090622-Observations UC demande de revision 2008108
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090622-Observations UC demande de revision 2008108
OBSERVATIONS D’UNION DES CONSOMMATEURS DANS LES DEMANDES EN VERTU DE LA PARTIE VII, RECLAMANT LA REVISION ET LA MODIFICATION DE LA DÉCISION DE TÉLÉCOM CRTC 2008-108 6226, rue Saint-Hubert Montréal (Québec) H2S 2M2 Téléphone : 514-521-6820 Sans frais : 1 888 521-6820 Télécopieur : 514-521-0736 C : [email protected] W : www.consommateur.qc.ca/union 22 Juin 2009 1. Dans la demande de révision de la décision Télécom CRTC 2008-108 déposée par The Consumers' Association of Canada, Canada without Poverty the Canadian Association of Internet Providers, Acanac In., Accelerated Connections Inc., Cybersurf Corp., eagle.ca, Execulink Telecom Inc., Managed Network Systems Inc., Skyway West Business Internet Services, Start Communications, TekSavvy Solutions Inc., Vianet Internet Solutions, and Yak Communications Inc., (les requérants), ceux-ci invoquent que le Conseil n'a pas tenu compte de la possible violation de la liberté d'expression des fournisseurs de contenus ainsi que des utilisateurs, du fait du ralentissement de certaines applications Peer-to-Peer (ci-après P2P).1 2. Au paragraphe 176 de la demande de révision, les requérants mentionnent : «Although it is not known exactly how Bell is interfering with P2P traffic streams once such a stream has been positively identified by the DPI equipment in Bell’s network, it is clear that the practices under consideration interfere with both the right of P2P content providers to make their expression and that of the end-customer to transmit or receive the expression. » 3. La compagnie Bell dans son document du 11 juillet 20082 déposé dans le cadre de la partie VII de la Canadian Association of Internet Providers, affirme au paragraphe 115, qu'elle ralentit notamment l'application Vuze qui utilise la technologie Bittorrent : « Although these applications are based on a P2P distribution model, they run completely different signatures from P2P file sharing applications and in fact mostly utilise HTTP protocol for their communications. As for Vuze, also mentioned by CIPPIC, this application uses the BitTorrent protocol and therefore shaping is applied. » (nos soulignés) 4. Toujours au paragraphe 115 du document du 11 juillet 2008, Bell précise que l'inspection approfondie des paquets se limite à l'identification des applications de partage de fichiers de type P2P.3 Pourtant dans le même paragraphe Bell précise qu'elle ralentit l'application Vuze, or cette application permet de visionner le contenu téléchargé tout en continuant à le télécharger. 5. Aux États-Unis l'entreprise de câblodistribution Cox4, tout comme Bell, a décidé de ralentir les applications qui ne sont pas « time-sensitive », et a identifié les applications P2P comme « non time-sensitive ». Dans les applications dites « time-sensitive », nous trouvons notamment les applications dites de « streaming » (web-based audio and video programs). De façon similaire, Bell a déclaré dans le document du 11 juillet 2008, que son ralentissement ne s'appliquait pas au « streaming »5, mais qu’il s'applique pourtant à 1 Demande de révision de la décision télécom CRTC 2008-108 par les requérants, au paragraphe 175 : http://www.crtc.gc.ca/partvii/fra/2009/8662/p8_200907727.htm (dernière visite le 16 juin 2009) 2 Réponse de Bell Canada à la demande de l'Association Canadienne des fournisseurs de services Internet du 11 juillet 2008 : http://www.crtc.gc.ca/PartVII/fra/2008/8622/c51_200805153.htm (dernière visite le 16 juin 2009) 3 Ibid., «The DPI shaping rules deployed by Bell Canada is limited to identified P2P file sharing applications. » 4 Politique de gestion du réseau de l'entreprise Cox disponible à l'adresse: http://www.cox.com/policy/congestionmanagement/ (dernière visite le 16 juin 2009) 5 Supra, note 2 paragraphe 22 : «Furthermore, the traffic shaping that Bell applies is limited to P2P file sharing applications during peak periods, and does not impact the speed for other applications such as Vuze. 6. Cependant, suite à la découverte des pratiques de l'entreprise Cox, les créateurs de Vuze ont réagi sur le Blogue de Vuze, où nous lisons : «On the list of “time-sensitive” activities entitled to higher priority is “streaming video and audio.” Apparently, Cox doesn’t know or perhaps doesn’t care that we offer a progressive download (“virtual streaming”) option for much of our content. Like other streaming experiences, you push “Play” and within seconds the content begins playing for the user. That’s the experience our users expect. So it would appear that under the new Cox regime YouTube and Hulu (and of course Cox services) are high priority, while Vuze’s similar services are relegated to the back of the bus.»6 (nos soulignés) 7. Tout comme Cox, Bell semble ignorer (ou ne pas se soucier du fait) que l'application Vuze permet à ses utilisateurs de visionner pendant le téléchargement le contenu téléchargé (streaming). En se livrant à de tels agissements soit le ralentissement d'une application de façon à rendre une de ses fonctionnalités inopérante, Bell viole la liberté d'expression non seulement des créateurs de contenus, mais également celle des utilisateurs. Vuze: 8. Dans le cadre d'une demande de la compagnie Vuze pour une intervention de la Federal Communications Commission (ci-après FCC) afin de réglementer les pratiques de gestion des réseaux des opérateurs de réseau haute vitesse7, les représentants de la compagnie Vuze ont mentionné : « Vuze’s technology and user base place it in an optimal position to offer an extensive and diverse content line-up which maximizes consumer choice from a wide variety of sources. In a few short months, Vuze has attracted over 100 content partners, including A&E, BBC, CBC, G4 TV, Geneon, The History Channel, Ministry of Sound TV, National Geographic, PBS, Showtime, Starz Media, The Poker Channel, TV Guide Channel, and many more. Popular content categories include science fiction, extreme sports, documentaries, music videos and anime, and range from short clips to full length features. In addition to offering licensed content to its users, Vuze web browsing or video streaming such that simultaneous use of other non P2P file sharing applications is not affected.»; Également parapgraphe 38: «To illustrate, various web applications or types of traffic can essentially be classified into 3 main categories: Real-Time, Time-Sensitive and Non TimeSensitive. Real-time applications such as VoIP, live video conferencing and interactive/online gaming must be delivered with minimal latency, jitter or loss for a good user experience. For Time-Sensitive applications, such as HTTP video streaming (e.g., YouTube), streaming audio, web browsing or timesensitive P2P applications like Joost, minimal packet loss or minimal jitter will not overly impact the end-user experience, however, the end-user is expecting a timely and consistent response. 6 Voir le Blogue de Vuze à l'adresse: http://blog.vuze.com/ (dernière visite le 16 juin 2009) 7 Petition to Establish Rules Governing Network Management Practices by Broadband Network Operators, http://www.publicknowledge.org/pdf/vuze-petition-20071114.pdf (dernière visite le 16 juin 2009) also has built an open platform, which enables independent content producers — such as independent producers of films and documentaries and other small publishers — to distribute their content to a global audience in a simple and cost effective fashion, and further enables them to monetize their content in a way that was not possible before. Content owners of all sizes can offer their content to viewers for free, for free with ad support, or at a price they choose. » (nos soulignés) 9. Vuze permet donc la diffusion de contenus de radiodiffusion issus d'entreprises de radiodiffusion traditionnelles, mais permet également à toute personne de diffuser du contenu au moyen de l'application. Liberté d'expression : 10. L'article 2(b) de la Charte canadienne des droits et libertés8 garantit à tous les Canadiens la liberté d'expression : «Chacun a les libertés fondamentales suivantes : (...) b) liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication; (...)» 11. la décision Re Ontario Film & Video Appreciation Society and Ontario Board of Censors9 précise que toute forme d'expression est également protégée par la Charte : « It is clear to us that all forms of expression, whether they be oral, written, pictorial, sculpture, music, dance or film, are equally protected by Charter. »10 12. Par la suite la décision R.v. Videoflicks11 de la Cour d'appel de l'Ontario a élargi la conception de la liberté d'expression donnée dans la décision Re Ontario Film : «I would add that this applies to all phases of expression from maker or originator through supplier, distributor, retailer, renter or exhibitor to receiver, whether as a listener or a viewer »12. 13. Selon cette conception de la liberté d'expression, les échanges poste-à-poste (P2P) participent à la liberté d'expression dans la mesure où ils permettent de diffuser certains contenus et permettent au public d'y accéder, constituant ainsi un mode d’exercice de la liberté d'expression. 14. Nous pouvons également lire dans la décision R. v. Videoflicks: « This view of the ambit of s. 2(b) of the Charter is supported by the more fully-defined but comparable art. 19(2) of the Covenant on Civil and Political Rights13: Everyone shall have the right to freedom of expression; this right shall include freedom to seek, receive and 8 Charte canadienne des droits et libertés. Disponible en ligne au : http://laws.justice.gc.ca/fr/charte/1.html (dernière visite le 16 juin 2009) 9 Re Ontario Film & Video Appreciation society and Ontario Board of Censors (1983) 147 D.L.R. (3d) 10 Ibid., p.65 11 R. v. Videoflicks Ltd., (1984), 48 O.R. (2d) 395 • (1984), 15 C.C.C. (3d) 353 • (1984), 5 O.A.C. 1 12 Ibid. 13 Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Texte disponible en ligne au : http://www.unhchr.ch/french/html/menu3/b/a_ccpr_fr.htm (dernière visite le 16 juin 2009) impart information and ideas of all kinds, regardless of frontiers, either orally, in writing or in print, in the form of art, or through any other media of his choice. » (nos soulignés) 15. La Charte peut être interprétée à la lumière de certains traités internationaux signés par le Canada. La Cour d'appel fédérale l'a souligné dans l'affaire Rahaman14: « Il ne fait aucun doute aujourd'hui que les normes internationales font partie du contexte dans lequel les lois nationales doivent être interprétées (...) », et surtout dans la décision Suresh15: « De même, les principes de justice fondamentale visés à l’art. 7 de la Charte ainsi que les limites à ces droits qui peuvent être justifiées au regard de l’article premier de la Charte ne sauraient être examinés indépendamment des normes internationales qu’ils reflètent. Pour bien comprendre la Loi et la Charte, il faut examiner le contexte international. » 16. La liberté d'expression doit donc être comprise de façon extrêmement large, et la possibilité pour les usagers et les producteurs de contenu d'utiliser des applications de type P2P pour exprimer leurs idées, ou diffuser leurs créations ne doit en aucun cas être limitée. Le fait qu'une entreprise s'arroge le droit de ralentir une application et impose de ce fait une limite à la liberté d'expression est injustifiable. 17. Le juge en chef McLachlin, dans la décision R. c. Sharpe a d'ailleurs mentionné à propos de la liberté d'expression : «Au nombre des droits les plus fondamentaux que possèdent les Canadiens figure la liberté d’expression. Celle-ci rend possibles notre liberté, notre créativité ainsi que notre démocratie, et ce, en protégeant non seulement l’expression qui est « bonne » et populaire, mais aussi celle qui est impopulaire, voire offensante. Le droit à la liberté d’expression repose sur la conviction que la libre circulation des idées et des images est la meilleure voie vers la vérité, l’épanouissement personnel et la coexistence pacifique dans une société hétérogène composée de personnes dont les croyances divergent et s’opposent. » 16 (nos soulignés) 18. Les informations ou contenus qui sont transmis grâce aux applications P2P doivent circuler librement, sans interférence ni ralentissement. Applicabilité de la Charte au Conseil: 19. Le Conseil ne peut porter atteinte à un droit protégé par la Charte, c'est ce que mentionne l’arrêt Genex, qui précise : «En l'absence d'un pouvoir expressément ou par implication nécessaire conféré par la loi de porter atteinte à un droit protégé, je crois qu'il n'est pas contesté qu'une décision discrétionnaire du CRTC ne saurait être contraire à la Charte.» 17 20. Cette décision s'inscrit dans la continuité de l'arrêt Slaight, de la Cour suprême, qui 14 15 16 17 Rahaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) [2002] 3 C.F. 537, par.35. Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l'Immigration) [2002] 1 R.C.S. 3, par. 59. R. c. Sharpe [2001] 1 R.C.S. 45, par. 21 Genex Communications Inc. c. Canada (Procureur Général) (2005), 260 D.L.R. (4th) 45, par. 55. mentionne: «L'arbitre tire en effet tous ses pouvoirs de la loi et il ne peut faire plus que ce que la loi lui permet. C'est la disposition législative attributrice de discrétion qui restreint le droit ou la liberté puisque c'est elle qui autorise le détenteur de ladite discrétion à rendre une ordonnance ayant pour effet d'apporter des limites aux droits et libertés énoncés dans la Charte. L'ordonnance prononcée par l'arbitre n'est que l'exercice de la discrétion qui lui est accordée par la Loi.» 18 21. Le Conseil tire son pouvoir discrétionnaire, en l'espèce, des articles 24 et 60 de la Loi sur les télécommunications (1993,ch 38). Ces articles disposent: • • «24- L’offre et la fourniture des services de télécommunication par l’entreprise canadienne sont assujetties aux conditions fixées par le Conseil ou contenues dans une tarification approuvée par celui-ci. 60- Le Conseil peut soit faire droit à une demande de réparation, en tout ou en partie, soit accorder, en plus ou à la place de celle qui est demandée, la réparation qui lui semble justifiée, l’effet étant alors le même que si celle-ci avait fait l’objet de la demande. » 22. Le Conseil a mentionné dans la décision télécom CRTC 2008-108: «À la lumière de ce qui précède et selon le dossier de la présente instance, le Conseil estime que l'application par Bell Canada de mesures de lissage du trafic à son SAP est permise conformément au paragraphe 8.3 de ses Modalités de service. Par conséquent, dans les circonstances, le Conseil conclut que l'application par Bell Canada de mesures de lissage du trafic au SAP ne contrevient pas au tarif SAP, en vertu de l'article 24 et du paragraphe 25(1) de la Loi. » 23. Le Conseil permet donc à Bell de continuer de ralentir les applications P2P, y compris l'application Vuze. Ce faisant, le Conseil, en approuvant les modalités de services comprenant de telles pratiques, autorise la violation d'un droit garanti par la Charte soit la liberté d'expression des personnes. 24. Si le Conseil entend restreindre certains droits et libertés contenus dans la Charte canadienne des droits et libertés, ces restrictions doivent respecter les conditions posées à l'article 1 de la Charte canadienne des droits et libertés qui précise: «La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. » 25. Cette approche a d'ailleurs été confirmée par la jurisprudence avec l'arrêt Slaight19, et 18 Slaight Communications Inc. c. Davidson [1989] 1 R.C.S. 1038, p.50 19 Supra, note 20, p.51 :« Pour déterminer si cette restriction est contenue dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique, il faut donc évaluer si l'utilisation qui fut faite de la discrétion a pour effet de contenir la restriction dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. Si la réponse est positive nous devons conclure que l'arbitre avait le pouvoir de rendre également récemment dans l'arrêt Multani : « 42. Comme je l’ai indiqué plus tôt, la décision du conseil des commissaires découle de l’exercice par celui-ci du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l’art. 12 de la Loi sur l’instruction publique. La décision prohibant le port du kirpan à l’école constitue donc une restriction par une règle de droit au sens de l’article premier de la Charte canadienne et, de ce fait, doit être justifiée conformément à cette disposition : 1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. 43.Il incombe aux intimés de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la violation est raisonnable et que sa justification peut se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. Pour ce faire, elle doit satisfaire à deux exigences. D’abord, l’objectif législatif poursuivi doit être suffisamment important pour justifier la restriction d’un droit constitutionnel. Ensuite, les moyens choisis par l’autorité étatique doivent être proportionnels à l’objectif en question : Oakes; R. c. Edwards Books and Art Ltd., [1986] 2 R.C.S. 713.» 20 26. On note, selon la jurisprudence, qu’il appartient à Bell de prouver que la violation est raisonnable et de démontrer que celle-ci se justifie dans une société libre et démocratique. Or le Conseil n'a pas jugé bon de statuer sur cette allégation de violation d'un droit protégé par la Charte, alors que la British Columbia Civil Liberties Association a soulevé la question dans son intervention du 12 juin 200821. 27. La compagnie Bell doit respecter les droits fondamentaux garantis par la Charte canadienne des droits et libertés. La Cour suprême, dans la décision Eldridge, a statué : «Il semble donc évident qu’un organisme privé peut être assujetti à la Charte à l’égard de certains actes de nature intrinsèquement gouvernementale. (...) Toutefois, il ressort clairement de l’arrêt McKinney que la Charte s’applique aux entités privées, dans la une telle ordonnance puisqu'il était autorisé à rendre une ordonnance restreignant un droit ou une liberté énoncés à la Charte dans des limites qui soient raisonnables et justifiables. Si la réponse est au contraire négative il faut alors conclure que l'arbitre a excédé sa juridiction puisque le Parlement ne lui a pas délégué le pouvoir de violer la Charte. Ayant excédé sa juridiction sa décision est donc nulle et sans effet. » 20 Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys [2006] 1 R.C.S. 256, par.42 et 43. 21 Observations de la British Columbia Civil Liberties Association, paragraphe 24: «Network management represents a serious threat to Canadians’ constitutionally protected right to expressive freedom, which encompasses both the right to convey and receive expressive content. Network management practices impair the free speech rights of ordinary citizens and likely engage the very core values of free speech protections in having particularly deleterious effects on demographics such as political organizations, independent media and citizen journalists. The effect of network management, regardless of its intentions, is to limit the content that users can access or provide on the internet. The BCCLA is gravely concerned by this practice and urges the CRTC to issue a direction that this practice cease and desist. » http://www.crtc.gc.ca/PartVII/fra/2008/8622/c51_200805153.htm (dernière visite le 17 juin 2009) mesure où celles-ci agissent en vue de l’exécution d’une politique ou d’un programme déterminé du gouvernement. Dans de telles circonstances, même si c’est un acteur privé qui exécute effectivement le programme, le gouvernement en conserve néanmoins la responsabilité. La justification de ce principe est facile à discerner. Tout comme il est interdit aux gouvernements de se soustraire à l’examen fondé sur la Charte en concluant des contrats commerciaux ou d’autres accords «privés», ils ne devraient pas être autorisés à échapper à leurs obligations constitutionnelles en déléguant la mise en œuvre de leurs politiques et programmes à des entités privées. (...) » 22 28. Ainsi en l'espèce Bell a décidé de ralentir certaines applications P2P2, et le Conseil a autorisé Bell à agir de la sorte. Le Conseil ne peut autoriser des actes qui auraient pour effet de violer les libertés fondamentales reconnues par la Charte et les juger légitimes. Défaut de base légale et insuffisance de motifs: 29. Plusieurs parties23 ont soulevé au cours de l'instance que le Conseil ne pouvait permettre à la compagnie Bell de ralentir certaines applications, parce que cela contreviendrait à certains objectifs de la politique Canadienne de télécommunication. Or, il revient au Conseil de veiller à la mise en œuvre des objectifs de la politique canadienne de télécommunication, comme le précise l'article 47 de la Loi sur les télécommunications : « Le Conseil doit, en se conformant aux décrets que lui adresse le gouverneur en conseil au titre de l’article 8 ou aux normes prescrites par arrêté du ministre au titre de l’article 15, exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent la présente loi et toute loi spéciale de manière à réaliser les objectifs de la politique canadienne de télécommunication et à assurer la conformité des services et tarifs des entreprises canadiennes avec les dispositions de l’article 27. » (nos soulignés) 30. Le Conseil a déjà affirmé dans des décisions précédentes, comme la décision de télécom CRTC 2006-9, Utilisation des fonds des comptes de report, au paragraphe 21, qu'il devait exercer ses pouvoirs de façon à mettre en œuvre les objectifs de la politique canadienne de télécommunication : « Le Conseil fait remarquer que l'article 7 de la Loi énonce les objectifs de la politique canadienne de télécommunication, et que dans l'instance en cause, comme dans toutes les autres, il se doit d'exercer ses pouvoirs en vue de mettre en œuvre ces objectifs.»24 (nos soulignés) Ou bien encore la Décision de télécom CRTC 2008-116, Cadre relatif à l'abstention de réglementation concernant les nouveaux services de gros non essentiels, au paragraphe 21: «Le Conseil estime que 22 Eldridge c. Colombie-Britannique (Procureur général) [1997] 3 R.C.S. 624 23 Voir notamment la Demande datée du 3 avril 2008 de l'Association Canadienne des fournisseurs de services Internet aux paragraphes 82 et 95; Observations d'Union des consommateurs du 24 avril 2008 aux paragraphes 5, 33, 39, 41, 42, 47; Observations de Canadian Internet Policy and Public Interest Clinic (CIPPIC) du 21 mai 2008 à la page 3; Observations de Skype Communications s.a.r.l. Du 11 juin 2008 au paragraphe 24; http://www.crtc.gc.ca/PartVII/fra/2008/8622/c51_200805153.htm (dernière visite le 18 juin 2009) 24 Décision de télécom CRTC 2006-9, Utilisation des fonds des comptes de report, http://www.crtc.gc.ca/fra/archive/2006/dt2006-9.htm (dernière visite le 19 juin 2009) les conclusions qu'il tire dans la présente décision contribueront à l'atteinte des objectifs de la politique de télécommunication énoncés aux alinéas 7b), c), et f) de la Loi (...) », aussi la Décision de télécom CRTC 2008-117, Demande de Cybersurf Corp. Concernant des exigences relatives à une vitesse équivalente à l'égard de services de gros, au paragraphe 20 : «En ce qui concerne le sous-alinéa 1b)(i) des instructions, le Conseil conclut que l'établissement d'une exigence relative à une vitesse équivalente viserait les objectifs énoncées aux alinéas 7b), c), f) et h) de la Loi sur les télécommunications.»25 31. Dans d'autres décisions, le Conseil a confirmé que sa décision était conforme aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication, et ainsi ne violait pas les dispositions de l'article 47 de la Loi sur les télécommunications, par exemple la Décision de télécom CRTC 2008-102, Demande de révision et de modification d'une partie de la décision de télécom 2008-1 concernant l'utilisation des fonds des comptes de report pour étendre les services à large bande, au paragraphe 15: «À la lumière de ce qui précède, le Conseil juge que sa conclusion relative à l'exigence d'accorder des rabais n'est pas contraire aux objectifs en matière de politique de la Loi et, par conséquent, que le Conseil ne contrevient pas à l'article 47 de la Loi.»26 32. Même la Cour d'appel fédérale en plusieurs occasions à rappeler l'exigence de l'article 47 de la Loi sur les télécommunications. Notamment dans la décision Allstream c. Bell: « Ajoutons qu'aux termes de l'article 47 de la Loi, le Conseil doit exercer les pouvoirs et fonctions que lui confère la loi de manière à réaliser les objectifs de la politique canadienne de télécommunication (...)»27, ou encore dans la décision Bell Canada c. Canada (CRTC): « L’article 47 de la Loi sur les télécommunications prescrit expressément au CRTC de prendre en considération, entre autres, les objectifs de la politique canadienne de télécommunication énumérés à l’article 7 de la même loi. Il s’ensuit à mon avis que le CRTC a le droit, aux fins des décisions de tarification qu’il rend sous le régime de la Loi sur les télécommunications, de prendre en considération tous les objectifs de ladite politique énoncés à l’article 7.» 28 33. Or, comme nous l'avons précisé, le ralentissement par Bell de certaines applications viole la liberté d'expression des Canadiens et des Canadiennes et est également contraire à l'objectif 7 a) de la Loi sur les télécommunications. Comment, sur ces bases, le Conseil peut-il justifier que les mesures mises en place par Bell, à savoir le ralentissement des applications P2P peuvent être avalisées? 34. Le ralentissement des applications P2P est également contraire à l'objectif 7 f) de la politique canadienne de télécommunication ; plutôt que de favoriser l’innovation, le ralentissement d’applications ne peut avoir pour effet que de freiner toute innovation en ce domaine. 25 Décision de télécom CRTC 2008-117, Demande de Cybersurf Corp. Concernant des exigences relatives à une vitesse équivalente à l'égard de services de gros, http://www.crtc.gc.ca/fra/archive/2008/dt2008-117.htm (dernière visite le 19 juin 2009) 26 Décision de télécom CRTC 2008-102, Demande de révision et de modification d'une partie de la décision de télécom 2008-1 concernant l'utilisation des fonds des comptes de report pour étendre les services à large bande, http://www.crtc.gc.ca/fra/archive/2008/dt2008-102.htm (dernière visite le 19 juin 2009) 27 Allstream Corp. c. Bell Canada, 2005 CAF 247 (CanLII), par. 29. 28 Bell Canada c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), 2008 CAF 91 (CanLII), par.46. 35. Le Conseil, dans la décision télécom CRTC 2008-108, mentionne au paragraphe 33 : «Le Conseil fait remarquer l'observation de Bell Canada selon laquelle à l'heure actuelle, l'approche adoptée en matière de lissage du trafic constitue la seule option pratique, tant sur le plan technologique qu'économique, visant à résorber la congestion sur son réseau LAN. » (nos soulignés) 36. Il appert que cette assertion est erronée. 37. En effet, plusieurs parties ont mentionné d'autres solutions existantes, technologiques ou pratiques, que Bell aurait pu choisir d’utiliser en lieu et place de l’option qu’elle a choisi. 38. Au paragraphe 20 de ses observations du 15 avril 2008, Bell déclare: «Last fall, before the Company began deployment of its Internet traffic management solution to ease network congestion during peak usage periods, 5% of users were generating 60% of total traffic on the network and 60% of that traffic was P2P traffic, including BitTorrent. » Bell aurait très bien pu appliquer des mesures spécifiques pour les 5% d'utilisateurs qui, selon Bell, génèrent 60% de son trafic sur son réseau. 39. C’est cette approche mesurée et ciblée qui a été adoptée aux États-Unis par l'entreprise Comcast, qui était sous le coup d'une enquête de la Federal Communications Commissions pour avoir, comme le fait Bell, bloqué les applications P2P29, faisant ainsi la preuve qu’il existe d’autres options pratiques, tant sur le plan technologique qu'économique, visant à résorber la congestion d’un réseau LAN, qui ont pour avantage de ne restreindre l’accès que dans la mesure du problème allégué. 40. Comcast durant les périodes de congestion ralentit le trafic Internet des gros utilisateurs avant celui des autres utilisateurs, par le biais d’un système qui ne s'applique qu'aux parties du réseau réellement congestionné et non à l’ensemble du réseau et à tous les utilisateurs.30 Ces pratiques, bien qu'encore discutables, nous semblent à tout le moins préférables, ne serait-ce que parce qu’elles sont moins discriminatoires, que celles de Bell, qui ralentit l’accès de façon systématique, non conditionnelle à l’état réel de congestion sur le réseau. Il est tout à fait inadmissible, si les pratiques de Bell visent en réalité la gestion du réseau, que l’accès de certains utilisateurs d'application P2P soit ralenti, et ce, même si le réseau ou la partie du réseau qu’ils utilisent n'est pas congestionnée au moment où Bell impose ce ralentissement. 41. L'approche de Comcast a d'ailleurs également été soulignée dans le cadre de l'avis public 2008-19, Examen des pratiques de gestion du trafic Internet des fournisseurs de services Internet, dans les observations de CIPPIC du 23 février 2009, dans le rapport de M. Bill St-Arnaud: « The Comcast approach is application agnostic, applies to all users equally, based on the amount of traffic they are generating at any given instance, does not target lower tier subscribers, and only operates when there is actual congestion 29 FCC News, Commission orders Comcast to end discriminatory network management practices, http://hraunfoss.fcc.gov/edocs_public/attachmatch/DOC-284286A1.pdf (dernière visite le 19 juin 2009) 30 Pour des informations sur les pratiques de Comcast, Nate Anderson and Eric Bangeman, Comcast loses P2P religion, goes agnostic on throttling, Ars Technica, http://arstechnica.com/old/content/2008/09/comcast-loses-p2p-religion-goes-agnostic-on-throttling.ars (dernière visite le 19 juin 2009), surtout lire le rapport de Comcast à la FCC, http://www.eff.org/files/Complete%20Comcast%20NM%20Filing%20--%20DateStamped%209%2019%202008.pdf (dernière visite le 19 juin 2009) on a given link.»31 42. D'autres solutions ont également été avancées, notamment dans le rapport du Professeur Reed pour la CIPPIC (au par. 31, en particulier) qui a été soumis au Conseil toujours dans le cadre de l'avis public 2008-19, le 23 février 200932, ou encore dans celui de M. Bill St-Arnaud (au par. 48)33, qui mentionne notamment la technologie P4P, qu'Union des consommateurs avait déjà mentionnée dans ses observations du 24 avril 2008 dans le cadre de la requête de la Canadian Association of Internet Providers du 3 avril 2008 au paragraphe 3234. Le Professeur Mark Coates, dans son rapport soumis au Conseil dans le cadre de l'avis public 2008-19 avec les observations d'Union des consommateurs du 23 février 2009, soumet lui aussi différentes solutions pour la gestion du réseau (aux par. 15 et 24)35. 43. Nous notons donc que nombre de solutions existent à l'heure actuelle et existaient déjà au moment de la prise de décision du Conseil en novembre 2008 ; ainsi la justification du Conseil à l'effet que le lissage du trafic est la seule option pratique est totalement erronée en fait et en droit. 44. La décision du Conseil, qui a fait abstraction de la preuve d’experts qui lui a été soumise, ne doit pas être maintenue. 45. La décision du Conseil, qui autorise le ralentissement des applications P2P, va à l’encontre des objectifs de la Loi et de la politique canadienne des télécommunications puisqu’elle nie aux Canadiens et Canadiennes l’accès à des services de télécommunication de qualité. 31 Observations de CIPPIC du 23 février 2009, Rapport de M. Bill St-Arnaud, au §48, http://www.crtc.gc.ca/PartVII/fra/2008/8646/c12_200815400.htm (dernière visite le 19 juin 2009) 32 Ibid. 33 Ibid. 34 Observations d'Union des consommateurs du 24 avril 2008, http://www.crtc.gc.ca/PartVII/fra/2008/8622/c51_200805153.htm (dernière visite le 19 juin 2009) 35 Observations d'Union des consommateurs du 23 février 2009, http://www.crtc.gc.ca/PartVII/fra/2008/8646/c12_200815400.htm (dernière visite le 19 juin 2009) Conclusion: • • • • • • • • Attendu que Bell empêche les Canadiens et Canadiennes d'exercer pleinement leur liberté d'expression; Attendu que le Conseil a autorisé Bell à ralentir certaines applications, qui sont les moyens d'exercice de la liberté d’expression ; Attendu que le ralentissement par Bell de certaines applications a rendu caduques certaines de leurs fonctionnalités ; Attendu que le Conseil ne pouvait rendre une décision qui autorise la violation d’un droit fondamental garanti par la Charte Canadienne des droits et libertés; Attendu que le Conseil a fait défaut de se prononcer sur cet aspect du dossier ; Attendu que l’exercice de ses pouvoirs par le Conseil contrevient aux modalités de l'article 47 de la Loi sur les télécommunications, en ce que les actes autorisés sont contraires aux objectifs de la Loi et de la politique canadienne des télécommunications; Attendu que le Conseil en rendant sa décision télécom CRTC 2008-108 a ignoré les objectifs de la politique canadienne de télécommunication de l'article 7 de la Loi sur les télécommunications, notamment les alinéas a), b), g) et h); Attendu que le Conseil a ignoré les preuves soumises qui établissaient que, contrairement à ce qu’alléguait Bell, de nombreuses solutions autres que celle du ralentissement d'applications P2P pouvaient être mises en place; Le Conseil doit: • • • infirmer la décision télécom CRTC 2008-108 qui autorisait Bell à ralentir les applications P2P; veiller à ce que la nouvelle décision qui sera rendue soit conforme aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication ; ordonner à Bell de cesser toute pratique, notamment en matière de gestion du trafic Internet, qui met en péril l'exercice par les Canadiens et Canadiennes des droits fondamentaux qui leur sont reconnus par la Charte; ***Fin de document***