IPRES contre Etat du Sénégal

Transcription

IPRES contre Etat du Sénégal
ARRET N°09
du 11/03/10
N°J/50/RG/09
du 19/02/09
-----Institut de Prévoyance Retraite du
Sénégal (I.P.R.E.S)
(Me Mayacine TOUNKARA &
Associés)
Contre :
Etat du Sénégal
(A.J.E)
PRESENTS :
Fatou Habibatou DIALLO, Président
de Chambre, Président ;
Mouhamadou NGOM,
Mamadou Abdoulaye DIOUF,
Amadou Hamady DIALLO,
Abdoulaye NDIAYE,
Conseillers
RAPPORTEUR :
Abdoulaye NDIAYE,
PARQUET GENERAL:
Abdourahmane DIOUF, Avocat
général,
Ibrahima SOW, Greffier;
AUDIENCE :
Du 11 mars 2010
MATIERE :
Administrative
RECOURS :
Excès de pouvoir
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REPUBLIQUE DU SENEGAL
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS
----------------COUR SUPREME
----------------CHAMBRE ADMINISTRATIVE
----------------A l’audience publique ordinaire du jeudi onze mars de
l’an deux mille dix ;
ENTRE :
L’Institut de Prévoyance Retraite du Sénégal (I.P.R.E.S),
22 Avenue Léopold Sédar SENGHOR, faisant élection de
domicile en l’étude de Maître Mayacine TOUNKARA et
associés, avocats à la cour , 15 boulevard Djily MBAYE x
rue de Thann;
D’UNE PART ;
ET :
L’Etat du Sénégal, pris en la personne de Monsieur l’Agent
judiciaire de l’Etat, en ses bureaux, sis au Ministère de
l’Economie et des Finances, building Peytavin, Avenue de la
République x Carde à Dakar ;
D’AUTRE PART ;
Vu la requête, reçue le 19 février 2009, au greffe de la Cour
suprême, par laquelle l’Institution de Prévoyance Retraite du
Sénégal dite IPRES, par l’organe de ses conseils Maître
Mayacine TOUNKARA et associés, avocats à la Cour, a
formé un recours en annulation du décret n°2008-1169 du 16
octobre 2008 du Président de la République, déclarant d’utilité
publique le projet d’acquisition par l’Etat, des immeubles bâtis
constituant l’établissement hôtelier, dénommé « Hôtel
Indépendance », sis à Dakar et cessibles les immeubles
immatriculés, objets des titres fonciers, n°399/DK,
n°2899/DK, n°2903/DK, n°3420/DK, n°7382/DK abritant
ledit immeuble ;
Vu la loi organique n°2008-35 du 08 août 2008 sur la Cour
suprême ;
Vu l’exploit du 25 février 2009 de Maître Malick NDIAYE,
huissier de justice à Dakar portant signification de la requête ;
Vu la quittance du 06 mars 2009, attestant la consignation de
l’amende ;
Vu le mémoire en défense du 24 avril 2009 de l’Agent
judiciaire de l’Etat ;
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Vu la lettre du 24 août 2009 de la chambre administrative
adressée à l’Agent judiciaire de l’Etat ;
Vu le décret attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Ouï Monsieur Abdoulaye NDIAYE, conseiller en son
rapport ;
Ouï Monsieur Abdourahmane DIOUF, avocat général,
représentant le Parquet général, en ses conclusions tendant à
l’annulation de la décision attaquée ;
LA COUR SUPREME,
Après en avoir délibéré conformément à la
loi ;
Sur la recevabilité du recours :
Considérant que, dans son mémoire du 24 avril 2009, l’Etat
du Sénégal soulève l’irrecevabilité du recours pour tardiveté,
au motif que le décret attaqué a été pris le 16 octobre
2008, alors que la requête de l’IPRES n’a été reçue au greffe
de la Cour suprême que le 19 février 2009, soit après le délai
légal de deux mois ;
Considérant qu’au sens de l’article 73-1 de la loi organique
n°2008-35 du 08 août 2008 sur la Cour suprême, le délai pour
se pourvoir contre une décision administrative est de deux
mois, ce délai court de la date de la publication de la décision
attaquée, à moins qu’elle ne doive être notifiée ou signifiée,
auquel cas, il court de la date de la notification ou de la
signification ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction du dossier que le
Journal officiel n°6458 du 07 mars 2009 portant publication
du décret attaqué a été déposé le 03 avril 2009 au Secrétariat
Général du Gouvernement ;
Qu’il s’ensuit que la requête introduite le 19 février 2009
avant même la publication du décret est recevable ;
Sur le fond :
Sur le moyen unique tiré de la violation de la loi n°76-67
du 02 juillet 1976 relative à l’expropriation pour cause
d’utilité publique en ses première et deuxième branche, et
sans qu’il soit besoin de statuer sur la troisième branche.
Sur la première branche du moyen tirée de la violation de
l’article 5 de la loi précitée en ce que la déclaration d’utilité
publique n’a pas été précédée d’une enquête, raison pour
laquelle le décret ne mentionne nullement les dates des procès
verbaux d’ouverture et de fermeture de l’enquête, mais se
borne à les citer ;
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Considérant qu’aux termes de la loi : « La déclaration
d’utilité publique est précédée d’une enquête dont
l’ouverture est annoncée au public par tous moyens de
publicité habituels ; pendant la durée de l’enquête, toute
personne intéressée peut formuler des observations » ;
Considérant que le décret attaqué se borne à viser le procès
verbal d’ouverture et de fermeture de l’enquête de commodo
et incommodo sans autres précisions, ni sur la date, ni sur le
moyen de publicité utilisé ;
Que, par lettre du 24 août 2009, la Cour a réclamé en vain à
l’autorité administrative le procès verbal de l’enquête
précédant la déclaration d’utilité publique ;
Qu’en l’état, il n’est donc pas établi que la déclaration d’utilité
publique a été précédée d’une enquête ;
Sur la 2èmebranche du moyen fondée sur la violation des
articles 1 et 2 de la loi susvisée en ce que le décret n’énonce
pas le projet justifiant l’expropriation, projet relevant d’un
des cas prévus par l’article 2 de la loi ou à tout le moins
qualifié d’intérêt général ;
Considérant qu’il résulte des articles 1 et 2 visés au moyen
que :
- d’une part, l’expropriation pour cause d’utilité publique
est la procédure par laquelle l’Etat peut, dans un but
d’utilité publique et sous réserve d’une juste et préalable
indemnité, contraindre toute personne à lui céder la
propriété d’un immeuble ou d’un droit réel immobilier,
l’expropriation ne pouvant être prononcée qu’autant que
l’utilité publique a été déclarée et qu’ont été accomplies
les formalités prescrites par la loi ;
- d’autre part, il est fait énumération de projets ayant un but
d’utilité publique et pouvant, par conséquent, justifier une
expropriation pour cause d’utilité publique ;
Considérant qu’en l’espèce, l’autorité administrative en se
limitant à déclarer d’utilité publique le projet d’acquisition par
l’Etat des immeubles immatriculés constituant l’établissement
dénommé « Hôtel Indépendance », sans indiquer le projet à
réaliser et l’utilité publique qui s’y attache, ne permet pas au
juge d’exercer son contrôle ;
Qu’il suit de tout ce qui précède que le décret attaqué encourt
l’annulation ;
PAR CES MOTIFS :
Annule le décret n°2008-1169 du 16 octobre 2008 déclarant
d’utilité publique le projet d’acquisition par l’Etat des
immeubles bâtis constituant l’établissement hôtelier
dénommé « Hôtel Indépendance » sis à Dakar et cessibles les
immeubles immatriculés, objets des titres fonciers, n°399/DK,
n°2899/DK, n°2903/DK, n°3420/DK, n°7382/DK abritant
ledit établissement hôtelier ;
Ordonne la restitution de l’amende consignée ;
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Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême,
Chambre administrative, en son audience publique ordinaire
tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents:
-Fatou Habibatou DIALLO, Président de Chambre,
Président ;
- Mouhamadou NGOM,
-Mamadou Abdoulaye DIOUF,
-Amadou Hamady DIALLO,
-Abdoulaye NDIAYE, Conseillers
-Ibrahima SOW, Greffier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président
de Chambre, Président, les Conseillers et le Greffier ;
Le Président de Chambre, Président :
Fatou Habibatou DIALLO
Les Conseillers :
Mouhamadou NGOM
Mamadou A.
DIOUF
Amadou H. DIALLO
Abdoulaye NDIAYE
Le Greffier :
Ibrahima SOW
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