Le brûleur micro-modulant tient plus que ses promesses… en

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Le brûleur micro-modulant tient plus que ses promesses… en
CERTIFICATS D’économieS d’énergie F
Le brûleur micro-modulant tient plus
que ses promesses… en laboratoire !
Des essais ont été réalisés dans le centre de recherche d’EDF des Renardières pour évaluer précisément les gains
obtenus par le remplacement d’un brûleur deux allures par un brûleur micro-modulant. Si ces gains, deux fois
supérieurs aux gains conventionnels, sont confirmés par des expérimentations sur un site industriel, la fiche CEE
correspondante pourrait évoluer.
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modulant permet un gain conventionnel de l’ordre de 2 % avec une
régulation d’O2 et de 2,4 % avec une
régulation combinée d’O2/CO. Cette
fiche a été utilisée plus de 30 fois rien
qu’en 2011 ce qui représente entre 60
et 70 GWh cumac.
Cependant, Babcock Wanson, filiale
du groupe CNIM et acteur international dans le domaine des chaudières et des brûleurs, souhaitait
évaluer plus précisément le gain
énergétique afin de mieux se positionner vis-à-vis des industriels. Il
faut dire que le gisement d’économie
n’est pas négligeable car le parc de
chaudières vapeur ou eau surchauffée, de puissance comprise entre 2 et
20 MW est de l’ordre de 10 000 chaudières. D’après le centre d’études
et de recherches économiques sur
l’énergie (CEREN), le taux de charge
moyen annuel de ce parc est de 40 %
de l’allure nominale. «Souvent des
progrès ont été faits sur les process
qui consomment donc moins d’énergie mais les chaudières n’ont pas été
changées et surconsomment, précise
Frédéric Sicard, ingénieur chez EDF.
Le parc visé par la fiche CEE est en
majorité constitué de brûleurs deux
ou trois allures ou de brûleurs ayant
une modulation moins précise. Avec
un brûleur micro-modulant ayant un
ratio de modulation 1 à 8, la puissance
varie continument de 12,5 % à 100 %,
tout en ayant un réglage plus fin.»
Comparaison de deux brûleurs
Dans le cadre des travaux pour le
développement de fiches au sein du
Club C2E de l’ATEE, Pascal Morawski,
directeur commercial de Babcock
Wanson, a rencontré Antoine Pégart,
chef de projet Énergies chez EDF et, en
août 2008, ils ont décidé de réfléchir
aux moyens de travailler ensemble
sur le sujet. EDF a donc proposé de
© Frédéric Sicard
D
epuis quelques années,
les brûleurs micromodulants ont fait
leur apparition sur le
marché et au regard
de leurs performances énergétiques,
ils font l’objet d’une fiche permettant
d’obtenir des certificats d’économies
d’énergie (opération n°IND-UT-05).
Elle concerne les brûleurs dont la
puissance est comprise entre 2 et
20 MW, avec une modulation de 1 à
8 au minimum et dont l’installation
comporte une régulation par mesure
d’oxygène dans les fumées. La modulation fine permet de limiter l’excès d’air de combustion, d’éviter des
cycles d’arrêt-redémarrage du brûleur et ainsi de réduire la déperdition
énergétique provoquée par la pré-ventilation d’allumage. Au total, comparativement à un brûleur deux débits
ou faiblement modulant, l’utilisation
d’un brûleur haut rendement micro-
J Les brûleurs micro-modulants
du centre de recherche
des Renardières.
faire réaliser les tests sur le brûleur
micro-modulant par une des équipes
du groupe Utilités Industrielles de
son centre de recherche des Renardières (77). Ces tests ont débuté fin
2010. La plateforme d’essais se compose d’une chaudière à tubes de
fumées sur laquelle les deux brûleurs
à comparer ont été installés : le premier est un brûleur d’ancienne génération à came mécanique offrant un
ratio de modulation de 1 à 4 mais réglé
de 1 à 2 pour les essais et le second, un
micro-modulant (de 1 à 8 minimum)
de type LNTA 0 avec son système de
régulation O2 et CO de la marque Babcock Wanson. Finalement, en raison
des trop nombreux réglages nécessaires par rapport au temps imparti
aux essais, les gains supplémentaires
de la régulation CO par rapport à la
régulation O2 n’ont pas pu être confirmés et évalués. Chacun des brûleurs
a été réglé par son constructeur à une
puissance de 550 kWth (puissance initiale du brûleur Weishaupt).
Quatre configurations (voir encadré)
ont été testées et sur chacune d’elles, il
a été appliqué un ensemble de courbes
de charges de trois sortes : type 0 correspondant à un fonctionnement en
continu avec un débit vapeur stable
(process calmes), type 1 pour un fonctionnement dynamique de type “créneau” similaire à une demande discontinue par paliers avec des appels
de puissance qui varient très vite (profil typique d’un fonctionnement avec
des autoclaves par exemple), et type
Courbes de charges type 1 et 2 pour des valeurs
de charge moyenne de 70 % et de 40 %
S Les essais ont été
réalisés avec des
profils de charge
ayant deux
périodes de temps
(20 et 60 minutes).
Les quatre configurations d’essais
3 Config 1 : Brûleur Babcock-Wanson
en régulation de combustion à priori (boucle ouverte)
3 Config 2 : Brûleur Babcock-Wanson en régulation
de combustion grâce à la mesure d’O2
© D.R.
3 Config 3 : Brûleur Babcock-Wanson en régulation
de combustion grâce à la mesure de CO et O2
3 Config 4 : Brûleur Weishaupt en régulation
de combustion à priori (boucle ouverte)
2 représentant un fonctionnement
dynamique “pente/palier” c’est-à-dire
une demande avec des appels de puissance plus lents (profil type de chauffage de locaux). Pour les types 1 et 2,
les essais ont été réalisés avec des profils de charge ayant deux périodes de
temps (20 et 60 minutes) et avec deux
valeurs moyennes de la charge (VM) :
40 % (fourchette basse du fonctionnement d’une chaudière) et 70 % (fonctionnement maximum d’une chaudière surdimensionnée). «L’estimation
des courbes de charge était une phase
très compliquée et comme nous nous
sommes retrouvés avec un trop grand
nombre de ces courbes, nous n’avons
conservé que les courbes les plus pertinentes», explique Frédéric Sicard.
Des résultats supérieurs
aux gains conventionnels
Pour comparer les essais entre eux, le
rapport du débit vapeur sur le débit
gaz a été choisi par les chercheurs
d’EDF. Ensuite, le gain est calculé
en comparant le résultat provenant
d’une situation initiale correspondant
à la présence d’un brûleur dans une
configuration non optimisée avec une
situation finale correspondant à une
optimisation du brûleur. Ce gain est
ramené à une situation de référence
qui corrige les mesures des différentes
perturbations possibles (différences
de température de l’air ou de l’eau,
modification du PCI du gaz, etc.). Il
est ensuite pondéré en fonction de la
charge de la chaudière. Par ailleurs,
l’incertitude des mesures a été éva-
luée à 1,37 % ce qui permet d’encadrer
les résultats finaux.
Les résultats ont été présentés à l’ATEE
le 10 mai 2011. Pour le fonctionnement stabilisé (type 0) avec un taux
de charge de 50 %, le gain apporté
par le remplacement d’un brûleur
à faible modulation par un brûleur micro-modulant est important
puisqu’il atteint 5,1 %. L’ajout de la
régulation d’O2 au brûleur modulant
permet même d’arriver à 6,6 %. Premier constat, en régime dynamique
(type 1 et 2) et à VM constante, quels
que soient les profils de charge et la
période étudiés, les gains pondérés
sont très proches. Second constat, plus
la VM est faible, plus les gains sont
importants. Le gain moyen apporté
par la modulation et la régulation
d’O2 pour un taux de charge moyen de
50 % est donc de 4,23 % pour le type 1
et de 4,32 % pour le type 2. Des résultats bien supérieurs au gain conventionnel estimé lors de l’élaboration de
la fiche CEE : 2,4 %. «Fort de ces tests,
nous espérons désormais une revalorisation de la fiche n°IND-UT-05
afin de refléter les véritables performances de ces brûleurs, souligne Pascal Morawski. Cependant, ces tests
en laboratoire nécessitent une confirmation sur un site industriel à équiper d’un brûleur micro-modulant
supérieur à 2 MW (le minimum de la
fiche) que nous recherchons actuellement avec les équipes commerciales
d’EDF». Les discussions pourront ainsi
reprendre avec l’Ademe. m
Christelle Deschaseaux
15 février 2012 - n°480
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