Compte rendu des visites du camp de concentration de Dachau (20

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Compte rendu des visites du camp de concentration de Dachau (20
Compte rendu des visites du camp de concentration de Dachau (20 mars) et
de la Haus der Kunst (23 mars 2012)
Clément Perret, 1S4 SED
Les élèves de première ayant pris part au voyage à Munich eurent l’occasion, parmi les
nombreuses visites culturelles au programme de la semaine, de pénétrer dans deux des
bâtiments qui comptèrent parmi les symboles forts du régime nazi : le
« Konzentrationslager » de Dachau, premier d’une longue et tristement célèbre série, mis en
service le 22 mars 1933, soit moins de deux mois seulement après la nomination de Hitler au
poste de chancelier, et la Haus der Kunst, ouverte en 1937, ayant pour projet mégalomaniaque
de regrouper dans une « grande exposition de l’art allemand », tout ce qui correspondait aux
critères esthétiques et artistiques nazis tout en fustigeant ce qui à leurs yeux avait valeur de
« entartete Kunst » (art dégénéré).
Ces deux bâtiments ont aujourd’hui été transformés respectivement en mémorial et en
musée d’art moderne.
N.B : Ce compte rendu n’a pas pour objectif ni de raconter en détail et de manière
encyclopédique ou exhaustive le passé et le présent de Dachau et de la Haus der Kunst, ni de
donner des impressions ou un avis personnel sur la visite de ces bâtiments, mais simplement
de retracer dans les grandes lignes et avec un minimum de concret ce qui a pu être appris à
leur sujet par les différents protagonistes ayant participé à la visite.
Dachau :
Le camp de concentration de Dachau est le tout premier du genre à être construit en
Allemagne, à peine deux mois après l’arrivée d’Hitler au pouvoir. Il est alors destiné aux
prisonniers politiques qui doivent y être « rééduqués ». En entrant dans le camp, le visiteur
peut apercevoir la phrase trônant sur le haut de la porte comme une devise : « Arbeit macht
frei » (le travail rend libre), symbole du cynisme et du mépris avec lequel les SS, et plus
généralement le régime nazi, considérait les détenus, astreints quotidiennement au travail
forcé.
A l’intérieur de l’enceinte du camp, l’impression d’ordre et de propreté glaciale est
toujours là, en raison du fait que les infrastructures qui le composent ont été laissées en place
ou reconstruites à l’exact emplacement où elles étaient avant leur destruction : le bâtiment de
maintenance du camp où logeait la garnison SS est devenu le musée accueillant l’exposition
de Dachau, le bunker (qui faisait office de prison, de salle d’interrogatoire, et où avait lieu la
plupart des exécutions par balles) ainsi que le crématorium et la fameuse « baraque X » sont
également libres d’accès au public.
Concernant les baraquements, sur les 34 que le camp a pu contenir, alignés en deux
rangées sur ce que l’on a appelé la « Lagerstraβe », seuls les deux premiers ont été
reconstruits (l’emplacement des 32 autres étant signalé par des sillons de ciment et de graviers
dans le sol). A l’intérieur de chacun d’entre eux, a été reconstituée l’évolution de l’aspect
qu’ont pu avoir les « sanitaires » des détenus (en trois étapes, de 1933 à 1938, de 1938 à 1942,
puis de 1942 à 1945), évolution parallèle à celle du camp lui-même, qui passe du statut de
camp d’internement des seuls opposants politiques (même les premiers prisonniers juifs du
camp étaient répertoriés comme opposants politiques et non comme juifs à l’origine) avant
1939, à celui de véritable machine esclavagiste, où les prisonniers, transfuges d’une trentaine
de nationalités différentes, parqués et entassés comme du bétail (au plus fort de son activité, le
camp a pu contenir 30000 détenus, alors que sa capacité théorique n’était que de 6000),
soumis à un labeur éprouvant et harassant, et ce jusqu’à leur passage à l’abattoir…
Il est intéressant de remarquer que le camp de Dachau, en dépit du fait qu’il ait
possédé des chambres à gaz, n’a jamais été répertorié comme camp d’extermination, peut-être
parce que même à l’apogée du camp, elles ne fonctionnaient pas à un rythme aussi soutenu
que celles de camps comme Auschwitz ou Treblinka (parmi les prisonniers de Dachau morts
gazés, la plupart d’entre eux l’ont été au château de Hartheim plus que dans le camp luimême).
Dachau possédait également deux crématoriums, le premier construit en 1940, et le
second (abrité par la fameuse baraque X) au cours de l’année 1942-1943. Néanmoins, ces
deux crématoriums n’avaient pas les capacités nécessaires pour faire disparaître les cadavres
toujours plus nombreux des détenus du camp, surtout à partir de 1944, lorsque la
surpopulation du camp évoquée plus haut entraina une vaste épidémie de typhus. Ainsi, à la
libération du camp le 29 avril par les troupes américaines, les soldats ayant pénétré dans le
camp purent contempler l’horreur des charniers pourrissants laissés à l’abandon par les SS (de
nombreuses photos dans le musée en témoignent).
Le mémorial de Dachau existe depuis 1965, et est accessible à tous depuis cette même
date. Outre les infrastructures du camp entretenues ou reconstruites, puis converties à un
usage en rapport avec l’objectif que veut se donner le mémorial, a été bâti, sur l’ancienne
Appellplatz, un mémorial international, ainsi que, au bout de la « Lagerstraβe », un mémorial
religieux (celui-ci le fut dès le 5 août 1960).
Grâce à la possibilité, pour ceux qui prennent les audioguides, d’écouter des
témoignages de survivants pris sur le vif à la libération du camp (disponible en une dizaine de
langues pour les polyglottes éventuels), et pas uniquement d’explications qui pourraient
s’avérer rébarbatives pour certains, la visite du « Konzentrationslager » de Dachau plonge de
plein fouet le visiteur dans l’enfer qu’ont pu vivre ces gens, et lui permet de dépasser son
statut de touriste apathique, juste là pour prendre des photos, et le rappellent à son « devoir de
connaissance » (et non pas « devoir de mémoire »).
Haus der Kunst :
Entre sa fonction originelle, qui destinait ce bâtiment à être le refuge du chantre de
l’art allemand comme l’entendaient les nazis, et aujourd’hui, où son rôle est strictement
dévolu à l’accueil et la présentation d’expositions d’art contemporain sous toutes ses formes,
il n’y a pas grand-chose de commun. Seules les mosaïques de svastikas encore visibles sur
certains murs rappellent au public les heures sombres auxquelles ce bâtiment a été lié.
C’est dans une salle dont la construction a été décidée par Hitler pour montrer
comment devait être représenté l’idéal architectural allemand, et destinée à l’origine à tourner
des films de propagande, la « Luftschutzkeller », que l’artiste Ingvild Goetz présente sa
nouvelle exposition « Why I never became a dancer », dont le sujet principal pourrait être (le
conditionnel est de rigueur, l’auteur de ces lignes n’étant pas un féru d’art contemporain, d’art
tout court d’ailleurs…) la jeunesse et sa culture, entre socialisation, conditionnement et
dépravation.
Goetz utilise ainsi les 14 pièces de la « Luftschutzkeller » pour présenter dans chacune
d’elles un « travail vidéo » (étant donné que le résultat est parfois nettement plus
« psychédélique » qu’un simple film) d’artistes tels que Doug Aitken, Rineke Dijkstra ou
encore Tracey Emin, traitant des modèles comportementaux de la jeunesse d’hier
(mouvement punk par exemple) et d’aujourd’hui (suppression de plus en plus marquée des
tabous sexuels).
Il serait bienvenu, pour le mot de la fin, de reprendre les propos de l’artiste à propos de son
œuvre : « Chaque génération a les figures culturelles qui lui sont propres, le langage qui lui
est propre, sa musique, son style et ses expressions. Jusqu’à ce qu’une génération se soit
trouvée, elle essaye tout : d’un style de vie particulier, en passant par la drogue, ainsi que
tous les chemins menant au monde virtuel d’Internet ».