Le Pin Maritime - Institut KLORANE
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Le Pin Maritime - Institut KLORANE
Professeur Isabelle Fourasté Faculté des Sciences Pharmaceutiques de Toulouse LE PIN MARITIME ▲ Pinus pinaster Ait. Pinaceae Fondation d’Entreprise pour la Protection et la Bonne Utilisation du Patrimoine Végétal - LE PIN MARITIME Pinus pinaster Aiton (Pinaceae) riginaire de la région méditerranéenne, le Pin maritime subit durant l’Antiquité une vaste campagne de déboisement. O Introduit dans les Landes au début du XIXe siècle par l’ingénieur Brémontier dans le but de stabiliser les dunes de sable, sa propagation a fait de cette région déshéritée une zone prospère par suite de l’exploitation forestière pour l’extraction de la térébenthine française. De nos jours, le Pin maritime croît spontanément dans le sud de la France, le SudOuest de l’Europe (Espagne, Portugal, Italie et Corse) ainsi que sur la majeure partie du littoral méditerranéen (Grèce, Nord-Ouest africain), préférant les sols siliceux, acides et pauvres. Introduit en Grande-Bretagne, en Belgique et dans diverses régions françaises, on cultive massivement le Pin maritime pour son bois, mais également comme brise-vent et pour fixer les sols sablonneux. Bien que malmenée par les grands incendies du siècle dernier, cette espèce s’est très largement propagée grâce à de vastes campagnes de reforestation mais aussi par sa propre régénération. Le Pin maritime constitue la quasi totalité des 900 000 hectares de la forêt des Landes et couvre actuellement plus de 4 millions d’hectares dans le Sud-Ouest de l’Europe (1, 2, 3, 14, 16, 17). Le Pin maritime est un arbre monoïque, à croissance initiale rapide et à port droit. Il peut atteindre une hauteur de 40 m et sa durée de vie oscille entre 40 et 50 ans. Son tronc est recouvert d’une écorce épaisse, rugueuse, fortement crevassée, de couleur brun grenat ou grisâtre. Les rameaux, verticillés et étalés, forment au sommet de l’arbre un gobelet pyramidal s’arrondissant à maturité. Ils portent de gros bourgeons ovoïdes et non résineux. Les feuilles, d’un vert intense, sont persistantes et se présentent en très longues aiguilles incurvées (10 à 27 cm), rigides et finement pointues. Elles sont groupées par deux et entourées à leur base par une fine gaine membraneuse et écailleuse. Vers Avril-Mai, lorsqu’il est suffisamment mature (environ 15 ans), le Pin maritime commence à fructifier. Il produit des chatons jaunâtres de 2 cm environ et des inflorescences femelles rouges, de 3 à 8 cm, isolées ou bien groupées par deux. Après fécondation, les cônes fructifères appelés « pignes de pin » ou « pommes de pin », oblongs, subsessiles et pendants, grossissent, se lignifient et prennent une couleur brun roux luisant. Les écailles présentent des écussons pyramidaux très saillants. Elles se disjoignent à maturité pour libérer les graines munies d’une longue aile latérale (3, 4, 14, 17). Pinus pinaster Aiton (également Pinus maritima Lam.) provient du latin Pinus, pin, lequel se rapproche du mot celtique pen, tête et de pinaster signifiant pin sauvage. Le Pin maritime est encore communément appelé Pin des Landes ou Pin de Bordeaux. Ce conifère est essentiellement exploité à des fins utilitaires (reforestation, stabilisation de sols sablonneux, industries du bois et du papier, industries de peinture et de vernis). Cependant, l’écorce, les rameaux, les bourgeons et les aiguilles de l’arbre sont aussi employés dans des préparations pharmaceutiques. L’oléorésine (ou térébenthine dite de Bordeaux) issue du gemmage, ainsi que son dérivé de distillation, l’essence de térébenthine, possèdent des propriétés physiologiques au niveau des voies d’élimination des systèmes respiratoire et urinaire. La colophane et la poix noire, dénuées de telle activité, entrent quant à elles uniquement dans la composition de pansements vésicants et pommades vétérinaires. Il est important de ne pas confondre l’huile essentielle de térébenthine ou essence de térébenthine, distillée à partir de l’oléorésine et l’huile essentielle de Pin obtenue par hydrodistillation des aiguilles et des bourgeons de Pin (1, 4, 5, 8, 15, 17, 18). - COMPOSITION CHIMIQUE - ■ Principaux constituants chimiques contenus dans les aiguilles et les bourgeons de Pinus pinaster Ait. (Pinaceae). L’huile essentielle des aiguilles de Pin maritime contient principalement des monoterpènes et des sesquiterpènes. 1. Carbures monoterpéniques (5, 6, 10, 13) L’ α-pinène, molécule caractéristique du genre et le β-pinène. Ces deux composés ne sont spécifiques ni de la drogue, ni de l’espèce. α-pinène (irritant) β-pinène Ont été également isolés des sesquiterpènes acycliques. β-myrcène (irritant) trans-β-ocimène Ces deux derniers composés joueraient un rôle transitoire dans la biosynthèse des monoterpènes cycliques décrits précédemment. 2. Sesquiterpènes (6, 9, 10, 13, 19) 64.6% Parmi les sesquiterpènes, on a identifié trois molécules : le germacrène D, le β-caryophyllène (composé majoritaire avec 22.2%) et le trans-β-farnésène (hydrocarbure sesquiterpénique acyclique rare dans la nature). germacrène D β-caryophyllène trans-β-farnésène Les aiguilles séchées contiennent également 0.12% d’acide sabinique et 0.17% d’acide junipérique (11). 3. Diterpènes (21) Le 7,13-abiétadiène et le 8,11,13-abiétatriène sont deux hydrocarbures diterpéniques tricycliques récemment identifiés (1998) comme de nouvelles substances à caractère insecticide. 4. Autres composés présents dans les aiguilles (5, 7, 11, 14) - Acides résiniques - Acide shikimique (0.15% dans les jeunes aiguilles) - Acide ascorbique - Pinitol, sequoyitol - Bornéol, esters odorants dont l’acétate de (-)-bornyle - Quercétine, kaempférol et leurs hétérosides - Leucoanthocyanes - DONNÉES PHARMACOLOGIQUES - a grande majorité des travaux réalisés sur le Pin maritime porte sur les divers extraits recueillis à partir de l’écorce et de la résine de l’arbre. Ce n’est que très récemment que l’huile essentielle obtenue à partir des aiguilles et des bourgeons de Pin a fait l’objet d’études phytochimiques plus avancées. L ■ ACTIVITÉ INSECTICIDE (21) L’extrait hexanique du feuillage de Pinus pinaster présente une activité insecticide. Deux hydrocarbures diterpéniques tricycliques, le 7,13-abiétadiène et le 8,11,13-abiétatriène, ont été isolés à partir cet extrait. ■ ACTIVITÉ BACTÉRICIDE (12) L’huile essentielle extraite de Pinus pinaster présente une activité bactéricide testée sur 21 souches de bactéries, ainsi qu’une activité antiseptique marquée en comparaison à celle exercée par la gentamicine, la tétracycline ou encore le chloramphénicol. ■ ACTIONS ANTI-ULCÉREUSE ET CICATRISANTE (4) En usage interne, les aiguilles du Pin maritime sembleraient avoir des propriétés anti-ulcéreuses. En usage externe, on leur attribuerait une action cicatrisante. - USAGES TRADITIONNELS ET COURANTS ■ USAGES TRADITIONNELS (4, 5, 8) Les bourgeons étaient traditionnellement préparés en décoction pour l’usage pectoral, les affections des reins et de la vessie. On attribue aux bourgeons de Pin, maritime ou autre, des propriétés antirhumatismales, diurétiques, antiscorbutiques, sudorifiques, bactéricides et pectorales. En médecine traditionnelle tunisienne et chez les anciens méditerranéens, les aiguilles de Pin étaient employées comme antiulcéreux en usage interne, mais également pour leurs vertus fortifiantes (sous forme de bains) et cicatrisantes, en usage externe. L’huile essentielle, obtenue à partir d’aiguilles et de bourgeons frais de Pin maritime, est principalement utilisée comme assainissant atmosphérique dans des diffuseurs d’ambiance. Elle est réputée pour ses propriétés balsamiques, mais aussi pour son action stimulante, désinfectante et antirhumatismale. ■ INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES (5, 8) La drogue est généralement utilisée sous forme d’infusions, de décoctions, en sirop ou bien macérée dans du vin ou de la bière. En usage externe, l’huile essentielle est appliquée en onction locale sur le thorax et les articulations arthrosiques. En usage interne, en aérosol dans du miel, on l’utilise pour les infections catarrhales respiratoires (il est à noter une action synergique avec le Pin sylvestre). L’huile essentielle est également employée en pharmacie, dans la formulation de diverses préparations pour inhalation. ■ EFFETS INDÉSIRABLES, CONTRE-INDICATIONS Aucun effet indésirable n’est à ce jour signalé dans la littérature. Toutefois, l’huile essentielle extraite à partir de l’oléorésine est reconnue comme ayant des propriétés irritante, rubéfiante et dermocaustique. - IDENTIFICATION (1, 3, 4, 5, 16, 20) - a drogue est constituée par les aiguilles et les bourgeons frais de Pin maritime. Les aiguilles sont très longues (de 10 à 27 cm), rigides, épaisses, aciculaires et légèrement incurvées. Elles sont réunies par deux et entourées à leur base par une fine gaine membraneuse et écailleuse. L Les bourgeons foliaires sont oblongs, fusiformes et non résineux. Ils portent au sommet des écailles brunes recouvertes de petits poils formant un duvet blanc. Feuille Pinus pinaster Ait. Rameau annuel - BIBLIOGRAPHIE - 1 - BEZANGER L., BEAUQUESNE L. et al. Plantes Médicinales des Régions Tempérées. Ed. Maloine, Paris, 1990, 2e édition, p. 233-234. 2 - BLAMEY M., GREY-WILSON C. La flore d’Europe occidentale. Ed. Arthaud, Paris, 1991, p. 40-41. 3 - BONNIER G. La Grande Flore en couleurs. Ed. Belin, Paris, 1990, Tome IV, p. 1349-1350. 4 - BOUKEF. M.F. Médecine traditionnelle et Pharmacopée - Les plantes dans la médecine traditionnelle tunisienne. Agence de coopération culturelle et technique, Paris, 1986, p. 23. 5 - BRUNETON J. Pharmacognosie – Phytochimie, Plantes médicinales. Ed. Lavoisier, Paris, 1999, 3e édition, p. 584-585. 6 - DICTIONNARY OF NATURAL PRODUCTS (on CD-ROM). Ed. Chapman & Hall/CRC, London, 1994. 7 - DURAN-CARRIL M.V., BUJAN C.R. Antioxidant systems in leaf apoplast compartment of Pinus pinaster Ait. and Pinus radiata D. on plants exposed to SO2. Annals of applied biology, Dec. 1998, 133 (3), p. 455-466. 8 - FOURNIER P. Le livre des plantes médicinales et vénéneuses de France. Ed. Lechevalier, Paris, 1948, Tome III, p. 221-228. 9 - GLEIZES M. et al. Sesquiterpene biosynthesis in maritime pine needles. Phytochemistry, May 1984, 23 (6), p. 1257-1259. 10 - GLEIZES M. et al. Role of acyclic compounds in monoterpene biosynthesis in Pinus pinaster. Phytochemistry, 1982, 21 (11), p. 2641-2644. 11 - HEGNAUER R. Chemotaxonomie der Pflanzen. Ed. Birhäuser verlag basel und Stuttgart, 1962, Tome I, p. 299, 385, 393-5, 398-9, 403, 405. - BIBLIOGRAPHIE - 12 - HMAMOUCHI M. et al. Chemical and antimicrobial properties of essential oils of five Moroccan pinaceae. Journal of essential oil research, Jul-Aug. 2001, 13 (4), p. 298-302. 13 - KLEINHENTZ M. et al. 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