Quelles obligations - Chambre Syndicale Française de l`Etanchéité

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Quelles obligations - Chambre Syndicale Française de l`Etanchéité
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ETANCHEITE
NFO
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le magazine des professionnels de l’étanchéité et de l’isolation
www.etancheite.com
ÉDITORIAL
PA G E 3
L’exemplarité au service de notre image
V É G É TA L I S AT I O N
PA G E 4
Une nouvelle subvention
pour l’Île-de-France
PORTRAIT
PA G E 7
Dominique Zoccoli : la mémoire vive
MÉTIER
PA G E 1 1
Technicien de laboratoire
CRÉDIT AGRICOLE DE BRETAGNE PA G E 2 5
PRÉVENTION DES CHUTES DE HAUTEUR
Quelles obligations
Exercice de style
sur terrasses multiples
Terrasses jardins, parkings, terrasses végétalisées
ou encore dalles sur plots : rares sont les bâtiments
à rassembler une telle diversité de toitures-terrasses.
Pour l’étancheur, la première mission consistera
donc à optimiser le choix des solutions techniques
tout en respectant des délais d’intervention
particulièrement serrés.
pour le maître d’ouvrage ?
Professionnels de l’étanchéité et acteurs de la prévention
sont unanimes : dix ans après la publication de la loi de 1993,
les bâtiments intègrent de plus en plus des garde-corps dès leur
conception. Toutefois, cette démarche est encore loin de s’être
totalement généralisée. Et nombre de maîtres d’ouvrage n’ont
toujours pas pris conscience des obligations de sécurité que
leur impose désormais la loi.
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ACTUALITÉS >
L’exemplarité
au service de notre image
T
Soyons fiers
de ces
exemplarités,
qu’elles
concernent
les hommes,
les techniques
ou encore
les actions.
out d’abord, et je vous en réserve ici la primeur : un amendement a été adopté par le
Conseil régional d’Île-de-France, subventionnant la réalisation des toitures terrasses végétalisées
à hauteur de 50 % du coût HT pour tous les bénéficiaires. Une belle incitation dont il convient d’espérer
qu’elle se généralise. En tout cas, une belle victoire,
fruit des efforts menés par la CSFE, l’Adivet, les fournisseurs et l’ensemble des acteurs engagés dans le
développement de la technique.
Les numéros de la revue se suivent mais ne se ressemblent pas. Sauf pour ce qui est de leur exemplarité. Cet Étanchéité.Info de juin est en effet exemplaire à plus d’un titre, et ce quelle que soit la
rubrique, jugez plutôt…
Faire revivre un des fleurons de l’Exposition universelle
de 1878 en redonnant vie au premier aquarium
construit au Trocadéro, n’est-ce pas un clin d’œil à
l’Histoire ? C’est surtout l’un des plus importants
chantiers de Paris en 2005 et aussi l’un des plus complexes. Nous vous mettons dans ces lignes l’eau à la
bouche, car tous les poissons ne sont pas encore là !
La deuxième application constitue à elle seule un véri-
est une publication trimestrielle
de L’Association pour la Promotion
des Métiers de l’Etanchéité APMEPROMETHÉE, éditée sous l’égide
de la CSFE.
6-14 rue La Pérouse,
75784 Paris cedex 16
Tél. : 01 56 62 13 20
Fax : 01 56 62 13 21
www.etancheite.com
Directeur de la publication :
Christian Paillard
table cas d’école : car à Vannes, le nouveau bâtiment
du Crédit Agricole, avec une telle diversité de toitures
terrasses, relève d’une gestion intelligente et d’une
optimisation extrême des solutions techniques.
Exemplaire aussi le technicien de laboratoire qui, associé à la gestion des projets, doit être rigoureux, avoir
une bonne capacité d’analyse pour être force de proposition. Encore exemplaire est l’initiative du premier
bailleur social de France d’investir autant en matière
de prévention, respectant ainsi les grands principes de
sécurité. Ce qui renvoie au dossier relatif aux protections collectives contre les chutes de hauteur, pour lesquelles les exigences induites par le décret de septembre 2004 ont entraîné la mobilisation de la CSFE.
Enfin, un bel exemple que celui de la carrière remarquable de Dominique Zoccoli, personnage connu et
écouté, véritable mémoire vive de la profession.
Alors soyons fiers de ces exemplarités. Qu’elles concernent les hommes, les techniques ou encore les actions,
elles accompagnent notre détermination à améliorer
sans cesse notre image. Ce à quoi je m’engage avec
vous tous et je sais que vous m’avez compris.
DOMINIQUE DE BRAY - PRÉSIDENT DE LA CSFE
Étanchéité.info est
éditée par Pyc Édition
16-18 place de la Chapelle,
75018 Paris
Tél. : 01 53 26 48 00
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Rédaction :
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Pèpe Rousset-Rouvière, Sabine Tang,
Bastien Cany (47 85) [email protected]
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Secrétaire de rédaction :
Paillard, Pierre Pannetier, Yann Schuler.
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Maquette : Atelier Chévara etc.
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Routage : GL Routage (Quetigny)
Dépôt légal à parution
Photo de couverture :
© Horizal
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EN BREF…
Nouvelle subvention
pour la végétalisation
> La sixième édition du Prix de
l’architecture se déroulera le 23 juin sur
le site de l’École nationale supérieure des
Beaux-Arts à Paris. Organisée par la CSRE
Île-de-France et l’École d’architecture de
Paris Val-de-Seine, ce concours annuel
récompense trois élèves de cinquième
année pour le traitement et l’intégration
de l’étanchéité dans leur « projet long ».
> Loxan vient d’acquérir le loueur
© S M AC
néerlandais Spreeuwenberg Hoogwerk
Systemen, spécialiste du matériel
d’élévation. Le leader européen de la
location de matériels de chantier étend
ainsi son maillage avec au total
375 agences implantées dans neuf pays.
Les toitures vertes vont-elles enfin fleurir sur l’Île-de-France ? Depuis six mois, le
Conseil régional semble en tout cas décidé à encourager le développement des techniques de végétalisation. Après une première subvention votée en décembre dans le
cadre de sa politique du logement, la Région vient d’adopter un amendement du
conseiller Vert, Lucien Ferrier, soutenant la réalisation de toitures-terrasses végétalisées
à hauteur de 50 % du coût HT. La mesure devrait concerner tous les propriétaires,
bailleurs, collectivités, entreprises et particuliers. À cette nouvelle incitation, inscrite au
plan régional énergie 2006-2010, voté le 17 mai dernier, s’ajoute une série d’aides
directes dédiées au développement des énergies nouvelles et renouvelables.
> Lors de leur trente-quatrième congrès,
qui s’est tenu à Lille du 3 au 5 mai dernier,
les Économistes de la construction ont
réélu Jacques-Philippe Charpy président
de l’Untec, pour un second mandat de
trois ans. L’Untec rassemble 850 cabinets
couvrant l’ensemble du territoire.
> Soprema vient d’éditer son nouveau
classeur « Décision Étanchéité », destiné
aux prescripteurs. Ce guide de choix est
organisé autour de cinq critères :
destination de l’ouvrage, type de
protection, nature de l’élément porteur,
pente admissible, présence ou non d’un
isolant thermique. Les fiches systèmes
présentent généralement trois solutions :
système de base, optimal et haute protection.
Soprema se renforce en Allemagne
Soprema vient d’acquérir la société Klewa, implantée à Burbach, près de Siegen.
La société allemande, avec ses quarante et un salariés, est spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de membranes d’étanchéité bitumineuses. À travers cette
acquisition, l’industriel alsacien, qui a réalisé 620 millions d’euros de chiffre d’affaires
consolidé en 2005, entend renforcer sa présence en Allemagne, « le principal marché
européen », précise-t-il dans un communiqué. Klewa et la filiale allemande de Soprema
vont fusionner pour donner naissance à une nouvelle entité : Soprema-Klewa.
> En application des DTU 23.1 et 20.1,
4·
Imperfrance devient Derbigum France
© Derbigum
le nouveau guide du CSTB détaille les
différentes étapes de mise en œuvre
d’un bardage rapporté sur une ossature
secondaire en bois. Il décrit ainsi les
principes de pose de l’ossature bois
(support, chevilles, fixations, etc.), des
éléments de peau du bardage ainsi que
le traitement des points singuliers (arrêts,
angles, joints, etc.). « Bardage rapporté
sur ossature secondaire en bois », Éd. CSTB,
80 pages, http://boutique.cstb.fr, rubrique
Guides, livres, études.
Filiale française du groupe belge Imperbel, le spécialiste de l’étanchéité Imperfrance devient
Derbigum France, en référence à la marque phare
de produits et de membranes d’étanchéité. L’entité
hexagonale sera désormais animée par Denis
Maciel, responsable des ventes depuis le 1er janvier 2006. Derbigum France déménage aussi son
stock central, installé jusqu’à présent dans le
Nord, en région parisienne, pour plus de réactivité sur l’ensemble du territoire national. Le groupe Imperbel a réalisé en 2005 un chiffre d’affaires de
85 millions d’euros pour 400 salariés.
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Les CQP arrivent
dans l’étanchéité
Désenfumage : le marquage CE
bientôt obligatoire
C’est une première pour la profession. Le 19 mai dernier, huit
candidats ont inauguré les épreuves du nouveau Certificat de
qualification professionnelle Étancheur (CQP). Un examen oral
qui vise à contrôler les acquis de l’expérience des salariés et à
valider leurs compétences par la délivrance d’un certificat.
L’initiative, lancée par la CSFE, cherche en partie à répondre
aux enjeux posés à la fois par l’évolution des techniques et par
les difficultés de recrutement. À terme, il s’agit donc bien de
développer et de fidéliser un vivier de personnel qualifié,
capable de répondre aux besoins des entreprises du secteur. La
Chambre syndicale a ainsi créé, en collaboration avec l’Office
des Asphaltes, trois CQP pour les trois métiers spécifiques de
l’étanchéité : étancheur, bardeur et asphalteur. Et la CSFE estime
qu’environ 350 personnes sont susceptibles chaque année d’être
candidates aux évaluations.
Effectif depuis août 2004, le marquage CE des dispositifs de
désenfumage naturel sera obligatoire sur tous les produits commercialisés à partir du 1er janvier 2007. Et dès le 1er septembre
prochain, plus aucun appareil ne pourra être lancé sur le marché
sans marque CE. Pour informer les professionnels de la maîtrise
d’ouvrage sur ces nouvelles dispositions, Hexadome et Souchier
viennent d’achever une série de réunions d’information sur l’ensemble du territoire. Écrans de cantonnement, ventilateurs et
appareils d’évacuation naturelle de fumée et de chaleur : en
2007, tous devront donc répondre aux exigences de la norme NF
EN 12101-2. En France, le marquage CE des produits devra aussi
respecter les prescriptions des réglementations applicables aux
différents types de bâtiment : établissements recevant du public
(ERP), lieux de travail, habitations collectives, etc.
Pour plus d’informations : www.hexadome.com/actualites
www.afnor.fr/construction.asp
Paulo Raposo (à droite), de l’entreprise Jean Rossi, devant le jury d’examen.
Asphalte : un nouveau fascicule
L’Office des Asphaltes vient de publier une version
mise à jour et complète du fascicule 1, « Étanchéité des toitures terrasses – Climat de plaine », de
son Cahier des charges. Principale nouveauté de
cette édition 2006 : l’intégration des complexes
mixtes associant feuilles bitumineuses et asphalte,
ainsi que des revêtements monocouche. Depuis
une vingtaine d’années déjà, ces étanchéités représentent une
part importante des réalisations. La présentation du document
s’inspire des fascicules 4, 5, 6 et 10 récemment remaniés. Il tient
compte de la norme NF P 84-204-1/DTU 43-1 et reprend des
généralités comme la terminologie, les supports admissibles, le
pare-vapeur, les isolants ou encore la nature des matériaux
entrant dans les complexes et les ouvrages annexes ou de protection. Conçu comme un instrument de prescription, d’étude
et de réalisation, le fascicule décrit les différents complexes et
intègre des croquis de principes donnant les revêtements types et
les relevés. Chaque asphalte évoqué dans ce fascicule fait l’objet
d’une fiche technique. L’ensemble du document peut aussi être
consulté à partir d’un CD-Rom.
Renseignements : [email protected] – Tél. : 08.72.63.11.24.
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ACTUALITÉS >
PORTRAIT
Mémoire vive
Dominique Zoccoli, 82 ans, retraité. Difficile pourtant de croire que l’homme a officiellement
cessé toute activité professionnelle depuis plus de dix ans. Son expérience et ses cinquante
années de carrière font de cet ancien pdg de Ruberoïd l’un des membres les plus écoutés
et les plus reconnus des instances techniques de la CSFE.
es dates, les hommes, les détails de chaque
chantier, Dominique Zoccoli se souvient de
tout. Des péripéties de son premier métré, en
1942, sur les toits de l’usine Renault à Flins, « plus
de huit jours pour calculer la totalité des surfaces »,
jusqu’aux grands noms du métier qui ont accompagné ses cinquante ans de carrière et qu’il est capable
de citer avec une précision étonnante. Une mémoire
de plus d’un demi-siècle, obstinée, presque compulsive, et qui lui vaut aujourd’hui sa réputation de fin
connaisseur de l’histoire des techniques et de la profession. Le rôle d’ailleurs ne lui déplaît pas. Et à la
demande, il endosse volontiers son costume d’historien de l’étanchéité. Pour autant, l’homme n’est pas
passéiste et s’attache à suivre au plus près les évolutions de son métier. À plus de 80 ans, il reste l’un
des membres les plus écoutés des instances techniques de la CSFE et participe, toujours avec la
même rigueur, aux travaux du GS5, la commission
chargée de l’évaluation des avis techniques au
CSTB.
Plus de dix ans après son départ en retraite,
Dominique Zoccoli continue de recevoir au siège de
Ruberoïd, à Antony (92). Bien sûr, le bureau ne ressemble plus à celui du directeur général qu’il fut jusqu’en 1992 mais il s’y sent toujours « comme chez lui ».
Difficile de tourner la page lorsqu’on a passé cinquante ans dans la même structure. « Pourquoi le
ferais-je ? s’étonne-t-il. On me consulte encore, je participe à certaines réunions. Et depuis que je travaille
sans contrainte, je n’ai jamais pris autant de plaisir. »
L
<
« Constater qu’une
étanchéité a traversé
plus de trente années
sans dégât a toujours
été une source de
satisfaction et de
fierté durant ma vie
professionnelle. »
« Apprentissage par la pathologie »
Fin 1941, il a dix-huit ans à peine lorsqu’il
entre dans l’entreprise. À l’époque, ce
n’est pas pour rejoindre le service travaux mais la comptabilité. Un début
de carrière administrative qui aujourd’hui le fait sourire, « après tout,
qui sait ? ». Rapidement, on lui propose d’évoluer
vers un poste de métreur. Il suit les cours du soir au
lycée Maximilien-Perret et découvre rapidement ses
premiers chantiers. Si la construction neuve marche
au ralenti, les activités de réfection restent, forcément, très actives : « Les bâtiments existants devaient
être maintenus en l’état. Mais il faut reconnaître que
les interventions concernaient également les nombreuses usines touchées par les bombardements.
Certaines toitures de Renault à Billancourt ont ainsi
été refaites trois fois. » Exception faite du contexte, il
juge l’expérience formatrice, « une
Pas de nostalgie sorte d’apprentissage par la pathologie ». Car alors, dans l’étanchéité
dans le discours
comme ailleurs, rien ne fonctionne
mais plutôt un
regard technique, simplement. Soixante ans plus
tard, Dominique Zoccoli dresse un
critique sur les
tableau épique de cette période
performances
où mener un chantier revenait à
des matériaux
et des méthodes maîtriser un certain art de la substitution. « À défaut de bitume, on
de l’époque.
utilisait du brai de houille mais
aussi du ciment volcanique, un
dérivé du goudron mélangé à du soufre. L’odeur était
forte et tenace, raconte-t-il. Elle imprégnait les vêtements. Personnellement, j’ai fini par m’y habituer
mais je n’en dirai pas autant des personnes qui
avaient la malchance de voyager avec moi dans le
métro. » Côté mise en œuvre, les conditions sont pittoresques : la course au bois de chauffage avant le
début des chantiers pour alimenter le fondoir, le
dédouanage du matériel auprès des correspondants
de la SNCF, le recyclage de vieux casques militaires
en guise de récipients à bitume pour pallier la pénurie de casseroles. Dominique Zoccoli s’amuse encore
de ces détails sans pour autant faire dans la caricature. Pas de nostalgie non plus dans le discours mais
plutôt un regard technique, critique sur les performances des matériaux et des méthodes de l’époque :
©Pyc
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« Les complexes d’étanchéité n’étaient pas autoprotégés
par paillettes. Tous les quatre ans pour les monocouches, huit ans dans le cas des bicouches, il était
nécessaire de traiter avec un enduit bitumineux à froid.
Aujourd’hui encore, je suis surpris de la longévité de ces
systèmes, jusqu’à une trentaine d’années pour
certains. »
Succès immédiat
Technicien d’exécution à la sortie de la guerre, il
mènera ensuite une carrière en forme de ligne droite,
sans fausse note. Sous-directeur, directeur adjoint, puis
directeur du service travaux, il prendra les commandes
du département produits sur béton au siège du nouveau groupe Ferem, né en 1970 du rapprochement
entre Ruberoïd et Acieroïd. Créé trente ans plus tôt,
Acieroïd fait dès 1946 le pari d’importer d’Angleterre
la couverture en bac acier. Une stratégie payante. La
société rencontre un succès immédiat dans une France
qui doit remettre sur pied son secteur industriel.
Résultat : au début des années soixante-dix, les deux
structures, fondées et dirigées par la famille
Chadenier, représentent un groupe de près de
3 000 personnes, coté en Bourse, alors à l’apogée de
son développement. Mais le marché se durcit. La
concurrence devient plus rude, l’informatisation coûte
cher et Ferem lance quelques projets d’implantation
malheureux à l’étranger. Des partenaires financiers se
désengagent et, en quelques années, le groupe est à la
portée de Smac. La fusion est opérée en 1978. Ferem
est définitivement absorbé.
La décennie suivante marque donc le renouveau. « Ces
années furent sans aucun doute les plus faciles et les
plus fastes. Faut-il y voir l’effet de l’environnement économique du moment ou de l’expérience acquise ? s’interroge-t-il. Je ne saurais pas répondre. Une chose est
sûre, les résultats étaient au rendez-vous. » Une victoire
pour le chef d’entreprise, certes. Mais pour le technicien, les vrais succès sont plutôt du côté des innombrables chantiers de ces cinquante ans de carrière :
« Évidemment, au fil des ans et de l’évolution des techniques, le terrain n’avait plus le même goût d’aventure
mais c’est toujours resté mon moteur. »
En 1987, il reçoit une demande de
« J’étais confronté devis pour la réfection d’une étanchéité réalisée par ses soins à la fin
à une nouvelle
des années quarante. « C’est peutdimension de
être un lieu commun de le reconmon travail
et pas forcément naître, mais constater qu’une étanla plus agréable : chéité a traversé plus de trente
années sans dégât a toujours été une
il a fallu
source de satisfaction et de fierté
restructurer,
réduire le champ durant ma vie professionnelle »,
avoue-t-il. Le devis en question, il
d’activité,
l’a malheureusement égaré. Peu
afin de remettre
importe, il se souvient encore des
l’entreprise
mètres carrés et même du comsur les rails. »
plexe installé soixante ans auparavant : « Faute d’isolant thermique, je
me rappelle avoir eu le réflexe de travailler en indépendance. » Le secret d’une telle mémoire ? Selon lui, il n’y
en a pas. « Disons simplement que j’ai toujours été passionné par mon métier. »
BASTIEN CANY
Un parcours d’entrepreneur
Réorganisation oblige, Dominique Zoccoli effectue un
court passage au siège de la nouvelle structure
comme directeur qualité. Ce n’est pas le poste rêvé
pour un homme dont le parcours et l’expérience en
font d’abord un entrepreneur. « Je m’éloignais de la
construction et de l’exploitation. Ces quelques mois
n’ont pas été les meilleurs moments de ma carrière »,
reconnaît-il. Très vite, il change de casquette. Dès
1980, il est nommé pdg de la nouvelle entité
Ruberoïd SA. Et affronte une nouvelle tempête. Car
les affaires vont mal, des agences doivent fermer.
Seule celle d’Antony résistera. « J’étais confronté à
une nouvelle dimension de mon travail et pas forcément la plus agréable : il a fallu restructurer, réduire le
champ d’activité, afin de remettre l’entreprise sur les
rails. » Opération douloureuse mais finalement réussie.
L E S D AT E S
> 1941 Entrée chez Ruberoïd, entreprise fondée en 1896.
> 1947 Technicien d’exécution puis cadre.
> 1970 Fusion de Ruberoïd et d’Acieroïd :
naissance du groupe Ferem.
> 1978 Smac absorbe Ferem.
> 1980 Nommé pdg de Ruberoïd SA.
> 1987 Élu conseiller prud’hommes, section industrie.
> 1988 Reçoit la grande médaille d’or du Travail.
> 1978 Smac absorbe Ferem.
> 1992 Départ en retraite.
> 2004 Reçoit la médaille des services professionnels
de la FFB.
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ACTUALITÉS >
MÉTIER
Le technicien de laboratoire
aux avant-postes de l’étanchéité
Physique, chimie, mécanique, et même microbiologie : dans l’étanchéité, le technicien
de laboratoire est un touche-à-tout de la R&D. Ce qui lui permet aujourd’hui d’être associé
à l’élaboration des projets de recherche, de la paillasse aux essais grandeur nature.
Le champ complet du génie des matériaux
Dans le secteur, la chimie reste évidemment la matière
reine. Mettre au point un nouveau produit d’étanchéité implique nécessairement de maîtriser l’art du
mélange et de la formulation. Du coup, mieux vaut
disposer de solides connaissances dans ce domaine.
Surtout pour travailler sur des formules de liants
bitumineux souvent complexes. La contrainte est plus
forte encore dans le domaine des solutions d’étanchéité liquide. « Il s’agit alors de concevoir des maté-
©Icopal
I
l n’est certainement pas un homme de terrain, du
moins au sens du bâtiment, porte plus souvent
une blouse qu’un casque de chantier et manie
davantage le spectromètre que le chalumeau. Enfin, il
faut le reconnaître, sa profession appartient moins au
monde de la construction qu’à celui de l’industrie. Et
pourtant, le technicien de laboratoire est bien aux
avant-postes de l’étanchéité. À plus forte raison lorsqu’il opère dans un service de recherche et développement. Sa première mission : mettre en application
les formules, les recettes à base de bitume et de polymères qui donneront naissance aux revêtements
d’étanchéité du futur. Deuxième phase, les soumettre
à une batterie d’essais afin d’en évaluer la résistance
et les performances. En résumé, il mélange, dose,
mesure, teste et observe, le tout en étroite collaboration avec un ingénieur. Un simple poste d’exécution ?
« Non, loin de là, corrige Yves Madec, ingénieur matériaux et responsable projet au centre R&D du groupe
Icopal à Mondoubleau (41). De plus en plus de centres
de recherche adoptent des organisations par projet. La
vision du technicien est donc moins segmentée. Il est
désormais associé à la conception des programmes de
développement et à la réflexion sur la manière de les
instrumenter. » La contrepartie : on ne lui demande
plus seulement de remplir un tableau de résultats
mais bel et bien de faire preuve d’esprit d’analyse et
d’être force de proposition.
D’OÙ VIENNENT-ILS ?
Le plus souvent des IUT, avec en poche un diplôme universitaire technologique, une licence professionnelle ou encore
un brevet de technicien supérieur. Les filières privilégiées :
- DUT Chimie option matériaux ou formulation ;
- DUT Mesures physiques ;
- DUT Sciences et génie des matériaux.
La liste des IUT proposant ces formations est accessible
sur le site www.sup.adc.education.fr/iutlst
riaux depuis la molécule jusqu’au produit fini, souligne
Rémi Perrin, directeur R&D de Soprema. C’est pourquoi les profils de purs chimistes y sont si appréciés. »
Conséquence : au départ, ceux qui sont le mieux
armés viennent des licences professionnelles, des
DUT et des BTS en chimie. Mais si ces filières sont privilégiées, elles n’ont pas pour autant le monopole du
recrutement. Car la recherche en étanchéité ne se
limite pas à la seule science de la matière et de ses
réactions. En fait, c’est le champ complet du génie des
matériaux qui est concerné. À chaque étape de
conception, il importe de tester, de mesurer et de
caractériser les produits. Et ce, tant sur un plan chimique que physique, mécanique et même parfois
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©Icopal
ACTUALITÉS >
microbiologique. Une fonction qui dépasse donc le
strict cadre de la R&D. « Elle intervient pour la veille
concurrentielle mais aussi comme support d’expertise,
explique Yves Madec. Il s’agira, par exemple, d’identifier
des problèmes rencontrés durant la vie d’un matériau ou
d’aider à orienter le choix d’une solution de réfection. »
Définir les procédures de tests
Cette dimension analytique a pris une place croissante dans les laboratoires. Progrès de l’instrumentation aidant, les données produites sont toujours plus
fines. Parallèlement aux mesures classiques de viscosité, de point de ramollissement ou encore de pénétrabilité à l’aiguille, certains se lancent dans la physique comportementale des matériaux. La rhéologie
dynamique dans le jargon scientifique. « On recherche
notamment, sur un domaine de températures, des
phases de transition dans le comportement plastique et
élastique des revêtements, précise le responsable de
laboratoire du groupe Icopal. Avec ce type d’analyse,
nous sommes capables d’évaluer et d’anticiper les performances des matériaux. » Résultat : depuis longtemps
déjà, les laboratoires élargissent leur recrutement audelà des filières de la chimie. Et ouvrent de plus en plus
leurs portes à d’autres compétences. Parmi les profils
On ne lui
demande plus
seulement
de remplir
un tableau
de résultats
mais bel et
bien de faire
preuve d’esprit
d’analyse et
d’être force
de proposition.
LES QUALITÉS QUI FERONT LA DIFFÉRENCE
- La rigueur dans la réalisation du travail expérimental.
- L’esprit d’analyse.
- La capacité à être force de proposition dans les projets de développement.
- L’aptitude à travailler en équipe dans une organisation par projet.
- La polyvalence.
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< La recherche en
étanchéité ne se limite
pas à la science de la
matière. À chaque
étape, il importe
de tester, de mesurer
et de caractériser
les produits.
Du coup, certains
techniciens se lancent
dans la physique
comportementale
des matériaux.
recherchés, les diplômés d’un DUT Mesures physiques
voient s’ouvrir de belles perspectives. Avec de l’expérience, ils participent à la définition des procédures de
tests, à la mise en place des essais, voire au développement d’équipements de mesure spécifiques. Quant aux
plus autonomes, ils pourront prendre en charge la fonction métrologie au sein du laboratoire. Un poste clé,
surtout à l’heure du marquage CE.
Toujours plus loin dans les essais
La matière première du technicien : le bitume, bien
sûr, et les revêtements qui découlent de sa transformation. Toutefois, aujourd’hui, son champ d’investigation va bien au-delà. Les produits d’étanchéité
liquide et les colles sont devenus des axes de développement de premier plan. Plus question de rester
rivé devant sa paillasse. « Nos techniciens doivent aller
sur le terrain. On intervient toujours plus loin dans les
essais d’application », constate Yves Madec. Et Rémi
Perrin d’ajouter qu’il est évident « que les produits doivent être en adéquation avec leurs conditions d’utilisation et avec leurs utilisateurs ».
Les grands thèmes de recherche pour ceux qui rentreront demain dans le métier ? La simplification et la fiabilisation de la mise en œuvre, sujet récurrent mais
porteur, et à coup sûr l’environnement, à travers notamment le recyclage des déchets. Quant aux possibilités
d’évolution, certains préféreront bifurquer vers la production ou la qualité en visant éventuellement des
postes d’encadrement. Mais les plus motivés pourront
jouer la carte de la validation des acquis de l’expérience (VAE) et décrocher un diplôme d’ingénieur, sésame
pour gravir rapidement les échelons dans la R&D. BC
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ACTUALITÉS >
COMMISSION SÉCURITÉ
Les filets souples n’ont plus la cote
Remis en cause par le décret sur le travail en hauteur, les filets de protection souples sont aujourd’hui
au cœur des discussions entre la Commission sécurité et les acteurs de la prévention. L’enjeu : trouver une
solution qui réponde à la fois aux exigences du décret et aux contraintes de mise en œuvre des étancheurs.
est l’un des dossiers
chauds de la profession
et probablement aussi
l’un des plus discutés à la CSFE.
Mais le débat autour des protections en rives apparaît également
comme l’un des meilleurs exemples du rôle joué par la Commission sécurité, présidée par Pierre
Thévenon, au sein du métier. Dès
la fin 2004 et la publication du
décret sur le travail en hauteur,
ses membres se sont naturellement retrouvés en première ligne
sur cette question. Et rapidement,
il a fallu prendre position sur un
texte qui mettait les professionnels au pied du mur et suscitait
une foule de questions. En cause :
l’article R 233-13-20 qui réclame
que la prévention des chutes de
hauteur soit désormais assurée
« par des garde-corps, intégrés ou
fixés de manière sûre, rigides et
d’une résistance appropriée » ou
« par tout autre moyen assurant
une sécurité équivalente ». A priori,
l’exigence est claire. Mais pour les
étancheurs, elle soulève un problème de taille : que faire des milliers de mètres de filets souples
couramment utilisés sur les toitures ? Et surtout, s’il faut les remiser au placard, par quels dispositifs les remplacer ? « Les réponses
bien sûr ne sont pas simples, reconnaît un membre de la Commission
sécurité. Notre premier travail a
consisté à établir le contact avec les
représentants de l’OPPBTP et de
la CNAM qui, naturellement, s’en
tenaient à une interprétation à la
lettre du décret. Aujourd’hui, le dialogue est engagé et ces discussions
devraient aboutir, du moins on l’espère, à une issue positive. »
C’
Difficultés d’interprétation
Au sein de la commission, on préfère pour le moment rester prudent et ne pas s’avancer sur les
solutions qui se dessinent. Toutefois, un document intitulé Engagement de la profession vient d’être
diffusé. Il demande à l’ensemble
des acteurs concernés – CRAM,
Inspection du travail, partenaires
sociaux – un temps de réflexion et
de recherche pour améliorer encore l’efficacité des systèmes utilisés
par les entreprises. Reste aussi à
éclaircir certaines difficultés d’interprétation et notamment la
notion, jusqu’à présent plutôt
S’il faut les
remiser au
placard,
par quels
dispositifs
les remplacer ?
* « Garde-corps périphériques temporaires. »
© S i p l a s t / D . E s ke n a z i
<
Les filets de
protection souples
ont depuis
longtemps les
faveurs de la
profession.
Bien que leur
utilisation fasse
aujourd’hui l’objet
d’un débat,
les étancheurs
estiment qu’ils
ont fait la preuve
de leur fiabilité.
vague, de « moyen assurant une
sécurité équivalente ». Une circulaire
précise aujourd’hui qu’il s’agit des
protections périphériques conformes
à la norme NF EN 13374*. Mais le
flou demeure quant aux situations
de travail autorisant le recours à
ces systèmes alternatifs. Sur ce
point, la CSFE a saisi la Direction
des relations du travail. L’objectif :
donner officiellement au secteur
de l’étanchéité la possibilité d’employer ces dispositifs équivalents.
« Car sur ce dossier encore plus
qu’ailleurs, explique-t-on au sein
de la commission, notre rôle
consiste à apporter une réponse
rapide à des entreprises qui n’ont
généralement ni le temps ni les
moyens de faire face seules aux
nouveaux enjeux de sécurité que
pose l’évolution des réglementations. »
BC
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DOSSIER >
©Horizal
< Intégrés dès la
conception du
bâtiment, les
garde-corps règlent
définitivement
la question des
risques de chute
en périphérie des
terrasses. Pour le
maître d’ouvrage,
cette solution reste
le meilleur moyen
de répondre aux
exigences des
principes généraux
de prévention.
PRÉVENTION DES CHUTES DE HAUTEUR
Quelles obligations
pour le maître d’ouvrage ?
Depuis plus de dix ans, les maîtres d’ouvrage ont l’obligation de respecter les principes généraux
de prévention. Si le neuf semble avoir intégré cette nécessité, il n’en va pas de même dans l’ancien,
où elle se heurte à certaines difficultés d’application.
est sans doute l’une des
plus grandes opérations
de mise en sécurité de
bâtiments. Un marché de sept millions d’euros, rien que pour les
départements de l’Essonne et du
Val-d’Oise. Cinq cents terrasses
équipées en quatorze mois de
mille lanterneaux et de quatrevingt mille mètres linéaires de
garde-corps. Les chiffres sont
imposants. Ce sont ceux du chantier lancé en 2004 par Immobilière 3F. Mais si elle est exemplaire, l’initiative du premier bail-
C’
leur social de France n’en reste pas
moins un cas isolé. Car rares sont
ceux qui consentent, une fois l’ouvrage achevé, à de tels investissements. « La prise de conscience n’a
pas encore eu lieu, confirme Patrice
Devaux, ingénieur prévention au
sein de l’OPPBTP*, alors que, paradoxalement, la loi du 31 décembre
1993 est parfaitement explicite. »
Pour la première fois, un texte définissait alors les obligations du
maître d’ouvrage en matière de
sécurité, et ce quelle que soit la
destination du chantier. Cette loi,
Les conséquences
pour les
professionnels
de l’étanchéité ?
Elles sont
à rechercher
dans le Code
du travail.
que dit-elle ? Premièrement, que
l’application des principes généraux de prévention n’incombe plus
aux seules entreprises de construction, mais bien à toutes les personnes intervenant sur le chantier.
Y compris, et c’est clairement
exprimé, aux maîtres d’ouvrage.
Deuxièmement, que ces mêmes
principes doivent être pris en
compte lors des choix architecturaux et techniques, autrement dit
être intégrés dès la conception du
bâtiment. Mais le texte va plus loin
encore. En exigeant du maître
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d’ouvrage la constitution d’un dossier
d’intervention ultérieure (DIUO), il
rappelle que ses responsabilités en
matière de sécurité s’exercent
aussi bien avant que pendant, et
même après les travaux.
Réticences financières
et esthétiques
Pour répondre
aux préoccupations
esthétiques des
maîtres d’ouvrage,
tous les fabricants
proposent
désormais dans
leur gamme
des garde-corps
inclinés.
©Horizal
<
Les conséquences pour les professionnels de l’étanchéité ? Elles sont
à rechercher dans le Code du travail. Et plus exactement dans l’article L 230.2 qui prescrit, au titre
des grands principes de prévention
à respecter, la nécessité de « prévoir
des mesures de protection collective
en leur donnant la priorité sur les
protections individuelles ». Une exi-
18 ·
gence récemment précisée par le
décret du 1er septembre 2004 sur
les travaux en hauteur : « La prévention des chutes de hauteur est
assurée en premier lieu par des
garde-corps intégrés ou fixés de
manière sûre, rigides et d’une résistance appropriée. » On le sait, la
mesure est à double tranchant
pour le monde de l’étanchéité.
D’un côté, elle remet en question
le devenir des filets souples, couramment utilisés par les professionnels du secteur. De l’autre, en
revanche, elle ne laisse guère de
doute sur les moyens à déployer
par le maître d’ouvrage. D’autant
plus que la loi du 31 décembre
1993 ne retient pas le motif d’impossibilité technique. Il revient
donc au concepteur de modifier
son projet pour y implanter des
garde-corps définitifs. Le font-ils
pour autant ? De l’avis des observateurs, une majorité de bâtiments neufs intègre aujourd’hui
des protections collectives en terrasses. Tandis que le constat s’inverse radicalement dans le cas des
constructions anciennes. « Il est
toujours difficile de faire accepter au
propriétaire d’un bâtiment d’une trentaine d’années l’idée de l’équiper en
garde-corps à l’occasion, par exemple,
d’une réfection d’étanchéité», reconnaît Patrice Devaux.
Les freins : le coût bien sûr, mais
aussi une méconnaissance de
leurs responsabilités. « Certains
n’ont pas conscience qu’il pourra
leur être reproché d’avoir privilégié
une protection individuelle ou temporaire alors qu’aucune contrainte
technique ne les empêchait d’installer un garde-corps permanent et
rigide », explique l’ingénieur de
l’OPPBTP. Quant au coût : inspecteurs du travail et professionnels
de la prévention y voient généralement un faux problème, tant
ÉTANCHÉITÉ.INFO · NUMÉRO 10 · JUIN 2006
LES TROIS
TEXTES CLÉS
• Loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991.
Intégré au Code du travail (L 230.2 et
L 230.5), ce texte décline les grands
principes de prévention. C’est lui
également qui a institué l’évaluation
des risques comme la pierre angulaire
de toute démarche de prévention.
• Loi n° 93.1418 du 31 décembre 1993.
Elle modifie les dispositions du Code
du travail applicables aux opérations
de bâtiment et de génie civil en vue
d’assurer la sécurité et de protéger
la santé des travailleurs.
• Décret du 1er septembre 2004
relatif à l’utilisation des équipements
de travail mis à disposition pour des
travaux en hauteur. Voir notamment
les articles R 333.13.20 à R 333.13.26
du Code du travail.
dans le neuf que dans l’ancien.
Certes, l’investissement dans un
garde-corps n’est pas négligeable
et peut en pousser plus d’un à
opter pour un dispositif antichute
individuel réputé plus économique. À long terme toutefois, les
données changent. Au coût initial
d’une ligne de vie, environ cent
euros le mètre linéaire, s’ajoutent
la maintenance et les vérifications
obligatoires cumulées sur une
vingtaine d’années. Sans compter
la nécessité pour l’entreprise intervenante de disposer de systèmes
antichute adaptés et de former ses
salariés à leur utilisation. Au final,
le bilan économique reste bien
souvent en faveur de la protection
collective.
Aux réticences financières s’ajoutent parfois des préoccupations
esthétiques. Certains misent alors
sur une voie intermédiaire et se
contentent de prévoir les supports
de garde-corps rigides tempo-
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DOSSIER >
©Siplast
< Il est possible
de concevoir une
toiture de manière
à ce que l’acrotère
joue lui-même le
rôle de protection
collective.
Seules contraintes :
sa hauteur,
minimum 1,10 m,
et sa résistance
qui devra être
équivalente à celle
d’un garde-corps
normalisé.
raires. « Cette stratégie est loin
d’être totalement satisfaisante, prévient cependant Patrice Devaux. Il
faudra encore que les maîtres d’ouvrage définissent soit dans l’évaluation des risques, soit dans le DIUO,
la manière d’installer en sécurité ces
protections provisoires. » Les solutions ? La première, standard,
passe par le recours à des gardecorps inclinés. Grâce à des fixations déportées, ce type de dispositif contribue à dissimuler les montants à l’intérieur de la terrasse. La
seconde consiste à concevoir la terrasse de manière à créer, en périphérie, un acrotère continu d’au
moins 1,10 mètre de hauteur. À ce
niveau, c’est incontestablement les
qualités de l’architecte qui doivent
s’exprimer. Et là, toutes les configurations sont imaginables.
Mise en sécurité des ouvertures
La loi de 1993 et le décret de septembre 2004 ont inévitablement
focalisé l’attention sur les protections au pourtour des terrasses. Au
risque de passer sous silence la
question des exutoires, voûtes,
lanterneaux et autres ouvertures.
Et pourtant, ces équipements, dès
lors qu’ils impliquent un risque de
chute, sont soumis aux mêmes
principes généraux de prévention.
Il est vrai que pour la majorité
d’entre eux, la mise en sécurité se
résume à la seule application de la
règle dite des 1 200 joules. Un essai
qui consiste à déterminer la résistance de leur remplissage à la traversée d’un sac simulant la chute
d’un corps mou de 80 kg tombant
de 1,50 mètre. « La quasi-totalité
des CCTP qui nous sont adressés
prescrivent aujourd’hui ce niveau de
résistance », constate Sylvain Belloir
d’Axter Skydôme. La règle semble
donc passée dans l’usage. Sauf que
le protocole de test mis au point
par le GIF** n’est jusqu’à présent
inscrit dans aucune norme ni
même dans le référentiel rattaché
au marquage CE des exutoires
(NF EN 12101-2). Aux maîtres
d’ouvrage alors de s’assurer que
les dispositifs installés répondent
bel et bien à cette préconisation,
recommandée à la fois par les
CRAM et l’INRS. À eux également
d’évaluer la sécurité des équipements permettant, outre l’évacuation des fumées et l’éclairement,
l’accès aux toitures.
Quelle protection antichute ces
appareils offrent-ils en position
AVA N T, P E N D A N T E T A P R È S L E C H A N T I E R
Impliquer les maîtres d’ouvrage dans la sécurité
de leur bâtiment avant, pendant et après leur
construction. Même dix ans après sa
publication, cela reste l’un des grands apports
de la loi de décembre 1993. Bien sûr,
aujourd’hui encore ce principe est loin d’être
une évidence pour tous. Bien sûr, le texte
rappelle en même temps les obligations de
chaque intervenant, maîtres d’œuvre comme
entreprises de construction. Mais son principal
mérite reste avant tout d’avoir enfin replacé
le maître d’ouvrage au cœur de la démarche
de protection des travailleurs du bâtiment.
De quelle manière ?
1/ En rappelant aux donneurs d’ordre leurs
obligations d’intégrer les principes généraux
de prévention dans leurs choix architecturaux
et techniques, ainsi que dans l’organisation des
chantiers. Parmi ces grandes règles : la nécessité
de privilégier les mesures de protection collective
en leur donnant la priorité sur les mesures
de protection individuelle (article L 230.2
du Code du travail). Sur une toiture-terrasse,
cette disposition implique de favoriser
systématiquement les garde-corps plutôt
que des dispositifs de type lignes de vie.
2/ En exigeant du maître d’ouvrage, dès que
le chantier implique plus d’une entreprise,
qu’il désigne un coordonnateur sécurité
et protection de la santé (SPS) avant même
la phase d’élaboration du projet.
3/ En instituant le dossier d’intervention
ultérieure sur ouvrage (DIUO) qui rassemble
toutes les données de nature à faciliter
la prévention des risques professionnels lors
des opérations de maintenance et d’entretien.
C’est précisément ce dossier qui devra présenter
les conditions de sécurité mises en place pour
accéder à la toiture et y travailler.
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DOSSIER >
©Skydôme
après coup ne sont pas forcément
testées et ne fournissent aucune
garantie quant à leur résistance. »
Enfin, il importe d’effectuer
des vérifications périodiques sur ces systèmes
de sécurité.
Partage
des responsabilités
Évaluer les risques, appliquer les
principes généraux de prévention
et surtout les intégrer dès la
conception du bâtiment : sur le
papier au moins, les obligations des
maîtres d’ouvrage sont désormais
parfaitement définies. Pour autant,
leur responsabilité sera-t-elle réellement engagée ? « À l’exception des
constructions concernant des lieux
de travail, estime Patrice Devaux,
les inspecteurs ne disposent pas de
moyens répressifs suffisants pour
verbaliser un maître d’ouvrage sur
le simple non-respect des principes
de prévention. » Quant à leur mise
* OPPBTP : Organisme professionnel de
prévention du bâtiment et des travaux
publics.
* * G I F : Groupement des installateurs et
fabricants-installateurs de matériels
coupe-feu et d’évacuation de fumées.
En matière
d’ouvertures
installées en
terrasses, la règle
à respecter est
simple : leur capot
doit afficher une
résistance de
1 200 joules.
Une énergie qui
correspond à la
chute d’un corps
mou de 80 kg
tombant de
1,50 mètre.
L’essai est réalisé
à l’aide d’un sac
de 50 Kg.
©Skydôme
ouverte ? La plupart
des fabricants répondent à cette
question en proposant des grilles
métalliques résistant à 1 200 joules.
« Cette solution s’impose progressivement sur le marché. Mais c’est
généralement à l’occasion d’une
mise en conformité de leur matériel
de désenfumage que les maîtres
d’ouvrage se penchent sur cet
aspect de la sécurité », note
Sylvain Belloir, mettant en garde
au passage contre la tentation
d’intervenir sur les costières de
dispositifs déjà en place : « Ces
grilles fabriquées et rapportées
© S M AC
> Capot ouvert,
la grille de cet
exutoire résistant
à 1 200 joules
assure une
protection
antichute.
en cause en cas d’accident…
Seule indication pour y voir plus
clair : les retours d’expérience du
décret du 20 février 1992 fixant
les prescriptions d’hygiène et de
sécurité relatives aux travaux
effectués dans une entreprise par
une société extérieure. « Ce texte,
explique-t-on au sein de la FFB, a
d’ores et déjà généré une jurisprudence statuant sur le partage des
responsabilités entre le chef d’entreprise et l’entrepreneur intervenant. » Qu’en est-il lorsque les travaux se déroulent dans un bâtiment autre qu’un lieu de travail ?
Les juges engageront-ils la responsabilité des maîtres d’ouvrage ? Une chose est sûre : la loi
de 1993 le leur permet. Et la jurisprudence devrait les y inciter. BC
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C R É D I T A G R I C O L E D E B R E TA G N E
<
L’étanchéité du
premier étage est
protégée par une
végétalisation
extensive.
Au rez-de-chaussée,
outre la terrasse
en platelage bois,
ont été installés
un parking, une
terrasse jardin
et des zones
circulables
en dalles béton.
Exercice de style sur
terrasses multiples
Pour les étancheurs, ce nouveau bâtiment du Crédit Agricole pourrait presque passer
pour un cas d’école : des délais courts, comme toujours. Et surtout, une diversité rare
de toitures-terrasses qui implique d’optimiser les solutions techniques.
e bâtiment n’affiche pas des dimensions exceptionnelles : deux étages pour environ 4 500 m2
de surface. Et pourtant, il est à lui seul une
sorte de synthèse de la toiture-terrasse. Toutes ou
presque y sont représentées : terrasses jardins, parkings, terrasses végétalisées ou encore dalles sur
plots. Implantés à Vannes, les locaux abritent aujourd’hui l’ensemble de l’informatique du Crédit Agricole
pour la région Bretagne. Une destination qui n’a pas
été sans conséquence sur le lot étanchéité. Planifié
pour l’automne 2005, le regroupement informatique,
prévu de longue date, rendait impératif une livraison
en octobre. « Il a fallu s’insérer dans un créneau serré,
à peine quatre mois », confirme Benoît Chauvin,
chargé d’affaires pour l’entreprise O. Hervieux, retenue pour l’étanchéité. Sur ce point, pari gagné, le
chantier a été réalisé en temps et en heure.
L
Mais pour l’entreprise bretonne, l’intérêt de l’opération résidait avant tout dans la diversité des terrasses
à traiter. À l’étage supérieur d’abord, où l’originalité
se trouve moins dans le complexe d’étanchéité – un
revêtement bicouche autoprotégé – que dans la solution d’évacuation des eaux : un système à mouvement
siphoïde. Pour le principe de fonctionnement, les
curieux pourront se reporter au théorème de
Bernoulli et aux notions de conservation de l’énergie
dans la mécanique des fluides. Pour les autres, l’essentiel à retenir, c’est qu’à la différence des techniques conventionnelles, l’air et la gravitation ne
jouent ici aucun rôle dans l’écoulement des eaux pluviales. En conséquence, pour des débits et une superficie donnés, il est possible de diminuer le diamètre
des canalisations et les pentes deviennent inutiles au
niveau des collecteurs. « Un avantage qui s’est avéré
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< À défaut de
garde-corps, la
sécurité est ici
assurée par une
ligne de vie.
> Pour l’architecte,
le rez-de-chaussée
ne devait pas donner
aux visiteurs
l’impression d’être
sur un terrasse
surélevée.
décisif pour cette toiture, souligne Gwenaël Lebaron,
du cabinet d’architecture In Situ. Il s’agissait de
regrouper les descentes d’évacuation sur une seule
extrémité du bâtiment. Seuls ces systèmes permettaient
de parcourir les soixante mètres de toiture avec des
canalisations horizontales.»
Des relevés invisibles
Difficulté supplémentaire, ceux du dernier étage ont
justement une vue plongeante sur la terrasse inférieure. Du coup, pour l’architecte, pas question de
recourir à ce niveau à une étanchéité autoprotégée ou
avec protection gravillonnaire. Une préoccupation
esthétique qui a conduit au choix d’un complexe végétalisé sur une surface d’environ 500 m2. Le système
installé obéit en tous points aux règles de l’art. Côté
étanchéité : un revêtement bicouche en bitume
modifié SBS, directement soudé sur l’isolant thermique. En périphérie des terrasses, une zone stérile a
été aménagée afin de permettre le contrôle des relevés et de faciliter les opérations d’entretien. Quant à
la végétalisation, un tapis composé de plusieurs variétés de sedums et livré précultivé a fourni un résultat
immédiat. La suite du complexe est plus traditionnelle :
le substrat nécessaire à l’ancrage des racines et à la
nutrition des plantes se compose principalement
d’éléments minéraux et organiques. Enfin, sous la
couche filtrante, des plaques perforées en polystyrène
expansé assurent l’évacuation de l’eau en excès, évitant ainsi l’asphyxie des racines.
Posé sur pilotis, le rez-de-chaussée obéit quant à
lui à une véritable logique de terrasses multiples.
Sur 2 200 m2, il reçoit un parking, un jardin et des
zones accessibles aux piétons. « Nous souhaitions que
26 ·
À l’étage
supérieur,
l’originalité
est moins dans
le complexe
d’étanchéité
que dans la
solution
d’évacuation
des eaux :
un système
à mouvement
siphoïde.
ÉTANCHÉITÉ.INFO · NUMÉRO 10 · JUIN 2006
les visiteurs qui arrivent sur le site n’aient pas l’impression d’être sur une terrasse surélevée », explique
l’architecte. Résultat : toutes les protections, qu’il
s’agisse de l’enrobé, de la terre végétale ou du platelage bois, sont affleurantes et continues. Et aucun
relevé n’est visible. Face à cette diversité d’emploi des
terrasses, multiplier les systèmes d’étanchéité aurait
été une erreur. La solution ? Utiliser un revêtement
multi-usage et antiracine afin de réaliser sans discontinuité l’étanchéité des terrasses jardins et de
leurs zones circulables en dalles béton et platelage
bois. Dans cette configuration, le muret de séparation est alors installé sur le revêtement et non sur le
support en maçonnerie. Seule la partie parking sera
étanchée à l’aide d’un revêtement bitumineux monocouche associé à un enrobé. « Pour nous, ce chantier
représente une double réussite, conclut Benoît
Chauvin. D’abord parce qu’il a été effectué dans les
temps. Ensuite, parce qu’il a fallu gérer le plus intelligemment possible ces différentes terrasses, tout en
apportant les solutions les mieux adaptées. »
BC
LES INTERVENANTS
Maître d’ouvrage : Crédit Agricole
Architectes : Cabinets In Situ (Nantes) et Guiolet-Belbeoc’h
Économiste : PMC
Entreprise d’étanchéité : O. Hervieux
Complexe végétalisé : Le Prieuré
Produits d’étanchéité : Siplast-Icopal
• Terrasse supérieure : Paradienne R3 + Paradienne 30
• Terrasse végétalisée : Paradienne SVV + Graviflex
• Terrasses jardins et zones piétonnes : procédé Gravi
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© Pyc
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AQUARIUM DU TROCADÉRO
<
La dalle d’accès
pompiers fait face
à l’entrée de
l’aquarium, la seule
installation visible
de l’extérieur.
Car pas question
de défigurer
un site classé
aux Monuments
historiques.
Sous l’étanchéité,
les vagues
S’il a raté son entrée sur la scène médiatique, l’aquarium du Trocadéro n’en reste pas moins
une vraie réussite architecturale. Parfaitement intégrée au site, cette structure de béton
armé est totalement dissimulée sous une succession de terrasses jardins.
T
rois concours publics annulés coup sur coup.
Un feuilleton juridico-financier de vingtquatre mois mettant en cause les conditions
d’attribution du marché par la Mairie de Paris au
groupe japonais Morita. Et enfin, une fuite dans le
grand bassin repoussant d’un mois encore l’ouverture
des installations. La reconstruction de l’aquarium du
Trocadéro se voulait une opération médiatique. C’est
réussi. Mais son nouveau gestionnaire, la Scat, n’espérait sûrement pas ce genre de publicité. Si ces
mésaventures à répétition ont fait couler de l’encre,
elles ont aussi relégué au second plan la dimension
technique d’un chantier qui reste malgré tout l’un des
plus importants de l’année 2005 dans la capitale.
L’idée : redonner vie au premier aquarium construit
en 1878, à l’occasion de l’Exposition universelle, et
fermé en 1985 pour des raisons de sécurité. Sur le
plan architectural, le projet reste incontestablement
une réussite.
L’ouvrage est complexe : un casse-tête de niveaux, de
volumes et de formes courbes. Coincée entre le palais
de Chaillot et l’avenue des Nations-Unies, la structure
et ses 10 000 m2 de béton armé ont été enterrés en
lieu et place de l’ancien aquarium. Car pas question
de toucher au site prestigieux et classé aux
Monuments historiques. Seule installation visible de
l’extérieur : l’entrée, avec son auvent censé évoquer la
forme d’une vague. Quant au cœur du site – quarantetrois bassins, quatre salles de cinéma, trois studios et
un plateau de télévision –, il est entièrement dissimulé sous une succession de terrasses jardins.
Des difficultés d’accès
Il faudra un peu plus d’un an aux équipes de Linéa BTP
pour étancher la totalité de ces 6 000 m2 de surface.
« Comme souvent, notre intervention était prise entre le
marteau et l’enclume, explique Madjid Brouk, responsable du département étanchéité pour l’Île-de-France.
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© Linéa BTP
D’un côté, nous étions tributaires de la réception des supports, et les blocages n’étaient pas rares. De l’autre, il fallait respecter un phasage des travaux contraignant. »
Une opération où l’étanchéité va être particulièrement exposée. Le site est étroit, rapidement envahi
par les différents corps d’état. Et surtout, l’accès à
l’aquarium implique forcément un passage par les terrasses. Durant toute la durée du chantier, trois trémies en surface vont rester ouvertes afin de permettre
l’acheminement du matériel jusqu’aux entrailles de
l’installation. Une contrainte à laquelle s’ajoute
une menace supplémentaire : la terre végétale.
Quelques milliers de mètres cubes seront rapportés
sur les différents niveaux de jardin. À cette étape, le
risque est que les dégradations du revêtement passent tout simplement inaperçues.
< Protection
en dalles béton
désactivé pour
la rotonde,
qui associe une
terrasse jardin
et une zone
piétonnière.
zone de 1 000 m2 dimensionnée pour recevoir des
véhicules lourds et entièrement protégée par un dallage en béton coulé de 12 cm.
En fait, seules certaines terrasses de l’entresol et
quelques loggias seront étanchées à l’aide d’un
revêtement bicouche élastomère, « uniquement en
raison de difficultés d’accès qui rendaient impossible la
mise en œuvre de l’asphalte », précise Madjid Brouk.
« Toutes les équipes étaient encordées »
Au cœur des jardins
trône le seul
vestige du premier
aquarium construit
en 1878.
Feuille bitumineuse et asphalte gravillonné
La première préoccupation sera donc de protéger
l’étanchéité. Comment ? D’abord par le choix d’un
système en isolation inversée pour la plupart des terrasses. Un moyen simple d’améliorer la résistance à
la compression du complexe, grâce notamment ici à
l’utilisation d’un isolant en polystyrène extrudé.
Ensuite, la stratégie consistera à employer une étanchéité mixte. Association vertueuse d’une feuille
bitumineuse manufacturée et d’un asphalte gravillonné réputé pour sa robustesse et sa bonne tenue
face aux aléas de chantier. Avantage non négligeable : il est aussi naturellement antiracine. C’est
également cette configuration qui sera retenue pour
l’accès pompiers face à l’entrée de l’aquarium, une
30 ·
© Pyc
> Un site étroit,
6 000 m2 de surface
à étancher, des
milliers de mètres
cubes de terre et
plusieurs niveaux
de terrasses jardins:
le chantier cumulait
les difficultés.
ÉTANCHÉITÉ.INFO · NUMÉRO 10 · JUIN 2006
Dernier ouvrage de taille à traiter, l’escalier principal et
sa paroi porteuse. Une paillasse de 250 m2 plongeant à
l’intérieur du site. Pas d’asphalte évidemment sur ce support incliné, mais un revêtement bitumineux avec une
deuxième couche renforcée par une armature en polyester non tissé de 180 g/m2. Seule véritable particularité :
le nombre important d’émergences à étancher, principalement des plots en béton, solidaires de la paillasse et
placés là pour éviter des phénomènes de ripage sur l’escalier accroché en tête. « Techniquement, ce type de
points singuliers ne pose guère de difficultés, concède le
responsable de Linéa BTP. Toutefois, au vu de la pente,
toutes les équipes étaient encordées. Ce qui tendait bien
sûr à compliquer le déroulement des opérations. »
Pour le moment, le public se contentera d’admirer cet
ensemble de terrasses, l’unique partie visible de
l’aquarium. Quant aux quinze mille poissons de cinq
cents espèces différentes et aux animations audiovisuelles, il faudra encore patienter. Repoussée de
semaine en semaine depuis mars, l’ouverture a finalement été reportée à la mi-juin. Restera alors pour le visiteur à s’acquitter d’un ticket d’entrée au tarif plutôt salé
de vingt-cinq euros par personne.
BC
LES INTERVENANTS
Maître d’ouvrage : Scat, Société de construction
de l’aquarium du Trocadéro, filiale du groupe Morita
Maîtrise d’œuvre : cabinet MP&A – Christian Marina et Gérard Philippick
Gros œuvre : Lainé-Delau
Étanchéité : Linéa BTP (Agence Île-de-France)

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