Lettre au ministre Christian Paradis dans le cadre de la consultation

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Lettre au ministre Christian Paradis dans le cadre de la consultation
Le 23 avril 2015
Monsieur Christian Paradis
Ministre du Développement international et de La Francophonie
Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario)
K1A 0G2
Monsieur le ministre Paradis,
Nous avons récemment été informés de l’état des négociations intergouvernementales aux
Nations unies en vue de l’adoption de l’agenda du développement pour l’après 2015. Nous
sommes inquiets de constater que l’ébauche d’objectifs de développement durable (ODD)
élaborée par le Groupe de travail ouvert accorde une place très limitée à la culture. Bien qu’il
s’agisse d’un pas dans la bonne direction par rapport aux Objectifs du Millénaire pour le
développement adoptés en 2000, force est de constater que le pouvoir transformateur de la
culture est encore bien mal compris. Pourtant, au cours de la dernière décennie, la communauté
internationale a pu vérifier à de nombreuses reprises en faisant le bilan de projets de
coopération que ceux qui ne prenaient pas suffisamment en compte la culture étaient voués à
l’échec.
Dans son rapport de synthèse déposé le 4 décembre dernier, La dignité pour tous d’ici à 2030 :
éliminer la pauvreté, transformer nos vies et protéger la planète, le secrétaire général de l’ONU
Ban Ki-moon a été on ne peut plus explicite quant au rôle facilitateur de la culture :
“Nous devons également mobiliser le pouvoir de la culture dans ce changement transformateur
que nous voulons. Notre monde est une mosaïque de cultures, qui reflète la diversité de nos
conceptions du développement durable. Il nous faudra encore beaucoup apprendre des
différentes cultures qui nous entourent pour pouvoir bâtir le monde que nous nous sommes choisi.
Si nous voulons y parvenir, les nouveaux objectifs de développement durable ne pourront pas
rester l’apanage des institutions et des États. Il faudra que le peuple les fassent siens. Par
conséquent, la culture, dans tous ses aspects, jouera un rôle important dans la réalisation du
nouveau programme d’action.” (Para. 132)
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Monsieur le Ministre, les 193 États membres de l’ONU adopteront en septembre prochain
l’agenda du développement qui guidera leur action pour les 15 prochaines années. Nous
pensons que le Canada devrait soutenir les propositions du secrétaire général Ban Ki-moon
concernant la culture, en reconnaissant pleinement son rôle moteur et facilitateur pour le
développement durable, dans la déclaration politique qui coiffera l’agenda du développement.
Nous sommes convaincus que la réalisation de l’objectif de la santé des mères, des nouveau-nés
et des enfants et les autres priorités du Canada pour l’agenda du développement post-2015 ne
pourra se réaliser de façon durable que si le contexte culturel est pris en compte. Pour
reprendre le mot du poète-président sénégalais Léopold Sédar Senghor, « la culture est au
début et à la fin de tout développement ».
En voici un exemple éloquent présenté par Sir Fazle Abed, le directeur et fondateur de la
Fondation BRAC du Bangladesh, une ONG de développement qui emploie 120 000 personnes
dans le monde, lors du congrès de Hangzhou de mai 2013 qui portait sur le thème « La culture :
clé du développement durable » :
Let me explain from an example that we have experienced in Bangladesh, as to how culture
becomes absolutely essential in terms of designing programs that work. In 1979 it was the
international year of the child. At that time in Bangladesh infant mortality was: under one year
old mortality used to be 135 per 1000, and under five years old mortality used to be 252 per 1000.
We thought that we need to something about that, we found that diarrhea kills more than half
the children, under five years old. So we have to tackle diarrheal mortality in Bangladesh. We took
up the program to go and teach mothers how to make oral rehydration fluid at home in order to
combat diarrheal rehydration and death in the households. So we decided to set up a group of
oral rehydration workers who would go and teach one woman in every household how to make
oral rehydration fluid at home and how to administrate it.
So first 30 000 houses was visited by our oral rehydration workers and we sent out a group of
monitors to test how many of the families who have been taught were using oral rehydration in
their household. We found only 6% per cent in the households visited used oral rehydration to
combat diarrhea in their household, we were very disappointed but very quickly found out that
our oral rehydration workers themselves did not believe in oral dehydration. Therefore if the
teacher doesn’t believe in something the kind of teaching that it goes on is not very effective and
persuasive, so we had to bring up all oral rehydration workers and teach them exactly how
efficacious oral rehydration program is, once they were convinced they went back again and then
they went to another 30 000 households we again sent out a group of monitors to find out how
oral rehydration programmes were used and at that time it came up to 19%. We were very
unhappy about the results of this programme because 81 % of the households who had diarrhea
in the household did not use oral dehydration.
So we sent out a group of anthropologists to check why 81% of the women having diarrhea in the
household did not use oral rehydration and we very quickly found out that the men in the
household did not encourage the women to use oral rehydration because they had not been told
anything about this programme. We had to redesign the programme, bring men in that, so our
programmes were designed only for women teaching women and hoping that the women in the
household would take action. Then we redesigned the programme before we went from house to
house, we decided to have meeting with all the men in the village tell them exactly what we are
teaching the women, and how oral rehydration works. Then we visited mosques we went to
market places went to many congregates we taught on about oral rehydration and then suddenly
the oral rehydration use rate started growing up dramatically and we followed up with spots and
interviews in television and then it went up to 67% to 80% use rate. Over a 10 year period we
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went to every household in Bangladesh, quarter million households spent out an hour with each
woman in the household, and so oral rehydration therapy became used by everybody and
diarrhea mortality went down dramatically our infant mortality rate of course now is one of the
lowest in South Asia, its less than 40, and under 5 mortality is less than 50. What I wanted to say
is that if the programme is not culturally appropriate then it doesn’t work and many of the
programmes are not culturally appropriate tend not to work but we were lucky that we were only
telling everything that it was going on and as result of it this programme became, of course now
Bangladesh has got the highest use of oral rehydration in the world and oral rehydration therapy
has become part of the culture itself so when a development programme and the outcome of the
programme becomes part of your culture then it became sustainable so what I wanted to say is
that in order to be sustainable, sustainable development means in fact at the level of culture a
change must take place otherwise it is not sustainable.
Dans son rapport de synthèse de décembre dernier, le secrétaire général Ban Ki-moon a
également invité les États membres à une révolution dans la collecte des données utiles à la
mesure de l’atteinte des objectifs en affirmant que la mesure du PIB ne peut plus servir à elle
seule d’indicateur de développement :
« Les États membres ont reconnu qu’il importait de s’appuyer sur les initiatives existantes pour
mettre au point des indicateurs de progrès en matière de développement durable qui ne se
limitent pas au produit intérieur brut. Il faut donc que l’ONU, les institutions financières
internationales, la communauté scientifique et les institutions publiques accordent une attention
particulière à la mise au point de nouveaux outils de mesure, lesquels doivent clairement être
axés sur le progrès social, le bien-être des personnes, la justice, la sécurité, l’égalité et la viabilité.
Ceux qui concernent la pauvreté devraient tenir compte du caractère multidimensionnel de ce
phénomène. Par ailleurs, de nouveaux indicateurs mesurant le bien-être subjectif pourraient être
utiles à l’élaboration des politiques. » (Para. 135)
Nous sommes pleinement en accord avec le secrétaire général. Alors que nous cherchons à
mettre en place un cadre de mesures des résultats axé sur l’imputabilité, nous devons concevoir
des indicateurs de développement humain et social de portée universelle. Sur cette question
précise, vous trouverez en pièce jointe des propositions formulées par un collectif de réseaux
internationaux des arts et de la culture qui ont lancé la campagne « Le futur que nous voulons
intègre la culture » qui a recueilli à ce jour plus de 3 000 signatures, dont celle de 1000
organisations, de 120 pays.
Monsieur le ministre Paradis, le Canada est un exemple inspirant de société ouverte, tolérante,
et juste fondée sur la conviction du rôle fondamental de la culture pour son développement. Les
associations que nous représentons œuvrent aux quatre coins du pays à la réalisation de cet
objectif central au bien-être de nos collectivités. Nous espérons vous avoir convaincu de
l’importance historique qui se présente pour le Canada d’aider la communauté internationale à
faire un pas en avant dans la recherche de moyens d’assurer que les sommes considérables
consentis à l’aide publique au développement connaissent des effets encore plus structurants et
durables. Et surtout, que les populations que nous voulons aider en bénéficient réellement.
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Signée par :
Lauriane
Jean-Pierre
Elisabeth
David
Brouillet
Caissie
Cyr
Jaeger
Jade
Maryse
Jerome
Diane
Karine
Natacha
Pierre
Joelle
Natalie
Philippe
Pierre
Marie-Neige
Pascale
Frederic
Sylvie Luce
Mehdi
Keith
Caroline
M. Sharon
Patrick
Carmen
Charles
Norman
Anne-Marie
Mary
Marquis
Meunier
Payette
St-Pierre
Vincent
Sincennes
McGraw
Bissonnette
Bernardin
Amiguet
Blain
Besner
Parent
Julien
Bergeron
Ghafouri
McPhail
Andrew
Jeannotte
Marmen
Moral-Suarez
Vallerand
Hogg
Jean
Blackstone
Alliance québécoise des techniciens de l’Image et du Son
Artsnb
Association des professionnels de l’édition musicale
Association des professionnels de la chanson et de la musique
Association québécoise des techniciens de l’image et du son
Association québécoise des techniciens de l’image et du son
Atena
CALACS
Canadian Arts Presenting Association - Association canadienne des organismes artistiques
CCE
Cégep Vanier
Centre for Art Tapes
Centre on Governance
Centre on Governance - University of Ottawa
Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal
Coalition pour la diversité culturelle
Coalition pour la diversité culturelle
Concordia University
Culture Montréal
Department of Theatre University of Regina
Jérôme
Pierre
Julie
Mailis
Carol Ann
Tara
Haroun
Emilie
Anne
Judith
Mark
Peter
Pruneau
Leclerc
Jodoin
Burgaud
Pilon
Rayher
Bouazzi
Guerette
Robineau
Marcuse
Jamison
Higham
Diversité artistique Montréal
DynamO Theatre
Espace pour la vie
Exeko
FCCF
Gen Why Media
HB
Independent Filmmaker
Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques
International Centre of Art for Social Change
Magazines Canada
Mount Allison University
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Elizabeth-Ann
Akoulina
Loree
Ritu
Ségolène
Ian
Marie
Will
Ian
Anika
Robin
Marlaina
Doyle
Connell
Lawrence
Verma
Roederer
McWilliams
D. Martel
Garrett-Petts
Garrett
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MU
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Université de Montréal
Université de Montréal
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Université du Québec à Montréal
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Wide Mouth Mason
World Culture Project
c.c. Shelly Glover, ministre du Patrimoine canadien
Wayne Smith, statisticien en chef du Canada
Guillermo Rishchynski, représentant permanent du Canada auprès des Nations unies
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