéristiques d'un mot, mais il faut se rappeler que, même pour les locuteurs natifs d'une langue, certains mots sont mieux maîtrisés que d'autres (Read 2000 : 32). 20 4. Le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECR) Dans divers pays, y compris en Finlande, le Cadre européen commun de référence pour les langues est devenu la référence pour les programmes d’éducation qui s’oriente vers les langues. Selon Rosen (2007 : 9–10), les premiers pas vers le Cadre ont été pris par les experts réunis en Suisse, en 1991, lors d’un symposium intergouvernemental organisé sur le thème de « Transparence et cohérence dans l’apprentissage des langues en Europe : objectifs, évaluation, certification ». Il y a plusieurs raisons pour lesquelles les nations européennes avaient décidé de créer un outil tel que le Cadre. Rien qu’en Europe, il existe des dizaines de diplômes différents qui décrivent les niveaux des compétences langagières et entre lesquels la comparaison est difficile. D’abord, dans le contexte européen, le Cadre (p. 9) offre « une base commune pour l’élaboration de programmes de langues vivantes, de référentiels, d’examens, de manuels, etc. ». Ensuite, le Cadre décrit et énumère des connaissances et des habiletés qu’un apprenant doit acquérir afin d’avoir un comportement langagier efficace, sans oublier le contexte culturel. Enfin, le Cadre définit les niveaux de compétence « qui permettent de mesurer le progrès de l’apprenant à chaque étape de l’apprentissage et à tout moment de la vie. » (Le Cadre : 9). Autrement dit, pour avoir plus de transparence avec les niveaux et les compétences entre les apprenants aussi bien dans un pays qu’au niveau international, les experts, avec le soutien du Conseil de l’Europe, ont mis en place le Cadre qui prend en compte tous les niveaux d’apprenants dans le contexte européen.8 Dans le Cadre (p.15), une perspective actionnelle est mise en valeur : un apprenant d’une langue est considéré comme un acteur social qui est censé accomplir des tâches dans une situation donnée et à l’intérieur d’un domaine d’action particulier. (v. chap. 4.5.) Pour être capable de bien accomplir des tâches linguistiques, l’apprenant utilise différentes compétences. Dans le 8 http://www.coe.int/T/DG4/Portfolio/?L=F&M=/documents_intro/common_ frameworkf.html. 21 Cadre, les compétences ont été divisées en deux catégories principales : d’abord, les compétences générales telles que les savoirs, aptitudes et savoirs, savoir-être et savoir-apprendre. Ensuite les compétences communicatives langagières qui comprennent les compétences linguistiques, pragmatiques et sociolinguistiques. (Le Cadre : 86–101). (v. chap. 4.1.). Le Cadre, qui a été diffusé en dix-huit langues9, n’est ni prescriptif ni dogmatique. Il n’a donc aucune intention d’imposer une méthodologie d’enseignement ou de déterminer des objectifs à atteindre, ce qui est exprimé dans le paragraphe suivant. […] il ne s’agit aucunement de dicter aux praticiens ce qu’ils ont à faire et comment le faire. Nous soulevons des questions, nous n’apportons pas de réponses. La fonction du Cadre européen commun de référence n’est pas de prescrire les objectifs que ses utilisateurs devraient poursuivre ni les méthodes qu’ils devraient utiliser. Ce qui ne veut pas dire que le Conseil de l’Europe soit indifférent à ces questions. De fait, les collègues des pays membres qui collaborent aux projets Langues vivantes du Conseil de l’Europe ont consacré, au fil des ans, beaucoup de réflexion et de travail à l’établissement de principes et à la pratique dans le domaine de l’apprentissage, de l’enseignement et de l’évaluation des langues. (Le Cadre : 4) Comme il est dit dans le paragraphe précédent, le Cadre peut être envisagé en fonction des aspects suivants : apprendre, enseigner et évaluer. Tagliante (2005) présente ces trois catégories du Cadre de la façon suivante : du point de vue d’un apprenant, le Cadre aide les apprenants de toutes les langues et de tous les niveaux différents à savoir quel niveau de compétence ils souhaitent maîtriser et à établir les éléments communs à atteindre au cours de chacune des étapes de l’apprentissage. Les enseignants peuvent trouver les objectifs d’apprentissage et d’enseignement à l’aide des niveaux de compétence allant du niveau A1 (utilisateur élémentaire) à C2 (utilisateur expérimenté). Les évaluateurs, souvent les professeurs, ont la possibilité de se référer aux mêmes niveaux de compétences et de comparer les objectifs d’apprentissage et d’enseignement pour toutes les langues. (2005 : 33–34). Quant à l’évaluation des compétences langagières dans le Cadre, Tagliante (2006 : 25–27) affirme qu’ « En ce qui concerne l’évaluation des compétences langagières, le souhait des auteurs est que ce concept de communauté valorise 9 En 2006 http://www.fdlm.org/fle/article/344/344cadre.php. 22 et concrétise une conception de l’évaluation commune et partagée au sein des États membres qui ont signé des accords éducatifs avec le Conseil de l’Europe et bien au-delà des frontières officielles de l’Europe actuelle ». Dans ce travail, notre principal intérêt portera sur le domaine de l’évaluation tandis que les domaines de l’apprentissage et de l’enseignement seront exclus. En outre, nous présenterons sous la forme d’un tableau « l’échelle CECR », un outil de l’évaluation, et sa correspondance par rapport à l’échelle finlandaise (v. chap. 4.2. et 4.3). Cette échelle finlandaise de dix niveaux forme la base de l’évaluation dans le projet HY-TALK. 4.1 Les compétences d’un apprenant dans le CECR Actuellement, la notion de la compétence est souvent mentionnée dans le domaine de la didactique. Dans ce mémoire, aussi, il s’agit au fond de l’évaluation de certaines compétences. Bachmann (1991 : 671–704) renvoie aux études qui montrent qu’une compétence langagière consiste en plusieurs habiletés telles que les connaissances langagières et les stratégies métacognitives. Selon Defays (2003 : 156), en didactique et dans l’enseignement, « les compétences visent directement l’action en se déclinant sous la forme être capable de… réaliser telle opération, de résoudre tel problème, y compris d’acquérir de nouvelles connaissances et compétences ». Dans le Cadre, les compétences sont divisées en deux catégories majeures : les compétences générales et les compétences communicatives langagières. Les locuteurs d’une langue utilisent « un certain nombre de compétences acquises au cours de leur expérience antérieure ». Les compétences générales ne sont pas directement liées avec des compétences linguistiques mais elles sont présentes dans toutes les activités de la vie, y compris dans les activités langagières. Les compétences communicatives, par contre, présentent plusieurs combinent composantes les deux spécifiquement ensembles de linguistiques. compétences, Les utilisateurs générales et communicatives, « afin de réaliser des intentions communicatives. » Le Cadre (p. 82–101). 23 4.1.1 Les compétences générales Comme nous l’avons constaté ci-dessus, les compétences générales représentent les compétences qu’un individu possède à travers son expérience personnelle et qui lui permettent d’agir dans la vie de tous les jours. Dans le Cadre (p.82–86), ces compétences générales sont divisées en quatre savoirs : savoir, aptitudes et savoir-faire, savoir-être et savoir-apprendre. (p. 14). En premier lieu, il y a le savoir, qui recouvre la culture générale (la connaissance du monde), par exemple des lieux, des institutions et des organismes, des personnes, des objets. Les deux aspects du savoir sont le savoir socioculturel et le savoir interculturel. Concrètement, il s’agit de la vie quotidienne, des relations interpersonnelles, des valeurs, des croyances et des comportements etc. Pour ce qui est du savoir, les utilisateurs du Cadre, par exemple les enseignants, peuvent se demander à quel niveau les apprenants connaissent la culture générale du pays dont ils apprennent la langue. Ils peuvent aussi traiter des questions telles que « Quelle expérience et quelle connaissance nouvelles de la vie en société dans sa communauté ainsi que dans la communauté cible l’apprenant devra - t - il acquérir afin de répondre aux exigences de la communication en L2 ? ». (p. 83). Ensuite, la deuxième compétence, les aptitudes et savoir-faire, comprend les aptitudes qui sont liées par exemple à la vie professionnelle ou aux loisirs (arts, passe-temps, sports). Rosen (2007 : 24–25) affirme que le savoir-faire exprime la capacité d’utiliser différentes stratégies pour entrer en contact avec les natifs d’une langue étrangère. Il s’agit de la sensibilisation à des cultures différentes. Dans ce cas là, les utilisateurs du Cadre demandent par exemple « Quelles sont les possibilités qu’aura l’apprenant de jouer le rôle d’intermédiaire culturel ? ». (p. 84). Rosen (2007 : 24–25) formule la troisième compétence, le savoir-être, comme représentant les traits de la personnalité, tels que les traits caractéristiques plus ou moins extravertis ou introvertis. Dans le Cadre (p. 84), cette capacité recouvre les attitudes, les motivations, les valeurs, les croyances, les styles cognitifs et les traits de la personnalité. Les enseignants 24 envisageront, par exemple, les caractéristiques personnelles que les apprenants auront besoin de développer ou seront encouragés à développer. Enfin, selon le Cadre (p.85–86), la dernière compétence est le savoirapprendre, c’est-à-dire la capacité à utiliser des savoirs antérieurs au bénéficie de la nouvelle connaissance. À nouveau, par exemple les enseignants, peuvent se poser une question telle que « Quelles conditions sont mises en place pour que les apprenants deviennent de plus en plus indépendants dans leur apprentissage et leur utilisation de la langue ? » 4.1.2 Les compétences à communiquer langagièrement Nous avons présenté les aptitudes générales que les apprenants doivent d’abord mobiliser dans les actions communicatives. Cependant, la compétence communicative comprend aussi des composantes plus spécifiques : la compétence linguistique, sociolinguistique et pragmatique. 4.1.2.1 La compétence linguistique Selon Tagliante (2001 : 48), la composante linguistique a « trait aux savoirs (étendue et qualité des connaissances) ainsi qu’aux savoir-faire (capacité à organiser et mobiliser ses connaissances) lexicaux, grammaticaux et phonétiques. » Le Cadre (p. 86–101) présente les compétences linguistiques suivantes : lexicale, grammaticale, sémantique, phonologique et orthographique. Dans le chapitre 3.2, nous avons déjà présenté la compétence lexicale qui a une position centrale dans notre mémoire. Selon le Cadre (p. 87), « Il s’agit de la connaissance et de la capacité à utiliser le vocabulaire d’une langue qui se compose : d’éléments lexicaux et d’éléments grammaticaux et de la capacité à les utiliser ». Le Cadre (p. 87) définit les éléments lexicaux comme les expressions toutes faites, les locutions figées et les mots isolés. Les éléments grammaticaux appartiennent à des classes fermées de mots comme les articles et les pronoms. La compétence grammaticale, elle, renvoie aussi bien aux connaissances grammaticales de la 25 langue (éléments, catégories, classes, structures, opérations et relations) qu’à la capacité à les utiliser. Dans ce mémoire, notre intérêt étant aussi bien les mots que les structures, cette compétence est la mise en œuvre des principes qui permettent de constituer les chaines de mots. Selon Tagliante (2001 : 49), la compétence sémantique est « une capacité à produire du sens, tout en respectant la forme. » Dans le Cadre (p. 91), la sémantique lexicale traite des questions liées au sens des mots : la relation entre le mot et le contexte, le référence, la connotation etc. La compétence linguistique phonologique qui, selon le Cadre (p. 91), « suppose une connaissance de la perception et de la production et une aptitude à percevoir et à produire par exemple les phonèmes, les allophones et les traits phonétiques qui distinguent les phonèmes. » Les dernières compétences linguistiques sont les compétences orthographiques et orthoépiques, qui, selon le Cadre, renvoient aux capacités à reconnaître et à produire des écritures différentes et à respecter les règles orthographiques correctes. Dans ce travail, ces deux dernières compétences ont été laissées de coté. 4.1.2.2 La compétence sociolinguistique La deuxième composante est la compétence sociolinguistique, qui, selon le Cadre (p. 93–94) « porte sur la connaissance et les habilités exigées pour faire fonctionner la langue dans sa dimension sociale. » Plus spécifiquement, il s’agit de questions qui traitent de l’usage des langues telles que les marqueurs des relations sociales (choix des salutations), les règles de politesse (utilisation convenable de merci, s’il vous plaît, etc.) ou les expressions de la sagesse populaire (expressions idiomatiques). 26 4.1.2.3 La compétence pragmatique Selon le Cadre (p. 96), la dernière composante, la compétence pragmatique, renvoie aux connaissances discursives et à la capacité à structurer le texte. Dans ce travail, notre intérêt porte sur la capacité des élèves à formuler des phrases dans des ensembles cohérents. Notre point de départ est qu’un mot doit toujours avoir un contexte et ne pas exister de manière détachée. Les compétences mentionnées forment une base théorique et un point de départ dans le chapitre 6 dans lequel nous définirons les principes selon lesquels nous avons accepté les mots et les structures dans nos analyses. 4.2 Les six niveaux de compétences Le Cadre définit six niveaux de compétence en langue pour toutes les langues vivantes. Ces niveaux permettent par exemple la formulation des critères qui déterminent qu’un objectif d’apprentissage est atteint. À l’aide de ces niveaux, il est aussi possible de décrire et de comparer les compétences des élèves dans les tests ou examens. Quant à ces six niveaux, la notion de la communauté est encore mise en valeur. Par exemple, Tagliante présente deux types de communautés différentes : la Communauté de niveaux de compétences et la Communauté de pratiques évaluatives. Dans le premier, « les six niveaux définis dans le CECR sont adoptés par de nombreux ministères en charge de l’éducation et permettent d’harmoniser les programmes de langues dans les systèmes scolaires. » Autrement dit, dans plusieurs pays européens, il existe un accord qui permet l’uniformité de l’évaluation. Le deuxième type de communauté donne « la possibilité de se référer, pour toutes les langues, aux mêmes six niveaux de compétences et offre l’immense avantage de pouvoir comparer entre eux les résultats des évaluations en langues, qu’elles soient sommatives (diplômes, certificats, attestations) ou formatives. » (2006 : 25–27) 27 Rosen (2007 : 37) et Tagliante (2005 : 41–44), entre autres, expliquent comment les six niveaux de compétences (v. chap. 4.3) sont séparés en trois catégories majeures : A, B et C. Ces niveaux sont subdivisés en deux parties. Le niveau A, le niveau élémentaire de l’apprenant novice, comprend les deux sous catégories suivantes : A1 est le niveau introductif (ou « de découverte ») et A2 représente le niveau intermédiaire (ou « de survie »). Rosen (2007 : 37) donne la définition suivante des apprenants qui se trouvent au niveau A : « L’apprenant de niveau A1 est capable d’interagir de façon simple, quand le domaine lui est familier ; celui de niveau A 2 peut se débrouiller à condition qu’il n’y ait pas de problème et maitrise certaines fonctions fondamentales telles que saluer ou demander des informations » . Le niveau B est celui de l’utilisateur indépendant. Le niveau B1 est décrit comme un « seuil » de communication. Tagliante (2005 : 41–42) écrit qu’au niveau B1, « l’apprenant est […] capable de se débrouiller en voyage dans le pays de la langue cible, dans des situations de la vie quotidienne ». Rosen constate que le niveau B2 est le niveau avancé, celui de l’utilisateur indépendant qui peut s’exprimer sans effort et se corriger sans aide. Le dernier niveau, celui de l’apprenant expérimenté, comprend le niveau C1, l’utilisateur autonome, et C2, l’utilisateur qui maitrise la langue-culture (2007 : 37–38). Selon Tagliante (2005 : 43), les locuteurs du niveau C ne doivent cependant jamais être considérés comme étant des locuteurs natifs. Rosen (2007 : 40–41) partage le même point de vue en disant que l’utilisateur au niveau C2 a atteint un degré de précision de la langue qui se rapproche de celui du locuteur natif mais qui ne l’égale pas. Selon Hilden et Takala (2007 : 291–300), les niveaux les plus avancés sont rarement atteints dans le système scolaire normal. Dans le projet HY-TALK, les évaluateurs ont utilisé une échelle des compétences langagières de dix niveaux qui en principe suit le Cadre, mais qui est plus détaillée (v. annexe 1). Dans le prochain chapitre, nous présenterons cette échelle et son équivalence avec les six niveaux de compétences dans le Cadre européen. 28 4.3 L’échelle des compétences langagières en Finlande Les six niveaux du Cadre ne sont pas figés dans tous les pays ou dans tous les contextes. Chaque niveau permet une subdivision par rapport aux publics et à leurs besoins. En Finlande, par exemple, on utilise généralement une échelle de dix niveaux de compétences qui est une adaptation basée sur le Cadre (v. annexe 1). Hilden et Takala (2007 : 291–300) constatent que le travail sur l’échelle finlandaise a commencé en 2001. Ils (2007 : 291–300) ajoutent que l’échelle des compétences langagières en Finlande correspond au Cadre et au Plan national d’enseignement finlandais (PNE ; v. chap. 4.4) quant aux activités de communication : la compréhension orale, l'expression orale, la compréhension écrite et l'expression écrite.10 Beaucoup de descripteurs (v. chap. 4.5) dans l’échelle finlandaise dérivent du Cadre mais comme nous l’avons déjà constaté, une échelle plus détaillée est considérée comme plus convenable dans le contexte finlandais. En effet, dans le Cadre, les échelles sont trop vastes pour décrire la véritable progression des élèves. La correspondance entre les échelles du PNE et celle du Cadre est présentée dans le tableau 3. 10 L’échelle contenue dans le PNE http://www.edu.fi/page.asp?path=498,1329,1513,10882,19183 29 Tableau 311 L’échelle du CECR A1 Niveau introduc tif ou de découve rte A2 Niveau intermé diaire ou de survie B1 Niveau seuil L’échelle contenue dans le PNE 12 A1.1 A1+(ou A1.1) A1 A2.1 A2 A2.2 (ou A2+) A1.1 Niveau introductif A1.2 Niveau introductif avancé A1.3 Niveau introductif opérationnel A2.1 Niveau intermédiaire A2.1 Niveau intermédiaire avancé B1.1 B1.2 (ou B1+) B1 B1.1 Niveau seuil B1.2 Niveau seuil avancé B2 Niveau avancé ou utilisate ur indépen dant C1 Niveau autonome B1.1 B2 B2.1 Niveau indépendant C2 Niveau maîtrise C2.1 C2.2 (ou C2+) 11 B1.2 (ou B1+) C1.1 C1.2 (ou C1+) B2.2 Niveau indépendant opérationnel C1 C1.1 Niveau autonome de base Source: Hilden & Takala (2007 : 291-300) L’échelle des compétences langagières en Finlande : http://www.edu.fi/page.asp?path=498,1329,1513,10882,19183 http://www.oph.fi/ops/perusopetus/pops_web.pdf 12 Les Niveaux finlandais du Cadre sont traduits en français par nous-mêmes. 30 4.4 Le Plan national d’enseignement finlandais En Finlande, tous les objectifs principaux de l’enseignement sont définis dans le Plan national d’enseignement finlandais pour les études de base (POPS)13 en 2004 et en 2003 dans le Plan national d’enseignement finlandais pour le lycée (LOPS) 14. Hilden et Takala (2007 : 291–300) constatent qu’en Finlande, dès 2005, l’échelle des compétences langagières finlandaise a été adoptée pour tous les niveaux obligatoires d’éducation de base ainsi que secondaire, après des expériences positives pendant dix ans dans l’éducation pour les adultes. Cette échelle des compétences, autrement dit l’échelle contenue dans le PNE, constitue la base des objectifs définis pour l’enseignement des langues étrangères dans le système scolaire finlandais. Le POPS (2004 : 132) met en avant les compétences communicatives. Dans le système éducatif finlandais, il existe trois repères nationals destinés à contrôler la progression des élèves : premièrement, à la fin de la classe 6, ensuite à la fin de la classe 9 et, enfin, à la fin du lycée, au moment du baccalauréat. Les critères pour obtenir la note 8 dans les langues étrangères (sauf l’anglais) à la fin de la classe 9 sont présentés dans l’échelle ci-dessous. Comme notre intérêt est dirigé vers la compétence orale, dans cette échelle, le critère le plus important est l’expression orale. Autrement dit, pour atteindre la note 8, un apprenant qui a commencé à étudier le français en classe 3 ou 4, devrait avoir les compétences définies pour le niveau A2.1 dans l’expression orale. Il est à noter que la note finale se compose de l’évaluation portant sur les quatre compétences dans leur ensemble et pas seulement sur l’évaluation de l’expression orale. 13 14 Perusopetuksen opetussuunnitelman perusteet. Les neuf premières années de scolarisation. Lukion opetussuunnitelman perusteet. 31 L’échelle de la compétence langagière des langues étrangères à la fin de la classe 9 (Programme A) Compréhension de l’oral Langues A2.2 étrangères le niveau intermédiaire en voie de développement Expression orale A2.1 le niveau intermédiaire Compréhension de l’écrit A2.2 le niveau intermédiaire en voie de développement Expression écrite A2.1 le niveau intermédiaire 4.5 Les descripteurs de compétences dans le CECR Le Cadre contient des descriptions de compétences qui ont une fonction importante dans l’évaluation. Les listes de descripteurs sont longues et concernent les six niveaux de compétences définis dans le chapitre précédent. À chaque niveau, les apprenants doivent pouvoir communiquer en français dans des situations variées. Selon le Cadre (p. 148), les descripteurs doivent être précis et « décrire les traits concrets de la performance, des tâches concrètes et/ou des niveaux concrets de capacité à réaliser les performances ». Les descripteurs doivent aussi être clairs et il faut éviter un vocabulaire « jargonnant ». Finalement, il faut qu’ils soient brefs puisque il est impossible « de se référer à un descripteur de plus de deux phrases pendant les opérations d’évaluation ». Ces descripteurs permettent d’établir des comparaisons entre les compétences des élèves ou entre les examens de tous les niveaux. Dans chaque niveau, il existe des descripteurs détaillés qui définissent les compétences d’un apprenant dans différentes activités. Rosen (2007 : 40) cite le Cadre de la façon suivante : l’ensemble des descripteurs est proposé les 8 activités (production orale et écrit, orale et écrit et médiation orale et compétences linguistique, pragmatique quelque 50 échelles des descripteurs communicatives et 13 pour les aspects langagières). dans le Cadre pour les 6 niveaux, réception orale et écrit, interaction écrite) et différents aspects des et sociolinguistique, soit au total (plus de 30 pour des activités des compétences communicatives 32 Rosen (2007 : 40) constate que « selon ces descripteurs, dès le niveau A1, l’utilisateur/apprenant, novice, peut jouer de manière minimale son rôle d’acteur social, à condition que son interlocuteur collabore et l’aide à maintenir le fil de l’interaction ». Rosen (2007 : 41) affirme également que d’une part, les situations, les thèmes et les objets de la prise parole sont définis (par exemple participer à une conversation ou à un débat) et que, d’autre part, le Cadre contient des attentes à l’égard des performances des apprenants comme « se débrouiller avec les nombres, débattre de manière convaincante ». Rosen (2007 : 40–41) constate que les descripteurs ont presque toujours été formulés d’une façon positive : les savoir-faire sont décrits par des affirmations qui commencent par « je peux… ». Les descripteurs du niveau dans l’échelle contenue dans le PNE sont faits selon le même principe. Par exemple, un apprenant au niveau A2.1 (A2.1 le niveau intermédiaire) « Sait décrire son entourage simplement ou raconter une série d’événements en courtes phrases » ou « Produit certains morceaux de conversation mais avec des pauses et des recommencements parfois erronés ». (v. annexe 1). Dans le projet HY-TALK, l’échelle de dix niveaux, y compris les descripteurs de compétences, est adaptée pour les aspects évalués (v. chap. 1.1). Prenons un exemple de l’étendue du vocabulaire : au niveau A2.1, le descripteur est formulé de la façon suivante : « Prévoit le sens du vocabulaire de base et plusieurs structures essentielles temps du passé et conjonctions ». (v. annexe 2). 4.6 L’approche actionnelle Les méthodologies dans l’enseignement du français langue étrangère (FLE) ont évolué de l’époque de la méthodologie traditionnelle jusqu’à nos jours. Si la méthodologie traditionnelle était basée sur l’enseignement exclusif de la norme (les règles grammaticales), l’approche communicative met l’accent sur 33 la compétence de communication sans oublier un savoir-faire social (v. chap. 4.1.1) Lautenbacher (1998 : 84–86). Après l’approche communicative de l’enseignement, une nouvelle approche pédagogique appelée « approche actionnelle » est mise en avant aussi bien dans le Cadre que dans la didactique des langues étrangères. Dans le Cadre (p. 15), l’apprenant d’une langue est considéré comme un acteur social qui doit accomplir différentes tâches à l’intérieur d’un domaine d’action particulier, dans des circonstances et un environnement donnés. L’approche actionnelle trouve sa correspondance dans les compétences définies dans le chapitre 4.1. Dans le Cadre (p. 15), l’usage et l’apprentissage d’une langue comprennent les actions accomplies par des gens qui, comme individus et comme acteurs sociaux, développent un ensemble de compétences générales et, notamment une compétence à communiquer langagièrement. Ils mettent en œuvre les compétences dont ils disposent dans des contextes et des conditions variés et en se pliant à différentes contraintes afin de réaliser des activités langagières permettant de traiter (en réception et en production) des textes portant sur des thèmes à l’intérieur de domaines particuliers, en mobilisant les stratégies qui paraissent le mieux convenir à l’accomplissement des tâches à effectuer. Au début de ce chapitre, nous avons présenté la nature descriptive du Cadre. Cependant, Goullier (2005 : 21) remarque que même si le Cadre ne recommande pas une école linguistique particulière, l’approche actionnelle est présentée comme la seule conception de l’enseignement et de l’apprentissage. 4.6.1 Les tâches communicatives langagières dans le CECR Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, dans le Cadre, les apprenants sont considérés comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches. Dans ce chapitre, nous éclaircirons brièvement la nature communicative des tâches. Le Cadre (p. 16) définit une tâche communicative « comme toute visée actionnelle que l’acteur se représente comme devant parvenir à un résultat donné en fonction d’un problème à résoudre, d’une obligation à remplir, d’un but qu’on s’est fixé ». Goullier (2005 : 21) constate que l’apprentissage et l’enseignement des langues « privilégie les tâches mettant en œuvre une ou 34 plusieurs activités langagières, pour lesquelles l’acteur social mobilise, selon les stratégies acquises, ses compétences générales individuelles et sa compétence communicative ». Rosen (2007 : 31) présente les quatre types d’activités dans le Cadre et les stratégies qui y sont liées : la réception, la production, l’interaction et la médiation. Autrement dit, la compétence langagière se réalise à travers ces quatre activités dans lesquelles on peut trouver plusieurs composantes qui sont évaluables. Rosen (2007 : 33–34 ) constate que dans les activités de réception, on écoute un locuteur ou on lit un texte. Dans les activités de production, on parle ou on écrit. Dans les activités d’interaction, des interlocuteurs se parlent ou s’écrivent, chacun à leur tour. La médiation correspond à la traduction ou à l’interprétation, c'est-à-dire que l’utilisateur joue un rôle intermédiaire, par exemple traduit le menu, entre des interlocuteurs qui ne sont pas en mesure de se comprendre. Dans notre corpus, le projet HY-TALK, les activités utilisées sont la production, l’interaction et la réception. Dans la première tâche dans laquelle les élèves se présentent,15 se réalise seulement l’activité de production. Les tâches 2, 3 et 4 sont des activités orales d’interaction dans lesquelles deux élèves discutent. Dans ces tâches, le rôle de la réception est également décisif parce que les locuteurs doivent se comprendre. 4.6.2 Les domaines d’utilisation de la langue dans les tâches Il est évident que les tâches doivent être adaptées aux besoins des apprenants. Tagliante (2005 : 51) renvoie au Cadre et constate que les activités sont liées à certains domaines dans la vie sociale tels que le domaine personnel, public, professionnel et éducationnel dans lesquels un apprenant est amené à réaliser des tâches communicatives. Elle affirme que, normalement, lors de l’acquisition des premiers niveaux (A1 à B1), les tâches sont liées à la vie quotidienne et aux domaines privés et publics. De niveaux B2 à C2, les 15 Les discussions avec un locuteur natif / une locutrice native sont exclues de notre corpus. 35 domaines éducationnels et professionnels sont mis en avant car ils offrent des tâches plus complexes. Dans notre étude, comme il est question des adolescents, les quatre tâches appartiennent au domaine personnel et les étudiants discutent des sujets quotidiens. (v. chap. 1.2). 36 5. L’évaluation de la compétence langagière orale La compétence langagière orale est une compétence complexe. Comme nous l’avons déjà constaté (v. chap. 1), elle est composée de plusieurs traits qualitatifs. Un évaluateur, souvent un enseignant, doit tenir compte de tous ces aspects qualitatifs dans le processus d’évaluation. Il doit également prendre en compte les divers savoirs et savoir-faire mentionnés dans le chapitre précédent. Noël-Jothy et Sampsonis (2006 : 27) renvoient aux approches communicatives qui ont modifié les pratiques des enseignants du FLE : elles constatent qu’un évaluateur doit tenir compte de la perspective actionnelle qui met en valeur le rôle social de l’utilisateur (v. chap. 4.6). Cette perspective est mise en avant aussi dans le Cadre. Dans ce chapitre, nous présenterons plus précisément ce qui a été dit sur le domaine de l’évaluation, surtout quant à la compétence orale. Cuq et Gruca (2005 : 209–210) définissent l’évaluation de la manière suivante : L’évaluation est […] un rapport central que toute formation instaure entre des objectifs plus ou moins clairement énoncés au départ, déterminant un programme de connaissance à acquérir, et des acquisitions dont il faut témoigner ou des compétences terminales à constater officiellement par des instruments considérés comme particulièrement fiables . Le Cadre (p. 134) énumère plusieurs aspects évaluables dans un programme de langue : la rentabilité de certains matériels pédagogiques ou méthodes, le type et la qualité du discours effectivement produit, la satisfaction de l’enseignant et celle de l’apprenant, l’efficacité de l’enseignement, etc. Cependant, lorsque l’on parle d’évaluation, il ne s’agit pas toujours d’examens, de tests ou d’autres moyens plus ou moins conscients. Selon Defays (2003 : 172), un enseignant évalue sans cesse les élèves, volontairement ou involontairement, explicitement ou implicitement, afin d’être sûr que leur apprentissage progresse. L’auteur constate néanmoins qu’il ne faut pas sous-estimer l’examen, qui, selon lui, représente une valeur symbolique de l’évaluation et qui est une preuve de « la crédibilité de 37 l’enseignement ». Tagliante (2005 : 87) affirme que l’évaluation d’une compétence complexe, c’est tenir en compte « non seulement les divers savoirs et savoir-faire, mais également tout ce qui relève de la sensibilité, de l’imagination, de l’opinion personnelle et de l’affectivité de l’individu. En un mot, de sa personnalité ». Il existe encore une dimension importante dans l’évaluation. Par exemple, Defays (2003 : 172) et Cuq et Gruca (2005 : 217) constatent que les apprenants s’auto-évaluent, chacun par rapport à soi ou par rapport aux autres. Dans ce travail, nous traiterons l’évaluation de la compétence langagière en laissant les autres aspects de côté. Nous avons déjà constaté dans le chapitre 2 que la langue parlée a des traits différents par rapport à la langue écrite. Nous avons également présenté la complexité de la compétence langagière orale (v. chap. 4.1). Comment donc évaluer cette compétence de façon sérieuse et juste ? Selon Luoma (2004 : 20–28), il est important que l’évaluation se concentre sur ce qui est essentiel dans l’expression orale : tout d’abord, un évaluateur doit comprendre quels sont les traits caractéristiques de la langue parlée, deuxièmement, il faut définir le type de la langue parlée utilisée dans le test et le domaine de l’utilisation (v. chap. 4.6.2). Quant au type de la langue parlée, Luoma (2004 : 22) renvoie à Brown et al (1984) qui envisagent deux cas différents : la langue parlée reliée à la discussion en ligne « chatting » et la langue parlée reliée au transfert d’information sur un sujet exact. La troisième étape est le développement des tâches et des critères. Ensuite, il est important que les élèves soient au courant des objectifs du test. Enfin, il faut vérifier que le processus d’évaluation s’est déroulé comme prévu. Noël-Jothy et Sampsonis (2006 : 52–53) présentent l’exemple suivant de la réalisation concrète d’un test oral : tout d’abord, le test d’expression orale est enregistré, ensuite les examinateurs utilisent des échelles de critères d’évaluation qui prennent en compte différents critères de capacité langagière, tels que l’exactitude linguistique du discours (la capacité à utiliser des structures grammaticales ainsi qu’un vocabulaire correct), l’étendue des compétences linguistiques (la capacité à utiliser un large éventail de mots et de structures grammaticales), la prononciation, la compétence discursive, la compétence interactive et la réussite globale. Nous pouvons constater que 38 dans le projet HY-TALK, le processus d'évaluation de la compétence langagière a, en principe, suivi ce déroulement. L’approche actionnelle, qui considère l’étudiant comme un acteur social dans les différents contextes, est basée sur les tâches communicatives que l’apprenant doit réaliser. L’évaluation des étudiants est faite en fonction de critères définis à priori. Dans le chapitre 4.6, nous avons présenté les principes de l’approche actionnelle et la nature des tâches communicatives. Selon Fulcher (2003 : 86), il existe beaucoup de classifications sur les tâches qu’un évaluateur peut utiliser selon le but ou le niveau des apprenants. L’auteur met en valeur l’importance de la relation entre les tâches communicatives et l’évaluation. Un évaluateur doit toujours se demander si la performance d’un apprenant est mesurable dans la tâche choisie et s’il est possible de tirer des conclusions sur les résultats obtenus. Saville et Hargreaves (1999 : 42–51 ) déclarent que les tâches exécutées avec une paire (testing speaking in pairs) permettent de tirer des conclusions plus vastes de la compétence langagière. Ils donnent l’exemple d’une étude qui consiste en quatre tâches, dont chacune varie entre 3 et 4 minutes. Les tâches sont accomplies individuellement et avec un ou deux interlocuteurs. Selon Saville et Hargreaves, ce procédé permet d’évaluer des aspects tels que la cohérence, l’interaction, l’exactitude, la pertinence, la prise de parole, la négociation, l’initiation etc. L’exemple de Saville et Hargreaves montre les ressemblances avec le projet HY-TALK. D’après nous, le projet HY-TALK permet l’évaluation d’aspects différents de manière assez exhaustive. Comme nous l’avons déjà souligné, afin d’obtenir des résultats justifiés, l’évaluateur doit trouver des tests et des échelles valides qui parviendront à mesurer les compétences d’un apprenant de façon satisfaisante. Luoma (2004 : 82) constate que dans le processus d’évaluation, il est souvent tentant d’utiliser une échelle déjà existante. Par exemple, les enseignants peuvent utiliser des échelles du Cadre. Cependant, selon Luoma, il faut toujours se demander si l’échelle choisie mesure les compétences concernées. Goullier (2005 : 90), entre autres, trouve que ces échelles toutes prêtes rendent la tâche du professeur « relativement simple » en ce qui concerne l’évaluation du niveau de compétence des élèves dans les activités de production. 39 5.1 L’évaluation holistique vs. l’évaluation analytique L’évaluation d’une langue étrangère peut être approchée de plusieurs manières. Selon Tagliante (2005 : 55–60), il existe dans le Cadre (p. 138–143) une typologie de treize pratiques évaluatives courantes. Les chapitres 5.1-5.3 sont consacrés aux présentations des approches que nous trouvons essentielles pour la compréhension de la nature de l’évaluation de la compétence langagière. Selon Huhta (1993 : 147) et Luoma (2004 : 61), dans l’approche holistique, la performance est évaluée sous tous les aspects, c'est-à-dire que l’apprenant ne reçoit qu’une note couvrant plusieurs compétences. D’après Huhta (1993 : 150–152 ), l’évaluation holistique peut être justifiée : la prononciation, la fluidité ou la correction de la langue utilisée par un apprenant ne se développent pas au même rythme « standard ». L’auteur constate que la compétence langagière d’un apprenant avancé évolue petit à petit dans un ensemble plus uniforme. Cependant, comme l’évaluation holistique est souvent basée sur la combinaison des compétences différentes, les descripteurs et les échelles basés sur l’évaluation holistique ne peuvent pas donner une image exacte de la compétence langagière des apprenants (Huhta 1993 : 150–152 ). Si les différents aspects de la performance d’un apprenant sont considérés séparément, il s’agit de l’évaluation analytique (le Cadre : 144). Selon Huhta (1993 : 153), les critères analytiques donnent une image plus réelle de la compétence linguistique que les jugements synthétiques globaux. Cependant Huhta (1993 : 154) constate que le nombre de critères différents peut être problématique : comment choisir les critères les plus pertinents dans l’évaluation des compétences langagières ? Selon Luoma (2004 : 71), dans le Cadre, l’échelle des compétences langagières est plutôt analytique, car les différents traits linguistiques sont évalués séparément. Huhta (1993 :152) constate que la distinction entre les évaluations holistique et analytique n’est pas toujours clairement établie. Par exemple, sur le fond, l’évaluation holistique se base sur l’évaluation analytique : même si 40 les instructions données aux évaluateurs mettent en valeur l’importance des compétences dans son ensemble, les évaluateurs font souvent attention aux aspects particuliers. Huhta (1993 :153) conclut cependant qu’il est important que tous les évaluateurs respectent les mêmes principes de base pour que l’évaluation soit équitable. Dans les écoles finlandaises, en ce qui concerne les langues étrangères, les étudiants reçoivent une note qui couvre un ensemble de nombreuses compétences. Cependant, afin de pouvoir tirer des conclusions sur les prestations des apprenants, un enseignant a dû évaluer séparément différentes connaissances telles que la production orale ou écrite ainsi que la compréhension orale et écrite. Dans le projet HY-TALK, les prestations des étudiants ont été évaluées du point de vue analytique et holistique. Dans le processus d’évaluation, cinq critères ont été utilisés qui décrivent chacun une dimension différente. Il s’agit de l’approche analytique dans les critères suivants : la prononciation, la richesse, la fluidité et la correction de la langue. Cependant, le cinquième critère (la prestation générale) est plutôt holistique puisqu’il met en valeur la compétence orale d’un individu dans son ensemble. 5.2 L’évaluation normative vs. l’évaluation critériée En plus des approches holistique et analytique, nous présenterons la différence entre l’évaluation basée sur la norme et l’évaluation basée sur l’utilisation des descripteurs. Tagliante (2003 : 10, 56) définit la norme et les critères d’évaluation de la façon suivante : la norme, qui est définie à priori, est celle des grammaires, des dictionnaires, des manuels, du système phonologique. Les critères d’évaluation, par contre, sont formulés par l’enseignant qui tente de faire acquérir la norme, autrement dit « parler correctement ». Luoma (2004 : 81) et Huhta (1993 : 144), donnent la définition suivante de l’évaluation normative : il s’agit de l’évaluation normative lorsqu’on tente de classer la prestation des apprenants les uns par rapport aux autres ou par rapport au standard ou à un groupe de candidats à un test. Huhta (1993: 145) se montre critique par 41 rapport à l’évaluation basée sur les normes. Selon lui, si un évaluateur veut savoir si un apprenant a atteint les buts d’apprentissage ou s’il maitrise la langue pour bien se débrouiller dans diverses situations, seule l’évaluation critériée est justifiée. Selon le Cadre (p. 139), dans l’évaluation critériée, les étudiants sont évalués seulement en fonction de leur capacité propre dans un domaine précis. Autrement dit, les critères tels que l’étendue, la correction, l’aisance, l’interaction et la cohérence permettent d’évaluer séparément le degré de maîtrise d’un apprenant quant aux différents composants de la compétence langagière. Dans le projet HY-TALK, l’intérêt principal des évaluateurs, c’est d’évaluer si les étudiants arrivent à effectuer les tâches proposées. Comme nous l’avons constaté à plusieurs reprises, les différents composants de la compétence orale ont été évalués séparément à l’aide d’échelles de dix niveaux. Cela dit, dans ce projet, l’évaluation critériée est dominante. 5.3 L'évaluation du vocabulaire Nous avons déjà présenté les principes de l’évaluation de la compétence langagière orale. Nous avons également introduit quelques approches essentielles dans le domaine d’évaluation et montré leur correspondance aussi bien avec l’enseignement en général qu’avec le projet HY-TALK. Dans ce chapitre, nous traiterons plus en détail les traits caractéristiques de l’évaluation du vocabulaire. Dans l'évaluation du vocabulaire, il est important de tenir compte de la nature de la compétence lexicale décrite dans le chapitre 3. Tréville et Duquette (1996 : 133) affirment que « [...] ce ne sont pas seulement la forme et le sens des mots qui doivent faire l'objet de l'évaluation mais aussi les comportements collocationnels, grammaticaux et pragmatiques de ces mots ». Les deux linguistes (1996 : 134) tiennent compte de l'équité de l'évaluation du vocabulaire et constatent qu'il faut prendre en considération l’existence ou la non-existence des supports possibles dont les candidats peuvent se servir, les objectifs, le programme enseigné et les propriétés individuelles des apprenants comme leur âge et niveau de compétence. En ce qui concerne les étudiants de 42 notre corpus, ils ont les consignes des tâches (en finnois) à leur disposition. Ils ont également eu du temps pour se préparer. Les situations appartiennent au monde des adolescents et les tâches ont été préparées pour leur niveau (v. chap. 1.2). Dans son ouvrage Assessing vocabulary, Read (2000 : 8–13) définit trois dimensions dans l'évaluation du vocabulaire. La première, distinct – enchâssé (discrete – embedded) oppose l'évaluation dans laquelle la compétence lexicale est perçue comme une capacité indépendante à l'évaluation qui couvre plusieurs compétences y compris le lexique. Dans le projet HY-TALK, les étudiants effectuent des tâches communicatives, il s'agit donc de l'évaluation de toute la compétence orale. En effet, les évaluateurs ont donné d’une part une note générale pour la performance d'un élève, et d’autre part une note séparée sur l'étendue du vocabulaire et des structures. Ainsi, en ce qui concerne le vocabulaire, il y a des éléments de l'évaluation distincte et aussi de l’évaluation enchâssée. La note générale de la performance d’un élève suit les principes de l’évaluation holistique tandis que les notes séparées suivent celle de l’évaluation analytique. La deuxième dimension présentée par Read (2000 : 10–11) est sélective – complète (selective – comprehensive). Dans l'évaluation sélective, on s'intéresse uniquement à la maîtrise de certains mots prédéfinis. Cela est le cas si, par exemple, l'enseignant interroge ses étudiants sur les mots d'un certain chapitre dans un manuel d'une langue vivante. Dans cette étude, il s’agit plutôt de l’évaluation complète, car nous tenons compte de tous les mots lexicaux utilisés par les apprenants, sauf les mots grammaticaux (v. chap. 3.1). Dans la troisième dimension (context-independent – context- dependent), il s'agit du rôle du contexte. Read (2000 : 12) constate qu'en général, l'évaluation du vocabulaire qui s'effectue à partir de tâches orales tient compte du contexte puisque les évaluateurs considèrent la conformité des mots avec la situation. Dans le projet HY-TALK, il s'agit justement des tâches orales et nous mettons en valeur le choix des mots par rapport à la situation. Toutefois, cela n'est pas notre but principal : ce qui nous intéresse, c'est plutôt de savoir si les apprenants réussissent à se faire comprendre même si le vocabulaire est quelquefois inadéquat. 43 Notre corpus de quatre tâches par étudiant, ne nous permet pas d’estimer l'étendue du vocabulaire total des apprenants et cela n'est pas non plus notre but. Comme notre corpus porte sur des tâches communicatives, le plus important est que l'étudiant arrive à se faire comprendre et à effectuer la tâche. Toutefois, nous ne pourrions pas examiner la question principale de ce mémoire si nous ne connaissions pas le nombre de mots et les constructions grammaticales utilisées par les étudiants. Autrement dit, nous ne pourrions pas savoir si les évaluations données sur la richesse de l'expression dans le projet HY-TALK sont justifiées. 44 6. Le choix des mots et des constructions grammaticales inclus dans les statistiques Le centre d'intérêt de cette étude étant le vocabulaire et les structures, il nous a fallu tout d'abord calculer les mots et les constructions utilisées dans les quatre tâches et ensuite établir les statistiques. Les classes ouvertes auxquelles nous nous intéressons sont les noms, les verbes, les adjectifs et les adverbes. Nous avons choisi les mots lexicaux, car ce sont des mots qui portent un sens et qui forment le véritable contenu de ce qui est dit tandis que les mots grammaticaux, dont le nombre est restreint, nous donnent assez peu d'information sur l’étendue lexicale d'un apprenant. (v. 3.1 Définition du mot). Comme il s'agit du français langue étrangère (FLE), nous avons dû réfléchir aux caractéristiques d'une unité qui peut être acceptée comme un mot. Dans ce chapitre, nous présenterons nos principes. Pour éviter la répétition, nous utiliserons l'abréviation E pour référer à un(e) étudiant(e) et l'abréviation T pour référer à une tâche. La numérotation des tâches est la même que dans la présentation du corpus (v. chap. 1.2). T1 réfère donc à la vidéo d'introduction, T2 à l'accueil et au logement, T3 à la discussion sur un film et sur la musique et T4 à la préparation d'une sortie. 6.1 L’étendue du vocabulaire Notre idée de départ a été la suivante : le mot est compté s'il est compréhensible, s'il a un contexte, s'il est prononcé d'une manière à peu près française et s’il se trouve dans un dictionnaire unilingue français ou s’il est utilisé dans le français des locuteurs francophones. Dans les cas confus, nous avons consulté des locuteurs francophones natifs. Nous n'avons pas exigé une maîtrise complète du mot, c'est-à-dire qu’un étudiant maîtrise parfaitement les compétences présentées dans le chapitre 4.1 ou tout ce que Read propose comme les caractéristiques d'un mot (v. chap. 3.2). Malgré cette prudence, étant donné que nous avons accepté des mots imparfaits, il est possible que nous ayons interprété quelques rares mots d'une manière qui ne correspond 45 pas à l'intention de l'étudiant. En plus, il peut y avoir des cas dans notre corpus, qui nous paraissent incompréhensibles, et que nous n’avons pas compté, mais dont le sens aurait pu être interprété dans une situation réelle et à l'aide du langage gestuel. Dans cette étude, il n'aurait pas été raisonnable d'aller aussi loin dans les interprétations. Cependant, comme nous l’avons remarqué dans le chapitre 2.1, si l’objet de l’étude était par exemple les corrections ou les hésitations, il faudrait tenir compte des rôles parfois décisifs du contexte et du langage gestuel. Dans ce chapitre, nous présenterons les principes utilisés pour choisir les éléments que nous avons considérés comme mots acceptables. 6.1.1 La prononciation Premièrement, pour être accepté dans les statistiques, nous avons exigé que la prononciation d’un mot soit compréhensible. Deuxièmement, nous n’avons pas compté les mots dont la prononciation ressemble plutôt aux autres langues qu’au français. L’étudiant a besoin de maîtriser un minimum de compétence phonologique. Par exemple, au niveau A1 dans le Cadre, (le niveau introductif ou de découverte), la maîtrise du système phonologique correspond à « la prononciation d’un répertoire très limité d’expressions et de mots mémorisés [qui] est compréhensible avec quelque effort pour un locuteur natif habitué aux locuteurs du groupe linguistique de l’apprenant/utilisateur ». Dans notre étude, la prononciation doit donc tout d’abord être compréhensible. Toutefois, la compétence pragmatique du locuteur, sa capacité d’organiser des phrases dans un ensemble cohérent dans un contexte donné, peut faciliter la compréhension si la prononciation est défectueuse (v. chap. 4.1.2). Par exemple, dans la première tâche de notre étude, vidéo d’introduction, E1 prononce le mot parle d'une manière incomplète mais n'importe qui le comprendra (ex. 1). Le même type de forme erronée se répète chez l'étudiant 7 (ex. 2). Dans ces deux cas, le contexte est clair et l'étudiant associe les mots en question « par(le) » et « lan( ) » avec des mots typiques. Nous les avons donc pris en compte dans les calculs. 46 1) je par(le) finnois suédois anglais (E1, T1) 2) tu parles quelles lan( ) (E7, T1) Par contre, nous n'avons pas accepté les mots dont la prononciation est incomplète. Ce sont des cas où nous n'avons pu que deviner un sens probable à la base des instructions données pour la tâche. Ainsi, dans l'exemple 3, il est possible, quant au contexte, qu’il s’agisse du mot préférée, mais l'étudiant prononce seulement la première syllabe pré. Les exemples 4 et 5 sont des cas semblables : en nous basant sur les instructions de la tâche 1, nous pouvons supposer qu’E6 cherche peut-être le mot passe-temps ; pourtant, le mot prononcé [pase] n'y ressemble pas assez pour être compris. E10 essaye sans doute de dire qu'il ne faut pas oublier un extra pull. (ex.5). 3) qu'est-ce que ton euhm [music] pré (E2, T3) 4) je [n ] faire rien en hmn je n'ai pas comme [pase] et mais je suis beaucoup temps avec hmm mes camarades (E6, T1) 5) et heum ne [nublie] pas ton euh [pul] chang[e] (E10, T4) 6.1.2 Le contexte Dans ce niveau, la compétence pragmatique (v. chap. 4.1.2) d’un apprenant est mise en valeur. Le discours de l’élève doit être suffisamment cohérent et cohésif pour que nous puissions en comprendre le sens. En ce qui concerne les structures, l’apprenant doit être capable de formuler des phrases cohérentes. Quant aux mots, ils doivent toujours avoir un contexte et ne pas se trouver détachés. Dans le corpus, il existe quelques mots isolés qui sont lexicalement et phonétiquement corrects, mais qui, d’après nous, semblent n’avoir aucun lien avec le contexte. Ces cas ne sont pourtant pas nombreux. Dans l'exemple 6, l'étudiant cherche des mots corrects mais n'arrive pas à finir sa phrase. Nous n'avons pas inclus dans notre corpus les verbes [ale], [ve] et [vas] parce qu'ils ne semblent se référer à rien. Un autre exemple est la vie prononcée par E7 47 dans la tâche 3 dans laquelle il s'agit des films (ex. 7) ou la structure il y a et le verbe probable [ve] dans l'exemple 8. 6) et c'est très -- très [kyl] que tu [ale] ici tu [ve] ici [va] euh je ne sais pas (E13, T1) 7) hmm c[e] meilleur que - hmm que la vie et parce que hmm il y a le meilleur acteur (E7, T3) 8) hmm c[e] [e] chambre mon frère et il y a [ve] (?) et (bruits) et copain d[e] lui (E1, T2) Tous ces exemples laissent la porte ouverte aux multiples interprétations. Pour cette raison, nous avons laissé ces mots et les cas similaires en dehors des statistiques. 6.1.3 Le problème de forme Dans notre corpus, il existe plusieurs cas dans lesquels l’étudiant n’a pas trouvé la bonne forme du mot qu’il a voulu utiliser. Ce problème se manifeste par exemple dans la première tâche dans laquelle l'étudiant dit « animals » au lieu de la forme correcte « animaux » (ex. 9). En ce qui concerne les verbes, le problème se trouve souvent au niveau de la conjugaison ou au niveau du temps. Dans certains cas, la forme utilisée est inexistante. Dans les exemples 10 et 11, l'étudiant cherche le présent. Si nous avons saisi ce que l'étudiant voulait dire, ce qui est le cas dans ces exemples, nous avons compté ces mots dans le vocabulaire malgré ces fautes de forme (v. chap. 6.2.3 pour le classement des temps verbaux dans les structures). Dans ces exemples, la compétence lexicale n’est pas parfaite mais nous la considérons comme suffisante. Les autres compétences comme la compétence phonologique et pragmatique sont bien maitrisées. 9) euhm euh j'aime les animals (E16, T1) 10) oui aujourd'hui euh euh le Linnanmäki - [uvri] euh le - (?) heure (E13, T4) 11) j'all[e] dans une école qui s'appelle... (E9, T1) 48 6.1.4 Les expressions maladroites Il n’est pas rare que l’étudiant choisisse un mot qui ne convient pas dans la situation. Il est possible que les mauvais choix de mots soit dû à la compétence sémantique insuffisante. Prenons deux exemples : dans l’ex. 12, l'étudiant utilise le mot « peuple » au lieu de « monde ». Dans l'exemple 13, E9 a voulu trouver un équivalent pour le mot finlandais « ruoka », mais le mot français « nourriture » ne s'emploi pas toujours dans les mêmes contextes. Nous pouvons constater que malgré la compétence sémantique insuffisante, ces mauvais choix des mots ne dérangent pas la compréhension et nous les avons donc acceptés. 12) ah ah regarde euh il y a beaucoup de il y a beaucoup de peuple (E14, T3) 13) et dans l'été on on euhm nous allons dans le parc et euh faire de la nourriture et oui (E9, T2) 6.1.5 Les interférences Les interférences sont un phénomène typique du discours des apprenants. Selon Defays (2003 : 29), il s’agit d’une interférence « dès qu’une langue maternelle (ou une autre langue étrangère déjà bien connue) prédispose l’apprenant à certaines réalisations et utilisations dans la langue cible, sur les plans phonétique, syntaxique, sémantique, discursif ou pragmatique». Dans notre corpus, surtout sur le plan phonétique, les interférences dues à l’anglais sont nombreuses. Nous n'en donnons que quelques exemples ci-dessous (ex. 14–19). Il arrive aussi que les étudiants utilisent un mot en finnois (ex. 20) ou un mot qui renvoie clairement au suédois (ex. 21). Ces exemples ne sont pas inclus dans nos statistiques. 14) [apartm nt] (E13, T1) 15) <band> (E17, T3) 16) [music] (E2, T3) 49 17) [praktis] (E13, T1) 18) <scientists> (E1, T1) 19) simil[ar] (E13, T3) 20) <kerrostalo> (E2, T1) 21) gymnasion (E8, T1) Toutefois, nous avons accepté les anglicismes qui sont employés dans le français contemporain et que les étudiants ont prononcé de la même façon que les francophones : (ex. 22–24). 22) hobby (E8, T1) 23) sandwich (E4, T4) 24) faire du snowboard (E15, T4) En ce qui concerne les interférences, les compétences sont insuffisantes à plusieurs niveaux. Nous pouvons constater que souvent, il y a des problèmes aussi bien au niveau des compétences lexicales qu’au niveau des compétences phonologiques. 6.1.6 La répétition La répétition est un trait caractéristique de la langue parlée (v. chap. 2.1) : on répète souvent les mêmes mots ou on les reformule. Comme nous l'avons déjà constaté dans le chapitre 3.1, nous nous intéressons surtout au nombre total des mots différents mais nous tenons compte aussi de la fréquence d'un même mot. Nous avons donc compté la répétition d'un même mot même s'il se trouvait deux fois de suite dans la même phrase, ce qui est le cas dans l’exemple 25. Cependant, comme les statistiques dans le chapitre 7 nous indiquent, il ne faut donc pas croire que si le nombre de mots total est élevé, cela signifierait un vocabulaire riche. Les statistiques des mots au total et des mots différents se trouvent dans le chapitre 7.2.2. 25) notre maison est est jaune (E17, T1) 50 6.2 Les structures Le centre d'intérêt de cette étude étant la richesse de l’expression, en plus des mots, nous nous concentrerons sur les constructions grammaticales utilisées dans les quatre tâches. Comme nous l'avons déjà mentionné dans le chapitre 1.1, les évaluateurs de HY-TALK ont donné une note séparée sur l'étendue de la performance dans chaque tâche. Cette note ne concerne pas seulement le vocabulaire mais aussi les constructions grammaticales. L’évaluation a été faite à l’aide d’une échelle, dans laquelle les compétences d’un élève, qui se situe par exemple au niveau A2.2 sont décrits de la manière suivante : « Possède un vocabulaire suffisant pour satisfaire les besoins communicatifs élémentaires et peut aussi utiliser quelque structures plus difficiles » (v. annexe 2). Les constructions auxquelles nous nous intéressons sont les subordonnées, les interrogatives et l'expression de la possession avec la préposition de. Dans cette étude, nous incluons sous le terme constructions / structures grammaticales aussi les temps et les modes verbaux suivants : le passé composé, l'imparfait, le futur simple, le futur proche, le conditionnel et le subjonctif. La raison pour laquelle nous avons choisi ces structures est simple : ce sont les structures que nous avons trouvées dans le corpus. Notre point de départ est donc descriptif. En établissant les statistiques, nous avons suivi le même principe qu'avec le vocabulaire : il fallait d’une part que nous comprenions ce que l'étudiant avait voulu dire et d’autre part qu'il réussisse à finir la phrase dans laquelle se trouve la construction en question. Les connaissances les plus importantes des étudiants dont nous avons tenu compte sont encore la maîtrise de la prononciation, de la pragmatique et du lexique. Cependant, nous n'avons pas exigé que les structures soient tout à fait correctes grammaticalement. Par exemple, dans l’exemple 26, nous avons accepté une interrogative commençant par qu'est-ce que même si la locution interrogative qu'est-ce que est répétée. Nous avons compté cette interrogation seulement une fois : en effet, du point de vue de la construction, il n'y en a qu'une seule. Cela est un principe que nous avons suivi avec toutes les 51 constructions. Rappelons qu'en ce qui concerne le vocabulaire, la répétition est comptée (v. chap. 6.1.6). 26) et qu’est-ce que qu’est-ce que tu faire en dans quand tu n’es pas à l’école ? (E6, T1) 6.2.1 Les subordonnées Les subordonnées impliquent une dépendance formelle et sémantique d’une autre proposition (Gardes-Tamine 2004 : 44). Dans notre étude, nous distinguons trois catégories de subordonnées : les relatives, les complétives et les subordonnées commençant par la conjonction quand ou parce que. En ce qui concerne les propositions relatives, nous avons exigé que le pronom relatif ait un antécédent pour être inclus dans les statistiques. Nous n'avons pas accepté les cas dans lesquels le pronom (ou la conjonction) n'est pas correct comme dans l'exemple 27. Il est à noter que dans l’exemple 28, il y a deux subordonnées distinctes. Dans cet exemple, les subordonnées sont classées séparément. La première, qui commence par la conjonction que, se trouve dans la catégorie des complétives. La seconde, qui commence par quand, se trouve dans la catégorie « les subordonnées commençant par la conjonction quand ». 27) j'a[n] deux amis…quels sont… mes amis préf(é)rés (E8, T1) 28) je je te prom[i] que quand tu as allé en Finlande tu peux hmm visiter ma grand-mère (E9, T1) 6.2.2 Les interrogatives Quand on veut poser une question, il existe plusieurs types d’interrogation à choisir. Gardes-Tamine (2004 : 37–38) distingue par exemple les interrogations directes, les interrogations complexes, les interrogations totales et les interrogations partielles. Elle constate que la particule interrogative est- 52 ce que, qui est très fréquente dans la langue parlée, peut se trouver en tête de l’interrogation totale. Dans notre analyse, nous avons compté trois types d’interrogatives différentes : les interrogatives qui commencent par le mot interrogatif, celles qui finissent par le mot interrogatif (ex. 29) et les interrogatives qui correspondent à une proposition déclarative, la seule différence étant l’intonation (ex. 30). Dans notre corpus, nous avons trouvé les mots ou les particules interrogatifs suivants : qu'est-ce que, est-ce que, quel/quels/quelle/quelles, comment, où, quand, combien et qui. 29) et vous habite où ? (E4, T1) 30) nous manger en Suomenlinna ? (E3, T4) Nous avons compté comme phrase interrogative les phrases qui comprennent un mot interrogatif, un verbe et un sujet et les phrases où la valeur interrogative est basée sur l’intonation. Ainsi, les propositions incomplètes ne sont pas acceptées (ex. 31). Nous avons aussi exigé que le mot interrogatif qui commence la phrase soit correct. Par conséquent, une proposition du type de l’exemple 32 n'est pas acceptée. De plus, la signification de cette phrase est ambigüe, ce qui n'est pas le cas avec l’exemple 33, une phrase que nous avons acceptée malgré la préposition erronée de devant le mot interrogatif. 31) à quelle heure ? (E7, T4) 32) et [kel] habite [kel] habite elle ? (E1, T1) 33) de quelles langues vous parlez (E15, T1) Lorsqu’il s’agit de l'ordre des mots, nous n'avons pas exigé l’usage normatif. Les statistiques contiennent donc des phrases du type qui se manifestent dans les exemples 34 et 35. Il s’agit d’expressions qui sont utilisées dans le français oral. 34) où je peux mettre mon accessoire ? (E2, T2) 35) quelles langues vous parlez ? (E3, T1) 53 Si nous avons pu identifier un mot interrogatif correct, un sujet et un verbe et que nous avons compris le sens de la proposition, nous avons accepté la phrase interrogative même si la forme du verbe était erronée, ce qui est le cas dans l’exemple 36. Toutefois, il arrive que le mot interrogatif, le sujet et le verbe soient tous corrects, mais que la proposition ne soit pas compréhensible. Nous n’avons pas compté ces occurrences. L’exemple 37 illustre ce type de cas ; la phrase n'a pas de lien avec ce qui est dit avant. 36) comment nous y aller (E3, T4) 37) qu’est-ce que je dois euh rappelle ? (E6, T4) En ce qui concerne les types de phrases qu’illustre l’exemple 38, nous les avons classées dans deux catégories séparées : les interrogatives construites avec est-ce que et les interrogatives commençant par quel/quels/quelle/quelles. 38) quelles langues est-ce que tu parles (E17, T1) 6.2.3 Les temps et les modes verbaux Les tâches présentées aux étudiants permettent en principe l’utilisation variée de tiroirs verbaux. Toutefois, en analysent les transcriptions, nous avons constaté que la plupart des verbes sont au présent. Malgré cela, dans cette étude, nous avons décidé d’ignorer la maîtrise du temps verbal au présent. Nous trouvons que l'utilisation des autres temps verbaux montre une certaine maîtrise du français oral et différencie les étudiants les uns des autres. En partant des formes qui sont présentes dans les enregistrements, nous avons tenu compte des tiroirs suivants : le passé composé, l'imparfait, le futur simple et le futur proche. De plus, nous avons inclus deux modes verbaux : le subjonctif et le conditionnel. Nous voulons souligner que notre point de départ est descriptif : nous avons choisi seulement les formes qui se trouvent dans le corpus. 54 Pour qu’une forme verbale soit incluse dans les statistiques des structures, nous avons dû reconnaître un temps correct dans le contexte donné. Autrement dit, si l’étudiant raconte ce qu’il a fait l’été dernier, nous avons exigé que l'étudiant parle d’un fait du passé et non du présent. Par conséquent, nous n'avons pas accepté la construction erronée du passé composé dans la phrase de l’exemple 39 puisque si nous n'avions pas eu les instructions pour les tâches à notre disposition, nous n'aurions pas su que l’étudiant devait parler de l'été précédent, donc utiliser un temps du passé. Il s'agit encore du principe de la compréhensibilité auquel nous avons tenu tout au long de l'analyse. Un cas semblable se trouve dans l’exemple 40. L'interlocuteur penserait tout de suite que l'étudiant ne va plus dans cette école ce qui est pourtant le cas. Nous n'avons donc pas compté cet imparfait dans les structures.16 Rappelons que le verbe « aller » est accepté dans la section vocabulaire. 39) j'ai fair[e] de voile avec X (E3, T1) 40) j'allais17 dans une école (E9, T1) Si le temps verbal en question ne peut pas être confondu avec un autre temps verbal et que l'étudiant essaye d'utiliser le bon temps, mais commet une faute de forme, nous l'avons accepté. C’est le cas dans l'exemple 41 dans lequel E11 se trompe dans le choix de l’auxiliaire. Comme nous l’avons constaté dans le chapitre 6.1, les cas trop ambigus sont exclus de l’analyse. L'exemple 42 illustre le problème de l’ambiguïté des temps verbaux. Nous n'avons pas le moyen de savoir si l'étudiant cherche à utiliser l'imparfait, le passé composé (mais oublie l'auxiliaire) ou s'il hésite et choisit finalement le présent. 41) l'été dernie[r] nous avons allé à la plage (E11, T1) 42) l'été derni[er] euh on all[e] 18à Helsinki et Hanko (E9, T1) 16 17 18 Le verbe aller est accepté dans la section vocabulaire (cf. chap. 6.1.3). Le temps verbal peut aussi être interprété comme aller. ou allait 55 Il est à remarquer qu'une grande partie des occurrences de l'imparfait concerne le verbe être. Par exemple E13 répète trois fois l’imparfait était dans T3 mais n’utilise pas d’autres verbes à l’imparfait dans le corpus. 6.2.4 L’expression de la possession Nous avons voulu inclure dans nos statistiques la structure de possession qui correspond à celle du génitif en finnois. Dans notre analyse, il s’agit de la construction (G)N1 + de + (G)N219 qui est formé de manière totalement différente dans la langue finnoise. Nous avons remarqué que même pour les élèves avancés, la formation de cette structure n’est pas toujours facile. Selon Riegel et al. (2006 : 187), il s’agit de la structure le groupe prépositionnel complément du nom lorsqu’un groupe prépositionnel fonctionne comme un complément du nom. Le groupe prépositionnel complément du nom est construit généralement à l’aide des prépositions à ou de, et parfois avec en, pour, par. Le complément du nom (GP) peut indiquer la qualité, la possession, la destination, l’accompagnement etc. Comme nous l’avons constaté, en finnois, nous parlons du génitif mais les traits caractéristiques sont identiques avec la définition suivante : il faut un GN (groupe nominal) et un GP (groupe prépositionnelle). Dans l’exemple 43, nous avons accepté la structure du génitif même si les articles ne sont pas corrects. 43) le musique de la film (E9, T3) 6.3 Les problèmes de classement particuliers En plus des classifications mentionnées, il nous semble pertinent de préciser quelques cas particuliers dans les principes qui concernent nos statistiques sur les noms, les adjectifs et les verbes. Puisque ces cas particuliers ne forment 19 G réfère à groupe et N à nom. 56 pas de catégories nettes et distinctes, nous voulons souligner nos principes concernant les mots que nous avons choisis dans les statistiques. Tout d’abord, nous avons trouvé difficile de classer les fautes qui ne gênent pas la compréhension : la distinction entre les mots féminins et masculins, les accords et les comparaisons des adjectifs ou encore l’usage erroné des auxiliaires être et avoir. De plus, nous ferons quelques remarques sur les marqueurs des relations sociales qui montrent entre autres une certaine maîtrise sociolinguistique et une compétence lexicale. Ceci est compté sous la catégorie du nom. 6.3.1 Les problèmes de classement particuliers : les noms et les adjectifs En ce qui concerne les noms et les adjectifs, les pluriels et les singuliers aussi bien que les formes féminines et masculines du même mot se trouvent dans la même catégorie. Autrement dit, si l’étudiant a utilisé la forme copain, copine, copains et copines, nous lui avons marqué la maîtrise du mot copain. Suivant le même principe, grand, grande, grands et grandes sont comptés comme des occurrences de l'adjectif grand. D'ailleurs, nous avons remarqué que les étudiants ne font souvent pas de distinction entre la forme masculine et féminine d’un mot et qu'il n'y a pas d'accord de l'adjectif et du nom. Toutefois, nous n'avons pas tenu compte de ces fautes dans le calcul des mots. Nous avons inclus dans les statistiques aussi quelques salutations et locutions typiques pour commencer et pour clore une conversation. Dans le Cadre (p. 93), ces expressions sont considérées comme des marqueurs des relations sociales qui varient selon les langues, les cultures et les situations. La maîtrise des marqueurs sociaux reflète aussi la compétence sociolinguistique d’un étudiant (v. chap. 4.1.2.2) : un apprenant est considéré comme un acteur social qui doit prendre en considération plusieurs facteurs et règles telles que les différences de registre, les règles de politesse, les dialectes et les accents (le Cadre : 93–94). Nous avons donc compté les salutations et les locutions de ce type à tout à l’heure, bonjour, salut etc. sous la catégorie du nom. Nous avons inclus dans la même catégorie les noms propres qui ne sont pas les mêmes en finnois et en français, par exemple Paris, France, Finlande et 57 Allemagne. Un autre classement aurait pu servir aussi bien à ce travail. Par exemple, une classification dans laquelle les marqueurs sociaux et les noms propres sont comptées séparément. Cependant, pour des raisons pratiques, nous avons décidé de limiter le nombre de différentes catégories. Comme intérêt de cette étude porte sur la richesse de l’expression en général, il n’est pas essentiel de connaître la classe des mots maîtrisés. Quant aux adjectifs, nous avons traité de la même manière un adjectif simple que ces formes de comparaisons. Ainsi, en analysant par exemple la proposition dans l’exemple 44, nous avons compté une occurrence de l'adjectif bon. Par contre, la forme comparative meilleur, -e a été classée séparément, car du point de vue de l’orthographe, cette forme est très éloignée de la forme de base bon, -ne. Nous l’avons donc considérée comme un mot séparé. 44) c'était moins bon que spiderman (E3, T3) Dans l’exemple 45, E15 emploi le nom courage comme un adjectif et pour cette raison, nous l'avons accepté dans la catégorie courageux, -se. 45) que c'était bon parce que James bond euh était très courage (E15, T3) Dans ce cas, nous avons encore suivi nos principes : la prononciation doit suivre les règles du français et le mot doit avoir un contexte même si la forme lexique est incomplète. Il faut donc que le sens de l’énoncé puisse être compris sans efforts. Étant donné que la plupart des étudiants de notre corpus ont des difficultés pour s'exprimer en français et que l'emploi de chaque mot différent fait déjà preuve d'une certaine compétence langagière, nous avons choisi de considérer les mots d’une même famille comme unités séparées (v. chap. 3.1 sur la définition du mot). Dans le domaine de la linguistique, il est question d’affixes dérivationnels, plus précisément des suffixes qui opèrent plus souvent le transfert d’une catégorie à une autre (Riegel et al. 2006 : 538). Nous avons donc distingué par exemple France et français ou Suède et suédois. Cependant, nous avons constaté que les étudiants confondent assez 58 souvent le nom, la langue et l'adjectif de certains pays (ex. 46, 47). Par exemple, dans l’exemple 46, E7 utilise le mot suède au lieu du mot correct suédois. L’exemple 47 est un cas similaire. 46) je parle finnois euh l’anglais le suède et un et le français (E7, T1) 47) mon père parler suède et l’anglais et finlande finnois aussi (E4, T1) 6.3.2 Les problèmes de classement particuliers : les verbes Nous avons constaté que l'utilisation des verbes avoir et être posait des problèmes pour plusieurs étudiants. Ces verbes peuvent fonctionner aussi comme auxiliaires dans les constructions auxiliaire + infinitif ou auxiliaire + participe passé. En plus, le verbe être peut fonctionner comme un verbe copule qui introduit soit un attribut soit un élément nominal ou un adjectif attribut. (Riegel et al. 2006 : 233, 237). Lorsque nous avons calculé les mots utilisés, nous avons donc considéré séparément l’utilisation des verbes être et avoir comme verbe lexical et comme auxiliaire. Comme notre intérêt principal porte sur la richesse de l’expression, nous avons compté un auxiliaire même si l'étudiant avait choisi avoir au lieu d’être ou l'inverse (ex. 48). Suivant le même principe, nous avons compté l'emploi d’avoir et l'emploi d’être dans les structures si l'étudiant s'est corrigé lui-même (ex. 49). 48) euh - je je te prom[i] que quand tu as allé en Finlande tu peux hmm visiter ma grand mère (E9, T1) 49) je suis j'ai seize ans (E12, T1) Il est à remarquer que les occurrences des verbes avoir et être utilisés comme verbes introducteurs ou comme verbes copules sont approximatifs. Cela résulte du fait que ces verbes ont des formes conjuguées très courtes comme es/est et ai/as/a qui sont répétées de nombreuses fois dans les énoncés des élèves. Parfois nous n'avons pas pu savoir s'il s'agissait d'un verbe, de la conjonction et ou plutôt des caractéristiques spécifiques de la langue parlée comme la répétition (v. chap. 2.1). L'exemple suivant illustre ce problème : 59 50) euh je m’appelle X je trois euh deux sœurs et un frère hm mon petit fier frère est onze ans et mon sœur est deux sœurs est babablelele est vingt-deux et/est vingt cinq (E2, T1) Les locutions verbales comme faire du voile, jouer au foot, aller à pied ont été comptées comme un seul lexème. Autrement dit par exemple faire du voile est compté comme une seule unité. 6.3.3 Les mots composés Selon la définition de Riegel et al. (2006 : 532) « Les mots composés se présentent […] comme des suites des termes qui dans d’autres contextes fonctionnent comme des mots autonomes ». Suivant cette définition, nous avons considéré que les expressions comme pain de seigle, parc d’attraction et science naturelles forment une seule unité. Autrement dit, les mots qui composent ces unités ne sont pas comptés séparément. 60 7. L'analyse des résultats Dans le chapitre précédent, nous avons présenté les principes suivis dans le classement des mots et des constructions grammaticales pour les statistiques. Nous avons également donné des exemples des cas ambigus. Les tableaux établis nous montrent le nombre total de mots et de structures grammaticales utilisés par chaque étudiant de notre corpus, autrement dit la richesse de leur expression. Dans ce chapitre, nous comparerons l’étendu du vocabulaire et les évaluations faites par les évaluateurs de HY-TALK afin de voir s'il existe une corrélation entre les deux. Rappelons que c’était la question de départ dans ce mémoire (v. chap. 1). Cette corrélation est illustrée à l'aide des diagrammes 1 et 2. (p. 62-63 ci-après). Dans les cas où les évaluations et la richesse du vocabulaire des étudiants ne semblent pas correspondre, nous essayerons de trouver les facteurs qui permettent d’expliquer la différence. Nous rappelons que l'abréviation E réfère à un(e) étudiant(e) et l'abréviation T à une tâche. La présentation des tâches se trouve dans l'introduction (v. chap. 1.2). Dans le projet HY-TALK, une échelle de dix niveaux a été utilisée pour évaluer les productions des élèves. Cette échelle est celle que l’on trouve dans l'adaptation finlandaise du Cadre européen commun de référence pour les langues (v. chap. 4.3). Cependant, afin de faciliter le traitement informatisé des données recueillies, une évaluation numérique de 1 à 10 a été adoptée au lieu d'utiliser les symboles du Cadre (A1.1 – C2). Par exemple le chiffre 4 correspondra au niveau A2.1. (v. annexe 2). Dans quelques évaluations, certains évaluateurs ont hésité entre deux valeurs. Nous avons alors dû interpréter les évaluations données afin de pouvoir calculer les moyennes pour les diagrammes. Nous avons donc suivi le principe suivant : si l'évaluateur a hésité entre deux ou trois valeurs, nous avons pris en compte la moyenne de celles-ci. Les valeurs « 2(3) » et « 2 tai 320 » ont ainsi été interprétées comme 2,5 et « 1 2 tai 321 » comme 2. De la même manière, « 8(6) » représente la valeur 7. Nous avons décidé d’ignorer le point d'interrogation utilisé parfois par les évaluateurs, ce qui signifie que « 2? » a 20 21 2 ou 3 1 2 ou 3 61 été pris pour 2. Il arrive aussi, qu'un évaluateur ait écrit « alle 122 » mais nous l'avons interprété comme étant 1 qui correspond au premier niveau de l’échelle (valeur 1). 7.1 La corrélation entre le nombre de mots ou de structures grammaticales et l'évaluation de la richesse de l'expression Afin de pouvoir analyser les résultats de notre étude, nous avons établi deux diagrammes qui illustrent la corrélation entre les mots et les structures grammaticales utilisés par les étudiants et l'évaluation de la richesse de l'expression donnée par les évaluateurs de HY-TALK. Dans les diagrammes 1 et 2, nous avons calculé la valeur moyenne de la richesse de l'expression pour chaque étudiant en tenant compte de toutes les évaluations obtenues sur la richesse de l'expression dans les quatre tâches et par tous les évaluateurs présents. En observant le diagramme 1 et le tableau 4 (p. 62), nous pouvons constater que le nombre de mots différents varie entre 41 (E2) et 96 (E17), la moyenne étant de 63. Le diagramme 2 et le tableau 5 (p. 63) nous montrent le nombre des structures grammaticales, qui varient entre 2 (E2) et 15 (E17), la moyenne étant de 9,3. La variable sur l'axe y (donc la moyenne de l'étendue de l’expression) va de 1,8 (E1) à 7,8 (E5). Nous rappelons que les mêmes descripteurs sont utilisés dans l'évaluation de l'étendue du vocabulaire et celle des structures grammaticales : les mêmes moyennes sont donc représentées dans les deux illustrations. Nous nous intéressons à la corrélation entre ces deux variables, c'est-à-dire d’une part le nombre de mots et de structures grammaticales et d’autre part leur évaluation. 22 moins de 1 62 Diagramme 1 : La corrélation du nombre de mots et l'évaluation de la richesse de l'expression Tableau 4 : La corrélation du nombre de mots et l'évaluation de la richesse de l'expression Mots différents E1 E2 E3 E4 E5 E6 E7 E8 E9 E10 E12 E13 E14 E15 E16 E17 44 41 48 65 88 75 60 56 72 61 65 47 79 68 43 96 Èvaluation 1,8 2,5 4,6 3,9 7,8 4,3 2,4 2,5 4,5 4,3 5,2 3,9 5,0 4,0 3,7 5,3 63 Diagramme 2 : La corrélation du nombre de structures grammaticales et de l'évaluation de la richesse de l'expression 10,0 Evalu a tio n 8,0 E5 6,0 4,0 E14 E12 E3 E10 E9 E4 E13 E15 E16 E2 2,0 E8 E17 E6 E7 E1 0,0 0 5 10 15 20 Nombre de structures Tableau 5 : La corrélation du nombre de structures grammaticales et de l'évaluation de la richesse de l'expression E1 E2 E3 E4 E5 E6 E7 E8 E9 E10 E12 E13 E14 E15 E16 E17 Structures différents Évaluation 6 1,8 2 2,5 4,6 9 7 3,9 13 7,8 4,3 14 2,4 11 8 2,5 11 4,5 4,3 9 11 5,2 8 3,9 5,0 9 10 4,0 5 3,7 15 5,3 64 Ces illustrations nous montrent qu'en principe les deux variables se suivent : plus il y a de mots ou de structures, plus l'évaluation se situe haut dans l’échelle. La droite de régression, tracée dans les deux diagrammes, illustre la corrélation entre la variable sur l'axe x et celle sur l'axe y : elle montre donc comment l'évaluation de l'étendue de l’expression (variable y) dépend du nombre de mots ou de structures (variable x). Plus la coordonnée d'un étudiant est proche de la droite, plus son évaluation est justifiée par rapport à celle des autres apprenants. Il est important de remarquer qu’il n'existe pas d'évaluation idéale. Autrement dit, nous ne pouvons pas dire qu'un étudiant avec un tel nombre de mots devrait être évalué à un tel niveau de l’échelle utilisée puisque nous ne disposons pas de repères numériques exacts qui permettraient de le faire. L'échelle de l'évaluation (v. annexe 2) contient simplement des descripteurs assez vagues comme « un vocabulaire limité de base », « le vocabulaire familier », « un vocabulaire assez étendu », « un nombre limité d'expressions apprises par cœur », « des expressions courantes » etc. La base pour l'analyse des résultats de cette étude est donc la corrélation entre l’étendue du vocabulaire et les évaluations données par les évaluateurs. En tenant compte de ce principe, nous pouvons constater que les coordonnées se situant audessus de la droite de régression représentent les étudiants qui ont obtenu une valeur surévaluée par rapport au nombre de mots ou aux constructions grammaticales qu’ils ont utilisés. Quant aux coordonnées se situant audessous de la droite de régression, elles indiquent les cas où le nombre de mots ou celui des constructions aurait a priori pu justifier une meilleure valeur. Il est également possible de calculer un coefficient de corrélation pour les variables x et y, c'est à dire d’établir un pourcentage montrant dans quelle mesure la variable x explique la variable y (MAOL : 50). Le coefficient de corrélation varie entre -1 et 1. S'il est 1, cela signifie que la variable x explique la variable y à 100%, autrement dit qu'il n'y a pas d'autres facteurs que la variable x qui influencent la variable y. Dans notre étude, en ce qui concerne le nombre de mots (illustration 1 et tableau 4), ce coefficient de corrélation est de 0,713. Nous pouvons donc 65 constater que le nombre de mots explique l’évaluation de l'étendue du vocabulaire avec un pourcentage de 71,3% en moyenne. Avec les structures, la corrélation est un peu plus faible, mais toujours importante : 60 % (illustration 2 et tableau 5). Il faut se rappeler que ces pourcentages indiquent une corrélation moyenne et que chaque étudiant représente un cas particulier. Comme nous l’avons constaté ci-dessus, nous ne pouvons pas dire qu'un étudiant avec un certain nombre de mots devrait être situé à un certain niveau de l’échelle d’évaluation. Il nous est donc impossible d’affirmer que le nombre de mots ou de structures et l’évaluation augmentent dans la même mesure. Cependant, le fait que les coefficients de corrélation soient élevés soutient cette hypothèse : une corrélation linéaire existe entre les variables x et y. Dans notre corpus, les coefficients de corrélation illustrent donc clairement l'interdépendance du nombre de mots ou de structures et l’évaluation. Nous voulons toutefois rappeler que l'information donnée par ces pourcentages doit être examinée avec une certaine réserve : les calculs sont basés sur la façon dont nous avons compté les mots et les structures de chaque étudiant (v. chap. 6). 7.2 Les différents facteurs qui influencent l'évaluation de la richesse de l'expression Comme nous l’avons constaté ci-dessus, le principal facteur influant sur l'évaluation de la richesse de l'expression est le nombre de mots différents et le nombre de structures grammaticales différentes. En plus du nombre de mots différents, nous avons aussi compté tous les mots lexicaux, ce qui représente l’étendue du vocabulaire total. Un autre facteur qu'il faut prendre en compte est, par exemple, l'influence de la variation du jugement des différents évaluateurs. Ci-dessous nous présenterons quelques aspects liés à leur rôle. Dans le sous-chapitre 7.2.3, nous analyserons ensuite certains facteurs moins évidents qui, d’après notre étude, semblent également influencer l'évaluation de la richesse de l'expression. 66 7.2.1 Le nombre de mots différents et de structures grammaticales Dans le diagramme 1 (p. 62), la variable représentée sur l'axe x est le nombre total de mots différents utilisés dans toutes les tâches par chaque étudiant. Selon les termes de Read, il s'agit donc de types et pas de tokens (v. chap. 3.1). Dans le diagramme 2, la variable x représente le nombre de structures grammaticales. De la même manière qu'avec les mots, nous avons tenu compte des structures différentes dans toutes les tâches. Dans nos calculs, tous les mots ont un statut égal. Nous ne prenons pas en considération le degré de difficulté des mots, autrement dit le fait que certains mots sont moins courants que d'autres. Nous aurions donc facilement tendance à dire que leur maîtrise exige une compétence lexicale plus élevée. Par exemple, les adjectifs les plus fréquents dans notre corpus (« grand » et « bon ») sont utilisés par la plupart des étudiants. Par contre, seul E15 utilise l'adjectif « malheureux », un adjectif qui n’est pas aussi fréquent dans la langue courante. Quant aux verbes, les plus utilisés sont « s’appeler » et « parler », deux verbes de base. Cependant, une grande partie des mots utilisés par les élèves sont exactement les mêmes qui se trouvent en finnois dans les instructions des tâches (v. annexe 3), soit ils y sont étroitement liés. Par exemple, dans T1 (dans laquelle les instructions sont « présente ta famille et toi-même 23»), le mot famille vient directement des instructions et une grande partie des étudiants emploient des mots qui appartiennent au même champ sémantique : mère, père, frère et sœur. Il nous semble qu'il y a surtout beaucoup de noms qui sont traduits directement des instructions. Le choix des adjectifs et des verbes paraît plus libre. En même temps, en observant les instructions d'une manière critique, nous pouvons constater que certaines d’entre elles orientent les étudiants à utiliser des mots appartenant à une certaine classe de mots. Par exemple la réplique dans T3 « demande à ton invité(e) comment il/elle a 23 Nous avons traduit les instructions nous-mêmes. Voici les instructions originales : « Esittele perheesi ja itsesi ». 67 trouvé le film24» invite les étudiants à produire des adjectifs. Même si cette orientation vers certaines classes de mots se reflète dans les prestations des tâches correspondantes, nous nous concentrons donc sur la production totale d'un apprenant en ignorant dans quelle tâche il/elle a produit un certain mot. Quant aux structures et surtout à l’utilisation des temps, il nous semble que les consignes des tâches T3 et T4 orientent les étudiants vers le choix de certains temps verbaux. Dans T3 25, les étudiants doivent parler du film qu’ils viennent de voir. Il est donc évident que les étudiants ont besoin d’utiliser des verbes au passé composé ou à l’imparfait. Dans T426, les étudiants sont dirigés vers l’utilisation du futur : dans les instructions, il a été demandé aux étudiants de planifier une sortie qu’ils ont l’intention de faire à l’avenir. 7.2.2 Le nombre de mots total Nous avons déjà mentionné que nous avons classé les nombres de mots en deux catégories dans ce travail : le nombre de mots différents et le nombre de mots total. Dans ce chapitre, il s’agit de token (v. chap. 3.1) qui renvoie au nombre total des mots. Dans la langue parlée, il est normal que l’on répète les mots (v. chap. 2.1) comme l’exemple 25 nous le montre. 25) notre maison est est jaune (E17, T1) Le tableau 6 nous montre que le nombre de mots différents varie entre 41 (E2) et 96 (E17), la moyenne étant de 63. Selon les statistiques, les étudiants qui ont utilisé le plus de mots différents sont E5, E6, E14 et E17. Le nombre de mots total, lui, varie entre 72 (E16) et 173 (E17), ce qui donne pour la valeur moyenne 113. Les étudiants qui ont le plus de mots au total sont aussi les mêmes qui ont le plus de mots différents. En ce qui concerne l'évaluation, la moyenne des étudiants est de 4.1. Cela nous permet de conclure que l’évaluation des quatre étudiants mentionnés est conforme à la logique selon 24 25 26 Répliques originales : « Kysy, mitä vieraasi piti elokuvasta ». Le nom de tâche original : « Keskustelua matkalla elokuvista kotiin». Le nom de tâche original : « Retkipäivästä sopiminen ». 68 laquelle la quantité élevée de mots différents et celle de mots au total correspond à un résultat d’évaluation qui est supérieur à la moyenne. Tableau 6 : L’évaluation par rapport aux nombre de mots total et au nombre de mots différents. Nombre de mots total E1 E2 E3 E4 E5 E6 E7 E8 E9 E10 E12 E13 E14 E15 E16 E17 Nombre de mots différents 75 91 75 107 149 138 105 104 132 96 95 107 153 132 72 173 44 41 48 65 88 75 60 56 72 61 65 47 79 68 43 96 Évaluation 1,8 2,5 4,6 3,9 7,8 4,3 2,4 2,5 4,5 4,3 5,2 3,9 5,0 4,0 3,7 5,3 Ci-dessus, dans le diagramme 1 (p. 62), nous avons présenté la corrélation entre le nombre de mots différents et l’évaluation de la richesse de l’expression. Le diagramme 4 illustre la correspondance entre le nombre de mots au total et les évaluations. Dans le diagramme 1, les cordonnées des étudiants se situent plus près de la droite de régression que dans le diagramme 4. Cette comparaison nous permet de constater que l’évaluation basée sur le nombre de mots différents (ce qui est notre point de départ) semble légèrement plus adéquat. Pour faciliter la comparaison, une seconde représentation du diagramme 1 se trouve au-dessus du diagramme 4. 69 Diagramme 3 : La corrélation entre le nombre de mots différents et (cf. diagramme 1) 9,0 8,0 Évaluation 7,0 6,0 5,0 4,0 3,0 2,0 1,0 0,0 0 20 40 60 80 100 Nombre de mots différents Diagramme 4 : La corrélation entre le nombre de mots total et l'évaluation de la richesse de l'expression 9,0 8,0 Évaluation 7,0 6,0 5,0 4,0 3,0 2,0 1,0 0,0 0 50 100 150 Nombre de mots total 200 120 70 7.2.3 Les évaluateurs Dans ce chapitre, nous traiterons le rôle des évaluateurs et des faits liés à ceux-ci. Sur la base des diagrammes 1 et 2 (p.62-63), nous pouvons constater que même si les variables x et y se suivent en principe, il existe des cas illogiques dans lesquels le nombre de mots et celui des constructions grammaticales augmente mais que l'évaluation baisse ou vice versa. De plus, les coefficients de corrélation calculés dans le chapitre 7.1 nous laissent penser que la maîtrise du vocabulaire et des structures grammaticales n'est pas le seul facteur qui intervienne dans l'évaluation de la richesse de l'expression. Il est notamment important de tenir compte du rôle des évaluateurs. Un facteur important est le fait que le nombre d’évaluateurs varie entre 4 et 5 selon la tâche et la paire. En outre, les évaluateurs ont chacun un style personnel, certains étant plus stricts que d'autres. Le manque d'un des évaluateurs peut donc influencer la moyenne d'un élève. Les différentes façons d'évaluer se manifestent dans la dispersion des évaluations : une variation de deux niveaux dans l'évaluation de la richesse de l'expression de la même tâche est courante, mais une différence plus importante est également possible. La plus grande variation se trouve dans T3, dans laquelle les évaluations données d’E3 varient entre 3 et 7. L'évaluation d'E5 dans T1 est un autre bon exemple de la possible influence des évaluateurs : il semble que la prestation d’E5 a été très réussie, trois évaluateurs sur quatre l’ayant située au niveau 9 sur la richesse de l'expression. Le quatrième, lui, l’a placée au niveau 6. Nous pouvons nous demander ce qu’aurait été l’évaluation donnée par un autre évaluateur à la place du quatrième compte tenu du fait que la prestation d’E5 correspondait aux descripteurs du niveau 9. Aurait-il peut-être donné la note 9 comme les autres ? 7.2.4 Les autres facteurs 71 Afin de trouver des facteurs moins évidents que le nombre de mots et de structures ou l'influence des différents évaluateurs, nous ferons des comparaisons entre deux ou trois étudiants. Nous prendrons l’exemple de six cas. Il est à remarquer qu'il ne s'agit pas de comparer les étudiants ayant effectué les tâches ensemble. Nous avons choisi les cas qui semblent intéressants à comparer entre eux quant à l’évaluation donnée. Nous présenterons les six cas différents, après quoi, dans les sous-chapitres suivants, nous évoquerons des facteurs qui peuvent expliquer les différences dans l’évaluation. Dans les cas 1 et 2, le nombre de mots différents augmente mais l'évaluation baisse. Par exemple dans le cas 1, E5 qui a 88 mots différents, a obtenu une évaluation de 7,8 en moyenne. Pourtant, l’évaluation d’E17 dont le nombre de mots est plus élevé (96), n’atteint que la valeur 5,3. Dans le cas 2, nous retrouvons une bizarrerie similaire : E3 a été évalué considérablement plus haut qu’E7, même s’il n’a maîtrisé que 48 mots ce qui est beaucoup moins qu’E7 dont le nombre de mots différents est de 60. Diagramme 5 Cas 1 : E5 (88 : 7,8) et E17 (96 : 5,3) 10,0 É v a lu a t io n 8,0 E5 6,0 E17 4,0 2,0 0,0 0 20 40 60 80 Nombre de mots 100 120 72 Diagramme 6 Cas 2 : E3 (48 : 4,6) et E7 (60 : 2,4) 10,0 Évaluation 8,0 6,0 E3 4,0 E7 2,0 0,0 0 20 40 60 80 100 120 Nombre de mots Dans le cas 3, le nombre de mots différents est sensiblement le même entre les deux étudiants : E7 a produit 60 unités différentes tandis que le nombre correspondant d’E10 est de 61. Toutefois, nous pouvons constater une différence importante dans leur évaluation moyenne (2,4 et 4,3). Diagramme 7 Cas 3 : E7 (60 : 2,4) et E10 (61 : 4,3) 10,0 É v a l u a t io n 8,0 6,0 E10 4,0 E7 2,0 0,0 0 20 40 60 Nombre de mots 80 100 120 73 Le cas 4 est semblable au cas 3. Le nombre de mots différents des deux étudiants E4 et E12 est exactement le même (65) mais nous pouvons encore voir une différence considérable dans leur évaluation : E4 (3,9) et E12 (5,2). Diagramme 8 Cas 4 : E4 (65 : 3,9) et E12 (65 : 5,2) 10,0 Évaluation 8,0 6,0 E12 4,0 E4 2,0 0,0 0 20 40 60 Nom bre de mots 80 100 120 74 Le cas 5 représente un groupe de trois étudiants E1 (44 et 1,8), E7 (60 et 2,4) et E8 (56 et 2,5) dont les coordonnées se trouvent clairement audessous de la droite de régression et qui auraient donc mérité une évaluation considérablement plus élevée par rapport aux autres étudiants. Diagramme 9 Cas 5 : E1 (44 : 1,8), E7 (60 : 2,4) et E8 (56 : 2,5) 10,0 Évaluation 8,0 6,0 4,0 E8E7 2,0 E1 0,0 0 20 40 60 Nom bre de m ots 80 100 120 75 Le cas 6 porte également sur trois étudiants : E3 (48 et 4,6), E13 (47 et 3,9) et E16 (43 et 3,7). Ils ont tous un nombre de mots assez bas mais leur performance a été surévaluée. Diagramme 10 Cas 6 : E3 (48 : 4,6), E13 (47 : 3,9) et E16 (43 : 3,7) 10,0 Évaluation 8,0 6,0 E3 4,0 E13 E16 2,0 0,0 0 20 40 60 Nom bre de m ots 80 100 120 76 7.2.4.1 La maîtrise des autres composants de la compétence orale Dans ce chapitre, nous examinerons si la maîtrise des autres composants de la compétence orale (la correction de la langue, la fluidité, la prononciation et la prestation générale) influence l’évaluation de la richesse de l’expression. Autrement dit, nous comparerons les évaluations des autres composants de la compétence orale à l’évaluation de la richesse de l’expression. Ces évaluations sont des moyennes calculées selon les mêmes principes que la moyenne de la richesse de l'expression (v. chap. 7.1). Nous donnerons des exemples à l’aide de cinq cas qui ont déjà été présentés dans le chapitre précédent. Les évaluations de tous les autres composants de la compétence orale sont illustrées dans le tableau 7. Dans les quatre premiers cas (v. tableau 7), l'étudiant ayant eu une meilleure évaluation sur la richesse de l'expression a obtenu une meilleure évaluation également dans tous les autres composants de la compétence orale dans le projet HY-TALK. Par exemple, dans le cas 4, le nombre de mots différents d’E4 et d’E12 est le même : 65 mots. Cependant, E12 a obtenu une meilleure évaluation d’une part de la richesse de l’expression mais d’autre part aussi de tous les autres composants de la compétence orale. Dans le cas 5, les différences ne sont pas aussi importantes mais nous pouvons toutefois observer la même tendance. En ce qui concerne le cas 5, les trois étudiants (E1, E7 et E8) ont eu les évaluations les plus basses dans tous les autres composants de la compétence orale évalués parmi tous les apprenants de notre corpus. À la base de nos observations, il nous semble donc qu’il existe une corrélation entre la maîtrise des autres composants de la compétence orale mentionnés ci-dessus et l'évaluation de la richesse de l'expression. 77 Tableau 7 : Les évaluations des autres composants de la compétence orale étudiant nombre de richesse de mots l’expression correction de la langue fluidité prononciation prestation générale cas 1 E5 E17 88 96 7,8 5,3 8,9 5,1 8,8 5,3 8,3 6,8 8 5,4 cas 2 E3 E7 48 60 4,6 2,4 4,9 2,5 5,4 2,1 6 2,7 5,1 2,3 cas 3 E7 E10 60 61 2,4 4,3 2,5 4,6 2,1 4,7 2,7 5,3 2,3 4,4 cas 4 E4 E12 65 65 3,9 5,2 4,1 5,9 4,8 6,3 5,5 5,8 4,7 5,6 cas 5 E1 E7 E8 44 60 56 1,8 2,4 2,5 2,1 2,5 2,5 1,8 2,1 2,2 2,3 2,7 2,9 1,9 2,3 2,5 78 7.2.4.2 Le partenaire La plupart des tâches ont été exécutées par paires. La prestation du partenaire27 a-t-elle une influence sur l’évaluation ? Il semblerait que ce soit le cas. Prenons quelques exemples (v. tableau 8). Dans les cas 1-3, l'étudiant ayant obtenu une évaluation plus élevée, a eu un meilleur partenaire en ce qui concerne le nombre de mots et l'évaluation de la richesse de l'expression. Si nous nous penchons sur le cas 3 dans lequel les étudiants E7 et E10 ont pratiquement le même nombre de mots, nous observons que l'évaluation d’E10 (4,3) est considérablement plus élevée que celle d’E7 (2,4). Le partenaire d’E10 a utilisé 72 mots tandis que le partenaire d’E7 s'est servi de 56 mots seulement. De plus, le partenaire d’E10 a été placé à un niveau beaucoup plus élevée (4,5) que le partenaire d’E7 (2,5). En outre, dans les cas 4 et 5, on peut également douter de l'influence du partenaire : dans le cas 5, nous remarquons que les étudiants ayant assez peu de mots mais se situant audessus de la droite de régression (donc surévalués), ont tous eu un partenaire dont le nombre de mots dépasse la moyenne28. Par contre, les étudiants dont les coordonnées se trouvent clairement au-dessous de la droite de régression (donc sousévalués), n'ont pas pu profiter de l'influence positive d'un partenaire doté d’un vocabulaire étendu (le cas 4) : E7 et E8 ont formé une paire entre eux et E1 a effectué les tâches avec E2 dont la coordonnée se trouve également au-dessous de la droite de régression (v. diagramme 1). Pour conclure, nous constatons que les cinq cas exemples, sans exception, illustrent l'importance du partenaire : le fait d'avoir un partenaire dont l'étendue du vocabulaire et l’évaluation moyenne sont relativement élevées influence de manière favorable l'évaluation de l'étudiant dont la prestation est plus faible. Nous pouvons par conséquent nous poser la question suivante : les étudiants sousévalués (le cas 4) auraient-ils eu des évaluations plus élevées sur la richesse de l’expression s'ils avaient eu un meilleur partenaire ? 27 Nous rappelons que uniquement T1 a été effectué seul, T2, T3 et T4 en paires (cf. chap. 1.2). 28 La moyenne du nombre des mots est de 63 (cf. chap. 7.1). 79 Tableau 8 : L'évaluation du partenaire étudiant nombre de mots nombre de évaluation partenaire mots du partenaire évaluation du partenaire cas 1 E5 E17 88 96 7,8 5,3 E6 E16 75 43 4,3 3,7 cas 2 E3 E7 48 60 4,6 2,4 E4 E8 65 56 3,9 2,5 cas 3 E7 E10 60 61 2,4 4,3 E8 E9 56 72 2,5 4,5 cas 4 E1 E7 E8 44 60 56 1,8 2,4 2,5 E2 E8 E7 41 56 60 2,5 2,5 2,4 cas 5 E3 E13 E16 48 47 43 4,6 3,9 3,7 E4 E12 E17 65 65 96 3,9 5,2 5,3 7.2.4.3 Le français parlé à la maison En réfléchissant aux facteurs possibles ayant une influence sur l'évaluation de la richesse de l'expression, nous n'avons pas pu éviter le fait qu'un des étudiants (E5) dans la comparaison dans notre corpus parle français à la maison (v. chap. 1.2). Ses prestations dans les tâches se rapprochent du parler oral d'un Français natif et il est possible que cette bonne impression générale influence l'évaluation de son étendue de l'expression. Cette bonne impression générale est liée à la maîtrise des autres composants de la compétence orale sur lesquels nous avons écrit ci-dessus. Autrement dit, si l'étudiant possède une bonne prononciation du français, si son expression est aisée et s’il n'y a pas beaucoup de fautes de langue, cela semble influencer d'une manière favorable l'évaluation de l'étendue de l'expression. De plus, nous pouvons nous demander si le simple fait de savoir que l’autre parent d'un étudiant est français, influence les évaluateurs. 80 7.2.4.4 La maîtrise des constructions grammaticales Afin de trouver des facteurs possibles qui expliqueraient les évaluations illogiques de la richesse de l'expression, nous présentons dans le tableau 9 le nombre de constructions grammaticales en plus du nombre de mots. Comme nous l’avons constaté à plusieurs reprises ci-dessus (v. chap. 7.1), la maîtrise des structures est un des principaux facteurs dans l'évaluation de la richesse de l'expression. Cependant, cela n'est pas toujours le cas, ce qui se manifeste dans le tableau ci-dessous. Si l'étudiant ayant moins de mots, mais une meilleure évaluation, avait utilisé plus de constructions grammaticales, cela justifierait la note plus élevée au moins dans une certaine mesure. Dans les cas 1-3, même si les différences entre les nombres de structures utilisées ne sont pas grandes, la situation est exactement l'inverse. Prenons par exemple le cas 1 : l'étudiant ayant un moindre nombre de mots mais une meilleure note est E5. Il a utilisé 13 constructions différentes tandis que le nombre correspondant d’E17 est de 15. Un nombre plus élevé de constructions grammaticales qui expliquerait la note supérieure est un facteur possible uniquement dans le cas 4. Tableau 9 : Le nombre des mots et (celui) des structures grammaticales étudiant nombre des mots évaluation nombre des contructions grammaticales cas 1 E5 E17 88 96 7,8 5,3 13 15 cas 2 E3 E7 48 60 4,6 2,4 9 11 cas 3 E7 E10 60 61 2,4 4,3 11 9 cas 4 E4 E12 65 65 3,9 5,2 7 11 81 8. Conclusion Dans ce mémoire, nous avons examiné la richesse de l'expression orale de seize apprenants de français langue étrangère qui, au moment du recueil du corpus, étaient des étudiants en première année dans deux lycées à Helsinki. Le corpus utilisé a été mis à notre disposition par le projet HY-TALK à l’Université de Helsinki. Dans ce projet, quatre situations de communication étaient proposées aux étudiants dont les prestations étaient enregistrées en vidéo et par la suite transcrites. Elles ont aussi été évaluées par plusieurs évaluateurs-enseignants qui ont situé les compétences des élèves sur les échelles de compétences contenues dans le Plan national d’enseignement finlandais. Plus particulièrement, notre objectif était de voir si les évaluations sur la richesse de l’expression pouvaient être justifiées par le nombre de mots et celui des constructions grammaticales que les étudiants utilisent. Nous voulions également savoir s'il existe d'autres facteurs qui ont une influence sur l'évaluation de l'étendue de l'expression. En plus de ces deux questions principales, nous nous étions posé la question de savoir si les étudiants de notre corpus avaient atteint le niveau A2.1 dans l'expression orale sur l’échelle des compétences langagières en Finlande. En effet, c’est le niveau pour obtenir la note 8 dans une langue vivante, autre que l'anglais, à la fin du collège en Finlande. Les résultats de notre étude indiquent qu'il y a une forte corrélation entre le nombre de mots ou de structures et l'évaluation de la richesse de l'expression. Ainsi, la tendance générale est que plus un étudiant utilise de mots ou de structures différents, plus il se situe haut sur l’échelle utilisée dans l’évaluation. Le nombre de mots explique l'évaluation de la richesse de l'expression à 71,3 % en moyenne et les structures à 61,1 %. Les autres facteurs qui, selon notre analyse, influencent l'évaluation de la richesse de l'expression sont le partenaire avec qui l'étudiant a effectué les tâches et la maîtrise des autres composants de la compétence orale : la fluidité, la prononciation et la correction de la langue. Ces derniers sont les autres composants de la compétence orale qui ont été évalués dans le projet HYTALK. Il nous semble également que le fait de parler français à la maison ou 82 l’absence d’un certain évaluateur peuvent avoir une influence sur les résultats de l’évaluation. Cependant, nous n'avons pas pu examiner leur rôle. Pour répondre à la question concernant le niveau de l'oral des apprenants, nous constatons que l'évaluation moyenne des étudiants dans notre corpus était 4,1 qui correspond au niveau A2.1 sur l'échelle utilisée dans le projet HY-TALK (v. annexe 2). Ce niveau est exactement celui qui est défini dans le Plan national d'enseignement finlandais (POPS). Il faut toutefois remarquer qu'il y avait une grande variation dans les évaluations des apprenants, la plus faible étant de 1,8 et la plus élevée de 7,8 sur une échelle de 1 à 10. En plus, le niveau A2.1 du POPS est défini pour l'expression orale en général, donc la richesse de l'expression n’en présente qu'une partie. Pour analyser le corpus, nous avons tout d’abord compté les mots lexicaux et les constructions grammaticales utilisés par les étudiants. Des le début de ce processus, nous avons dû établir les principes selon lesquels inclure des mots dans les statistiques. Nous avons donc décidé qu’un mot est compté s'il est compréhensible, s'il a un contexte, s'il est prononcé d'une manière à peu près française et s’il se trouve dans un dictionnaire unilingue français ou s’il est utilisé dans le français des locuteurs francophones. Malgré ces principes définis à priori, nous avons trouvé certains mots difficiles à classer, surtout les formes erronées qui ne gênent pas la compréhension. De plus, il nous a parfois été difficile de savoir quel mot ou quelle forme un étudiant a voulu exprimer. Par exemple, le verbe être (est, es) peut facilement être confondu avec la conjonction et. Pour cette raison, nous n’avons pas inclus les mots dont nous avons dû deviner le sens. Il se peut que, dans certains cas, d’autres conclusions que les nôtres soient tout à fait possibles. Dans ce mémoire, il s’agit au fond de l’évaluation de certaines compétences. Nous avons présenté deux groupes des compétences : les compétences générales individuelles et les compétences nécessaires pour communiquer langagièrement. Nous avons constaté qu’une approche pédagogique assez récente appelée « approche actionnelle », qui trouve sa correspondance dans les compétences définies, est mise en avant aussi bien dans le Cadre européen que dans la didactique des langues étrangères. Dans cette approche, l’apprenant d’une langue étrangère est considéré comme un acteur social. 83 En écrivant ce mémoire, nous avons profité d'une grande partie de tout ce que nous avons appris pendant nos études universitaires. Nos connaissances sur la phonétique, la grammaire, la pragmatique aussi bien que nos études pédagogiques se sont montrées très utiles. En établissant les statistiques des mots et des constructions utilisés par les étudiants, il nous a d'abord semblé qu'il n'y avait pas de grande correspondance entre les statistiques et les évaluations : il nous semblait que les autres qualités des étudiants et des prestations jouaient un rôle beaucoup plus important que la véritable connaissance du vocabulaire et des structures grammaticales. Toutefois, la présentation graphique des statistiques et des évaluations a créé une base solide pour l'analyse des résultats et nous a orientées vers la bonne direction. Le mot clé qui a caractérisé notre travail sur ce mémoire du début jusqu'à la fin est la collaboration : dans chaque phase de cette étude, nous avons collaboré d’une façon intense. Il serait donc injuste, même impossible, de partager la version finale de ce travail entre nous deux. Le fait de travailler ensemble nous a beaucoup apporté, car à travers les discussions, nous avons réussi à avoir un point de vue plus vaste sur les domaines traités dans ce mémoire. Nous avons pu être critiques l'une envers l'autre mais nous avons toujours voulu prendre en considération les avis et les points de vue de l'autre afin d'arriver à un bon résultat. Nous avons profité des qualités de chacune et nous nous sommes complétées mutuellement. Cette façon de travailler nous a inspirées et a fait avancer cette étude. En fin de compte, nous avons beaucoup appris sur le travail en équipe. Cependant, cette leçon sur les avantages de la collaboration n'est pas la seule chose que le travail sur ce mémoire nous a apportée : nos connaissances en informatique se sont beaucoup améliorées surtout quant au logiciel Excel. Étant deux futures enseignantes, nous pourrons certainement aussi profiter des connaissances des domaines sur lesquels nous nous sommes penchées pendant le projet : la langue parlée, le vocabulaire et avant tout Le cadre européen commun de référence pour les langues et l'évaluation de la compétence orale. Avant d'écrire ce mémoire, nous ne connaissions pas très bien le Cadre qui nous paraissait un document assez hermétique. Maintenant, grâce à ce mémoire, nous savons de quoi il s'agit et nous pourrons nous en 84 servir dans notre futur travail. En plus d'avoir une bonne idée générale sur toutes les composantes qui font partie de la maîtrise d'une langue, nous saurons l'exploiter dans l'évaluation. Même si nous avons travaillé principalement sur la richesse de l'expression, après avoir terminé le mémoire, nous avons une conception beaucoup plus claire de tout ce qu'il faut prendre en compte dans l'évaluation de la compétence orale. Cela nous sera sans aucun doute utile et nous aidera aussi quant à la préparation des examens oraux qui, à partir de 2010, seront obligatoires au lycée pour la langue étrangère obligatoire. Nous avons apprécié la possibilité de collaborer avec le projet HYTALK. Grâce à ce projet, nous avons pu travailler sur un corpus vivant, ce qui nous a beaucoup inspirées. Dans le cadre de ce mémoire, nous avons dû nous limiter principalement à l'étude d'un facteur dans l'évaluation de l'oral, la richesse de l'expression. Il serait intéressant d'examiner en détail aussi les autres aspects évalués dans HY-TALK, qui sont la fluidité, la prononciation et la correction de la langue, et voir quel est le rôle de chacune de ces souscompétences dans l'évaluation de la prestation générale. Peut-être notre étude est-elle le premier pas sur ce chemin. 85 Bibliographie A. Ouvrages théoriques Bachman, L.F. (1991) « What does language testing have to offer? » TESOL Quarterly 25. 671-704. 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Opetusministeriö http://80.248.162.139/OPM/Tiedotteet /2008/06/lukio.html?lang=fi Le projet HY-TALK http://www.helsinki.fi/sokla/vieki/vieki_hytalk.htm. ANNEXE 1 L’échelle contenue dans le PNE Niveau A1.1 Expression orale * Sait répondre aux questions les plus simples le concernant. L’interaction repose sur l’interlocuteur et l’apprenant a recours à sa langue maternelle ou à la gestuelle. * Beaucoup de pauses, de répétitions et de coupures. * La prononciation peut amener de gros problèmes de compréhension. * Connaît un vocabulaire limité de base et quelques expressions courantes apprises. * Les expressions connues peuvent être assez correctes Même si l’apprenant ne peut formuler de production libre. A1.2 * Peut communiquer de façon limitée pour ses besoins immédiats et répondre à des questions le touchant personnellement dans une conversation. Nécessite souvent l’aide de son interlocuteur. * Pauses et autres coupures dans le discours. * La prononciation peut gêner la compréhension. * Connaît un vocabulaire limité, quelques expressions correspondant à des situations particulières, les bases de la grammaire. * Dans un discours même élémentaire, apparaissent toutes sortes de fautes. A1.3 * Sait parler de lui et de son entourage de façon brève. Se débrouille dans toutes les conversations simples et dans des situations de service. Nécessite parfois l’aide de son interlocuteur. * Expression courante dans toutes les conversations les plus familières, ailleurs pauses et hésitations * La prononciation gêne parfois la compréhension * Connaît un nombre limité d’expressions apprises par cœur, le vocabulaire le plus important et les structures de base. * Beaucoup de fautes élémentaires dans un discours simple. A2.1 * Sait décrire son entourage simplement ou raconter une série d’événements en courtes phrases. Réussit dans les situations sociales les plus fréquentes et les services les plus familiers. Sait commencer et terminer une conversation, mais n’arrive pas à discuter longtemps. * Produit certains morceaux de conversation mais avec des pauses et des recommencements parfois erronés. * La prononciation est compréhensible même avec un fort accent étranger et quelques erreurs de compréhension de temps en temps. * Prévoit le sens du vocabulaire de base et plusieurs structures essentielles (temps du passé et conjonctions) * Maîtrise la syntaxe élémentaire, mais des fautes apparaissent encore beaucoup dans les structures de base. A2.2 * Peut présenter une description énumérative de son entourage et les côtés quotidiens. Peut participer à une conversation routinière traitant de ses proches ou de lui-même. Peut avoir besoin d’aide dans la conversation et éviter certains sujets. * Le discours est quelquefois courant mais souvent coupé de pauses. * La prononciation est compréhensible malgré un accent étranger et des erreurs de prononciation. * Connaît assez bien le vocabulaire familier et quelques expressions courantes. Connaît les structures de base et quelques constructions plus exigeantes. * Dans un discours libre plus large apparaissent beaucoup de fautes (par ex. le temps des verbes) et ces fautes peuvent parfois gêner la compréhension. B1.1 * Peut parler de choses connues et aussi donner des détails. Se débrouille avec la langue dans les situations familières et conversations non officielles. Sait communiquer les choses les plus importantes pour lui-même dans des situations exigeantes. Les présentations longues ou les sujets traités peuvent apporter des difficultés. * Peut tenir un discours compréhensible même si dans des parties du discours apparaissent des pauses et des hésitations. * La prononciation est compréhensible même s’il apparaît parfois un accent étranger et des fautes de prononciation. * Sait utiliser une gamme étendue de vocabulaire familier et quelques expressions idiomatiques. Peut diversifier les constructions. * Dans un discours plus libre les fautes de grammaire sont générales (par ex. articles, terminaisons), mais gênent rarement la compréhension. B1.2 * Peut parler de sujets ordinaires, concrets et décrivant, énumérant, comparant et commentant d’autres sujets comme le cinéma, les livres, la musique. Communique sûrement dans différentes situations quotidiennes. L’expression langagière n’est pas encore très précise. * Sait facilement parler de lui-même. Malgré des pauses et des coupures, le discours continue et le message passe. * La prononciation est très compréhensible même si l’intonation et l’accent ne sont pas toujours appropriés à la langue. * Sait utiliser un vocabulaire assez étendu, des expressions courantes. Utilise des structures diversifiées et des phrases complexes. * Des fautes grammaticales apparaissent dans une certaine mesure mais gênent rarement une communication même étendue. B2.1 * Sait présenter clairement des descriptions précises de choses ayant trait à des expériences, parler de ses sentiments et présenter la signification personnelle d’événements et d’expériences personnelles. Peut participer activement dans des conversations souvent pratiques et des situations sociales et même plus formelles. Peut communiquer de façon interactive avec un natif sans paraître ridicule ou irritant. L’expression orale ne trouve pas toujours le bon niveau de style. * Peut produire des conversations à débit régulier et avec de rares pauses ou hésitations. * La prononciation et l’intonation sont claires et naturelles. * Sait utiliser des constructions diversifiées et un vocabulaire étendu avec des expressions et un vocabulaire conceptuel. Montre la capacité de réagir convenablement aux exigences de forme convenant à la situation. * Maîtrise assez bien la grammaire et les rares fautes ne gênent pas en général la compréhension. B2.2 * Peut tenir un discours préparé sur toutes sortes de thèmes généraux. Peut discuter efficacement et socialement avec un locuteur natif. Peut discuter et négocier de beaucoup de choses, présenter et commenter le cours d’idées exigeants et peut se joindre à des conversations. Sait s’exprimer avec sûreté, clairement et poliment selon la situation. La présentation peut être schématique et le locuteur peut avoir recours à des périphrases. * Sait communiquer spontanément, souvent même couramment et sans efforts avec quelques hésitations occasionnelles. * La prononciation et l’intonation sont très claires et naturelles. * Maîtrise amplement les moyens langagiers d’exprimer des sujets concrets et abstraits, connus et inconnus sûrement, clairement et en suivant la forme exigée par la circonstance. L’expression est rarement limitée par des raisons linguistiques. * Bonne maîtrise de la grammaire. Souvent le locuteur corrige lui-même ses fautes qui ne gênent pas la compréhension. C1.1 * Peut présenter un exposé préparé formel assez long. peut prendre part activement á des conversations complexes avec des détails et conduire des réunions. de routine et de petits groupes. peut utiliser la langue dans toutes sortes de situations sociales. Le changement de style ou de forme peuvent apporter des difficultés. * Sait communiquer couramment, spontanément et presque sans efforts. * Sait changer d’intonation et mettre l’accent correctement pour indiquer des nuances subtiles. * Le vocabulaire et les structures sont étendues et ne limitent que rarement l’expression. Peut s’exprimer sûrement, clairement et poliment dans des situations qui l’exigent. * Bonne maîtrise de la grammaire. Des fautes occasionnelles ne gênent pas la compréhension et le locuteur sait se corriger lui-même ANNEXE 2 HY-TALK-hanke, 2007: Puhumisen ops-asteikko: Laajuus 1 A1.1 Kielitaidon alkeiden hallinta * Osaa hyvin suppean perussanaston ja joitakin opeteltuja vakioilmaisuja. 2 A1.2 Kehittyvä alkeiskielitaito A1.3 Toimiva alkeiskielitaito * Osaa hyvin suppean perussanaston, joitakin tilannesidonnaisia ilmaisuja ja peruskieliopin aineksia. 4 A2.1 Peruskieli-taidon alkuvaihe *Osaa helposti ennakoitavan perussanaston ja monia keskeisimpiä rakenteita (kuten menneen ajan muotoja ja konjunktioita). 5 A2.2 Kehittyvä peruskielitaito *Osaa kohtalaisen hyvin tavallisen, jokapäiväisen sanaston ja jonkin verran idiomaattisia ilmaisuja. Osaa useita yksinkertaisia ja myös joitakin vaativampia rakenteita. 6 B1.1 Toimiva peruskieli-taito *Osaa käyttää melko laajaa jokapäiväistä sanastoa ja joitakin yleisiä fraaseja ja idiomeja. Käyttää useita erilaisia rakenteita. 7 B1.2 Sujuva peruskielitaito *Osaa käyttää kohtalaisen laajaa sanastoa ja tavallisia idiomeja. Käyttää myös monenlaisia rakenteita ja mutkikkaitakin lauseita. 8 B2.1 Itsenäisen kielitaidon perustaso *Osaa käyttää monipuolisesti kielen rakenteita ja laajahkoa sanastoa mukaan lukien idiomaattinen ja käsitteellinen sanasto. Osoittaa kasvavaa taitoa reagoida sopivasti tilanteen asettamiin muotovaatimuksiin. 9 B2.2 Toimiva itsenäinen kielitaito *Hallitsee laajasti kielelliset keinot ilmaista konkreetteja ja käsitteellisiä, tuttuja ja tuntemattomia aiheita varmasti, selkeästi ja tilanteen vaatimaa muodollisuusastetta noudattaen. Kielelliset syyt rajoittavat ilmaisua erittäin harvoin. 10 C1.1 Taitavan kielitaidon perustaso *Sanasto ja rakenteisto ovat hyvin laajat ja rajoittavat ilmaisua erittäin harvoin. Osaa ilmaista itseään varmasti, selkeästi ja kohteliaasti tilanteen vaatimalla tavalla. 3 *Osaa rajallisen joukon lyhyitä, ulkoa opeteltuja ilmauksia, keskeisintä sanastoa ja perustason lauserakenteita. ANNEXE 3 PUHETEHTÄVÄT Valmistelu 20 min + suoritus 20 min Suorita seuraavat puhetehtävät parisi kanssa. Tutustukaa niihin ensin 20 minuutin ajan. Älkää käyttäkö apuvälineitä (sanakirjoja tms.). Muistiinpanoja voit tehdä, mutta niitä ei saa lukea suoritustilanteessa. Kukin tehtävä vie korkeintaan viisi minuuttia. Aluksi käydään lyhyt vapaa keskustelu ”syntyperäisen” puhujan kanssa. Tehtävä 1. Esittelyvideo Saat kesävieraaksi etäisen sukulaisnuoren (nimeltään Nico tai Anna), jonka perhe on muuttanut kohdekieliseen maahan kauan sitten, eivätkä lapset enää osaa suomea. Toimitat hänelle ensin lyhyen videokatkelman, jossa esittelet perheesi ja itsesi (sen, mitä sanot, ei tarvitse olla totta). Tervehdi. Esittele perheesi ja itsesi (nimet, iät, mitä kieliä kukin puhuu, mistä pitää tai mitä harrastaa). Kysy, mitä kieliä Nico/Anna puhuu ja paria muuta asiaa. Kerro, missä asutte ja millainen asunto teillä on. Kerro koulustasi. Kerro, miten vietät vapaa-aikaasi. Mainitse, ketkä ovat parhaat ystäväsi. Kerro, mitä teit heidän kanssaan viime kesänä. Lupaa jotakin Nicolle/Annalle, kun hän tulee Suomeen. Päätä esityksesi kohteliaasti. Tehtävä 2. Arkitilanteita Keskustele parisi kanssa mahdollisimman luontevasti. llmaise vuorosanojen asiasisältö kohdekielellä. Älä käännä, vaan yritä saada itsesi ymmärretyksi omin sanoin. Jos et tiedä jotain, älä juutu vaikeaan kohtaan vaan jatka eteenpäin ja puhu mahdollisimman paljon. Nico/Anna viipyy luonasi kuukauden, jonka aikana käytte seuraavat kaksi keskustelua (numerot 2.1 ja 2.2). Vaihtakaa vuoroja niin, että kumpikin teistä on toisessa tilanteessa oma itsensä (S=sinä) ja toisessa vieraan (Nico/Anna) roolissa. Sopikaa roolijako ennen kuin alatte puhua. 2.1. Majoittuminen N/A: S: N/A: S: N/A: S: N/A: S: Kommentoi kohteliaasti huonetta, jonka olet saanut käyttöösi. Kerro kuka siinä yleensä asuu ja missä tämä henkilö nyt on. Kysy, mihin voit laittaa tavarasi. Vastaa, että kaapissa on tilaa vaatteille ja että peseytymisvälineet voi viedä kylpyhuoneeseen. Kysy, mihin aikaan perheessä herätään aamulla. Vastaa ja kerro muutenkin päiväohjelmasta kesäaikaan. Ojenna ja esittele kaksi tuliaista, jotka olet tuonut perheelle. Kerro myös, miksi valitsit ne. Kiittele tuliaisista ja kerro, mitä aiotte tehdä niillä. 2.2 Keskustelua matkalla elokuvista kotiin S: N/A: S: N/A: S: N/A: S: N/A: S: Kysy, mitä vieraasi piti elokuvasta (mainitse elokuvan nimi). Kerro mielipiteesi ja tiedustele toisen mielipidettä elokuvasta. Vastaa kysymykseen ja kuvaile tunnetilaasi elokuvan jälkeen. Vertaa elokuvaa johonkin toiseen näkemääsi elokuvaan ja perustele näkemyksesi. Mainitse, mikä muu elokuva on tehnyt sinuun vaikutuksen ja miksi. Kerro mielipiteesi elokuvan musiikista ja kysy jotain suomalaisesta musiikista. Vastaa kysymykseen ja suosittele toiselle jotain suomalaista musiikkia. Äkkiä huomaat jotakin, joka yllättää sinut (mainitse mitä) ja kehotat toista kiirehtimään. Reagoi tilanteeseen rauhoittavasti. Tehtävä 3. Retkipäivästä sopiminen Suunnittelette yhdessä retkeä johonkin suosittuun paikkaan kotiseudullasi. Sopikaa yhdessä seuraavista asioista: mihin retki tehdään, mihin aikaan ja mistä lähdetään keitä lähtee mukaan miten pitkä matka on ja miten se tehdään (kävellen/bussilla/pyörillä) mitä kumpikin haluaa tehdä ja nähdä missä syödään ja mitä miten paljon rahaa otetaan mukaan ja mihin sitä kuluu milloin palataan takaisin mitä pitää muistaa / mitä ei saa unohtaa