Un tiers peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité

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Un tiers peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité
Un tiers peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la rupture brutale d’une relation
commerciale, dès lors que ce manquement lui a causé un préjudice.
SOURCE : Cass. com., 6 septembre 2011, n° 10-11975, Publié au Bulletin
En l’espèce un fournisseur initialement en relation avec la filiale Thaïlandaise de son distributeur, demande dès
1974, que le fret ainsi que les aspects administratifs et comptables des commandes soient assurés par la filiale
française.
Avec près de 25 de relations commerciales ainsi étables, et constatant une réduction de ses ventes en Thaïlande,
le fournisseur met fin aux relations qu’il entretien avec la filiale française.
S’estimant victimes d’une rupture brutale des relations commerciales établies, sanctionnée sur le fondement de
l’article L442-6 I 5° du code de commerce[1], les filiales assignent le fournisseur en justice afin d’obtenir des
dommages et intérêts.
L’existence d’une rupture brutale des relations commerciales étant rapidement reconnue, le litige se porta sur la
demande de la filiale Thaïlandaise, devenue depuis 1974, tiers aux relations commerciales.
Pour accueillir la demande de la filiale, la Cour d’appel considère que cette société, qui assurait la revente des
produits objets de la relation commerciale, a subi un préjudice au regard de sa rupture brutale. La Cour estime
ainsi que la filiale Thaïlandaise, bien que tiers aux relations commerciales, est fondée à demander réparation du
préjudice subi du fait de la rupture abusive, sur le fondement de la responsabilité délictuelle du fournisseur, régi par
l’article 1382 du Code Civil.
Saisie du pourvoi formé par le fournisseur, contestant toute extension des dispositions de l’article L442-6 I 5° du
code de commerce à l’indemnisation d’éventuels dommages par ricochet, La Cour de cassation approuve
l’analyse opérée par les juges du fond.
Rejetant le pourvoi, la Haute juridiction précise qu’ « un tiers peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité
délictuelle, la rupture brutale d’une relation commerciale, dès lors que ce manquement lui a causé un préjudice ».
Cette motivation n'est pas sans rappeler celle de l'arrêt d’Assemblée Plénière du 6 octobre 2006, selon lequel « le
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tiers à un contrat peut se prévaloir d'un manquement contractuel, sur le fondement de la responsabilité délictuelle,
dès lors que ce manquement lui a causé un dommage »[2]
Cette arrêt aboutit ainsi à la reconnaissance de l’existence de deux fautes délictuelles lors d’une rupture brutale
des relations commerciales établies, l’une envers le partenaire commercial, sur le fondement de l’article L442-6 I
5° du code de commerce, l’autre envers les tiers, partenaires de la victime de la rupture brutale.
Revirement jurisprudentiel, la Haute juridiction n'ayant jamais admis auparavant la réparation du dommage de la
victime par ricochet d'une rupture brutale de relation commerciale établie[3], admettant toutefois l’intérêt à agir du
tiers lorsque celui-ci est expressément reconnu par les contrats entre les cocontractants principaux, et payés
directement par l’auteur de la rupture, cet arrêt nous invite à considérer que le préjudice du tiers à une rupture
brutale des relations commerciales établies peut être indemnisé.
Doit-on en conclure que tout partenaire de la victime de la rupture brutale est recevable à agir, qu’il soit sous
traitant, fournisseur, prestataire de service,… sous réserve de démontrer une faute, un préjudice et un lien de
causalité en relation avec la rupture brutale?
La porté de cet arrêt peut être relativisée, en considération de la notion de causalité. En l’espèce, les liens
commerciaux entre la filiales Thaïlandaise et le fournisseur s’avéraient en réalité assez étroits, une relation
commerciale directe préexistant entre ces deux sociétés, avant que le fournisseur ne demande que la filiale
française joue le rôle d’intermédiaire. Dès lors, le fabricant ne pouvait ignorer que la filiale Thaïlandaise aurait à
subir la rupture des relations commerciales avec la filiale française.
Sylvain VERBRUGGHE
VIVALDI AVOCATS
[1] Article L442-6 du code de commerce :
I.-Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant,
industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée
de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par
des accords interprofessionnels.
[2] Ass. Plén., 6 octobre 2006, 05-13.255, P+B+R+I
[3] Cass. com., 3 novembre 2004, n° 02-17078
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