À Venise, les gondoles prennent l`eau

À Venise, les gondoles prennent l'eau
Voix off
Andrea Balbi a réussi l’examen obligatoire pour devenir gondolier voici exactement 17 ans.
Depuis, par tous les temps, il emmène des touristes voguer sur les canaux de Venise. Mais les
jours de marée haute, il doit désormais faire appel à toute son habileté pour passer sous les
ponts.
Andrea Balbi, vice-président de l’association des gondoliers
Voilà la difficulté, comme vous pouvez voir, je suis passé vraiment à un centimètre du pont alors
que j’avais abaissé la pointe postérieure de ma gondole. Jusqu’à présent, nous réussissons
encore à choisir notre parcours pour éviter les ponts trop bas, mais demain, avec l’augmentation
du niveau de la mer, ce sera un problème qui concernera tous les ponts de Venise.
Voix off
Les hautes marées sont en moyenne dix fois plus nombreuses aujourd’hui qu’il y a un siècle. La
ville a perdu 23 centimètres sur le niveau de la mer. Et si le spectacle de l’eau sur la place SaintMarc est incontournable pour les touristes, les chercheurs estiment que Venise est un
laboratoire à ciel ouvert pour étudier les effets du réchauffement climatique.
Pierpaolo Campostrini, directeur Corila – Recherches sur la lagune
La lagune est un endroit très délicat au sein de la Méditerranée avec des différences de marées
très marquées. Ici, vraiment chaque centimètre compte. De plus, Venise est une ville qui a mille
ans d’histoire et qui a déjà dû à plusieurs reprises adapter sa politique aux changements de
climat et pas seulement les changements de ces dernières années.
Valérie Dupont, journaliste
Venise est l’une des premières villes au monde à avoir imaginé un système de digues flottantes
pour protéger la ville de la montée des eaux. Mais voilà, la construction du MOSE[1] a pris
beaucoup de retard et ne sera prêt qu’en 2017, voire 2018 alors que beaucoup de Vénitiens
affirment déjà que ce sera totalement insuffisant.
Sonia Bernath, présidente WWF de Venise
Le MOSE n’a pas été construit en pensant à une augmentation globale du niveau de la mer et
donc les digues nous sauveront seulement des hautes marées pendant quelques décennies.
Mais quand la mer, comme on le prévoit en 2100, ou même avant parce qu’on ne sait pas,
augmentera de plus de 30 ou 40 centimètres, ces digues seront parfaitement inutiles.
Voix off
« Venise va donc se noyer. Peut-on imaginer plus belle mort pour cette ville ? » écrivait Paul
Valéry en son temps. Les Vénitiens, eux, espèrent que la Conférence de Paris apportera une
petite note d’espoir pour sauver la Sérénissime[2].
[1] MOSE est le nom du projet de digue flottante. C’est l’acronyme en italien de MOdulo
Sperimentale Elettromeccanico, soit « module expérimental électromécanique ».
[2] Désigne à l’origine la République de Venise (697 à 1797) et par glissement de sens, ici, Venise
et ses alentours.