Dans le monde
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Dans le monde
TON UNIVERS IMPITOYABLE Dans notre pays, si les homosexuels ont obtenu des lois égalitaires avec les hétérosexuels, le chemin à parcourir est encore long et semé d’embûches au travers le monde. En Belgique et dans d’autres pays où une politique libérale semble avoir pris le pas des revendications des LGBT, le mouvement de marches prend encore tout son sens contre une forme de violence symbolique, ambiante, latente et diffuse au sein de la population. A ce propos, connaissez-vous le sens premier d’une tapette ? Demandez donc à l’homo micro Robert ou à la rousse poussiéreuse du coin ce qu’ils en pensent. Vous direz qu’on s’égare ? Pas tant que cela… Cela dit, la mobilisation au travers les Gay Pride dans les pays qui connaissent des développements plus lents reste plus que d’actualité. Petit tour du monde au travers les Gay Pride pour constater que l’homosexualité reste encore durement réprimée moralement et pénalement. Lire la suite Un monde de différences En Europe de l’Est, la répression sévit durant le régime soviétique entre déportation au goulag, disparitions et exécutions. Jusqu’au début des années 90, il est impensable d’organiser un événement. La Russie est le premier pays à le faire en 1991 : l’International Gay & Lesbian Human Rights Commission assure le financement d’un festival de cinéma gay à Moscou. Pourtant l’un des premiers pays de l’Est à dépénaliser l’homosexualité en 1993, malgré les tentatives de la communauté, les manifestations et les heurts qu’elles ont provoqués, aucune Gay Pride n’y a encore eu lieu. Depuis 95, la Hongrie organise un festival. La Croatie autorise les défilés depuis 2002. Manifestement, les mentalités au sein des populations évoluent plus vite que les positions de la classe politique. Ces dix dernières années, de nombreuses manifestations sont interdites sous la bannière « atteinte au mœurs ». La Gay Pride joue un rôle de vecteur important pour s’affirmer mais c’est loin de se monter aussi festif qu’à l’Ouest. Par exemple, les serbes essuient des refus systématiques à leurs demandes depuis des affrontements entre policiers, contremanifestants extrémistes et manifestants en 2001. Les menaces d’annulations pèsent également en Roumanie suite à aux agitations de groupes d’extrême droite. En Lettonie, les défilés de 2005 et 2006 ont été interdits. C’est en Pologne que le discours politique et les sanctions réprobatrices de l’ex-président défunt Kaczynski se font les plus sévères, soutenant ainsi les actions de contre-manifestation de groupes ultra-catholiques. Alors que les manifestations gagnent en nombre et en visibilité depuis le début des années 2000, les parades de Varsovie de 2004 et 2005 sont interdites derrière des prétextes sécuritaires ou de halte au « prosélytisme de la culture gay ». Les années suivantes sont signes de tensions entre la police, manifestants et groupes d’extrême droite. Ce qui amène le vice-premier ministre à déclarer que « si les choses continuent comme cela, il faudra bientôt reconnaître des droits de l’être humains pour les chimpanzés et les gorilles » ! En Israël, c’est le contraste entre Tel-Aviv où les défilés sont relativement bien acceptés et Jérusalem où la pression des trois religions influe. En Turquie, la Gay Pride se tient à Istanbul depuis 2003. En Asie, le premier défilé remonte à 1994 à Osaka au Japon. La Thaïlande suit le mouvement depuis 1999. Ce pays reste d’ailleurs assez ouvert sur les questions homosexuelles. C’est une des raisons qui pousse les gens de tous les pays d’ExtrêmeOrient à se rendre à Bangkok, Phuket ou Pattaya chaque année. Par contre, l’homosexualité est toujours pénalisée en Chine. Un défilé militant se tient sur l’île de Taïwan, sa voisine tant revendiquée par les chinois. Les manifestants y défilent d’ailleurs masqués. En Amérique latine, c’est en 1997 que Sao Paulo regarde défiler pour la première fois 2000 personnes pour en voir passer trois millions dix ans plus tard ! Cette Gay Pride (la plus importante en nombre) affiche un seul mot d’ordre « l’homophobie est un délit » avec l’union civile (envisagée par le parti du Président Lula) comme revendication. On défile aussi au Mexique, au Pérou, en Argentine et au Venezuela. L’Afrique du Sud est le seul pays africain accueillant les Gay Pride, à Johannesburg depuis 1990 et au Cap depuis 2001. Euro et World Pride pour une dimension internationale Chaque année depuis Londres en 1992, une ville européenne accueille l’Euro Pride. Cette année, c’est à Varsovie en Pologne que la fête battra son plein. En même temps, ce sera l’occasion de tester les réticences et jauger l’évolution des perceptions au sein des pays de l’Est. A l’échelle mondiale, c’est la World Pride qui se tient à intervalle moins rapproché. La première a rassemblé 250000 personnes à Rome en 2000. La suivante devait se tenir à Jérusalem en 2005. Elle fut décalée à l’année suivante en raison du retrait des colons de la bande de Gaza au même moment. Après un deuxième report de quelques mois suite au conflit entre Israël et le Liban, quelques jours avant la fête, les réticences des ultras conservateurs mêlées aux bombardements et attentats suicides ont empêché son déroulement. Elle s’est alors travestie en un grand rassemblement dans le stade de l’université hébraïque de Jérusalem. Oppositions Ce tour du monde fait apparaître les différentes formes d’opposition à la tenue des Gay Pride. Dans les pays où les mentalités dans la population sont à la traîne, la classe politique invoque l’argument de la sécurité et les lourds moyens à déployer pour les participants. Elle invoque aussi des raisons comme celle du caractère « déplacé » de la marche qui heurterait la sensibilité de la population. Ces arguments moraux sont relayés sous des formes plus radicales par les partisans des 3 religions monothéistes. A quelques nuances près, le Christianisme, l’Islam, le Judaïsme considèrent l’homosexualité comme un péché. Entendu cette position, la fierté des marches en prend un sacré coup, comme en témoigne les appels quasi unanimes lors de l’organisation de la World Pride de Jérusalem en 2006. Le rabbin Metzger appela à « tout faire pour annuler la parade de l’abomination à Jérusalem ». Le Cheick Mansara déclara que « Dieu peut détruire Jérusalem comme il l’a fait à Sodome ». Et l’archevêque Antonio Franco de déclarer pour couronner le tout : « Tous les dirigeants des religions sont contre la parade à cause de la sainteté de la ville ». Rideau ! La Gay Pride vue par la communauté homosexuelle Si on s’attarde sur ses fondements et les nombreux enjeux en matière de droits pour les LGBT, il ne fait nul doute que les Gay Pride pèsent considérablement et ont leur raison d’être. En effet, les défilés et les événements sous-jacents offrent une merveilleuse opportunité de faire entendre les revendications politiques. La communauté et ses membres ne sont pas pour autant unanimes quant à l’organisation de l’événement. Il crée le débat, les sentiments et les positions divergent. Certains se questionnent en relevant le côté trop commercial, loin des préoccupations des homosexuels. Les ressources financières manquent, les entreprises et les enseignes sont sur la balle, trop présentes au goût de certains. D’autres ne se sentent pas concernés par les revendications politiques. Par exemple, les réticents au mariage et à l’adoption qu’ils assimilent à la norme des couples hétérosexuels. Enfin, d’aucuns considèrent l’aspect festif, folklorique et carnavalesque comme nuisible à la substance du message à faire passer. Clichés ou pas, retenons surtout que c’est notre regard sur les homosexuels qui doit changer. Et ne nous faites pas dire « un peu d’allure », ce n’est pas dans nos habitudes. Allez, un peu d’air et d’altitude…et l’attitude suivra ! CID Inter J Centre d’Information et de Documentation pour Jeunes Rue de France 10 5580 Rochefort 084/223073 www.interj.be - [email protected] Mai 2010