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PORTRAIT Peter Walker | PWP Landscape Architecture | Berkeley, CA Peter Walker : Design minimaliste, impact majeur Peter Walker Peter Walker, membre de la Société américaine des architectes paysagistes, est devenu une légende de son temps. Il est l’un des principaux architectes paysagistes du Mouvement moderne, et a été désigné pour participer à la conception et à la construction du Mémorial du 11‑Septembre à New York. Et la liste d’honneurs ne s’arrête pas là. Au total, Walker a reçu plus de 70 récompenses aux niveaux régional, national et international. En 2007, Walker se voit décerner le très convoité Cooper Hewitt National Design Award. En 2005, il est le premier lauréat du Sir Geoffrey Jellicoe Award issu de la Fédération Internationale des Architectes Paysagistes, le plus grand honneur que l’on puisse faire à un architecte paysagiste. Il a également reçu l’American Institute of Architects Honor Award, la Harvard Centennial Medal, la Thomas Jefferson Medal d’architecture de l’université de Virginie, et la American Society of Landscape Architects Medal, entre autres distinctions, pour son approche novatrice et remarquablement simple de la conception de paysage. UN PARCOURS SINGULIER Peter Walker a eu une carrière atypique. Il suit initialement des cours de journalisme à l’université de Berkeley, en Californie, dans l’optique de développer et produire des journaux et magazines. Il réexamine rapidement son choix et tombe sur le cours d’architecture du paysage dans la liste des programmes. Walker se souvient qu’environ un tiers du programme était consacré aux cours d’art, un autre tiers aux cours techniques appliqués à l’architecture du paysage et à la conception de paysage, et le dernier tiers aux enseignements généraux : histoire, philosophie, etc. « Je ne pensais pas devenir un architecte paysagiste », confie-t-il. « Je pensais simplement que cela constituerait une meilleure préparation pour la production et la publication de magazines. Je me suis donc lancé et j’ai fini par découvrir que cela me plaisait. » Plus tard, il réalise ses rêves de journalisme et combine ses deux passions en fondant la maison d’édition Spacemaker Press, qu’il dirige de 1996 à 2005. Spacemaker Press continue de publier des livres dédiés à l’évolution des paysages. Walker est titulaire d’une licence scientifique en architecture du paysage obtenu à l’université de Berkeley. En 1957, il obtient un master en architecture du paysage de la Graduate School of Design (Harvard), décrochant en outre le prix Weidenman de l’école. Il a également reçu plusieurs doctorats honoris causa, notamment un de l’université de l’Illinois et un de l’université de Pretoria. Bien qu’étant toujours scolarisé, Walker fait ses débuts en travaillant pour le célèbre architecte paysagiste Lawrence Halprin à San Francisco. Peu après, alors qu’il étudie à Harvard, il travaille à temps partiel pour l’influent architecte paysagiste et professeur Hideo Sasaki. Tout juste un an plus tard, il intègre la firme à plein temps. En 1957, ils forment ensemble la firme Sasaki Walker Associates. Deux ans plus tard, Walker inaugure les nouveaux bureaux situés sur la Côte Ouest américaine. PORTRAIT Peter Walker | PWP Landscape Architecture | Berkeley, CA Le mémorial du 11 septembre à New York s’étend sur sept hectares et a été inauguré le 11 septembre 2011 Pendant la crise des années 70, Walker fonde le groupe SWA dont il préside le conseil d’administration jusqu’en 1983, année où il fonde une firme plus petite, connue aujourd’hui sous le nom de Peter Walker and Partners (PWP) Landscape Architecture. PWP compte actuellement sept dirigeants, 35 employés et traite quelques projets par an. Elle « se spécialise », comme l’explique Walker, à « amener ces projets à un très haut niveau d’achèvement ». La firme se concentre principalement sur les travaux institutionnels : villes, places, parcs urbains, universités, centres culturels ; des projets de monuments, tels que le Mémorial du 11‑Septembre, le Newport Beach Civic Center and Park, l’ambassade des États-Unis à Pékin ; ou encore des campus d’entreprises telles que Pixar, Weyerhaeuser, Novartis, et VMware®. On retrouve le travail de PWP partout dans le monde. La firme est largement considérée comme étant l’une des plus actives et des plus brillantes au monde dans son domaine. LE MÉMORIAL DU 11‑SEPTEMBRE : COMBLER LE VIDE Le 11 septembre 2011, soit exactement 10 ans après l’attaque la plus meurtrière que les ÉtatsUnis aient connue (qui coûta la vie à près de 3 000 personnes), le Mémorial du 11‑Septembre était inauguré à New York en l’honneur des victimes. Plusieurs années auparavant, le jury du concours avait fait appel à Walker pour travailler avec l’architecte Michael Arad, afin de l’aider à réaliser sa vision pour le mémorial : deux grands bassins alimentés par des fontaines, situés dans les empreintes des tours jumelles détruites, et portant les noms des victimes des attaques du 11 septembre 2001 et de l’attentat à la bombe de 1993. Walker et sa firme ont équilibré le mémorial de pierre avec un parc luxuriant, afin d’encourager la réflexion et le répit des visiteurs, ainsi que des habitants du Lower Manhattan (un des quartiers les plus densément peuplés du pays). PORTRAIT Peter Walker | PWP Landscape Architecture | Berkeley, CA Les parapets des deux grands bassins alimentés par des fontaines, situés dans les empreintes des tours jumelles détruites, portent les noms des victimes des attaques du 11 septembre 2001 et de l’attentat à la bombe de 1993 Le mémorial s’étend sur sept hectares, soit environ la moitié de la surface du site du World Trade Center. Outre le défi que représente ce chantier titanesque, Walker et son équipe à PWP ont dû travailler avec un grand nombre de clients, aux niveaux local, étatique et fédéral. Parmi ces clients, on peut citer le promoteur immobilier Larry Silverstein, les cinq gouverneurs successifs de New York, le Maire de New York, la Fondation pour le Mémorial du World Trade Center, la Corporation pour le développement du Lower Manhattan, l’Autorité portuaire de New York et du New Jersey, le Service des travaux publics, le Département des transports de New York, ainsi que diverses agences de sécurité, sans oublier les 3 000 familles de victimes et 10 000 proches touchés par cette tragédie. De même, le cadre du site pose de nombreux défis. Bien que le Memorial Plaza ait ouvert le 11 septembre 2011, la construction du site n’était pas terminée à cette ................ “J’aime le minimalisme car cette approche permet, entre autres, de renforcer le processus naturel aux yeux des gens. Par exemple, lorsqu’il n’y pas tout un tas d’arbustes, le site est beau‑ coup plus simple à gérer au fil des saisons. Donc, d’une certaine façon, la plante est le matériau star. Un de nos principes est d’essayer d’utiliser les plantes de façon à les mettre en avant.” – Peter Walker, PWP Landscape Architecture, Berkeley ................ date. Quatre tours sont en construction (l’une d’entre elles sera la plus haute du pays). De plus, plusieurs bâtiments de sept étages prennent forme sous terre, comprenant notamment des stations de métro, un centre commercial, les sous-sols desdits bâtiments, une centrale de production de froid, un parking et un musée… Et tout cela est construit en même temps. « Cela ressemble un peu aux échecs en 3D. Cela paraît difficile comme ça, mais jusqu’ici tout va bien », confie Walker. Le Mémorial du 11‑Septembre est aussi un projet atypique en termes de délais. Étant donné son importance dans l’histoire des États-Unis et le travail titanesque devant être accompli, le projet requiert des délais importants. Habituellement, Walker travaille environ un an sur un projet, le soumet au client puis le fait construire dans les cinq années qui suivent. Or, lorsque le mémorial a été inauguré, Walker avait déjà passé sept ans sur ce projet… Et ce dernier n’était pas encore terminé. Afin d’imprégner le projet des idées modernistes, Walker a fait appel à sa grande expérience. « Certaines idées utilisées pour le mémorial sont des idées que nous avons développées sur d’autres projets », explique-t-il. « Nous avons travaillé pendant 20 ans sur les toits d’immeubles. Désormais, les immeubles représentent la moitié de notre travail. Cela montre une tendance vers le milieu urbain. Et je suis l’un de ceux qui disent qu’il ne faut pas faire du naturalisme. On ne doit pas essayer de faire ressembler un toit à Central Park… Une grande partie du vocabulaire du mémorial provient donc de projets antérieurs. » J’aime le minimalisme car cette approche permet, entre autres, de renforcer le processus naturel aux yeux des gens. Par exemple, lorsqu’il n’y pas tout un tas d’arbustes, le site est beaucoup plus simple à gérer au fil des saisons. Donc, d’une certaine façon, la plante est le matériau star. Un de nos principes est d’essayer d’utiliser les plantes de façon à les mettre en avant. Un de ces projets était le Sony Center à Berlin (Allemagne), pour lequel Walker a collaboré avec l’architecte Helmut Jahn. Walker avait pour mission de faire en sorte qu’une place de la taille d’un stade de football soit visuellement réussie, même lorsque celle-ci était vide (tout comme pour le très coûteux site du mémorial). Les noms des victimes sont rétro-éclairés, et les plaques de bronze sont chauffées ou refroidies selon les saisons pour le confort au toucher. PORTRAIT Peter Walker | PWP Landscape Architecture | Berkeley, CA On peut également citer un autre exemple, situé dans la préfecture de Saitama au Japon, juste au nord de Tokyo. On y trouve la plus grande salle omnisports et le plus grand immeuble du pays. Les deux bâtiments entourent le Keyaki Hiroba Center, lequel abrite aussi une gare ferroviaire. « Le parc est situé au sommet d’un bâtiment de trois étages, et nous avons remporté le projet en ne faisant pas quelque chose de naturaliste », précise Walker. « Nous avons créé des alignements de Zelkovas, un arbre qui a une belle forme de vase. Et bien que le nom du parc soit Saitama Plaza, tout le monde l’appelle Zelkova Plaza. Ce qui est intéressant en l’occurrence, c’est qu’il n’y a rien de naturel dans ce projet, à l’exception de ces arbres. C’est ce qui a capturé l’imagination de tout le monde. » Minimaliste autoproclamé, Walker explique que la conception épurée du site permet aux gens de se concentrer sur les arbres. « J’aime le minimalisme car cette approche permet, entre autres, de renforcer le processus naturel aux yeux des gens. Par exemple, lorsqu’il n’y pas tout un tas d’arbustes, le site est beaucoup plus simple à gérer au fil des saisons. Donc, d’une certaine façon, la plante est le matériau star. Un de nos principes est d’essayer d’utiliser les plantes de façon à les mettre en avant. » La philosophie de Walker est de n’utiliser que quelques objets et matériaux significatifs. « Il est intéressant de voir comment des choses simples peuvent avoir de multiples interactions, comme jouer avec les ombres d’un groupe d’arbres. Ce qui m’intéresse est de savoir où les gens pourraient s’asseoir : sur des bancs, mais aussi sur des marches, des murs… J’essaie toujours de créer un maximum d’interactions avec un minimum de choses. Ce n’est pas tellement un intérêt pour la simplification mais avant tout un intérêt artistique », poursuit Walker. Cette approche est très visible dans le Mémorial du 11‑Septembre. Plus de 400 chênes bicolores ont été plantés sur le site du mémorial. Ils peuvent vivre jusqu’à 350 ans. Chaque élément du mémorial a été sélectionné pour son aspect fonctionnel et artistique. Le plan initial prévoyait uniquement de la pierre sur les sept hectares. Walker a réduit la quantité de pierre de moitié environ. À la place, il a sculpté le sol à l’aide de pelouses et d’arbres afin d’adoucir l’espace. Plus de 400 chênes bicolores ont été triés sur le volet et choyés pendant cinq ans dans une pépinière du New Jersey, avant d’être transplantés sur le site du mémorial. Les arbres sont plantés dans un sol rempli de terre, profond de 1,8 mètre et traversé par des tuyaux d’irrigation. Ce sol repose sur les toits des bâtiments souterrains et est recouvert de pavés. Les chênes bicolores peuvent vivre jusqu’à 350 ans. Leur tronc pousse droit et leurs feuilles deviennent dorées en automne. Ils mesurent actuellement neuf mètres de haut, mais mesureront le double à maturité, protégeant ainsi l’espace d’un trop-plein de lumière et du bruit. Un poirier de Chine ayant survécu aux attaques a également été replanté sur le site. Il est désormais appelé « Survivor Tree » (l’arbre survivant). Walker a sélectionné avec soin le mobilier, l’éclairage et les autres éléments, afin de conserver un plan de masse aéré. « Lorsque vous vous trouvez près des bassins, cela ressemble à une place. Mais vu de l’extérieur, cela ressemble plus à un parc. » explique Walker. Le sol devait être parfaitement plat, afin que les bassins, profonds de neuf mètres, aient un impact visuel. « L’astuce consistait à garder le sol plat pour que les bassins soient creusés dans le sol de façon à être reconnaissables », poursuit-il. Outre l’aspect purement esthétique, la conception est durable. Des cuves récupèrent l’eau de pluie, qui est ensuite acheminée via des tuyaux dans des réservoirs de 568 000 litres situés sous le mémorial. La collecte s’arrête en début d’année afin de tirer profit des plus grosses pluies. L’eau PORTRAIT Peter Walker | PWP Landscape Architecture | Berkeley, CA sol au fur et à mesure qu’ils sont imprimés. Voilà l’évolution considérable dont j’ai été témoin. » Walker explique que sa philosophie « s’est développée au fils des années » mais « qu’elle n’a pas changé », poursuit-il. « J’ai commencé à faire ce que faisaient les architectes paysagistes californiens, à savoir principalement des jardins. C’était ça le modernisme à l’époque. Le paysage actuel est très influencé par ce que nous avons créé, car tout le monde utilise les techniques que nous avons développées. C’est notre objectif. Dans une certaine mesure, nous l’avons atteint, et nous voulons continuer dans cette voie aussi longtemps que possible. » Le sol devait être parfaitement plat, afin que les bassins, profonds de neuf mètres, aient un impact visuel. de pluie collectée est ensuite utilisée à la fin de l’été et au début de l’automne lorsqu’il y a moins de précipitations. Cela évite de devoir compter sur l’eau de la ville et empêche le sol de déverser de l’eau dans les réserves de la ville. « Il s’agit du plus grand projet durable de New York », ajoute Walker. « Et peut-être même des États-Unis, du moins à ma connaissance. » Les magnifiques fontaines ont également fait l’objet d’une conception durable, ce qui n’était pas le cas initialement. En effet, elles devaient à l’origine consommer davantage d’énergie, et donc, avoir un coût de fonctionnement annuel plus élevé que ce que leur construction a coûté. Le consultant en fontaines Dan Euser trouva la solution, que Walker qualifie de « brillante ». Dan Euser a créé un barrage d’eau en forme de peigne. Ainsi, seulement un dixième des 2,5 cm d’eau prévus initialement s’écoule de la fontaine. Cela a permis de réduire de façon significative le coût en énergie, sans diminuer le puissant effet de la fontaine. La fontaine est l’une des plus importantes jamais construites avec des côtés longs de plus de 488 mètres. 113 500 litres d’eau par seconde s’écoulent du petit barrage. L’eau est projetée à 1,2 mètre et tombe en cascade neuf mètres plus bas. 4 000 mètres carrés d’eau remplissent les bassins et forment une surface réfléchissante, entourant un puits carré qui semble infini. Les noms des victimes sont gravés sur les ................ “Nous avons toujours utilisé Vectorworks pour la préparation des projets. C’est la façon dont nous travaillons habituellement ; tout le monde ici procède ainsi. Vectorworks est bien plus flexible et plus poussé qu’AutoCAD.” – Peter Walker, PWP Landscape Architecture, Berkeley ................ parapets en bronze qui entourent les bassins. Les noms sont rétro-éclairés, et les plaques de bronze sont chauffées ou refroidies selon les saisons pour le confort au toucher. En façonnant une forte tradition moderniste de la conception de paysage aux États-Unis et à travers le monde, Walker a participé à la création d’un vocabulaire qui continue encore aujourd’hui de faire avancer le design. Par le biais du Mémorial du 11‑Septembre et bien d’autres projets de renom, Peter Walker a donné forme à des espaces qui commémorent des moments qui ont marqué l’histoire ; des monuments vivants qui continueront de rayonner pour les années à venir. La conception a été saluée par la critique, bien qu’au final ce qui importe le plus pour Walker sont les avis de familles et d’amis des victimes. « Je me fiche des critiques presque autant que la réaction émotionnelle des proches des victimes compte pour moi. Nous le faisons autant pour le gouvernement que nous le faisons pour les familles des victimes et pour les visiteurs », déclare-t-il. UNE ÉVOLUTION DU DESIGN Walker et son équipe ont utilisé le logiciel Vectorworks® Landmark pour concevoir et modéliser le Mémorial du 11‑Septembre, comme ils le font pour tous leurs projets. « Nous avons toujours utilisé Vectorworks pour la préparation des projets. C’est la façon dont nous travaillons habituellement ; tout le monde ici procède ainsi. Vectorworks est bien plus flexible et plus poussé qu’AutoCAD® », note Walker. Walker recommande l’utilisation de la 3D. Quand on sait à quel point ça peut être difficile de dessiner, disposer d’outils de modélisation 3D souples et performants s’avère extrêmement utile. Walker apprécie notamment la possibilité d’agrandir un détail à taille réelle pour en voir les moindre détails. « C’est un véritable atout selon moi. » Il compare la conception assistée par ordinateur à l’époque où tout était dessiné à la main : « cela ne se résume pas qu’au gain de temps, c’est un tout autre monde. La première fois que j’ai eu des ennuis à mes débuts chez Halprin est lorsque j’ai posé une tasse de café sur la planche à dessin… Tout le monde m’a dit : « si tu renverses ton café, tu peux ruiner toute la page, ce qui nous coûterait des dizaines de milliers de dollars ! » Bien sûr, maintenant, nous posons les dessins à même le La conception du mémorial a été réalisée à l’aide de Vectorworks Landmark Coordonnées : PWP Landscape Architecture 739 Allston Way Berkeley, CA 94710 USA Tél : (510) 849-9494 - Fax : (510) 849-9333 Email: [email protected] www.pwpla.com Images : Landscape Architect Peter Walker Texte original publié par : Nemetschek Vectorworks, Inc. www.vectorworks.net Version française : CESYAM