POÈME DE L`EXTASE - Orchestre National de Lille
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POÈME DE L`EXTASE - Orchestre National de Lille
onlille.com +33 (0)3 20 12 82 40 ———————————— ZOOM POÈME DE L’EXTASE CYCLE L’AMOUR ET LA DANSE ÉPISODE 2 JEU 19 JANV. et VEN 20 JANV. 20h / Lille, Auditorium du Nouveau Siècle & à Grande-Synthe le 21 JANV. 20h et à La Rochelle les 24 et 25 JANV. 20h30 ———————————— BEETHOVEN Triple concerto pour violon, violoncelle et piano R. STRAUSS Salomé : Danse de Salomé SCRIABINE Poème de l’Extase Direction Jean-Claude Casadesus Piano François-Frédéric Guy Violon Tedi Papavrami Violoncelle Xavier Phillips ————————— AUTOUR DES CONCERTS LEÇONS DE MUSIQUE “Des sons et des couleurs en musique” Avec Hèctor Parra, compositeur en résidence Jeu. 19 & Ven. 20 Janv. 19h (Entrée libre muni d’un billet) CONCERT FLASH 12H30 “L’art du trio” Beethoven • Schumann Avec le pianiste François-Frédéric Guy, le violoniste Tedi Papavrami et le violoncelliste Xavier Phillips Ven. 20 Janv. 12h30 RETROUVEZ LE CYCLE L’AMOUR ET LA DANSE TOUT AU LONG DE LA SAISON er ROMÉO ET JULIETTE Jeu. 1 Déc. 20h DON JUAN Jeu. 2 Mars 20h et Ven. 3 Mars 20h ———————————————————————————————————————————————————————— Rédaction © Ghislain Abraham intervenant pédagogique Orchestre National de Lille Crédits Photos Salomé par le peintre Robert Henri (1909) © Mead Art Museum – Amherst College ———————————————————————————————————————————————————————— Orchestre National de Lille – Place Mendès France, Lille (licence n°2-1083849) Association subventionnée par le Conseil régional des Hauts-de-France, le Ministère de la Culture et de la Communication, la Métropole Européenne de Lille et la Ville de Lille ❶ Le Poème de Scriabine Un nirvana orchestral Alexander Scriabine est sans doute le moins russe des compositeurs moscovites : contrairement à ses prédécesseurs notamment ceux du Groupe des Cinq* ou Stravinsky, il refuse dans sa musique toute référence au folklore de son pays. Pour lui, l'art musical doit avoir une dimension métaphysique et conduire à l'élévation spirituelle. Parallèlement à sa brillante carrière musicale, il se passionne pour la philosophie, l’ésotérisme et l'hindouisme. Grâce à ses tournées en Europe en tant que pianiste concertiste, il fréquente les cercles théosophiques à Londres et Bruxelles (associations dont la devise est : « Il n'y pas de religion supérieure à la vérité »), ce qui renforce encore ses affinités avec le mysticisme. Il y expose ses projets pour la construction d’un temple en Inde, dans le parc de la Société de théosophie, où ses œuvres accompagneraient la liturgie d’une nouvelle religion. À Moscou, il est fortement impressionné par un chant religieux soufi censé amener les auditeurs à une sorte de transe mystique. Scriabine prône la fusion entre les sens et les arts, et accompagne ses concerts de projections colorées basées sur les correspondances entre les hauteurs sonores et le spectre des couleurs, ces deux phénomènes n'étant finalement que des vibrations. Il note dans son journal : « La vibration relie les états de conscience entre eux et constitue leur seule substance ». Rappelons ici que Scriabine était atteint d'une forme de synesthésie* « musique-couleurs » c'est-à-dire qu'il percevait des couleurs en réponse à des sons. Alexandre Scriabine, mort brutalement en avril 1915 des suites d'une piqûre d'insecte n'aura finalement pas l'occasion de monter son grand projet d’œuvre d'art total intitulé Mystère où s'entrelaceraient, dans une trame serrée musique, paroles, lumières, gestes, parfums, et même goûts et contacts. Son Poème de l'Extase dont il commence la composition à l'âge de 34 ans est initialement pensé pour être sa Quatrième symphonie. Il travaille sur une œuvre orchestrale d'envergure (il convoque un 'hyperorchestre' de plus de 100 musiciens) dont le titre provisoire est Poème orgiaque. Le mot 'extase' qu'il fixera par la suite prend alors un sens clairement sexuel. On est donc face à une musique des sens, de la volupté, une musique qui a pour finalité l'extase aussi bien physique que spirituel. L’œuvre est résolument avant-gardiste et, quelques années avant Le Sacre du Printemps de Stravinsky, provoque le scandale et l'incompréhension, aussi bien aux Etats-Unis qu'en Europe. Un critique musical new-yorkais parle des « murmures et plaintes d’âmes perdues des violons, tandis que de bizarres mélodies, ondulantes et imprécises planaient parmi les vents ...». Rimski-Korsakov parle quant à lui de l’œuvre « obscène » d’un compositeur « agaçant ». Elle trouvera pourtant sa place au répertoire de tous les grands orchestres. On sent que, dans cette œuvre fleuve, Scriabine absorbe les musiques symphoniques des compositeurs de son temps. À l’origine, elle était précédée d’un poème en vers, le Poème orgiaque, d’une dizaine de pages, qui décrit les émerveillements et les souffrances de l’Esprit. Les vers de ce poème sont d'une aide précieuse pour entrer dans la symbolique de cette œuvre : La première partie : « Versant des flots d’espérance / De nouveau illuminé / L’Esprit brûle de l’ardeur de vivre » est d'une sonorité impressionniste, ruisselante, diffuse et fait penser à la Mer de Debussy (1905). Ensuite arrivent : « Des reflets brillants / D’une lumière magique / Illuminent l’Univers », une féérie enchanteresse proche du Shéhérazade de Rimski-Korsakov (1889) ou de l'Apprenti Sorcier de Dukas (1897). Peu après, deux instruments se distinguent particulièrement de la texture orchestrale insaisissable : La trompette-solo, avec son motif conquérant qui parcourt la pièce, apparaît comme une personnification de « l’Esprit qui joue, l’Esprit qui désire, de l’Esprit tout puissant, créant tout en rêvant… ». Lui répondent les soupirs du violon-solo, indécis. Le tableau s'assombrit, les cuivres apportent le chaos. Nous sommes maintenant dans un univers orchestral proche de celui du Zarathoustra de Richard Strauss (1896) : « Rythmes menaçants et sombres pressentiments / Envahissent brutalement ce monde charmant / […] Des gueules de monstres affreux s’entrouvrent ». Le glockenspiel* maintient ses notes mystiques malgré le fracas, « Les éclairs de la volonté divine sillonnent le ciel ». Un carillon* démesuré emmène tout l'orchestre plus vite, plus fort vers l'extase : un énorme accord orchestral tutti* de Do Majeur. EN BREF Titre : Poème de l’Extase, op.54 Compositeur : Alexander Scriabine (1872-1915), russe Date de création : 10 décembre 1908, New York Genre : poème symphonique Durée : 23' ❷ Salomé Une danse de la mort Pour son troisième opéra, Richard Strauss s’inspire de la pièce de théâtre Salomé d’Oscar Wilde. Ce sera son premier grand succès lyrique. À la quatrième scène, il met en musique cette danse érotique que réalise Salomé pour son beau-père, le Roi Hérode qui lui a promis en échange de lui donner tout ce qu’elle désirait. Par dépit amoureux, Salomé désire ardemment la tête de Jean le Baptiste qui se refuse à elle. Elle joue à un jeu malsain avec son beau-père qu’elle parvient à aguicher en effectuant ce que l’on appellerait aujourd’hui un « strip-tease ». Il s’agit de la danse dite « des sept voiles », une sorte de danse du ventre au cours de laquelle la danseuse retire, un à un, les voiles qui l’habillent. Avec une introduction rythmée et colorée ponctuée de coups de cymbales, on s’attend à une page symphonique orientalisante comme on en compte beaucoup dans le répertoire de cette époque. Mais il n’en est rien ! Même si Strauss a recours à l’inévitable solo de hautbois tout en mélismes, jouant une mélodie ‘orientale’ usant de seconde augmentée*, il parvient à dépasser le simple aspect pittoresque de la scène. Il y excelle dans l’évocation de son côté décadent en concevant une sorte de valse lente et morbide qui alterne entre réels moments d’insouciance et précipitations tragiques. La mélodie envoûtante entamée par les cordes au milieu de la pièce ne parvient pas à nous défaire de ce pressentiment tenace du drame qui se jouera une fois la danse terminée. Richard Strauss, comme à son habitude (et tout comme Scriabine), fait appel à un « hyperorchestre » foisonnant et insaisissable qui donne énormément de relief à cet interlude d’opéra, désormais au répertoire de tous les grands orchestres symphoniques. EN BREF Titre : Danse des sept voiles dite ‘Danse de Salomé’ Compositeur : Richard Strauss (1864 -1949), allemand Date de création : 19 décembre 1905, Dresde Genre : interlude musical d’un opéra Durée : 9’ ———————————————————————————— PETIT DICTIONNAIRE MUSICAL (retrouvez ici tous les mots signalés*) Carillon : succession répétitive de quelques notes martelées à la manière de cloches d’église. Glockenspiel : mot allemand signifiant « jeu de cloches ». Il s’agit d’un métallophone aigu c’est à dire un ensemble de petites lames métalliques rangées de manière chromatique (par demi-tons, comme un clavier de piano) sur lesquelles le percussionniste frappe avec des mailloches. Groupe des Cinq : association de compositeurs russes fondée par Balakirev regroupant autour de lui Rimski-Korsakov, Cui, Moussorgski et Borodine, prônant une musique nationale russe basée sur le folklore. Seconde augmentée : intervalle d’un ton et demi séparant deux notes conjointes et qui donne une couleur ‘orientale’ à la mélodie. Par exemple dans la mélodie descendante LA SOL♯ FA MI, il y a une seconde augmentée entre SOL♯ et FA. Dans le mode mineur harmonique, c’est l’intervalle qui sépare la note sensible (septième degré de la gamme) et la tonique (premier degré de la gamme). Symphonie : pièce instrumentale d’importance, souvent bâtie en 4 mouvements de caractères contrastés, dans laquelle les instruments de l’orchestre « sonnent » ensemble. Synesthésie : phénomène neurologique par lequel deux ou plusieurs sens interfèrent entre eux en réaction à un signal. Tutti : passage musical dans lequel tous les instruments de l'orchestre jouent ensemble. Variations : modifications rythmiques, mélodiques ou harmoniques que l’on fait subir à une phrase musicale initiale pouvant aller jusqu’à la rendre méconnaissable.