Fini le tourisme plan-plan, direction le "9-3" - Seine-Saint

07/08 OCT 12
Quotidien Paris
OJD : 286348
Surface approx. (cm²) : 542
N° de page : 3
80 BOULEVARD AUGUSTE-BLANQUI
75707 PARIS CEDEX 13 - 01 57 28 20 00
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Enquête Petit à petit, une nouvelle forme de tourisme se développe
en banlieue. De l'Ile-Saint-Denis à Montreuil en passant par Bobigny,
« il n'y a pas que des barres et des tours pourries de l'autre côté du périph'»
« Fini le tourisme plan-plan,
direction le "9-3" ! »
De plus en plus dè touristes sollicitent les Greeters, des particuliers qui font découvrir leur ville,
ou vont à la découverte de lieux insolites comme le canal de l'Ourcq, paradis des graffeurs. 00193
SEINE8
5642183300505/GTA/OTO/1
Eléments de recherche : DOUCE BANLIEUE : appellation citée, opération de ballades en Seine-Saint-Denis (93), toutes citations
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Quotidien Paris
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u pied de l'immeuble en
beton, un groupe de visi
leurs ecoute avec attention
les explications sur cette tns
te architecture qu'ils ont
devant les yeux Ils sont une
quinzaine a regarder, perplexes, la cite du
Bocage avec ses toits pointus et ses area
des, construite dans les annees 1970 dans
le style de l'architecte Jean Renaudie C'est
la derniere etape de leur parcours de decou
verte de l'Ile Saint Denis, une toute petite
commune du « 9-3 » (Semé Saint Denis),
coincée sur un bras de Seine entre Saint
Denis et Villeneuve la-Garenne (Hauts de
Seine) En ce dimanche de septembre,
Marie Pierre Agnes, de l'association
Accueil Banlieues, s'est faite guide d'un
jour pour faire decouvrir sa banlieue Une
balade urbaine dans un de ces quartiers ou
l'on pense qu'il n'y a rien a voir
A
« Nous ne sommes pas des guides
professionnels, mais nous
connaissons nos quartiers et les
gens apprécient ce contact direct »
Alain Vulbeau
membre dè l'association Accueil Banlieues
Une vingtaine de personnes se sont ins
entes par Facebook ou sont arrivées avec le
programme du Parisien des curieux de
tous ages venus d'Ile-de France ou des
habitants intrigues, a la recherche de l'mso
hte Jacques lely décorateur a la retraite
habitant Enghien les Bains (Val d'Oise),
raconte qu'il passait la tous les jours, direc
lion Courbevoie (Hauts de Seine), pour
éviter les embouteillages de l'autre rive
«/e ne m'y suis /ornais arrête C'est l'occa
non de mieux decouvrir l'île » Plus pragma
tique, Emilie Quedeville, conseillère peni
tertiaire d'insertion, veut « connaître le ter
maire ou vivent les gens [qu'elle] suis »
II n y a la rien de spectaculaire, « maîs
c'est en dehors des sentiers battus», expli
que Bernard Lefort, ingénieur de 50 ans
Un arrêt au bord du fleuve, sur les traces
des mariniers qui venaient louer leurs services pour guider les péniches, le suivant
au Saule fleuri, petite cite proprette avec
sa curieuse cheminée d'usine de brique
rouge, et une pause diapositives autour
d'un verre chez Alain Vulbeau, un mem
bre de I association la visite sort de l'ordi
naire et enchante les touristes d'un jour
«Nous ne sommes pas des guides professionnels, maîs nous connaissons nos quar
tiers et les gens apprécient ce contact
direct», glisse Alain Vulbeau
Se faire les promoteurs du patrimoine
local, c'est aussi la demarche des Greeters,
reseau d'habitants, sur le modele new yor
kais, qui proposent bénévolement aux tau
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ristes de visiter leur quartier «Je montre
ma ville comme si )'avais un ami qui venait
a la maison », raconte Rose Hubon, retrai
tee a Saint Ouen «Ici les gens viennent
chercher des rencontres A Pans, les seules
personnes avec qui ils échangent plus de
trois mots sont les hôteliers et les taxis!»,
renchérit Pierre Luc Vacher, membre du
reseau a Montreuil «Les touristes qui viennent a nos balades ont dans la tête l'image
de la banlieue coupe-gorge En partant,
leur regard a change », remarque Bernard
Meunier, Greeter a Aubervilliers « Quand
/e f aïs le tour de La Plaine en montrant les
porches ou se trouvaient les relais pour che
vaux avant la construction des abattoirs a
La Villette, les gens ne voient plus les rues de
la même facon ' », ajoute ce retraite
Des visites comme celles ci, il s'en deve
loppe des dizaines sur ces anciennes terres
industrielles a l'image dégradée On croise
ainsi des touristes dans les cites jardins de
Stains, sur le canal de lourcq a Bobigny
-paradis des graffeurs -, au milieu des étals
dumarchedeSaint Denis, ou le long du Par
cours des impressionnistes dans le parc de
l'Ile Saint Denis Persuades que dans ces
communes aussi se cachent des traces du
passe ouvrier et des innovations architectu
raies, le comite departemental du touns
me, les elus et les habitants de la banlieue
nord souhaitent les mettre en valeur
Une appellation a même ete déposée
«Douce banlieue», sans plaquettes sur
papier glace ni affiches vantant le charme
de ces contrées méconnues comme le font
d'autres regions « Nous essayons de racon
ter la banlieue, sans angehsme maîs sans
noircir le tableau », explique Marie-Pierre
Agnes Rien a voir avec la nostalgie des
photos sepia d'un Cartier Bresson maîs
plutôt une maniere de dire « Fini le touns
me plan-plan tour Eiffel Louvre chateau
de Versailles, direction le "9 3" ' » Depuis
deux ans, un nouveau tourisme se deve
loppe de l'autre côte du peripherique
Jusqu alors, le tourisme hors Paris se
limitait a quèlques rares lieux classiques
comme le château de Versailles, Disney
land, les puces de Saint Ouen ou le Musee
de l'air et de l'espace au Bourget Progressi
vement, d'autres sites moins en vue ont
réussi a percer ce fut le cas du Stade de
France, qui drame quelque 89 DOO curieux
en dehors des jours de match ou la basili
que de Saint Denis et sa necropole royale
qui a vu son nombre de visiteurs augmen
ter de 15 % entre 2009 et 2010
Maîs, plus récemment, c'est le tourisme
alternatif, a la mode berlinoise, qui emer
ge «Des nouveaux touristes» ou «post
touristes», selon l'expression de Mana
Gravan Barbas, professeure de geogra
phie physique a Paris I, qui veulent « don
ner un nouveau sens a leurs voyages et qui
cherchent autant les 'must see" que les
Eléments de recherche : DOUCE BANLIEUE : appellation citée, opération de ballades en Seine-Saint-Denis (93), toutes citations
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Quotidien Paris
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Surface approx. (cm²) : 542
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lieux se référant a une histoire sociale »
Ce n'est pas encore une vague de fond
maîs un vrai frémissement que les elus
locaux regardent attentivement La fre
quentation du site Internet de I office de
tourisme de Saint Ouen aurait double en
un an Plus de 500 balades sont proposées
par le comite departemental du 93
(www tourismegs com), soit quatre fois
plus depuis le lancement de Douce ban
lieue On peut même voir sur certaines
vitrines le macaron du tres branche
« Lonely Planet », qui a fait un encadre sur
ces promenades en banlieue
« C'est un enjeu majeur
pour le territoire,
une affaire d'image et un
facteur d'intégration des
habitants et des salariés »
Francis Dubrac
president de I office de tourisme
de Saint Denis Plaine Commune
« Nous avons de plus en plus de deman
des de visites des cites ou des anciennes usines désaffectées» assure Samia Amrani,
conseillère en sejour a l'office de tounsme
de Saint Denis « Nous voyons se develop
per un tourisme différent, en dehors des
standards et de l'économie marchande,
avec une demande d'authenticité qui n'exis
tait pas jusqu'alors», remarque Daniel
Orantm, directeur du comite departemen
tal du tourisme «Ilyaqumzeans,cetaitun
exil de venir dans le 93 Ce n'est plus le cas
Avec la metropolisation parisienne et le
début de gentrification, la frontière entre
Paris et sa banlieue s'efface lentement»,
explique encore Laurent Clavier profes
seur en BTS tourisme a Epinay sur Seine
Cette poussée - encore modeste - du
tourisme en banlieue est aussi la conséquence de la saturation des sites parisiens
«Le nombre de touristes mira murosexplo
se a tel point que les tour operators hesi
tenta programmer la visite de Paris a cer
tomes périodes», assure Daniel Orantm
qui souligne que le taux d'occupation
moyen des hôtels parisiens atteint 90%
L'hôtellerie s'est donc développée dans la
petite couronne, maîs surtout comme un
delestage du trop plein parisien ou pour
le tourisme d'affaires Les offres d'hôtels
bon marche sont trop peu nombreuses Et
dans son schema touristique, la commu
naute de communes a mis davantage I ac
cent sur la construction d'hôtels trois ou
quatre etoiles que sur l'hébergement en
chambre d'hôtes, pourtant plus adapte a
ce tourisme alternatif, reconnaît une res
pensable de Plaine Commune
Ce sont des initiatives individuelles ou
associatives qui tentent de repondre a la
demande de nuitees Des habitants qui se
mobilisent en reseau ou sur Internet pour
montrer le coin ou ils habitent Le reseau
Accueil Banlieues propose ainsi des cham
bres chez I habitant a prix modeste en
échange d un engagement a passer une
journee sur le territoire Mathieu Glay
man fait cela presque tous les week ends
«Nous voulons toucher des gens qui ont
des a priori négatifs sur les quartierspopu
laires et montrer la diversite des habitats
Leur montrer que, de I autre cote du peri
ph' il ny a pas que des barres et des tours
pourries»,résume t il
II reste cependant encore quèlques
freins pour developper ce tourisme diffe
rent Outre le nombre d'agressions de lou
nstes peu prudents et les equipements
qui manquent, I acces n est pas toujours
aise La communaute d'agglomération tar
de a investir dans la signalisation des sites
et a aider les initiatives associatives « C'est
pourtant un enjeu majeur pour le terntoi
re, une aff aire d'image et unfacteurd'intégration des habitants et des salaries, souh
gne Francis Dubrac, president de l'office
dè tourisme de Saint Denis Plaine Com
mune Lorsqu'on raconte a des habitants
que leur quartier attire aussi les touristes,
c'est une surprise et une fierté »•
SYLVIA ZAPPI
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Eléments de recherche : DOUCE BANLIEUE : appellation citée, opération de ballades en Seine-Saint-Denis (93), toutes citations