universite de la mediterranee aix-marseille ii these de

Transcription

universite de la mediterranee aix-marseille ii these de
UNIVERSITE DE LA MEDITERRANEE
AIX-MARSEILLE II
FACULTE DES SCIENCES DE LUMINY
163 Avenue de Luminy
13288 MARSEILLE CEDEX 9
THESE DE DOCTORAT
Spécialité : Science des Matériaux
présentée par
Isabelle MEUNIER
en vue d'obtenir le grade de docteur de l'Université de la Méditerranée.
TITRE DE LA THESE
Des divers modes de relaxation des contraintes
induites par le désaccord de maille dans les
alliages de surface
Soutenue le jeudi 25 octobre 2001
devant le jury composé de
Robert BAUDOING-SAVOIS (rapporteur)
Riccardo FERRANDO (rapporteur)
Fabienne BERTHIER
Jean-Pierre LANDESMAN
Michel LANNOO (Président)
Jean-Marc GAY (Directeur de thèse)
Guy TRÉGLIA (Directeur de thèse)
Centre de Recherche sur les Mécanismes de la Croissance Cristalline - C.N.R.S.
Ce travail a été réalisé au sein du Centre de Recherche sur les Mécanismes de la Croissance
Cristalline (CRMC2-CNRS) à Marseille. Je remercie très vivement Jacques Derrien, directeur de ce
laboratoire, de m’y avoir accueillie et Michel Bienfait, responsable de la formation doctorale, de la
confiance qu’il m’a accordée en m’acceptant au D.E.A. "Sciences des Matériaux".
Je tiens à exprimer ma reconnaissance à Michel Lannoo pour avoir présidé le jury de cette
thèse, ainsi qu’à Robert Baudoing-Savois et Riccardo Ferrando qui ont accepté d’en être les
rapporteurs. Mes remerciements vont aussi à Fabienne Berthier et Jean-Pierre Landesman qui ont
également fait partie du jury. Par leur gentillesse à mon égard, ils ont réussi à me donner confiance
en moi, ce qui n’était pas gagné d’avance ! Olivier Thomas a failli faire partie de ce jury ... mais l’appel
du grand ouest a été le plus fort ... merci quand même Olivier !
Je voudrais remercier Jean-Marc Gay, qui a encadré la partie expérimentale de ma thèse. Je
lui sais gré de la compréhension dont il a fait preuve à mon égard quand ma thèse a basculé vers "le
côté obscur de la force" (la modélisation), déséquilibrant ainsi les parties expérimentale et
théorique.
Il est pour moi très difficile de parler de toi, Guy. Je ne saurais trouver les mots pour
exprimer toute ma reconnaissance ... J’ai passé des années merveilleuses auprès de toi, au cours
desquelles j’ai beaucoup appris, tant du point de vue scientifique que humain. Tout au long de cette
thèse, tu as su m’écouter, m’encourager et me soutenir dans les moments de doute, ... ou même être
là tout simplement.
Une autre personne, qui compte beaucoup pour moi est Bernard (dit "le méchant", et ça je ne
comprends pas pourquoi !) Legrand : tu n’as jamais cessé d’être présent et ce vraiment en toute
circonstance. Nos discussions à trois ont toujours été enrichissantes pour moi et souvent porteuses
de nouvelles orientations que prenait ma thèse, que ce soit par le mail, le téléphone mais aussi de
manière beaucoup plus "physique" lors de tes visites au CRMC2. Merci de m’avoir fait partager, même
à distance, ton goût pour la recherche et le travail en équipe, ta culture et ton enthousiasme.
Je voudrais aussi exprimer ma reconnaissance à Robert (Tétot) sans qui rien de ce qui est
Monte Carlo ne serait arrivé ! Après une année de correspondance (mails et téléphone ont encore été
mis à contribution), nous avons enfin pu mettre à Porquerolles un visage sur une voix ... et je n’ai pas
été déçue ! En revanche, je ne connais toujours pas le visage de Jérôme (Creuze), mais j’espère bien
que cela finira par arriver et cela ne m’empêche pas de lui dire combien son aide dans les problèmes
de vibrations m’a été précieuse !
Je tiens également à remercier les membres de l’équipe "modélisation" : Christophe Bichara
(arrivé récemment, mais on a l’impression qu’il a toujours été là !), Chu-Chun Fu (pour le canard laqué
entre autres !), Livia Giordano (ma confidente et amie), Jacek Goniakowski (qui m’a beaucoup aidé
dans le cadre de mon tutorat), Christine Mottet (pour tes conseils éclairés ... et aussi pour le premier
petit copain de Lola), Stéphane Olivier (pour son humour pince sans rire), Jean-Marc Roussel (pour
cette attention qu’il sait apporter avec tant de délicatesse à son entourage), Ali Senhaji (pour sa
gentillesse et avec qui j’ai "partagé" mon directeur de thèse), Andrès Saúl (pour son amitié discrète
mais ô combien précieuse) et Samir Sawaya (complice dans les galères du tutorat et des calculs
d’interactions de paires effectives) pour leur amitié et leur soutien de tous les jours. Votre aide m’a
été tout particulièrement précieuse lors de la préparation de ma soutenance.
Ce travail doit aussi beaucoup à Bernard (dit "le gentil", et ça je comprends pourquoi !)
Aufray, qui a su nous motiver pour tenter de modéliser ses "vieux" (pardon Bernard !) systèmes
physiques. Ta joie de vivre à toute épreuve m’a été souvent d’un grand réconfort !
Je voudrais aussi témoigner ma gratitude à Antoine Barbier qui, par ses conseils éclairés sur
le maniement de "rod" et sur les techniques de diffraction de surface, m’a aidée quant au
dépouillement des expériences sur Ni/Ag. Merci aussi pour ton amitié.
Merci Jean-Paul (Bibérian) pour ton aide lors de mon séjour à l’ESRF et pour ta patience en
ce qui concerne notre système mythique "Au-Pb" !
Mais je n’oublie pas que ma thèse a débuté dans "l’annexe" (comme ils disent), au 5ième étage :
Hamid y a été mon confident dans les moments un peu difficiles, Benjamin "de Barjols" m’a apporté
sa bonne humeur si communicative. Merci aussi à toute l’équipe : Jean-Yves Hoarau (tu es excusé de
ne pas être venu le jour J), Jean Suzanne, Jean-Paul Coulomb, Alain Glachant, Nicolas Pic, Bénédicte
Ealet (nous avions une date importante en commun !), Simone Hanania ... et la dernière arrivée
Christelle (merci pour ton aide lors de l’organisation du pot de thèse).
Quand le moral n’était pas au beau fixe, il m’était réconfortant de retrouver, en particulier à
l’heure du repas, mes amis C. (caliméro ?)-Laurent Piccolo et Michel Dayez (cela permettait que le
repas dure ...). Et merci aussi à Daphné Becquet et Laurent Lapena pour avoir su être là pendant ces
moments de blues.
Je tiens à remercier Francis Quintric et Fred Augier qui n’ont jamais ménagé leur temps et
qui ont su être toujours disponible pour me dépanner tout au long de cette thèse. Merci aussi tout
particulièrement à la première "fan" de Lola : merci beaucoup Véro pour ton soutien morale et tes
conseils plus que précieux !
De façon plus générale, si ces années passées au CRMC2 ont été agréables pour moi, je le dois
à l’ambiance qui y règne ... et donc à tous ses membres, permanents et non permanents !
Enfin un grand merci à Franck Thibaudau pour la confiance qu’il me fait, en me donnant
l’occasion de découvrir une nouvelle activité de recherche à l’issue de ma thèse.
Et pour terminer, je tiens à réserver une place toute particulière à mes parents pour leur
présence et leur soutien sans faille ... et sans question !
TABLE DES MATIERES
___________________________________________________________________________
Des divers modes de relaxation des contraintes induites
par le désaccord de maille dans les alliages de surface
INTRODUCTION ..................................................................................................................... 4
I - EXPERIENCE .................................................................................................................... 7
I.1 - Techniques ...................................................................................................................... 7
I.1.1 - Spectroscopie d’électrons Auger (AES) ............................................................ 7
I.1.2 - Diffraction d’électrons lents (LEED) ................................................................. 9
I.1.3 - Rétrodiffusion élastique d’ions-Rutherford Backscattering : RBS .................... 9
I.1.4 - Microscopie à effet tunnel (STM) .................................................................... 10
I.1.5 - Diffraction de rayons X sous incidence rasante (SXRD) ................................. 11
I.1.5.1 - Principe de la diffraction X sous incidence rasante
I.1.5.2 - Tiges de troncature
I.1.5.3 - Protocole de l’analyse d’une expérience de diffraction de surface
I.2 - Applications ................................................................................................................... 14
I.2.1 - Sb/Cu (111) ....................................................................................................... 14
I.2.1.1 - Résultats antérieurs : LEED, AES, RBS, STM, PES
I.2.1.2 - Résultats originaux obtenus en SXRD
I.2.2 - Ag/Cu (111) ...................................................................................................... 21
I.2.2.1 - AES, LEED
I.2.2.2 - STM
I.2.2.3 - SXRD
I.2.3 - Ni/Ag (100) ....................................................................................................... 23
I.2.3.1 - Etudes antérieures : AES, LEED, STM
I.2.3.2 - Etude actuelle : SXRD
II - MODELISATION ........................................................................................................... 27
II.1 - Potentiel ........................................................................................................................ 27
II.1.1 - Formalisme des Liaisons Fortes ...................................................................... 27
II.1.2 - Approximation du second moment (SMA) ..................................................... 28
II.1.3 - Modèle d’Ising Effectif (TBIM) ..................................................................... 30
II.1.4 - Cohérence SMA-TBIM : couplage entre ordres chimique et atomique ......... 31
II.1.5 - Potentiel SMA dans les systèmes étudiés ....................................................... 32
II.1.5.1 - Métaux purs Cu, Ag, Ni
II.1.5.2 - Cas particulier : relation entre p et q pour l’antimoine
II.1.5.3 - Alliages
-1-
TABLE DES MATIERES
___________________________________________________________________________
II.2 - Méthodes atomistiques de relaxation des contraintes .............................................. 36
II.2.1 - Dynamique moléculaire Trempée (T = 0 K) ................................................... 37
II.2.1.1 - Principe
II.2.1.2 - Analyse locale
II.2.2 – Calcul à température finie : phonons et entropie vibrationnelle ..................... 39
II.2.2.1 - Approximation harmonique
II.2.2.2 - Approximation quasi-harmonique inhomogène
II.2.3 - Calcul à température finie : simulations Monte Carlo .................................... 41
II.2.3.1 - Principe et application
II.2.3.2 - Calcul de l’énergie interne
II.2.3.3 - Calcul des positions moyennes <r>
III - COUPLAGE CHIMIE-MORPHOLOGIE .................................................................... 44
III.1 - Alliages dilués : Cu-Ag, Cu-Pd ................................................................................. 44
III.1.1 - Calculs des interactions de paires .................................................................. 45
III.1.1.1 - TBIM
III.1.1.2 - Calcul des interactions de paires TBIM dans le modèle SMA
III.1.2 - Application au système CuAg ....................................................................... 47
III.1.2.1 - Couplage "relaxation - ordre" en volume (effet de concentration)
III.1.2.2 - Ordre en surface (anisotropie, diagramme de phases 2D)
III.1.2.3 - Analyse locale
III.1.2.4 - Conclusion
III.1.3 - Application au système CuPd ........................................................................ 60
III.1.3.1 - Couplage "relaxation - ordre" en volume (effet de concentration)
III.1.3.2 - Ordre en surface
III.1.4 - Comparaison des systèmes CuAg et CuPd .................................................... 62
III.2 - Précipité en volume : Ag(Ni) ..................................................................................... 63
III.2.1 - Structure atomique ......................................................................................... 63
III.2.2 - Cas du précipité icosaédrique ........................................................................ 64
III.2.3 - Energie de solution ........................................................................................ 64
III.3 - Conclusion .................................................................................................................. 67
IV - STRUCTURES DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHERENTE ......................... 69
IV.1 - Système à tendance à l’ordre : Sb / Cu (111) ........................................................... 69
IV.2 - Système à démixtion, interface 2D : Ag / Cu (111) .................................................. 71
IV.2.1 - Etude à température nulle .............................................................................. 71
IV.2.1.1 - Comparaison des surstructures (stabilité, morphologie)
IV.2.1.2 - Boucles de dislocation partielle dans le premier plan de cuivre
IV.2.1.3 - Analyse locale : cartes d’énergie interne
IV.2.1.4 - Analyse locale de la contrainte : cartes de pression
IV.2.1.5 - Lacunes interfaciales ségrégées et lacunes constitutives
-2-
TABLE DES MATIERES
___________________________________________________________________________
IV.2.2 - Effets de la température ................................................................................. 86
IV.2.2.1 - Energie interne
IV.2.2.2 - Analyse des densités locales de phonons
IV.2.2.3 - Entropie vibrationnelle
IV.2.2.4 - Energie libre
IV.2.2.5 - Conclusion
IV.3 - Système à démixtion, précipité incohérent : Ni / Ag (100) ................................... 101
IV.3.1 - Rappels des résultats théoriques antérieurs ................................................. 101
IV.3.2 - Dépôt 2D immergé ou émergeant à la surface ............................................ 102
IV.3.2.1 - Couche bidimensionnelle complète
IV.3.2.2 - Précipités bidimensionnels de taille variable
IV.3.3 - Précipités 3D immergé ou émergeant à la surface........................................ 106
IV.3.4 - Optimisation (2D / 3D, profondeur) ............................................................ 107
IV.3.5 - Conclusion ................................................................................................... 108
CONCLUSION ..................................................................................................................... 109
ANNEXES
A - Formalisme de la diffraction de rayons X en incidence rasante ............................... 111
B - Méthode de fraction continue pour le calcul des densités locales de phonons ........ 116
REFERENCES ..................................................................................................................... 120
-3-
INTRODUCTION
___________________________________________________________________________
INTRODUCTION
L’objet du travail présenté dans ce mémoire est de déterminer la structure atomique et
la morphologie des "alliages de surface", vocable utilisé pour désigner les composés
superficiels métastables résultant du dépôt et recuit d’une ou plusieurs couches d’un métal sur
un autre [1,2]. En effet, dans certaines conditions de température, le dépôt peut être incorporé
dans le substrat, tout en restant confiné au voisinage de la surface par des effets de surface tels
que la différence d’énergie de surface et/ou de taille entre les éléments, et par des effets de
volume tels que la tendance du système à former des liaisons hétéroatomiques ou
homoatomiques. Ces composés, ainsi stabilisés à la surface pendant des temps plus ou moins
longs (après un temps infini, la situation d’équilibre est la dissolution complète), possèdent
des propriétés spécifiques (chimiques, structurales, électroniques) et peuvent ainsi ressembler
ou non (surtout lorsque la différence de taille entre les deux constituants est importante) aux
phases tridimensionnelles du diagramme de phases de volume.
Une alternative à l’obtention de tels systèmes superficiels (alliages de surface) par
dépôt/dissolution d’un élément sur un substrat pur, est de laisser faire la nature par
ségrégation de surface (d’équilibre) à partir d’une solution solide (surface d’alliages) [3].
Dans ce dernier cas, la composition chimique et la structure cristallographique des couches
proches de la surface dépendent des trois forces motrices déjà citées, qui conduisent à un
enrichissement superficiel en l’un ou l’autre des composants [4]. Ces forces jouent un rôle
similaire dans le cas des alliages de surface en favorisant ou non le maintien en surface d’un
élément. Plus précisément :
- l’effet d’énergie de surface favorise la remontée ou le maintien à la surface de
l’élément qui présente la plus faible énergie de surface.
- l’effet de taille favorise la ségrégation de l’élément le plus gros (surtout quand il
est minoritaire).
- l’effet chimique (effet d’alliage) pilote essentiellement le profil de concentration.
Ainsi, dans le cas d’une tendance à l’ordre (formation de paires hétéroatomiques), le premier
plan atomique sous-jacent est appauvri par rapport à l’espèce ségrégeant à la surface. Le profil
est oscillant et des composés ordonnés peuvent se former. Au contraire, dans le cas d’une
tendance à la démixtion (formation de paires homoatomiques), la première sous-couche est
enrichie en l’espèce ségrégeante. Le profil est monotone et des précipités (agrégats) peuvent
se former.
Nous pouvons faire un tableau schématique des différents cas de figure résultant de la
dissolution du dépôt d’un métal sur un autre (voir figure 1), en admettant pour simplifier que
c’est l’atome de plus grand rayon atomique (le "plus gros") qui ségrége ... ce qui va être le cas
dans les systèmes que nous allons considérer. On peut distinguer quatre familles de composés
superficiels (illustrées par les systèmes modèles étudiés ici) suivant que l’on dépose l’espèce
qui a tendance à ségréger ou non et suivant la tendance du système à former des liaisons
hétéroatomiques (ordre) ou homoatomiques (démixtion). Dans la présente étude, nous
traiterons le cas de systèmes à fort effet de taille, dans lesquels le plus "gros" atome a la plus
faible énergie de surface, et tend donc à ségréger à la surface.
-4-
INTRODUCTION
___________________________________________________________________________
Structure atomique des alliages de surface :
A/B, B/A
τ (A) < τ (B) et r (A) > r (B)
démixtion
V<0
V>0
ordre
temps
démixtion
V<0
V>0
ordre
Figure 1 : Représentation schématique de la dissolution après recuit d’un dépôt d’un métal sur un autre, en
tenant compte de la taille (et donc de la tendance à ségréger) de l’élément déposé par rapport à l’autre puis de
la tendance chimique des deux composés (ordre (Sb/Cu et Au/Pb) ou démixtion (Ag/Cu et Ni/Ag)).
→ Dépôt de gros atomes / petits atomes
Quand on dépose l’élément qui tend à ségréger, il demeure en surface avant sa
dissolution dans le substrat. Pour un système ayant tendance à l’ordre (Sb/Cu), la question est
de savoir si l’atome d’antimoine demeure en site d’adsorption ou s’incorpore dans la surface
de Cu pour former un composé ordonné (alliage de surface) de type CunSb avec ségrégation
superficielle de Sb. Si au contraire, le système présente une tendance à la démixtion (Ag/Cu),
l’élément déposé (Ag) tend à occuper les sites de surface sans se mélanger aux éléments du
substrat. A la complétion de la monocouche, un plan dense d’Ag recouvre le substrat de Cu,
lieu de forts effets de contrainte qui peuvent être relaxés par l’apparition d’une surstructure à
grande maille. Nous verrons par la suite le moyen adopté par le système pour relâcher, de
façon originale, la contrainte. Le choix pour les atomes d’Ag de rester en sites d’adsorption ou
s’intégrer se pose pour des recouvrements inférieurs à la monocouche.
→ Dépôt de petits atomes / gros atomes
Les gros atomes du substrat, possédant la plus faible tension de surface, vont avoir
tendance à remonter à la surface sous la forme d’une ou plusieurs couches flottantes (effet dit
surfactant). Ils viennent enterrer le dépôt qui se présente sous la forme de composés ordonnés
ou de précipités immergés, suivant la tendance du système à former des paires
hétéroatomiques ou homoatomiques. Dans le cas d’un système présentant une tendance à
-5-
INTRODUCTION
___________________________________________________________________________
l’ordre (Au/Pb), les atomes de plomb remontent en surface et forment des composés ordonnés
de type AuPbn, qui peuvent au début présenter des terminaisons métastables relativement au
composé semi-infini correspondant. Si au contraire, éléments du substrat et du dépôt ont
tendance à la démixtion (Ni/Ag), les atomes d’argent remontent en surface (sous la forme
d’une ou plusieurs couches flottantes d’argent) et viennent enterrer le dépôt qui peut ou non se
fragmenter en précipités immergés. Les questions posées sont de savoir si les atomes de Ni
forment bien des précipités 3D ou s’ils restent sous forme de couches, s’ils se trouvent sous
une ou plusieurs couches d’argent ou bien à la surface, et enfin comment les interfaces
accommodent les contraintes issues du désaccord de maille.
La composition chimique et la structure atomique de ces alliages de surface sont
accessibles grâce au développement et au couplage de techniques tant expérimentales, comme
la microscopie tunnel (STM), la spectroscopie Auger (AES), la diffraction d’électrons lents
(LEED), ou la diffraction de rayons X en incidence rasante (SXRD), que théoriques comme la
Dynamique Moléculaire ou la simulation Monte Carlo dans des potentiels interatomiques
issus de la structure électronique. Grâce à ce couplage "expérience (essentiellement SXRD
dans le cadre de ce travail) - théorie" et à un constant aller-retour entre les deux, nous avons
pu déterminer les structures atomiques des composés superficiels à fort effet de taille (ici de
l’ordre de 10%) des systèmes Sb/Cu(111), Ag/Cu(111) et Ni/Ag(100), et mettre en évidence
leurs modes de relaxation des contraintes. Le manuscrit s’articule en quatre parties.
Dans un premier chapitre, nous exposerons les différentes techniques expérimentales
qui ont permis de soulever les questions auxquelles nous avons tenté de répondre par une
modélisation atomistique. Nous détaillerons deux types de technique : la diffraction des
rayons X de surface (SXRD) et l’imagerie STM et nous exposerons l’analyse des résultats
dans les trois systèmes étudiés. Nous donnerons aussi un bref aperçu des techniques AES et
LEED qui ont contribué à la caractérisation de ces surstructures.
Le deuxième chapitre décrit la modélisation par des simulations numériques, du type
Dynamique Moléculaire Trempée (T = 0 K) [5] et Monte Carlo [6] (T ≠ 0 K) dans des
potentiels interatomiques issus de la structure électronique décrite en Liaisons Fortes
(approximation du second moment : SMA). On supposera ici la configuration chimique
connue et on cherchera à déterminer la structure atomique d’équilibre du système après
relaxation à température nulle ou finie. Des surstructures ainsi déterminées, nous pourrons
obtenir les densités locales de phonons et les entropies de vibration en utilisant la méthode de
récursion [7], qui sera aussi développée dans ce chapitre, dans les approximations harmonique
et quasi-harmonique inhomogène.
Le troisième chapitre traite du couplage chimie-morphologie, qu’il aborde d’un
double point de vue. Il s’agit tout d’abord de déterminer s’il existe ou non un mélange à la
surface dans le système Ag-Cu à partir du calcul d’interactions de paires effectives d’alliage.
Nous avons poussé cette étude plus loin, en analysant le couplage "relaxation-ordre" en
volume puis en surface dans les deux limites diluées des systèmes AgCu (tendance à la
démixtion) et CuPd (tendance à l’ordre). Nous montrerons en particulier que la relaxation des
contraintes induit une tendance à la démixtion alors que couper des liaisons a pour effet
d’augmenter l’ordre et peut même induire de l’ordre dans les systèmes à séparation de phase.
Le second objectif poursuivi est de permettre d’aller au-delà de la chimie fixée en prenant en
compte les effets de relaxation dans un "modèle d’Ising effectif". Nous étudions ainsi la forme
et la morphologie des précipités de Ni dans un volume d’Ag.
Enfin, le quatrième chapitre illustre l’effet du désaccord de maille sur la structure
superficielle incluant soit un mélange A et B (composé 2D en surface : Cu2Sb) soit un
interface A/B incohérent plan (Ag/Cu(111)) ou enfin un précipité enterré (Ni/Ag(100)). Dans
le cas de Ag/Cu, nous mettrons l’accent sur l’influence de la température, via les phonons, sur
le mode d’accommodation des contraintes.
-6-
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
I - EXPERIENCE
Ce travail de thèse a comporté une partie expérimentale importante, tant au niveau des
discussions et tentatives d’explication de données originales obtenues au laboratoire
(essentiellement par STM), qu’au niveau du dépouillement des expériences de diffraction X
en incidence rasante (SXRD). Il était donc important de donner un aperçu des techniques
essentielles de caractérisation de la structure (chimique, atomique) des alliages de surface, de
leurs apports, limitations et complémentarités. C’est ce qui est fait dans la première partie de
ce chapitre, où un accent particulier sera mis sur les principes de la technique spécifique
utilisée (SXRD). Puis, dans une deuxième partie, seront présentés les résultats expérimentaux
originaux obtenus dans le cadre de cette thèse sur les systèmes Sb/Cu, Ag/Cu et Ni/Ag.
I.1 - Techniques
I.1.1 - Spectroscopie d’électrons Auger (AES)
Sous l’impact d’un faisceau électronique monocinétique de faible énergie, les atomes
de surface sont ionisés. Leur désexcitation, par réorganisation de leur structure électronique,
s’accompagne d’une émission d’électrons Auger, dont le spectre énergétique est relié aux
trois orbitales impliquées dans les transitions. L’émission Auger est donc caractéristique de
l’atome émetteur et permet d’identifier la nature des atomes superficiels. Cette technique
permet une analyse chimique des tout premiers plans de la surface (quelques nanomètres) [8].
Lorsqu’on bombarde un matériau par des électrons, on peut créer un trou dans un
niveau atomique profond (K par exemple), l’atome peut ensuite relaxer en comblant ce trou
par un électron provenant d’une autre couche plus externe (L1 par exemple). L’énergie
E K − E L1 peut être libérée par l’atome sous forme de photon X (fluorescence X) ou transférée
à un électron de même niveau ou d’un niveau plus externe de l’atome (émission Auger).
Figure I.1 : Présentation schématique de l’effet Auger. (1) : électron primaire, (2) : électron éjecté, (3) : photon
X d’énergie hν = E K − E L , (4) : électron Auger d’énergie cinétique E c = E K − E L − E ∗L − eΦ .
1
1
23
Ainsi, la transition Auger décrite dans la figure I.1 est notée KL1L23 et l’énergie
cinétique de l’électron Auger est :
(1.1)
E c = E K − E L1 − E ∗L23 − eΦ
-7-
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
∗
E K et E L 1 sont les énergies de liaison des niveaux énergétiques de l’atome, tandis que E L 23
(différente de E L 23 ) représente l’énergie de liaison en présence du trou dans la couche L1. eΦ
est le potentiel de sortie de l’électron. Ainsi, chaque élément de la classification possède une
série de transitions Auger qui lui est propre. L’analyse des différentes énergies de transition
conduit à l’identification de cet élément.
La spectroscopie Auger étant une technique d’analyse très sensible à la surface, elle
nécessite l’utilisation d’un équipement ultra-vide pour limiter la contamination à partir des
gaz résiduels. L’échantillon est bombardé par un faisceau d’électrons d’énergie primaire Ep.
L’analyse des électrons Auger produits par la cible se fait par un analyseur de type CMA
(Analyseur à Miroirs Cylindriques). Les électrons collectés sont focalisés sur la fenêtre
d’entrée d’un multiplicateur d’électrons. Le courant I(E) mesuré à la sortie du CMA est
proportionnel au nombre d’électrons N(E) ayant l’énergie E. L’analyse du spectre en énergie
des électrons émis par la cible se fait en variant la tension de balayage.
Lors de la condensation d’atomes sur une surface, on peut déterminer le mode de
croissance grâce aux courbes donnant l’évolution de l’intensité des signaux Auger des
différents éléments au cours du temps. Néanmoins, il est difficile de trancher entre ces modes
lors des premiers stades de la croissance. En outre, l’AES ne peut pas distinguer entre des
atomes en insertion et des atomes en adatomes. La référence [9] traite avec plus de détails le
sujet de la croissance.
Figure I.2 : Modes de croissance.
On distingue quatre modes de croissance (voir figure I.2) :
- Frank-van der Merwe [10] : c’est une croissance couche par couche. Théoriquement chaque
couche est remplie avant la formation de la couche suivante. Les signaux Auger du substrat et
de l’adsorbat présentent une succession de segments de droite dont les cassures signent le
remplissage de chaque monocouche. L’enveloppe de ces segments de droite est exponentielle.
- Stranski-Krastanov [11] : ce mode de croissance correspond à la formation d’une couche
complète suivie de la croissance de cristallites "3D". L’évolution des signaux Auger présente
une cassure suivie d’une variation beaucoup plus lente.
- Volmer-Weber [12] : dans ce cas, il y a formation directe de cristallites "3D" sur le substrat
nu. Les variations des signaux Auger sont continues, on n’observe pas de cassure.
- Composé de surface [13] : dans ce mode, les courbes présentent des cassures plus au moins
nettes, suivies de paliers où les intensités Auger des deux éléments n’évoluent presque plus.
-8-
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
La persistance d’atomes du substrat non recouverts fait que le signal Auger de ce dernier
n’atteint jamais une valeur nulle.
I.1.2 - Diffraction d’électrons lents (LEED)
Cette technique permet de déterminer la structure de surface d’échantillons
monocristallins, grâce à une visualisation directe du diagramme de diffraction sur un écran
fluorescent. Elle est basée sur l’analyse de la distribution spatiale de l’intensité des électrons
rétrodiffusés élastiquement par un cristal soumis à un bombardement d’électrons
monocinétiques de faible énergie (10 eV < Ep < 300 eV) (voir figure I.3) [14].
L’angle d’incidence avec la surface des électrons, qui peut être quelconque, est
généralement nul (perpendiculaire à la surface) : le réseau réciproque d’un plan est "vu de
dessus".
Figure I.3 : Dispositif du LEED.
Lors d’un dépôt, les atomes adsorbés peuvent s’ordonner selon la même structure ou
selon une structure multiple de celle de la face propre d’un cristal (surstructure). Il apparaît
dans ce dernier cas sur le diagramme de diffraction des taches supplémentaires représentatives
du réseau réciproque.
Une méthode couramment utilisée pour nommer les structures de surface a été
proposée par Wood [14]. La notation de Wood ne peut être utilisée que si les angles entre les
vecteurs de la surstructure et ceux du substrat sont égaux. Dans ces rconditions
r la structure de
r
r
0
0
surface sera notée : p(u × v) Rφ ou c( u × v)Rφ avec a' = u a et b' = v b (u et v entiers) ;
p : primitive et c : centré. Rφ0 désigne une rotation d’angle φ0 du réseau de la surstructure par
rapport au réseau de substrat.
I.1.3 - Rétrodiffusion élastique d’ions-Rutherford Backscattering : RBS
La spectrométrie RBS [15] est une méthode d’analyse nucléaire des premiers
micromètres d’un solide. Le faisceau primaire est constitué d’ions légers (H+, He+)
monocinétiques, accélérés sous une tension de 0,5 à 3 MV. Une faible fraction de ces ions est
rétrodiffusée par la barrière coulombienne des noyaux des atomes de l’échantillon. La
méthode est basée sur le comptage et l’analyse en énergie des ions rétrodiffusés après leur
interaction avec les atomes de l’échantillon à analyser. Elle est particulièrement bien adaptée
à l’analyse d’éléments lourds dans une matrice d’éléments légers. L’énergie des ions
rétrodiffusés est une signature de la masse de l’atome diffuseur que l’on peut déterminer à
partir de la cinématique des collisions élastiques. Le nombre d’ions rétrodiffusés à une
-9-
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
certaine énergie permet de déterminer de façon absolue avec une bonne précision (quelques
%) le nombre d’atomes par unité de surface de chaque élément présent dans l’échantillon. La
connaissance de la section efficace de rétrodiffusion par un potentiel coulombien (loi de
Rutherford) conduit à une analyse quantitative de la composition chimique de l’échantillon.
I.1.4 - Microscopie à effet tunnel (STM)
La microscopie par effet tunnel, introduite par G. Binnig et H. Rohrer en 1982, est
devenue l’une des plus puissantes techniques d’analyse des surfaces à l’échelle atomique [16].
Le principe du STM est très simple : il est basé sur le phénomène quantique de l’effet tunnel.
On approche une fine pointe métallique à quelques distances atomiques (5-10 Å) de la surface
à étudier, afin de permettre un léger recouvrement des fonctions d’onde des états
électroniques de la pointe-sonde et de la surface. Les électrons attirés par une différence de
tension transitent par effet tunnel entre la pointe et la surface analysée (voir figure I.4). Selon
le signe de la tension qu’on applique, les électrons passent de la pointe à la surface ou
inversement. Cette technique est utilisée pour imager des surfaces conductrices ou semiconductrices.
Figure I.4 : Présentation schématique du microscope à effet tunnel
Il existe essentiellement deux modes de fonctionnement d’un STM. Le premier est le
mode à courant constant : la position de la pointe est ajustée en permanence de manière à ce
que l’intensité du courant tunnel soit constante. On obtient une image topographique de la
surface en portant les variations verticales en z de la pointe en fonction de ses positions
latérales x et y. Le second mode est dit à hauteur constante : la pointe balaye la surface de
manière à ce que z reste constant. Une image de la surface étudiée est obtenue en portant cette
fois les variations du courant tunnel I en fonction des positions latérales de la pointe. Ce mode
est rarement utilisé car il nécessite des surfaces larges et surtout très planes. On peut aussi
faire de la spectroscopie à effet tunnel (STS). Dans ce cas on se met à une position fixe en
(x,y,z) et on enregistre le courant tunnel I en fonction de la tension appliquée V. Le courant
tunnel est fonction de la densité électronique locale qui dépend aussi de la géométrie réelle de
la surface. Le maximum de la densité électronique ne coïncide pas toujours avec les positions
atomiques. Ces deux contributions peuvent dans certains cas être séparées en appliquant des
tensions de signe inverse. D’autres techniques, basées sur des interactions de forces pour
imager des structures de surface, telles que la microscopie à force atomique (AFM) et la
microscopie à force magnétique (MFM), ont été développées à partir de l’idée de Binnig et
- 10 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
Rohrer : la microscopie à force atomique (AFM), qui repose sur la faible interaction de la
force de van der Waals entre la pointe et la surface, est bien adaptée à l’étude des surfaces
isolantes. La microscopie à force magnétique (MFM), quant à elle, utilise la force magnétique
entre une pointe magnétique et la surface.
I.1.5 - Diffraction de rayons X sous incidence rasante (SXRD)
I.1.5.1 - Principe de la diffraction X sous incidence rasante [17-21]
Il est connu que les surfaces des matériaux présentent le plus souvent un arrangement
atomique différent de celui du volume : la symétrie est abaissée et on observe des mailles
multiples notées "mxn" par référence à la maille "1x1" dérivée de la structure de volume. Le
diagramme de diffraction correspondant comporte des taches de surstructures d’indices
fractionnaires notés h/m, k/n, l, dont le traitement par des méthodes cristallographiques
classiques permet de déduire le contenu atomique de la maille de surface.
La technique de diffraction de rayons X rasants permet :
® l’identification sans ambiguïté des espèces chimiques,
® des mesures quantitatives des distances parallèles et normales à la surface,
® la mise en évidence de déplacements dans les couches sous-jacentes,
® d’établir la relation translationnelle entre la couche de surface (reconstruite ou
adsorbée) et le substrat.
Elle est donc capable de déterminer l’ordre chimique et les positions atomiques, non
seulement dans les surfaces mais aussi à leur voisinage (couches enterrées). En cela, elle
apporte des informations inaccessibles au STM. En contrepartie, la méthode nécessite des
zones ordonnées sur des longueurs de cohérence de plusieurs dizaines d’angströms, et son
interprétation est complexe dans le cas de surfaces à domaines multiples.
Cette technique est différente de son analogue volumique par le fait que seules les
couches proches de la surface contribuent à l’intensité diffractée. Ceci oblige à utiliser la
radiation synchrotron (plus intense que la radiation des sources de rayons X de laboratoire)
dans le but de mener l’expérience dans un temps acceptable et d’avoir des intensités
décelables. Elle est de plus en plus largement utilisée dans des domaines aussi divers que
l’étude de l’état de surface de métaux, d’oxydes ou de semi-conducteurs, de la structure de
films minces déposés sur un substrat, ...
d’une surface, il est d’usage
d’orienter l’espace sur une base de vecteurs
r r
r r rEn présence
r
i , j , k où k est normal à la surface et i , j décrivent la périodicité du réseau dans le plan de
(
)
( )
surface. L’analyse des phénomènes de diffraction repose sur la connaissance du réseau
réciproque et la dualité réseau direct - réseau réciproque. La figure I.5 montre une vue
schématique de la géométrierde diffraction dans la technique d’incidence rasante. Le faisceau
incident de vecteur d’onde kin fait un rangle αi (0,2° < αi < 1°) avec le plan de surface. Le
faisceau diffracté, de vecteur d’onde kout , est détecté juste au-dessus du plan de surface.
L’angle de diffusion 2θ est défini comme étant l’angle entre les projections dans le plan de
r
q
surface
des
faisceaux
incident
et
détecté.
Dans
cette
géométrie
le
vecteur
d’onde
r
r r
( q = k out − kin ) se trouve proche du plan de surface de sorte que la technique est
principalement sensible à la structure projetée dans le plan.
- 11 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
r
r
Figure I.5 : Diffraction des RX dans la géométrie d’incidence rasante. kin et kout sont respectivement les
vecteurs d’ondes des faisceaurx entrant et sortant. αi est l’angle d’incidence et 2θ l’angle de diffusion dans le
plan. Le vecteur de diffusion q reste proche du plan de surface.
I.1.5.2 - Tiges de troncature
Le calcul de l’intensité diffractée par une surface, d’abord parfaite, puis reconstruite ou
présentant des défauts (atomiques, chimiques), est détaillé dans l’annexe A. Nous ne
retiendrons ici que l’essentiel de l’effet de la surface sur le spectre de diffraction, à savoir
l’apparition de tiges de troncature entre les réflexions de volume, induites par la coupure du
cristal infini.
I (0,k,l)
k
y(hk2)
y(hk1)
y(hk0)
k=1
k=2
k=0
100
10
h
1
l
0,1
0
0,5
(a)
1
1,5
2
2,5
3
(b)
Figue I.6 : (a) Représentation dans l’espace réciproque des nœuds (hk) correspondant aux trois premiers plans
d’une structure hexagonale cfc(111) (l = 0, 1, 2), (b) : tiges de troncature (0kl) avec l = 0, 1 ,2.
Ainsi, en présence d’urne surface considérée comme parfaite terminaison du volume, un
rayon X de vecteur d’onde Q défini par ses composantes (h,k,l) dans le réseau réciproque est
diffracté avec l’intensité (cf. Annexe A) :
r
r 2
I 0 (Q) = A 0 (Q)
(1.2)
r
r
r sin(πhNx ) sin(πkNy )
(1.3)
A 0 (Q) = F(Q)
.
Fctr (Q)
sin(πk)
sin(πh)
Le premier terme est le facteur de structure usuel qui s’obtient à partir de la densité
électronique ρ(r) relative à une maille selon :
n0
r r
r
r iQr .rr 3 r
−2Q 2 u 2
−2Q2 u 2i 0
iQ . R i
ρ(r ) e d r = ∑ fi0 e 0 e
.
(1.4)
F(Q) = ∫∫∫ e
i0 =1
où le terme e
−2Q 2 u 2
est le facteur de Debye-Waller mettant en jeu l’amplitude de vibration
- 12 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
thermique <u2>, et la somme sur i0 porte sur unre maille élémentaire. La présence de la surface
se manifeste par la fonction de troncature Fctr (Q) :
r
ie −iπl
(1.5)
Fctr (Q) =
2sin(πl)
Cette influence de la surface est illustrée sur la figure I.6 dans le cas d’une surface (111) d’un
réseau cfc, en l’absence de toute reconstruction ou relaxation.
De façon plus générale, si le réarrangement des atomes des couches supérieures vers
une configuration d’équilibre qui dépend de l’environnement chimique de la surface conduit à
une nouvelle périodicité (nxm), l’expression de A0(Q) est modifiée par un terme perturbatif
(voir annexe A) qui introduit essentiellement deux types de modification :
→ une modulation des tiges de troncature
→ de nouvelles taches de surstructure aux nœuds (h/n, k/m).
Des exemples de l’effet d’une relaxation, d’une faute d’empilement ou d’un ordre superficiel
chimique, sont donnés dans l’annexe A. Pour résumer les choses, deux contributions (volume,
surface) existent, mais l’amplitude de la première n’est différente de zéro que si h et k sont
entiers et l quelconque. Il n’y a donc pas de contribution du volume aux raies fractionnaires,
de sorte que ces deux contributions n’existent simultanément que sur les raies dites entières,
i.e. avec h et k entiers. Ainsi, seuls les atomes impliqués dans une reconstruction participent à
l’intensité des raies fractionnaires, les raies entières contenant elles la contribution
supplémentaire des atomes du volume ; dans ce dernier cas, seules les positions (h, k, l) qui ne
correspondent pas à des réflexions autorisées en volume permettront l’évaluation de la
contribution de surface, et seront d’une grande utilité pour positionner la surstructure par
rapport au volume.
I.1.5.3 - Protocole de l’analyse d’une expérience de diffraction de surface
® carte de Patterson
A priori, l’arrangement atomique de la maille reconstruite de surface est inconnu. Or, si
les atomes impliqués dans la reconstruction participent seuls à l’intensité diffractée des raies
fractionnaires, leur contribution à l’intensité des raies entières n’est pas séparable de celle des
atomes du volume. Dans un premier temps, nous ne traitons que les raies d’ordre
r 2
r
fractionnaire. Il est nécessaire de mesurer le maximum d’intensités F(Q) où Q est dans le
plan de surface.
Utilisant les seules réflexions fractionnaires, on fait alors une cartographie des valeurs
prises par la fonction de Patterson, définie comme le produit d’auto-corrélation de la densité
électronique, ou de façon équivalente comme la transformée de Fourier des intensités
diffractées :
r 2 −iQr .ru
r
r r
r
r
Q
e
(1.6)
F
P( u) = ∫∫∫ ρ(u + r ) ρ(r ) d 3 r = ∑
r
Q
()
r
r
r
r r r
r
Ainsi P( u ) n’est non nulle que si u est un vecteur interatomique : u = ri − rj où ri et rj
r
définissent les positions des atomes i et j. En introduisant les coordonnées x, y, z du vecteur u
suivant les vecteurs de base du réseau de Bravais, il vient :
2
(1.7)
P(x, y,z) = ∑ F(h, k,l ) e −2iπ (hx+ ky+ lz)
h,k,l ,entiers
Dans le cas particulier d’une maille reconstruite (nxm), la diffraction se produit suivant un
réseau bidimensionnel de "raies" perpendiculaires au plan de la surface. L’étude sur l n’étant
pas possible, nous construirons la fonction de Patterson associée aux vecteurs interatomiques
projetés dans le plan de surface :
- 13 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
P S(xS ,yS ) =
∑
h S ,k S ,entiers
F(hS ,k S ) e
(
2 −2iπ h S x S +k S y S
)
(1.8)
r
r
où (xS, yS) et (hS, kS), sont les composantes de u et Q suivant les vecteurs unitaires de la
nouvelle maille de surface dans l’espace direct et dans l’espace réciproque respectivement.
La carte de Patterson sera établie à partir des seules mesures sur les ordres
fractionnaires, afin de construire un premier modèle de surstructure. Cette carte fournit les
vecteurs interatomiques spécifiques à la maille reconstruite nxm, à partir desquels est proposé
un premier modèle. Une telle analyse est imparfaite, puisque la maille nxm diffracte aussi en
des positions (hk) avec h,k entiers : l’omission de ces réflexions peut donc engendrer des
distorsions dans la carte de Patterson.
® ajustement des tiges
Le modèle de maille reconstruite positionné par rapport au volume permet le calcul des
2
F(h, k) , qui sont ensuite confrontés aux valeurs expérimentales dans un affinement par
moindres carrés. Rappelons que seules les réflexions entières sont sensibles à la relation
translationnelle entre mailles de surface et de volume. Une détermination précise des
coordonnées normales des atomes nécessiterait la connaissance des Fhkl, donc
l’enregistrement de l’intensité le long des raies.
® largeur de pic et mosaïcité
Lorsque des domaines de taille caractéristique existent (îlots, précipités), on peut tirer
des informations supplémentaires des largeurs des pics dans le plan. En particulier, on peut
ainsi obtenir la taille (D) des domaines, ainsi que la mosaïcité ω qui rend compte de la qualité
cristallographique des amas, qui tous deux affectent la largeur des balayages dans l’espace
réciproque. La taille des domaines est liée à une taille caractéristique dans l’espace direct. Un
élargissement ∆q=2π/D est obtenu dans l’espace réciproque. La mosaïcité est une dispersion
angulaire constante et indépendante de q. Si l’on a accès à deux pics caractéristiques dans le
plan, de vecteurs q1 = A2 h 21 + B2 k 21 , q 2 = A2 h 22 + B2 k 22 (A,B, vecteurs du réseau
réciproque), correspondant à deux angles w1 et w2, la largeur de pic et la mosaïcité s’écrivent :
w2 −w2
q12 w12 − q22 w 22
∆q 2 = 11 12 ,
ω=
(1.9)
q12 − q22
−
q12 q 22
d’où l’on tire la taille des domaines :
π
D =2
(1.10)
∆q
I.2 - Applications
I.2.1 - Sb/Cu (111)
Parmi les systèmes binaires présentant une forte ségrégation, Cu-Sb est particulièrement
intéressant en raison de sa forte tendance à former des composés ordonnés. Ce système a déjà
fait l’objet de la thèse d’H. Giordano [22] du point de vue de la ségrégation à partir de
solutions solides diluées Cu(Sb) (111) (contenant 0,45% d’atomes de Sb) et de la dissolution
de couches d’antimoine déposées puis recuites (dépôt mince, épais). Les résultats obtenus
alors par LEED, AES, RBS, ont été ensuite complétés par STM et PES (photoémission).
I.2.1.1 - Résultats antérieurs : LEED, AES, RBS, STM, PES
Cette étude a montré que l’antimoine ségrège fortement sur la face (111) du cuivre pour
former un composé superficiel. De plus, ces deux types de cinétique, dissolution et
ségrégation, conduisent à un même état tant du point de vue de la composition chimique de la
- 14 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
surface que du point de vue de sa structure. La cinétique de dissolution à 673 K, représentée
sur la figure I.7, laisse apparaître une dissolution rapide lors des tout premiers instants suivie
d’un brusque ralentissement se traduisant par un palier mettant en évidence un blocage de la
dissolution sur un alliage de surface [23,24], présentant une surstructure du type
p( 3 × 3 )R30° , de composition Cu2Sb. Toutefois, il est difficile de savoir si dans ce
Rapport dÕintensit
Auger pic ˆ pic : I(Sb)/I(Cu
composé les atomes d’antimoine occupent des positions d’adsorbat ou sont incorporés dans la
surface du cuivre.
0.8
p(Ã3xÃ3)R30¡
0.6
0.4
p(Ã3xÃ3)R30¡
0.2
0.0
0
500
1000
Temps (s)
1500
Figure I.7 : Cinétiques expérimentales enregistrées par AES à 673 K de la dissolution d’une MC de Sb déposée
à température ambiante („), et de la ségrégation de Sb à partir d’une solution solide Cu(Sb)(111) (x) [25].
Ce travail a été prolongé par une étude en photoémission de l’évolution des niveaux de
cœur 4d de l’antimoine au cours du dépôt d’une monocouche de Sb sur Cu(111), puis du
recuit qui conduit à la surstructure ( 3 × 3)R30° et enfin lors du recuit de ségrégation de la
solution solide Cu(Sb)-(111) à 0,45 at% [26]. L’analyse a montré qu’il existe au cours du
dépôt deux états chimiques très différents : l’un a été associé à du Sb en interaction avec le Cu
et l’autre à du Sb non en contact avec le Cu. La dissolution se traduit par la disparition du seul
pic correspondant à du Sb non lié au Cu. Les spectres caractéristiques de la surstructure
( 3 × 3)R30° obtenue soit après dissolution soit après ségrégation sont très semblables si ce
n’est une faible contribution de Sb dissout près de la surface. La position des pics est
caractéristique de Sb présent dans le composé intermétallique Cu2Sb.
La dernière étude, effectuée par STM, de la surstructure ( 3 × 3)R30° obtenue après
une cinétique de ségrégation suggère, si on assimile les modulations de structure électronique
aux corrugations atomiques, que les atomes de Sb occupent dans le plan (111) des sites en
substitution entourés par six atomes de Cu, parmi lesquels trois sont déplacés par rapport à
leurs positions de réseau, ce qui est illustré dans la figure I.8. Ce déplacement rompt la
symétrie de surface hexagonale. Une question se pose alors : obtient-on la même structure
après ségrégation et dissolution ? Il semble que la réponse ne soit pas si claire d’après les
expériences PES évoquées plus haut. Le but de l’étude SXRD effectuée ici est de déterminer
la structure atomique de la reconstruction p( 3 × 3 )R30° obtenue à partir de la dissolution
d’1 MC d’antimoine sur Cu(111).
- 15 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
Figure I.8 : Vue en trois dimensions d’une image STM (1,7x1,5 nm2) du plan de surface (111) obtenue après
ségrégation de surface de l’antimoine à partir d’une solution solide de Cu-0,45 at% Sb [27]. Elle montre un atome
d’antimoine entouré de six atomes de cuivre (I = 12 nA et V = -0,7 mV) (reconstruction : (√3x√3)R30°) et un
abaissement de la symétrie. L’étoile indiquée, centrée sur un atome de Sb, se compose de deux triangles associés
respectivement aux deux types d’atomes de Cu inéquivalents.
I.2.1.2 - Résultats originaux obtenus en SXRD [28]
Le système, obtenu après dissolution d’un film d’antimoine sur du cuivre (111), est
donc assez bien connu : surstructure p( 3 × 3 )R30° , composition Cu2Sb. Toutefois la DEL
classique (sans étude dynamique) ne peut fournir que la maille p( 3 × 3 )R30° , son motif
restant à déterminer.
1.2.1.2.1 - Expérience
 préparation de l’échantillon et conditions expérimentales
Les expériences ont été réalisées sur la ligne BW2 au laboratoire synchrotron de
Hambourg (HASYLAB). Une monocouche d’antimoine a tout d’abord été déposée sur
Cu(111) dans une chambre de préparation UHV. L’échantillon a ensuite été chauffé à 673 K.
La reconstruction p( 3 × 3 )R30° a été observée par DEL. L’échantillon a alors été transféré
dans une petite chambre UHV portable [29] et transporté jusqu’au diffractomètre à rayons X.
Les expériences de rayons X de surface ont été réalisées sur l’échantillon gardé dans la petite
chambre avec une fenêtre hémisphérique en béryllium.
Une fois installée sur le diffractomètre à rayons X, la surface de l’échantillon était
verticale. La largeur du faisceau de 0,5x1 mm2 était limitée par des fentes placées avant
l’échantillon. Les fentes positionnées avant le détecteur déterminent sa résolution : la
résolution verticale (dans le plan) est de 6 mm, tandis que celle horizontale (hors plan) est
respectivement de 8 et 3 mm pour les réflexions dans le plan et les profils de tiges.
Les rayons X sont monochromatiques de longueur d’onde 1,42 Å. Les réflexions dans le
plan ont été mesurées avec les angles d’incidence et de réfraction égaux à 0,4°, légèrement
plus grands que l’angle critique de réflexion totale.
 données expérimentales
Le volume de cuivre cristallise enrun réseau cubique cfc. La structure de
l’échantillon
r
r r
r r
est ici décrite en utilisant une base a , b, c choisie de telle manière que a , b et c soient
r
r
a
et
b
faisant un angle de 120°.
respectivement parallèles
et
normal
au
plan
de
surface
(111),
rr r
Les vecteurs de base a , b, c sont reliés à la base cfc de la façon suivante :
r 1
r 1
r
r r
r
a = [101 ]cub , b = [01 1]cub , c = [111]cub ;
a = b =2,556 Å, c =6,261 Å.
2
2
(
)
( )
- 16 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
Ainsi, pour une réflexion (h,k,l), h et k représentent le vecteur quantité de mouvement
dans le plan, et l sa composante normale à la surface. La reconstruction p( 3 × 3 )R30°
donne lieu à des réflexions d’ordre fractionnaire avec les indices de Miller h et k multiples de
1/3. Deux types de mesures ont été effectués. Tout d’abord, 25 réflexions dans le plan ont été
mesurées. La symétrie six a été observée pour les réflexions d’ordre fractionnaire, parmi
lesquelles quatre étaient inéquivalentes. Pour chaque réflexion, on effectue une rotation ω de
l’échantillon autour d’un axe vertical perpendiculaire au faisceau incident : le spectre du
signal enregistré en fonction de l’angle de rotation de l’échantillon est communément appelé
"rocking curve". L’incertitude (10%) a été estimée à partir de la reproductibilité entre les
intensités de réflexions symétriquement équivalentes. Les figures I.9 et I.10 représentent ces
données expérimentales obtenues dans le plan. Ensuite, 11 tiges ont été analysées pour
lesquelles l’indice de Miller l varie de 0 à 3, chaque point sur une tige résultant de l’intensité
intégrée d’une "rocking curve". Notons que les spectres expérimentaux ont été corrigés d’un
facteur de Lorentz (résultant de la relation entre les coordonnées de l’espace réciproque et les
coordonnées angulaires), d’un facteur décrivant l’état de polarisation de l’onde incidente et
d’un facteur géométrique tenant compte de la fraction du faisceau diffusé par la surface
(active) de l’échantillon éclairée, pour obtenir une série de facteurs de structure au carré. Les
profils de tiges correspondants sont illustrés sur la figure I.11.
‘ analyse Patterson
La fonction de Patterson (voir équation (1.8)) est calculée à partir des données
expérimentales dans le plan, la somme incluant toutes les réflexions inéquivalentes d’ordre
fractionnaire et leurs réflexions reliées par symétrie. Cette fonction donne les vecteurs
interatomiques dans le plan dans la maille élémentaire. La figure I.9 donne le graphe de la
fonction Patterson calculé à partir des données d’ordre fractionnaire et représenté dans la
maille p( 3 × 3 )R30° . Il n’apparaît qu’une seule distance dans le graphe, ce qui implique
que les atomes de Cu ne subissent pas de déplacement latéral significatif.
(a)
(b)
Figure I.9 : Cartes de Patterson dans la cellule p(√3x√3)R30 (a) à partir des données expérimentales d’ordre
fractionnaire et (b) théorique issue de la simulation à partir du meilleur modèle.
1.2.1.2.2 - Analyse par le programme "Rod"
 principes
2
Il faut comparer Fhkl calculé suivant l’équation (1.4) aux données expérimentales. Pour
cela, on simule les réflexions dans le plan et celles des tiges à partir des différents modèles de
structure. Les réflexions dans le plan avec la composante perpendiculaire du vecteur quantité
de mouvement nulle ou petite (l = 0,06) sont seulement sensibles à la maille élémentaire de
surface projetée. Les réflexions d’ordre fractionnaire dépendent des positions atomiques à
l’intérieur de la couche d’alliage reconstruite indépendamment de sa position par rapport au
réseau du substrat.
- 17 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
 modèles proposés
Différents modèles de maille élémentaire des surstructures ont été testés : Sb adsorbés
en sites ternaires, apicaux, Sb incorporés sur deux couches et un plan mixte Cu2Sb avec
incorporation des atomes Sb. Ces différents modèles sont illustrés dans le dernier chapitre
(voir figure IV.1), où leurs énergies respectives sont calculées. La première question concerne
la position des atomes de Sb. On suppose que l’adsorption des molécules Sb4 est dissociative
[30]. Après le dépôt, durant le traitement thermique à 673 K, les atomes de Sb pourraient soit
rester au-dessus de la surface de cuivre en tant qu’adatomes, soit se substituer aux atomes de
la couche de surface de Cu. Bien que l’élévation des atomes de Sb ne soit pas accessible par
les réflexions dans le plan, les différentes structures conduisent à des positions latérales
différentes donc mesurables. Deux modèles d’adatomes ont été testés avec des atomes
d’antimoine se trouvant soit en positions ternaires soit en positions apicales, occupant un tiers
de ces sites. Par ailleurs, dans le cas de la substitution, un alliage de composition Cu2Sb peut
s’étendre sur une ou plusieurs couches. Le modèle le plus simple est celui d’une couche de
surface avec un atome de Sb entouré de six atomes de Cu dans des positions de sites (voir les
coordonnées dans le tableau I.1). On a aussi étudié le modèle issu des images STM du plan de
surface (111) obtenu après ségrégation de surface de Sb à partir d’une solution solide de Cu à
0,45 at% de Sb [27]. Ce modèle repose sur des atomes de Sb en sites de substitution entourés
par six atomes de Cu, dont trois sont déplacés latéralement (+0,5 Å) par rapport à leur
position de réseau (voir figure I.8) ; les positions des atomes de la maille unité
p( 3 × 3 )R30° sont reportées dans le tableau I.1.
Sb
Cu
Cu
positions de sites
x
y
0,33
0,00
0,00
0,33
0,67
0,67
structure STM
x
y
0,33
0,00
0,00
0,33
0,73
0,80
Tableau I.1 : Coordonnées latérales (x,y) dans la cellule unité p(√3x√3)R30° des atomes de Sb et Cu lorsque
ceux-ci se trouvent en positions de sites ou lorsqu’ils sont déplacés comme suggérés par l’étude STM.
‘ résultats
structure dans le plan
® comparaison des courbes de Patterson : les courbes de Patterson ont été calculées à partir
des différents modèles proposés puis comparées à celle expérimentale (figure I.9). Il est
réellement impossible de choisir entre tous les modèles, excepté pour le cas du modèle STM
qui, comme on va le voir, donne aussi un très mauvais accord avec des intensités dans le plan
définitivement différentes de celles expérimentales (figure I.10b).
® réflexions dans le plan : les paramètres d’ajustement des réflexions dans le plan sont les
positions (x,y) de tous les atomes de la couche considérée et un facteur d’échelle. Les
réflexions dans le plan ne sont en effet pas sensibles à la coordonnée atomique z. Les
paramètres de Debye-Waller u2 Sb (0,6 Å2) et u2 Cu (0,5 Å2) sont fixés à leur valeur de
volume [31,32], et augmentés d’un facteur 1,5 dans la couche de surface [33]. La procédure
d’ajustement repose sur une minimisation du paramètre χ2, une valeur normalisée de χ2
proche de 1 correspondant à un bon accord.
Dans les modèles en adatomes et dans celui des atomes en substitution, les coordonnées
(x,y) sont initialement fixées aux positions de réseau. Le modèle substitutionnel tiré des
images STM est incapable de reproduire de manière satisfaisante les données expérimentales
dans le plan. Ce modèle est définitivement rejeté au vue de la valeur du χ2 égale à 12. Tous
- 18 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
les autres modèles considérés ci-dessus (modèles en adatomes, modèles non distordus
d’atomes en substitution) mènent à des réflexions dans le plan simulées en accord avec les
données expérimentales avec une valeur de χ2 inférieure à 1 (0,6 et 0,2 respectivement pour
les modèles en adatomes et en substitution).
(a)
(b)
Figure I.10 : Intensités mesurées (demi-cercles de droite) et calculées (demi-cercles de gauche) des réflexions
dans le plan d’ordre fractionnaire inéquivalentes représentées dans le réseau réciproque. Les lignes en trait
plein et en traits pointillés montrent respectivement les mailles du réseau réciproque 1x1 et élémentaire
p(√3x√3)R30. Les aires de ces cercles sont proportionnelles à l’intensité. Les intensités simulées sont
représentées dans le cas du meilleur modèle obtenue (a) et dans celui STM (b). Les intensités mesurées dans le
plan sont données avec une barre d’erreur de 10%.
structure hors-plan
La structure dans la direction perpendiculaire z est déterminée à partir des profils des
tiges. Partant de la structure dans le plan, les atomes ont alors la possibilité d’être déplacés
suivant la direction z. Les paramètres d’ajustement sont les déplacements z hors-plan, un
paramètre de rugosité β [34] et un facteur d’échelle. Dans l’ajustement considéré, le
paramètre β est fixé à 0 (i.e. pas de rugosité) car on a testé qu’une variation de β supérieure à
0,05 entraîne une détérioration de l’accord.
Les tiges d’ordre entier sont plus intenses que celles d’ordre fractionnaire. Ainsi
l’analyse se fait en deux étapes. Les tiges d’ordre fractionnaire sont tout d’abord considérées,
et donnent ainsi accès aux coordonnées z des atomes à l’intérieur même de la couche
reconstruite. La position de la couche d’alliage de surface par rapport au substrat de volume
sous-jacent est alors déterminée grâce aux tiges d’ordre entier. Une analyse des données est
faite avec les différents modèles décrits plus haut. Aucun des modèles en adatomes ne peut
décrire de manière satisfaisante les profils de tiges expérimentaux (χ2 = 2,8 pour les tiges
d’ordre fractionnaire).
couche de surface
deuxième couche
troisième couche
atomes
1(Sb)
2(Cu)
3(Cu)
4(Cu)
5(Cu)
6(Cu)
7(Cu)
8(Cu)
9(Cu)
∆z (Å)
+0,32±0,02
+0,03±0,01
+0,03±0,01
-0,05±0,01
-0,05±0,01
-0,05±0,01
-0,03±0,01
-0,03±0,01
-0,03±0,01
Tableau I.2 : Valeurs optimales des paramètres utilisés pour ajuster les profils de tiges expérimentaux. ∆z (Å)
est le déplacement des atomes perpendiculairement au plan de surface par rapport à leurs positions idéales de
volume. Le paramètre de rugosité β utilisé dans notre ajustement est pris égal à zéro (pas de rugosité).
- 19 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
Un accord satisfaisant (χ2 = 0,3 pour les tiges d’ordre fractionnaire) est obtenu avec le
modèle des atomes en substitution en gardant les atomes de Cu et de Sb à leurs positions (x,y)
de réseau (non déplacés latéralement). Dans le même temps, deux couches pures de Cu ont été
considérées sous la couche de surface Cu2Sb, dans lesquelles les atomes de Cu ont la liberté
de se déplacer dans la direction z. Comme on peut le voir dans le tableau I.2, le meilleur
accord (χ2 = 1,5 pour les tiges d’ordre entier) correspond à des positions presque inchangées
de ces atomes de Cu.
Nous avons aussi considéré une couche Cu2Sb d’épaisseur supérieure à une MC.
Lorsqu’on augmente l’épaisseur des couches d’alliage, les modulations apparaissent plus
accidentées et beaucoup plus nombreuses dans les profils de tiges simulés, en désaccord total
avec les données expérimentales. La couche d’alliage Cu2Sb est donc limitée à une seule
monocouche de surface.
Intensité (u.a.)
Figure I.11 : Profils de tiges des réflexions d’ordres entier et fractionnaire. Les courbes en trait plein
représentent le meilleur ajustement et traversent les points correspondant aux données expérimentales.
’ comparaison ségrégation/dissolution
Cette conclusion que les atomes de Sb déposés restent localisés à l’intérieur de la
dernière couche de substrat (111) dans des sites substitutionnels est en accord avec les études
expérimentales et théoriques d’un système présentant une surstructure p( 3 × 3 )R30°
similaire : Sb/Ag(111) [35-36]. La principale différence entre les systèmes Sb-Cu et Sb-Ag
est que les atomes de Sb ont presque la même taille que ceux d’Ag, tandis qu’ils sont
significativement plus gros que ceux de Cu. L’observation d’alliages de surface à deux
dimensions presque identiques dans les deux cas montre que les forces motrices pour leur
formation viennent de la tendance à l’ordre chimique, presque indépendamment de la
différence de taille entre les atomes de dépôt et ceux de substrat.
De plus, les études PES déjà citées ont montré de petites différences entre les couches
d’alliage de surface obtenues après la dissolution de Sb sur Cu ou après ségrégation de la
solution solide Cu(Sb). Rappelons que, dans le premier cas, les atomes Sb de sous-surface
font apparaître un pic PES non observé après ségrégation. L’interprétation basée sur la
présence d’atomes Sb de sous-surface après dissolution n’est pas validée par les données
- 20 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
SXRD, qui montrent des atomes Sb localisés seulement dans la couche de surface. L’origine
de cette petite différence entre dissolution et ségrégation, révélée par les expériences de
photoémission est probablement responsable de celle existant entre les surstructures
déterminées par SXRD et STM. Il faudrait donc, pour réconcilier les résultats STM et SXRD,
faire d’un côté l’étude SXRD de la reconstruction après ségrégation et de l’autre côté celle en
STM dans le cas de la dissolution.
“ faute d’empilement
Le protocole de préparation de l’échantillon semble aussi influer sur la composition de
la couche d’alliage. Ainsi, des expériences menées par Vries et al. sur ce même système et sur
Sb/Ag(111) [37] mettent en évidence des structures très similaires et une couche d’alliage en
surface contenant des atomes du substrat et de Sb, mais dans des sites hcp, donc avec à une
faute d’empilement. La détermination des structures de Sb/Cu(111) et Sb/Ag(111) a fait
l’objet d’autres études expérimentales par LEED [38] et MEIS [39,40], qui ont toutes conclu
que tandis que leur structure se compose d’une seule couche d’alliage respectivement Cu2Sb
et Ag2Sb, les atomes dans la couche d’alliage de surface occupent des sites hcp. De plus, des
calculs en théorie de la fonctionnelle de la densité ont eux aussi mis en évidence ces fautes
d’empilement dans les deux systèmes [41].
ln(I)
11
10
9
8
hcp
7
cfc
l
6
-3
-2
-1
0
1
2
3
Figure I.12 : Effet de la présence d’une faute d’empilement cfc-hcp : évolution en fonction de l du logarithme de
l’intensité I le long de la tige de troncature d’une surface (111) (structure cfc) dans les systèmes Sb/Cu (trait
plein) : pas de faute d’empilement, (…) : faute d’empilement cfc-hcp.
Nous avons donc testé l’influence que peut avoir une faute d’empilement sur les tiges de
troncature à l’aide d’un petit programme moins performant que "Rod" mais plus souple dans
son utilisation dont le protocole est détaillé dans l’annexe A. Nous avons ainsi pu étudier de
façon un peu générique les effets d’une relaxation verticale de la surface, de la chimie ou bien
de la présence d’une faute d’empilement sur le profil des tiges dans le cas du système Sb/Cu
(111). Nous pouvons voir sur la figure I.12 que la signature d’une faute d’empilement cfc/hcp
sur une tige de troncature est très caractéristique (elle module assez fortement le profil de la
tige) et ne va pas du tout dans le sens de ce que l’on observe pour Sb/Cu(111).
I.2.2 - Ag/Cu (111)
Dans ce système, les mesures expérimentales ont été effectuées avant ce travail de thèse.
Elles sont résumées ici. Comme pour le système CuSb, la monocouche d’Ag/Cu(111) peut
être obtenue soit par dépôt d’Ag sur Cu pur, soit par ségrégation à partir d’une solution solide
Cu(Ag). Les deux types d’expériences ont été effectuées [42].
- 21 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
I.2.2.1 - AES, LEED
La croissance d’Ag sur un substrat de Cu à température ambiante est du type couche par
couche [43]. Ce comportement est une conséquence de la très basse énergie de surface de
l’argent comparée à celle du cuivre, et de la faible énergie d’interface Ag/Cu [44]. Le LEED
montre pour Ag/Cu(111) une surstructure de surface p(9±1 x 9±1) [45].
Sur la face (111) à 723 K l’isotherme de ségrégation de Ag/Cu(111) a été calculée à
partir des cinétiques de ségrégation et de dissolution. Les isothermes présentent une partie
verticale caractéristique d’une transition de phase "2D" observable également par diffraction
d’électrons lents : p(1x1) → p(9x9). Pour des concentrations en surface supérieures à la demimonocouche, l’isotherme obtenue à partir de la cinétique de ségrégation s’écarte de celle
obtenue par dissolution [46], cette non réversibilité étant attribuée à la perte d’un moteur à la
ségrégation au cours de la cinétique [47]. La transition de phase observée expérimentalement
à 723 K sur la face (111) a été interprétée comme la première d’une série (infinie) de
transitions de couches de surface à l’approche de la limite de solubilité, révélant ainsi une
"prédémixtion" de surface analogue à la préfusion [47].
I.2.2.2 - STM
Expérimentalement, si Ag est déposé à 225 K, on observe une structure Moiré [48].
Cette structure Moiré peut être décrite comme une couche d’Ag hexagonale légèrement
distordue positionnée au dessus d’une couche de Cu, avec (n-1) atomes d’Ag pour n de Cu le
long des rangées denses, avec n = 9 ou 10. En revanche, si Ag est déposé à température
ambiante, on observe un réseau périodique 2D de boucles de dislocation triangulaires [49].
Les images STM (figure I.13) en résolution atomique montrent que la surface est formée d’un
réseau périodique de triangles avec respectivement au centre de chaque triangle un ou trois
atomes.
Figure I.13 : Image STM en résolution atomique de la surstructure Ag/Cu(111) (I = 0,63 nA et V = 0,8 mV)
[49]. A gauche vue d’ensemble (10x11 nm2) et à droite détail sur quatre motifs.
I.2.2.3 - SXRD [49]
Seules les premières mesures dans le plan ont été utilisées afin de déterminer la
structure de surface. La maille élémentaire de surface "moyenne" est trouvée
(9,43±0,02x9,43±0,02) fois plus grande que la maille unité de surface de Cu(111) (voir
figures I.14 et I.15). La figure I.14 qui suit donne une représentation dans le plan des taches
de diffraction expérimentalement mesurées.
- 22 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
0. 1
5
Intensit
0. 1
0
800
h=1
k=0
600
0. 0
0
0.95
Cu
400
h-scan
0.85
(cps)
Ag
h=0.894
k=0.106
0. 0
5
h=0.894
k=0.000
k-s
ca
n
Figure I.14 : La taille des cercles tracés est proportionnelle au logarithme de l’intensité intégrée des taches. Les
lignes continues représentent la maille 1x1 de surface du Cu. Les lignes discontinues montrent la disposition des
taches fractionnaires satellites dues à la reconstruction de surface.
1.00
200
1.05
0
14
(a)
16
18
20
22
ω (deg)
(b)
Figure I.15 : (a) : scans SXRD le long des principaux axes de symétrie h et k autour de la réflexion du substrat
de Cu (1,0), (b) : scans ω en SXRD des réflexions (1,0) du Cu et (0.894,0) d’Ag.
I.2.3 - Ni/Ag (100)
Le fait que l’énergie de surface du Ni (γNi = 1,9 J/m2) soit supérieure à celle de Ag (γAg
= 1,3 J/m2) [50] laisse supposer que le dépôt de Ni devrait être recouvert par des atomes d’Ag
remontant du substrat, du moins en supposant une petite énergie d’interface. C’est ce que
confirment les diverses expériences effectuées avant et pendant cette thèse et qui sont
détaillées ci-dessous.
I.2.3.1 - Etudes antérieures : AES, LEED, STM
Les expériences d’Auger indiquent sans ambiguïté qu’à des températures comprises
entre 450 K et 620 K, il y a dissolution rapide mais incomplète de Ni déposé sur Ag (cf figure
I.16), alors que le dépôt inverse reste stable aux mêmes températures [51,52]. Elles ne disent
rien toutefois sur la profondeur d’enfouissement de Ni, ni sur la forme adoptée par le dépôt
enterré. Des expériences de DEL quantitatif [53] ont complété cette étude en confirmant que
les atomes d’Ag migrent à la surface pour enterrer le dépôt. La croissance de Ni en soussurface n’apparaît pas comme une structure en couche, mais plutôt comme mettant en jeu des
îlots ou amas de sous-surface.
- 23 -
Signal de lÊÕintensit
Auger (u. a.)
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
500
Ag (356eV)
400
300
200
100
0
Ni (848eV)
Ni (61eV)
0
10
20
30
40
50
temps (102s)
Figure I.16 : „ Cinétiques expérimentales de dissolution enregistrées à 620 K d’une MC de Ni déposée à
température ambiante [52].
Enfin, Hite et al. [54] ont étudié la corrélation entre la morphologie de croissance et la
structure électronique du Ni sur Ag(100) à l’aide de la microscopie à effet tunnel (STM) (voir
figure I.17) et de la spectroscopie de photoémission (ARPES). Leur but était de déterminer les
effets de la contrainte sur la structure électronique. Ils ont pour cela suivi le dépôt de 1 MC de
Ni sur Ag(100). Les résultats STM montrent qu’à température ambiante le Ni est déposé sur
Ag(100) sous la forme d’amas d’extension latérale de ∼ 30 Å et de hauteur à peu près de 2-5
Å. Toutefois, quelques amas sont observés avec une hauteur de seulement ∼ 1 Å, indiquant la
ségrégation de sous-surface même à température ambiante. Après recuit à 420 K, la densité
d’aire de ces amas est réduite par un facteur 3 et la hauteur moyenne est abaissée d’un facteur
10 à ∼ 0,2-0,5 Å. Les îlots ont la forme de volcans, i.e. avec une dépression dans le milieu de
l’amas. Les auteurs, n’ayant pas eu la résolution atomique, n’ont pas eu accès à la structure
locale qui couvre les amas enterrés. De plus l’exposition de cette surface à de l’oxygène
n’entraîne pas la formation de NiO, ce qui implique que le Ni a ségrégé en sous-surface
formant des amas nanométriques de Ni recouverts d’une couche d’Ag.
La structure électronique du système recuit correspond à celle d’un système à 3
dimensions. Ceci est interprété comme résultant de l’hybridation d de Ni et sp de Ag et de
l’augmentation de la coordination.
(a)
(b)
Figure I.17 : Image STM de Ni/Ag (100), déposé à 300 K (a) puis recuit à 420 K (b). Les amas de Ni ont dans
(a) une largeur latérale de ~ 30 Å et des hauteurs entre 2 et 5 Å. La figure (b) montre la morphologie induite par
le nickel sous la surface : la hauteur des îlots est de ~ 0,5 Å. Chaque image est 500 Å x 500 Å.
- 24 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
I.2.3.2 - Etude actuelle : SXRD
Nous avons analysé quatre systèmes différents. Tout d’abord, un substrat (100) d’Ag
pur, sur lequel nous avons déposé une monocouche de Ni, que nous avons ensuite recuit 5 mn
à 620 K. Enfin, nous avons rajouté et recuit dans les mêmes conditions 3 couches de Ni sur
l’échantillon précédent.
Intensit
Intensité
Intensit
10 4
1000
(h00)
recuit
d p™t
d p™t
(00L)
Ag pur
dépôt
recuit
dépôt épais
(11L)
pais
1000
100
0,01
100
10
10
Recuit
Dépôt
3ML
Ag pur
1
h
4
L
5
0
1
2
(a)
3
4
0
1
2
(b)
Intensité
3
4
(c)
Intensit
Intensit
1000
Recuit
Dépôt épais
1
L
1
1000
recuit
dépôt épais
(200) Ni
(20L)
(202) Ni
0,1
dépôt épais
recuit
dépôt
Ag pur
(2.31, 0, 0) et (2.31, 0, 2.36)
100
0,01
10
100
(1.16,1.16,L)
1E-3
L
L
0
1
2
(d)
3
4
0
0,5
1
1,5
(e)
2
2,5
3
L
1
0
1
2
3
4
(f)
Figure I.18 : (a) balayages (h00) dans le plan, (b) tige (00L) intégrée, (c) tige (11L) intégrée, (d) scan en L
selon (11L) du Ni, (e) tige (20L) du Ni, (f) tige (20L) intégrée.
Lors du dépôt de la première monocouche, les balayages dans le plan qui sont
disponibles montrent très bien que le Ni déposé n’adopte pas la structure Ni(100) avec son
paramètre de maille volumique (figure I.18a). A partir de là, on peut en déduire que :
* soit le Ni est pseudomorphe à l’Ag à cause des interférences
* soit il adopte une autre structure qui n’apparaît pas dans les "scans" que l’on a faits
mais seuls certains atomes de Ni sont placés sur les colonnes atomiques d’Ag et produisent
les interférences. Les "scans" le long des tiges de Ni relaxés sont blancs, il n’y a donc pas de
Ni relaxé hors du plan (du moins pas en structure cfc (100)).
Par ailleurs la tige (00L) (figure I.18b) plonge beaucoup pour le dépôt de Ni. Cela
indique que le Ni apparaît certainement sous forme d’îlots car la surface est beaucoup plus
rugueuse avec le dépôt. Une autre explication possible est une forte rugosité chimique
(diffusion), ce qui semble peut crédible pour des métaux qui ne forment pas d’alliages.
Lors du recuit de la première monocouche, les tiges de l’Ag reprennent leur aspect
d’origine (figure I.18b,c,f). Cela semble exclure la présence d’îlots à la surface. Le Ni est
suffisamment parti dans l’Ag pour qu’aucune rugosité résiduelle ne persiste à la surface. Les
"scans" dans le plan (figure I.18a) montrent l’apparition des pics que l’on attend pour du
Ni(100) complètement relaxé. On voit aussi se développer des pics hors du plan qui sont des
pics de Bragg bien plus étroits que ce que l’on attend pour des films continus. Lors du recuit
de la monocouche, il apparaît une rugosité plutôt chimique (la tige est assez modulée). Les
atomes de Ni sur les sites d’Ag induisent une certaine rugosité, il y a création d’une certaine
épaisseur. Ni rentre dans la sous-surface. On a des amas dans la matrice et il n’y a plus de Ni
- 25 -
CHAPITRE 1 : EXPERIENCE
___________________________________________________________________________
au niveau de la surface. Il n’y a aucun doute : les atomes de Ni forment des îlots enterrés dans
l’Ag. En revanche il est difficile (voire impossible) d’en déduire la profondeur d’enterrement.
A partir des largeurs des pics dans le plan on peut tirer, par les équations (1.9-1.10),
d’une part la taille des domaines (très vraisemblablement le diamètre des amas), évaluée grâce
aux pics dans le plan ((200)Ni ou (2.31,0,0) (1,65°) et (400)Ni ou (4.63,0,0) (1,006°)), et
d’autre part la mosaïcité mesurant la qualité cristallographique des amas. On utilise pour cela
les valeurs suivantes. Pour les indices et largeurs (rad) des pics on prend : h1 = 2.31, k1 = 0,
π
π
w1 = 1,6553
et h2 = 4.63, k2 = 0, w2 = 1,0059
, et comme paramètres du réseau
180
180
réciproque : A = B = 1,538 Å-1. On trouve ainsi : D// ~ 67 Å et ω = 0,69 deg.
On peut utiliser la largeur des pics de Bragg hors du plan (par exemple la tige (11L)Ni)
pour obtenir de façon grossière l’épaisseur des amas. On trouve une largeur en L de 0,093 et
donc une épaisseur : D⊥ = 50 Å. Le rapport d’aspect vaut 1,3, ce qui est très proche de celui
des sphères.
Enfin, pour le recuit du dépôt épais de 4MC, on procède de la même façon que
précédemment. On obtient ainsi, à partir des tiges (2.31,0,0) et (2.31,-2.31,0), une taille de
domaine D// ~ 210 Å et une mosaïcité ∆ω = 1,38 deg. La taille hors du plan quant à elle est :
D⊥ = 30 Å. Le rapport d’aspect vaut 7 : ces îlots semblent donc se présenter sous la forme de
galettes bien plus aplaties que les précédentes.
- 26 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
II - MODELISATION
Dans ce chapitre nous allons développer les outils théoriques utilisés dans la suite de
ce travail. Nous donnerons tout d’abord quelques détails sur les potentiels interatomiques
utilisés, en mettant l’accent sur les problèmes posés par la difficulté à rendre compte de façon
cohérente des réarrangements atomiques et chimiques. Puis nous donnerons quelques
informations sur les méthodes de simulation numérique permettant de relaxer un système, que
ce soit à température nulle (Dynamique Moléculaire Trempée) ou à température finie (Monte
Carlo). Dans ce dernier cas, nous présenterons une méthode alternative pour rendre compte
des effets de température, via la contribution des phonons calculée par une méthode de
fraction continue.
II.1 - Potentiel
La plupart des systèmes étudiés étant constitués d’éléments des séries de transition, ils
sont caractérisés par une bande d étroite (électrons partiellement localisés dans le solide
autour de chaque atome) qui est bien décrite dans l’approximation des Liaisons Fortes
[55,56]. Les potentiels utilisés seront dérivés de cette approximation.
II.1.1 - Formalisme des Liaisons Fortes
L’approximation des Liaisons Fortes est basée sur le fait que chaque fonction d’onde
peut s’exprimer comme une combinaison linéaire d’orbitales atomiques (CLOA) notées iλ
où i est l’indice du site atomique (i = 1, …, N) et λ l’indice de dégénérescence de l’orbitale
(pour les électrons d, λ = 1, …, 10). Dans la base orthonormée des orbitales atomiques,
l’Hamiltonien de Liaisons Fortes s’écrit :
jµ
(2.1)
H = ∑ iλ ε iλ iλ + ∑ iλ β λµ
ij
i, λ
i, j≠i, λ,µ ≠ λ
où les sites atomiques i et j sont premiers voisins, ε iλ est l’énergie du niveau atomique de
l’atome i pour l’orbitale λ, et β λµ
ij , l’intégrale de transfert ou de saut, qui traduit la probabilité
de saut de l’électron entre l’orbitale λ au site i et celle µ au site j. Nous avons négligé ici
l’intégrale de dérive (champ cristallin). β λµ
ij , qui lève la dégénérescence des états atomiques,
dépend de la distance entre deux sites i et j et décroît très rapidement (après les 1ers ou 2nds
voisins pour les structures compactes).
L’avantage essentiel de la méthode est qu’elle permet de calculer les densités et les
énergies dans l’espace direct, sans avoir à diagonaliser l’hamiltonien (il s’agit dans le cas
d’une bande d dégénérée d’une matrice 5x5) et surtout sans avoir besoin du théorème de
Bloch, ce qui permet de traiter des solides non cristallins et des défauts (surface, systèmes
finis ...).
Les métaux de transition ont un grand nombre de propriétés physiques remarquables
qui proviennent de leur structure électronique particulière, faite d’une bande d’énergie "d"
étroite superposée à une bande "s" large (voir figure II.1). Les fonctions d’onde de type d sont
relativement bien localisées au voisinage du noyau atomique, contrairement à celles de type s
qui sont largement étendues.
- 27 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
n(ε)
bande nd
bande (n+1)s
ε
εF
Figure II.1 : Structure de bande schématique d’un métal de transition.
Un des principaux avantages de ce formalisme est de pouvoir définir, de manière simple, la
densité d’états locale (DEL) sur un site donné i0 [57] :
 Im

n i0 (E) = limη→0 + − ∑ io ,λ G(E + iη) i0 ,λ
(2.2)
 π λ

sans avoir recours à une quelconque condition périodique, à partir de la projection de la
fonction de Green G : G(z) = (z-H)-1. G(z) s’écrit sous la forme d’une fraction continue, dont
les coefficients s’obtiennent, soit à partir de la connaissance des p premiers moments µp de
n i0 (E) [58] :
+∞
µ p (i 0 ) = ∫ E p n i0 (E)dE = ∑ i 0 ,λ Hp i 0 ,λ
−∞
(2.3)
λ
obtenus en comptant tous les chemins de p sauts sur le réseau, soit directement en construisant
une nouvelle base qui tridiagonalise H et ce dans le cadre de la méthode de récursion [7]. La
fraction continue se termine alors par les valeurs asymptotiques des coefficients qui sont
reliées aux bords de bande et ajustées sur la structure de bande. n i 0 (E) sera connue d’autant
plus précisément que le nombre de coefficients exacts sera grand. Il est important de noter
que, pour les éléments de transition de fin de série, il est nécessaire de tenir compte des
électrons de valence s et p ainsi que de leur hybridation avec les électrons d pour obtenir une
densité d’états en accord avec celle dérivée des calculs ab-initio [59].
II.1.2 - Approximation du second moment (SMA) [60]
L’énergie de cohésion Ecoh est définie comme étant l’énergie (par atome) nécessaire à
0 K pour sublimer un solide volumique composé de N atomes en N atomes libres. Elle s’écrit
comme la somme de deux termes [61] :
EF
Q (r)Q j( r ′)
1
(2.4)
E coh = ∑ ∫ (E − ε λat )n λi (E)dE + ∑ ∫∫ drdr ′ i
2 i≠j
r − r′
i, λ −∞
EF
où ni(E) et Ni (=
∫ n (E)dE ) sont respectivement la densité locale et la charge électroniques
i
−∞
au site i et ε λat est l’énergie des atomes libres. Le premier terme (Eb) correspond à l’énergie de
bande (il provient de la délocalisation des électrons d de valence lors de la formation du
solide, ce qui élargit les niveaux atomiques en une bande d’énergie) et le second est un terme
d’interaction de paires (Er) entre les atomes neutres avec la densité de charge Qi(r) = Ziδ(r-i)Ni(r-i) où Zi est la charge ionique au site i. Malheureusement Er ne rend pas bien compte de la
partie répulsive de l’énergie, l’approximation des Liaisons Fortes ne reproduisant pas bien les
- 28 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
répulsions à courtes distances. Pour palier ce manque, l’idée est de construire un modèle
phénoménologique de Liaisons Fortes dans lequel la partie "terme de bande" est issue de la
structure électronique et a donc un caractère à N-corps tandis que la partie répulsive est un
potentiel de paires ajusté sur quelques propriétés physiques. L’énergie peut se ré-écrire de la
façon suivante :
E coh = E b + E r
(2.5)
¹ L’énergie de bande s’écrit donc (pour un choix adapté de l’origine des énergies
dans l’état atomique) :
EF
b
E =
∫ En(E)dE
(2.6)
−∞
Le comportement de Eb dépend peu des détails de la forme de n(E). L’approximation
au second moment consiste à caractériser la densité d’états en se limitant aux moments
d’ordre inférieur ou égal à 2. On peut donc choisir de remplacer n(E) par une densité d’états
rectangulaire s’étendant de -W/2 à W/2, ayant le même second moment, c’est à dire :
W /2
1
W2
2
µ2 =
E
dE
=
= ∑ β 2 = Zβ 2
(2.7)
∫
W −W / 2
12 voi sin s
où Z est le nombre de premiers voisins. Eb étant proportionnelle à µ 2 , elle est aussi
fonction, comme les intégrales de saut, de la distance interatomique et est proportionnelle à la
racine carrée du nombre de voisins. Elle ne peut donc pas se ramener à une simple somme
d’interactions de paires. Pour une décroissance exponentielle de l’intégrale de saut avec la
distance, l’énergie de bande au site i a donc la forme suivante :
b
i
E =− ξ
2
∑e
−2q (
r ij
r0
−1)
(2.8)
j
où rij est la distance entre les sites i et j, r0 la distance d’équilibre dans le volume entre atomes
premiers voisins et ξ l’intégrale de saut "effective" correspondant à la distance r0.
La présence de la racine carrée est garante de la bonne description des relaxations de
surface [62]. En effet les atomes de surface peuvent subir des réarrangements atomiques par
rapport à leurs positions de volume en raison des liaisons coupées. Dans tous les cas, il y a au
moins une relaxation verticale, qui expérimentalement, est dirigée vers l’intérieur (contraction
de la première distance interplan) pour les métaux de transition. Le potentiel SMA reproduit
bien la contraction de quelques pourcents de cette distance observée expérimentalement,
contrairement aux simples modèles de potentiel de paires qui prédisent une relaxation vers
l’extérieur. Dans certains cas, la maille de surface 2D change aussi (reconstruction). Là
encore, les Liaisons Fortes en général, et le potentiel SMA en particulier, donnent les bonnes
tendances expérimentales [63].
Il est important de noter que pour les métaux nobles, la bande d est pleine. Dans ce
cas, l’énergie de bande, E bi , s’annule de sorte que l’application de ce potentiel aux métaux
nobles semble erronée. Or on a constaté que cette formulation s’appliquait très bien à ces
métaux et donnait de très bons résultats. Il est possible de justifier cette généralisation du
SMA aux métaux nobles en supposant que l’énergie de bande ne dépend plus de la largeur de
la bande d mais est reliée au déplacement de la bande d, qui peut être supposé proportionnel à
la racine carrée du second moment [64]. Le terme de déplacement de bande ne devient
important devant celui d’élargissement que pour les métaux cfc de fin de série de transition et
naturellement pour les métaux nobles.
- 29 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
¹ L’énergie répulsive s’écrit sous forme d’une somme d’interactions de paires [65] :
E = A∑ e
r
i
− p(
r ij
r0
−1)
(2.9)
j
L’énergie au site i est donc :
Ei = A
∑e
− p(
rij
r0
−1)
− ξ
j,rij < rc
2
∑e
−2q(
rij
r0
−1)
(2.10)
j,rij <rc
où rc est le rayon de coupure. L’énergie dépend de la donnée des quatre paramètres A, ξ, p, q
déterminés de telle façon qu’ils reproduisent, le mieux possible, les valeurs expérimentales de
l’énergie de cohésion (Ecoh), du paramètre de réseau (a), du module de compressibilité (B) et
suivant les cas, des constantes élastiques (C44, C’) ou les variations en distance dictées par
l’équation universelle d’état [66]. Les interactions répulsives et les intégrales de saut
s’étendent jusqu’aux premiers voisins. Il est nécessaire de ne pas annuler "brutalement" les
interactions au delà du rayon dit de "coupure" rc, car cela créerait une discontinuité. Nous
utilisons ainsi un polynôme d’ordre cinq qui permet de raccorder l’énergie à zéro de manière
continue et deux fois dérivable.
II.1.3 - Modèle d’Ising Effectif (TBIM) [67]
Pour un système bimétallique AcB1-c l’hamiltonien (2.1) dépend de la configuration
K
chimique pi ( pKi =1 si le site i est occupé par un atome de type K (K=A,B) et pKi =0 sinon) :
{}
({ })= ∑ ∑ p
K
H pi
K i, λ
K
i
i, λ ε iλ i,λ + ∑
K
∑p
K L
i
j
K,L i, j≠i, λ,µ ≠ λ
( )
λµ
p i,λ β ij
KL
j,µ
(2.11)
A présent l’hamiltonien tient compte du "désordre chimique" par le biais de deux termes. Le
premier introduit un "désordre diagonal" via la variation du niveau atomique ε Kiλ en fonction
de l’élément A ou B, alors que le second rend compte d’un possible désordre non diagonal dû
à la différence des largeurs de bande ou des rayons atomiques entre les deux constituants
(c’est-à-dire la dépendance en K, L des intégrales de saut) qui est le plus souvent négligé :
K
K K
λµ
H {pi } = ∑ ∑ i,λ p i ε iλ i,λ + ∑ i,λ β ij j,µ
(2.12)
(
)
K
i, j≠i ,λ,µ ≠λ
i,λ
Introduire une surface est à présent plus compliqué car outre les relaxations atomiques
interviennent aussi les réarrangements chimiques. Malheureusement, tenir compte du désordre
diagonal nécessite d’aller au delà du second moment. En effet, pour être sensible à la
configuration chimique en terme de moments, il est nécessaire de tester la nature chimique
des deux atomes d’une paire i-j donnée, ce qui requiert un chemin de quatre sauts : deux sauts
"sur place" impliquant ε Kiλ , ε Liλ et un aller-retour d’un site à l’autre impliquant deux intégrales
µλ
de sauts : β λµ
ij β ji . L’approximation minimale est alors celle du quatrième moment, le
cinquième étant souvent nécessaire pour reproduire quantitativement la différence d’énergie
entre les diverses structures ordonnées dans les alliages de métaux de transition [58].
On développe alors un autre type d’approximation, qui est particulièrement bien
adapté à l’étude de l’effet d’ordre chimique sur un réseau rigide, le modèle d’Ising en
Liaisons Fortes (TBIM). En effet, on peut montrer que, même si le caractère à N-corps du
terme de bande dans les équations (2.6)-(2.8) ne permet pas de l’écrire comme une somme
d’interactions de paires, la partie de cette énergie qui ne dépend que de la configuration
chimique peut tout de même être développée sur réseau rigide sous la forme suivante [67] :
1
(2.13)
E tot {pKi } = E (c) + ∑ pKi h Ki + ∑ p Ki pLj VijKL
2 i ,j
i,K
(
)
K ,L
- 30 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
dans laquelle le premier terme, qui rend compte de la majeure partie de l’énergie, est l’énergie
d’un alliage désordonné qui ne dépend pas de la configuration, tandis que les second et
troisième termes, caractéristiques d’un modèle d’Ising, dépendent d’une manière simple de la
configuration, i.e. ce sont des fonctions linéaires et quadratiques de pKi . Nous pouvons
remarquer que le champ local h Ki dépend seulement de la nature géométrique du site i (il est
le même pour tous les sites équivalents), tandis que l’interaction effective de paires VijKL
dépend aussi de la distance entre les sites i et j.
Le résultat essentiel du TBIM est que, lors d’un changement de configuration
B) entre un atome occupant un site i du plan p (parallèle à la surface, la
chimique (échange A¥
surface étant indexée p = 0) et un autre occupant un site j du plan q, le bilan énergétique ne
met en jeu que les doubles différences :
∆h p,q = (hAp − h Aq )− (h Bp − hqB)
(2.14)
Vpq =
AB
VpqAA + VpqBB − 2Vpq
(2.15)
2
le premier terme n’étant non nul que si p ou bien q = 0, auquel cas il est numériquement
identique à la différence d’énergie de surface des éléments purs A et B [67] :
∆ h 0 = ∆h 0,q ≠0 ≅ γ A − γ B
(2.16)
Le second terme, limité aux premiers voisins (V), donne la tendance du système à s’ordonner
(V > 0) ou démixer (V < 0) en volume, et se trouve généralement renforcé (V0p ≈ 1,5-2 V) au
voisinage de la surface [67].
II.1.4 - Cohérence SMA-TBIM : couplage entre ordre chimique et ordre atomique
Chacun des deux modèles ci-dessus souffre de limitations. Le SMA ne peut être
étendu au cas des alliages, du moins de façon bien fondée, et le TBIM est restreint à un réseau
rigide. Le premier semble donc dévolu à l’étude des relaxations structurales dans les éléments
purs et le second à celle des phénomènes d’ordre dans des systèmes multicomposants sans
effet de taille. Or il est tout de même possible d’étendre le SMA au cas des alliages en tirant
partie des leçons du TBIM, ou de prendre en compte les effets de taille dans le TBIM par un
SMA spécifique.
­ SMA généralisé :
Le problème majeur du SMA est de prendre incorrectement en compte les effets
d’ordre chimique, que ce soit au niveau du terme de mélange (V) ou des différences
d’énergies de surface ∆h0 (puisqu’il sous-estime systématiquement ces dernières [60]).
Malgré les remarques précédentes quant au nombre de moments nécessaire à la description de
l’ordre chimique, on peut toutefois essayer d’étendre le SMA au cas d’un alliage en tirant
leçon des prescriptions issues du TBIM. L’énergie au site i s’écrit alors :
Ei =
∑A
j, rij < rc
KL e
− p KL (
rij
0
rKL
−1)
−
∑ξ
j, rij < rc
2
KL
e
−2q KL (
rij
0
rKL
−1)
(2.17)
K et L rendent compte de la nature chimique des atomes situés aux sites i et j distants de rij,
0
0
0
0
rKK
est la distance entre premiers voisins dans le métal pur K (K=L), rKL
= (rKK
+ rLL
) 2 si
K≠L. Afin que les interactions homoatomiques ne changent pas lorsque l’on passe du métal
pur à l’alliage, nous utilisons un polynôme d’ordre cinq qui permet de raccorder l’énergie à
zéro de manière continue et deux fois dérivable entre la distance entre seconds voisins du
0
0
> rBB
.
métal A et celle entre troisièmes voisins du métal B pour rAA
- 31 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
Afin de rendre compte au moins de la tendance à l’ordre du système (cf TBIM), les
paramètres croisés AKL, pKL sont obtenus à partir du calcul des énergies de dissolution d’une
impureté de A dans une matrice de B après relaxation du système (ce qui est essentiel, surtout
lorsqu’il y a une grande différence de taille entre les deux constituants) et vice versa ; pKL et
qKL sont pris comme moyennes arithmétiques des valeurs des métaux purs. Cela suffit en
général à reproduire la caractéristique essentielle du diagramme de phases, par exemple
l’existence d’une lacune de miscibilité, ou une température de transition ordre-désordre. Pour
ce qui est des énergies de surface, même si elles sont (habituellement) sous-estimées en SMA,
leur variation d’un élément à un autre est bien reproduite par exemple dans le cas de Ag et Cu,
ce qui est suffisant d’après le TBIM. Il faut toutefois avoir conscience que l’ajustement de
l’énergie de solution n’est qu’un pré requis minimal (limite diluée) qui ne rend pas forcément
compte d’effets de concentration. Il faut alors recalculer les interactions d’ordre V, soit en
rapprochant des impuretés, soit par d’autres méthodes, pour voir jusqu’où ordre et relaxation
se couplent. Ce point délicat sera étudié en détail dans le chapitre III.
­ TBIM généralisé :
Comme on l’a vu, le TBIM développé sur réseau rigide ne peut rendre compte
d’éventuels effets de relaxation de réseau dus à un fort désaccord de maille entre les
constituants. Il y a deux façons d’y remédier en utilisant le SMA.
La première consiste à découpler complètement effet d’ordre et effet de taille en
rajoutant à l’hamiltonien (2.13) un terme local, calculé comme l’énergie de ségrégation d’une
impureté, dont seul le paramètre cristallin varie par rapport aux caractéristiques de la matrice.
Il faut alors dériver un potentiel SMA ad hoc, permettant de relaxer cette impureté singulière
placée d’abord en volume, puis sur un plan p parallèle à la surface, et de faire le bilan
d’énergie [68]. Le résultat qualitatif essentiel est que l’effet de taille est limité au plan de
surface dans lequel il conduit à la ségrégation de l’impureté lorsqu’elle est la plus grosse
uniquement (contrairement à la théorie élastique qui la prévoit dans tous les cas, la différence
étant due à l’asymétrie tension-compression du potentiel), sauf pour les surfaces ouvertes où
la relaxation du réseau conduit à des résultats plus semblables à ceux de l’élasticité.
L’autre méthode consiste à dériver les paramètres du TBIM à partir d’un potentiel
SMA complet (chimie + taille) [69] ; ainsi ∆h0 est obtenu en laissant relaxer l’impureté en
surface et en volume (ce qui couple effet de taille et effet d’énergie superficielle) et V est
calculé en rapprochant des impuretés en milieu dilué ou concentré, ou en laissant relaxer de
gros amas enchâssés (cf. §III). On peut ainsi obtenir un paramètre V qui dépend à la fois de la
concentration (ce qui était déjà le cas sur réseau rigide) mais aussi des effets de relaxation de
réseau.
De façon générale, ce couplage entre chimie et morphologie fera l’objet du chapitre III
de ce travail.
II.1.5 - Potentiel SMA dans les systèmes étudiés
II.1.5.1 - Métaux purs Cu, Ag, Ni
D’après l’expression obtenue précédemment (équation (2.10)), le potentiel
interatomique en SMA comporte quatre paramètres que nous pouvons ajuster sur un certain
nombre de données expérimentales. Nous avons choisi d’ajuster les paramètres des métaux
purs de façon exacte sur l’énergie de cohésion (Ecoh) et la distance entre premiers voisins (d0),
et de façon approchée (moindres carrés) sur quelques constantes élastiques (B, le module de
compressibilité et C44 et C’ les modules de cisaillement) [70]. Les équations reliant les
paramètres A, p, q, ξ, aux valeurs expérimentales (Ecoh, d0, B, C44 et C’) sont détaillées dans la
thèse de Christine Mottet [71]. La limitation de l’extension des interactions aux premiers
- 32 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
voisins concernant les structures compactes telles que la structure cfc est une bonne
approximation [60,72]. En effet la majeure partie de l’énergie de cohésion est obtenue dès la
première sphère de coordination. Certaines études spécifiques de reconstruction de surface
montrent cependant qu’il peut être nécessaire d’étendre la portée des interactions dans des cas
précis jusqu’aux troisièmes voisins [63]. Les paramètres correspondants sont donnés dans le
tableau II.1. Dans tous les cas, lorsqu’on s’intéresse aux relaxations des atomes autour de
leurs positions d’équilibre, il est important de ne pas couper trop brutalement les interactions
au-delà du rayon de coupure, ce qui reviendrait à créer une discontinuité plus ou moins
conséquente selon l’extension choisie. Dans ce travail les interactions de la formule (2.10)
font intervenir les premiers et seconds voisins uniquement. Ensuite, l’énergie est raccordée à
zéro de manière continue (entre seconds et troisièmes voisins dans la plupart des cas, mais le
raccord sera étendu aux 4ièmes voisins dans le cas spécifique Cu et Ag noté * [74]) et deux fois
dérivable par un polynôme d’ordre 5.
Ag
Cu
Ni
Pd
Ag*
Cu*
Sb
p
10,85
10,55
11,34
10,90
10,35
10,38
6,54
q
3,18
2,43
2,27
3,72
3,42
2,63
3,27
A (eV/at)
0,1031
0,0894
0,0956
0,1710
0,1249
0,1084
0,665
ξ (eV/at)
1,1895
1,2799
1,5624
1,7134
1,2672
1,3434
2,679
Ecoh (eV/at)
-2,95
-3,5
-4,46
-3,94
-2,95
-3,5
-2,7
r0 (Å)
2,89
2,55
2,49
2,75
2,89
2,55
2,9
B
1,08
1,39
1,92
1,95
1,08
1,41
1012 erg.cm-3
(1,08)
(1,42)
(1,88)
(1,95)
(1,08)
(1,42)
C44
0,50
0,79
1,16
0,74
0,44
0,80
1012 erg.cm-3
(0,51)
(0,82)
(1,32)
(0,71)
(0,51)
(0,82)
C’
0,18
0,26
0,39
0,28
0,16
0,27
1012 erg.cm-3
(0,17)
(0,26)
(0,55)
(0,29)
(0,17)
(0,26)
0,352
0,475
0,638
0,411
(0,649)
(0,730)
(0,921)
(0,968)
γ100 (eV/at)
Tableau II.1 : Paramètres du modèle SMA pour Ni, Ag, Cu, Pd et Sb ajustés sur les énergies de cohésion, r0 est
exprimé en Å, Ecoh, γ100, A et ξ en eV/at, B, C44 et C’ en erg.cm-3 et pour Ag* et Cu* (raccord entre 2ièmes et 4ièmes
voisins). Les valeurs entre parenthèses correspondent aux données expérimentales [70,73].
Il est connu que l’énergie de surface γΚ des métaux purs est sous-estimée par le
potentiel SMA, comme par la plupart des potentiels à N-corps (EAM [75], EMT [76],
potentiels de Finnis-Sinclair [77], ...), à l’exception du potentiel dit "de colle" [78]. La
différence ∆γ = γK - γL est heureusement assez bien reproduite dans les systèmes Ni-Ag
( ∆γ th = 0,29 eV/at et ∆γ exp = 0,27 eV/at) et Ag-Cu ( ∆γ th = 0,12 eV/at et ∆γ exp = 0,08 eV/at),
ce qui est essentiel pour les études des alliages de surface ou des surfaces d’alliages.
- 33 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
Une alternative à l’ajustement de C44 est d’utiliser la relation universelle qui donne la
variation de l’énergie totale d’un solide en fonction de la distance interatomique, avec pour
seuls paramètres l’énergie de cohésion Ecoh, le module de compressibilité B, et la distance
entre premiers voisins r0 [66]. Son expression analytique est :
r − r0
E(r)
∗
∗ ∗
∗
∗3
− r∗
E (r ) =
= −(1+ r + 0,05r )e et r =
(2.18)
λr0
E coh
E* et r* sont sans dimension, E(r) et r représentent respectivement l’énergie totale du système
1 E coh
et la distance interatomique. λ est une grandeur caractéristique du métal : λ =
. Le
3 BV
potentiel SMA ajusté sur C’ et C44 respecte l’équation universelle, comme cela est illustré ici
dans le cas de Ag et Ni (figure II.2), ce qui lui assure une bonne anharmonicité, indispensable
pour reproduire des distorsions de liaisons et les propriétés de volume.
*
E
0,5
0
-0,5
-1
-2
-1
0
1
2
3
4
5
*
r
Figure II.2 : Relation E*(r*) suivie par les potentiels SMA de Ag (trait pointillé) et de Ni (trait tireté), comparée
à l’équation universelle (2.18) (trait continu).
II.1.5.2 - Cas particulier : relation entre p et q pour l’antimoine
En volume un atome d’antimoine a essentiellement six premiers voisins à des
distances qui se décomposent en trois distances "courtes" (2,90 Å) et trois distances "longues"
(3,36 Å). La structure peut en fait être considérée comme une structure cubique simple (six
premiers voisins) ayant subi une distorsion de Peierls. La distribution des distances est
montrée dans la figure ci-dessous où elle est comparée à celle du Cu.
15
Z(R)
Cu
Cu
3
Cu
1
4
10
Cu Sb
2
2
5
Sb4 Sb5
Sb
Sb
1
3
0
0
1
2
3
4
5
6
R
Figure II.3 : Nombre de voisins Z en fonction de la distance R dans M (= Sb, Cu) pur : Mn désigne la couche de
nièmes voisins. Les zones pleines indiquent la portée des interactions : Cu-Cu (blanc), Sb-Sb (noir), Cu-Sb (gris).
- 34 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
Dans le cas du système mixte Cu-Sb, on peut voir sur la figure II.3 qu’une coupure
naturelle des interactions est de les arrêter après les seconds voisins du Cu cfc et avant la
deuxième couche de voisins de Sb. Le calcul des constantes élastiques dans un système non
cubique étant pénible, les paramètres A, p, q, ξ intervenant dans l’expression du potentiel
SMA sont ajustés sur l’équation d’état universelle. Plusieurs jeux de paramètres sont
possibles en fonction du rapport p/q, la valeur critique p/q = 2 séparant des structures
compactes (cherchant à maximiser le nombre de voisins) des structures plus ouvertes (qui au
contraire minimisent le nombre de voisins). Ce point est illustré sur la figure II.4, où sont
portées les distances d’équilibre et les énergies correspondantes en fonction du nombre de
premiers voisins (dans ce cas, pour simplifier la détermination du potentiel, on considère un
Sb non distordu donc cubique simple).
R(Z)
p<2q
p=2q
p>2q
3,5
E(Z)
-2
p<2q
p=2q
-2,5
3
-3
2,5
-3,5
2
0
5
10
(a)
15
Z
p>2q
-4
0
5
10
15
Z
(b)
Figure II.4 : Distance d’équilibre (a) et énergie (b) en fonction du nombre de voisins Z pour 3 valeurs de p/q.
Les valeurs des paramètres correspondant aux différents cas sont :
q = 3.440, p = 6.320, ξ = 2.952, A = 0.782 pour p < 2q
q = 3.270, p = 6.540, ξ = 2.679, A = 0.665 pour p = 2q
q = 2.772, p = 8.196, ξ = 1.993, A = 0.368 pour p > 2q
Il n’est donc possible, au second moment, de stabiliser une structure cubique simple que pour
la valeur p = 2q, mais celle-ci est alors dégénérée avec toutes les autres. C’est néanmoins le
choix que nous ferons.
II.1.5.3 - Alliages
Les interactions croisées ont été paramétrisées en ajustant les énergies de solution
d’impuretés A dans B, E Asol (B) , et inversement [73,79]. En raison de la grande différence de
taille entre les éléments, il est nécessaire d’obtenir ces énergies après relaxation. Les
paramètres p et q sont obtenus par une moyenne arithmétique des paramètres des métaux
purs : pAB = (pA + pB)/2 et qAB = (qA + qB)/2. Comme pour les éléments purs, les interactions
dans l’équation (2.17) sont évaluées jusqu’à une distance rc, et reliées à zéro avec un
polynôme d’ordre cinq entre rc et un deuxième rayon de coupure rc’. Dans la plupart des cas, rc
a été choisi (quelle que soit l’interaction : homo ou hétéroatomique) comme la distance entre
seconds voisins du plus gros atome (Ag pour Ag-Cu, Pd pour Pd-Cu et Ag pour Ni-Ag) et rc’
comme la distance entre troisièmes voisins du plus petit atome (Cu pour Ag-Cu et Pd-Cu et
Ni pour Ni-Ag). Toutefois, lorsqu’un système présente de grandes distorsions des distances
interatomiques, un raccord plus doux peut s’avérer nécessaire. Ainsi, pour le système Ag-Cu,
nous avons aussi utilisé un potentiel noté Ag*-Cu* [74], dans lequel rc et rc’ correspondent
aux distances de seconds et quatrièmes voisins des métaux purs pour les interactions
homoatomiques, et aux distances entre seconds voisins de Ag et quatrièmes de Cu pour les
interactions mixtes. Les valeurs correspondantes sont reportées dans le tableau II.2.
- 35 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
A-B
CuPd
AgNi
AgCu
Ag*Cu*
pAB
10,795
11,095
10,700
10,361
qAB
3,085
2,725
2,805
3,029
AAB
0,143
0,096
0,098
0,111
ξAB
1,611
1,340
1,227
1,245
A
B
E sol (B)
E sol (A)
-0,461
0,700
0,390
-0,561
0,580
0,278
Tableau II.2 : Paramètres mixtes du modèle SMA pour les alliages CuPd, AgNi et AgCu, ajustés sur les
énergies de solution d’impuretés d’un élément dans le volume d’un autre après relaxation. p et q sont calculés
en faisant les moyennes arithmétiques des valeurs des composés purs. A et ξ, ainsi que les énergies de solution
dans les deux limites diluées, sont exprimés en eV/at.
On peut se demander si cet ajustement sur l’énergie de solution permet de reproduire
correctement les limites de solubilités. En effet, dans un système dilué ayant tendance à la
démixtion AcB1-c (c → 0), E Asol (B) est reliée à la limite de solubilité, clim, par :
 E A (B) 
(2.19)
clim = exp  − sol
kT 

L’accord est en général semi-quantitatif. Par exemple, dans le système Ag-Ni, même si le
diagramme de phases ne révèle pas d’asymétrie significative [80], des mesures plus précises
de la limite de solubilité indiquent que Ag est moins soluble dans Ni que Ni dans Ag [81]. La
mesure quantitative effectuée dans le cas de Ni(Ag) à T = 773 K donne clim = 1,5 10-5, en bon
accord avec la valeur déduite de l’équation (2.19) : clim = 2,7 10-5.
Une alternative à l’ajustement de l’énergie de solution est de développer cette dernière
en interactions de paires effectives VR, entre Rièmes voisins, selon les équations (2.13)-(2.15).
Ces interactions sont alors calculées (comme ce sera décrit au chapitre III.1), après relaxation,
à partir de la différence d’énergie entre une configuration initiale où les deux atomes de soluté
sont loin et une finale où ils sont en positions Rièmes voisins.
II.2 - Méthodes atomistiques de relaxation des contraintes
Une fois en possession d’un potentiel réaliste, nous sommes en mesure de déterminer
la structure d’équilibre d’un système, i.e. celle qui minimise son énergie libre, ou plus
précisément, dans le cas d’un dépôt de NA atomes d’une espèce A sur un substrat de N atomes
de B, son énergie libre d’adsorption définie comme :
F (A / BN ) − Ftot (BN )
A
Fads = tot
− Fref
(2.20)
NA
où Ftot (A / B N ) est l’énergie libre totale du système incluant le substrat B et la couche
adsorbée A, et Ftot (BN ) celle du substrat pur semi-infini B. FrefA est la référence énergétique
pour les atomes A, qui est prise nulle à 0 K et égale à 3/2 kBT à température finie.
Pour minimiser Fads, il faut avoir recours à des simulations numériques à l’échelle
atomique, permettant de rendre compte des propriétés physiques d’un système de particules
en interaction. Le problème est relativement simple à résoudre à température nulle, puisqu’il
suffit alors de minimiser son énergie interne. Une méthode bien adaptée est alors la
Dynamique Moléculaire Trempée qui sera décrite au §II.2.1. Le problème se complique
lorsque des effets de température finie sont à prendre en compte. Une première façon de
procéder est alors de calculer l’entropie vibrationnelle séparément, à partir des densités
locales de phonons obtenues à partir de la structure minimisée à T = 0 K par une méthode de
fraction continue [82]. C’est l’approximation harmonique [83] qui sera décrite au §II.2.2. On
- 36 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
verra toutefois que cette reconstruction simple de l’énergie libre est parfois insuffisante, que
ce soit parce que l’énergie interne varie fortement avec la température, ou parce que
l’approximation harmonique de l’entropie est trop brutale. Il faut alors avoir recours à des
simulations Monte Carlo, qui peuvent donner directement l’énergie libre à température finie,
mais de façon lourde et peu transparente, mais aussi permettre de calculer à la fois l’énergie
interne du système et les positions moyennes <R> des atomes à température finie. Ceci
autorise alors les calculs d’entropie de vibration dans une approximation quasi-harmonique
inhomogène [84]. C’est dans ce sens que seront présentés au §II.2.3 les simulations Monte
Carlo effectuées dans ce travail.
De façon générale, quelle que soit la méthode, une grandeur physique à laquelle est
r r
r
associée l’observable Q(q N , pN ), où q N = (r1, r2 ,..., rN ) est la coordonnée de position
r
r
r
généralisée et pN = (M1 v1 ,M 2 v 2 ,..., MN v N ) la quantité de mouvement conjuguée, est évaluée
en faisant la moyenne de Q(qN, pN) sur un espace "échantillon". En thermodynamique
statistique, une valeur moyenne, dite moyenne d’ensemble, s’écrit :
TrQ(q N ,p N )exp −β H(q N ,p N )
N
N
Q(q ,p ) =
(2.21)
Tr exp −βH(q N , pN )
[
[
]
]
Le symbole Tr (trace) signifie que l’on somme sur tous les états accessibles du système et
β = 1 k BT . Le dénominateur est la fonction de partition et H (qN, pN) l’Hamiltonien du
système. Une autre valeur moyenne, dite moyenne temporelle, peut être calculée le long d’une
trajectoire de l’espace des états pendant un laps de temps (t-t0) significatif par rapport à la
dynamique du système :
Qt = (t − t 0 )
−1
t
∫ Q(q
N
,p N )dt
(2.22)
t0
Le principe ergodique stipule que ces deux moyennes sont équivalentes :
Q(qN ,p N ) = Qt→∞
(2.23)
Il importe de noter que la Dynamique Moléculaire et les simulations Monte Carlo sont
fondées sur des principes différents : la première est une méthode déterministe (i.e. elle décrit
la trajectoire réelle des particules en intégrant les équations du mouvement) alors que la
seconde est une méthode stochastique (i.e. elle décrit l’évolution du système de manière
aléatoire). Elles conduisent pourtant théoriquement aux mêmes résultats, et ce sera ici un
guide pour tester les validités croisées des deux méthodes. Notons que ces méthodes, parfois
lourdes à mettre en œuvre et relativement coûteuses en temps de calcul, ont l’avantage de
conduire à des résultats exacts dans le cadre d’une description donnée du système (nature et
propriétés des particules, modèle énergétique, ...). C’est pourquoi on parle souvent à leur
propos d’expériences numériques.
II.2.1 - Dynamique Moléculaire Trempée (T = 0 K)
II.2.1.1 - Principe
Les simulations en Dynamique Moléculaire sont, sous plusieurs aspects, les plus
proches d’expériences réelles. On choisit un système modèle constitué de N particules
(atomes) et on résout les équations de mouvement de Newton jusqu’à ce que les propriétés du
système soient stationnaires avec le temps : le système atteint alors son équilibre.
Dans un système à N corps, la température est reliée à l’énergie cinétique moyenne
suivant la règle d’équipartition de l’énergie :
- 37 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
1
3
1 2
k BT = ∑
mv
2
N i=1,N 2 iα
(2.24)
α=1,3
où viα est la composante α de la vitesse de l’atome. Nous utilisons dans la simulation cette
équation rcomme une définition de la température. Le mouvement de chaque atome i (de
position ri ) est décrit à partir des positions initiales hors équilibre, où il est soumis à une force
r
Fi qui le ramène vers sa position d’équilibre, en suivant l’équation de Newton. La technique
de relaxation en Dynamique Moléculaire consiste à intégrer la relation fondamentale de la
dynamique :
r
r
d2 ri
Fi = m 2
(2.25)
dt
Nous avons utilisé dans le programme l’algorithme de Verlet pour déterminer la
position atomique à chaque instant t. Si l’on effectue le développement de Taylor de la
coordonnée d’un atome, autour du temps t, on obtient
:
r
r
r
r
Fi (t) 2 ∆t 3
4
ÝÝ
ri (t + ∆t) = ri (t) + v i (t)∆t +
∆t +
rÝ
i + ε(∆t )
2m
3!
(2.26)
r
3
r
r
r
F (t)
∆t
4
Ý
ri (t − ∆t) = ri (t) − v i (t)∆t + i ∆t 2 −
rÝÝ
i + ε(∆t )
2m
3!
En sommant ces deux équations nous obtenons :
r
r
r
r
Fi (t) 2
ri (t + ∆t) = 2 ri (t) − ri (t − ∆t) +
∆t + ε (∆t 4 )
(2.27)
m
Notons que l’algorithme de Verlet n’utilise pas la vitesse pour calculer la nouvelle position.
On peut en revanche tirer la vitesse de la connaissance de la trajectoire, en utilisant :
r
r
r
ri (t + ∆t) − ri (t − ∆t) = 2 vi (t)∆t + ε (∆ t 3 )
(2.28)
r
r
r
r (t + ∆t) − ri (t − ∆t)
2
+ ε(∆t )
v i (t) = i
2∆t
Les atomes inéquivalents sont relaxés individuellement, à température finie ou nulle.
Dans le premier cas, on simule ainsi la dynamique du système, mais cela nécessite des
simulations coûteuses en temps de calcul (les temps caractéristiques expérimentaux étant de
l’ordre de la minute alors que le pas en temps de la dynamique est de l’ordre de la
femtoseconde). Ici, nous utiliserons plutôt la dynamique moléculaire comme une procédure de
minimisation de l’énergie interne à T = 0 K. Il s’agit donc d’une Dynamique Moléculaire
Trempée. En effet, pour déterminer la position d’équilibre à température nulle, onr effectue
r
r
une trempe, c’est à dire qu’on annule les vitesses v i quand le produit scalaire Fi (t).vi (t)
devient négatif, ce qui permet de converger vers le minimum de l’énergie potentielle.
Toutefois, les atomes peuvent être piégés dans des sites énergétiquement moins stables. Afin
de les dépiéger, on peut soit chauffer le système en cours de simulation en donnant des
vitesses aléatoires non nulles aux atomes, soit tester plusieurs conditions initiales différentes.
II.2.1.2 - Analyse locale
Deux indicateurs
r essentiels sont la force et la pression s’exerçant sur chaque atome i.
Tout d’abord la force Fi dérive de l’énergie potentielle du système de N atomes Etot :
r
dE
(2.29)
Fi = − rtot
d ri
N
E tot = ∑ E i
(2.30)
i= 1
- 38 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
r
où Ei est l’énergie de l’atome sur le site i donnée en (2.17). On en tire l’expression de Fi :
 r

 r

r
ij
ij
r 
p KL −p KL  rKL0 −1   1
1  ξ2KLq KL −2q KL  rKL0 −1  rij
Fi =  − ∑ 2AKL 0 e
− b + b
e
(2.31)
 r
0
rij
rKL
E i E j  rKL

j, rij < rc


b
où E i est l’énergie de bande donnée en (2.8).
L’autre quantité microscopique intéressante dans un système contenant un grand
nombre de sites inéquivalents est la pression hydrostatique locale définie à T = 0 K, qui
caractérise l’état de contrainte [85] :
dE i
dE
dE i
=− iV=−
rij
(2.32)
Pi = −
d ln V
dV
3drij
pour le volume atomique supposé sphérique.
Le signe de Pi donne le sens de la contrainte, en compression (Pi > 0) ou en tension (Pi < 0).
A partir des équations (2.31) et (2.32) nous obtenons l’expression de la pression exercée sur le
site i :
 r

 r

ij
ij
rij −p KL  rKL0 −1  ξ2KL q KL  rij −2q KL  rKL0 −1 
1
 0 e
−
(2.33)
Pi =  ∑ AKL pKL 0 e

 E bi  rKL
rKL
3 j,rij <rc


Une telle expression a la dimension d’une énergie ([E] = [F].L). On peut la convertir en unité
de pression ([P] = [E] / L3) en considérant le volume occupé par un atome égal à a3/4 dans la
structure cfc (à 4 atomes par maille) où a est le paramètre de maille du métal considéré,
exprimé en Å. La pression en unité GPa s’écrit :
4
Pi (GPa ) = 3 .1,602.102.Pi (eV)
a
II.2.2 – Calcul à température finie : phonons et entropie vibrationnelle
II.2.2.1 - Approximation harmonique
Le seul indicateur non ambigu de stabilité thermodynamique est l’énergie libre, qui à
température finie s’obtient en ajoutant à l’énergie interne un terme entropique dû, pour les
métaux purs, aux vibrations, l’entropie électronique n’étant pas inclue dans nos modèles
simplifiés. Ces deux contributions ayant été calculées par des approches différentes et à des
niveaux d’approximation pas toujours équivalents, une telle reconstruction n’est pas
univoque. Ainsi, l’approximation la plus simple consisterait à tout calculer (énergie et
entropie) à partir de la structure atomique d’équilibre issue de la dynamique trempée à 0 K
(approximation harmonique). Le développement de l’énergie potentielle U au second ordre
par rapport aux déplacements atomiques conduit à l’expression suivante :
1
0
0
U = U + ∑ ∑ Φ iαjβ u iα u jβ
(2.34)
2 i, α j,β
où U0 est l’énergie potentielle de la structure relaxée à T = 0 K, uiα est le déplacement
atomique de l’atome i dans la direction α (x, y ou z) et Φ 0iαjβ est la matrice des constantes de
∂2 U0
.
∂ u iα ∂ u j β
L’entropie de vibration S est obtenue à partir de la densité d’états de phonons n(ν) (où
ν est la fréquence) [82,83] :
force (qui sont reliées à la structure électronique) : Φ 0iαjβ =
- 39 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________

 hν
 hν 


 − ln  2sinh hν   n( ν)dν

coth
(2.35)
∫0 2k BT  2k BT  
 2k BT   
Pour calculer la densité d’états de vibration n(ν), nous avons utilisé l’analogie entre les
spectres d’électrons et ceux de phonons [82,83], en faisant le rapprochement entre les
équations de mouvement des atomes dans un cristal dans l’approximation harmonique et
l’équation de Schrödinger pour les états électroniques du cristal dans l’approximation des
Liaisons Fortes. Ainsi la technique de la fraction continue, qui évite la sommation dans
l’espace des k, peut s’appliquer à l’étude des propriétés vibrationnelles.
Comme pour le calcul des densités locales d’états électroniques (utilisation des
spectres d’électrons à partir desquels on peut tirer les propriétés électroniques des métaux de
transition), on utilise la méthode de récursion pour obtenir les densités locales d’états de
phonons (LPDS) sur les différents sites dont les positions d’équilibre ont été calculées à T = 0
K par Dynamique Moléculaire Trempée. Le calcul détaillé développé dans l’Annexe B
montre que n(ν) s’obtient sous la forme d’une fraction continue :
(2.36)
n(ν )= ∑ n iα (ν)
ν max
S = kB
iα
()
n iα (ν) = 2νNiα ν
2
( )
Niα ν2 = −
G ii (z) =
αα
(2.37)
(
Im
2
lim+ Gαα
ii ν + iε
ε
→0
π
1
z − a iα
2
(2.38)
( )
(b )
−
(b )
z−a −
b1iα
z − a1iα −
)
2
iα
2
iα
3
(2.39)
2
iα
3
2
...
dont les coefficients, calculés par la méthode de récursion (voir Annexe B), convergent vers
des valeurs asymptotiques directement reliées aux bords de la densité de phonons. La densité
locale de phonons au site i pour le mode α, niα(ν), sera d’autant plus précise qu’on calcule
plus de coefficients. La troncation de la fraction au 1er étage permet de retrouver le modèle
d’Einstein, souvent utilisé dans ce type de problèmes [85].
Notons que le calcul de la LPDS permet aussi de déduire la contribution des phonons à
d’autres grandeurs thermodynamiques : chaleur spécifique, déplacement carré moyen ou
température de Debye (on peut ensuite remonter à la valeur du facteur de Debye Waller qui
joue un rôle important dans les expériences telles que la diffraction en incidence rasante)... De
plus, ces spectres sont mesurables expérimentalement grâce à la diffusion inélastique de
neutrons, la spectrométrie infrarouge Raman ou celle de perte d’énergie d’électrons (EELS).
II.2.2.2 - Approximation quasi-harmonique inhomogène
L’approche harmonique précédente nécessite que l’énergie interne et les positions
d’équilibre ne varient pas trop en température. Si tel n’est pas le cas, il faut alors recalculer
cette énergie à température finie, par simulation Monte Carlo, comme ce sera expliqué dans la
section suivante. Dans ce cas, il reste possible de conserver le terme entropique harmonique,
mais il est plus cohérent de recalculer celui-ci aussi à partir des positions moyennes issues des
simulations Monte Carlo à température finie. C’est l’approximation quasi harmonique
inhomogène (notée QHI), dans laquelle l’introduction de l’effet de la température se fait au
travers de l’utilisation des positions moyennes déterminées par simulations Monte Carlo pour
calculer les LPDS. Les positions atomiques sont ainsi évaluées à température finie. L’énergie
- 40 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
potentielle U est toujours développée au second ordre par rapport aux déplacements
atomiques, mais cette fois-ci à partir des positions d’équilibre obtenues à température finie.
II.2.3 - Calcul à température finie : simulations Monte Carlo
Les calculs Monte Carlo effectués ici répondent à deux objectifs :
→ trouver les structures stables en fonction de la périodicité d’une surstructure de surface
donnée (nxm) et de la température, et calculer les énergies internes correspondantes.
→ calculer les positions moyennes <R> des atomes dans chaque cas afin d’effectuer les
calculs d’entropie de vibration dans l’approximation quasi-harmonique inhomogène.
Dans ce but, nous avons testé notre méthodologie en calculant l’énergie interne à 0K
par simulation Monte Carlo, et en confrontant les résultats à ceux obtenus en Dynamique
Moléculaire Trempée (cf. § II.2.1). Pour cela, on a effectué des calculs à différentes
températures décroissantes (typiquement 130 K, 70 K et 10 K), en repartant à chaque fois de
la dernière configuration obtenue à la température précédente, et en extrapolant les résultats à
0 K. L’accord entre les deux méthodes est quasi-parfait. Ce chapitre décrit donc le principe de
ces simulations Monte Carlo, dans lesquelles la structure est optimisée à chimie fixée.
II.2.3.1 - Principe et application
Dans les simulations Monte Carlo, il n’est pas nécessaire de connaître la dynamique
intrinsèque du système ; l’espace "échantillon", constitué ici de tous les états, est parcouru au
moyen d’un processus aléatoire. Cependant, rappelons qu’il s’agit d’évaluer numériquement,
et le plus précisément possible, des moyennes données par l’équation (2.21). En général,
l’Hamiltonien H (qN, pN) varie fortement avec les coordonnées et de ce fait, le facteur de
Boltzmann exp −βH(q N ,p N ) a un caractère très contrasté. En conséquence, seule une partie
[
]
limitée des états contribue de façon significative à l’expression (2.21) et, le nombre d’états
étant très grand, il est illusoire de vouloir explorer la totalité de cet ensemble. Il faut donc
avoir recours à une méthode permettant d’échantillonner l’espace des états autour de la région
où les intégrants de l’équation (2.21) ont un poids substantiel. Ces états vont être générés par
ce que l’on appelle une chaîne de Markov stationnaire ergodique, ce qui signifie que tous les
états possibles peuvent être atteints avec une probabilité non nulle. L’algorithme le plus usité
et conduisant à un échantillonnage efficace pour le type de problème qui nous intéresse ici a
été proposé par Metropolis et al. [86] (pour plus de détails, voir Allen et al. [87]). La
probabilité de transition entre un état i et un état j est alors donnée par :
π ij = min 1,exp (−β∆Φ ij )
(2.40)
[
]
où ∆Φ ij est la variation d’énergie entre l’état final j et l’état initial i.
Il faut maintenant définir l’ensemble thermodynamique dans lequel on souhaite
travailler. Il s’agit ici de l’ensemble isotherme-isobare (NPT) dans lequel le nombre d’atomes
(N), la pression extérieure (P) et la température (T) sont maintenus constant. Ici la pression
extérieure sera prise égale à 0 car elle ne joue aucun rôle sur un solide tant qu’elle reste
proche de la pression atmosphérique. Dans cet ensemble, un nouvel état est généré en
déplaçant un atome au hasard et/ou en effectuant un changement de volume :
® le déplacement aléatoire d’un atome par rapport à sa position précédente met en jeu
le bilan énergétique ∆Φ ij = ∆E d , où ∆E d est la variation d’énergie d’interaction associée au
r
déplacement. La nouvelle position rin de l’atome i dans la configuration n est générée au
r
hasard à partir de la position rim de cet atome dans la configuration précédente m par :
r n rm
r
ri = ri + δ rmax (2ξ − 1)
(2.41)
r
où ξ est un nombre aléatoire compris entre 0 et 1 et δrmax est le déplacement maximum
r
permis. Dans la pratique, l’atome peut bouger à l’intérieur d’un petit cube de coté δrmax ,
- 41 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
r
r
centré sur rim , et l’on tire 3 nombres ξ, un pour chaque axe. δrmax est de l’ordre de grandeur de
la racine carrée du déplacement quadratique moyen dans une direction, à la température T
(environ 0,1 Å à 600K) pour Cu et est ajusté au cours de la simulation pour assurer un taux
d’acceptation des déplacements d’environ 50 %. Une fois le nouvel état généré, on calcule la
quantité δH qui est la différence d’enthalpie entre les états m et n. Le déplacement est accepté
avec la probabilité πij (2.40) de l’algorithme de Metropolis.
® la variation du volume total par déplacement collectif de tous les atomes (i.e. en
opérant une homothétie du réseau) implique, quant à elle, la variation [6,86,87] :
V 
∆Φ ij = −NkBT ln  j  + ∆E V
(2.42)
 Vi 
où Vi (resp. Vj) est le volume de la boîte dans l’état i (resp. j) et ∆E V est la variation
d’énergie due au changement de volume.
Dans le présent travail, nous n’avons pas effectué de changement de volume, car cela
n’était pas adapté aux situations considérées. En effet, les calculs sont effectués sur des
couches minces, simulées par des boîtes de simulation parallélépipédiques, faites d’un
empilement de Nz plans parallèles à l’orientation du substrat suivant l’axe z (Nz étant choisi
de façon à ce que les propriétés de volume soit retrouvées au centre de la couche : Nz = 42),
chaque plan étant construit selon les deux axes denses x et y et contenant (nx,p x ny,p) sites (nx,p
et ny,p ne dépendant de p qu’à l’interface dépôt-substrat). Des conditions aux limites
périodiques sont appliquées suivant ces deux axes, les deux surfaces étant libres. Les
dimensions moyennes de la boîte selon les axes x et y sont donc imposées par le paramètre du
substrat à la température T, calculé par des simulations indépendantes sur des boîtes
tripériodiques. La dimension selon z peut, elle, varier pour accommoder les relaxations dues
aux surfaces libres, et ceci s’effectue naturellement par le déplacement individuel des atomes.
Un macropas Monte Carlo (ou MCS pour Monte Carlo Step) est constitué de
l’ensemble des événements consistant à proposer un déplacement à chaque atome de la boite.
Une simulation met en jeu un grand nombre de macropas (∼ 104), de sorte que la moyenne
donnée par l’expression (2.21) peut se ré-écrire sous la forme d’une moyenne arithmétique :
1 Λ
N
N
N
N
(2.43)
Q(q ,p ) = ∑ Qλ (q , p )
Λ λ =1
L’état de départ étant en général relativement loin de l’état d’équilibre, on laisse le
système se relaxer pendant un certain nombre NR de macropas. Λ est alors égal à NT - NR, NT
étant le nombre total de macropas. Enfin, la convergence des grandeurs thermodynamiques
recherchées est caractérisée par une fluctuation de ces quantités autour d’une valeur moyenne,
signifiant que l’équilibre thermodynamique est atteint.
II.2.3.2 - Calcul de l’énergie interne
Le critère énergétique adapté à notre étude est l’énergie d’adsorption définie par
(2.20). Rappelons que l’énergie de référence pour l’espèce déposée est prise nulle à 0 K mais
est égale à 3/2kBT à température finie. Un problème rencontré a été d’analyser des différences
d’énergie de quelques meV, ce qui veut dire que la précision requise pour les simulations
Monte Carlo sur la partie énergie interne de l’énergie libre d’adsorption, Eads, doit être de
l’ordre de 1 meV/at. Pour des dépôts d’une centaine d’atomes, cela nécessite une précision de
0,1 eV sur l’énergie interne totale de la boîte de simulation, qui pour une couche de 42 plans
est de l’ordre de -15 keV. La précision requise dans les simulations est donc ~ 7.10-6. Cela
nécessite également de trouver une énergie de référence précise pour le substrat nu, ce qui est
primordial pour comparer des surstructures de périodicité (nxn) différente. Cette énergie est
normalisée par atome pour être indépendante de n :
- 42 -
CHAPITRE 2 : MODELISATION
___________________________________________________________________________
γB
(2.44)
Nz −1
On voit sur la figure II.5 qu’il faut ~ 15.104 MCS pour obtenir une valeur de référence
Eréf(Cu) = - 3,39915 ± 2.10-5 eV pour un substrat de cuivre orienté (111) et n = 9,10,11, ce qui
donne une idée des temps de simulation nécessaires pour avoir la précision voulue sur Eads.
E réf (B) = E coh +
B
<E>
(eV/at)
E(<r>)
(eV/at)
(10x10)
-3,3986
(10x10)
(9x9)
-3,474
-3,3988
-3,399
-3,4745
-3,3992
(11x11)
-3,3994
-3,475
(11x11)
-3,3996
(9x9)
-3,3998
0
5
Instantan : - - - - - Cumul :
Instantan : - - - - - Cumul :
10
15
(a)
20
25
run
-3,4755
0
5
10
15
20
25
run
(b)
Figure II.5 : (a) Energie de Cu pur en fonction du numéro de run pour n = 9, 10 ,11 sur 30 runs de 5000 MCS
et (b) énergie par site pour Cu pur sur 150000 pas à partir des positions moyennes.
II.2.3.3 - Calcul des positions moyennes <r>
Les simulations Monte Carlo impliquant de petits déplacements des positions
atomiques est une bonne méthode pour obtenir non seulement l’énergie interne moyenne
E(T) mais aussi les positions atomiques moyennes ri (T ) . En l’absence d’événements de
diffusion ou de transition structurale, l’énergie interne calculée avec les positions atomiques
moyennes, E[ r( T) ] correspond à une énergie minimale, tandis que l’énergie interne
moyenne contient l’énergie vibrationnelle, égale à 3/2 kBT au dessus de la température de
Debye. Par conséquent, dans le cas usuel d’un solide :
E[ r(T) ]= E( T) - 3/2 kBT
(2.45)
Lorsque cette relation est vérifiée, les positions atomiques moyennes peuvent être utilisées de
façon fiable pour calculer les diverses quantités locales (électroniques, vibrationnelles). Dans
l’approximation QHI, nous serons amenés à calculer les entropies de vibration à partir des
positions moyennes calculées sur un seul run, ˜r = r 1 run . Il importe donc de valider cette
approximation pour l’énergie interne. Pour cela, il faut d’abord chercher la nouvelle énergie
de référence du substrat pur, qui devrait être différente d’environ 3/2kBT de la précédente.
Comme on peut le voir sur la figure II.5, il se passe une chose curieuse : on obtient deux
valeurs différentes selon qu’on la calcule en faisant la moyenne sur l’ensemble des runs ( )
des valeurs instantanés ( E inst (˜r) = -3,4744 ± 2.10-4 eV) ou que l’on prend la moyenne
cumulée ( E cum ( ˜r ) = -3,47498 ± 2.10-5 eV). Plus exactement la moyenne cumulée est
toujours en dehors des fluctuations instantanées. La raison est que l’énergie est une fonction
complexe des positions moyennes. Nous avons vérifié en revanche, que la moyenne cumulée
des positions moyennes (sur quelques atomes) est compatible avec les positions moyennes
obtenues avec les runs instantanés. Notons que la différence entre E inst (˜r) et Eréf(Cu) est de
0,0753 eV, ce qui est très peu différent de 3/2kBT (= 0,0776 à 600K), la petite différence
pouvant être due à des effets anharmoniques. Ces calculs montrent déjà que le calcul des
énergies internes à partir des positions moyennes est justifié.
- 43 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
III - COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
Il ressort du chapitre précédent qu’il n’est pas facile de traiter au même niveau
d’approximation les réarrangements chimiques et structuraux. En effet, s’il est suffisant de
décrire la densité d’états électroniques au second moment pour rendre compte des relaxations
atomiques, la sensibilité à l’ordre chimique requiert une description exacte au moins au 4ème
moment. Du coup, les deux approches développées présentent des inconvénients. Le modèle
d’Ising sur réseau rigide permet certes la mise en œuvre de l’arsenal des techniques
thermodynamiques usuelles, mais rend mal compte des réarrangements atomiques en présence
de fort désaccord de maille (une amélioration étant apportée par l’addition d’un terme local
calculé en dynamique moléculaire par un potentiel SMA ad hoc ne décrivant que la différence
de taille entre les deux constituants). Au contraire ces réarrangements sont bien décrits par le
potentiel SMA dans le cas des éléments purs, mais de façon plus critiquable en présence de
plusieurs composants. Le choix d’utiliser l’une ou l’autre de ces approches suivant le
problème considéré demande donc d’assurer un minimum de cohérence entre les deux. En
particulier, on peut se demander comment un effet de taille (traité en SMA) peut modifier les
interactions mises en jeu dans le TBIM, en volume comme en surface.
Nous allons essayer dans ce chapitre de "concilier" ces deux modèles et de prédire
comment la tendance du système à former des paires hétéroatomiques ou homoatomiques
évolue avec le nombre de liaisons coupées (orientation de la surface) et la concentration de
l’alliage (du moins dans les limites diluées). Pour cela, nous calculons les interactions de
paires d’alliages effectives (EPI) d’une manière plus complète à partir de calculs d’énergie
totale dans un modèle au second moment, l’influence des relaxations structurales étant
obtenue par des simulations de Dynamique Moléculaire Trempée. Les calculs sont faits en
volume, soit dans les limites diluées, soit pour des concentrations plus élevées. L’influence de
la surface ne sera étudiée, quant à elle, que dans les limites diluées.
Nous montrons ainsi que le couplage entre les processus d’ordre et de relaxation des
contraintes induites par le désaccord de maille ou la rupture de liaisons est loin d’être trivial,
même si quelques tendances générales semblent se dégager, utilisables pour traiter
simultanément réarrangements chimiques et atomiques.
III.1 - Alliages dilués : Cu-Ag, Cu-Pd
A cause de l’existence des liaisons coupées, les surfaces d’alliage peuvent présenter une
grande variété de comportements par rapport au volume. C’est particulièrement vrai en ce qui
concerne l’apparition d’arrangements atomiques comme les relaxations ou les reconstructions,
mais aussi d’un point de vue chimique, avec la possibilité d’une modulation de la
concentration à l’extrême surface (ségrégation superficielle) [4]. Dans ce dernier cas,
l’enrichissement en surface peut même induire des effets précurseurs proches des transitions
de phases volumiques, comme c’est le cas pour les transitions de couches (prédémixtion de
surface [47]) ou l’ordre [88] / désordre [89] induits par la surface. Dans tous ces cas, les
phénomènes d’ordre sont différents en surface par rapport au volume, mais la tendance
principale du système (ordre ou séparation de phases) reste inchangée. En revanche, dans
quelques cas, on peut même assister à une complète inversion de cette tendance, ce qui veut
dire une complète perturbation de la propension intime d’un système donné à former en
premiers voisins des paires hétéroatomiques ou homoatomiques. Ceci pourrait se produire
dans les systèmes à séparation de phases présentant un fort désaccord de maille, pour lesquels
de simples arguments élastiques montrent que la manière la plus efficace pour des impuretés
- 44 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
de relaxer les contraintes est de ségréger à la surface, et là de s’éviter les unes les autres,
conduisant à la formation d’un alliage confiné à la surface dans les systèmes immiscibles [90].
En revanche, il est important de noter que de tels arguments simples négligent complètement
les autres forces chimiques et les relaxations atomiques, dont la prise en compte pourrait
complètement renverser les conclusions, et ce même dans le cadre d’une simple description
énergétique d’équilibre et sans avoir recours à de quelconques considérations cinétiques [4] !
De telles prédictions théoriques doivent être comparées aux données expérimentales.
Grâce au développement des microscopies de champ local, les surfaces peuvent maintenant
être imagées à l’échelle atomique, du point de vue morphologique comme de celui de l’ordre
chimique local [91], ce qui donne quelques outils pour savoir si une telle inversion de la
tendance à l’ordre est observée ou non. Ceci a fait l’objet de plusieurs expériences qui
suggèrent que ce phénomène dépend crucialement, non seulement de la nature des deux
espèces mais aussi, pour un système donné, de leur concentration respective et de l’orientation
de la surface. Ainsi, les images STM du système Ag / Cu (111) ne montrent aucun mélange à
la surface ou dans le volume [48-49]. En revanche, dans le cas de l’orientation (100), des
expériences STM ont révélé une situation plus complexe [92]. En effet, les images suggèrent
un mélange des atomes d’Ag dans la phase bidimensionnelle riche en Cu (à bas taux de
couverture en Ag) mais aucun mélange dans la phase riche en Ag (pour des taux de
couvertures proches de celui de la monocouche), qui est en fait très proche de la structure
hexagonale de type (111) résultant de la reconstruction c(10x2) [46,93]. En résumé, la
formation de l’alliage de surface semble possible dans le cas du système bidimensionnel
Cu(Ag) (100) mais pas dans celui d’Ag(Cu) (111). Notons que ceci est en accord total avec
les images STM mentionnées plus haut, prises sur le substrat (111) [49].
Le but de ce chapitre est donc d’analyser comment la tendance du système à former des
paires hétéroatomiques ou homoatomiques évolue, tout d’abord en fonction de l’état de
contrainte du système, puis avec le nombre de liaisons coupées (orientation de la surface) et la
concentration de l’alliage (du moins dans les limites diluées). Pour cela, nous allons calculer
les interactions de paires d’alliages effectives (EPI), en effectuant des simulations de
Dynamique Moléculaire Trempée dans un potentiel SMA en volume, puis pour les faces
(111), (100) et (110), dans les deux limites diluées : Cu(Ag) et Ag(Cu), avec l’espoir de
retrouver les tendances chimiques observées expérimentalement en surface, c’est-à-dire la
tendance pour les impuretés d’Ag à se mélanger facilement dans un plan pur Cu (100) mais
pas pour les impuretés de Cu dans la couche d’Ag pur (111). En d’autres termes, la lacune de
miscibilité volumique devrait évoluer d’une manière très asymétrique (en fonction de la
concentration) en fonction du nombre de liaisons coupées : peu de changements sont attendus
dans la limite diluée Ag(Cu) mais un fort abaissement (et même une possible inversion vers
une tendance à l’ordre) devrait être obtenu dans la limite diluée Cu(Ag). A titre de
comparaison, nous appliquerons la même procédure au système Cu-Pd, jumeau du précédent
en ce qui concerne l’effet de taille, mais qui présente quant à lui une tendance à l’ordre en
volume.
III.1.1 - Calculs des interactions de paires
III.1.1.1 - TBIM
On a pu voir au chapitre II que le terme de bande de l’énergie totale pouvait s’écrire
comme la somme d’une énergie moyenne dépendant de la concentration mais pas de la
configuration et d’une énergie en dépendant sous une forme simplifiée de type "Ising" (éq.
2.13). Dans cette dernière partie apparaissaient deux termes, respectivement fonctions
linéaires et quadratiques de {pKi }. Le premier implique un terme de champ local h Ki qui
dépend seulement de la nature du site i (et est le même pour tous les sites équivalents), tandis
- 45 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
que le second met en jeu une interaction de paires effective VijKL qui dépend aussi de la
distance entre les sites i et j. Ainsi, quand on calcule le bilan énergétique ∆E1-2 entre deux
configurations {pKi }1 et {pKi }2 correspondant à la même concentration moyenne (i.e. incluant
seulement les échanges A↔B), le terme moyen s’annule et seuls les deux termes d’Ising
jouent un rôle. Par exemple, si les deux configurations correspondent au cas dilué dans lequel
Nimp impuretés occupent des sites différents, le bilan énergétique ∆E1-2 par atome
d’impureté s’écrit :


K
K
∑ ∑ p Lj E Lj {p Ki }2 − ∑ pLj E Lj {p Ki }1 
E tot {p i }2 − E tot {pi }1
j
L
L
∆E1−2 =
=
(3.1)
N imp
N imp
qui implique seulement des combinaisons linéaires des paramètres d’Ising :

1 
1− 2
(3.2)
∆E1−2 =
Z r Vij 
∑ h i +
∑
Nimp  i
< ij> ∈ r ième couche

(
)
(
)
(
{
)
(
)
}
où, de façon similaire au cas des surfaces décrit dans les équations (2.14-2.15), le premier
terme implique une sommation des champs locaux sur les sites i d’impuretés :
h i = {hAi − h Bi }2 − {h Ai − h Bi }1
(3.3)
et le second terme une sommation des interactions effectives de paires (EPI) sur les couches
successives de voisins (r =1, 2, ...) :
1 AA
BB
AB
Vij = (Vij + Vij − 2Vij )
(3.4)
2
qui rend compte de la tendance du système à favoriser soit les paires hétéroatomiques (Vij >
0) soit homoatomiques (Vij < 0) rièmes voisines. Cette interaction est multipliée par un facteur
Z 1r− 2 caractéristique des configurations initiale et finale de l’étude. Nous indiquons ici trois
exemples qui seront détaillés par la suite :
→ le premier revient à mélanger deux métaux purs, dans des proportions relatives c et
1-c (Nimp=Nc, où N est le nombre total d’atomes), pour former un alliage concentré
désordonné, de sorte que ∆E1-2 n’est alors autre que l’énergie de mélange ∆Emix(c). Dans ce
cas Z 1r− 2 = - (1-c) Zr où Zr est le nombre de voisins dans la rième couche de coordination pour
un atome de volume.
→ le second concerne la dissolution, dans un volume B, d’une impureté A unique
issue de son propre volume (Nimp = 1). ∆E1-2 est l’énergie de solution ∆Esol, et Z 1r− 2 = - Zr
(coordinance).
→ le troisième consiste à prendre deux impuretés (Nimp = 2) dans des positions isolées
pour les rapprocher en positions de rièmes voisines : Z 1r− 2 = + 2 et Z 1−r' ≠r2 = 0. Alors : ∆E1-2 = Vr.
En général, pour des désaccords de maille faibles, les interactions de paires effectives
premières (resp. secondes) voisines sont suffisantes pour reproduire les énergies de mélange
dans le cas des structures cristallines cfc (resp. bcc) [72,94,95]. Dans un premier temps,
n’étudiant ici que des métaux cfc, nous ne considèrerons que les EPI entre premiers voisins
(Vij = V1). Notons que dans ce cas le signe de V1 pilote la tendance du système à l’ordre (V1 >
0) ou à la séparation de phases (V1 < 0). En revanche, nous verrons par la suite que cette très
courte portée des interactions peut être critiquée dans le cas particulier de Ag-Cu, à cause de
la très grande différence de taille entre les espèces. En particulier, quelques interactions à plus
longue portée (Vr pour r = 2, 3, ...) peuvent avoir des valeurs significatives.
Comme nous allons le voir, toujours dans le système AgCu, la préférence à former ou
non une paire hétéroatomique n’est pas ressentie forcément de façon symétrique par chacun
des constituants, puisque V peut se décomposer de la façon suivante :
- 46 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
1
AgAg
AgCu
CuCu
AgCu
Vij = ((Vij
− Vij ) + (Vij
− Vij ))
(3.5)
2
Cu
(3.6)
Vij = E Ag
ij + E ij
Ag
Cu
E ij et E ij représentent respectivement les tendances des éléments Ag et Cu à s’entourer
d’atomes de même nature ou non, ce qui n’a aucune raison d’être symétrique comme cela se
voit dans le cas simple suivant :
VijCuCu < VijAgCu < VijAgAg
(3.7)
Cu
Ag
E ij < 0 < E ij
(3.8)
III.1.1.2 - Calcul des interactions de paires TBIM dans le modèle SMA
Nous voulons déterminer les interactions de paires effectives Vnm d’une manière plus
complète à partir de calculs d’énergie totale dans un potentiel SMA, afin de tenir compte des
relaxations atomiques négligées dans la dérivation initiale du TBIM. Nous pouvons calculer
les différences d’énergie totale à partir de l’équation (3.1) dans le cas d’un processus
d’échange bien adapté {1}→{2}, c’est-à-dire en rapprochant deux impuretés A initialement
isolées en positions rièmes voisines dans une matrice d’atomes B.
1
E B(A − A ) − E tot B(2A∞ )
(3.9)
Vr = ∆E1-2 =
2 tot
où E tot B(A − A ) et E tot B(2A∞ ) correspondent à l’énergie totale du système dilué B(A)
[
]
[
]
{[
]
[
]}
respectivement dans les configurations finale et initiale.
Cette interaction dépend de la nature géométrique des sites (surface, volume) sur
lesquels l’échange est effectué. Dans le cas des systèmes avec une très faible différence de
taille, le TBIM a révélé un renforcement général des interactions de paires effectives à la
surface [67]. Malheureusement, il s’agit d’une analyse sur réseau rigide clairement inadaptée
au cas de forts désaccords de maille (e.g. Cu-Ag), auquel cas il faut prendre en compte la
relaxation atomique autour des impuretés, par exemple en Dynamique Moléculaire Trempée
(cf. §II.2.1).
Une fois que les EPI ont été déterminées de façon atomistique, il est possible de
vérifier le rôle des relaxations locale et globale (i.e. mettant en jeu une variation du paramètre
de réseau). On calcule pour cela l’énergie de solution mise en jeu lors du processus de
dissolution d’une seule impureté (Eq. (3.1)) et l’on compare les deux calculs à l’aide de l’éq.
(3.2) qui se simplifie dans ce cas puisque le terme de champ local disparaît en raison de
l’équivalence de tous les sites de volume :
∆E sol = − ∑ Z r Vr
(3.10)
couche r
III.1.2 - Application au système CuAg [96]
III.1.2.1 - Couplage "relaxation - ordre" en volume (effet de concentration)
La tendance à l’ordre ou à la séparation de phases dans le volume peut être
caractérisée par le calcul de l’énergie de solution (dissolution d’une seule impureté) ou bien
des interactions de paires effectives entre rièmes voisins résultant du rapprochement de deux
impuretés à partir de positions isolées ... les deux calculs devant être cohérents !
{p }
{p }
K
i init
K
i final
a) dissolution d’une seule impureté A dans une matrice B (Nimp = 1)
= N atomes B dans leur volume (B) et 1 A dans son volume (A)
= {1 at. A + (N-1) at. B} dans B(A) + 1 at. B dans B (volume)
- 47 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Pour une solution très diluée B(A) (ici une seule impureté A est plongée dans un
substrat B composé de N-1 atomes), l’éq. (3.1) s’écrit de la manière suivante :
B
∆Esol = E tot {B(A)}− E Acoh − (N − 1)Ecoh
(3.11)
Les valeurs correspondantes pour les deux limites diluées sont données dans le tableau III.1,
avant et après relaxation. Les valeurs positives de l’énergie de solution indiquent une
tendance à la séparation de phase, tandis que celles négatives révèlent une tendance à l’ordre.
On retrouve bien la tendance à la séparation de phase du système, les valeurs trouvées après
relaxation étant identiques aux valeurs expérimentales ... ce qui est la moindre des choses
puisque les paramètres du potentiel ont été ajustés aux énergies de solution dans les deux
limites diluées. Globalement l’énergie totale est bien reconstituée par la somme des deux
principales contributions (dues aux sites de l’impureté et de ses proches voisins). L’accord est
parfait dans le cas non relaxé et également dans le cas relaxé pour Ag (Cu), un peu moins bon
pour Cu (Ag) relaxé : la perturbation due à l’introduction de l’impureté est plus importante
quand celle-ci est plus grosse que les atomes de la matrice et les effets de la relaxation
s’étendent alors au-delà des premiers voisins. L’influence de la relaxation n’est pas essentielle
dans ce cas puisqu’elle fait décroître l’énergie de solution d’environ 30 % quand l’impureté
est la plus grosse, i.e. dans la limite Cu(Ag), et seulement de 15 % dans le cas opposé (comme
on pouvait s’y attendre avec l’asymétrie tension - compression du potentiel).
une impureté
deux impuretés
n
analyse locale
B(A)
"exacte"
préparée
− ∑ Z r Vr
r=1
A
sol
Cu(Ag)
Ag(Cu)
∆E
- 146
(31)
414
(453)
B
sol
∆E
482
(545)
- 138
(- 129)
app
sol
∆E
336
(576)
276
(324)
∆E sol
384
(576)
276
(324)
*
sol
∆E
- 816
(- 624)
- 174
(- 126)
n=1
132
(- 564)
72
(- 132)
n=4
270
(- 594)
90
(- 132)
Tableau III.1 : - (1 impureté) : Energie de dissolution d’une seule impureté ∆Esol dans les deux limites diluées,
calculée à partir de l’éq. (3.11) et comparée à sa valeur approchée ∆Esolapp donnée par l’éq. (3.14a). On donne
aussi sa décomposition en deux contributions venant du site d’impureté ( ∆EsolA ) et de ses premiers voisins ∆EsolB .
La valeur ∆E*sol correspond au cas où l’impureté a été "préparée" au volume atomique de la matrice avant sa
dissolution (voir § III.1.2.1.c).
- (2 impuretés) : reconstruction de l’énergie de solution ∆Esol à partir des interactions de paires
effectives calculées en rapprochant deux impuretés initialement isolées.
Les valeurs sont données en meV, celles entre parenthèses étant obtenues avant relaxation.
{p }
{p }
K
i init
K
i final
b) rapprochement de deux impuretés A dans une matrice B (Nimp = 2)
= 2 atomes A isolés dans une matrice B : B(2A∞)
= 2 atomes A voisins dans une matrice B : B(A-A)
Dans ce cas le calcul est effectué en utilisant l’éq. (3.9). Les interactions résultantes
sont données jusqu’aux 4ièmes voisins dans le tableau III.2. Un premier résultat surprenant est
que l’interaction entre seconds voisins est du même ordre de grandeur que celle entre
premiers voisins, contrairement à ce qui est généralement admis pour les systèmes cfc (du
moins sur réseau rigide) pour lesquels les interactions sont largement affaiblies au-delà des
premiers voisins [72,94,95]. C’est une conséquence du désaccord de maille entre les deux
éléments, qui introduit de forts effets de relaxation, puisque les interactions sont
complètement négligeables au-delà des premiers voisins dans la situation non relaxée (cf.
tableau III.2). De plus, dans ce dernier cas, même le signe de V1 est erroné ! Il faut donc tenir
- 48 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
compte de la relaxation pour retrouver la tendance du système à la séparation de phases de
volume dans les deux limites diluées (V1, V2 < 0). Toutefois, comme illustré dans le tableau
III.1, la tendance ainsi trouvée est plus faible que celle issue de la dissolution d’une impureté,
puisqu’une reconstruction de l’énergie de solution à partir des EPI conduit à une valeur plus
basse d’environ 30 % (270 meV au lieu de 384 meV) pour Cu(Ag) et de 70 % (90 meV au
lieu de 276 meV) pour Ag(Cu). La comparaison des calculs d’énergie de solution effectués
avec une ou deux impuretés est encore pire dans le cas non relaxé où elle conduit à des signes
opposés (cf. tableau III.1) : -594 meV au lieu de +576 meV pour Cu(Ag) et -132 meV au lieu
de +324 meV pour Ag(Cu) !
volume
(111)
(100)
(110)
Cu(Ag2)
V2
V3
- 19
-3
(1)
(1)
V1
- 11
(47)
3
(43)
2
(41)
9
(39)
V4
4
(0)
-9
(1)
-5
(0)
Ag(Cu2)
V2
V3
-5
0
(0)
(0)
V1
-6
(11)
-4
(9)
2
(7)
1
(6)
V4
1
(0)
-2
(0)
-3
(- 1)
Tableau III.2 : Variation des interactions de paires effectives en fonction du nombre de liaisons coupées. Les
EPI sont calculées jusqu’aux quatrièmes voisins en rapprochant deux impuretés initialement isolées, dans les
deux limites diluées. Les valeurs sont données en meV, celles entre parenthèses étant obtenues avant relaxation.
c) comment réconcilier les deux approches ?
Il est en fait difficile de comparer directement les énergies issues des deux
procédures : dissoudre une seule impureté (Eq. (3.11)) ou rapprocher deux impuretés isolées
(Eq. (3.9)). En effet, dans le premier cas l’atome d’impureté est initialement à son propre
paramètre de réseau de volume avant d’être plongé dans celui de la matrice, tandis que dans le
deuxième cas, les Vi sont calculés pour deux impuretés situées sur le réseau de la matrice dans
les deux états initial et final. Une comparaison entre les deux procédures serait possible si l’on
"préparait" dans le premier cas l’impureté seule au volume atomique de la matrice avant de la
dissoudre. Ceci implique de changer son énergie de cohésion dans l’éq. (3.11) de la façon
suivante :
Ag
Ag
Ag
Cu
E coh r0 = - 2,95 eV
⇒
E coh r0 = - 1,76 eV
Cu
E coh
{ }
{r }= - 3,50 eV
Cu
0
⇒
Cu
E coh
{}
{r }= - 3,05 eV
Ag
0
Les valeurs ci-dessus montre que "préparer" Ag au volume atomique de Cu est plus pénalisant
que l’inverse, en accord avec l’asymétrie tension - compression du potentiel. Les valeurs des
énergies de solution modifiées apparaissent dans le tableau (III.1) sous le nom ∆E*sol . L’accord
avec les énergies de solution calculées à partir de l’éq. (3.10) (calcul à deux impuretés) est
définitivement amélioré dans le cas non relaxé puisque maintenant à la fois le signe et les
valeurs absolues sont en très bon accord : ∆ E*sol = -624 meV au lieu de -594 meV pour
Cu(Ag) et ∆E*sol = -126 meV au lieu de -132 meV pour Ag(Cu). Malheureusement, cette
préparation détruit complètement l’accord (du moins) qualitatif précédemment obtenu dans le
cas relaxé puisque le signe est maintenant inversé : ∆ E*sol = -816 meV au lieu de +270 meV
pour Cu(Ag) et ∆E*sol = -174 meV au lieu de +90 meV pour Ag(Cu) ! Ceci illustre
l’importance des effets de relaxation sur les EPI et la limite de la cohérence entre les deux
- 49 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
procédures (une ou deux impuretés). Notons en revanche que cet échec pour relier les deux
procédures n’interdit pas l’étude de la variation de la tendance à l’ordre avec le nombre de
liaisons coupées dans le cadre de la seconde procédure, qui ne présente aucune ambiguïté liée
au changement du volume atomique de l’impureté entre les états initial et final.
III.1.2.2 - Ordre en surface (anisotropie, diagramme de phases 2D)
Afin de déterminer l’influence des liaisons coupées sur la tendance à l’ordre ou à la
séparation de phases, nous avons calculé l’évolution des deux EPI les plus importantes (V1,
V2) dans le volume, sur les faces (111), (100) et (110), pour Cu dilué dans Ag, référencé par
Ag(Cu2), et Ag dilué dans Cu, référencé par Cu(Ag2). Les calculs sont effectués en
rapprochant deux impuretés et en utilisant l’éq. (3.9).
V1 , V2
V1 , V2
50
10
Cu(Ag)
40
5
30
0
20
-5
Ag(Cu)
10
-10
Cu(Ag)
-15
0
-10
Ag(Cu)
7
(110)
8
(100)
9
(111)
10
(a)
11
Z1
12
(volume)
-20
7
(110)
8
(100)
9
(111)
(b)
10
11
Z1
12
(volume)
Figure III.1 : Variation des interactions de paires effectives entre premiers (V1 : traits épais, marqueurs pleins)
et seconds (V2 : traits fins, marqueurs vides) voisins en fonction du nombre de liaisons premiers voisins Z1, dans
les deux limites diluées Cu(Ag2) (ligne continue, cercles) et Ag(Cu2) (lignes en pointillés, carrés), dans les
situations non relaxée (a) et relaxée (b). Les valeurs sont exprimées en meV.
Les résultats correspondants, qui sont montrés dans le tableau III.2 et la figure III.1,
avant et après relaxation, appellent les commentaires suivants :
i) relaxer la structure est essentiel pour tenir compte d’une possible tendance à la
séparation de phases puisque, dans toutes les situations non relaxées, le potentiel utilisé donne
une tendance à l’ordre chimique local à la fois dans le volume et à la surface.
ii) couper de plus en plus de liaisons rend V1 de moins en moins négatif, ce qui
signifie que cela abaisse la tendance à la séparation de phases observée dans le volume, et
peut même l’inverser en une tendance à l’ordre chimique (V1 > 0) pour les surfaces les plus
ouvertes. Ce renversement apparaît avant l’orientation (111) pour Cu(Ag2), et entre les
orientations (111) et (100) pour Ag(Cu2). De plus, pour Ag(Cu2), V1 a environ la même valeur
pour l’orientation (111) et en volume. L’évolution des tendances de V1 et des miscibilités
respectives des atomes de Ag et Cu en fonction du nombre de liaisons coupées peut être
schématiquement illustrée de la façon suivante. Utilisons la relation entre la limite de
solubilité à une température donnée cs(T) et les interactions de paires effectives, via l’énergie
de solution (2.19), pour un système dilué à séparation de phases :
 ∑ Z r Vr 

(3.12)
c s (T ) ≈ exp  r
kT 


- 50 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Les résultats de la figure III.1 montrent que dans le volume il est plus facile de mélanger des
impuretés composées de petits atomes dans une matrice de plus gros que l’inverse, tandis que
le comportement opposé est observé à la surface, du moins dans le cas de l’orientation (111).
Le diagramme de phases à deux dimensions (2D) correspondant devrait présenter
simultanément une lacune de miscibilité dans la région Ag(Cu) et une grande miscibilité dans
la partie Cu(Ag). Ceci est illustré qualitativement dans la figure III.2, où nous comparons les
diagrammes de phases schématiques 3D et 2D qui pourraient être issus de l’éq. (3.12). Nous
insistons sur le fait que cette représentation est seulement schématique. En particulier, la
limite de la lacune de miscibilité (111) dans la région riche en Cu est arbitraire puisqu’il est
difficile d’obtenir une valeur exacte de la concentration en fonction des interactions.
L’évolution est dramatique pour les surfaces les plus ouvertes (100) et (110). Pour ces
orientations, la lacune de miscibilité 2D s’atténue complètement, conduisant à une tendance à
l’ordre avec la formation de composés 2D à basse température. Ces diagrammes de phases 2D
sont en accord avec les tendances expérimentales rappelées plus haut.
T
3-dim (volume)
2-dim (111)
2-dim (100)
Cu
Cu1-cAgc
c
Ag
Figure III.2 : Evolution schématique de la lacune de miscibilité dans Cu1-cAgc depuis le cas volumique à trois
dimensions (3D) jusqu’aux cas des surfaces à deux dimensions (2D) (dans lesquels c est la concentration de
surface) pour les orientations (111) et (100). Le dernier cas correspond à une miscibilité dans toute la gamme de
concentration. Notons l’asymétrie différente des lacunes de miscibilité du volume et de la surface (111).
iii) dans le but de vérifier que le renversement de signe observé pour V1 est bien la
signature d’un changement dans la tendance du système depuis la séparation de phases
jusqu’à l’ordre, on doit étudier l’évolution de V2 en fonction du nombre de liaisons coupées
(voir tableau III.2 et figure III.1). Notons que nous avons omis V2 pour la face (111) puisque
V2 relie la surface à la première sous-couche et devrait donc être comparée à V1 d’intercouche
qui n’est pas calculée ici. Comme nous pouvons le voir, V2 varie dans le cas relaxé de la
même manière que V1 en fonction du nombre de liaisons coupées, mais sans changement de
signe (V2 < 0). Par conséquent, V2 ne change pas le comportement global piloté par la
variation de V1. De plus, son signe négatif renforce certes la tendance à la séparation de
phases quand V1 est aussi négatif, mais aussi celle à l’ordre quand V1 devient positif. En effet
dans ce dernier cas, optimiser le nombre de paires hétéroatomiques AB dans les positions
premières voisines et homoatomiques AA et BB en secondes voisines est totalement cohérent
avec des phases ordonnées sur réseau cfc [61].
iv) les effets sont plus importants dans Cu(Ag2) que dans Ag(Cu2), i.e. quand les
atomes d’impureté sont plus grands que ceux de la matrice.
- 51 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
III.1.2.3 - Analyse locale
Les points essentiels liés à la rupture des liaisons que nous voulons analyser peuvent
être résumés de la façon suivante :
i) influence de la relaxation : sans relaxation, le système présente une tendance à
l’ordre dans tous les cas, dans le volume et à la surface quelle que soit la limite diluée. Après
relaxation, nous retrouvons la tendance à la séparation de phases dans le volume et une petite
tendance à l’ordre à la surface, du moins pour les surfaces ouvertes. Il est alors nécessaire
d’analyser localement sur quel site la relaxation induit le principal effet : est-ce pour les
impuretés isolées ou adjacentes et dans chaque cas, est-ce sur le site d’impureté ou sur ceux
des voisins ?
ii) influence des liaisons coupées : plus le nombre de liaisons coupées est important,
plus la tendance à l’ordre est grande, mais seulement après que la relaxation ait été prise en
compte.
iii) influence de la concentration : elle est un peu déroutante en ce qui concerne V1
puisqu’elle ne joue aucun rôle dans le cas de la surface (100) (du moins dans le cas relaxé),
tandis qu’elle agit inversement pour le volume d’un côté et les surfaces (111) et (110) de
l’autre : dans le volume la tendance à la séparation de phases est augmentée quand l’impureté
est l’atome le plus grand, tandis que pour les faces (111) et (110) c’est la tendance à l’ordre
qui est augmentée dans le même cas.
Dans le but de donner des réponses qualitatives aux questions posées ci-dessus, nous
avons isolé les contributions principales à la tendance à l’ordre du système dans le but de faire
une analyse locale. Pour cela, nous supposons que les énergies entre les configurations initiale
et finale de chaque processus diffèrent seulement pour les sites occupés par l’impureté, ∆ E1A−2 ,
et ses plus proches voisins (seuls les premiers voisins pour le volume ou les surfaces
compactes (111) et (100), mais des voisins plus distants pour la surface plus ouverte (110)),
∆E1B−2 . Dans ce cas, le bilan énergétique exacte donné par les équations (3.1) et (3.9) dans le
cas dilué B(A) peut être approximé par :
A
B
∆E1app
(3.13)
−2 = ∆E1− 2 + ∆E1 −2
Nous allons maintenant détailler ces contributions, d’abord dans le cas de la
dissolution d’une impureté unique, puis dans celui du rapprochement de deux impuretés
initialement isolées.
a) dissolution d’une seule impureté A dans une matrice B (Nimp = 1)
Dans ce cas, l’éq. (3.13) s’écrit :
app
A
B
∆E sol = ∆Esol + ∆Esol
(3.14a)
A
A
A
∆E sol = E n imp {B(A )} − E coh {A}
(3.14b)
∆E Bsol = ∑ E Bn vois {B(A)} − Z1 E Bcoh {B}
(3.14c)
n vois
dans lesquelles E Bn vois {B(A)} est l’énergie locale d’un premier voisin B (noté nvois) de
l’impureté isolée A dans l’état final. Ces contributions sont détaillées pour les deux limites
diluées dans la figure III.3 et le tableau III.1, dans lequel nous comparons la valeur
approximée de l’énergie de solution issue de cette analyse locale à celle exacte dérivée de
l’éq. (3.11). L’énergie totale est bien reproduite par la sommation des deux contributions
principales (l’impureté et ses premiers voisins). L’accord est parfait avant relaxation. Après
relaxation, il reste excellent pour Ag(Cu), mais un peu moins satisfaisant pour Cu(Ag). En
effet, la perturbation induite par l’impureté est plus importante quand elle est plus "grosse"
que les atomes de la matrice, auquel cas les effets de relaxation s’étendent au-delà des
premiers voisins. De cette analyse locale, deux principaux comportements apparaissent.
- 52 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Tout d’abord du point de vue chimique, il y a une forte asymétrie entre les deux
espèces en ce qui concerne leur propension à s’entourer par des atomes de nature identique ou
différente. Les atomes d’Ag forment préférentiellement des liaisons Ag-Cu mais pas les
atomes de Cu, conséquence du très fort caractère cohésif de Cu par rapport à Ag. En effet, à
partir d’une simple analyse en interactions de paires, on trouverait :

V1CuCu < V1AgAg < 0
CuCu
− V1CuAg < − V1AgAg − V1CuAg < 0
 ⇒ V1
CuCu
AgAg
CuAg
+ V1
− 2V1
< 0
V1
ce qui veut dire qu’une paire Cu-Cu est toujours préférée à une paire Cu-Ag. Le bilan est plus
subtil pour le métal moins cohésif (Ag) qui peut préférer ou non être lié à l’autre espèce. Ici
on voit que, même avant relaxation, un atome d’Ag n’est que faiblement pénalisé lorsque l’on
transforme toutes ses liaisons Ag-Ag en Ag-Cu (31 meV). Dans l’état non relaxé, l’impureté
Ag est comprimée au volume atomique de Cu, ce qui est énergétiquement très défavorable.
Après relaxation cette contrainte en compression est partiellement réduite : la distance Ag-Cu
augmente de 2,56 Å à 2,62 Å, qu’il faut comparer à r0CuAg = 2,72 Å. C’est néanmoins suffisant
pour produire un environnement local Cu très favorable pour l’impureté Ag (-146 meV).
Ainsi, la tendance à la séparation de phases est assurée par les 12 atomes Cu voisins qui
n’aiment pas former des liaisons Cu-Ag (+482 meV). L’autre limite est plus claire puisque
entourer une impureté de Cu par des atomes d’Ag est fortement pénalisant (> 400 meV),
quelle que soit la relaxation (ici une faible contraction de 2,89 Å à 2,85 Å), ce qui n’est pas
contrebalancé par le faible gain en énergie sur ses 12 voisins Ag (-138 meV). Dans les deux
cas, l’élément le plus cohésif (Cu) est responsable de la tendance à la séparation de phases.
V app = - 48 meV , V exact = - 48 meV
-11
46
-11
46
46
-11
V
app
-146
-11
40
40
exact
= - 23 meV
-11
40
40
-11
= - 23 meV , V
après relaxation
40
40
-11
-11
V app = - 28 meV , V exact = - 32 meV
40
= - 27 meV
-11
453
46
40
exact
-11
46
31
46
= - 27 meV , V
app
avant relaxation
46
46
V
-11
-11
414
-11
-11
-11
-11
Figure III.3 : Contributions à la valeur approchée ∆Esolapp de l’énergie de dissolution d’une impureté dans les
deux limites diluées (gauche : Cu(Ag) et droite : Ag(Cu)) venant du site d’impureté ∆EsolA et de ses premiers
voisins ∆ EsolB / 12, avant (haut) et après (bas) relaxation.
Du point de vue de l’effet de taille, l’impureté Ag n’aime pas être comprimée au
volume atomique de Cu, ce qui induit de forts effets de relaxation dans la limite diluée
Cu(Ag). Au contraire Cu accepte aisément d’être dilaté au paramètre de réseau d’Ag, de sorte
que la relaxation ne joue pas de rôle essentiel dans la limite opposée Ag(Cu). Ceci implique
que la contribution des voisins plus distants devrait être plus grande dans le premier cas que
dans le second, ce qui est confirmé dans le tableau III.1.
- 53 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
b) rapprochement de deux impuretés A dans une matrice B (Nimp = 2)
Dans ce processus, l’état initial met en jeu deux impuretés A isolées occupant des
positions éloignées, soit dans le volume, soit à la surface. Dans l’état final, une de ces
impuretés a été échangée avec un voisin B (1er, 2nd, ... en fonction de l’interaction considérée)
de l’autre impureté. Dans ce cas, les deux contributions de l’éq. (3.13) s’écrivent :
A
∆E1−2
= E An imp {B(A2 )}− E An imp {B(A)}
(3.15)
dans laquelle E An imp {B(A2 )} (resp. E An imp {B(A)}) est l’énergie du site d’impureté dans l’état
final (resp. initial) ;
B
B
ÝÝB + ∆Eˆ B
∆E1−2
= ∆E˜ 1−2
+ ∆E
(3.16a)
1−2
1− 2
avec :
˜B =
∆E
1 −2
∑ (E {B(A )}− E
n vois =1, Z˜
B
n vois
2
B
n vois
{B(A)})
  E B* {B(A )}+ E B 

n
2
éch
∆Ý
EÝ = ∑   vois
 − E Bn vois {B(A)}
2
n vois =1, Ý
ZÝ 


B
B
B
ˆ = E − E {B(A)}
∆E
B
1−2
1 −2
(a)
(
éch
n vois
)
(3.16b)
(3.16c)
(3.16d)
(b)
Figure III.4 : Illustration schématique (vue de dessus) des diverses contributions au bilan énergétique ∆E1-2
(Eqs. ( 3.15) – (3.16a-d)) impliquées lorsque l’on rapproche (b) deux impuretés initialement isolées (a) dans une
couche (100). Les cercles (carrés) représentent les atomes (en dessous ou au-dessus) de cette couche. Les petits
cercles et carrés réfèrent aux atomes non impliqués (dans notre hypothèse locale) dans le processus. Les atomes
affectés par le processus sont de taille soit moyenne (atomes B de la matrice) soit grande (impureté A) : les
ˆ B , les cercles et carrés vides
grands cercles noirs contribuent à ∆EA1−2 , les cercles noirs de taille moyenne à ∆ E
1− 2
˜ B et enfin les croix de taille moyenne à ∆ E
Ý
ÝB .
de taille moyenne à ∆ E
1− 2
1− 2
Dans l’état initial, on note E Bn vois {B(A)} l’énergie locale d’un voisin B (appelé nvois) de
l’impureté isolée A : il y a Z1 sites avec la même énergie dans le calcul pour le volume tandis
qu’il faut considérer deux types différents de sites (nvois) dans le cas de la surface
correspondant aux liaisons intracouches ou intercouches. De plus, dans le dernier cas,
restreindre l’analyse aux premiers voisins est seulement justifié pour les surfaces compactes
Ý
Ý + 1), qui
(111) et (100). On trouve alors dans l’état final trois sites inéquivalents (Z1 = Z˜ + Z
sont définis dans la figure III.4 pour le volume et la surface (100) avec une généralisation
évidente à l’orientation (111), et qui correspondent aux trois termes suivants :
i) Z˜ sites B restent liés à seulement une des deux impuretés A, avec l’énergie
B
E n vois {B(A2 )}. Tous ne sont pas équivalents, même dans le volume. Leur contribution au bilan
énergétique est alors donnée par l’éq. (3.16b),
- 54 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Ý
Ý/2 sites B sont liés aux deux impuretés, avec une énergie E B {B(A )}, auquel
ii) Z
n vois
2
Ý
Ý
cas le bilan dans l’éq. (3.16c) nécessite de tenir compte des autres Z /2 qui ont été placés loin
de l’impureté avec l’énergie E Béch = E Bcoh (resp. E Béch = E Bsurf ) lorsque la procédure est réalisée
dans le volume (resp. à la surface),
iii) finalement un voisin B a été remplacé par la seconde impureté, et est alors renvoyé
loin des deux impuretés avec la même énergie E Béch qu’au-dessus, conduisant à l’éq. (3.16d).
*
B(A2)
Cu(Ag2)
Ý
Ý
Z˜ , Z
volume
7, 4
(111)
5, 3
(100)
5, 2
(110)
9, 4
volume
7, 4
(111)
5, 3
(100)
5, 2
(110)
9, 4
Ag(Cu2)
A
1−2
∆E
28
(91)
28
(79)
26
(75)
21
(68)
- 17
(- 1)
- 16
(3)
-7
(5)
-4
(7)
˜
∆E
B
1−2
28
(0)
15
(0)
10
(0)
22
(0)
7
(0)
5
(0)
0
(0)
4
(0)
analyse locale
ÝÝB
ˆB
∆E
∆E
1−2
1−2
- 24
(0)
-9
(3)
2
(0)
-9
(0)
-8
(0)
-6
(0)
0
(0)
-2
(0)
- 40
(- 46)
- 32
(- 37)
- 32
(- 35)
- 22
(- 30)
12
(11)
10
(4)
10
(2)
5
(- 2)
exacte
app
1
V
-8
(45)
2
(45)
6
(40)
12
(38)
-6
(10)
-7
(7)
3
(7)
3
(5)
V1
- 11
(47)
3
(43)
2
(41)
9
(39)
-6
(11)
-4
(9)
2
(7)
1
(6)
Tableau III.3 : Valeurs (en meV) des diverses contributions à l’EPI V1app (Eq. (3.13)) : ∆ E1A−2 (Eq. (3.15)) et
ˆ B , ∆E
˜ B , ∆E
Ý
ÝB (Eq. (3.16)), calculées en rapprochant deux impuretés initialement isolées. Les valeurs
∆E
1 −2
1 −2
1 −2
"exactes" de V1 (Eq. (3.8)) sont aussi rappelées. Les valeurs entre parenthèses sont obtenues avant relaxation.
<110>
<1 1 0>
Figure III.5 : Illustration schématique (vue de côté) des diverses contributions au bilan énergétique ∆E1-2 (Eqs.
(3.15) – (3.16a-d)) impliquées lorsque l’on rapproche (bas) deux impuretés initialement isolées (haut) dans une
couche (110). Les notations sont définies dans la figure III.4. Ici les marqueurs gris indiquent les contributions
supplémentaires venant des atomes situés au-delà des premiers voisins des impuretés.
- 55 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Rappelons que cette analyse locale est restreinte ici aux premiers voisins de l’impureté,
ce qui est insuffisant pour la surface la plus ouverte (110) pour laquelle la perturbation s’étend
au-delà de cet ordre. Dans ce cas une analyse détaillée des contributions des voisins plus
distants révèle que certains d’entre eux (voir figure III.5) ont encore une influence
significative. Nous prendrons alors aussi en compte ces voisins pour cette orientation dans le
Ý
Ý
cadre de l’analyse locale. Les valeurs correspondantes des nombres de coordination Z˜ et Z
sont données dans le tableau III.3.
b.1 - volume
Ces contributions sont illustrées sur la figure III.6a et reportées dans le tableau III.3.
La reconstruction de V1 à partir de ces contributions locales ( V1app ) est très satisfaisante, à la
fois dans les cas non relaxé et relaxé. Ceci permet de tirer des conclusions générales.
V app = + 46 meV , V exact = + 47 meV V app = + 12 meV , V exact = + 11 meV
V
app
= 43 meV , V
exact
= 43 meV
1
contraint
1
0
V
app
= 9 meV , V
exact
= 8.5 meV
0
contraint
0
0
91
-1
-46
11
0
0
exact
= - 11 meV
1
0
exact
= - 5.5 meV
V
app
= 3 meV , V
1
-6
1
exact
4
-17
2
-6
12
exact
= 41 meV
-1
V
app
= 9 meV , V
exact
exact
-35
-1
= 2 meV
app
= 39 meV , V
exact
= 39 meV
V
app
= 6 meV , V
exact
= 6 meV
contraint
0
5
68
2
0
7
-30
-2
0
0
V
app
= 4 meV , V
exact
= 2 meV
V app = 12 meV , V exact = 9 meV
relaxé
-32
0
8
0
-7
3
0
V app = 3 meV , V exact = 0.5 meV
relaxé
-1
1
3
V
0
1
2
-3
1
26
1
= 7 meV
0
3
2
10
1
-5
1
-1
= 7 meV , V
0
-16
(b) : surface (111)
0
app
-1
4
-32
2
0
V
-3
6
contraint
75
= - 4 meV
exact
1
1
28
6
1
= 40 meV , V
= - 6 meV , V
relaxé
-5
(a) : volume
app
app
-2
1
1
V
V
-2
1
-40
0
= 2.5 meV
2
1
28
9
4
1
V app = - 8.5 meV , V
relaxé
4
3
-37
1
V app = - 9 meV , V
0
79
10
0
4
21
-12
9
-6
8
-1
1
-8
8
1
0
-22
2
0
5
1
1
-1
0
-1
0
1
5
-4
-3
0
3
-3
0
-1
-1
(c) : surface (100)
(d) : surface (110)
Figure III.6 : Contributions (en meV) à la valeur approchée ∆Esolapp de l’énergie lors du rapprochement de deux
impuretés en volume (a) et en surface (b, c, d) dans les deux limites diluées (gauche : Cu(Ag) et droite : Ag(Cu))
venant du site d’impureté ∆EsolA et de ses premiers voisins ∆EsolB , avant (haut) et après (bas) relaxation.
Tout d’abord, on retrouve ici un comportement similaire à celui trouvé lors de la
dissolution d’une seule impureté en ce qui concerne la propension des atomes d’Ag à former
des liaisons Ag-Cu et de Cu à ne pas les former. En effet, les contributions respectives de
- 56 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
A
B
l’impureté ∆E1−2
et de ses voisins ∆ E1−2
présentent des signes opposés à ceux trouvés dans le
cas de la dissolution d’une seule impureté, du moins après relaxation, ce qui est en accord
avec l’évolution inverse du nombre de liaisons A-A depuis l’état initial jusqu’à l’état final
entre les deux procédures, puisque ce nombre croît maintenant de 0 à 1 alors qu’il décroissait
de 12 à 0 dans la dissolution.
Un autre résultat important est que la contribution majoritaire dans le terme des
B
ˆ B (Eq. (3.16d)), qui tient compte de l’expulsion dans la
est la troisième ∆ E
voisins ∆E1−2
1−2
matrice du voisin B initial de la première impureté qui a été remplacé par la seconde impureté
dans l’état final. En effet, même si les deux autres contributions sont du même ordre de
˜ B pour les voisins B qui gardent un seul lien avec l’impureté durant la
grandeur ( ∆ E
1−2
ÝÝB pour ceux qui ont dans l’état final deux liens ou ont été envoyés dans le
procédure et ∆ E
1 −2
volume), elles ont des signes opposés et s’annulent presque l’une avec l’autre (voir tableau
˜ B + ∆E
ÝÝB ~ 0).
III.3 : ∆ E
1 −2
1−2
Finalement, on retrouve, comme attendu à partir d’arguments développés au-dessus,
que la tendance à la séparation de phases de volume résulte de la répulsion de Cu pour Ag qui
˜ B +∆ E
ÝÝB ~ 0, ceci
est plus forte que l’attraction de Ag pour Cu ! Prenant en compte que ∆ E
1−2
1−2
A
B
ˆ
ˆB | <
peut s’exprimer par | ∆ E1−2 | > |∆ E1−2 | dans la limite diluée Cu(Ag2) tandis que | ∆ E
1−2
A
|∆ E1−2
| dans celle Ag(Cu2).
Notons que l’effet de la relaxation sur le site d’impureté est moins dramatique que
pour la dissolution d’une seule impureté, ce qui était prévisible puisque cette fois, l’impureté a
été préparée au volume de la matrice dans les deux états initial et final. De plus, on trouve que
l’influence de la relaxation sur la contribution de l’impureté est la plus importante quand
l’impureté est l’atome le plus gros (Ag).
b.2 - surfaces
Les variations des différentes contributions en fonction du nombre de liaisons coupées
(∆Z1) sont données dans le tableau III.3 et illustrées dans la figure III.7. Il faut toutefois faire
attention car ces tableaux sont très simplificateurs dans la mesure où, contrairement au cas du
volume, il y a parmi les voisins de nombreux sites inéquivalents (en particulier suivant qu’ils
sont en surface ou dans le plan d’en dessous), ce qui apparaît dans les figures III.6b-d. De
plus, ces tableaux ne décrivent qu’une analyse locale en la limitant aux premiers voisins de
l’impureté, ce qui est probablement insuffisant pour la surface (110). On voit en effet sur la
figure III.6d que, dans ce dernier cas, les contributions jusqu’aux quatrièmes voisins sont
presque aussi importantes, surtout dans l’alignement de la paire d’impuretés (anisotropie
importante), ce qui explique le relatif désaccord entre valeurs approchée et exacte révélé par
le tableau III.3. Il est tentant d’expliquer cette évolution progressive, de la démixtion vers
l’ordre quand ∆Z1 augmente, comme venant du fait que couper des liaisons affaiblit plus la
répulsion de Cu pour Ag que l’attraction de Ag pour Cu, au point même d’arriver à inverser la
tendance pour les surfaces les plus ouvertes.
En effet, on peut voir que, dans les deux cas dilués Cu(Ag2) et Ag(Cu2), la
A
ˆ B pour Ag(Cu2)) est presque indépendante de
pour Cu(Ag2) et ∆ E
contribution de Ag ( ∆ E1−2
1−2
ˆ B | dans Cu(Ag2) et | ∆ E A | dans
Z1, tandis que l’importance de la contribution de Cu (| ∆ E
1−2
1−2
Ag(Cu2)) décroît quand Z1 décroît. Ainsi, l’effet d’ordre de surface est principalement piloté
par la contribution de Cu ! Il en résulte que la somme de ces deux termes se comporte avec Z1
comme la contribution de Cu, décalée d’une quantité positive presque constante. Cela doit
conduire à un changement de signe (et aussi de tendance) à la fois dans Cu(Ag2) et Ag(Cu2),
pourvu que d’une part la contribution positive due à Ag soit suffisamment grande (ce qui est
le cas pour Ag(Cu2) mais pas pour Cu(Ag2)), et d’autre part que les deux autres contributions
- 57 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
˜ B + ∆E
ÝÝB ~ 0, ce qui est le cas dans Ag(Cu2) où ces deux termes
soient négligeables ( ∆ E
1−2
1−2
˜ B + ∆E
ÝÝB ~ cst, ce qui est le cas
proviennent d’atomes d’Ag), ou du moins varient peu ( ∆ E
1−2
1−2
dans Cu(Ag2) où ces deux termes proviennent d’atomes de Cu). Dans ce dernier cas, la
constante, petite et positive, vient donc s’ajouter au décalage résultant du terme dominant, dû
à l’atome de Cu voisin de la première impureté d’Ag qui a été remplacé par la deuxième
impureté d’Ag, qui favorise l’ordre quel que soit Z1.
∆E
∆E
Cu(Ag2)
1-2
30
1-2
20
20
10
10
0
0
-10
-10
-20
-20
-30
-30
-40
-50
Ag(Cu2)
30
-40
Z
7
(110)
8
(100)
9
(111)
11
10
12
(volume)
1
-50
Z
7
(110)
8
(100)
9
(111)
10
11
1
12
(volume)
Figure III.7 : Variation (en meV) de la valeur exacte de V1 (points noirs, traits pleins) donnée par l’éq. (3.9), et
de sa valeur approchée V1app (cercles ouverts, ligne tiretée) donnée par l’éq. (3.13) en fonction du nombre de
liaisons premiers voisins Z1, dans les deux limites diluées Cu(Ag2) (gauche) et Ag(Cu2) (droite). Nous donnons
aussi la décomposition de V1app en ses contributions (lignes pointillées) définies par les éqs. ((3.15)-(3.16a-d)) et
ˆ B (∇) et la somme ( ∆ E
˜ B + ∆E
Ý
ÝB ) (…).
illustrées dans la figure III.4 : ∆EA (∆), ∆ E
1−2
1−2
1−2
1−2
En résumé, l’influence de la surface est de décroître la tendance à la séparation de
phases (ou d’augmenter la tendance à l’ordre), principalement en raison du rôle de Cu. Reste à
savoir si un changement de signe (donc une inversion totale de tendance) est possible, et si oui
pour quelle valeur critique ∆Zc du nombre de liaisons coupées. La réponse dépend d’une part
de l’importance de la contribution positive due dans les deux cas à Ag (à laquelle vient
s’ajouter dans le cas dilué Cu(Ag2) la contribution des autres voisins de l’impureté), et d’autre
part de la contribution du terme dominant de Cu tendant à faire démixer le système. Ainsi, les
équations (3.15) et (3.16a-d) peuvent alors se réécrire de la façon suivante :
∆E1-2 = ∆ECu(Z1) + ∆EAg + ∆Evois
(3.17)
où ∆ECu et ∆EAg rendent compte des contributions respectives des atomes de Cu et Ag
directement impliqués dans la formation de la paire (sur l’un des deux sites d’impureté) tandis
que ∆Evois vient de la couche des autres voisins de la première impureté.
Cu(Ag2)
∆ECu
∆EAg
∆Evois
∆E1-2
Zc
"exacte"
ˆB <0
∆E
1−2
A
∆ E1−2 > 0
ÝÝB
˜ B + ∆E
∆E
1−2
1−2
9,5
Ag(Cu2)
ajustement
- 3 - 3,1 Z1
+ 27
+8
32 - 3,1 Z1
10,2
"exacte"
A
∆ E1−2 < 0
ˆB >0
∆E
1−2
B
˜
ÝÝB
∆E + ∆E
1−2
1−2
8,5
ajustement
12 - 2,6 Z1
+ 10
-1
21 - 2,6 Z1
8,2
Tableau III.4 : Décomposition en premiers voisins des EPI approximées (V1 = ∆E1-2) en leurs contributions (en
meV) relatives à Cu et Ag (Eq. (3.17)). La colonne "exacte" donne la correspondance avec le tableau III.3, et la
colonne de l’ajustement donne les valeurs ajustées correspondantes. Zc est le nombre critique de premiers
voisins correspondant au changement depuis la tendance à la séparation de phases jusqu’à l’ordre.
- 58 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
A
Comme nous pouvons le voir dans le tableau III.4, ∆ECu (égal à ∆ E1−2
dans Ag(Cu2) et
B
ˆ
à ∆ E1−2 dans Cu(Ag2)) est négatif : il pilote donc la tendance à la séparation de phases. Au
A
ˆ B dans Ag(Cu2)) est positif : il favorise
contraire, ∆EAg (égal à ∆ E1−2
dans Cu(Ag2) et à ∆ E
1−2
˜ B dans Ag(Cu2) et
ÝÝB + ∆ E
donc la tendance à l’ordre. Le troisième terme ∆Evois (= ∆ E
1−2
1−2
Cu(Ag2)) est négligeable dans Ag(Cu2) ou augmente légèrement la dernière contribution
positive dans Cu(Ag2). Seule la première contribution dans l’éq. (3.17) dépend de façon
significative de Z1 (|∆ECu | ↓, ∆EAg ~ cste, ∆Evois ~ cste, quand Z1 ↓) de sorte que :
∆E12 = ∆ECu(Z1) + cte (> 0)
(3.18)
D’après les courbes de la figure III.8a, les pentes de ∆ECu(Z1) sont à peu près les mêmes dans
les deux limites (cf. ajustements linéaires du tableau III.4). Ces pentes étant négatives, on
s’attend à une inversion de signe de ∆E1-2 (i.e. une inversion de tendance de la séparation de
phases à l’ordre) quand on coupe de plus en plus de liaisons. Le fait que la contribution
positive soit plus importante dans le cas Cu(Ag2) implique que ∆E1-2 s’annulera pour une
coordinence critique Zc plus grande que dans le cas Ag(Cu2). Plus précisément, on voit
d’après le tableau III.4 que :
* Cu(Ag2) : Zc ≈ 10,2 (le calcul exact donnait Zc ≈ 9,5)
* Ag(Cu2) : Zc ≈ 8,2 (le calcul exact donnait Zc ≈ 8,5)
Comme on le voit, ces valeurs "ajustées" de la coordinance critique Zc sont en bon accord
avec les valeurs exactes de la figure III.1. Ainsi, on retrouve Zc > 9 pour Cu(Ag2), i.e. "avant"
l’orientation (111), et Zc < 9 pour Ag(Cu2), i.e. "après" l’orientation (111).
∆ E1-2
∆ E1-2
∆ EAg = +27 meV
30
20
30
20
∆ Evois = +8 meV
10
0
0
-10
-10
-20
-20
-30
-30
-40
-50
7
(110)
∆ EAg = +10 meV
10
∆ Evois = -1 meV
-40
Z
8
(100)
9
(111)
10
11
1
12
(volume)
-50
7
(110)
Z
8
(100)
9
(111)
10
11
1
12
(volume)
Figure III.8 : Variation de la valeur exacte de V1 (+, traits pointillés) donnée par l’éq. (3.9), et de ses valeurs
approchées V1app (z, trait fin) données par l’éq. (3.13) en fonction du nombre de liaisons premiers voisins Z1,
dans les deux limites diluées Cu(Ag2) (à gauche) et Ag(Cu2) (à droite). Nous donnons aussi la décomposition de
ˆ B (∇, lignes
V1app en des contributions définies par les éqs. ((3.15)-(3.16a-d)) : ∆EA1−2 (∆, trait épais), ∆ E
1−2
ˆ B ) ({). Nous avons représenté les
˜ B + ∆E
Ý
ÝB ) (…, pointillés) et ( ∆EA + ∆ E
tiretées) et les sommes ( ∆ E
1−2
1−2
1−2
1−2
ajustements de ces énergies par des constantes. Les valeurs sont exprimées en meV.
III.1.2.4 - Conclusion
On peut tirer deux grandes leçons de cette étude. La première est que, en présence
d’un fort désaccord de maille entre les constituants d’un alliage dilué ayant tendance à la
démixtion, contraindre les impuretés au paramètre de maille de la matrice induit une tendance
à l’ordre chimique, plus forte pour une contrainte en compression qu’en tension. Relaxer le
système est donc nécessaire pour rendre compte de sa tendance chimique. Si l’on introduit
ensuite une surface, celle-ci peut inverser à son tour la tendance à la séparation de phases
volumique en une tendance à l’ordre en surface pourvu qu’un nombre suffisant de liaisons
- 59 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
soit coupé. Ainsi, dans le système Cu-Ag, nous avons trouvé que cette inversion, qui dépend
de la concentration, apparaît pour la face (111) dans la limite diluée Cu(Ag) et pour la face
(100) dans la limite Ag(Cu). Ce comportement général peut être relié aux observations faites
par STM qui montrent que quelques atomes d’Ag se mélangent facilement dans une couche
de Cu (100) tandis que quelques atomes de Cu ne le font pas dans une couche d’Ag (111)
[92]. En effet, tant que V1 reste négatif, l’abaissement de sa valeur absolue correspond à une
augmentation de la limite de solubilité d’après l’éq. (3.12), et dès que V1 devient positif, le
mélange est facile dans toute la gamme de concentration.
Ce comportement peut être qualitativement compris en termes de propension générale
des atomes d’Ag à former des liaisons Ag-Cu au contraire des atomes de Cu. Ainsi, la
tendance à la séparation de phases de volume résulte de la répulsion qu’a Cu pour Ag qui est
plus forte que l’attraction qu’a Ag pour Cu. L’inversion de tendance chimique quand le
nombre de liaisons coupées augmente, est attribuable au fait que couper des liaisons abaisse
plus la répulsion de Cu pour Ag que l’attraction d’Ag pour Cu. L’ordre de surface est donc
principalement piloté par la contribution des atomes de Cu. Notons toutefois que cette
conclusion n’est valable que si la relaxation est prise en compte, ce qui confirme le fort
couplage entre effet de taille et effet chimique.
III.1.3 - Application au système CuPd
III.1.3.1 - Couplage "relaxation - ordre" en volume (effet de concentration)
a) Dissolution d’une impureté
Il est possible comme dans le cas de Cu-Ag de faire une analyse locale afin de tester la
généralité de l’argument "A aime B mais B n’aime pas A" ! En effet, si la propension de A à
ne pas aimer B vient de ce que A est plus petit, ou encore que A est du Cu, on devrait
retrouver la même tendance, à savoir que "Cu n’aimerait pas Pd alors que Pd aimerait Cu".
L’argument basé sur la cohésion conduirait à la conclusion inverse puisqu’il faut revoir
l’argument développé dans CuAg. En effet, d’une part les ordres de cohésion sont inversés :
Ag
Cu
Pd
0 > E coh (= − 2,95 eV) > E coh (= − 3,5 eV) > E coh (= − 3,94 eV)
et d’autre part le système a tendance à l’ordre de sorte que l’argument simple d’interactions de
paires se réécrit :
CuCu
PdPd

0 > V1
> V1
CuCu
CuPd
PdPd
CuPd
− V1 > V1 − V1
>0
 ⇒ V1
CuCu
PdPd
CuPd
V1
+ V1 − 2V1
> 0
Ainsi Cu "aime" toujours Pd alors que, suivant les valeurs relatives des interactions,
Pd peut "aimer" ou non Cu. D’après les valeurs numériques du tableau III.5, on retrouve bien
d’une part que "Cu aime toujours beaucoup Pd" (≈ - 500 meV), qu’il soit élément d’impureté
ou de la matrice. Au contraire, la propension manifestée par Pd est beaucoup plus faible (≈ ±
30 meV) et s’inverse suivant que Pd est l’impureté (il n’aime pas Cu) ou le composant de la
matrice (il aime un peu Cu).
b) Rapprochement de deux impuretés
Si l’on passe ensuite au calcul des interactions de paires de volume en fonction de
l’éloignement des voisins, en rapprochant deux impuretés initialement isolées, on obtient les
valeurs données dans le tableau III.6 et illustrées dans la figure III.9. Le résultat essentiel est
un comportement plus conforme au TBIM, avec un amortissement rapide des interactions de
paires qui sont négligeables au-delà des premiers voisins. En revanche l’effet de la relaxation
est plus sensible que dans le cas d’une seule impureté (surtout pour la grosse impureté) : il
réduit de façon notable la tendance à l’ordre. Enfin, il n’est pas possible de reconstruire
- 60 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
l’énergie de solution par le terme Z1V1, comme on le voit sur le tableau III.5, puisqu’on
obtient ainsi des énergies bien trop grandes ! On a donc le même problème que dans CuAg, le
calcul à partir des V donnant toujours une énergie de solution décalée négativement par
rapport à celle issue du calcul à une impureté.
B(A)
Cu(Pd)
Pd(Cu)
une impureté
analyse locale
"exacte"
A
B
app
∆ E sol
∆E sol
∆E sol
∆E sol
42
- 600
- 558
- 561
(133)
(- 599)
(- 466)
(- 497)
- 424
- 23
- 447
- 461
(- 407)
(- 25)
(- 432)
(- 443)
deux impuretés
expérience
exp
∆E sol
- 540
- 450
-Z1V1
- 1464
(- 2112)
- 816
(- 984)
Tableau III.5 : - (1 impureté) : Energie de dissolution d’une seule impureté ∆Esol dans les deux limites diluées,
calculée à partir de l’éq. (3.11) et comparée à sa valeur approchée ∆Esolapp donnée par l’éq. (3.14a). On donne
aussi sa décomposition en deux contributions venant du site d’impureté ( ∆EsolA ) et de ses premiers voisins ∆EsolB .
- (2 impuretés) : reconstruction de l’énergie de solution ∆Esol à partir des interactions de paires
effectives calculées en rapprochant deux impuretés initialement isolées.
Les valeurs sont données en meV, celles entre parenthèses étant obtenues avant relaxation.
Vp
200
150
Cu(Pd)
100
50
Pd(Cu)
0
p
1
2
3
4
Figure III.9 : Variation de Vp, interaction de paire effective entre pièmes voisins dans le volume, avant (traits
pointillés) et après (traits pleins) relaxation dans le cas du système Pd-Cu. Les variations sont représentées dans
les deux limites diluées : Cu(Pd) (traits gras et cercles noirs) et Pd(Cu) (traits fins et carrés blancs).
volume
(111)
(100)
(110)
V1
122
(176)
146
(189)
142
(179)
153
(186)
Cu(Pd2)
V2
V3
18
5
(40)
(13)
26
(47)
32
(45)
25
(33)
V4
4
(6)
V1
68
(82)
77
(90)
76
(90)
79
(94)
Pd(Cu2)
V2
V3
4
0
(10)
(2)
7
(12)
9
(12)
10
(0)
V4
0
(1)
Tableau III.6 : Variation des interactions de paires effectives en fonction du nombre de liaisons coupées. Les
EPI sont calculées jusqu’aux quatrièmes voisins en rapprochant deux impuretés initialement isolées, dans les
deux limites diluées. Les valeurs sont données en meV, celles entre parenthèses étant obtenues avant relaxation.
- 61 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
III.1.3.2 - Ordre en surface
L’influence du nombre de liaisons coupées apparaît dans le tableau précédent, et dans
la figure III.10 qui permet une comparaison avec le système Cu-Ag. Comme on peut le voir,
on retrouve cette fois un comportement plus "classique" de type TBIM dans la mesure où
l’influence de la surface est d’augmenter V1 d’environ 20 % (V1,0 = 1,2 V1). Comme pour le
système Cu-Ag, on peut schématiser cette évolution de V1 par une décroissance quasi linéaire
de l’EPI quand Z1 croît :
* Cu(Pd2) : V1(Z1) ≈ V1(volume) - 6 (Z1-12)
* Pd(Cu2) : V1 (Z1) ≈ V1 (volume) - 2 (Z1-12)
V1
200
Cu(Pd)
150
100
Pd(Cu)
50
7
(110)
8
(100)
9
(111)
10
11
12
(bulk)
Z1
Figure III.10 : Variation de V1 (en meV), interaction de paire effective entre premiers voisins, en fonction du
nombre de liaisons coupées avant (traits pointillés) et après (traits pleins) relaxation dans le cas du système PdCu dans les deux limites diluées : Cu(Pd) (traits gras et cercles noirs) et Pd(Cu) (traits fins et carrés blancs).
III.1.4 - Comparaison des systèmes CuAg et CuPd
La relaxation joue un rôle très similaire dans les deux systèmes CuPd et CuAg. Ainsi,
en volume, elle diminue l’effet d’ordre d’environ 55 meV dans le cas où l’impureté est la plus
grosse (Ag ou Pd) et seulement de 15 meV quand elle est la plus petite (Cu). Si l’effet est plus
spectaculaire dans CuAg, c’est parce que les énergies non relaxées y sont plus faibles que
dans CuPd, de sorte que le même effet conduit alors à un changement de signe de
l’interaction.
L’effet de la surface peut-être lui aussi considéré comme globalement identique dans
les deux systèmes si on le résume en disant qu’elle renforce la tendance à l’ordre selon la
règle suivante : V1(Z1) ≈ V1(volume) - α (Z1-12), la pente α étant comprise entre 3 et 6 quand
l’impureté est la plus grosse (Ag ou Pd) et entre 2 et 3 quand elle est la plus petite (Cu). Ainsi,
si là aussi l’effet est plus spectaculaire dans CuAg, c’est surtout parce que V1 (volume) est
petit et négatif, permettant donc un changement de signe quand Z1 décroît, surtout quand
l’impureté est plus grosse.
Pour résumer, quand l’impureté est la plus grosse, l’effet des liaisons coupées est
d’augmenter la tendance à l’ordre alors que l’effet de la relaxation est de la diminuer. Quand
l’impureté est la plus petite, les deux effets sont quasi-négligeables. Ces conclusions ont été
confirmées par des calculs ab initio [97]. De plus, pour une tendance à l’ordre, c’est l’élément
le moins cohésif qui aime toujours s’entourer de l’autre alors que pour une tendance à la
démixtion c’est l’élément le plus cohésif qui aime ne jamais s’entourer de l’autre. Dans les
deux cas étudiés lors de ce travail, Cu joue alternativement l’un et l’autre rôle.
- 62 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
III.2 - Précipité en volume : Ag(Ni)
On peut s’interroger sur la généralité du résultat précédent lorsqu’on augmente la
concentration en impuretés : l’accumulation de contrainte induit-elle toujours une tendance à
l’ordre dans un système massif ayant une tendance à la séparation de phases ? Pour répondre à
cette question, nous avons calculé l’énergie de solution de précipités de taille croissante dans
une matrice étrangère pour un système modèle présentant une telle tendance. Au lieu de
choisir le système Ag-Cu qui aurait été a priori la suite logique de l’étude précédente, nous
avons opté pour le système Ag-Ni, où Ni joue le même rôle (amplifié) que Cu par rapport à
Ag (i.e. il est encore plus petit et plus cohésif, cf. tableau II.1), et qui a le mérite d’avoir fait
l’objet d’études expérimentales. Plus précisément, l’étude du recuit d’un dépôt de Ni sur un
substrat d’Ag ayant conduit à l’observation d’amas de Ni enfouis sous une ou deux couches
d’Ag (cf § I.2.3), nous nous intéresserons ici à la limite diluée correspondante : Ag(Ni).
III.2.1 - Structure atomique
La procédure adoptée pour faire croître l’agrégat de Ni enchâssé dans la matrice d’Ag
est la suivante. Tout d’abord, nous creusons une cavité (quasi-sphérique) de rayon donné dans
Ag
la matrice d’argent, formant ainsi N lac lacunes d’Ag, que nous remplissons d’atomes de Ni.
Pour étudier le précipité de Ni contraint (en tension puisque le paramètre de maille du Ni est
plus petit), il suffit de remplacer chaque lacune d’Ag par un atome de Ni. Il est ensuite
possible de relaxer le précipité soit de façon partielle en conservant le même nombre d’atomes
Ni
Ag
Ni
de Ni ( N at = N lac ), soit de façon plus complète en optimisant N at (ce qui revient à incorporer
plus d’atomes de Ni qu’il n’existe de lacunes d’Ag). En fait, ce nombre optimal correspond à
peu près à celui qu’on déduirait d’un critère géométrique basé sur le rapport des volumes
Ag
Ni
Ni
Ag
atomiques de Ni et Ag ( (r0 / r0 )3 = 1,56), soit : N at ≈ 1,56 N lac .
(a)
(b)
(c)
Figure III.11 : Relaxation d’un amas de 381 atomes de Ni enchâssés dans une matrice d’Ag, avec N Niat = N Ag
lac
(b), puis N Niat ≈ 1,56 N Ag
lac (c). Le cas d’un amas contraint en tension est illustré en (a).
La construction de la cavité se fait en enlevant Nc couches successives d’Ag. La cavité
est ensuite remplie d’atomes de Ni dont les nombres sont donnés dans le tableau III.7.
Précipité
Ni
Ag
N at = N lac
Ni
Nc = 1
13
Ag
N at ≈ 1,56 N lac
Nc = 2
55
Nc = 3
177
Nc = 4
381
Nc = 5
767
Nc = 6
1289
19 ≈ 20 87 ≈ 86 273 ≈ 277 603 ≈ 596 1205 ≈ 1199 2029 ≈ 2015
Tableau III.7 : Nombre d’atomes de Ni constituant le précipité dans les cas où il est contraint puis relaxé en
optimisant ce nombre (cf. texte), en fonction de la taille de la cavité (donnée en nombre de couches Nc).
- 63 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
III.2.2 - Cas du précipité icosaédrique
On peut s’interroger sur la possibilité pour le précipité de Ni d’adopter une structure
différente de la structure cfc de la matrice. En effet, il est bien connu que dans le cas
d’agrégats libres, une structure icosaédrique peut être préférée à la structure cfc aux très
petites tailles [71,98]. Ce n’est pas le cas pour un agrégat enchâssé dans une matrice étrangère
cfc, du moins s’il est contraint en dilatation. En effet, comme on le voit sur la figure III.12, la
relaxation d’un petit icosaèdre de 55 atomes de Ni (a) le fait transiter vers une forme (b) très
proche de celle d’un cuboctaèdre relaxé (c), ce qui est encore mieux visualisé sur les
distributions de distances correspondantes caractéristiques des deux structures. La petite
différence subsistant entre les deux structures relaxées vient d’une optimisation imparfaite de
la structure initialement icosaédrique (qui la pénalise de 16 meV/at.Ni). Ainsi, la relaxation
change l’icosaèdre en un cuboctaèdre cfc dès les petites tailles, en raison de la contrainte
imposée par l’interface avec la matrice cfc. Ceci signifie que, du moins si l’on n’optimise pas
le nombre d’impuretés par rapport à la taille de la cavité, le désaccord de maille à l’interface
empêche l’apparition de symétries interdites, même pour des amas de petites tailles. En
pratique, nous ne considèrerons plus la structure icosaédrique par la suite.
(a)
(b)
(c)
N(r)
N(r)
1 st
bulk
neighbours
Ni
Ag
2
Ni
nd
N(r)
bulk
bulk
neighbours
st
neighbours
Ni
Ag
1
Ag
2 nd
Ni
bulk
bulk
neighbours
15
15
10
neighbours
Ag
bulk
2 nd neighbours
Ni
10
Ni-Ni
Ni-Ni
5
5
Ag
15
10
Ni-Ni
st
Ni
1
Ag
5
Ni-Ag
Ni-Ag
Ni-Ag
0
2
2,5
3
3,5
4
r
0
2
2,5
3
3,5
4
r
0
2
2,5
3
3,5
4
r
Figure III.12 : Relaxation d’un précipité de 55 atomes de Ni dans une cavité sphérique de 55 lacunes d’Ag : (a)
icosaèdre non relaxé, (b) icosaèdre relaxé et (c) cuboctaèdre relaxé. En haut est représentée une coupe
transversale de la boîte de simulation et en bas la distribution des distances.
III.2.3 - Energie de solution
Ici, le critère énergétique adapté est de minimiser une énergie de solution plutôt
qu’une énergie d’adsorption, du type de l’éq (2.20). La différence entre les deux vient de la
définition de l’énergie de référence des atomes déposés, qui est prise nulle dans le cas de
l’adsorption, et égale à l’énergie de cohésion pour la dissolution. La généralisation de
l’énergie de dissolution d’une impureté (Eq. (3.11)) au cas de plusieurs impuretés, permet
d’écrire celle-ci, par atome de précipité, comme le bilan énergétique du mélange de N Ni
at
Ag
atomes Ni et N at atomes d’Ag, initialement préparés chacun dans son propre volume (donc
Ni
Ag
avec leur énergie de cohésion : E coh , E coh ) :
- 64 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Ag
Ni Ni
E tot − NAg
at E coh − N at E coh
(3.19)
NNi
at
où Etot est l’énergie du système (matrice Ag+précipité Ni). Ces énergies sont reportées dans le
tableau III.8, pour différentes tailles de précipités dans les cas où le précipité est contraint en
tension (avant relaxation), semi-relaxé et relaxé.
E sol =
Esol (meV/at.Ni)
Ag
contraint : N Ni
at = N lac
Ag
semi-relaxé : N Ni
at = N lac
Ag
relaxé : N Ni
at ≈ 1,56 N lac
Nc = 0
670
585
Nc = 1
725
488
527
Nc = 2
746
451
263
Nc = 3
758
384
254
Nc = 4
764
347
186
Nc = 5
767
344
75
Nc = 6
770
334
66
Tableau III.8 : Energie de solution par atome de précipité pour un précipité de Ni contraint, semi-relaxé et
totalement relaxé, en fonction de la taille de la cavité. Les cases grisées indiquent les énergies minimales.
On peut tout d’abord voir que l’amas de Ni tend à relaxer à son propre paramètre audelà d’une taille critique de cavité d’une vingtaine d’atomes, en accord avec les mesures RX.
En revanche, au-dessous de cette taille, une contrainte partielle est préférée d’un point de vue
énergétique (afin de conserver le même nombre d’atomes que celui d’Ag enlevés).
Il est tentant d’analyser ce résultat en terme d’interactions de paires effectives, en
séparant d’une manière schématique dans le bilan énergétique ∆Esol la contribution
interfaciale de celle du cœur du précipité. Ainsi, l’énergie Etot du système (matrice+précipité)
peut se décomposer en un terme de volume (EV) et un terme d’interface (ES) :
Ni
Ni
Ni Ni
Ag
Ag
Ag
Ag Ag
E tot = (N Ni
(3.20)
at − N S )E V + N S E S + (N at − N S )E V + N S E S
En première approximation, on peut supposer que les nombres d’atomes de Ni et d’Ag
Ag
NiAg
à l’interface sont égaux : N Ni
, de sorte que l’énergie de solution se réécrit :
S ≈ NS ≈ N S
Ni
Ni
Ni
Ag
Ag
Ag
Ag
Ni
Ag
Nat (E V − E coh )+ Nat (E V − E coh )+ NSNiAg (E Ni
S + ES − EV − EV )
(3.21)
E sol =
NNi
at
Ag
La matrice d’Ag étant infinie et à son paramètre de réseau : E Ag
V = E coh . On a donc :
 NNiAg

S

× ∆E NiAg
+
(3.22)
E sol = ∆E Ni
Ni
V
int erface
 Nat 
où ∆E Ni
V est la différence entre l’énergie moyenne d’un atome de Ni du cœur de l’amas et
l’énergie de cohésion volumique de Ni :
Ni
Ni
Ni
∆E V = E V − E coh
(3.23)
et l’énergie d’interface est définie par :
NiAg
Ni
Ag
Ni
Ag
∆E interface = E S + ES − E V − E V
(3.24)
Si l’on fait l’hypothèse d’un précipité sphérique, le nombre d’atomes de Ni à la
1
3
2
Ni 3
at
2
Ni 3
at
surface du précipité varie comme : N
≈ (36π) (N ) ≈ 4,84(N ) (loi bien suivie pour
les surfaces des diverses morphologies citées plus haut, cf. fig. III.13), l’éq (3.22) se ré-écrit :
NiAg
S
1
NiAg
Ni 3
E sol = ∆E Ni
v + 4,84∆E interface × (N at )
Dans un formalisme d’interactions de paires, on aurait :
Z
(Z − Z int )
Z
A
E v = tot VAA
et
E As = tot
VAA + int VAB
2
2
2
de sorte que :
−
(3.25)
(3.26)
- 65 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
NiAg
∆E interface = − Z int V1
V1 =
avec
V1NiNi + V1AgAg − 2V1NiAg
2
(3.27)
N
surface
4,84 N
2/3
Wulf
800
sph re
(N =1,6 N )
Ni
Ag
600
cubocta dre
sph re
(N =N )
400
Ni
Ag
200
0
0
50
100
150
200
2/3
N
total
Figure III.13 : Variation du nombre d’atomes de Ni en surface en fonction du nombre total d’atomes du
précipité pour différentes morphologies.
Ainsi, si l’on considère une interface moyenne (Zint ≈ 4), on trouve pour l’énergie de
solution la dépendance linéaire suivante :
1
Ni 3
(3.28)
E sol ≈ ∆E Ni
v − α V1 (N at )
où α est le facteur de structure fonction de la forme de l’amas (ici α ≈ 20 pour une forme
−
1
3
isotrope). Ajuster linéairement les variations de l’énergie de solution en fonction de (N Ni
at )
donne alors accès à la variation de l’énergie au cœur de l’agrégat de Ni par rapport au volume
(terme constant) et à l’interaction de paires (pente). Ceci est illustré sur la figure III.14.
−
∆ Esol
relax
semi-relax
0,8
(a) Ni contraint
0,6
(b) Ni partiellement relax
0,4
0,2
(c) Ni relax
0
0
0,2
0,4
0,6
0,8
(N
at
Ni -1/3
)
Figure III.14 : Variation de l’énergie de solution (en eV/at) en fonction de ( N Niat )-1/3 (i.e. de l’inverse de la taille
de l’amas), dans les trois cas illustrés dans la figure III.1 : amas contraint (a), partiellement (b : N Niat = N Ag
lac ) ou
complètement (c : N Niat ≈ 1,5635 N Ag
)
relaxé.
Les
courbes
sont
interpolées
de
façon
linéaire.
lac
- 66 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
Ag
a) précipité contraint ( N Ni
at = N lac ) :
Le cas de Ni contraint au paramètre de réseau d’Ag confirme la conclusion tirée de la
dissolution d’une seule impureté : le système non relaxé présente une tendance à l’ordre au
lieu d’une tendance à la séparation de phases puisque la pente est négative : V1 ≈ 0,005 eV/at.
La valeur non nulle du terme constant ( ∆E Ni
v = 0,775 eV/at) est due au fait que même pour
des gros amas, le cœur Ni demeure au volume d’Ag, de sorte que E Ni
v est l’énergie d’un solide
Ni
Ni*
de Ni préparé au paramètre de Ag : E v = E coh = - 3,677 eV/at, et non à son propre volume :
Ni
Ni
E coh = - 4,46 eV/at, ce qui conduit bien à : ∆E v = 0,78 eV/at. Le fait de trouver tout de même
une énergie de solution positive ne vient donc pas ici de la répulsion des Ni pour les Ag
(puisque ici il y a plutôt attraction, cf. pente négative), mais plutôt du fait d’avoir contraint les
atomes de Ni au paramètre de Ag, ce qui les pénalise de 0,78 eV/at. Ainsi, l’interface stabilise
le précipité contraint en son cœur, la présence des Ag diminuant un peu la dilatation des Ni.
Ag
b) précipité partiellement relaxé ( N Ni
at = N lac ) :
On trouve cette fois deux pentes :
- aux petites tailles : une pente maintenant positive V1 ≈ - 0,008 eV/at et ∆ E Ni
v ≈ 0,42 eV/at.
- aux grandes tailles : une pente toujours positive V1 ≈ - 0,031 eV/at et ∆ E Ni
v = 0,28 eV/at.
Ni
∆E v a bien diminué, mais on ne trouve toujours pas zéro car le nombre de Ni n’est pas
suffisant pour lui permettre de retrouver son paramètre et il reste donc un peu dilaté.
Il est aussi possible d’ajuster les résultats sur toute la gamme de tailles en ne
considérant qu’un seul régime. On obtient alors une pente moyenne : V1 ≈ - 0,020 eV/at.
Ag
c) précipité relaxé ( N Ni
at = 1,56 N lac ) :
On trouve bien cette fois une droite passant par l’origine ( ∆E Ni
v ≈ 0), avec une pente
plus forte que dans le cas précédent : V1 ≈ - 0,070 eV/at.
Ainsi, l’ensemble des résultats montre qu’un précipité de Ni contraint en dilatation
dans une matrice d’Ag préfèrerait s’y mélanger. Seule une relaxation des distances dans le
précipité permet de retrouver la tendance à la démixtion du système, celle-ci demeurant faible
si l’on n’optimise pas en même temps le nombre d’atomes dans le précipité. On trouve que la
perte de cohérence du précipité par rapport au réseau de la matrice apparaît dès une trentaine
d’atomes de Ni (transition entre amas partiellement et complètement relaxés). Toutefois, il
faudrait analyser de façon plus détaillée la nature de la transition dans l’état partiellement
relaxée, une analyse qualitative semblant indiquer que l’amas se sépare en un cœur relaxé et
une interface passablement perturbée.
III.3 - Conclusion
Pour tirer une leçon de portée générale des résultats des deux paragraphes précédents,
il faut s’assurer de ce que les valeurs des EPI tirées des énergies de solutions de précipités de
taille croissante (§ II.1) sont cohérentes avec celles issues d’un calcul d’impuretés isolées (§
III.1) pour un même système. Nous avons donc répété les calculs du § II.1 pour la dissolution
d’une impureté de Ni (Eq.(3.10)), puis le rapprochement de deux impuretés de Ni (Eq.(3.9))
dans une matrice d’Ag. Les V1 qui en résultent sont comparés à ceux tirés des pentes des
droites de la figure III.14 (Eq. (3.28)) dans le tableau III.9.
- 67 -
CHAPITRE 3 : COUPLAGE CHIMIE - MORPHOLOGIE
___________________________________________________________________________
V1 (meV)
Ni contraint
Ag
Ni partiellement relaxé : N Ni
at = N vac
1 impureté
- 56
- 48
2 impuretés
+ 11
- 15
Ag
Ni complètement relaxé : N Ni
at = 1,56 N vac
amas
+5
- 20
- 70
Tableau III.9 : Interaction de paire effective entre premiers voisins dans le système Ag(Ni), issue de l’énergie
de solution d’une impureté, du rapprochement de deux impuretés, ou de l’énergie de solution d’un amas.
Ces résultats, illustrés aussi dans la figure III.15, montrent comment l’analyse du
couplage entre relaxation structurale et effet chimique réalisée dans la limite diluée s’étend au
cas d’un milieu plus concentré. Ainsi, le rapprochement de Nimp impuretés conduit toujours,
en l’absence de relaxation, à une tendance à l’ordre avec : V1 = + 11 meV (Nimp = 2) et V1 = +
5 meV (Nimp >> 2). Lorsqu’on relaxe partiellement le système, cette tendance s’inverse pour
conduire à une tendance à la démixtion, toutefois plus faible que celle attendue : V1 = - 15
meV (Nimp = 2) et V1 = - 20 meV (Nimp >> 2). Enfin, une relaxation complète avec
optimisation du nombre d’impuretés conduit bien à la démixtion attendue, avec une valeur V1
= - 70 meV (Nimp >> 2), qu’il convient cette fois de comparer au calcul à 1 impureté, V1 = 48 meV (Nimp = 1) puisque dans ce cas, le nickel de référence est à nouveau considéré comme
du nickel pris à son propre volume.
V1 (meV)
25
ordre
non relax
0
-25
: NNi = Nlac (Ag)
N
imp
demixtion
relax
: NNi = Nlac (Ag)
-50
relax
: N = 1,6 N (Ag)
Ni
lac
-75
1 impuret
2 impuret s
amas
Figure III.15 : Variations de l’interaction de paire effective entre premiers voisins dans le système Ag(Ni), en
fonction de la méthode de calcul (énergie de solution d’une impureté, rapprochement de deux impuretés,
énergie de solution d’un amas) et de l’état de relaxation.
Nous avons aussi mis en évidence, par le biais d’analyses locales, que la tendance à la
démixtion d’un système, définie comme la propension à former des paires homoatomiques,
était pilotée par l’élément le plus cohésif alors que la tendance à l’ordre (paires
hétéroatomiques) l’était par l’élément le moins cohésif. Toutefois, il faut garder à l’esprit que
ces résultats ont été obtenus, dans le premier cas pour un système où l’élément le moins
cohésif est celui de plus grand rayon atomique, et dans le second cas pour un système où c’est
l’inverse. Afin de tester la généralité de l’argument, l’étape suivante devrait être maintenant
d’effectuer une même étude pour des systèmes présentant des caractéristiques opposées, à
savoir où l’élément le plus cohésif est aussi le plus gros dans le cas d’une tendance à la
démixtion, et l’inverse dans le cas d’une tendance à l’ordre.
- 68 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV - SURSTRUCTURES DE SURFACE PRECIPITATION INCOHERENTE
La connaissance de la structure atomique d’une couche mince déposée sur un substrat,
et de son évolution en fonction de la température de dépôt et/ou recuit, a de fortes
implications tant fondamentales que technologiques. De nombreux travaux y ont donc été
consacrés, qui se sont attachés en particulier à essayer de dégager l’influence de la différence
de taille entre l’élément déposé et celui du substrat [99-105]. C’est dans cet esprit que nous
allons, au cours de ce chapitre, tenter de mettre en lumière les divers modes de relaxation
adoptés par un système pour accommoder les contraintes induites par un fort désaccord de
maille, en fonction des tendances schématisées dans la figure 1 de l’introduction. Ce propos
sera illustré par l’étude de trois systèmes génériques, caractéristiques de ces tendances :
Sb/Cu, Ag/Cu et Ni/Ag. Ces trois systèmes seront analysés de façon plus ou moins détaillée.
Ainsi, le cas du système à tendance à l’ordre (Sb/Cu) sera rapidement traité dans la mesure où
les résultats ne font que conforter les conclusions de l’étude expérimentale en SXRD
présentée au §I.2.1 qui a constitué la plus grosse partie du travail mené sur ce système dans le
cadre de cette thèse. L’analyse sera beaucoup plus détaillée pour les modes de relaxation des
systèmes dits à démixtion, suivant qu’on dépose l’élément qui veut ségréger (Ag/Cu) ou
l’inverse (Ni/Ag). Là encore, le niveau d’approfondissement ne sera pas identique, les
surstructures d’Ag/Cu ayant été étudiées à la fois à température nulle et finie, alors que les
précipités résultant de l’effet surfactant dans Ni/Ag ne l’ont été qu’à T = 0 K.
IV.1 - Système à tendance à l’ordre : Sb / Cu (111)
Comme expliqué au § I.2.1, plusieurs modèles de maille élémentaire étaient
envisageables, compatibles avec la surstructure ( 3 × 3)R30° issue du LEED. Pour
comparer leurs stabilités respectives à T = 0 K, nous avons utilisé le critère de minimisation
de l’énergie d’adsorption (Eq. (2.20)), qui peut se ré-écrire en terme d’énergie interne de la
façon suivante :
Cu Cu
E tot SbN˜ / Cu N −N Cu + Nlac E coh − E tot (Cu N )
lac
Sb
E ads =
− E ref
(4.1)
˜
N
(
(
)
)
où E tot SbN˜ / CuN −N Culac est l’énergie du système incluant le substrat avec (N − N lac ) atomes de
˜ atomes de Sb, et E (Cu ) est l’énergie d’un substrat
Cu et la couche adsorbée contenant N
Cu
tot
N
pur de Cu avec N atomes et une surface (111). N Cu
lac est le nombre de lacunes de Cu dans la
première couche de substrat, dont les atomes initialement présents ont été replacés en volume
Cu
avec leur énergie de cohésion E Cu
coh . En général, N lac sera nul pour l’adsorption, mais il sera
égal au tiers des atomes de surface pour une incorporation d’un atome sur trois. L’énergie de
référence des atomes de Sb en phase vapeur est prise égale à zéro.
A l’aide de ce critère et des potentiels définis au § II, nous avons considéré que les
atomes de Sb se trouvaient soit au-dessus de la surface de cuivre en positions d’adatomes, soit
en substitution (remplacement des atomes de la couche de surface de Cu). Plus précisément,
deux modèles d’adatomes ont été testés avec des atomes d’antimoine se trouvant soit en
positions ternaires (figure IV.1a) soit en positions apicales (figure IV.1b), occupant dans les
deux cas un tiers de ces sites. Dans le cas de la substitution, nous avons considéré une couche
- 69 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
d’alliage de composition Cu2Sb, sur une monocouche (figure IV.1c) ou deux couches (figure
IV.1d). De plus, dans le cas de la couche adsorbée Cu2Sb, nous avons envisagé la possibilité
d’une faute d’empilement cfc-hcp.
(a)
(b)
(c)
(d)
Figure IV.1 : Modèles proposés pour la surstructure Sb/Cu(111) : Sb adsorbés en sites ternaires (a) et en sites
apicaux (b), plan mixte Cu2Sb cfc s’étendant sur une (c) ou deux (d) couches.
Dans chaque cas, nous avons effectué des simulations de Dynamique Moléculaire
Trempée. Nos calculs montrent sans aucune ambiguïté que la structure la plus stable est la
( 3x 3 )R30° intégrée en site ternaire, en bon accord avec les simulations des spectres de
rayons X rasants. De plus, la corrugation obtenue (les atomes de Sb sortent de 0,3 Å) est à la
fois cohérente avec les profils STM (cf. tableau I.2) et des calculs ab initio [106].
. Nous n’avons en revanche décelé aucun signe de brisure de symétrie, ni pu déterminer
si l’alliage de surface Cu2Sb présentait (ou pas) une faute d’empilement cfc-hcp, les
différences d’énergie entre surface "parfaite" et "fautée" n’étant pas numériquement
significatives. Ce n’est guère surprenant si l’on se souvient qu’un potentiel ajusté au 2nd
moment n’est a priori pas fondé pour rendre compte de différences qui (sur réseau rigide)
demandent d’aller au moins jusqu’au 4ème moment [58] ! De plus, il convient de garder à
l’esprit les réserves émises lors de la dérivation d’un potentiel SMA pour Sb (§II.1.5.2).
- 70 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.2 - Système à démixtion, interface 2D : Ag / Cu (111)
Le système Ag / Cu (111) peut être considéré comme représentatif du cas : gros atomes
du dépôt / petits atomes du substrat, pour deux espèces qui sont fortement immiscibles dans le
volume. Il a donc fait l’objet de plusieurs études expérimentales [44-49,107-109] et
théoriques [47,93,110,111].
Les expériences ont été détaillées au § I.2.2. Rappelons les résultats essentiels, à savoir
l’existence d’une surstructure (10±1 x 10±1), cohérente avec le rattrappage géométrique du
paramètre de réseau lié à la différence de taille entre Ag et Cu (à peu près 13 %), et
l’observation par STM de deux types de microstructures : l’une de forme isotrope (référencée
comme structure Moiré) [48] et l’autre présentant (figure I.13) des régions de basse élévation
de forme triangulaire (de côtés constitués de quatre ou cinq atomes avec respectivement un ou
trois atomes centraux proéminents) [49]. Plus précisément, des études exhaustives de STM
[48] ont montré que les deux structures (triangulaire et Moiré) pouvaient être observées en
fonction de la température. Un phénomène très similaire avait déjà été observé sur le système
Au / Ni (111), où les formes triangulaires avaient été attribuées à une reconstruction de la
première couche du substrat de Ni associée à la formation d’un alliage de surface très dilué en
Ni, Au(Ni) [112].
Nous avons donc entrepris de comparer les stabilités de ces deux surstructures, d’abord
à température nulle par Dynamique Moléculaire Trempée, puis à température finie en
associant simulation Monte Carlo et calculs d’entropie vibrationnelle par la méthode de
fraction continue, à l’aide du potentiel SMA défini au § II. Il faut noter dès à présent que la
formation de ces surstructures peut impliquer la formation de lacunes d’argent dans le plan de
surface et de lacunes de cuivre et/ou de boucles de dislocation dans la première sous-couche.
De tels phénomènes étant difficilement observables durant des temps réalistes de simulation
en Dynamique Moléculaire, nous avons dû les introduire dès le début de la simulation, pour
ensuite comparer les énergies (internes, libres) des diverses configurations et décider laquelle
est la plus stable.
IV.2.1 - Etude à température nulle
IV.2.1.1 - Comparaison des surstructures (stabilité, morphologie)
Les calculs effectués dans ce travail font suite à ceux initialement limités à l’étude de la
structure Moiré, avec un potentiel SMA tronqué aux troisièmes voisins [93]. Nous allons ici
généraliser l’étude en permettant la formation de lacunes dans le substrat. La première étape
est de déterminer la périodicité de la surstructure à la complétion de la monocouche, définie
comme la couverture critique au-delà de laquelle un atome d’argent supplémentaire devrait
être localisé dans la seconde couche d’adsorption. Pour cela nous allons construire une couche
˜ = (n − 1) × (n − 1) atomes d’Ag sur
d’Ag pseudoépitaxiée sur le substrat de Cu, en plaçant N
un plan (111) composé de N s = n × n atomes de Cu, dans le but de déterminer la valeur de n
qui minimise l’énergie d’adsorption par atome d’Ag, définie comme en (4.1), par :
Cu Cu
E tot AgN˜ / CuN −N Cu + Nlac E coh − E tot (CuN )
Ag
lac
E ads =
− E ref
(4.2)
˜N
Une telle reconstruction relaxant, au moins partiellement, les contraintes en compression que
subiraient les atomes d’Ag dans une couche pseudomorphe où ils seraient contraints au
paramètre de maille du Cu, le minimum d’énergie doit être voisin de la valeur n* défini par le
simple critère géométrique d’un rattrappage de maille le long des rangées compactes :
(
)
- 71 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
1
= 8,76
(4.3)
r0Cu
1 − Ag
r0
On obtient ainsi la structure Moiré représentée sur la figure IV.2 pour n = 10, et dont l’énergie
passe en effet par un minimum très plat pour n = 9 et n = 10 (Eads = -3,050 eV/at),
définitivement plus bas que l’énergie de la couche pseudomorphe (Eads = -2,625 eV/at). Cette
périodicité est donc en bon accord tant avec le critère géométrique qu’avec les expériences.
n* =
I
II
(a)
(d)
(c)
A
B
C
A
B
C
(b)
A-C-A
B
C
A
B
C
(e)
(f)
Figure IV.2 : (a-b) : carte des élévations de Ag/Cu (10x10) relaxée vue de dessus. Dans l’échelle de gris, les
ronds noirs (blancs) sont associés à l’élévation la plus profonde (haute). Les résultats sont donnés dans (a)
avant l’introduction de lacunes et dans (b) après création de deux domaines avec respectivement quatre (I) et
cinq (II) lacunes par maille élémentaire. Les élévations extrémales sont hmin = - 0,33 Å, hmax = + 0,75 Å.
(c-d) : vue de dessus des deux premières couches des surstructures présentées en (a) et (b), les
atomes d’Ag (Cu) étant représentés par des cercles vides (gris).
(e-f) vue de profil schématique de la faute d’empilement, qui permet d’éviter les positions
apicales défavorables (e), par l’introduction d’une boucle de dislocation partielle (f). Les cercles noirs
représentent les atomes de Cu initialement dans les positions défavorables.
- 72 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Si les résultats concernant la périodicité semblent satisfaisants, les choses se
compliquent quand on regarde de façon plus détaillée la surstructure correspondante. En effet,
comme on peut le voir sur la figure IV.2a, la distribution des atomes d’Ag est loin d’être
uniforme ! De plus, c’est aussi le cas pour les atomes de Cu sous-jacents. Il apparaît ainsi une
très forte corrugation qui s’étend jusqu’à la dixième couche du substrat de cuivre. De façon
plus quantitative, la couche d’argent présente une corrugation d’environ 0,9 Å, tandis qu’elle
atteint un maximum égal à 1,2 Å sur le premier plan du substrat, comme on peut le voir sur
les courbes correspondant à nv = 0 dans la figure IV.3.
n =0
Corrugation [ ]
1,5
v
1
n =4
v
0,5
n =5
0
v
0
Ag
1
Cu
2
Cu
3
Cu
4
Cu
5
Cu
Couche
Figure IV.3 : Profil de corrugation (quantifiée pour chaque plan parallèle à la surface comme l’amplitude
maximale d’élévation entre l’atome le plus bas et le plus haut) associé aux surstructures (9x9) (traits pleins) et
(10x10) (lignes brisées), pour différents nombres de lacunes de Cu par maille élémentaire (nv = 0, 4, 5).
Une analyse détaillée des figures IV.2a-c montre que, lors de la formation de la
structure Moiré, certains sites d’Ag se retrouvent placés en position (ou près d’une position)
apicale par rapport aux atomes de Cu du premier plan sous-jacent. En d’autres termes, ces
sites correspondent à une région où l’empilement {A-B-C-A-....} de la structure CFC devient
localement {A(Ag)-A(Cu)-B(Cu)-C(Cu)-A(Cu)-...}, comme schématiquement décrit dans la
figure IV.2e. De façon surprenante les atomes d’Ag placés en position apicale sont ceux qui
s’enfoncent le plus dans le substrat alors que les sites d’Ag qui sont les plus élevés sont ceux
qui se retrouvent en position hcp, correspondant à l’empilement local {B(Ag)-A(Cu)-B(Cu)C(Cu)-A(Cu)-...}, ce résultat étant corroboré par des simulations effectuées à l’aide du
modèle énergétique EAM [113].
Une manière d’éviter de telles positions, énergétiquement peu favorables, est d’enlever
les atomes des zones où ils se retrouvent avec une trop basse coordinance (position apicale par
exemple), soit de la couche d’Ag, soit du premier plan du substrat de Cu. Une autre façon est
de créer localement une faute d’empilement sur l’un des deux premiers plans pour éliminer
les positions apicales, soit dans le plan d’Ag, soit dans celui de Cu. Dans ce dernier cas,
l’empilement : {A(Ag)-A(Cu)-B(Cu)-C(Cu)-A(Cu)-...} est remplacé par {A(Ag)-C(Cu)B(Cu)-C(Cu)-A(Cu)-...} (voir figure IV.2f). Nous verrons par la suite que cette faute
d’empilement, limitée par une boucle de dislocation partielle, nécessite la formation de
lacunes d’Ag ou de Cu. Cela veut dire que les deux processus envisagés, permettant la
relaxation de la contrainte interfaciale (défauts ponctuels et boucles de dislocation), sont
fortement liés.
La première idée, qui consiste à enlever successivement les atomes d’Ag en position
apicale ou proches de ces régions, ne se révèle pas pertinente ! En fait, s’il n’y a aucune
ambiguïté pour créer une seule lacune (l’atome en position parfaitement apicale étant unique),
le choix devient plus difficile en ce qui concerne les suivants puisque la structure est
symétrique autour de cette position. Aussi, plutôt que de retirer un seul atome sur les six
- 73 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
possibles, nous les avons enlevés le long d’une rangée compacte voisine, avant de relaxer
l’ensemble du système. On voit sur la figure IV.4 que l’introduction des lacunes d’Ag conduit
à une augmentation croissante de l’énergie d’adsorption quel que soit leur nombre. Cela
signifie que le système préfère subir une corrugation à longue portée dans le substrat plutôt
que d’abaisser la densité atomique dans la couche d’Ag. Donc les régions triangulaires
observées par STM ne peuvent pas être attribuées à la formation de lacunes d’Ag.
∆ Eads [eV/at]
0,04
X=Ag
0,03
X=Cu
0,02
0,01
0
-0,01
0
5
10
X-lacunes (n )
15
v
Figure IV.4 : Variation de l’énergie d’adsorption (en eV/at) par rapport à celle de la surstructure (10x10) sans
lacune, en fonction du nombre de lacunes (par maille unité) d’argent dans la surstructure (10x10) (pointillés), et
de lacunes de cuivre dans les surstructures (10x10) (ligne continue) et (9x9) (ligne en tiretés).
La seconde idée est d’introduire nv lacunes de Cu par maille élémentaire dans la
première couche de substrat de Cu, ce qui nécessite de replacer les atomes de Cu enlevés. Le
lieu peut être, soit dans la couche de dépôt (formation d’un alliage de surface dilué à deux
dimensions), soit à un cran en bord de marche (ce qui équivaut d’un point de vue
thermodynamique à les mettre en volume). Si le premier choix est envisageable pour un
système comme Au/Ni [112], qui présente une large miscibilité en volume, et encore plus en
surface [114], c’est le second que nous adopterons pour Ag/Cu, système fortement immiscible
dans le volume, et pour lequel nous avons montré au § III.1, qu’il n’existe pas d’augmentation
significative de la miscibilité à la surface, du moins pour l’orientation (111) [96], en accord
avec les résultats expérimentaux [92]. Nous supposerons donc, contrairement à ce qui est
envisagé dans le cas de Au/Ni, que les atomes de Cu éjectés du substrat, sont localisés dans un
environnement pur en cuivre (par exemple un cran pur de cuivre) au potentiel chimique du
cuivre, de façon cohérente avec notre définition de l’énergie d’adsorption (Eq. (4.2)). Nous
avons introduit les nv lacunes de Cu, d’une manière non localisée, en supprimant un atome de
Cu dans chacune des nv rangées compactes avant de déplacer de façon continue les atomes de
Cu restants le long de ces rangées. La relaxation conduit à la surstructure de la figure IV.2b-d
pour la maille élémentaire (10x10) avec quatre et cinq lacunes. Nous pouvons observer des
régions de forme triangulaire avec un ou trois atomes de Cu ressortant dans le centre, en
excellent accord avec les images STM. On peut remarquer l’efficacité de l’algorithme de
relaxation, qui conduit à une localisation des atomes de Cu déplacés, les nv lacunes de Cu
étant elles-mêmes distribuées le long d’une frontière triangulaire. En effet, la même structure
triangulaire est obtenue si on introduit les lacunes d’une manière plus localisée en enlevant les
atomes de Cu le long d’une rangée compacte, passant au travers de la position apicale. Ceci
confirme bien la stabilité de cette structure, puisqu’elle est obtenue quelle que soit la
configuration initiale. Les atomes de Cu dans le triangle sont à présent en position hcp par
rapport au substrat de Cu (figure IV.2d-f), ce qui permet aux atomes d’Ag, en positions
- 74 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
apicale dans la structure Moiré, de se retrouver en sites ternaires, et à ceux du bord du triangle
d’occuper des sites quaternaires, et même cinq fois coordonnés pour les atomes de sommet,
favorisés du point de vue énergétique.
Nombre de
voisins
Nombre de
voisins
(a)
12
Cu
(b)
12
10
10
8
8
6
6
4
4
Cu
Ag
2
2
0
2
3
distances
4
Nombre de
voisins
(9x9)
Ag
0
2
3
4
distances
Nombre de
voisins
(c)
12
Cu
10
10
8
8
6
6
4
4
2
2
Ag
0
2
(d)
12
3
4
Ag
0
distances
Nombre de
voisins
Cu
2
3
distances
4
Nombre de
voisins
(e)
12
Cu
(f)
12
10
10
8
8
6
6
4
Cu
4
Ag
2
2
0
2
3
distances
4
Nombre de
voisins
(10x10)
Ag
0
2
3
4
distances
Nombre de
voisins
(g)
12
Cu
10
10
8
8
6
6
4
4
2
2
Ag
0
2
3
(h)
12
4
distances
Cu
Ag
0
2
3
4
distances
Figure IV.5 : Courbes de distribution des distances (en Å) intraplan Ag-Ag (a,c,e,g) et interplan Ag-Cu (b,d,f,h)
pour les surstructures Ag/Cu(111) (9x9) (a,b,c,d) et (10x10) (e,f,g,h) Moiré (P) et triangulaire (∆) avant (a,b,e,f)
et après (c,d,g,h) relaxation.
- 75 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Ces considérations sont confortées par l’analyse de l’intégrale de la fonction de
distribution de distances (figure IV.5), qui donne le nombre de voisins en fonction de la
distance interatomique. Les comportements diffèrent suivant que l’on regarde les distances
intraplans ou interplans. Dans le premier cas (Ag-Ag), l’évolution du nombre de voisins se
fait par paliers, les transitions apparaissant aux distances de premiers et troisièmes voisins de
Ag, en accord avec la situation de pseudoépitaxie. Le fait qu’il n’y ait pas de saut à la distance
seconds voisins est dû à leur absence dans un plan (111). L’effet de la relaxation est d’adoucir
la transition, ce qui correspond à un élargissement de la distribution de distances et à son léger
décalage vers des distances plus courtes (sans toutefois atteindre celle du Cu ni même la
moyenne entre les deux). Dans le second cas (Cu-Ag), le comportement est sensiblement
différent puisque, du moins avant relaxation, le rattrapage du paramètre de Ag dans le plan se
traduit par une distribution de distances Cu-Ag continue et donc une variation monotone du
nombre de voisins avec la distance. Les distributions avec ou sans lacunes sont indiscernables.
L’effet de la relaxation est de former des paliers ("doux") autour des distances moyennes CuAg du moins pour les premiers voisins où la distribution s’étend de la distance de Cu à celle
de Ag. Cette fois, l’introduction des lacunes modifie un peu la distribution en augmentant le
nombre de premiers voisins. L’effet est à peine visible sur la surstructure (10x10) mais un peu
plus marqué pour la surstructure (9x9) où le nombre moyen de premiers voisins passe de 3
sans lacune à 3,3 avec lacunes, reflétant l’effet déjà mentionné. Ainsi la présence de lacunes
se traduit par l’existence de paliers plus marqués. La situation pour les distances entre seconds
et troisièmes voisins est différente. Le palier demeure plus marqué en présence de lacunes
mais la structure est moins "compacte" au delà des troisièmes voisins.
Globalement, l’effet de la relaxation est d’estomper la zone "pseudolacunaire" autour du
triangle due à la faute d’empilement cfc/hcp. Ceci amène les atomes de bord (de l’ordre de 10
%) à une coordination 4, voire 5 ! On peut penser que cette compacification naturelle pour un
mode de liaison métallique peut permettre de gagner de l’énergie (du moins suffisamment
pour compenser l’énergie de défaut liée à la faute d’empilement cfc/hcp). C’est ce que l’on
vérifie sur la figure IV.4 : l’énergie d’adsorption est minimale pour 3 ≤ nv ≤ 5, le minimum
absolu étant atteint dans le cas de quatre lacunes pour la structure (10x10). La valeur obtenue,
à la fois pour les surstructures (9x9) et (10x10), est très proche de celle de la structure Moiré
(i.e. sans lacune de Cu), puisqu’elle est plus basse de seulement 0,004 eV/at ! C’est en accord
avec l’observation des deux surstructures, en fonction de la température [48]. Par ailleurs, la
figure IV.3 indique que la disparition des sites apicaux s’accompagne d’un amortissement
plus rapide de la corrugation, dont l’amplitude diminue, à la fois pour les structures (10x10) et
(9x9). La situation est légèrement différente pour la couche d’Ag. Sa corrugation reste
inchangée pour la périodicité (10x10), tandis qu’un abaissement significatif est observé pour
la surstructure (9x9), au moins pour le cas de cinq lacunes par maille élémentaire.
On peut comparer de façon plus précise la structure atomique de la couche d’Ag issue
de nos simulations avec l’image STM de la figure I.13 [49]. Nous montrons dans la figure
IV.2b la structure relaxée (10x10) correspondant aux deux situations les plus stables, i.e. avec
des triangles respectivement entourés par quatre ou cinq atomes (obtenus en introduisant
respectivement quatre et cinq lacunes de Cu par maille élémentaire dans la première couche
de substrat de Cu). On peut voir que l’accord avec les images STM obtenues à température
ambiante est fortement amélioré par rapport à la configuration sans lacune (structure Moiré,
figure IV.2a). En effet, les régions quasi-circulaires associées aux sites en tension de la
structure Moiré ont été remplacées par des régions triangulaires, bordées par des côtés de
quatre ou cinq atomes, avec un ou trois atomes qui remontent au centre. La même
morphologie avec triangles et atomes centraux qui remontent est observée également pour la
structure (9x9). Si l’on entre plus en détail dans la description de ces triangles, le tableau IV.1
indique que l’élévation diffère fortement d’un site (coin, bord et centre) à l’autre. En
- 76 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
particulier, les atomes de coin sont trouvés plus bas que les atomes de bord, excepté pour les
cinq atomes qui longent les bords des triangles dans la structure (9x9). Ceci est en assez bon
accord avec les scans linéaires expérimentaux donnant l’amplitude de corrugation le long
d’une direction parallèle à un bord de triangle (cf. figure I.13 [49]). En outre la corrugation est
plus prononcée pour la structure (10x10) que pour la structure (9x9). Finalement, il est
important de noter qu’un mélange des surstructures (9x9) et (10x10) pourrait expliquer la
périodicité (9,43x9,43) donnée par les expériences de SXRD.
coin
bord
centre
(10x10)
5 lacunes
- 0,54 Å
- 0,27 Å
- 0,02 Å
(10x10)
4 lacunes
- 0,65 Å
- 0,36 Å
- 0,16 Å
(9x9)
5 lacunes
- 0,32 Å
- 0,31 Å
0,00 Å
(9x9)
4 lacunes
- 0,55 Å
- 0,32 Å
- 0,13 Å
Expérience
- 0,20 Å
- 0,20 Å
0,00 Å
Tableau IV.1 : Corrugation des atomes d’Ag occupant les différents sites au-dessus de la faute d’empilement de
Cu. Les données expérimentales sont prises avec une incertitude de ± 0,05 Å [19]. Les valeurs théoriques sont
moyennées sur différents sites, ce qui conduit à une dispersion d’environ ± 0,10 Å.
IV.2.1.2 - Boucles de dislocation partielles dans le premier plan de cuivre
Nous venons de voir que la génération de quatre ou cinq lacunes dans le premier plan du
substrat, pour des surstructures (9x9) et (10x10), permet d’éviter les positions apicales de
quelques atomes d’Ag. La forme triangulaire est en effet une région localisée où l’empilement
{A(Ag)-A(Cu)-B(Cu)-C(Cu)-A(Cu)-...} est remplacé par celui maclé {A(Ag)-C(Cu)-B(Cu)C(Cu)-A(Cu)-...}, conduisant à une faute d’empilement dans le premier plan du substrat (voir
figure IV.2f). Il est bien connu qu’une faute d’empilement localisée peut être formée dans le
volume par dissociation d’une dislocation parfaite en des dislocations partielles de Shockley
ou de Frank, par exemple produites par aggrégation de lacunes [115,116]. C’est le cas de la
faute d’empilement tétraédrique observée par trempe dans l’or [117], l’argent et dans des
alliages nickel-cobalt [116]. Cependant, il s’agit là d’une géométrie 3D, et l’on peut se
demander quelle est la relation entre l’extension de la faute d’empilement et le nombre de
défauts ponctuels nécessaires à sa création dans la géométrie présente quasi-2D.
bas
haut
Figure IV.6 : Condensation de lacunes dans la couche A d’un empilement cfc ...C/A/B/C/... Les points sont
utilisés pour les atomes de type A, les cercles pleins pour ceux de type C et les croix pour ceux de type B. Nous
représentons seulement les boucles triangulaires de 15 lacunes dans la couche A. Les autres boucles de tailles
(3, 6, 10, 21) indiquées dans le tableau IV.2, sont obtenues d’une manière similaire.
Afin de répondre à cette question, considérons des dislocations de Frank le long des
directions de type 1 1 0 (i.e. une boucle triangulaire) dans la première couche de surface
(111) d’un cristal pur Cu semi-infini avec l’empilement C(surface)-A-B-C-A... Une telle
- 77 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
situation peut s’obtenir par condensation de lacunes dans la première sous-couche (A).
Toutefois, on peut voir sur la figure IV.6 que, selon que la boucle est orientée vers le bas ( ∇ )
ou vers le haut (∆), le nombre de sites C à l’intérieur de la boucle triangulaire est plus grand
ou plus petit que celui de sites B. En conséquence, pour une orientation vers le bas, on peut
donc s’attendre à une relaxation géante des atomes de surface, ceux situés au-dessus de la
boucle triangulaire de lacunes rentrant dans les sites C à l’intérieur de la boucle triangulaire.
De tels phénomènes sont effectivement rencontrés dans le cas des petits agrégats de lacunes
dans un cristal volumique cfc [118,119]. Si nous enlevons maintenant les atomes de surface
restants, le plan A avec sa faute d’empilement triangulaire est correctement préparé pour
devenir la première couche de substrat recouverte par la couche d’Ag.
Nous donnons, dans le tableau IV.2, la relation entre le nombre de lacunes formant la
boucle de Frank initiale, le nombre de lacunes effectives de Cu, les atomes de Cu dans le
triangle fauté dans la première sous-couche après la relaxation géante des atomes de surface et
le nombre d’atomes d’Ag dans le triangle dans la première couche. Pour cette dernière
quantité, nous distinguons les atomes au-dessus du triangle fauté de Cu (atomes protubérants)
des atomes d’Ag des bords du triangle. Par cette construction, nous voyons donc que le cas de
quatre (resp. cinq) lacunes de Cu correspond précisément aux triangles d’Ag bordés par
quatre (resp. cinq) atomes et avec un (resp. trois) atomes qui ressortent. Il est donc possible
d’unifier les descriptions de la surstructure en terme de défauts ponctuels ou de boucles de
dislocation dans la première sous-couche. De plus, on peut expliquer ainsi l’orientation du
triangle (haut ou bas), ce qui a pour implication qu’une marche ne doit pas changer cette
orientation, tandis que la présence d’un joint enterré parallèle à la surface doit le faire.
nFrank
3
6
10
15
21
nCu
1
3
6
10
15
nv
2
3
4
5
6
Agbord
2
3
4
5
6
Agprotub
0
0
1
3
6
Tableau IV.2 : Relation entre la taille de la boucle de Frank (en nombre de lacunes, nFrank), le triangle fauté de
Cu (en nombre d’atomes de Cu, nCu), le nombre de lacunes de Cu par maille élémentaire, nv, la longueur des
bords de triangles d’Ag (en nombre d’atomes d’Ag, Agbord) et le nombre d’atomes d’Ag qui ressortent, Agprotub.
IV.2.1.3 - Analyse locale : cartes d’énergie interne
La principale caractéristique de la structure triangulaire est de remplacer des sites
apicaux par des sites ternaires, énergétiquement plus favorables, le prix à payer étant celui de
la faute d’empilement cfc/hcp, ou du moins de la dislocation qui l’entoure. On peut se
demander comment se font localement les bilans d’énergie, et quels sont les sites jouant un
rôle décisif dans la stabilisation de l’une ou l’autre structure. Nous avons donc tracé, sur les
figures IV.7-8, les cartes donnant les énergies de sites pour la couche d’Ag et les deux
premières sous-couches de Cu, avant et après l’introduction de lacunes de Cu. Au-delà, les
cartes sont quasi-identiques (plan de volume de Cu). On retrouve tout d’abord le côté très
pénalisant de l’environnement du site apical, ce qui se traduit par l’existence de régions
favorisant fortement la structure triangulaire, à la fois dans le plan d’Ag et dans le premier
sous-plan de Cu. Le prix de la faute d’empilement cfc/hcp est payé par le troisième plan de
Cu, où l’on peut voir que les lignes entourant la faute sont énergétiquement défavorables alors
que le profil est plat pour la structure Moiré. Il est surprenant de noter que, bien que le profil
de corrugation s’amortisse très lentement pour la structure Moiré, le profil d’énergie lui
s’atténue sur deux couches, ce qui montre que la corrélation de corrugation entre les plans se
fait par l’optimisation de l’énergie.
- 78 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
(a)
(α)
(b)
(c)
(β)
(γ)
Figure IV.7 : Cartes des énergies locales à 0 K dans le plan du dépôt d’Ag (a,α) et dans les deux premières
couches du substrat de Cu (b,β) et (c,γ) pour les surstructures (10x10) Ag/Cu(111), Moiré (a,b,c) et triangulaire
avec 5 lacunes de Cu (α,β,γ). L’échelle des couleurs est définie dans la figure ci-dessous. La zone encadrée
correspond à la maille définie dans la figure IV.2.a-d.
(a)
(b)
(c)
(α)
(β)
(γ)
Figure IV.8 : Mêmes cartes que dans la figure ci-dessus mais à 3D pour définir le code des couleurs. L’unité
d’énergie est l’eV/at.
- 79 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Au contraire, la structure triangulaire, pour laquelle la corrugation atomique était
fortement amortie, a un profil d’énergie lié à la faute d’empilement qui s’étend plus loin. En
résumé, la structure triangulaire minimise l’énergie par rapport à la structure Moiré sur les
deux premiers plans, mais est pénalisée par l’énergie de la boucle de dislocation sur le
troisième plan.
IV.2.1.4 - Analyse locale de la contrainte : cartes de pression
Une autre façon de décrire la préférence du système pour former telle ou telle
surstructure, est de considérer l’accommodation des contraintes issues du double effet
(compétitif) de la présence d’une surface (qui induit une contrainte en tension, due à la
présence de liaisons coupées), et du désaccord de maille (qui fait qu’une couche d’Ag
pseudomorphe au substrat de Cu connaîtrait de fortes contraintes en compression). Afin
d’avoir une vision à l’échelle atomique de la distribution des contraintes dans le système,
nous montrons sur les figures IV.9-10 les cartes de la pression locale hydrostatique définie par
les éqs.(2.32)-(2.33) [85] et subie par les atomes des trois premiers plans : le plan de
l’adsorbat Ag et les deux premières couches du substrat de Cu. Une première remarque
générale est que, à la différence des cartes d’énergie, le profil de pression ressemble plus à
celui des corrugations, à savoir qu’il s’amortit plus lentement en fonction de la profondeur
quelle que soit la structure.
Dans le cas de la structure Moiré (figures IV.9-10a-c), on constate une inversion quasitotale entre les pressions des couches d’Ag et de Cu. Plus précisément, tous les atomes d’Ag
subissent une pression en tension, les sites les plus en tension étant localisés dans les régions
environnant la position apicale par rapport au premier plan de Cu sous-jacent. Inversement, il
existe dans le plan de Cu à la fois des régions en compression et en tension, les sites en
compression maximale se trouvant juste en dessous de ceux d’Ag qui présentent la contrainte
en tension maximale. Les plans ultérieurs sous-jacents subissent une compression similaire
qui s’amortit complètement seulement au-delà de la dixième couche. Ceci implique que les
régions les plus contraintes se composent de colonnes d’atomes se terminant par les sites les
plus en tension de la couche d’Ag. La carte de pression associée à la structure triangulaire
(figures IV.9-10α-γ), confirme que l’introduction des lacunes est un moyen efficace pour
relaxer les contraintes ... du moins dans les deux plans d’interface Ag-Cu. L’effet essentiel est
de réduire et distribuer plus uniformément la contrainte en tension dans le plan d’Ag et celle
en compression dans le premier plan de Cu.
Ces résultats confirment que, dans Ag/Cu (111) comme dans Au/Ni(111), une façon
particulièrement efficace qu’a le système de relaxer ses contraintes est de coupler la
reconstruction de la couche de surface avec celle de la première couche de substrat par
l’introduction d’une boucle de dislocation. La différence essentielle entre les deux systèmes
provient de la stabilité de la structure triangulaire sans avoir recours à un quelconque mélange
de Cu-Ag dans la couche d’adatomes déposés, i.e. sans formation d’un alliage de surface dilué
bidimensionel comme observé pour Au/Ni (111).
Il serait intéressant d’identifier les mécanismes atomiques impliqués dans la création de
la faute d’empilement. Ainsi, une étude préliminaire [120] par Dynamique Moléculaire et par
la méthode de recherche de col NEB (Nudged Elastic Band Method) s’est attachée à trouver
les états de transition et les énergies d’activation correspondantes afin d’étudier les
mécanismes de nucléation, croissance et le mouvement de ces boucles de dislocation à
l’interface Ag/Cu(111). Dans notre cas, la valeur de l’énergie de formation de lacunes très
basse, voire négative, sur des sites du premier plan du substrat de Cu peut nous renseigner sur
le mécanisme atomique responsable de l’apparition de la surstructure. Ce point fait l’objet du
paragraphe qui suit.
- 80 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
(a)
(α)
(b)
(c)
(β)
(γ)
Figure IV.9 : Cartes des pressions locales à 0 K dans le plan du dépôt d’Ag (a,α) et dans les deux premières
couches du substrat de Cu (b,β) et (c,γ) pour les surstructures (10x10) Ag/Cu(111), Moiré (a,b,c) et triangulaire
avec 5 lacunes de Cu (α,β,γ). L’échelle des couleurs est définie dans la figure ci-dessous. La zone encadrée
correspond à la maille définie dans la figure IV.2.a-d.
(a)
(b)
(c)
(α)
(β)
(γ)
Figure IV.10 : Mêmes cartes que dans la figure ci-dessus mais à 3D pour définir le code des couleurs. L’unité
de pression est le kbar.
- 81 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.2.1.5 - Lacunes interfaciales ségrégées et lacunes constitutives [111]
Forts des conclusions du chapitre précédent, nous allons adopter ici un point de vue
différent. Plutôt que de considérer que la force motrice de la reconstruction est l’optimisation
de la coordinance, nous allons focaliser notre attention sur l’efficacité de la création de
lacunes dans le substrat comme mode de relaxation des contraintes, comme c’est le cas par
exemple au cœur des agrégats icosaédriques [121], ou dans certains joints de grains pour
lesquels l’optimisation structurale conduit à la création de lacunes, ou même de plan de
lacunes, par rapport au réseau de coïncidence [122]. Nous verrons que cette approche est plus
générale que la précédente. Elle nous permettra, en outre, de discuter la relation qui existe
entre lacunes constitutives (à énergie de formation négative) qui abaissent l’énergie
d’interface, et lacunes ségrégées (à énergie de formation inférieure à celle de volume, tout en
restant positive) qui conduisent à l’augmentation de la concentration d’équilibre de lacunes
sur certains sites par rapport à la concentration volumique à température finie. Nous
montrerons aussi que cette réduction des contraintes locales est aussi la force motrice de la
ségrégation chimique de Ag dans le premier plan du substrat.
Pour une surstructure donnée, l’énergie de formation de lacunes sur un site i, E form,lac
,
i
est obtenue comme la différence d’énergie totale entre l’état initial correspondant à la
surstructure relaxée considérée et l’état final où un atome de Cu au site i a été enlevé et
replacé virtuellement à son potentiel chimique, i.e. l’énergie de cohésion d’un cristal pur de
Cu. On peut généraliser cette définition à l’énergie de formation d’un amas de Nv lacunes sur
les sites i1, i2, ..., i N v : l’état initial est le même que précédemment alors que dans l’état final
les atomes sur les Nv sites considérés ont été enlevés et replacés une nouvelle fois à leur
potentiel chimique. En raison de l’interaction existant entre les lacunes, l’énergie de formation
de l’amas de Nv lacunes n’est pas égale à la somme de l’énergie de formation de chaque
lacune de l’amas. Notons qu’une énergie de formation négative pour une lacune ou pour un
amas de lacunes signifie qu’il existe des défauts constitutifs ou, en d’autres termes, qu’ils
constituent un moyen pratique pour définir la structure la plus stable à partir d’une structure
"mère", moins stable mais plus facile à décrire. Dans ce contexte, l’énergie de ségrégation de
, est le bilan énergétique impliquant une lacune, initialement dans
lacunes sur un site i, E seg,lac
i
le volume de Cu, échangée avec l’atome de Cu au site i de la première sous-couche, i.e. c’est
la différence entre les énergies de formation sur ce site et en volume :
seg,lac
form,lac
form,lac
Ei
= Ei
− E vol
(4.4)
seg,lac
Dans un formalisme de champ moyen, E i
relie la concentration de lacunes sur le
lac
site i, c i , à la concentration de lacunes dans le volume c lac
vol par l’équation [2,4] :
lac
lac
ci
c vol
E seg,lac
i
)
(4.5)
lac =
lac exp ( −
1 − ci
1 − c vol
k BT
Une valeur négative de E seg,lac
indique que la concentration de lacunes sur le site i est plus
i
forte que celle en volume. Comme c lac
vol est donnée par :
lac
c vol
E form,lac
vol
=
exp
(
−
)
(4.6)
1 − c lac
k
vol
BT
l’équation (4.5) peut être ré-écrite en utilisant les équations (4.4) et (4.6) :
E form,lac
c lac
i
i
).
(4.7)
lac = exp (−
1 − ci
k BT
Les équations (4.5) et (4.7) ne sont valides que si E form,lac
est positive, ce qui introduit
i
la classification suivante :
* E form,lac
< 0 : il y a une lacune constitutive sur le site i, permettant de définir une
i
nouvelle structure de l’interface.
- 82 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
* E form,lac
> 0 et E seg,lac
< 0 : il y a un enrichissement en lacunes au site i. Quand T
i
i
lac
décroît, le facteur d’enrichissement c lac
i / c vol croît (Eq. (4.5)), tandis que la concentration de
lacunes c lac
diminue (Eq. (4.7)) et s’annule à T = 0 K.
i
form,lac
* Ei
> 0 et E seg,lac
> 0 : il y a appauvrissement en lacunes au site i, par rapport à la
i
concentration de volume. Comme précédemment, quand T décroît, c lac
diminue et s’annule à
i
lac
lac
T = 0 K, mais maintenant, le facteur d’enrichissement c i / c vol décroît également.
De façon similaire, l’énergie de ségrégation (chimique) d’un atome d’Ag sur le site i,
seg,Ag
, est définie comme le bilan énergétique impliquant un atome d’Ag, initialement dans le
Ei
volume de Cu, échangé avec un atome de Cu au site i. Comme pour l’équation (4.5), un
formalisme de champ moyen conduit à la relation suivante entre la concentration d’Ag au site
Ag
i, c Ag
i , et celle de volume, c vol [2,4] :
ciAg
c Ag
E seg,Ag
vol
i
=
exp
(−
).
(4.8)
Ag
1− c Ag
1−
c
k
i
vol
BT
Là aussi, Eseg,Ag
< 0 signifie que le site i est enrichi en Ag, et le facteur d’enrichissement
i
Ag
Ag
Ag
c i / c vol augmente lorsque T diminue. En revanche, contrairement au cas d’une lacune, c i
augmente aussi car, au contraire de la concentration de lacunes en volume, c Ag
est
vol
indépendant de la température, du moins dans le domaine de la solution solide Cu(Ag).
lacunes
constitutives
(a)
(b)
(c)
(α)
(β)
(γ)
Figure IV.11 : Cartes de pression locale (a, α), d’énergie de formation de lacune (b, β) et d’énergie de
ségrégation de Ag (c, γ) dans le premier plan de cuivre sous la surface pour les surstructures "Moiré" (a, b, c) et
"triangulaire" (α, β, γ). Les couches utilisées dans le processus de relaxation sont composées de 42 plans.
L’échelle de gris est telle que les sites les plus clairs (resp. sombres) sont les plus en tension (resp. en
compression) (a, α), les plus favorables (resp. défavorables) à la formation de lacune (b, β) et à la ségrégation
de Ag (c, γ). Les valeurs extrêmes sont Pmin = - 75 kbar, Pmax = + 85 kbar (a, α), Emin = - 0,11 eV, Emax = + 1,18
eV (b, β), et Emin = - 0,42 eV, Emax = + 0,21 eV (c, γ).
Nous allons maintenant montrer comment la connaissance des pressions locales
permet d’une part d’optimiser la structure interfaciale à l’aide des lacunes constitutives et
d’autre part de prédire la ségrégation, tant des lacunes que des atomes d’Ag. Considérons tout
d’abord la structure Moiré. Nous rappelons sur la figure IV.11a la carte des pressions locales
sur le premier plan de cuivre sous la surface d’argent, déjà présentée sur la figure IV.9-10b
mais étendue à quatre mailles cette fois. L’argument selon lequel l’introduction de lacunes
pourrait être un moyen efficace pour relaxer des contraintes en compression doit se traduire
- 83 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
par de faibles énergies de formation de lacune dans les régions les plus comprimées. C’est
effectivement ce qu’on constate sur la carte des énergies de formation de lacunes présentée
dans la figure IV.11b : elle est très corrélée à celle des pressions locales et l’énergie de
formation moyenne dans les zones en compression n’est que de 0,15 eV, valeur très faible par
rapport à la valeur de 1,24 eV en volume. Ceci doit conduire en particulier à une très forte
ségrégation d’équilibre des lacunes dans ces régions, la concentration lacunaire sur ces sites
étant typiquement de 10-3 à T = 300 K, à comparer à une concentration volumique de 10-21 à
cette température. De façon plus spectaculaire encore, trois sites, indiqués par des flèches sur
la figure IV.11b, connaissent une énergie de formation négative, signature des lacunes de
constitution (défauts constitutifs pour la structure Moiré (10x10)). En revanche, on peut voir
sur la figure IV.12 que la création simultanée de lacunes sur ces trois sites conduit à des
énergies de formation comparables à celle de volume, ce qui montre les limites de l’utilisation
de la carte de pression comme guide pour définir une nouvelle surstructure à partir de lacunes
de constitution isolées. Inversement, on peut voir sur cette même figure que si l’on enlève
simultanément Nv atomes le long d’une direction dense contenant la position apicale, on
obtient une énergie de formation négative pour ces amas de lacunes pour 2 ≤ Nv ≤ 6. La
valeur positive de l’énergie de formation pour Nv = 1 est cohérente avec le fait que le site
placé sous la position "on-top" n’est pas un des trois sites correspondant aux lacunes de
constitution isolées. Ainsi, par un effet subtil d’interaction entre lacunes, un amas de lacunes,
dites de constitution quand elles sont isolées, acquiert une énergie de formation positive, alors
qu’un amas formé de lacunes à énergies de formation positives, quand elles sont considérées
isolément, devient un défaut constitutif !
form,vac
E
(eV)
3
2,5
ˆ partir de la
structure triangulaire
2
1,5
form,vac
E vol
1
0,5
ˆ partir de la
structure Moir
0
-0,5
-1
0
5
10
15
N (lacunes de Cu)
v
Figure IV.12 : Energie de formation d’un amas de Nv lacunes dans le premier plan sous-jacent en fonction de
Nv pour les structures "Moiré" (cercles vides et pleins) et "triangulaire" (triangles pleins), celle-ci étant
construite en introduisant cinq lacunes dans la structure "Moiré". Les lacunes sont créées soit dans les sites
correspondant aux plus faibles énergies de formation de la lacune isolée (trait plein) (cf. figures IV.11(b,β)) soit
selon une direction dense contenant la position on-top (tiretés). La valeur de l’énergie de formation d’une
lacune de cuivre en volume est également rappelée.
Nous n’avons pas considéré ici la formation de lacunes dans le plan d’Ag puisque
nous savons déjà (cf. figure IV.4) que leur énergie de formation y est toujours positive, donc
que les adlacunes d’Ag ne sont pas des défauts constitutifs de surface. Ce résultat, qui est
assez surprenant, vient de la compétition entre l’effet de coordination et celui de la pression
locale. En effet, le site apical d’Ag, qui selon l’argument de moindre coordinence devrait être
- 84 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
le site le plus favorable pour la formation de lacunes, est aussi le site le plus en tension, donc
le plus défavorable en terme de pressions locales.
Même si, en accord avec la figure IV.12, la structure optimale devrait être obtenue
pour Nv = 3, la stucture triangulaire observée par STM (figure I.13) est plus proche de la carte
des élévations de la figure IV.2b pour Nv = 5, qui sera donc utilisée par la suite. Dans ce cas,
il n’y a plus de position apicale, les lacunes ayant formé une boucle de dislocation partielle
autour d’une faute d’empilement localisée. Aussi, plutôt que de parler en termes de défauts
constitutifs de la structure Moiré, nous décrirons la structure triangulaire comme une nouvelle
structure per se. Pour cette structure la carte des pressions locales sur le premier plan de
cuivre montre qu’il existe encore des sites en compression près des bords du triangle fauté
(figure IV.11α). De façon cohérente, la carte des énergies de formation de lacune
correspondante (figure IV.11β) montre bien des énergies de formation très faibles sur ces
sites, mais cette fois positives (0,024 eV), conduisant à des concentrations lacunaires aussi
élevées que 10-1 à température ambiante. La monolacune dans la structure triangulaire
(10x10) n’est donc plus un défaut constitutif, mais bien un défaut thermique de très forte
concentration ! De nouveau, nous pouvons observer une interaction violemment répulsive
entre lacunes, car la formation simultanée de deux ou trois lacunes sur ces sites conduit à des
énergies de formation proches de celle du volume (figure IV.12).
Nous avons vu que la carte des pressions locales est un bon guide pour localiser les
lacunes constitutives et ségrégées dans les sites en compression de la première sous-couche.
Nous pouvons nous demander si elles ont la même efficacité pour prédire la carte d’énergie de
ségrégation d’Ag dans la première sous-couche. Ainsi, dans le cas de la solution solide
Cu(Ag) (111), une fois la surstructure de surface établie en raison de la forte ségrégation
superficielle de l’argent résultant de la synergie entre les effets d’énergie de surface, de taille
et d’alliage [4,47], deux raisons peuvent conduire à un enrichissement en argent dans le
premier plan sous-jacent. D’abord, une forte tendance à la démixtion, comme celle présente
dans le système Cu-Ag, donne généralement lieu à un profil de concentration monotone à
partir de la surface et donc à un enrichissement en Ag dans les premiers plans sous la surface.
Par ailleurs, la carte des pressions (figure IV.11a-α) indique que la surstructure de surface fait
apparaître dans le premier plan sous-jacent, non seulement des sites en compression,
favorables à la ségrégation lacunaire comme nous l’avons vu ci-dessus, mais aussi des sites en
tension, qui doivent être favorables à la ségrégation d’argent en raison du plus grand rayon
atomique de cet élément. C’est effectivement ce que montre la carte des énergies de
ségrégation de l’argent dans ce plan (figure IV.11c-γ). On remarque d’une part que cette carte
est quasiment inverse de celle des énergies de formation de lacune, ce qui montre que
l’argument stérique est prépondérant, et d’autre part qu’elle diffère notablement d’une
surstructure à l’autre. Ainsi, la surstructure Moiré devrait conduire à un enrichissement
d’argent beaucoup plus inhomogène dans le premier plan sous-jacent que la surstructure
triangulaire, de façon cohérente avec la carte des pressions locales (figures IV.11a-α).
Ces résultats illustrent le fort couplage entre surstructure et ségrégation superficielle,
tant des lacunes que de l’une ou l’autre des espèces chimiques. Ainsi, la ségrégation chimique
sur la première sous-couche dépend fortement de la surstructure de surface. Ils donnent aussi
des indications sur les mécanismes atomiques permettant l’établissement de ces surstructures,
ainsi que sur ceux conduisant à la dissolution d’une monocouche d’argent déposée. On peut
en particulier se demander si la ségrégation lacunaire sur certains sites peut conduire à des
chemins préférentiels de dissolution. La présente étude montre que ce n’est pas si simple,
puisque le site en compression occupé préférentiellement par une lacune dans le sous-plan de
Cu n’est pas favorable à recevoir un “gros” atome d’Ag de surface ! Il faut donc recourir à
une étude complète des énergies de migration au voisinage de la surface, ce qui est l’une des
perspectives offertes par la présente étude.
- 85 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.2.2 - Effets de la température [123,124]
Malgré leur grande différence structurale, les structures Moiré et triangulaire
présentent des énergies très voisines, la seconde n’étant favorisée par rapport à la première
que de moins de 0,005 eV/at ! On peut dès lors s’interroger sur la capacité de calculs effectués
à T = 0 K à rendre compte d’observations collectées à température ambiante ou même
supérieure, d’autant que ces mêmes expériences semblent indiquer une transition entre les
deux structures lorsqu’on augmente la température ! Il est donc légitime de se demander si la
variation des relaxations de surface avec la température ou les vibrations atomiques peuvent
contribuer de façon significative à stabiliser l’une ou l’autre structure. A notre connaissance il
y a très peu d’estimations du rôle de la température, et plus particulièrement des phonons,
dans la formation des surstructures durant la croissance d’un élément sur un autre dans un
système à fort désaccord de maille. Ce rôle se manifeste sous deux aspects : variation de
l’énergie interne et introduction d’une entropie vibrationnelle. Afin de mieux le cerner, nous
allons considérer séparément ces deux contributions. De plus, ayant déjà insisté sur
l’influence des inhomogénéités de sites à T = 0 K (du point de vue de la structure, des
propriétés énergétiques, et de la contrainte), nous détaillerons de façon similaire à température
finie les contributions locales des sites des premiers plans de surface. Notre but n’étant pas de
décrire exactement les conditions expérimentales, mais plutôt de caractériser sans ambiguité
un régime haute température, donc bien au-dessus de la température de Debye, tous les
calculs qui suivent seront effectués à T = 600 K.
IV.2.2.1 - Energie interne
L’énergie interne d’adsorption à température finie est définie de la même façon qu’à
température nulle, l’équation (4.2) mettant en jeu des quantités calculées à la température T
considérée. Ainsi, la référence d’énergie pour les atomes d’Ag, E Ag
réf , qui était prise égale à
zéro à 0 K, est maintenant égale à 3/2 kB T à température finie. Ces quantités sont calculées
par simulation Monte Carlo, suivant le protocole détaillé au § II.2.3. Ainsi, conformément à
ce protocole, nous avons commencé par vérifier la cohérence des deux approches utilisées :
Dynamique Moléculaire trempée et Monte Carlo, en extrapolant à T = 0 K les résultats
obtenus par cette dernière méthode à 130 K, 70 K et 10 K. Les valeurs correspondantes de
Eads sont comparées dans le tableau IV.3, pour les surstructures (nxn) Moiré et triangulaire et
différentes valeurs de la périodicité n. On constate que l’accord est remarquable, la différence
étant inférieure à 0,5 meV/at. Pour chaque surstructure, le minimum de Eads correspond à n =
10, la structure la plus stable étant bien la triangulaire une fois que les lacunes ont été créées
dans le premier plan de Cu.
structure (nxn)
Moiré
Triangulaire
méthode
Dyn. Mol. trempée
Monte Carlo interpol.
Dyn. Mol. trempée
Monte Carlo interpol.
(8x8)
- 2,975
- 2,964
(9x9)
- 2,984
- 2,984
-2,986
(10x10)
- 2,987
- 2,987
- 2,995
- 2,995
(11x11)
- 2,986
- 2,986
- 2,994
- 2,993
Tableau IV.3 : Eads (en eV/at) à T = 0 K (en D.M. et en M.C.) pour les structures (nxn) Moiré et triangulaire.
Ces résultats à T = 0 K confirment que la différence de Eads entre les deux
surstructures pour une périodicité n donnée, ou entre deux différentes valeurs de n pour la
même surstructure, est de l’ordre de quelques meV. Par conséquent, pour analyser l’évolution
de stabilité relative en fonction de la température, une précision d’à peu près 1 meV est
nécessaire lorsqu’on détermine Eads à partir des simulations Monte Carlo à température finie.
Nous avons déjà évoqué au § II.2.3 le problème de la référence de Cu pur. L’analyse détaillée
- 86 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
des énergies, illustrée sur la figure IV.13 pour les deux structures, indique que le nombre de
MCS adopté (60000 MCS) conduit bien à des fluctuations de la moyenne cumulée sur
l’énergie interne inférieures à 1 meV. Les flèches pointent les runs conduisant à un calcul
d’énergie proche de cette valeur moyenne à partir des positions dites "instantanées", i.e.
moyennées uniquement sur le run. Ces runs nous seront utiles dans l’analyse locale qui suit.
E
E
ads
Moir
ads
(9x9)
-2,96
Triangle (9x9)
-2,96
-2,97
-2,97
12
-2,98
-2,98
-2,99
12
-2,99
6
Inst
Cum
<pos> Inst
<pos> Cum
-3
-3,01
0
2
4
Eads
6
8
10
run
12
Inst
Cum
<pos> Inst
<pos> Cum
-3
-3,01
0
2
4
6
8
10
run
12
E
Moir
ads
(10x10)
-2,96
-2,96
-2,97
-2,97
Triangle (10x10)
8
12
-2,98
-2,98
-2,99
-2,99
10
Inst
Cum
<pos> Inst
<pos> Cum
-3
2
4
Eads
6
Moir
8
Inst
Cum
<pos> Inst
<pos> Cum
-3
-3,01
0
5
10
12
run
-3,01
0
2
4
Eads
(11x11)
-2,96
-2,96
-2,97
-2,97
-2,98
-2,98
-2,99
6
-2,99
Inst
Cum
<pos> Inst
<pos> Cum
-3,01
0
2
4
6
8
10
12
run
10
run
12
Triangle (11x11)
8
8
-3
8
Inst
Cum
<pos> Inst
<pos> Cum
-3
-3,01
0
2
4
6
8
10
12
run
Figure IV.13 : Influence de la température sur l’énergie interne (approximation quasi-harmonique) à partir de
simulations Monte Carlo pour les structures Moiré et triangulaire (nxn). Nous avons représenté les valeurs
moyennes <∆E> (cercles) et celles calculées à partir des positions moyennes ∆E(<R>) (carrés), soit
instantanées (traits tiretés) ou cumulées (trait plein), pour n = 9, 10, 11. Un run représente 5000 MCS.
- 87 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
A partir de la valeur moyenne des énergies issues de la figure précédente (lignes
droites), et des courbes équivalentes pour les autres valeurs de n, nous sommes en mesure de
tracer la variation l’énergie interne Eads à 600K en fonction de l’indice de périodicité n pour
les deux surstructures. C’est l’objet de la figure IV.14 où ces courbes sont comparées à celles
précédemment obtenues à T = 0 K. L’effet de la température sur Eads est manifeste. Il déplace
le minimum de Eads vers les plus hautes valeurs de n pour la structure triangulaire, tandis qu’il
fait apparaître deux minima pour la structure Moiré à n = 9 et n = 12, ces trois minima étant
dégénérés en énergie. En fait, pour 9 ≤ n ≤ 12, Eads ne dépend que légèrement de T pour la
structure Moiré, alors qu’elle augmente de façon très significative (de plus de 10 meV/at)
pour la structure triangulaire. En conclusion, en ce qui concerne l’énergie interne, augmenter
la température remplace la stabilité de la structure triangulaire (10x10) à T = 0 K par une
"tristabilité" des structures Moiré (9x9), (12x12) et triangulaire (12x12) à T = 600 K.
∆E
-2,95
-2,96
-2,97
-2,98
-2,99
-3
7
8
9
10
11
12
13
nxn
Figure IV.14 : Variation de l’énergie interne d’adsorption par atome d’Ag pour les surstructures (nxn) Moiré
(cercles) et triangulaire (triangles) à T = 0 K (traits tiretés) et 600 K (traits pleins) en fonction de n.
Il est tentant de voir si l’on peut identifier de façon simple l’origine de cette inversion.
Pour cela, nous avons recours une nouvelle fois à une analyse locale de l’énergie interne, mais
cette fois par plan et non plus par site comme précédemment. Dans ce cas, l’équation (4.2)
peut être décomposée en contributions par plan :
E ads = ∑ ∆E p
(4.9)
p
qui s’expriment en énergies d’excès par plan, induites par l’adsorption :

1
Ag
Ag
∆E 0 = ˜  ∑ E i 0 (Ag / Cu) − E ref ,
N  i0

1
Cu
Cu 
Cu
∆E1 = ˜  ∑ E i1 (Ag / Cu) − E 1 (Cu) − N lac (E 1 (Cu) − E coh )
N  i1


1
∆E p>1 = ˜  ∑ E Cu
i p (Ag / Cu ) − E p ( Cu)  ,
N  ip

(
)
(
)
(4.10)
Cu
où E Ag
i 0 et E i p sont respectivement les énergies de site (2.17) dans le système Ag/Cu, pour les
sites ip localisés respectivement dans le plan d’Ag (p = 0) et dans un plan de Cu parallèle à la
surface (p = 1 : 1ère couche de Cu, p = 2 : seconde couche de Cu, ...). Ep(Cu) est l’énergie du
site correspondant dans le substrat de Cu pur semi-infini avant adsorption, qui est seulement
indexée par l’indice p puisque tous les sites sont équivalents dans un plan donné p. Il n’est
- 88 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
malheureusement pas possible de dégager des énergies de site de la simulation Monte Carlo.
Nous avons donc pour cela utilisé des configurations instantanées significatives, i.e. d’énergie
totale proche de la valeur moyenne. Ces configurations sont indiquées par des flèches sur la
figure IV.13. Nous avons vérifié lorsqu’on pouvait encadrer la valeur moyenne par deux
configurations que le résultat ne dépendait pas du choix de l’une ou l’autre de ces
configurations. La variation correspondante de ∆Ep en fonction de la profondeur, pour les
deux surstructures (10x10) Moiré et Triangulaire, est portée sur la figure IV.15 à T = 0 K et T
= 600 K. On retrouve bien sûr à T = 0 K, l’essentiel des informations tirées des cartes locales
de la figure IV.7-8, i.e. une structure triangulaire favorisée sur les deux plans de l’interface
Ag/Cu (p = 0, 1) mais pénalisée sur le plan de cuivre suivant (p = 2). L’analyse des courbes à
T = 600 K montre que l’effet essentiel de la température se localise sur le plan de Cu à
l’interface Cu/Ag (p = 1), qui est maintenant indifférent à la nature de la surstructure, les
résultats étant inchangés pour les deux autres plans (plan d’Ag (p = 0) et second plan de Cu (p
= 2)). Le bilan est que la température pénalise la structure triangulaire au point de la trouver
dégénérée avec la structure Moiré pour n = 10. La légère différence avec la figure IV.14 où
l’effet de la température allait jusqu’à légèrement inverser les stabilités est due à l’imprécision
sur les énergies locales calculées à partir des configurations instantanées. Néanmoins, l’effet
global est bien que, du point de vue de l’énergie interne, la température favorise la structure
Moiré, et ce au niveau du plan de Cu à l’interface avec le plan d’Ag. Il s’agit là d’un effet
purement anharmonique, dont la figure IV.2 indique qu’il doit se manifester essentiellement
sur les atomes de Cu du cœur de la dislocation (i.e. sur les bords du triangle) dont les liaisons
parallèles sont très distordues. Toutefois une analyse détaillée des configurations reste à faire.
∆ Ep (eV/at.Ag)
∆ Ep (eV/at.Ag)
0,2
0,2
0,1
0,1
0
0
-0,1
-0,1
-0,2
-0,2
0
1
∆ Epmoir - ∆ E ptriangle (eV/at.Ag)
2
3
p (n¡ plan)
(a)
0
∆ Epmoir - ∆ E ptriangle (eV/at.Ag)
0,02
0,02
0,01
0,01
0
0
-0,01
-0,01
0
1
2
(b)
1
3
p (n¡ plan)
0
1
2
3
p (n¡ plan)
3
p (n¡ plan)
(α)
2
(β)
Figure IV.15 : Comparaison des énergies internes d’excès à T = 0 K (a,b) et T = 600 K (α,β). Les profils
d’énergie sont donnés en (a,α) pour les surstructures (10x10) Moiré (trait tireté, ) et triangulaire (ligne pleine,
∆) en fonction du plan p. La différence d’énergie d’excès entre les deux surstructures, par plan (trait plein, „) et
cumulée (trait pointillé, ‹) est tracée en (b,β). Pour des raisons d’échelle, nous avons choisi ici comme
référence des atomes d’Ag, E Ag
ref , leur énergie en volume plutôt qu’en phase vapeur comme dans la figure IV.14.
- 89 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.2.2.2 - Analyse des densités locales de phonons
Outre son rôle dans l’énergie interne, la température introduit un terme d’entropie
vibrationnelle, que l’on peut calculer à partir de la connaissance des densités locales de
phonons (LPDS), via l’équation (2.35). Comme expliqué au § II.2.2, ces LPDS peuvent être
calculées sur tous les sites perturbés par le dépôt par une méthode de récursion, qui permet
une analyse détaillée de l’influence de l’environnement local. Deux types d’approximation
sont alors possibles, suivant que ces LPDS sont calculées, à T = 600 K, à partir des positions
d’équilibre des atomes à T = 0 K obtenues par Dynamique Moléculaire Trempée
(approximation harmonique : HA) ou à partir des positions moyennes issues de simulation
Monte Carlo à T = 600 K, qui prennent en compte leurs modifications, à la fois dans le
volume (expansion thermique) et au voisinage de défauts (expansion thermique d’excès près
de la surface). Ce deuxième protocole (approximation quasi-harmonique inhomogène :
QHIA) est plus satisfaisant puisque, si l’énergie potentielle n’est encore développée qu’au
second ordre par rapport aux déplacements, elle l’est cependant à partir des positions
d’équilibre à la température considérée. Nous reviendrons sur les mérites respectifs des deux
approximations pour le calcul de l’entropie. Pour ce qui est des LPDS, les deux
approximations donnent qualitativement les mêmes résultats (à un facteur d’échelle près sur la
fréquence maximale) de sorte que nous ne présenterons ici que les courbes obtenues dans
l’approximation harmonique.
Le grand nombre de sites inéquivalents pour chaque surstructure interdit une
présentation exhaustive de toutes les LPDS. Il est donc nécessaire d’utiliser un guide simple
pour répertorier les principaux effets vibrationnels apparaissant dans les premiers plans de
surface. Comme les propriétés de vibration sont fortement corrélées à la pression locale, nous
allons ré-utiliser les cartes de pression de la figure IV.9-10. Ces cartes permettent d’identifier
grossièrement deux régions principales dans le plan de surface d’Ag, correspondant soit à une
contrainte en tension (région I) soit à l’absence de contrainte (région II). Comme nous
pouvons le voir dans la figure IV.16, la région II contient essentiellement des atomes d’Ag
occupant des sites ternaires par rapport à la sous-couche de Cu, tandis que dans la région I les
atomes d’Ag présentent une coordination soit plus basse (Moiré) soit plus grande (triangle).
Région I
Région I
Région II
Région II
Figure IV.16 : Positions relaxées des deux premières couches des structures Ag/Cu(111) (10x10) Moiré et
triangulaire, en vue de dessus. Les atomes d’Ag (Cu) sont représentés par des cercles vides (grisés).
Montrons tout d’abord comment les LPDS sont modifiées au voisinage de l’extrême
surface dans l’état final (couche d’Ag adsorbée sur un substrat de Cu) par rapport à celui
initial (volume d’Ag et substrat semi-infini pur Cu), et ceci pour les deux surstructures. Nous
présentons ainsi dans la figure IV.17 les LPDS pour une paire de sites Ag-Cu dans chacune
des deux régions I et II, en choisissant les atomes les plus caractéristiques. Dans le but de bien
les identifier, ces atomes seront référés par X(NXX,NXY) avec X = Cu ou Ag, NXX (resp. NXY)
étant le nombre de plus proches voisins de même espèce (resp. d’espèce différente). Nous
montrons ainsi dans la région I : les sites apicaux Ag(6,1)-Cu(9,1) pour la structure Moiré et
- 90 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
les sites de coins Ag(6,5)-Cu(7,3) pour la structure triangulaire. Dans la région II, quelle que
soit la structure, la paire est Ag(6,3)-Cu(9,3) impliquant le même nombre total de voisins que
dans le cas de la surface (111) d’un métal pur M(= Cu, Ag) : M(9,0)-M(12,0).
n(ν)
n(ν)
2,5
2,5
moir
Ag(6,1) Ag(6,3)
2
2
1,5
1,5
1
1
0,5
0,5
0
0
2
4
6
8
ν (THz)
0
0
n(ν)
n(ν)
2,5
2,5
2
2
triangle
Ag(6,5) Ag(6,3)
1,5
1
0,5
0,5
0
2
4
2
4
6
8
ν (THz)
n(ν)
6
8
ν (THz)
8
ν (THz)
triangle
Cu(9,3) Cu(7,3)
1,5
1
0
moir
Cu(9,3) Cu(9,1)
0
0
2
4
6
n(ν)
2,5
2,5
pure
Ag(9,0) Ag(12,0)
2
2
1,5
1,5
1
1
0,5
0,5
0
0
2
4
6
8
ν (THz)
pure
Cu(9,0) Cu(12,0)
0
0
2
4
6
8
ν (THz)
Figure IV.17 : Densités d’états locales de phonons (LPDS) pour Ag/Cu(111) dans l’approximation harmonique
sur les sites les plus caractéristiques de la couche d’Ag et de la première sous-couche de Cu, définis dans la
figure IV.16 pour les structures (10x10) Moiré et triangulaire. Les LPDS correspondant aux atomes d’Ag et Cu
de volume pur et de surface sont aussi données dans un souci de comparaison.
Plusieurs caractéristiques apparaissent dans la figure IV.17, qui peuvent être analysées
à partir de deux arguments généraux différents :
i) d’un point de vue chimique, la LPDS pour un atome d’Ag volumique est
caractérisée par un déplacement total vers les plus basses fréquences par rapport à la LPDS du
Cu volumique, en raison de la masse plus élevée de l’argent. Ceci conduit à des fréquences
Cu
maximales de l’ordre de υ Ag
max ≈ 4,7 THz pour Ag et υ max ≈ 7,7 THz pour Cu.
ii) d’un point de vue géométrique, une contrainte en tension est associée à un
plus grand volume libre et donc à un déplacement vers les plus basses fréquences pouvant
conduire à un mode résonnant. Parmi les possibles sources de contrainte en tension, on
recense la rupture des liaisons à la surface (qui entraîne un mode résonnant à une fréquence
0,4 υ max pour la surface (111), en bon accord avec les calculs réalisés avec les modèles à
- 91 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
force centrale [82]) ou bien la dissolution d’une impureté de petit rayon atomique dans une
matrice d’un élément de plus grand rayon.
Considérons tout d’abord les sites d’Ag dans la région II. Nous observons que l’allure
générale de la LPDS pour le site ternaire Ag(6,3) est très similaire pour les deux structures
(Moiré ou triangulaire), et ressemble beaucoup à celle d’un atome Ag(9,0) sur une surface
propre (111), qui se caractérise par un déplacement vers les basses fréquences par rapport à un
atome de volume Ag(12,0) en raison des liaisons coupées. Pour les deux surstructures, un
élargissement sur une plus grande gamme de fréquences s’ajoute à ce déplacement à cause de
l’interaction avec le substrat de Cu. Au contraire, les LPDS des sites de la région I différent
fortement entre les deux structures. Dans le cas de la Moiré, la LPDS du site apical Ag(6,1)
présente un fort déplacement vers la région de basses fréquences et un mode localisé très
étroit à ≈ 0,2 υ Ag
max . Une analyse du spectre le long des directions x, y et z montre que ce mode
résonnant est principalement dû au mouvement perpendiculaire à la surface (direction z). Ce
mode basse fréquence n’apparaît pas pour les sites de coin Ag(6,5) dans la structure
triangulaire. On observe à la place un plus petit déplacement vers les basses fréquences et une
structure élargie. Ce déplacement général vers les basses fréquences est relié au caractère en
tension des sites de surface, qui existe aussi pour une surface propre comme mentionné
précédemment. Le caractère résonnant est renforcé pour la structure Moiré et élargi pour la
triangulaire, en relation avec l’amplitude de la contrainte en tension pour les atomes d'Ag.
Rappelons que cette contrainte est plus forte (en valeur absolue) pour la structure Moiré que
pour la structure triangulaire (voir figure IV.9-10).
Les cartes de pression indiquent une très forte correspondance entre les sites en
tension dans la couche de surface d’Ag (région I) et les sites en compression dans la première
sous-couche de Cu (voir figure IV.9-10), la compression étant plus forte pour la structure
Moiré que pour la structure triangulaire. Du coup, la LPDS sur les sites les plus comprimés
dans cette sous-couche (site apical Cu(9,1)), est caractérisée par un élargissement de la partie
hautes fréquences, dû à cette compression. Il y a donc apparition d’états localisés au-dessus
du bord de bande de volume (à ≈ 1,05 υ Cu
max ), mais aussi d’un pic étroit à basse fréquence (à ≈
Cu
0,23 υ max ) relié à l’interaction avec l’atome d’Ag voisin. Comme prévu, les modes de haute
fréquence sont moins déplacés pour les atomes Cu(7,3) dans la structure triangulaire. Pour les
atomes Cu(9,3) dans la région II (qui ont trois plus proches voisins d’Ag dans le plan de
surface, dans des positions presque parfaitement ternaires), la LPDS est très similaire dans les
deux surstructures et ressemble à celle du volume Cu(12,0), avec un rétrécissement dû aux
interactions avec les atomes d’Ag remplaçant les atomes de Cu.
Ces densités d’états locales sur un nombre réduit de sites ne sont pas suffisantes et il
est nécessaire de les moyenner par plan afin d’avoir des idées plus générales. Dans ce but,
nous présentons dans la figure IV.18 ces LPDS moyennées par plan pour les trois premières
couches, la convergence vers le Cu volumique étant presque atteinte dès la quatrième couche.
Nous retrouvons en fait les principales caractéristiques décrites précédemment. Dans le cas de
la couche d’Ag, la caractéristique la plus forte est l’augmentation de la LPDS aux basses
fréquences (avec un mode résonnant à ≈ 0,4 υ Ag
max ) et la décroissance du pic aux hautes
fréquences par rapport à l’Ag de volume, comme pour la surface Ag(111) propre dont elle
diffère toutefois par un élargissement dû à l’interaction avec le substrat de Cu. Notons que ce
déplacement est plus marqué pour la structure Moiré que pour la triangulaire, comme attendu
à partir des cartes de pression. En conséquence, nous pouvons nous attendre à ce que la
contribution du plan de surface à l’entropie vibrationnelle favorise la stabilité de la structure
Moiré. Inversement, nous retrouvons pour la première sous-couche de Cu le déplacement
général vers les plus hautes fréquences, à cause du caractère comprimé de cette couche. Ce
déplacement est plus marqué pour la structure Moiré (conduisant même à l’apparition d’un
- 92 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
état localisé à ≈ 1,1 υ Cu
max ) que pour la structure triangulaire. A nouveau, le résultat est en
accord avec les cartes de pression et la contribution de la première sous-couche à l’entropie
vibrationnelle devrait avoir l’effet opposé à celui de la couche de surface en favorisant la
stabilité de la structure triangulaire ! Toutefois, ces derniers commentaires demeurent
qualitatifs, le bilan entropique concernant la stabilité relative entre les deux surstructures étant
subtil. Il convient maintenant de les confronter au calcul complet de l’entropie de vibration.
LPDS
Couche d'Ag
triangle
Ag volumique
1,5
1
0,5
moir
2
4
6
ν (THz)
LPDS
1
re
sous-couche de Cu
1,5
Cu (111)
1
triangle
0,5
moir
2
4
6
ν (THz)
LPDS
2
me
sous-couche de Cu
1,5
Cu volumique
1
0,5
triangle
moir
2
4
6
ν (THz)
Figure IV.18 : Densité d’états de phonons (LPDS) moyennées par plan pour les surstructures Moiré (traits
tiretés) et triangulaire (ligne continue) Ag/Cu(111) (10x10), dans l’approximation harmonique pour la couche
d’Ag et les deux premières sous-couches de Cu. Elles sont comparées à leur profil dans l’état initial (volume
d’Ag et surface ou volume de Cu).
- 93 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.2.2.3 - Entropie vibrationnelle
Afin de calculer la variation d’entropie vibrationnelle induite par adsorption, nous
définissons, comme pour l’énergie interne (4.9-10) l’entropie de vibration d’excès, ∆ SCu
ip , pour
le site ip de Cu appartenant au plan p parallèle à la surface (p = 1 : 1ère couche de Cu, p = 2 :
seconde couche de Cu, ...) par :
Cu
∆SCu
(4.11)
ip = S ip (Ag / Cu) − S p (Cu )
dans laquelle le premier terme réfère à l’entropie de vibration au site ip dans le système Ag/Cu
et le second à celle du même site dans le cristal pur semi-infini, pour lequel le site est
seulement indexé par l’indice p puisque tous les sites sont équivalents dans un plan donné.
Avec une telle notation, l’excès d’entropie de surface pour un substrat pur Cu(111) s’écrit :
Cu
Cu
∆ SCu
avec : ∆ SCu
(4.12)
surf = ∑ ∆ Sp,surf
p,surf = S p (Cu ) − S vol
p=1,∞
Cu
vol
où S est l’entropie de vibration d’un atome de volume dans un cristal pur Cu. Dans le but
de comparer l’entropie de vibration totale pour différentes surstructures d’Ag, il faut aussi
obtenir l’entropie d’excès de la couche d’Ag (indexée p = 0). Cette quantité peut être définie à
partir d’une référence arbitraire, puisque la comparaison impliquera des quantités d’excès
normalisées par atome d’Ag. Nous définissons par la suite l’entropie d’excès pour un atome
d’Ag au site i0 par :
Ag
Ag
∆ SAg
(4.13)
i0 = S i0 (Ag / Cu) − Svol
Ag
où Svol est l’entropie de vibration d’un atome de volume dans un cristal pur d’Ag.
i) Approximation harmonique
Dans le cadre de l’approximation harmonique, l’entropie de vibration d’excès par site
Cu ,Ag
∆ S ip
est calculée à partir de l’équation (2.35), en utilisant les LPDS au site ip obtenues à
partir des positions atomiques issues des simulations en Dynamique Moléculaire Trempée à T
,Ag
= 0 K. Nous avons testé la convergence de ∆ SCu
en fonction du nombre d’étages exacts
ip
dans la fraction continue définissant la LPDS. Cette convergence est uniforme et cinq couples
de coefficients (i.e. 10 moments) exacts sont largement suffisants pour avoir une bonne valeur
,Ag
de ∆ SCu
. Dans la suite, tous les résultats seront obtenus avec ces cinq étages.
ip
∆ S i (k )
p
B
Ag : site apical
3,5
3
2,5
Ag / Cu (111)
2
Ag : site ternaire
1,5
1
Cu : surface (111)
0,5
200
400
600
800
T (¡K)
Figure IV.19 : Dépendance en température de l’entropie d’excès pour un site de surface pure Cu(111) et pour
les deux sites d’Ag les plus caractéristiques de la structure Moiré Ag/Cu (111).
- 94 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
(a)
(α)
(b)
(c)
(β)
(γ)
Figure IV.20 : Cartes des entropies locales d’excès calculées à 600 K dans l’approximation harmonique dans le
plan du dépôt d’Ag (a,α) et dans les deux premières couches du substrat de Cu (b,β) et (c,γ) pour les
surstructures (10x10) Ag/Cu(111), Moiré (a,b,c) et triangulaire avec 5 lacunes de Cu (α,β,γ). L’échelle des
couleurs est définie dans la figure ci-dessous. La zone encadrée correspond à la maille définie dans la figure
IV.2.a-d.
(a)
(b)
(c)
(α)
(β)
(γ)
Figure IV.21 : Mêmes cartes que dans la figure ci-dessus mais à 3D pour définir le code des couleurs. Les
<entropies sont données en unité kB.
- 95 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Afin d’avoir une idée de l’évolution de cette quantité en fonction de la température et
de nous assurer que notre choix de travailler à T = 600 K était bien représentatif d’un régime
de haute température, nous portons sur la figure IV.19 la courbe ∆SCu
1,surf (T) pour une surface
Cu
propre Cu (111). Partant de 0 à T = 0 K, ∆S1,surf augmente rapidement jusqu’à environ θD/2 ≈
175 K (où θD est la température de Debye) et approche alors une valeur constante (0,45 kB par
atome). On observe un comportement similaire dans le cas d’atomes d’Ag recouvrant le
substrat, comme illustré sur la même la figure pour les deux sites d’Ag représentatifs des
régions I et II de la structure Moiré. La principale différence est la valeur asymptotique qui
peut atteindre 3,5 kB pour le site apical Ag(6,1).
Nous présentons ensuite dans les figures IV.20-21 les cartes des entropies de vibration
d’excès pour la couche d’Ag et les deux premières sous-couches de Cu. L’effet le plus
marquant est la similarité quasi-parfaite entre cette carte et celle des pressions locales qui
avait fait l’objet de la figure IV.10, les régions de plus forte tension correspondant à celles
présentant l’entropie d’excès la plus grande, comme prévu par les arguments développés à
partir des LPDS de la figure IV.17 et de l’éq. (2.35). De plus, comme la variation de pression
locale, et donc le déplacement de fréquences dans les LPDS, est plus importante dans la
structure Moiré que dans la triangulaire, l’entropie de vibration d’excès est plus élevée, en
valeur absolue, dans les deux premiers plans de la surstructure Moiré.
Dans le but d’avoir une description plus quantitative de cet effet entropique sur la
stabilité relative des structures Moiré et triangulaire pour un taux de couverture donné (ou un
˜ ), comme pour les énergies internes, nous pouvons
nombre donné d’atomes d’Ag : N
décomposer l’entropie d’excès par atome d’Ag en contributions par plan p parallèle à la
surface (p = 0 : couche d’Ag, p = 1 : 1ère sous-couche de Cu, p = 2 : 2ème sous-couche de Cu,
...) :
∆ S = ∑ ∆Sp
(4.14)
p
avec
1
Ag 
∆S0 = ˜  ∑ ∆Si0  ,
N  i0

1
Cu
Cu 
Cu
∆S1 = ˜  ∑ ∆Si1 − N lac ∆S1,surf 
N i

(4.15)
1

1
∆Sp>1 = ˜  ∑ ∆SCu
ip  ,
N  ip

Cu
Cu
dans laquelle le terme N lac ∆S1,surf tient compte du replacement à des crans des N Cu
lac atomes de
Cu impliqués dans la formation de la structure triangulaire. Ces contributions sont portées en
fonction du numéro de plan p sur la figure IV.22, ainsi que la différence
δSp = (∆SMoiré
− ∆Striangulaire
) entre les deux surstructures, et sa valeur cumulée, ∑ δSp . On
p
p
p
vérifie que l’entropie d’excès est essentiellement localisée sur les trois premiers plans de
surface, de sorte que la somme dans l’équation (4.14) peut être tronquée pour p > 2. De plus,
comme évoqué dans les cartes d’entropies locales (et prévu à partir de la carte des pressions),
il y a une compétition entre la contribution de la couche d’Ag et celle de la première couche
de Cu, chacune étant plus forte (en valeur absolue) pour la structure Moiré que pour la
structure triangulaire. L’effet résultant est que l’entropie de vibration favorise la structure
triangulaire, en raison de la prépondérance de l’effet sur la première couche de Cu, où la
compression y est mieux relaxée pour la structure triangulaire, l’entropie d’excès
correspondante étant alors moins négative.
- 96 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
∆S
∆ S (k /at.Ag)
p
B
moir
p
- ∆S
triangle
p
(k /at.Ag)
B
0,3
0,1
0,2
0,05
0,1
0
0
-0,1
-0,05
-0,2
-0,1
-0,3
0
1
2
3
p (n¡ plan)
0
1
(a)
2
3
p (n¡ plan)
(b)
Figure IV.22 : Profil d’entropie vibrationnelle d’excès à T = 600 K (a) pour les surstructures (10x10) Moiré
(trait tireté, ) et triangulaire (trait plein, ∆) en fonction du plan dans l’approximation harmonique. Profil (trait
plein, „) et profil cumulé (trait pointillé, ‹) de la différence des entropies d’excès des deux surstructures (b).
L’analyse précédente confirme que c’est bien la contrainte sur les premiers plans qui
détermine le comportement de l’entropie de vibration d’excès. Nous pouvons donc imaginer
l’évolution suivante de la périodicité n de chaque surstructure (Moiré et Triangulaire) :
lorsque n décroît, la surface subit une tension de plus en plus forte, conduisant à un gain dans
l’entropie de vibration d’excès. La figure IV.23 confirme totalement ce point. Pour les deux
structures, l’entropie d’excès, ∆S, augmente quand n décroît. Elle montre aussi que l’entropie
de vibration favorise la structure triangulaire quelle que soit la valeur de n.
Si la convergence de l’entropie d’excès avec le nombre de niveaux de récursion est
presque parfaite à partir de cinq étages, il est intéressant de considérer la validité d’une
approximation simple, comme le modèle d’Einstein, qui a largement été utilisée dans le
contexte de la méthode harmonique locale, sensiblement équivalent à un calcul considérant
seulement le premier niveau de récursion [125]. La figure IV.23 montre que ce modèle
simple, qui néglige la nature corrélée des déplacements des atomes, donne la bonne tendance
qualitative : ∆S augmente quand n décroît et favorise la structure triangulaire quelle que soit
la valeur de n. En revanche, cette approximation surestime la stabilité relative de la structure
triangulaire d’un facteur plus grand que 2, ce qui peut conduire à des bilans erronés lorsqu’on
ajoutera le terme d’énergie interne, et empêche donc de l’utiliser à des fins prédictives.
T ∆S (meV/Ag.at)
5
0
-5
-10
9x9
10x10
11x11
nxn
Figure IV.23 : Entropie vibrationnelle d’excès T∆S à T = 600 K pour les surstructures Moiré (cercles plein et
vide) et triangulaire (triangles plein et vide) (nxn) en fonction de n, dans les approximations harmonique (ligne
pointillée), quasi-harmonique (trait plein) et dans le modèle d’Einstein (ligne tiretée).
- 97 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
ii) Approximation quasi-harmonique inhomogène
Tous les résultats ont jusqu’à maintenant été obtenus dans l’approximation
harmonique, i.e. en supposant que les positions atomiques ne changent pas lorsque la
température augmente. Afin de tester le domaine de validité de nos résultats, nous avons donc
pris en compte à la fois l’expansion thermique du substrat et des possibles réarrangements
thermiques des atomes dans la région de surface à T = 600 K par l’approximation quasiharmonique inhomogène (IQA). Comme expliqué au § IV.2.2.2, cela nécessite de calculer les
LPDS à partir des positions atomiques moyennes issues des simulations Monte Carlo. Ceci
n’est justifié qu’en l’absence d’événements individuels ou collectifs de diffusion, ainsi que de
transition structurale. Si tel est bien le cas pour la surstructure triangulaire, celle Moiré pose
un problème épineux, dont on peut juger sur la figure IV.24.
x,y (barycentre)
Moir
x,y (barycentre)
(9x9)
Triangle (9x9)
yAg
3
3
2
2
1
y
0
x
1
y
0
x
Cu
Cu
y
-1
-1
Cu
Cu
Ag
xAg
-2
-2
x
Ag
-3
5
10
15
20
25
30
run
0
5
10
15
(a)
20
25
30
run
(b)
Eads
E
ads
Moir
(9x9)
Triangle (9x9)
-2,94
-2,94
-2,95
-2,96
-2,96
-2,97
-2,98
-2,98
-3
Einst
Ecum
E<R>inst
E<R>cum
-3,02
0
5
10
15
(α)
20
25
30
Ecum
Einst
E<R>inst
E<R>cum
-2,99
run
-3
0
5
10
15
20
25
30
run
(β)
Figure IV.24 : Visualisation du glissement de la couche d’Ag par rapport au substrat de Cu dans la
surstructure Moiré (9x9) (a). Trajectoire du barycentre des deux premiers plans suivant les directions denses en
fonction du numéro de run dans les surstructures Moiré (a) et triangulaire (b). L’évolution correspondante des
énergies, selon la nomenclature de la figure IV.13, est donnée en (α,β ).
En effet, on constate en fonction du nombre de runs Monte Carlo, une dérive
progressive du barycentre de la couche d’Ag, qui s’accompagne d’une dérive corrélée de
l’énergie calculée à partir des positions moyennes. Rien de tel n’est observé pour la structure
triangulaire. Ce phénomène s’explique en fait par un glissement collectif de la couche d’Ag
par rapport au substrat de Cu dans la structure Moiré. Un tel glissement a déjà été rapporté
dans les systèmes Ag / Cu (001) et Ag / Ni (001) [126], dans lesquels la couche déposée
forme un réseau très proche du réseau triangulaire d’Ag (111). Dans ce cas, l’arrangement est
tel que la couche adsorbée est commensurable avec le substrat dans une direction compacte et
presque incommensurable dans l’autre direction, le glissement apparaissant dans cette
dernière direction. C’est ce que nous observons ici pour la surstructure Moiré Ag / Cu (111),
- 98 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
qui est presque incommensurable avec le substrat le long des trois directions compactes. Cette
couche flottante est donc due au fait que tous les sites d’adsorption étant quasi-équivalents
pour cette structure, la couche d’Ag n’est pas ancrée sur les sites du substrat, ou en d’autres
termes, cette couche peut facilement diffuser sur une surface d’énergie potentielle plate. Nous
pouvons noter que l’uniformisation de la surface d’énergie potentielle nécessaire pour obtenir
un tel glissement est détruite dans la structure triangulaire, à cause de l’existence de la boucle
de dislocation dans la première couche de Cu. Ainsi, en présence d’un fort désaccord de
maille, la couche déposée peut présenter un comportement "superglissant", à moins qu’elle ne
soit ancrée par la formation de lacunes constitutives dans la première couche du substrat.
Si le glissement de la couche d’Ag empêche d’utiliser les positions atomiques
moyennes pour calculer les LPDS pour la structure Moiré à T = 600 K, il est possible de ne
considérer que quelques parties des runs Monte Carlo, où le glissement n’apparaît pas. C’est
ce que nous avons fait en utilisant alors les positions atomiques moyennées le long de ces runs
limités pour évaluer les LPDS et l’entropie de vibration d’excès pour la structure Moiré. Nous
avons vérifié que la valeur de ∆S est presque indépendante de la moyenne partielle
considérée. En suivant cette procédure, nous obtenons les entropies de vibration d’excès dans
l’approximation quasi-harmonique pour les deux surstructures qui sont portées sur la figure
IV.23. Le calcul quasi-harmonique confirme complètement les deux principales conclusions
obtenues dans l’approximation harmonique, à savoir l’effet stabilisant de l’entropie pour la
structure triangulaire et l’augmentation de ∆S quand n décroît pour les deux surstructures.
IV.2.2.4 - Energie libre
Nous avons montré que l’entropie vibrationnelle favorisait légèrement la structure
triangulaire (d’environ 5 meV/at à T = 600 K) et déplaçait la périodicité optimale vers les plus
faibles valeurs de n, avec un gain d’à peu près 5 meV/at par unité de n. Au contraire, quand
on augmente la température, les effets anharmoniques sur l’énergie interne font apparaître une
"tristabilité" des structures Moiré (9x9), (12x12) et triangulaire (12x12). Rappelons que, à T =
0 K, la périodicité optimale pour les deux surstructures était obtenue pour n = 10, la structure
triangulaire étant la plus stable, avec un gain de 7 meV/at par rapport à la structure Moiré.
F
ads
-2,96
-2,97
-2,98
-2,99
-3
7
8
9
10
11
12
13
14
nxn
Figure IV.25 : Variation de l’énergie libre Fads à T = 0 K (---) et 600 K (___) pour les surstructures Moiré (P,O)
et triangulaire (∆,V), en fonction de l’indice de périodicité n.
Ajouter la contribution de l’énergie interne à celle de l’entropie vibrationnelle conduit
à l’estimation de l’énergie libre portée dans la figure IV.25 à T = 600 K en fonction de n pour
les deux surstructures. L’effet essentiel de l’entropie de vibration est de lever la
dégénérescence issue de la variation de l’énergie interne, en éliminant les structures à grand n.
- 99 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Il y a donc inversion de stabilité entre structure triangulaire (10x10) à T = 0 K et Moiré (9x9)
à T = 600 K. Notons que toute l’analyse détaillée de l’entropie de vibration et de l’énergie
interne présentée précédemment pour n = 10 est complètement transférable à n = 9. Ce
déplacement de l’indice de périodicité, qui est principalement dû au terme entropique, est en
bon accord avec les expériences [49]. En ce qui concerne la stabilité relative des deux
surstructures, c’est la forte augmentation de l’énergie interne avec la température pour la
structure triangulaire qui explique le renversement de stabilité entre T = 0 K et T = 600 K.
Ainsi, les effets anharmoniques stabilisent la structure Moiré à 600 K, avec un gain d’énergie
libre d’environ 7 meV/at par rapport à la structure triangulaire, même si le terme entropique
favorise cette dernière !
Ces résultats éclairent les observations expérimentales sous un jour nouveau. Dans les
expériences STM, la structure Moiré est observée après dépôt à 225 K, tandis que la structure
triangulaire apparaît après dépôt à température ambiante [48,49]. Nos résultats suggèrent que
la structure stable à basse température est la structure triangulaire, mais sa formation est
probablement empêchée par l’énergie d’activation élevée nécessaire pour former les boucles
de dislocation. Cette énergie a été estimée de l’ordre de 1 eV en utilisant la théorie du milieu
effectif [120]. Ainsi, l’observation de la structure Moiré à basse température (225 K) est
probablement due à des raisons cinétiques et non d’équilibre. La stabilité de la structure
triangulaire à 300 K signifie que cette température est caractéristique d’un régime basse
température, et nous suggérons que chauffer cette structure à 600 K doit conduire à une vraie
transition de phase thermodynamique (et non cinétique) vers la structure Moiré de haute
température, accompagnée d’une petite diminution de la périodicité n. Malheureusement,
aucune étude expérimentale systématique de la stabilité des deux surstructures en fonction de
la température n’existe à notre connaissance. Nous espérons que nos résultats en motiveront
dans le futur.
IV.2.2.5 - Conclusion
Nous avons étudié dans ce chapitre le dépôt Ag / Cu (111) comme un cas représentatif
de l’influence des contraintes sur les propriétés vibrationnelles et sur la sélection de la
surstructure d’équilibre, ici les deux surstructures (nxn) compétitives. Le bilan est subtil, en
raison des effets de compensation, sur les plans de l’interface Ag/Cu, entre les contributions
d’énergie interne et d’entropie de vibration. En particulier, il était tentant de penser que la
présence de sites en dilatation dus aux boucles de dislocations dans la première sous-couche
de Cu devait favoriser la structure triangulaire à haute température du point de vue entropique.
Le calcul des LPDS confirme ce point, mais montre que cette contribution entropique de la
première sous-couche de Cu est quasiment contrebalancée par celle de la couche d’Ag. Le
bilan sur l’énergie libre est un renversement de stabilité quand on augmente la température,
depuis la triangulaire (10x10) vers la Moiré (9x9), dû à l’effet couplé d’un fort accroissement
de l’énergie interne pour la structure triangulaire aux bas indices de périodicité associé à une
déstabilisation des structures de haut indice par effet entropique. Le rôle de l’énergie interne,
qui ne peut pas être prédit à partir des positions atomiques à T = 0 K, est un pur effet
anharmonique localisé sur le premier plan de cuivre. Nous espérons que de nouvelles
expériences et des calculs ab initio confirmeront cette prédiction, même si la taille de la
cellule unité et la nécessité de faire ces simulations à des températures finies ne les laissent
pas espérer dans un futur proche.
- 100 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.3 - Système à démixtion, précipité incohérent : Ni / Ag (100)
IV.3.1 - Rappels des résultats théoriques antérieurs [128,129]
Lors du recuit d’un film mince déposé sur un substrat, pour deux éléments presque
immiscibles, on s’attend à ce que les atomes du substrat remontent pour enterrer le dépôt si les
forces motrices de ségrégation lui sont favorables (cf. figure 1 de l’introduction). La question
posée ici est de savoir si ce dépôt enterré conserve sa forme 2D ou bien s’il préfère se scinder
en précipités 3D. De nombreux systèmes satisfaisant ces critères ont été étudiés
expérimentalement, parmi lesquels Ni/Ag (100) pour lequel (cf. § I.2.3) la dissolution, limitée
aux premières couches sous la surface, semble conduire à des précipités de Ni relaxés au
paramètre de volume de cet élément. Du point de vue théorique, une version cinétique du
TBIM (KTBIM), qui prend en compte les moteurs énergétiques de la ségrégation de surface et
de l’ordre de volume, a permis à J.-M. Roussel d’étudier la dissolution, sur réseau rigide,
d’une monocouche de Ni/Ag(100) [128,129]. Le résultat essentiel est que les atomes du
substrat remontent, enterrant le dépôt qui abandonne sa structure bidimensionnelle pour se
fragmenter en amas de Ni enterrés s’étendant sur une dizaine de couches (figure IV.26). Il a
été ainsi possible de caractériser la microstructure de ces précipités (polyèdres cfc réguliers) et
les lois de nucléation-croissance qui mettent en compétition mûrissement d’Ostwald et
dissolution dans le substrat. Cette remontée de l’élément ségrégeant peut aussi améliorer le
mode de croissance, ce qui lui a valu l’appellation d’effet surfactant.
Figure IV.26 : Amas de Ni enterrés issus de la dissolution d’une monocouche de Ni initialement déposée sur
une surface d’Ag (100). On peut voir deux instantanés pris lors d’une dissolution effectuée par Monte Carlo
cinétique en utilisant un modèle KTBIM sur réseau rigide [128,129]. Seuls les atomes de Ni sont représentés.
Toutefois, cette étude ayant été effectuée sur réseau rigide, on peut se demander quel
rôle joue la relaxation des contraintes dues au fort désaccord de maille entre Ni et Ag, tant en
ce qui concerne la structure atomique du Ni enterré, que ce soit sous forme 2D ou 3D, qu’en
ce qui concerne les stabilités respectives de ces deux morphologies potentielles. Nous allons
montrer ici que si la relaxation ne change pas le résultat essentiel, à savoir la fragmentation du
dépôt enterré en agrégats, elle modifie sensiblement la morphologie non seulement des
agrégats, mais aussi de la couche d’Ag qui les recouvre, en bon accord avec les mesures
SXRD et les images STM [54]. De plus, la relaxation des couches bidimensionnelles met en
évidence un effet important de l’enfouissement sur la propension du Ni à retrouver son
paramètre de maille (couche déposée) ou à rester contraint à celui de Ag (couche enterrée).
- 101 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.3.2 - Dépôt 2D immergé ou émergeant à la surface
IV.3.2.1 - Couche bidimensionnelle complète
Nous avons tout d’abord étudié la structure d’une couche bidimensionnelle complète
de Ni, soit déposée sur Ag(100) (dépôt à froid), soit enterrée sous NAg couches d’Ag dans le
substrat d’Ag (dépôt à chaud ou après recuit), pour différentes reconstructions (nxm) du plan
de Ni ainsi que, dans le cas du dépôt enterré, des couches d’Ag superficielles.
Dans le cas de la couche déposée (NAg = 0), trois types de structures (métastables
comme on le verra par la suite) ont été envisagées (figure IV.27) :
® une pseudomorphie (1x1) : Ni est contraint au paramètre de Ag.
® une pseudoépitaxie (nxn) : il n’y a pas de changement de la maille 2D, de sorte que
Ni n’est relaxé à son paramètre que de façon partielle (unidimensionnelle) en plaçant (n+1)
atomes de Ni pour n atomes de Ag le long de chaque rangée dense, avec un taux de
2
 n + 1
0
recouvrement en Ni de θ =
. Le critère géométrique s’écrit : nrAg
= ( n + 1)rNi0 , ce qui
 n 
0
= 0,86, conduit à 6 ≤ n ≤ 7, soit 1,36 ≥ θ ≥ 1,31.
pour rNi0 / rAg
® une reconstruction pseudohexagonale (nxm) : il y a changement de la maille (100)
3 0 2
100
0 2
d’Ag, d’aire SAg = (rAg ) , en une maille hexagonale de Ni, d’aire S111
(r ) , qui permet
Ni =
2 Ni
de mieux relaxer Ni à son paramètre en optimisant cette fois le nombre d’atomes de Ni
suivant les deux dimensions. On range ainsi (n+1) et (m+1) atomes de Ni pour n et m atomes
d’Ag respectivement le long des deux directions denses (x,y). Le critère géométrique s’écrit
(n + 1)(m + 1)
111
= 1,56 ,
alors : nm S100
Ag = (n + 1)( m + 1) S Ni qui conduit à un recouvrement θ =
nm
bien approché par les valeurs : n = 5 et m = 3. Toutefois, en raison de la parité de la structure
hexagonale rapportée au réseau carré suivant la direction le long de laquelle les rangées sont
décalées (cf. figure IV.27), il faut doubler la périodicité correspondante (m = 6) de sorte qu’il
s’agit en fait d’une surstructure (5x6).
(a)
(b)
(c)
(α)
(β)
(γ)
Figure IV.27 : Relaxation par Dynamique Moléculaire Trempée de Ni/Ag(100) : pseudomorphie (a,α : θ = 1),
pseudoépitaxie (7x7) (b,β : θ = 1,31) et reconstruction pseudohexagonale (5x6) (c,γ : θ = 1,6). Les structures
sont présentées avant (a,b,c) et après (α,β,γ) relaxation.
- 102 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
pseudomorphie pseudoépitaxie
θ=1
θ = 1,31
- 3,7267
- 3,6820
Eads (eV/at)
- 3,4201
- 3,3610
pseudohexagonale
θ = 1,25
θ = 1,52
θ = 1,6
- 3,7855
- 3,8828
-3,9070
- 3,3056
- 3,5736
- 3,5851
Tableau IV.4 : Energie d’adsorption en eV/at du système Ni-Ag avant (italique) et après relaxation.
Pour la reconstruction pseudohexagonale, nous avons en fait testé d’autres valeurs du
taux de recouvrement que celle issue du critère géométrique. On peut voir sur le tableau IV.4
que la comparaison des énergies d’adsorption correspondantes (Eq. 2.20) met en évidence une
(méta)stabilité de la structure pseudohexagonale de Ni (5x6), qui en surdensifiant la surface,
diminue la contrainte en tension. A l’opposé, la pseudomorphie est trouvée particulièrement
défavorable (prix à payer du surcroît de contrainte en tension de la surface), même si la
relaxation verticale améliore sensiblement les choses.
La situation s’inverse lorsque l’on enfouit la couche de Ni sous de l’Ag, comme on
peut le voir dans le tableau IV.5. Dans ce cas, nous avons envisagé non seulement la
reconstruction pseudohexagonale du plan de Ni, mais aussi (pour NAg = 1) celle du plan d’Ag
remonté en surface. Cette reconstruction hexagonale a été optimisée pour relaxer la couche,
soit au paramètre de Ni (structure (5x6)), soit au paramètre de Ag (structure (10x4)), de sorte
qu’on a aussi autorisé un plan d’Ag reconstruit hexagonal, sur une couche de Ni soit
pseudomorphe soit pseudoépitaxiée. Nous avons effectué le calcul des énergies d’adsorption
dans tous ces cas de figure et avons reporté les résultats dans le tableau suivant. Nous n’avons
pas retenu les valeurs issues des simulations au cours desquelles apparaissent des éjections
d’atomes ou une modulation beaucoup trop grande des couches de surface. Ainsi, par
exemple, lorsque l’on met une couche de Ni (100) relaxée à son paramètre insérée entre une
couche d’argent de surface et de substrat (100), la relaxation éjecte des atomes de Ni pour
former une couche pseudomorphe contrainte en dilatation au paramètre d’Ag.
Reconstruction de Ni seul
Reconstruction de Ni et Ag
Ni et Ag
Ag (10x4) hex.
pseudohexagonal
(5x6)
(10x4)
Ni (1x1) Ni (7x7)
Eads
(eV/at)
(1x1)
(7x7)
(5x6)
NAg = 0
- 3,682
- 3,420
- 3,727
- 3,361
- 3,907
- 3,585
O.K.
éjection
ondulation
éjection
O.K.
O.K.
ondulation
- 4,158
- 3,715
- 4,130
- 3,742
- 4,128
- 3,742
- 4,115
- 3,205
- 3,960
- 3,432
- 4,070
- 2,529
- 4,133
- 3,420
- 3,932
-3,323
- 4,055
-3,561
NAg = 1
NAg = 2
NAg > 3
Tableau IV.5 : Energie d’adsorption en eV/at du système Ni-Ag issue de calculs en Dynamique Moléculaire
dans le cas où seule la couche de Ni est reconstruite et dans celui où à la fois la couche de Ni et la première
couche d’Ag sont reconstruites et ceci pour diverses profondeurs de la couche de Ni. Les valeurs en italique
correspondent à des énergies d’adsorption calculées avant relaxation.
- 103 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Nous avons ensuite reporté, sur la figure IV.28 la variation de ces énergies en fonction
du nombre de couches d’Ag qui remontent. On observe bien une inversion des stabilités dès
que la couche de Ni s’enfouit, la pseudomorphie l’emportant (de peu) sur une reconstruction
pseudohexagonale qui s’étendrait (du moins pour NAg = 1) sur les deux premières couches. Le
second effet important est l’existence d’un minimum pour NAg = 1, qui confirme que la
couche enterrée préfère ne pas s’enfouir trop loin de la surface.
E
ads
-3,5
-3,6
-3,7
-3,8
-3,9
-4
-4,1
-4,2
-1
0
1
2
3
4
5
N
Ag
Figure IV.28 : Variation de l’énergie d’adsorption d’une couche de Ni en fonction du nombre de couches d’Ag,
NAg, qui recouvrent le dépôt (0 ≤ NAg ≤ 5), pour les différentes reconstructions du dépôt et/ou de la première
couche de substrat définies dans le tableau IV.5 :
- pour NAg = 0 : pseudomorphie (1x1) avant () et après (z) relaxation, pseudoépitaxie (7x7) („) et
reconstruction pseudohexagonale (X) de la couche de Ni seule.
- pour NAg = 1 : reconstruction (5x6) des 2 premières couches (X), pseudomorphie (1x1) de la couche
de Ni et reconstruction (10x4) de la première couche d’Ag (~), pseudoépitaxie (7x7) de la couche de Ni et
reconstruction (10x4) de la première couche d’Ag (V), reconstruction (10x4) des 2 premières couches (W).
- pour NAg > 1 : pseudomorphie (1x1) avant () et après (z) relaxation.
A l’issue de cette étude de la monocouche bidimensionnelle de Ni/Ag(100), nous
pouvons tirer des conclusions sur la stabilité relative des différents systèmes testés :
® sur réseau rigide, c’est-à-dire avant relaxation, Ni est contraint au paramètre de Ag,
et la situation la plus stable correspond à un plan de Ni enterré sous au moins deux couches
d’Ag : Ag/Ag/.../Ni/Ag/.../Ag.
® lors d’une relaxation verticale, Ni est partiellement relaxé perpendiculairement à la
surface, ce qui confine la couche de Ni sous un plan d’Ag.
® si l’on relaxe complètement la couche de Ni déposée sur la surface, celle-ci se
reconstruit de façon pseudohexagonale (5x6), conduisant à Ni(111)/Ag(100).
® toutefois, cette structure hexagonale relaxée à la surface reste moins stable que la
structure semi-contrainte sous un plan d’Ag. L’optimisation latérale de cette couche enterrée
(reconstruction des deux premiers plans) n’améliore pas l’énergie.
En conclusion, une couche de Ni déposée sur une surface (100) de Ag relaxe à son
paramètre de réseau selon une structure (111), alors qu’une même couche enterrée sous un
plan d’Ag préfère rester contrainte latéralement au paramètre de Ag suivant une structure
(100) ne relaxant ses contraintes que par déplacements verticaux.
- 104 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.3.2.2 - Précipités bidimensionnels de taille variable
Pour compléter cette étude, nous avons cherché à partir de quelle taille latérale d’îlot
bidimensionnel les résultats précédents étaient valides. Nous avons pour cela calculé l’énergie
de solution d’un système constitué d’un disque de Ni que l’on fait grossir latéralement jusqu’à
former une couche bidimensionnelle, d’abord dans la surface (100) de l’argent, puis enfoui de
sous NAg couches d’Ag. Tous les calculs ont été effectués en géométrie pseudomorphe, ce qui
suffit pour NAg > 0 puisque c’est bien alors l’état le plus stable à la complétion de la
monocouche. Il aurait été intéressant pour NAg = 0 de faire aussi le calcul pour un disque
reconstruit (7x7), et surtout (5x6), afin de déterminer s’il existe une taille critique de transition
(1x1) →(5x6) ... mais le temps a manqué pour faire cette étude.
Notons qu’afin de faire le lien avec le § III.2, nous parlerons dorénavant en terme
d’énergie de solution (3.19) plutôt qu’en terme d’énergie d’adsorption comme au § IV.3.2.
Cela revient simplement à décaler les résulats précédents de l’énergie de cohésion de Ni.
Esol
1
NAg Ag / ... / Ni / Ag (100)
0,9
N =0
Ag
0,8
N =1
N
0,6
Ag
0,5
= 2, 3, ... ,
8
Ag
0,7
N =1
Ag
0,4
0,3
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1/3
(1/N)
Figure IV.29 : Variation de l’énergie de solution Esol (en eV/at) en fonction de (1 N ) (avec N le nombre total
d’atomes de Ni qui composent le disque), c’est-à-dire en fonction de la taille du disque, d’un disque de Ni
déposé sur Ag (100) (cercles), puis enfoui sous une (triangles), deux et plus (carrés) couches d’Ag, avant
(pointillés) et après (traits pleins) relaxation.
13
Des courbes correspondantes portées sur la figure IV.29, on peut tirer la conclusion
que la relaxation joue un rôle essentiel dans l’évolution du précipité bidimensionnel :
® elle améliore systématiquement l’énergie de solution.
® elle stabilise un disque de Ni enfoui sous une seule couche d’Ag, au lieu de conduire
à une stabilité de disque enfoui sur un plan de volume quelconque.
® elle change l’évolution générale des courbes lorsque la taille du disque de Ni
augmente (du moins lorsque NAg ≥ 1) : la stabilité du disque augmente lorsque sa taille croît,
au contraire de ce qui se passe dans le cas non relaxé. Ce changement de pente se traduit par
un changement de tendance (ordre vs démixtion) comme dans le cas des précipités 3D
volumiques (§ III.2).
® quand le précipité est en surface, la relaxation ne suffit pas à inverser la tendance à
l’ordre pour retrouver celle à la démixtion, ce qui est cohérent avec les résultats
précédemment obtenus pour des impuretés isolées dans le système Cu-Ag (§ III.1.2).
- 105 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
IV.3.3 - Précipités 3D immergés ou émergeant à la surface
En suivant le protocole développé au § III.2 pour l’étude de précipités de Ni enchâssés
dans une matrice volumique de Ag, nous avons relaxé des agrégats de Ni dans des cavités
d’Ag, soit cuboctaédriques soit quasi-sphériques, de taille croissante, que nous avons enfouis
plus ou moins loin de la surface (en fait en recouvrant le sommet du précipité de NAg couches
d’Ag). Comme dans le cas du volume, nous avons d’abord relaxé partiellement le précipité de
Ni en conservant un nombre d’atomes de Ni égal à celui des atomes d’Ag enlevés, puis
complètement en optimisant aussi ce nombre. On peut noter que la présence de la surface
nous a permis d’optimiser ce nombre de façon "naturelle" en laissant les précipités émerger de
la surface (NAg < 0), auquel cas les atomes de Ni retombaient sous la surface pour compléter
l’amas immergé (voir figure IV.30).
Figure IV.30 : Amas sphérique de 1289 atomes de Ni occupant une cavité de 1183 lacunes d’Ag(100) tronquée
par la surface, avant (gauche) et après (droite) relaxation. L’amas est vu de dessus (haut) et le long d’une coupe
perpendiculaire (bas).
Figure IV.31 : Influence de l’optimisation du nombre d’atomes de Ni sur la relaxation d’un amas sphérique
occupant une cavité de 381 lacunes d’Ag(100) terminée par la surface : avant (381 atomes de Ni : à gauche) et
après (603 atomes de Ni : à droite). L’amas est vu de dessus (haut) et le long d’une coupe perpendiculaire (bas).
- 106 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
Toutefois, la présence de la surface introduit des degrés de liberté supplémentaires par
rapport à la même étude en volume (§ III.2) qui rendent l’optimisation du nombre d’atomes
de Ni dans le précipité délicate. N’ayant obtenus pour l’instant que des résultats partiels (voir
par exemple la figure IV.31), difficilement analysables, nous préférons ne présenter ici que les
résultats de la relaxation partielle, qui ne présentent aucune ambiguïté et sont cohérents avec
l’étude des agrégats bidimensionnels effectuée au § IV.3.2.2. Nous reportons donc sur la
figure IV.32, l’évolution avec la taille de l’énergie de solution d’un amas cuboctaédrique de
Ni partiellement relaxé, immergé dans le substrat d’Ag et dont l’ultime facette (100) est
progressivement recouverte par NAg couches d’Ag.
Esol
1
NAg Ag / ... / Ni / Ag (100)
0,8
N =1
N =0
Ag
Ag
0,6
N
Ag
>1
N =1
Ag
0,4
0,2
0
0
0,2
0,4
0,6
0,8
(1/N)1/3
Figure IV.32 : Représentation de l’énergie de solution Esol (en eV/at) en fonction de (1 N ) (avec N le nombre
total d’atomes de Ni qui composent l’amas), d’un amas 3D de Ni émergeant sur Ag (100) (cercles), puis enfoui
sous une (triangles), plus d’une (carrés) couche d’Ag, avant (pointillés) et après (traits pleins) relaxation.
13
On peut tirer de ces courbes les conclusions suivantes :
® on retrouve pour NAg > 0 l’évolution déjà décrite dans le cas de précipités immergés
en volume (§ III.2), à savoir une tendance à l’ordre du précipité contraint avant relaxation, et à
la démixtion après. En fait, on retrouve les courbes de volume dès que NAg > 1.
® lorsque le précipité affleure à la surface (NAg = 0) la situation est sensiblement
différente, en particulier dans le cas non relaxé qui retrouve une tendance à la démixtion.
® on observe une transition en fonction de la taille du précipité en ce qui concerne sa
profondeur d’enfouissement. Alors que l’impureté de Ni est trouvée plus stable dans le
premier plan sous la surface, les amas de taille croissante sont stabilisés par leur affleurement
à la surface.
IV.3.4 - Optimisation (2D / 3D, profondeur)
Afin de répondre à la question de la morphologie d’équilibre d’un précipité de Ni au
voisnage de la surface d’un substrat d’Ag, nous portons sur la figures IV.33, l’évolution de
leur énergie de solution en fonction de leur taille et de leur dimensionnalité (2D, 3D). Nous
pouvons tirer de ces courbes les conclusions suivantes :
® lorsque Ni est contraint au paramètre de Ag, la situation la plus stable est celle d’une
couche bidimensionnelle enfouie sous au moins deux couches d’Ag. En fait, dès que le dépôt
- 107 -
CHAPITRE 4 : STRUCTURE DE SURFACE - PRECIPITATION INCOHÉRENTE
___________________________________________________________________________
est recouvert (NAg ≥ 1), la situation 2D est plus stable que celle 3D, alors que l’inverse se
produit quand le dépôt affleure à la surface.
® la situation est plus complexe après relaxation. On trouve alors que, pour des précipités
suffisamment gros (NNi > 30 atomes), la forme la plus stable est celle d’un précipité 3D,
relaxé (partiellement) au paramètre de Ni et affleurant à la surface par sa facette supérieure.
En revanche, en dessous de 30 atomes, ce sont les précipités 2D recouverts d’une couche
d’Ag qui sont les plus stables.
Il faut toutefois garder présent à l’esprit que ces conclusions, tirées de relaxations
partielles, devraient être complétées par une optimisation du nombre d’atomes de Ni contenu
dans un amas de Ni en fonction de sa taille. Mais ceci fera l’objet d’un travail ultérieur.
E
E
sol
sol
1
1
N =0
2D
Ag
0,8
3D
2D
0,8
N =1
Ag
N =0
Ag
2D
N
Ag
= 2, 3, ... ,
N
0,6
8
0,6
3D
Ag
>1
N =1
0,4
0,4
0,2
0,2
Ag
2D
(a)
0
0
0,2
0,4
0,6
(a)
0,8
(b)
1/3
(1/N)
0
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1/3
(1/N)
(b)
Figure IV.33 : Représentation de l’énergie de solution Esol (en eV/at) en fonction de (1 N ) (avec N le nombre
total d’atomes de Ni qui composent le disque ou l’amas), en géométrie 2D (symboles vides et pointillés) ou 3D
(symboles pleins et trait plein), pour le cas où disques ou amas sont déposés à la surface de Ag (100) (cercle),
puis enfouis sous une (triangle), plus d’une (carré) couche d’Ag. (a) : Ni est contraint au paramètre de Ag en
l’absence de toute relaxation, (b) : Ni est partiellement relaxé (sans apport de matière).
13
IV.3.5 - Conclusion
Les résultats précédents confortent l’analyse expérimentale en SXRD développée au
chapitre I, à savoir que les précipités de Ni préfèrent adopter une forme tridimensionnelle au
voisinage de la surface, enfouis sous au maximum une couche d’Ag, et relaxés à leur
paramètre de réseau. De plus, comme on peut le voir en comparant la figure IV.30 à la figure
I.17, la perturbation de la morphologie de surface par ces précipités enterrés est cohérente
avec les images issues du STM [54], qui présentent en particulier des cratères à l’aplomb de
précipités. Enfin, la forme allongée de ces précipités est en accord avec les données de SXRD.
Du point de vue théorique, nos résultats ont permis de poser quelques garde-fous quant
aux limitations d’un calcul effectué sans prendre en compte les effets de relaxation pour un
système présentant un fort désaccord de maille. Toutefois, cette étude demeure préliminaire
dans la mesure où nous avons découplé, de façon quelque peu arbitraire, la chimie et la
morphologie : jusqu’ici, seules ont été entreprises vraiment des études de la morphologie à
chimie fixée ou bien de la chimie à morphologie fixée. La prochaine étape sera donc d’utiliser
la technique du Monte Carlo couplé, qui associe les échanges et les déplacements atomiques
(relaxations) [130] pour décrire de façon plus détaillée les comportements observés dans ce
travail.
- 108 -
CONCLUSION
___________________________________________________________________________
CONCLUSION
Nous avons tenté, dans ce travail de thèse, de caractériser les différents modes de
relaxation de contraintes dans des alliages de surface dont les éléments constitutifs présentent
un fort désaccord de maille. Pour cela, nous avons couplé des analyses expérimentales par
Diffraction de Rayons X en Incidence Rasante (SXRD) à une modélisation par simulation
numérique (Dynamique Moléculaire, Monte Carlo) dans des potentiels interatomiques fondés
sur la structure électronique (approximation des Liaisons Fortes).
Trois systèmes ont été étudiés, représentatifs de trois classes de comportement : Sb/Cu
(incorporation des atomes déposés), Ag/Cu (couche épitaxiée) et Ni/Ag (remontée des atomes
du substrat). Les résultats essentiels sont :
- pour Sb/Cu, la formation d’un alliage bidimensionnel de surface,
- pour Ag/Cu, la compétition entre des surstructures mettant en jeu des mécanismes de
relaxation fondamentalement différents, impliquant ou non la formation de lacunes dans le
substrat,
- pour Ni/Ag, la formation de précipités relaxés enterrés sous la surface.
Dans les deux derniers systèmes, nous avons particulièrement étudié l’influence de la
température via les vibrations de réseau et le couplage intime entre morphologie et ordre
chimique. Ainsi, il est apparu que les contraintes pouvaient générer (artificiellement) en
volume une tendance à l’ordre chimique dans un système présentant pourtant une tendance à
la séparation de phases, effet dont il faudra tenir compte à l’avenir dans tout calcul sur réseau
rigide (de type Ising).
Nous avons montré qu’il était essentiel, dans une modélisation atomistique de
l’hétéroépitaxie en général, et des alliages de surface en particulier, de rendre compte
correctement de l’asymétrie entre contraintes en tension et en compression.
Enfin, nous avons pu voir qu’une cartographie des pressions locales était un outil de
choix pour prédire tant les réarrangements atomiques et chimiques que les effets
vibrationnels. Néanmoins, nous insistons sur le fait qu’il convient de manier cet outil avec
précaution.
En complément de cet aspect un peu "catalogue" de l’ensemble de nos résultats, il est
possible de tirer quelques leçons générales de ce travail.
La première concerne la nécessaire synergie entre études expérimentales et
modélisation pour avancer de façon convaincante dans la compréhension d’un problème
physique posé en science des matériaux. Même s’il n’a pas toujours été facile au cours de
cette thèse de mener de façon équilibrée ces deux aspects, la tentative de le faire a tout de
même suffi à dégager les richesses des deux approches certes, mais également leurs
limitations quand elles sont utilisées seules. L’étude du système Ag/Cu (111) en est
particulièrement illustrative. En effet, ce système, où tout semblait élucidé il y a une dizaine
d’années, pose encore, y compris à l’issue de ce travail, des questions de fond, après une série
d’allers-retours entre expérience et modélisation. Ainsi, si les premières études en LEED ont
mis en évidence une périodicité compatible avec des arguments géométriques simples, la
volonté de conforter ce résultat par une modélisation a permis de prédire une structure
(Moiré) à la surprenante corrugation. Lors de la tentative de résoudre celle-ci
expérimentalement (détermination du motif et non plus seulement de la périodicité de la
maille) par le couplage des techniques STM-SXRD, une autre structure (triangulaire), a été
- 109 -
CONCLUSION
___________________________________________________________________________
mise en évidence, suscitant une nouvelle modélisation ! Cette dernière a permis d’identifier
un mécanisme de relaxation de contraintes bien plus complexe (mettant en jeu la création de
lacunes dans le substrat) et une compétition entre phénomènes d’équilibre et phénomènes
cinétiques qui devra de nouveau faire l’objet d’études ultérieures !
C’est là la seconde leçon de ce travail : une leçon de modestie donc, tant du point de
vue expérimental que théorique.
Ainsi, du point de vue expérimental, aucune technique, utilisée seule, ne permet
d’apporter une réponse globale. Même le STM, s’il a permis des avancées incontournables en
science des surfaces, ne résout pas tout. On a pu voir dans cette thèse que, tant dans le cas du
système Sb/Cu (111) (incorporation relativement à l’adsorption, symétrie brisée, faute
d’empilement) que dans celui du système Ni/Ag (100) (morphologie des précipités enterrés),
seul le couplage du STM avec d’autres techniques expérimentales, en particulier la SXRD,
mais aussi avec la modélisation, a permis d’avancer dans la compréhension des phénomènes
... même si tout n’est pas encore résolu !
Leçon de modestie aussi pour la modélisation, dont on a pu voir combien elle devait
être guidée (voire "remise dans le droit chemin" !) par les observations expérimentales. En
effet la complexité des phénomènes mis en jeu (nombre d’atomes inéquivalents, effet de la
température, arguments d’équilibre ou cinétiques) ne permet pas pour l’instant de comprendre
et prédire ceux-ci d’une façon totalement ab initio. Ceci nécessite ainsi d’utiliser non
seulement des approches semi-empiriques, mais aussi de définir des conditions initiales
permettant au mieux de comparer des (méta)stabilités relatives !
Il y a donc encore du "grain à moudre" pour les approches fondées sur des potentiels
semi-empiriques, les méthodes ab initio n’étant pour l’instant pas capables de tout résoudre
(comme le STM du point de vue expérimental), ce qui n’empêche pas ces dernières de
constituer un progrès essentiel. Elles permettent en particulier, quand cela leur est possible, de
valider des différences d’énergie très petites trouvées par les méthodes semi-empiriques dans
les comparaisons de structures, et également de mieux paramétrer ces méthodes approchées.
Un protocole raisonnable semble donc d’utiliser les méthodes semi-empiriques pour dégager
les grandes tendances suivies par les systèmes, et caractériser ainsi les paramètres pertinents
permettant d’établir des classes de comportements. Ceci conduit alors à identifier des
systèmes représentatifs de chaque classe, tels que : gros ou petit atome, ordre ou démixtion ...
De ce dernier point de vue, il apparaît clairement que les grandes tendances dégagées
dans ce travail sur le couplage entre ordre chimique et réarrangements structuraux, en volume
comme en surface, l’ont essentiellement été pour une classe particulière (systèmes à
démixtion).
Il faudra naturellement étudier les autres classes, en particulier celle des systèmes à
tendance à l’ordre qui font actuellement l’objet d’études à Strasbourg (Co-Pt [131]).
Une autre perspective importante, qui échappe actuellement aux approches ab initio,
est celle du mécanisme atomique de relaxation des contraintes par formation de lacunes dans
le substrat. Ceci devrait permettre d’élucider les aspects cinétiques évoqués précédemment
pour Ag/Cu. Des techniques de Monte Carlo cinétique pourraient être utilisées dans ce but.
Elles devraient également permettre d’étudier la dissolution de Ni/Ag pour compléter notre
étude préliminaire. Ainsi une relaxation complète des amas au voisinage de la surface avec
optimisation du nombre d’atomes serait possible, premier pas pour comprendre comment ces
phénomènes de relaxation peuvent se coupler au blocage de la cinétique de dissolution au
voisinage de la surface.
- 110 -
ANNEXE A
___________________________________________________________________________
ANNEXE A
Formalisme de la diffraction de rayons X en incidence rasante
 Petits rappels de cristallographie
Considérons un rér seau rtridimr ensiornnel semi-infini, constitué d’atomes i dont
r r rles
coordonnées s’écrivent R i = xi i + yi j + z i k dans la base du réseau direct appropriée i , j , k ,
r
telle que le vecteur k soit perpendiculaire
à la surface d’équation z = 0. Soit une maille
r r r
élémentaire du réseau direct a , b, c , contenant n0 atomes, d’indices (1 ≤ i0 ≤ n0) :
r
r
r r
r
r
r r
r
r
r
r
(A.1)
a = a x i + a y j + a zk ; b = bx i + b y j + b zk ; c = c x i + cy j + c z k
r r r
Cette maille élémentaire a pour volume : V = a . b ∧ c . Tout atome du réseau s’obtient donc à
r
partir d’un atome de cette
maille
par
une
translation
Ti :
r
r
r
r
r
r
r
R i = Ri 0 + Ti avec Ti = n x a + n y b + nz c
(A.2)
r r r
La maille du réseau réciproque A,B, C correspondante est définie par :
r r
r r
r r
r
a ∧b
b∧ c r
c∧a r
A = 2π
, B = 2π
, C = 2π
(A.3)
V
V
V
r
Le vecteur d’onde Q associé à un rayon X donné est défini par ses composantes (h,k,l) dans
le réseau réciproque : r
r
r r
Q r= hAr +r kB +rl C
(A.4)
r
r
rr r r r r r r r r rr
(A.5)
a .A = b.B = c.C = 2π ; a .B = a.C = b.A = b.C = c .A = c.B = 0
(
(
)
)
(
(
)
)
 Intensité diffractée
par une surface parfaite (terminaison du volume) :
r
L’intensité de l’onde Q diffusée par ce réseau s’écrit :
r
r 2
I( Q) = A(Q)
(A.6)
où l’amplitude complexe est
:
r r
r donnée ipar
(Q .R i )
A(Q) = ∑ fie
(A.7)
i
fi étant le facteur de forme associér à l’atome i (égal à son numéro atomique en première
approximation, mais dépendant de Q au delà).
Cette rsomme peut être ramenée à la maille élémentaire en utilisant les vecteurs
translation Ti définis ci-dessus de sorte que l’amplitude se ré-écrit :
r
r n x =N x n (2iπh) n y = Ny n y (2iπk ) n z = Nz n (2iπl )
A(Q) = F( Q) ∑ e x
(A.8)
∑e
∑e z
n x =− Nx
n y =− N y
n z = −N z
Avec Nx, Ny, Nz qui tendent vers l’infini. Cette amplitude met en jeu les termes suivants :
¸ facteur de structure
Le premier terme n’est autre que le facteur de structure
r r
n0
r
iQ. R i
F(Q) = ∑ fi0 e 0
(A.9)
i0 =1
qu’il faudrait, en pratique, pondérer par le facteur d’atténuation de Debye-Waller :
B = e
−2Q 2 u 2
(A.10)
- 111 -
ANNEXE A
___________________________________________________________________________
¸ composantes de volume
Les deux termes suivants mettent en jeu des sommes infinies dans les deux dimensions
(x,y) qui permettent de re-sommer les sommes d’exponentielles sous forme de sinus, soit :
n y = Ny
n x = Nx
sin(πhNx ) sin(πkNy ) = Nx N y si (h,k) entiers
n (2iπk)
n x (2iπh)
ey
=
.
e
(A.11)

∑
∑
sin(πk) = 0 sinon
sin(πh)
n x =-N x
n y = -Ny
ce qui sélectionne les nœuds du réseau réciproque (h,k) car les quotients s’annulent excepté
pour les valeurs entières où ils sont égaux à Nx(y).
¸ tige de troncature
Enfin, le dernier terme est spécifique de la surface dans la mesure où la somme est semiinfinie, ce qui conduit à l’existence des tiges de troncatures (voir figure A.1b) :
n z =N z
r
ie− iπl
n (2iπl)
=
(N z → ∞)
(A.12)
Fctr (Q) = ∑ e z
2sin(πl)
nz = 0
k
y(hk2)
y(hk1)
y(hk0)
I (0,k,l)
k=1
k=2
k=0
100
10
h
1
l
0,1
0
0,5
1
(a)
1,5
2
2,5
3
(b)
Figue A.1 : (a) Représentation dans l’espace réciproque des nœuds (hk) correspondant aux trois premiers plans
d’une structure hexagonale cfc(111) (l = 0, 1, 2), (b) : tiges de troncature (0kl) avec l = 0, 1 ,2. Ces tiges
existent à cause de la terminaison du volume par une surface.
L’amplitude totale en présence d’une surface s’écrit donc :
r
r sin(πhN ) sin(πkNy ) ie− iπl
x
A 0 ( Q) = F(Q)
.
sin(πk) 2 sin(πl)
sin(πh)
(A.13)
‘ Intensité diffractée par une surface perturbée
De façon plus générale, s’il y a modification de la structure au voisinage de la surface, il
faut définir une nouvelle maille de surface. Pour simplifier les notations, nous choisirons cette
nouvelle maille comme répétant un nombre entier de fois dans les trois directions la maille de
volume, au risque que cette maille soit plus grande que nécessaire. Soit mx, my, mz le nombre
de répétitions de la maille de volume dans le maille de surface : mz est donc le nombre de
plans perturbés. Dansr ce cas, les vecteurs dertranslation à deux dimensions s’écrivent :
r
Tis = n' x (m x a ) + n' y (m y b)
(A.14a)
r
r
rs
R i = Ri s0 + Ti
(A.14b)
- 112 -
ANNEXE A
___________________________________________________________________________
¸ surstructure de surface (mz = 1)
La figure A.2 illustre le cas particulier d’une surstructure élémentaire
( 3x 3 ), décrite
par une maille (3x3) trois fois plus grande : mx = my = 3.
k
(V3 x V3) R30°
(3 x 3)
h
(a)
(b)
Figure A.2 : Représentation schématique (a) des deux premiers plans d’une surface (111) dans le cas d’une
surface reconstruite 3x 3 R30° (la maille de surface unitaire est représentée en trait continu et la maille de
(
)
reconstruction par les pointillés) et (b) des intensités des réflexions de Bragg dans le plan (l = 0)
correspondantes : { (volume), { (reconstruction).
Dans ce cas, si la nouvelle maille contient n s0 atomes ( n s0 pouvant être différent de n0),
l’amplitude se ré-écrit :
r r
Nsy
ns0
Nsx
r
r N x n (2iπh) Ny n (2iπk ) Nz n (2iπl )
iQ . R s
n' y (2iπkmy )
i
n' x (2 iπhm x )
y
x
z
A(Q) = F( Q) ∑ e
+ ∑e
∑e
∑e
∑e
∑ fis0 e 0
n x =− Nx
n y =− N y
n z = mz
n' x = −N sx
n' y = −N sy
is0 =1
(A.15)
où N x = m x N , N y = m y N et n’apparaît plus en z que le facteur de structure de la maille de
surface :
r r
n s0
rs r
iQ. R s
i
F ( Q) = ∑ fis0 e 0
(A.16)
s
x
s
y
is0 =1
Si l’on veut pouvoir utiliser la formule précédente resommant les exponentielles sous forme
de sinus, il faut donc rajouter la partie modifiée par la surface avant perturbation et en même
temps la soustraire. On obtient ainsi
r :
r
r
˜ (Q )
A(Q) = A 0 ( Q) + A
(A.17)
s
s
N
N
m
N
N
−
1
y
y
x
x
z
r
r
r
n' (2iπkm )
n (2iπk)
˜ (Q) = F s( Q)
A
∑ e n' x(2iπhmx ) ∑ e y y − F(Q) ∑ e nx (2iπh) ∑ e y ∑ e nz (2iπl ) (A.18)
n' x =− Nsx
n' y =− Nsy
n x = −N x
n y =− Ny
n z =0
s
s
r m z −1
r
r
˜A(Q) = sin(πhm x N x ) . sin(πkm y Ny ) Fs (Q) − sin(πhN x ) . sin(πkNy ) F( Q) ∑ e n z (2iπl) (A.19)
sin(πhm x )
sin(πh)
sin(πkm y )
sin(πk)
n z =0
r
r
˜
Le terme "perturbatif" A(Q) introduit deux types de modifications par rapport à A 0 (Q) :
- une modulation de la tige de troncature
- de nouvelles taches fractionnaires dites de surstructure aux nœuds (h/mx et k/my)
puisque le quotient de sinus est cette fois non nul pour hmx et kmy entiers (voir figure A.2).
Ainsi pour les taches entières :
r
r m z −1
r
r m z −1
r

˜ (Q) = N s .N s .Fs (Q) − N .N .F(Q) e n z (2iπl) = Ns .Ns  Fs (Q) − m m F( Q) e n z (2iπl )  (A.20)
A
∑
∑
x
y
x
y
x
y
x y


nz = 0
n z =0
et pour les taches fractionnaires r:
r
˜ (Q) = N s .N s .Fs (Q)
(A.21)
A
x
y
- 113 -
ANNEXE A
___________________________________________________________________________
En pratique, afin de simplifier la programmation informatique, plutôt que de soustraire
r
r m z −1 n (2 iπl )
m x m y F(Q) ∑ e z
on soustrait un facteur de structure F0s( Q) calculé sur la même maille
nz = 0
que la surstructure, mais ravant perrturbation.
r L’amplitude s’écrit de la façon suivante :
˜
A(Q) = A(Q) + A0 (Q)
(A.22)
r
r
r
˜ (Q) = sin(πhm x Ns ) . sin(πkm y Ns ) Fs (Q) − Fs (Q)
(A.23)
A
0
sin(πhm x )
sin(πkm y )
r
sin(πhN x ) sin(πkNy ) r ie− iπl
(A.24)
A 0 ( Q) =
.
F(Q)
sin(πk)
2sin(πl)
sin(πh)
1
424
3
[
]
fctr
¸ relaxation verticale (voir figure A.3)
Si les (P+1) premières distances interplans changent, passant de a à ap (p = 0 surface), il
faut faire attention en effectuant la re-sommation :
− P−1
0
0
0
0
r r
rr
rr
rr
r r
r r
r r
e iπl
i( q . a )
i (q . a k )
i ( q . a)
i( q . a k )
i ( q . a)
i( q . a k )
i ( q .a )
(A.25)
e
+
e
=
e
+
e
−
e
=
+
e
−e
∑
∑
∑
∑
∑
2isin(πl) k= −P
k=−∞
k=− P
k= −∞
k= −P
On obtient ainsi de façon simple l’influence de la relaxation sur la tige de troncature, qui
se manifeste par une asymétrie, d’un côté ou de l’autre de l = 0,5 suivant qu’il s’agit d’une
dilatation ou d’une contraction.
[
]
[
]
log(I)
+ 10 %
-10 %
0%
12
10
8
6
l
4
0
0,5
1
Figure A.3 : Effet de la relaxation : évolution en fonction de l du logarithme de l’intensité I le long de la tige de
troncature d’une surface (111) (structure cfc) dans différentes conditions : trait plein : relaxation nulle,
pointillés : relaxation verticale de +10% du dernier plan, tirets : relaxation verticale de -10% du dernier plan.
¸ effet de la chimie : Sb/Cu vs Cu/Cu(111)
ln(I)
ln(I)
ln(I)
12
12
12
11
11
10
10
9
9
8
8
7
7
6
6
11
10
9
5
-3
-2
-1
0
(a)
1
2
3
l
8
7
5
-3
-2
-1
0
(b)
1
2
3
l
l
6
-3
-2
-1
0
1
2
3
(c)
Figure A.4 : Evolution en fonction de l du logarithme de l’intensité I le long de la tige de troncature d’une
surface cfc (111) non relaxée dans les systèmes :
(a,b) : effet de la chimie (Cu/Cu (trait plein) et Sb/Cu (…)) dans différentes conditions : (a) facteur de
forme = Z et facteur de Debye-Waller = 1, (b) facteurs de forme et de Debye-Waller dépendant de Q.
(c) Effet de la dépendance en Q du facteur de Debye-Waller pour le système Sb/Cu, trait plein : facteur de
Debye-Waller = 1 et … : facteur de Debye-Waller dépendant de Q.
- 114 -
ANNEXE A
___________________________________________________________________________
L’effet de la chimie sur les tiges de troncatures, illustré ici dans le cas d’une couche
Sb/Cu (111), se traduit par la modulation de l’amplitude à une dimension selon :
e iπl
cos(πl)
fCu
f
fCu
+ [fSb − fCu ]=
[−i cos(πl) + sin(πl)]+ [fSb − fCu ]− ifCu
+ (fSb − Cu )
2i sin(πl)
2sin(πl)
2
2sin(πl)
(A.26)
et conduit aux variations d’intensité de la figure A.4 selon le degré d’approximation utilisé
pour traiter le facteur de forme et celui de Debye-Waller.
¸ effet d’une faute d’empilement
On peut introduire une faute de type cfc-hcp à la surface (A-B-C-B-...) ou non (A-B-CA-B-C-...), comme illustré sur la figure A.5.
(a)
(b)
Figure A.5 : Empilements cfc sans faute d’empilement (a) et hcp avec faute d’empilement (b).
On peut voir sur la figure A.6 que la signature de cette faute d’empilement cfc/hcp sur
une tige de troncature est très caractéristique, dans le système pur Cu comme mixte Sb/Cu :
elle module assez fortement le profil de la tige.
ln(I)
11
ln(I)
ln(I)
12
11
11
10
10
9
9
8
8
10
9
7
8
hcp
7
hcp
hcp
6
6
-2
-1
0
(a)
cfc
5
cfc
5
-3
7
1
2
3
l
cfc
l
4
-3
-2
-1
0
(b)
1
2
3
l
6
-3
-2
-1
0
1
2
3
(c)
Figure A.6 : Effet de la présence d’une faute d’empilement cfc-hcp : évolution en fonction de l du logarithme de
l’intensité I le long de la tige de troncature d’une surface (111) (structure cfc) dans les systèmes Cu/Cu (a), (b)
et Sb/Cu (c), (trait plein) : pas de faute d’empilement, (…) : faute d’empilement cfc-hcp dans différentes
conditions : (a) pas de relaxation, facteur de forme = Z et facteur de Debye-Waller = 1, (b) et (c) : pas de
relaxation, facteurs de forme et de Debye-Waller dépendant de Q.
- 115 -
ANNEXE B
___________________________________________________________________________
ANNEXE B
Méthode de fraction continue pour le calcul des densités locales de phonons
La densité d’états de vibration n(ν) est déterminée à partir des équations de
mouvement :
∂U
Ýiα = Fiα = −
M iuÝ
= − ∑ Φ0iαjβu jβ
(B.1)
∂uiα
jβ
où Mi est la masse de l’atome i, uiα est le déplacement atomique de l’atome i dans la direction
∂2 u iα
0
α (x, y ou z), Ý
uÝiα =
2 , Φ iαjβ est la matrice des constantes de force et U est l’énergie
∂t
potentielle du système.
1
Nous cherchons des solutions de la forme u iα (t ) =
u iαe 2iπνt . On a donc :
Mi
F
1
2
0
0
ν u iα = − 2 iα
=∑ 2
Φ iαjβu jβ = ∑ Diαjβu jβ
(B.2)
jβ 4π
jβ
4π M iMj
M iM j
1
0
Diαjβ =
4π
2
M iM j
0
Φ iαjβ est la matrice dynamique (3Natx3Nat), Nat étant le nombre d’atomes.
Cette nouvelle équation du mouvement (B.2) est identique à l’équation de Schrödinger pour
les états propres des électrons dans l’approximation des Liaisons Fortes : l’énergie propre,
fonction d’onde et matrice hamiltonienne sont remplacées respectivement par la fréquence au
0
carré (ν2), les déplacements (ujβ) et les éléments de la matrice dynamique Diαjβ
. Les modes
normaux νn du système sont obtenus en diagonalisant l’équation (B.2). La densité d’états
totale N(ν2) est donnée par :
n(ν)
(B.3)
N(ν2 ) = ∑ δ(ν2 − ν2n ) =
2ν
n
Nous pouvons développer la densité d’états totale sous la forme d’une somme de
densités d’états vibrationnels locale et partielle (sur un site i et le long d’une direction α) :
2
2
(B.4)
N(ν ) = ∑ Niα (ν )
iα
avec
2
Niα (ν ) = ∑ u niα δ(ν2 − ν 2n )
2
(B.5)
n
où u niα est la composante α du vecteur de déplacement généralisé de l’atome i dans le mode
normal n. On peut définir un opérateur de Green :
G(ν2 ) = (ν 2Id − D0 ) −1
(B.6)
où I est la matrice identité.
2
Niα (ν2 ) est relié à l’élément de matrice diagonale Gαα
ii (ν ) de l’opérateur de Green.
Im
2
lim+ Gαα
(B.7)
Niα ν2 = −
ii ν + iε
π ε →0
2
n iα (ν) = 2νNiα ν
(B.8)
( )
()
n(ν )= ∑ n iα (ν)
(
)
(B.9)
iα
- 116 -
ANNEXE B
___________________________________________________________________________
On peut écrire la densité de phonons sous la forme d’une fraction continue, ce qui est
possible si on peut créer à partir de la base des états de vibration n (n = 1, 2, ..., 3N) une
nouvelle base n} orthonormée dont le premier vecteur est iα et dans laquelle la matrice
dynamique est tridiagonale telle que :
 a 1iα b1iα
 b iα a iα
1
2

D = 0 b2iα

... 0

 ... ...
que l’on peut aussi écrire :
0
biα
2
...
0
a iα
3
biα
3
0
biα
3
a iα
4
...
[ {
...
...
0

...

...
(B.10)
{
{]
D = ∑ n}a n n + n}bn n + 1 + n − 1}b n−1 n
iα
avec
n
{
{
{
{
a iα = n D n}
n

iα
 bn = n D n + 1}
 iα
 bn−1 = n D n − 1}
0 = n D n ± p pour p > 1
}

On cherche l’élément de matrice diagonal :
αα
G ii (z) = G11 =
Or
avec :
iα
{
G11 = 1 (zId − D) 1}
{
(zId − D)
iα
}
−1
−1
 z − a1iα
 −biα
1
zId − D =  0

...

 ...
αα
(B.12)
ii
(B.13)
z − a iα
n+1
...
...
0

...

...
− bniα+1
− bniα+1
0
...
z − a iα
n+1
iα
−b n+2
...
−b1iα
z − a 2iα
0
−b2iα
...
0
−b2iα
0
...
z − a iα
3
iα
−b3
0
− biα
3
z − a iα
4
...
 Det1 ... ...
1 
G(z) =
... ... ... avec
Det 0 

 ... ... ...
Det n =
qui s’étend en utilisant la loi de récursion :
(
(B.11)
)
( )
2
Det n = z − a niα+1 Det n+1 − bniα+1 Det n +2
(B.14)
0
...
−b iα
...
n+2
iα
z − a n+1 ...
...
...
(B.15)
(B.16)
Il est alors facile de projeter G sur le premier état vibratoire :
{
G11 = 1 (zId − D) 1}= iα (zId − D) iα
−1
−1
(B.17)
ce qui conduit en procédant par itérations successives à la fraction continue, qui s’écrit de
manière générale pour le site i et la composante α de l’état de vibration :
Det 1
Det 1
1
αα
=
=
(B.18)
G ii (z) =
2
2 Det
iα
iα
Det 0
iα
iα
2
z − a1 Det1 − b1 Det 2
z − a 1 − b1
Det 1
(
)
( )
(
)( )
- 117 -
ANNEXE B
___________________________________________________________________________
1
G ii (z) =
αα
z − a1iα −
z − a iα
2
(B.19)
( )
(b )
−
(b )
z−a −
b1iα
2
iα
2
2
iα
3
2
iα
3
...
A présent, il reste à déterminer les vecteurs de la nouvelle base n} de manière à calculer les
coefficients a iαn et biα
n . On fixe le premier vecteur de base 1} puis on obtient les autres par la
méthode de récursion :
1}= iα
2}= D 1}− a 1iα 1}
( ) 1}
iα
3}= D 2}− a iα
2 2}− b1
M
2
(B.20)
( ) n − 1}
iα
n +1}= D n}− a iα
n n}− bn −1
2
Les relations d’orthogonalisation donnent alors :
{n
n + 1}= 0
⇒ a iα
n =
{n − 1 D n}
{n D n} = {n D n}
{n n}

n − 1 n + 1}= 0 ⇒ (b ) =


n − 1 n − 1}
iα
=
 ⇒ b n−1
n
n
} 
iα
n + 1 n + 1}= n + 1 D n}⇒ (b n−1
)2 =
n − 1 n − 1}
{
{
2
iα
n −1
{
{
{
{
{
{n − 1 D n}
{
n −1 n − 1} n n}
{
= n − 1D n}
(B.21)
Pour calculer les coefficients de récursion, on construit un amas centré sur le site i et
comprenant les voisins proches, puis on construit la couche suivante constituée des voisins
des précédents et ainsi de suite jusqu’à avoir N couches correspondant à N paires de
coefficients pour chaque direction α. Il faut à présent prolonger la fraction continue ; on
distingue alors deux cas :
pour un amas fini, biα
n tend vers zéro au delà d’un certain étage de la fraction
continue, de telle sorte que la fraction est tronquée naturellement, conduisant à un spectre
discret de pics δ élargis par la partie imaginaire ε pour la densité de phonons au site i et
Im
2
suivant une direction donnée ( Niα ν2 = −
lim+ Gαα
ii ν + iε ).
π ε →0
pour un système infini ou semi-infini, les coefficients convergent vers les valeurs
a∞ et b∞ reliées à la largeur de bande de la densité d’états vibrationnels. On prolonge alors
artificiellement la fraction continue par une fonction Γ(z).
( )
(
)
- 118 -
ANNEXE B
___________________________________________________________________________
1
G ii (z) =
αα
z − a1iα −
z − a iα
2
(B.22)
( )
(b )
−
(b )
z−a −
b1iα
2
2
iα
2
2
iα
3
iα
3
...
...
( ) Γ(z)
iα
− bn
2
avec la condition sur la fonction :
Γ (z ) =
1
z − a ∞ − b2∞ Γ(z)
(B.23)
où z = ν2 + iε et les valeurs a∞ et b∞ sont les valeurs asymptotiques des coefficients a iαn et
biα
n . On les déduit de l’équation du second degré :
b2∞Γ 2 (z )+ (a ∞ − z )Γ(z) + 1= 0
(B.24)
dont les solutions ont une partie imaginaire pour z = ν2 , à condition que :
(B.25)
0 < ν2 < ν2max
2
νmax étant la fréquence de vibration maximale et telle que νmax = 2a ∞ = 4b ∞ ( a ∞ = 2b ∞ ). On
obtient donc deux solutions pour Γ(z) :
(z − a ) + (z − a ) − 4b
=
2
∞
(z − a ) − (z − a ) − 4b
2
∞
2
γ
γ
+
−
(z)
(z) =
∞
∞
2b2∞
2
∞
∞
(B.26)
2
∞
2b
Pour que G (z) soit une fonction de Hergoltz, il faut la condition :
αα
ii
(
)
Im(z )< (> )0 ⇔ Im G ii (z ) > (<)0
αα
(B.27)
On retient alors Γ (z ) = γ (z). La propriété de Hergoltz de G
−
d’appartenir à l’axe réel. Finalement en développant γ
−
αα
ii
(z)
garantit aux pôles
(z) et en considérant sa limite lorsque
2
ε → 0, la terminaison s’écrit en fonction de ν :
 ν2 − a − i 4b2 − ν2 − a 2 
∞
∞
∞


−
2
γ ν =
(B.28)
2
2b∞
La densité de phonons est celle d’un amas fini mais plongé dans un milieu infini avec
une densité de phonons semi-elliptique centrée en a∞ et de largeur 4b∞ qui élargit
naturellement les pics δ.
( )
(
)
- 119 -
REFERENCES
___________________________________________________________________________
REFERENCES
[1]
[2]
[3]
[4]
[5]
[6]
[7]
[8]
[9]
[10]
[11]
[12]
[13]
[14]
[15]
[16]
[17]
[18]
[19]
[20]
[21]
[22]
[23]
[24]
[25]
[26]
[27]
U. Bardi, Rep. Prog. Phys. 57 (1994) 939.
B. Legrand, A. Saúl et G. Tréglia, Mater. Sci. Forum 155-156 (1994) 165
G. Tréglia, A. Saúl and B. Legrand, Il Vuoto, Scienza e Tecnologia, XXV (1996) 32
Y. Gauthier et R. Baudoing, Surface Segregation Phenomena, ed. P.A. Dowben, A.
Miller , CRC Press Florida (1990) 169.
G. Tréglia, B. Legrand, F. Ducastelle, A. Saúl, C. Gallis, I. Meunier, C. Mottet, A.
Senhaji, Modeling of Segregation Phenomena at Alloy Surfaces, Special Issue of
Computational Materials Science (Elsevier Ed., 1999).
D. Frenkel et B. Smit, Understanding Molecular Simulation, (Academic Press, New
York, 1996).
C.H. Bennett, Diffusion in Solids, Recent Developments, ed. A.S. Nowick et J.J.
Burton (New York: Academic Press, 1975) 73.
K. Binder, The Monte Carlo Method in Condensed Matter Physics, (Springer Verlag,
Berlin, 1995).
D.G Pettifor and D.L. Weaire, The Recursion Method and its Applications, Springer
Series in Solid-State Sciences (1984)
A. Cornet et J.-P. Deville, Physique et Ingénierie des Surfaces, (EDP Sciences Les
Ulis, 1998) 218.
A. Barbier, Surf. Sci. 406 (1998) 69
F.C. Franck et J.H. van der Merwe, Proc. R. Soc. London A 198 (1949) 205.
J.N. Stranski et L. Krastanov, Ber. Akad. Wiss. Wien 146 (1938) 797
M. Volmer et A. Weber, Z. Phys. Chem 119 (1926) 277.
W.K. Burton, N. Cabrera et F.C. Franck, Phil. Trans. R. Soc.London A 243 (1951) 99.
E. Wood, J. Appl. Phys. 23,4 (1964) 1306.
Y. Gauthier, R. Baudoing, C. Gaubert et D. Aberdam, Surface Crystallography by
LEED, Plenum Press, Research Symposium Series (1985).
W.K. Chu, J.W. Mayer et M.A. Nicolet, Backscattering Spectrometry, ed. Academic
Press, N.-Y. (1978)
L.C. Feldman et J.W. Mayer, Fondamentals of Surface and Thin Films Analysis, ed.
North-Holland, Elsevier Science Pub. Co. (1986)
G. Binnig, H. Rohrer, Ch. Gerber et E. Weibel, Phys. Rev. Lett. 49 (1982) 57.
Scanning Tunneling Microscopy II, ed. R. Wiesendanger et H. J. Guntherodt, Springer
Series in Surf. Sci. 28 (1992).
G. Renaud, Surf . Sci. Rep. 32 (1998) 1
J.-M. Gay, Applications des Rayons X et des Neutrons, CPMSI, Luminy (1992).
M. Brunel, J. Phys. IV France 6 (1996) 321.
N. Jedrecy, thèse Paris VI (1990).
I.K. Robinson, Phys. Rev. B 33 (1986) 3830.
H. Giordano, thèse Aix-Marseille I (1993).
H. Giordano, B. Aufray, C. Cohen, D. Schmaus, F. Abel, A. l’Hoir et Y. Girard, (à
publier).
H. Giordano, O. Alem et B. Aufray, Scr. Met. 28 (1993) 257.
H. Giordano et B. Aufray, Surf. Sci. 352-354 (1996) 280.
M. Göthelid, B. Aufray, H. Giordano, J.-M. Gay et G. Le Lay, Surf. Rev. Lett. 4
(1997) 1203.
B. Aufray, H. Giordano et D.N. Seidman, Surf. Sci. 447 (2000) 180.
- 120 -
REFERENCES
___________________________________________________________________________
[28]
I. Meunier, J.-M. Gay, L. Lapena, B. Aufray, H. Oughaddou, E. Landemark, G.
Falkenberg, L. Lottermoser et R.L. Johnson, Surf. Sci 422 (1999) 42.
[29] R. Feidenhans’l, Surf. Sci. Reports 10 (1989) 105.
[30] C.Y. Park, T. Abykawa, T. Kinoushita, Y. Enta, S. Kono, J. Appl. Phys 27 (1988) 147.
[31] B.E. Warren, X-ray Diffraction (Addison-Wesley, Reading, MA, 1969) chap.11.
[32] C. Kittel, Introduction to Solid State Physics (J. Wiley, New-York, 1976) p.126.
[33] M.-C. Desjonquères et G. Tréglia, Phys. Rev.B 34 (1986) 6662.
[34] E. Vlieg, thesis FOM Amsterdam (1988).
[35] H. Crugel, B. Lépine, S. Ababou, F. Solal, G. Jézéquel, C.R. Natoli et R. Belkhou,
Phys. Rev B 55 (1997) R16061.
[36] S. Oppo, V. Fiorentini et M. Scheffler, Phys. Rev. Lett. 71 (1993) 2437.
[37] S.A. de Vries, W.J. Huisman, P. Goedtkindt, M.J. Zwanenburg, S.L. Bennett, I.K.
Robinson, E. Vlieg, Surf. Sci. 414 (1998) 159.
[38] E.A. Soares, C. Bittencourt, V.B. Nascimento, V.E. de Carvalho, C.M.C. de Castilho,
C.F. McConville, A.V. de Carvalho, D.P. Woodruff, Phys. Rev. B 61 (2000) 13983.
[39] P. Bailey et T.C.Q. Noakes et D.P. Woodruff, Surf. Sci. 426 (1999) 358.
[40] P.D. Quinn, D. Brown, D.P. Woodruff, P. Bailey et T.C.Q. Noakes, sous presse.
[41] D.P. Woodruff et J. Robinson, J. Phys. Condens. Matter 12 (2000) 7699.
[42] J. Eugène, thèse Université Aix-Marseille III (1989).
[43] Y. Borensztein, Europhys. Lett. 4 (1987) 723.
H. Tokutaka, K. Nishimori et K. Takashima, Surf. Sci. 86 (1979) 54.
[44] E. Bauer et J.H. van der Merve, Phys. Rev B 33 (1986) 3657.
[45] E. Bauer, Surf. Sci. 7 (1967) 351.
E. Bauer, Appl. Surf. Sci. 11-12 (1982) 479
K.A.R. Mitchel, D.P. Woodruff et G.W. Vernon, Surf. Sci 46 (1974) 418.
[46] J. Eugène, B. Aufray et F. Cabané, Surf. Sci. 241 (1991) 1.
Y. Liu and P. Wynblatt, Surf. Sci. 240 (1990) 245
Y. Liu and P. Wynblatt, Surf. Sci. 241 (1991) L21
Y. Liu and P. Wynblatt, Surf. Sci. 310 (1994) 27
[47] G. Tréglia, B. Legrand, J. Eugène, B. Aufray, F. Cabané, Phys. Rev. B 44 (1991) 5842
J. Eugène, G. Tréglia, B. Legrand, B. Aufray, F. Cabané, Surf. Sci. 251-252 (1991)664
A. Saúl, B. Legrand, G. Tréglia, Phys. Rev. B 50 (1994) 1912
[48] F. Besenbacher, L. Pleth Nielsen and P.T. Sprunger, The Chemical Physics of Solid
Surfaces and Heterogeneous Catalysis, eds. D.A. King, D.P. Woodruff, Elsevier,
Amsterdam 8, chap. 10 (1997).
W.E. MacMahon, E.S. Hirschorn and T.C. Chiang, Surf. Sci. 279 (1992) L231.
[49] B. Aufray, M. Göthelid, J.-M. Gay, C. Mottet, E. Landemark, G. Falkenberg, L.
Lottermoser, L. Seehofer, R.L. Johnson, Microsc. Microanal. Microstruct. 8 (1997)
167.
[50] V.K. Kimmikov et K.B. Khokonov, J. Appl. Phys. 54 (1983) 1346.
[51] A. Rolland et B. Aufray, Surf. Sci. 162 (1985) 530.
[52] B. Aufray, H. Giordano, B. Legrand et G. Tréglia, Surf. Sci. 307-309 (1994) 581.
[53] K.S. Lee, S.H. Kim, H.G. Min, J. Seo et J.-S. Kim, Surf. Sci. 377-379 (1997) 918.
[54] D.A. Hite, O. Kizilkaya, P.T. Sprunger, M.M. Howard, C.A. Ventrice, H. Geisler et
D.M. Zehner, J. Vac. Technol. A 18, n° 4 (2000) 1950.
[55] J. Friedel, The Physics of Metals, ed. J.M. Ziman, Cambridge Univ. Press. (1969) 340.
[56] M. Lannoo et P. Friedel, Atomic and Electronic Structure of Surfaces, Springer Series
in Surface Sciences 16 (1991).
[57] R.J. Elliott, J.A. Krumhansl et P.L. Leath, Rev. Mod. Phys. 46 (1974) 465.
H. Ehrenreich et L.M. Schwartz, Solid State Phys. 31 (1976) 149.
- 121 -
REFERENCES
___________________________________________________________________________
[58]
[59]
[60]
[61]
[62]
[63]
[64]
[65]
[66]
[67]
[68]
[69]
[70]
[71]
[72]
[73]
[74]
[75]
[76]
[77]
[78]
[79]
[80]
[81]
[82]
[83]
[84]
[85]
J.-M. Ziman, Models of Disorder, Cambridge University Press (1979).
F. Ducastelle et F. Cyrot-Lackmann, J. Phys. Chem. Sol. 32 (1973) 3077.
J.P. Gaspard et F. Cyrot-Lackmann, J. Phys. C 6 (1973) 3077.
R. Haydock, V. Heine, and M. J. Kelly, J. Phys. C 5, 2845 (1972).
M. J. Kelly, Solid State Phys. 35, 356 (1980).
P. Turchi, thèse Université Paris VI (1984).
S. Sawaya, J. Goniakowski, C. Mottet, A. Saúl, G. Tréglia, Phys. Rev. B 56 (1997)
12161.
V. Rosato, M. Guillopé, B. Legrand, Phil.Mag. A 59 (1989) 321.
F. Ducastelle, Order and Phase Stability in Alloys (North-Holland, 1991).
M.-C. Desjonquères et D. Spanjaard, Concepts in Surface Physics, Springer.
M. Guillopé and B. Legrand Surf. Sci. 215 (1989) 577-595.
B. Legrand, M. Guillopé, J. S. Luo et G. Tréglia, Vacuum 41 (1990) 311.
O.K. Andersen, O. Jepsen et D. Glötzel, Highlights of Condensed Matter Theory, ed.
F. Bassani, F. Fermi, M.P. Tosi (North Holland, Amterdam 1985)
F.Ducastelle, J. Phys. Paris 31 (1970) 1055.
H. Rose, J. R. Smith et J. Ferrante, Phys. Rev. B 28 (1983) 1835
D. Spanjaard et M.-C. Desjonquères, Phys. Rev. B 30 (1984) 4822.
G. Tréglia, B. Legrand et F. Ducastelle, Europhys. Lett. 7 (1988) 575.
D. Tomanek, A.A. Aligia et C.A. Balseiro, Phys. Rev. 32 (1985) 5051.
G. Tréglia et B. Legrand, Phys. Rev. 35 (1987) 4338.
F. Berthier, B. Legrand, and G. Tréglia, Acta Mater. 47 (1999), 2705.
J. Creuze, F. Berthier, R. Tétot et B. Legrand, Phys. Rev. B 62 (2000) 2813.
G. Simmons et H. Wang, Single Crystal Elastic Constants and Calculated Aggregated
Properties, MIT, Cambridge (1971).
C. Mottet, thèse Aix-Marseille II (1997).
A. Bieber, F. Gautier, G. Tréglia, F. Ducastelle, Solid State Comm. 39 (1981) 149.
F.R. de Boer, R. Boom, W.C.M. Mattens, A.R. Miedema, A.K. Niessen, Cohesion in
Metals (North-Holland, 1988).
F. Berthier, J. Creuze, R. Tétot et B. Legrand, Appl. Surf. Sci. 177 (2001) 243.
M.S. Daw and M.I. Baskes, Phys. Rev. B 29 (1984) 6443.
K.W. Jacobsen, J.K. Norskov et M.J. Puska, Phys. Rev. B 35 (1987) 7423.
O.B. Christensen, K.W. Jacobsen, J.K. Norskov et M. Manninen, Phys. Rev. Lett. 66
(1991) 2219.
M.W. Finnis and J.E. Sinclair, Philos. Mag. A 50 (1984) 45.
F. Ercolessi, E. Tosatti, and M. Parrinello, Phys. Rev. Lett. 57 (1986) 719.
R. Hultgren, P.D. Desay, D.T. Hawkins, M. Gleiser, K.K. Kelley, D.D. Wagman,
Selected Values of Thermodynamic Properties of the Elements (American Society of
Metals, Ohio, 1973)
M. Hansen, Constitution of Binary Alloys, Mc Graw Hill N.-Y. (1958).
S.Taoud, thèse Université de Nantes (1989).
G. Tréglia and M.-C. Desjonquères, J. Physique 46 (1985) 987.
A. A. Maradudin, E. W. Montroll, G. H. Weiss, and I. P. Ipavota, Theory of Lattice
Dynamics in the Harmonic Approximation, (Academic Press, New York, 1971).
J. Creuze, F. Berthier, R . Tétot, B. Legrand et G. Tréglia, Phys. Rev. B 61 (2000)
14470.
D.J. Srolovitz, K. Maeda, V. Vitek and T. Egami, Phil. Mag. A 44 (1981) 847.
T. Egami and V. Vitek, J. non-crystalline Solids 61-62 (1984) 499.
V. Vitek and T. Egami, Phys. Stat. Sol. (b) 144 (1987) 145.
- 122 -
REFERENCES
___________________________________________________________________________
[86]
[87]
[88]
[89]
[90]
[91]
[92]
[93]
[94]
[95]
[96]
[97]
[98]
[99]
[100]
[101]
[102]
[103]
[104]
[105]
[106]
[107]
[108]
[109]
[110]
[111]
[112]
[113]
[114]
[115]
[116]
[117]
[118]
N. Metropolis, A.W. Metropolis, M.N. Rosenbluth, A.H. Teller et E. Teller, J. Chem.
Phys. 21 (1953) 1087.
M.T. Allen et D.J. Tildesley, Computer Simulation of Liquids, Clarendon PressOxford (1994).
W. Schweika, K. Binder, D.P. Landau, Phys. Rev. Lett. 65 (1990) 3321.
R. Lipowsky, Phys. Rev. Lett. 49 (1982) 1575.
J. Tersoff, Phys. Rev. Let. 74 (1995) 434.
W.A. Hofer, G. Ritz, W. Hebenstreit, M. Schmid, P. Varga, J. Redinger, R.
Podloucky, Surf. Sci. Lett. 405 (1998) L514
P. Varga and M. Schmid, Appl. Surf. Sci. 141 (1999) 287.
P.T. Sprunger, E. Lægsgaard, F. Besenbacher, Phys. Rev. B 54 (1996) 8163
C. Mottet, G. Tréglia, B. Legrand, Phys. Rev. B 46 (1992) 16018
C. Mottet, G. Tréglia and B. Legrand, Surf. Sci. 287-288 (1993) 476
H. Dreyssé, A. Berera, L.T. Wille, D. de Fontaine, Phys. Rev. B 39 (1989) 2442
H. Dreyssé, L.T. Wille, D. de Fontaine, Phys. Rev. B 47 (1993) 62
V. Drchal, J. Kudrnovsky, L. Udvardi, P. Weinberger, A. Pasturel, Phys. Rev. B 45
(1992) 14328
J. Kudrnovsky, S.K. Bose, V. Drchal, Phys. Rev. Lett. 69 (1992) 308
I. Meunier, G. Tréglia et B. Legrand, Surface Science 441 (1999) 225
S. Sawaya, thèse Université Aix-Marseille II (1999).
C. R. Henry, Surf. Sci. Rep. 31 (1998) 231.
A. Khoutami, B. Legrand, C. Mottet, G. Tréglia , Surf. Sci. 307-309 (1994) 735.
J.W. Matthews, in: Epitaxial Growth, Part 2, ed. J.W. Matthews (Academic Press,
New York, 1975) p. 559
J.H. van der Merwe, in: Chemistry and Physics of Solid Surfaces, eds. R. Vanselow
and R. Howe (Springer, Berlin, 1984) p. 365
B.W. Dodson, Mater. Res. Soc. Symp. Proc. 116 (1988) 491
M.H. Grabow and G.H. Gilmer, Mater. Res. Soc. Symp. Proc. 94 (1987) 15.
J.H. van der Merwe, D.L. Tönsing and P.M. Stoop, Surf. Sci. 312 (1994) 387.
M. Henzler, Surf. Sci. 357-358 (1996) 809.
S. Tan, A. Ghazali and J.C.S. Lévy, Surf. Sci. 369 (1996) 360.
J. Goniakowski et A. Saul, communication privée.
P.A. Huttunen, J. Mäkinen and A. Vehanen, Phys. Rev. B 41 (1990) 8062.
P.A. Huttunen and A. Vehanen, Phys. Rev. B 42 (1990) 11570.
S. Mroz and M. Nowicki, Surf. Sci. 297 (1993) 66.
I. Meunier, G. Tréglia, J.-M. Gay, B. Aufray, B. Legrand, Phys. Rev. B 59 (1999)
10910.
I. Meunier, G. Tréglia, B. Legrand, R. Tétot, B. Aufray et J.-M. Gay, Appl. Surf. Sci.
162-163 (2000) 219.
J. Jacobsen, L. Pleth Nielsen, F. Besenbacher, I. Stensgaard, E. Lægsgaard, T.
Rasmussen, K.W. Jacobsen and J.K. Norskov, Phys. Rev. Lett. 75 (1995) 489.
S.M. Foiles, Surf. Sci. 292 (1993) 5.
M. Dynna, A. Marty, B. Gilles and G. Patrat, Acta Mater. 44 (1996) 4417.
M. Dynna, A. Marty, B. Gilles and G. Patrat, Acta Mater. 45 (1997) 257.
N.V. Doan, Point Defects and Defects Interactions in Metals, édité par J. Takamura,
M. Doyama et M. Kiritani (University of Tokyo Press, 1982) p. 722.
A.G. Crocker, M. Doneghan and K.W. Ingle, Phil.Mag. A 41 (1980) 21.
J. Silcox and P.B. Hirsch, Phil. Mag. 4 (1959) 72.
J. Friedel, Dislocations (Pergamon Press, 1964).
- 123 -
REFERENCES
___________________________________________________________________________
[119] J.P. Hirth and J. Lothe, Theory of Dislocations, Krieger Publishing Company
(Malabar, Florida, 1992) 331.
[120] T. Rasmussen, Phys. Rev. B 62 (2000) 12664.
[121] C. Mottet, G. Tréglia, B. Legrand, Surf. Sci. Lett. 383 (1997) L719.
[122] G.J. Wang, A.P. Sutton et V. Vitek, Acta Met 32 (1984) 1093.
[123] I. Meunier, R. Tétot, G. Tréglia et B. Legrand, Appl. Surf. Sci.177 (2001) 252.
[124] I.Meunier , G. Tréglia, R. Tétot, J. Creuze, F. Berthier et B. Legrand, Phys. Rev. B 66
(2002) 125409.
[125] A. Hairie, F. Hairie, B. Lebouvier, G. Nouet, E. Paumier, N. Ralantoson et A. Sutton,
Interface Science 2 (1994) 17.
[126] J.E. Black, Z-J. Tian et T.S. Rahman, Surf. Sci. 291 (1993) 215;
T.S. Rahman et J.E. Black, Phys. Rev. B 48 (1993) 5530
[127] J.-M. Roussel, thèse Université Aix-Marseille II (1999).
[128] J.-M. Roussel, A. Saúl, G. Tréglia et B. Legrand, Surf. Sci. 352 (1996) 562.
J.-M. Roussel, A. Saúl et G. Tréglia, Phys. Rev B 55 (1997) 10931.
[129] J Creuze, thèse Université Paris (2000).
[130] C. Goyhenex, H. Bulou, J.-P. Deville et G. Tréglia, Phys. Rev. B 60 (1999) 2781.
C. Goyhenex, G. Tréglia, Surf. Sci. 446 (2000) 272.
C. Goyhenex, H. Bulou, J.-P. Deville, G. Tréglia, Appl. Surf . Sci. 177 (2001) 238.
- 124 -
_________________________________________________________________________
RESUME en français
L’objet de ce travail est l’étude des différents modes de relaxation de contraintes dans des
alliages de surface dont les éléments constitutifs présentent un fort désaccord de maille. Il couple
des analyses expérimentales par Diffraction de Rayons X en Incidence Rasante à une
modélisation par simulation numérique (Dynamique Moléculaire, Monte Carlo) dans des
potentiels interatomiques fondés sur la structure électronique (approximation des Liaisons
Fortes). Trois systèmes ont été étudiés, représentatifs de trois classes de comportement : Sb/Cu
(incorporation des atomes déposés), Ag/Cu (couche épitaxiée) et Ni/Ag (remontée des atomes du
substrat). Les résultats essentiels sont : dans le premier cas la formation d’un alliage
bidimensionnel de surface, dans le second cas la compétition entre des surstructures mettant en
jeu des mécanismes de relaxation fondamentalement différents, impliquant ou non la formation
de lacunes dans le substrat, et enfin dans le troisième cas la formation de précipités relaxés
enterrés sous la surface. Dans les deux derniers systèmes, un accent particulier est mis sur
l’influence de la température via les vibrations du réseau et sur le couplage intime entre
morphologie et ordre chimique.
_________________________________________________________________________
TITRE en anglais
Relaxation of the stress induced by size-mismatch in surface alloys.
_________________________________________________________________________
RESUME en anglais
The aim of the present work is to study how the stress induced by size-mismatch can be
released in a surface alloy. This is achieved using both experimental Surface X Ray Diffraction
analysis and atomistic modeling (Molecular Dynamics or Monte Carlo simulations in TightBinding interatomic potentials). Three different systems have been considered, which illustrate
the three main general behaviours : Sb/Cu (incorporation of adatoms), Ag/Cu (epitaxial layer)
and Ni/Ag (surfactant effect). The essential results are the following : in the first case there is
formation of a bidimensional surface alloy, in the second case different superstructures compete,
which involve drastically different relaxation mechanisms (with or without substrate vacancies),
and in the third case relaxed clusters are buried just below the surface. In the two latter systems,
some emphasis is put on the influence of temperature via lattice vibrations and on the intimate
coupling between morphological and chemical ordering.
_________________________________________________________________________
DISCIPLINE – SPECIALITE DOCTORALE
Science des Matériaux
_________________________________________________________________________
MOTS-CLES
Alliages de surface, contraintes, relaxation-reconstruction, phonons, modélisation
atomistique, diffraction de Rayons X en Incidence Rasante, Ni, Cu, Ag, Sb.
_________________________________________________________________________
INTITULE ET ADRESSE DU LABORATOIRE
Centre de Recherche sur les Mécanismes de la Croissance Cristalline (CRMC2)
Campus de Luminy, Case 913, 13288 Marseille Cedex 9.

Documents pareils