Le buzz du papillon ou la grande poésie virale

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Le buzz du papillon ou la grande poésie virale
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Le buzz du papillon ou la grande poésie virale
Soumis par Stephane Desbrosses
... ou bien encore, le jonglage de concepts théorico-sociéto-viraux, une mise en bouche poétique à propos d'Ourobouros
et d'insecte volant... Le récit d'un buzz scientifique et de l'implantation du concept d'effet papillon, de sa présence dans
certains sites. Un retour sur la destinée d'un effet qui s'affectait lui même.
Vous n'y voyez goutte? Ainsi en serait la principale origine d'un grand buzz scientifique, une méconnaissance des
mécanismes d'une affaire par trop complexe pour être appréhendée par le quidam tout venant, lequel serait alors
étonnament plus porté sur la surface poétique du message plutôt que de sa cohésion profonde...
L'un des plus grands représentants de l'effet papillon... est lui même, sa conception, sa dynamique, son évolution :
parti de rien, à peine un murmure, de la bouche de Lorenz, en 1972. Météorologue de son état, et maitre de conférence
pour l'occasion, il laissa échapper une image verbale qui fit le tour du monde, jusqu'à donner naissance à des reprises
cinématographiques, une théorie jugée acquise ainsi qu'un marquage d'esprit très présent. Car l'effet papillon est
surement connu de chacun de vous...
Le saviez-vous? A l'origine, dit-on, l'esprit de Lorenz songeait plus à une mouette qu'à un insecte lorsqu'il évoquait, en tant
qu'un des redécouvreurs de la théorie du chaos, sa conception de la complexité et de l'effet de micro-différences dans
des paramètres initiaux. L'effet mouette... beaucoup moins poétique... L'organisateur d'une conférence donnée par
sieur Lorenz en jugeait de même : c'est un peu à l'insu du scientifique qu'il décida, parait-il, de renommer la conférence
en "Predictability: Does the Flap of a Butterfly's Wings in Brazil Set off a Tornado in Texas". L'image était lancée, les
conceptions redécouvertes et néanmoins nouvelles de la théorie du chaos étaient par trop obscures pour les
journalistes de l'époque, les leaders d'opinions et de manière générale, ceux qui faisaient la pluie et le beau temps
dans la diffusion de l'information... Mais l'image du papillon, la grâce et la beauté, juxtaposée en une même phrase et
en un même effet, l'un conséquence de l'autre, avait de quoi séduire...L'effet Papillon, mythe ou réalité? Bien entendu,
il ne s'agissait là que d'une image : les variations "atmosphériques" pourraient dépendre du simple battement d'aile d'un
papillon, et des perturbations de l'air que ces battements entraînent... Une belle image pour décrire la sensibilité aux
conditions initiales de phénomènes complexes. Cette sensibilité est décrite dans diverses courbes d'état comme celle
dont vous pouvez voir la représentation ci-contre : parti d'un point ou d'un autre, juste à coté, la suite mathématique
décrite diverge complètement. pour l'une, l'orientation se fait à gauche. Une minime différence fera partir l'autre à droite.
De la même façon, on peut décrire l'effet boule de neige : un petit caillou qui glisserait d'un côté d'une montagne plutôt
qu'un autre, entrainerait la dévastation d'une vallée quand il n'eut été que précocément bloqué dans l'autre
sens.Cette sensibilité aux conditions initiales caractérise de nombreux systèmes, dont certains systèmes sociaux...
Certains sites comme Scoopeo présentent une certaine sensibilité aux conditions initiales (voir dernier chapitre). Cette
sensibilité est bien réelle. En est-il de même pour le battement d'ailes du Papillon? Plusieurs raisons s'y opposent- Le
même papillon bat des ailes toute la journée : un effet dans un sens est statistiquement très probablement annihilé par
d'autres battements d'ailes.- Le papillon n'est pas le seul à battre des ailes, d'autres congénères le font également.
Depuis le XVIIème siècle, à la suite des travaux de Boyle et Mariotte, de nombreux physiciens ont abandonné l'idée de
décrire le mouvement d'atomes uniques pour y préférer une théorie cinétique (mécanique statistique) ayant eu pour
conséquence une percée majeure : dans le cas d'effets mineurs de petites particules, il est statistiquement plus
adéquat de s'intéresser au mouvement d'ensemble : il en va de manière semblable pour les Papillons : que l'un fasse
un mouvement qui conduirait à la création d'une tornade, un autre ferait un mouvement produisant l'effet inverse. Dans
l'ensemble, l'effet d'un seul papillon, malgrè la sensibilité aux conditions initiales, est relativement faible, sauf exception
rarissime...- D'autant que les papillons ne sont pas les seuls à brasser de l'air, les animaux, les hommes (y compris
certains présidents) peuvent en brasser énormément.- et d'autres... The butterfly Effect est avant tout une image... et
c'est d'ailleurs cette qualité qui paradoxalement, lui a permis son expansion phénoménale.Moins je comprends, plus je
trouve beau? C'est du moins une explication plausible défendue par S. Jourdan, qui introduit pour son explication l'effet
au nom amusant : L'effet Papigé. Selon cet effet, similaire à l'effet papillon mais ne s'appliquant qu'aux théories
"scientifiques", une image est bien entendue d'autant plus facilement colportée que la théorie qui en est la base est
obscure... et d'autant plus diffusée que la manière dont cette image est formée atteint un esthétisme agréable. S.
Jourdan définit ainsi son Effet Papigé : “ Une théorie d'apparence scientifique sera d'autant plus propagée dans
le grand public que :
1 les sciences supposées être en question échapperont complètement à ceux qui la répètent;
2 sa formulation sera plus poétique, permettant ainsi une appropriation suivie de réinterprétation, permutation, etc.
L'effet Papigé tire naturellement son nom du milieu dans lequel il se propage : ceux qui n'ont pas pigé... Ainsi en auraitil été de l'effet papillon : par trop obscur pour que l'on en saisisse le sens directement, seule l'image en serait restée,
jusqu'à prendre la place de la théorie elle même... Il faut dire que l'image avait de quoi séduire. Elle a par ailleurs donné
naissance à de nombreux films, de nompreuses reprises de cet "effet" sur de tout aussi nombreux supports, comme le
montre la page Wikipédia anglaise. Il est à noter que cette explication a le mérite de suivre les principes de psychologie
des théories de traitements profonds versus superficiels de l'information : il existe selon cette théorie deux façons
d'intégrer l'information. Le traitement profond est basé sur la justesse des arguments : plus un raisonnement est juste,
mieux on l'intègre si l'on fait l'effort d'essayer de le comprendre. En cas où on n'essaie pas de la comprendre, seules les
caractéristiques superficielles du message sont intégrées, comme son côté poétique ou agréable (c'est par exemple
pour cette raison que l'on utilise de jolies filles ou des stars dans les spots de pub : peu importe que le produit soit
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convaincant, si l'image à laquelle on l'associe nous est agréable) L'effet papillon aurait émergé de cette manière : parce
qu'il s'agit d'un concept complexe, le traitement profond n'a pas toujours été possible (peu compris). Dès lors, le fait
qu'il ait été présenté sous un jour poétique a largement contribué à sa diffusion... et malheureusement sa déformation!
Le plus anecdotique étant que l'effet papillon fut alors victime... de lui même! Pour aller un peu plus loin...Et remettre les
choses dans leur ordre initial : à commencer par Lorenz à qui l'ont attribue le nom de cet effet (malgrè la nouvelle de Ray
Bradbury qui évoquait l'effet Papillon en 1952) : Lorenz minimisa lui-même cet effet. De fait, il souhaitait lors de sa
conférence, expliquer ce qu'il nommait les attracteurs étranges.En termes simples et non imagés, la représentation cicontre montre deux courbes de trajectoire d'une fonction mathématique dont les conditions initiales sont légèrement
modifiées. Comment l'interprêter? Imaginez que les deux cônes disposés à une place similaire sur la courbe jaune et la
courbe bleue, sont les points de départ. la trajectoire est définie dans le temps : à partir de ces points de départ, si on
remonte une courbe ou l'autre, c'est que l'on avance dans le temps. Chaque point de la courbe correspond à une valeur
numérique, on pourrait donc dire en gros :- que la courbe bleue est au départ à la valeur 2 puis après 1 seconde, à la
valeur 2.5, puis 3, puis 1, etc.... jusqu'à arrivé à 10 minutes, au point correspondant au deuxième cône bleu (les valeurs
numériques sont fictives et sont là juste pour exprimer concrêtement l'idée) - que la courbe jaune démarre à la valeur
2.01 puis après une seconde, à la valeur 2.55, puis 3.8, puis -5.... jusqu'à arriver, au bout de 10 minutes, au second cône
jaune.On voit qu'à l'instant de la 10ème minute, les deux courbes ont des valeurs totalement différentes, elles ont
complètement divergé, et ce, à cause de l'infime différence de condition initiale... Et pourtant! il ne faut pas être Sherlock
Holmes pour se rendre compte que les deux courbes se ressemblent énormément... C'est ce que souhaitait montrer
Lorenz : Même si les valeurs que prennent les trajectoires divergent sensiblement selon les conditions initiales, la forme
des courbes est relativement identique quelle que soient ces valeurs initiales.Dans cet exemple, cela signifie que même
si des conditions initiales sont différentes, les conséquences d'une action seront vraisemblablement identiques (pour
être exact : si cette action appartient à un système chaotique qui présente des attracteurs étranges). Cela signifie dès
lors, que si un battement d'aile de papillon entraine une tornade, alors, que ce papillon batte plus ou moins rapidement
des ailes, la tornade arrivera plus tôt ou plus tard mais arrivera tout de même. Ainsi est la sensibilité aux conditions
initiales.Pour exporter cet exemple à quelque chose que vous connaissez bien..., Scoopeo et les sites du genre
présentent en quelque sorte un attracteur étrange vers lequel converge chaque bon post : la home page. Il est amusant
de constater que de très bons articles auront toujours une trajectoire similaire : En Attente, puis presque promu, Home
page et oubli... C'est le principe même du site.Pourtant, les articles sont sensibles aux conditions initiales : qu'un
individu vote presque juste après sa sortie, un article, où le commente, et hop, l'article est propulsé beaucoup plus
rapidement sous les feux de la rampe, l'effet boule de neige s'enclenche, comme l'indiquait cet article (Plus tu votes, plus
ça devient bien ). Si l'article ne bénéficie pas d'une telle opportunité, il mets plus de temps (à condition qu'il soit bon!) à
atteindre la home page - mais il l'atteint tout de même.Ici est l'essence de ce que souhaitait montrer Lorenz lors de sa
conférence : même si la sensibilité aux conditions initiales est extrème, et que l'évolution diverge, elle reste quand
même sur des trajectoire similaires - et notamment prévisibles. Quoiqu'il en soit, certains sites sont de toute façon des
attracteurs étranges ;) Images issues de : Jourdan S (2007). "Effet papillon ou effet Papigé?". Knol.google.com
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