Des interferences sur Ie dosage de TSH pratique sur
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SPECTRA IOLOGIE ~ ... Tire apart du numero 178 de Spectra Biologie - Janvier - Fevrier - Mars 2010 LABORATOIRE PRATIQUE Catherine MASSART1, Sa"fda SELBADIP, Anne CHARRIE3, Florence BOUX DE CASSON4, pour Ie Groupe de Biologie Specialisee (GBS) de la Societe Fran~aise de Medecine Nucleaire. Des interferences sur Ie dosage de TSH pratique sur certains automates d1mmunoanalyse aI'origine de diagnostics errones d'hypothyroIdie fruste RESUME Nous rapportons ici sept cas d'hypothyro"idie fruste de I'adulte etablie sur la base de TSH moderement elevee (4 mUI/L <TSH < 10 mUIIL) non confirmee par un dosage de TSH realise au moyen d 'une autre technique. Devant une elevation de TSH, sans signes cliniques probants, il appartient au biologiste de verifier la realite de i'elevation de la TSH en controlant Ie resultat avec une technique de dosage differente et si besoin en recherchant d'eventuelles interferences. II devra dialoguer avec Ie clinicien pour eviter des diagnostics errones I'origine d'investigations complementaires, coOteuses et inquietant inutilement les patients. a MOTS-ClES Interferences, TSH, immunoanalyse, hypothyro"idie fruste. Interferences on TSH assay measured with some automated immunoassays associated with discordant subclinical hypothyroiditis diagnosis SUMMARY In this work, we describe seven cases of subclinical hypothyroiditis diagnosed by slightly increased TSH values (between 4 mlUIL and 10 mIUIL) not confJrmed by another TSH assay. Face a high TSH value without any convincing clinical sign, the biologist should check the TSH result with another method and if necessary investigate interferences. He should discuss with the clinician to ovoid inappropriate biological, expensive and worrying investigations. KEYWORDS Interferences, TSH, immunoanalysis, subclinical thyroiditis I -Introduction Le dosage de l'hormone thyreostimulante ou Thyrotropin Stimulating Hormone (TSH) serique au cours d'un bilan de sante est de plus en plus pratique devant les signes cliniques d'appel nombreux et varies pouvant evoquer une hypothyroidie. Un resultat de TSH moderement augmente impose un contrale un mois plus tard ainsi que Ie dosage de la T4 libre et des anticorps anti-thyroperoxydase (Ac anti-TPO). La persistance d'une TSH elevee associee a une T4 libre situee dans la zone des valeurs de reference permet Ie diagnostic d'une hypothyroidie infraclinique (1) encore appelee fruste. La prise en charge du patient en dehors de la grossesse, depend de la valeur de la TSH, de la presence d'Ac anti-TPO et du bilan clinique. Le dosage de la TSH est actuellement realise par immunoanalyse al'aide de methodes immunometriques a deux sites ou methodes «sandwich». lUnite d'Hormonologie - Centre d'investigation Clinique INSERM 0203 - CHU Rennes - Tel.: 02 99 28 42 71- Fax: 02 99 28 4145 E-Mail: catherine.massart@chu-rennesJr lUnite d'Endocrinologie - CHU Rennes - Tel. : 02 99 26 71 42 - Fax : 02 99 26 71 49 - E-Mail :selbadii@yahooJr IService Federe de Biochimieet Biologie Moleculaire - Unite d'Endocrinologie-Nutrition-Metabolisme EA 3738 - CHU Lyon - Tel. :04 26 23 53 46 Fax: 04 78 86 66 54 - E-Mail :[email protected] . I Unite Fonctionnelle d'Hormonologie Metabolique - CHU Angers- TeL : 02 4135 39 20- Fax : 02 41353923 - E-mail : [email protected] Extrait de SPECTRA BIOLOGIE n° 178' Janvier - Fevrier - Mars2010 () LABORATOIRE PRATIQUE Ces techniques utilisent deux anticorps, l'un fixe sur un support solide, l'autre portant un marqueur isotopique, enzymatique, fluorescent ou luminescent permettant la quantification de l'hormone. Des interferences positives generees par la presence d'autoanticorps seriques formant un pont entre l'anticorps de capture et l'anticorps marque peuvent conduire a une surestimation artefactuelle des resultats (2), permettant ainsi parfois d'expliquer une elevation erronee de TSH (3-8). Nous rapportons ici sept cas d'hypothyroYdie fruste suspectee par des medecins generalistes devant une valeur de TSH legerement elevee chez des patients qui presentaient quelques signes cliniques pouvant conduire a suspecter et a rechercher une hypothyroYdie. II - Patients et methodes L'etude concerne sept patients (age moyen 41 ans ; extremes: 25 a 47 ans) consultant leur medecin generaliste pour des causes diverses, notamment une fatigue, une asthenie ou un syndrome depressif (Tableau I). La TSH serique a ete dosee par electrochimiluminescence sur Modular/Cobas· (Roche Diagnostics, Meylan) dans cinq cas, par polarisation de fluorescence sur l'AxSYMo (Abbott Diagnostics, Rungis) dans deux cas. Dans les sept cas les resultats de TSH ont ete contr6les par une technique chimiluminescente sur l'ADVIA-Centaur· (Siemens Healthcare Diagnostics, Eragny). La thyroxine (T4) libre a ete egalement mesuree chez les patients 2 et 3 par immunoanalyse sur Ie Modular/Cobas' et contr6lee dans tous les cas sur l'ADVIA-Centaur·. Le dosage des Ac anti-TPO a ete effectue sur les sept serums par radioimmunologie al'aide de la trousse commerciale DYNOtest anti-TPOn' (Brahms France, Clichy) utilisant un antigene humain natif. III - Resultats Les resultats des sept patients sont reportes dans Ie Tableau 1. Les concentrations de TSH obtenues sur les automates AxSYMO et Modular/Cobas' presentent des valeurs superieures ala limite haute des valeurs de reference (comprises entre 4,9 et 7 mUI/L lors du bilan initial). Les contr6les realises adistance du bilan initial (1 a6 mois), avec la meme technique chez les patients 2, 3, et 4 montrent une elevation de la TSH (ModularI Cobas' patients 2 et 3 ; AxSYM' patient 4). Le dosage de la T4libre, realise six mois apres Ie bilan initial chez les patients 2 et 3, montre des taux situes dans la zone des valeurs de reference, soit 12-22 pmollL. Tableau I Signes cliniques et resultats de TSH obtenus chez les sept patients de letude. VR: valeurs de reference. Cas Motif de consultation et remarques 1 Patient de 2S ans Suivi d'un syndrome de Klinefelter Asthenie et constipation chronique Patiente de 20 ans 2 3 Depression et fatigue Seeur traitee pour hypothyroIdie congenitale AxSYM" : 7 (VR : 0,47-4,6) (ontrole 6 mois plus tard (ontrole 6 mois plus tard 5 6 Patient de S7 ans Diabeteinsulino-requerant Fatigueet depression Patientede41 ans Asthenie fluctuante Extrait de SPECTRA BIOLOGIE n° 178 · Janvier - Ftlvrier - Mars 2010 3,87 (VR: 0,4-4,2) 3,29 (VR: 0,4-4,2) Modular/Cobas"' : 6,87 (VR: 0,27-4,2) Modular/Cobas"': 6,33 (VR: 0,27-4,2) Depression et fatigue Oncle opere pour nodule thyroIdien Contr61e sur ADVIA-Centaur" Modular/Cobas'" : 5,89 (VR : 0,27 -4,2) Patient de 38 ans Patiente de Sl ans Asthenie, prise de poids, perte de cheveux, manque d'appetit Seeur traitee pour hypothyroIdie 7 Dosage initial Asthenie et prise de poids Seeur avec thyroIdectomie totale pour goitre heteromultinodulaire Patiente de 41 ans 4 Resultats de TSH (mUI/L) 3,9 (VR: 0,4-4,2) Modular/Cobas"': 6,46 (VR: 0,27-4,2) AxSYM'" : 4,9 (VR: 0,47-4,6) (ontrole 1 mois plus tard 3,7 (VR: 0,4-4,2) AxSYM'" : 6,9 (VR : 0,47-4,6) Modular/Cobas"' : 6,43 (VR: 0,27-4,2) 2,7 (VR : 0,4-4,2) Modular/Cobas"': 5 (VR: 0,27-4,2) 3,7 (VR : 0,4-4,2) Modular/Cobas": 7 (VR: 0,27-4,2) 3,2 (VR: 0,4-4,2) Laboratoire pratique Des interferences sur Ie dosage de TSH pratique sur certains automates d'immunoanalyse aI'origine de diagnostics errones d'hypothyrO"fdie fruste Dans les sept cas, les taux seriques de TSH doses sur I'ADVIA-CentaurOsont retrouves dans la limite des valeurs de reference. Des dilutions effectuees au demi et au quart dans Ie diluant du fabricant permettent d'observer une linearite pour les sept serums testes. Les concentrations de T 4 libre mesurees chez les sept sujets sur I'ADVIA-CentaurOse situent egalement dans la fourchette de reference soit 10,3-20,6 pmollL. Les Ac anti-TPO seriques restent indetectables « 30 UIImL) chez les sept patients etudies. Enfin, l'examen semiologique ou echographique demontre l'absence d'anomalie thyroidienne majeure (presence de micronodules dans deux cas). Au total, nous concluons a l'absence d'interference sur Ie dosage de TSH avec la technique AD VIACentaurO, a une surestimation probable des valeurs de TSH avec les techniques Moduiar/Cobaso et AxSYM" et a l'absence d'hypothyro·idie. IV - Discussion La multitude des signes cliniques permettant d'evoquer un diagnostic d'hypothyroidie a genere ces dernieres annees une augmentation de la prescription du dosage de TSH. Afin de rationaliser ces demandes dans l'optique d'un depistage precoce de l'hypothyroidie et de cibler les patients necessitant un traitement, la Societe Franc;:aise d'Endocrinologie (SFE) et la Haute Autorite de Sante (HAS) ont etabli des recommandations en 2007 (9). Celles-ci stipulent notamment que Ie diagnostic d'hypothyroidie fruste repose sur des dosages biologiques associant une valeur de TSH moderement elevee contr61ee a un mois d'intervalle sans diminution du taux de T4 libre et qu'un traitement substitutif ne do it etre envisage qu'en presence d'Ac anti-TPO serique ou pour des TSH superieures a 10 mUIIL en raison de l'elevation du risque cardiovasculaire et des repercussions neuropsychiques et sur la qualite de vie (9). En cas de TSH moderement elevee « 10 mUI/L), de T4libre normale et en l'absence d'Ac anti-TPO serique, ce qui est Ie cas dans notre etude, la HAS et la SFE recommandent un contr61e de la TSH a six mois puis annuel en l'absence de normalisation de cette derniere. Par ailleurs, dans ce contexte clinico-biologique, des elevations particulierement importantes de la TSH, ce qui n'est pas Ie cas dans ce travail, doivent systematiquement conduire Ie biologiste a effectuer des investigations poussees a la recherche d'artefacts analytiques provoques notamment par des traitements ou des immunoscintigraphies utilisant des anticorps monoclonaux de souris. Seul un dialogue etroit avec Ie clinicien permettra au biologiste de connaitre ces renseignements indispensables pour eviter les interferences et pour produire des resultats de TSH de qualite dans Ie contexte d'une reforme de la biologie mettant notamment en exergue Ie renforcement du caractere medical de la discipline. Lorsque la TSH est inferieure a 4 mUIIL, il n'ya pas lieu de realiser des examens complementaires et de multiplier les dosages de TSH sauf chez les sujets consideres comme a risque. Cette difference de prise en charge des patients fondee sur la valeur de la TSH prouve !'importance de contr61er les resultats de TSH et d'eliminer to ute discordance analytique. Dans ce travail, nous mettons en evidence des resultats de TSH discordants selon l'automate d'immunoanalyse utilise. Les valeurs obtenues sur I~ SYMOou Ie ModularolCobaso (meme recontr61ees chez deux patients six mois plus tard) se retrouvent moderement elevees (4 mUI/L<TSHdO mUIIL) alors qu'elles se situent dans la limite des valeurs de reference et dans tous les cas inferieures a 4 mUIIL quand elles sont dosees sur I'ADVIA-Centauro. La presence associee de concentrations de T4 libre situees dans la zone des valeurs de reference peut ainsi generer un diagnostic oppose de presence ou d'absence d'hypothyroidie fruste selon la technique de dosage de TSH utilisee. Deux explications aces discordances peuvent etre envisagees : des interferences positives generees sur les resultats de TSH dosee sur I'AxSYMo ou sur Ie ModuiarolCobasoou des interferences negatives sur Ie dosage de TSH pratique sur I'ADVIA-Centauro. L'hypothese de ces interferences negatives generees par la presence d'anticorps heterophiles ne reconnaissant qu'un des deux anticorps utilises sur I'ADVIA-CentaurO et empechant la formation du pont « sandwich» aurait pu etre envisagee mais doit etre abandonnee pour plusieurs raisons. Tout d'abord, cette situation extremement rare entrainerait des valeurs particulierement abaissees de TSH (10), ce qui n'est pas observe dans notre etude. Par ailleurs, la linearite du test de dilution effectue infirme la presence d'artefact. Enfin, l'absence d'Ac anti-TPO et la morphologie thyro·idienne normale observee a la palpation et surtout a l'echographie plaident en faveur de l'absence de pathologie thyroidienne. A !'inverse, des interferences positives peuvent permettre d'expliquer l'elevation des taux de TSH mesures sur I'AxSYMo ou sur Ie ModularolCobaso. En effet, ce type d'interferences tres frequentes sur les dosages immunometriques a deux sites a deja fait l'objet de publications anciennes (2-6) ou plus recentes notamment sur I'AxSYMo (7-8). II faut savoir que certains echantillons seriques contiennent des anticorps humains anti-immuno globulines animales susceptibles de se fixer aux anticorps du dosage formant ainsi des ponts entre l'anticorps de capture et l'anticorps marque a l'origine de la surestimation artefactuelle des resultats. Si ces anticorps de faible affinite reagissent avec des immunoglobulines de differentes especes animales, l'appellation d'anticorps heterophiles est utilisee. Les plus frequemment rencontres sont representes par les anticorps anti-souris ou HAMA (Human Anti-Mouse Antibody) mais des anticorps diriges contre des immunoglobulines de toute espece ainsi que les facteurs rhumatoides peuvent etre egalement impliques. La parade la plus courante utilisee par les fournisseurs pour remedier a l'action des anticorps heter6philes Extrait de SPECTRA BIOLOGIE n° 178· Janvier - Fevrier - Mars 2010 LABORATOIRE PRATIQUE consiste a. ajouter au milieu reactionnel des agents bloquants (melange d'immunoglobulines de plusieurs especes animales)(l1). Neanmoins, ces interferences peuvent persister notamment lors d'addition insuffisante de ces agents bloquants ou en presence d'IgM et/ou d'anticorps anti-idiotype plus difficiles a. eliminer (11). Les surestimations des concentrations de TSH mesurees avec l'AxSYM· et Ie Modular/Cobas· dans les sept cas que nous avons ici rapportes peuvent s'expliquer par la presence d'anticorps interferant sans que nous puissions confirmer ou infirmer cette hypothese. En effet, des interferences generees par des anticorps heterophiles observees avec l'AxSYM· ont ete publiees a. deux reprises (7, 8). Lelevation des resultats de TSH dosee sur Ie Modular/Cobas· peut egalement etre attribuee a. de nombreuses interferences que Ie fournisseur affiche dans la notice technique (titres eleves d'HAMAs, de facteurs rhumato"ides, d'anticorps anti-streptavidine ou anti-ruthenium) dont les effets sont minimises par un procede approprie (12). L'addition en quantite trop limitee d'agents bloquant les anticorps ci-dessus cites, ou la presence d'anticorps interferents en quantite tres importante peut permettre d'expliquer l'elevation de la TSH dans les sept cas que nous rapportons dans cette etude. A !'inverse, Ie systeme immunologique utilise pour doser la TSH sur l'ADVIACentaur" semble tres bien protege vis-a.-vis des interferences positives retrouvees avec les deux autres dosages cites ci-dessus. Par ailleurs, les anticorps anti-streptavidine ou anti-ruthenium restent sans effet dans Ie systeme d'immunoanalyse utilise sur cet automate. v-Conclusion Devant un bilan thyro"idien discordant, il appartient au clinicien d'alerter Ie biologiste pour qu'il puisse faire verifier Ie resultat par une autre technique. Si la discordance persiste, il faudra envisager la presence d'interferences qui pourront etre recherchees dans des laboratoires specialises. Dans ces conditions, pourront etre evites des diagnostics errones a. l'origine d'investigations complementaires, couteuses et inquietant inutilement les patients. BIBLIOGRAPHIE (1) COOPER DS, Subclinical hypothyroidism, N. Eng. J. Med., 2001,345,260-265. 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